B. L'ORGANISATION DES PROFESSIONS DE SANTÉ

Le renforcement de l'organisation des professions de santé est important afin de préserver le caractère spécifique des soins thérapeutiques qui ne peuvent en aucun cas être assimilés à une simple prestation de service soumise au droit de la concurrence. Ceci suppose tant une mise en conformité de certaines pratiques avec les exigences du droit communautaire qu'une réforme de l'organisation des ordres professionnels et des modes d'obtention de certains titres d'exercice.

1. Protéger la santé de toute assimilation à une prestation de service

L'assimilation de la médecine à un service commercial est rejetée tant par le droit national que par le droit communautaire. Il convient néanmoins de garantir la médicalisation de certaines professions dont l'activité commerciale a pu être source d'interrogations au niveau communautaire. Il convient par ailleurs de permettre le développement de la recherche française sur des sujets éthiquement sensibles tout en évitant de s'exposer à des critiques au motif que l'Etat entraverait la liberté d'entreprendre.

a) Garantir le caractère médical des laboratoires de biologie

L'évolution technique de la biologie médicale impose aujourd'hui une évolution de ses modes d'exercice, notamment pour favoriser les investissements nécessaires en matière d'équipement. Par ailleurs, malgré un niveau moyen satisfaisant, des problèmes de fiabilité existent sur les résultats donnés par certains laboratoires, qui sont de nature à fausser les diagnostics. Ces déficiences montrent les limites du système actuel de contrôle. Un laboratoire ne fait l'objet d'une visite d'inspection qu'en moyenne tous les vingt ou quarante ans selon les départements, ce qui ne permet pas de garantir aux patients la qualité des examens. Malgré ce très petit nombre d'inspections, dix à quinze laboratoires sont fermés chaque année sur un total d'environ quatre mille laboratoires de biologie médicale privés en France. On peut donc craindre que des laboratoires n'offrant pas toutes les garanties de qualité soient encore en exercice d'où la nécessité d'une réforme de la biologie médicale.

Cette réforme se place dans le cadre du droit communautaire. En effet, les limites posées par le législateur à l'ouverture des cabinets de biologie médicale posent un problème au regard des critères du droit communautaire garantissant la liberté d'installation et de prestation. La commission européenne n'est pas habilitée à se prononcer sur l'opportunité du choix par un Etat membre de réserver l'exercice de certaines activités aux professions de santé. Elle peut en revanche exiger que cette restriction ne soit pas une entrave déguisée au droit de la concurrence. Elle a ainsi mis en demeure la France d'élargir la possibilité d'ouverture du capital d'un laboratoire, ouverture actuellement plafonnée à 25 %. Si la France ne se conformait pas aux exigences du droit communautaire et ne parvenait pas à justifier les restrictions qu'elle apporte à l'installation de laboratoires par des motifs de santé publique, elle pourrait se voir contrainte par le juge communautaire d'ouvrir la biologie médicale à la concurrence. Or, aucune évolution de type commercial n'est acceptable pour ce qui concerne la conduite d'examens qui font partie intégrante du parcours de soins. Toute réforme de la biologie médicale doit donc garantir que les actes resteront sous le contrôle d'un biologiste responsable. La qualité des examens doit également être garantie par la mise en place d'un système d'accréditation qui vienne compléter le système de contrôle actuel. Ces améliorations sont de nature à offrir une plus grande sécurité au patient et à réduire les coûts liés à la multiplication d'examens jugés, à tort ou à raison, peu sûrs.

b) Faciliter le lien entre recherche et développement des médicaments

La qualité des soins passe également par une possibilité accrue de développer des médicaments nouveaux à partir de la recherche publique. L'enjeu est particulièrement crucial dans le domaine éthiquement sensible des produits et médicaments liés au sang. A la suite de l'affaire du sang contaminé, le regroupement des organismes de collecte au sein de l'établissement français du sang (EFS) a eu pour pendant la création d'une entité publique, devenue société anonyme en 2005, le laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies (LFB) chargé de la commercialisation des produits dérivés du sang. L'indépendance de l'EFS et du LFB répond à un impératif éthique : celui de l'absence d'activité commerciale liée à la collecte de sang. L'EFS se trouve en revanche dans l'impossibilité de traduire lui-même sur le plan thérapeutique les recherches qu'il mène, sous peine de voir son activité considérée comme une aide d'Etat au sens du droit communautaire. Le Sénat a ainsi déjà eu l'occasion de préconiser la création d'une filiale permettant d'associer l'EFS et le LFB pour le développement et la mise sur le marché de médicament liés aux produits sanguins 23 ( * ) . Les propositions faites en ce sens par le projet de loi sont de nature à faciliter les innovations thérapeutiques.

Garantir la dominante non commerciale des actes liés à la santé et développer des structures permettant un développement éthique des médicaments participent à une meilleure organisation des professions de santé. Celle-ci repose également sur un renforcement des ordres professionnels et des conditions d'obtention des titres.

* 23 Rapport d'information n° 79 (2008-2009) de Marie-Thérèse Hermange, « Le sang de cordon : collecter pour chercher, soigner et guérir ».

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