C. UNE PROLONGATION INDISPENSABLE DE L'ÉTAT D'URGENCE SANITAIRE

Dans ce contexte, le projet de loi soumis à l'examen de la commission vise à proroger, pour une nouvelle durée de deux mois, soit jusqu'au 23 juillet inclus , l'application du régime de l'état d'urgence sanitaire.

Prévue par l'article 1 er du texte, cette prorogation s'effectuerait dans les mêmes conditions que celles définies par l'article 4 du projet de loi d'urgence du 23 mars 2020. Elle s'appliquerait, en conséquence, sur l'ensemble du territoire national, collectivités ultra-marines et Nouvelle-Calédonie incluses.

Aux termes de l'exposé des motifs du projet de loi, la prorogation de deux mois proposée « permettra de prévenir la levée pure et simple des mesures indispensables à la protection de la santé des Français, et de définir les modalités d'une reprise progressive des activités à compter du 11 mai, en adéquation avec l'évolution de la situation sanitaire ».

Bien qu'elle souscrive au principe d'une prorogation de ce régime d'exception, la commission a quant à elle estimé qu'il était souhaitable, au regard des incertitudes qui pèsent encore sur les conditions dans lesquelles sera mené le déconfinement, que le Parlement puisse, si le prolongement de l'état d'urgence sanitaire se révélait nécessaire, se prononcer dans un délai plus court que celui proposé par le Gouvernement. Elle a, en conséquence, adopté un amendement COM-159 de son rapporteur, qui anticipe la date de fin de l'état d'urgence sanitaire au 10 juillet 2020 .

En prorogeant la durée de l'état d'urgence, l'article 1 er du projet de loi induit des effets directs sur les dispositions prises par ordonnances sur le fondement de la loi d'urgence du 23 mars dernier, dont le champ d'application temporel est « calé » sur la durée de l'état d'urgence .

Certaines dispositions sont en effet prévues pour durer uniquement pour la période de l'état d'urgence, augmentée selon le cas, d'une période d'un ou deux mois. Or, la commission constate que les mesures « d'urgence » prévues par ordonnances qui, lorsqu'elles ont été prises, pouvaient pleinement se justifier pour des durées de deux, trois ou quatre mois, ne le peuvent plus, au moins pour certaines d'entre elles, pour des périodes de quatre, cinq ou six mois.

Dans ces conditions, la prorogation de la durée de l'état d'urgence implique un réexamen impératif de la pertinence de l'ensemble des mesures d'urgence prises par ordonnances sur le fondement de la première loi d'urgence . À l'instar du Conseil d'État dans son avis sur le projet de loi, la commission invite le Gouvernement à prendre les dispositions législatives nécessaires, dans le cadre des habilitations qui lui sont encore ouvertes, pour revenir sur des dérogations qui n'apparaitraient plus justifiées dans un contexte de déconfinement et de reprise progressive de l'activité sociale et économique. Le cas échéant, ces mesures devront être abordées dans le cadre du nouveau projet de loi que le Gouvernement a annoncé vouloir présenter dans les prochains jours.

Dans cette attente, la commission a, en tout état de cause, souhaité que les habilitations en cours ne puissent conduire à prolonger à nouveau certaines mesures dérogatoires déjà prévues par ordonnance . C'est pourquoi, en particulier, elle a modifié le champ de l'habilitation prévue au d) du 2° du I de l'article 11 de la loi d'urgence du 23 mars dernier, afin d'interdire que, par ordonnance, le Gouvernement puisse à nouveau décider d'allonger les détentions provisoires ou les mesures d'assignation à résidence sous surveillance électronique en cours 6 ( * ) (amendement COM-55) .

La commission a enfin adopté un amendement COM-84 de M. Gilbert-Luc Deninaz et de ses collègues du groupe socialiste et républicain, qui modifie les conditions dans lesquelles il peut être mis fin de manière anticipée à l'état d'urgence sanitaire . Cette prérogative sera désormais conditionnée à l'avis préalable du comité de scientifiques.


* 6 Mesure qui figure à l'article 16 de l'ordonnance n° 2020-303 du 25 mars 2020 portant adaptation de règles de procédure pénale sur le fondement de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19.

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