B. LES REPRÉSENTANTS INDÉPENDANTISTES ONT TROUVÉ LEUR PLACE DANS LA NOUVELLE ARCHITECTURE INSTITUTIONNELLE

La réussite de l'accord de Nouméa tient également à la capacité des représentants indépendantistes à respecter les engagements pris depuis 1988, au premier rang desquels se trouve le retour à la paix.

La violence avait en effet atteint son paroxysme avec la prise d'otage de gendarmes et l'assaut donné par le groupe d'intervention de la gendarmerie nationale le 5 mai 1988 sur l'île d'Ouvéa, qui s'est soldée par la mort de dix-neuf militants indépendantistes et de deux militaires. En renonçant à l'action violente après la signature des accords de Matignon-Oudinot du 26 juin 1988, les responsables indépendantistes ont rendu possible le dialogue et la co-construction de l'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie. Cette concession, qui est aujourd'hui saluée par l'ensemble de la population calédonienne, ne faisait pas consensus parmi les militants indépendantistes au tournant des années 1990. Jean-Marie Tjibaou, signataire des accords de Matignon-Oudinot, et Yeiwéné Yeiwéné, membre du front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS), ont ainsi été assassinés le 4 mai 1989 par un militant leur reprochant d'avoir accepté de négocier l'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie avec les responsables non-indépendantistes.

Dix ans après la fin des « évènements », les responsables indépendantistes ont non seulement accepté le retour à la paix mais ont également participé aux processus politiques électoraux communaux, provinciaux et calédoniens définis dans le cadre de l'accord de Nouméa. La configuration politique actuelle n'a jamais été aussi favorable aux indépendantistes qui contrôlent désormais deux des trois provinces
- la province Nord et la province des Iles -, et près de la moitié des communes. Ils président le gouvernement collégial et le Congrès. Les trois consultations d'autodétermination ont été déclenchées par les élus indépendantistes du Congrès dans le strict respect des conditions fixées par l'accord de Nouméa.

Les indépendantistes ont également consenti à partager le droit à l'autodétermination avec un corps électoral partiellement ouvert, tandis que les non-indépendantistes renonçaient à exiger que tous les électeurs de Nouvelle-Calédonie participent aux scrutins. Sans concerner l'ensemble des habitants de la Nouvelle-Calédonie, la liste électorale spéciale pour la consultation (LESC) ne regroupe pas seulement les Kanaks, ce qui témoigne de l'acceptation par les représentants indépendantistes de l'existence d'une identité calédonienne qui va au-delà des ethnies mélanésiennes. Les critères d'inscription sur la LESC, fixés à l'article 218 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999, n'ont pas été modifiés depuis leur mise en oeuvre, malgré les revendications des responsables non-indépendantistes qui considèrent qu'ils sont trop restrictifs compte tenu de l'évolution de la démographie calédonienne.

Les critères d'inscription sur la liste électorale spéciale
pour la consultation (LESC)

L'article 218 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 pose les conditions dérogatoires au droit commun d'inscription sur la liste électorale spéciale pour la consultation.

Il dispose que « sont admis à participer à la consultation les électeurs inscrits sur la liste électorale à la date de celle-ci et qui remplissent l'une des conditions suivantes :

a) Avoir été admis à participer à la consultation du 8 novembre 1998 ;

b) N'étant pas inscrits sur la liste électorale pour la consultation du 8 novembre 1998, remplir néanmoins la condition de domicile requise pour être électeur à cette consultation ;

c) N'ayant pas pu être inscrits sur la liste électorale de la consultation du 8 novembre 1998 en raison du non-respect de la condition de domicile, justifier que leur absence était due à des raisons familiales, professionnelles ou médicales ;

d) Avoir eu le statut civil coutumier ou, nés en Nouvelle-Calédonie, y avoir eu le centre de leurs intérêts matériels et moraux ;

e) Avoir l'un de leurs parents né en Nouvelle-Calédonie et y avoir le centre de leurs intérêts matériels et moraux ;

f) Pouvoir justifier d'une durée de vingt ans de domicile continu en Nouvelle-Calédonie à la date de la consultation et au plus tard au 31 décembre 2014 ;

g) Être nés avant le 1er janvier 1989 et avoir eu son domicile en Nouvelle-Calédonie de 1988 à 1998 ;

h) Être nés à compter du 1er janvier 1989 et avoir atteint l'âge de la majorité à la date de la consultation et avoir eu un de leurs parents qui satisfaisait aux conditions pour participer à la consultation du 8 novembre 1998.

Les périodes passées en dehors de la Nouvelle-Calédonie pour accomplir le service national, pour suivre des études ou une formation ou pour des raisons familiales, professionnelles ou médicales ne sont pas, pour les personnes qui y étaient antérieurement domiciliées, interruptives du délai pris en considération pour apprécier la condition de domicile. »