TRIBUNE PUBLIÉE SUR LE SITE DU JDD LE 17 JUILLET 2021 : « PARITÉ : LE MOMENT EST VENU DE FAIRE ENTRER LES FEMMES DANS TOUS LES CERCLES DU POUVOIR ÉCONOMIQUE ! »

Parité dans les entreprises : le moment est venu de faire entrer les femmes dans tous les cercles du pouvoir économique !

Alors que s'est achevé il y a quelques jours, à Paris, le Forum Génération Égalité, grand rassemblement mondial pour l'égalité femmes-hommes, où en est aujourd'hui la parité dans les entreprises françaises ?

Dix ans après le vote de la loi Copé-Zimmermann imposant des quotas de femmes dans les conseils d'administration des entreprises françaises, que de chemin parcouru !

Les quotas ont fait voler en éclat l'inertie en matière de parité économique qui prévalait dans les instances de gouvernance des grandes entreprises françaises avant 2011 : la France se situe aujourd'hui au premier rang mondial en termes de féminisation des conseils d'administration des grandes entreprises cotées, avec une proportion de plus de 46 % de femmes en 2021, devant la Norvège, pourtant pionnière en la matière, et loin devant la Suède, l'Allemagne, les États-Unis ou le Japon. Cette proportion a plus que triplé en l'espace de dix ans !

Cette féminisation a également entraîné une évolution des modalités de la gouvernance économique : ce qui était à l'origine une contrainte s'est muée en atout pour les acteurs économiques en termes d'amélioration de la gouvernance des entreprises mais aussi, plus prosaïquement, de performance économique et de valorisation productive et financière des entreprises.

La loi Copé-Zimmermann a donc constitué une contribution majeure à la cause de l'égalité femmes-hommes dans notre pays.

Et pourtant !

Aujourd'hui encore, rares sont les femmes à la tête des grandes entreprises françaises. Elles se comptent sur les doigts d'une main s'agissant du CAC 40 : une femme PDG (Catherine Macgregor chez Engie) et deux femmes présidentes de conseil d'administration (Angela Garcia-Poveda chez Legrand et Barbara Dalibard chez Michelin).

Aujourd'hui encore, toutes les entreprises ne jouent pas le jeu ou ne sont tout simplement pas au courant que ces règles s'appliquent aussi à leur gouvernance. La parité reste limitée dans les conseils d'administration et de surveillance des plus petites capitalisations boursières (moins d'un tiers de femmes), des entreprises non cotées de plus de 250 salariés (moins de 25 % de femmes) et, encore plus, des PME n'entrant pas dans le champ d'application de la loi (environ 18 % de femmes), ce qui montre bien les limites des pratiques d'autorégulation.

Surtout, les femmes sont encore trop peu nombreuses dans les instances de direction des entreprises, notamment dans les comités exécutifs (Comex) et les comités de direction (Codir), et trop peu présentes à des postes d'encadrement. Les femmes occupent, en 2021, 22 % des postes des Comex et Codir du SBF 120. En outre, 12 % des Comex/Codir du SBF 120 ne comptent aucune femme et 96 % en comptent moins de 40 %.

L'effet de ruissellement attendu n'a donc pas eu lieu, les femmes n'ont pas investi tous les cercles du pouvoir économique : la parité s'est arrêtée au milieu du gué.

Alors que faire ?

La délégation aux droits des femmes du Sénat constate qu'une fois de plus, sans contrainte légale, les choses ne bougeront pas d'elles-mêmes. C'est pourquoi elle propose :

- de soutenir toutes les initiatives législatives de nature à mettre en place de nouvelles obligations de mixité dans les instances dirigeantes des entreprises et au sein des postes à responsabilités ;

- de renforcer le contrôle et la transparence des données relatives à la répartition genrée au sein des instances de gouvernance et de direction des entreprises françaises ;

- plus largement, d'appliquer pleinement les dispositions législatives existantes en matière d'égalité professionnelle et salariale.

C'est une nouvelle étape qui doit aujourd'hui être franchie pour lever les résistances à l'entrée des femmes dans les cercles du pouvoir économique et faire enfin exploser le plafond de verre de la direction opérationnelle des entreprises.

Signataires de la tribune :

Annick BILLON, présidente de la délégation aux droits des femmes du Sénat ; Martine FILLEUL, rapporteure ; Joëlle GARRIAUD-MAYLAM, rapporteure ; Dominique VÉRIEN, rapporteure.

Autres membres de la délégation aux droits des femmes du Sénat, par ordre alphabétique :

Jean-Michel ARNAUD, Bruno BELIN, Alexandra BORCHIO FONTIMP, Valérie BOYER, Isabelle BRIQUET, Max BRISSON, Jean-Pierre CORBISEZ, Laure DARCOS, Patricia DEMAS, Nadège HAVET, Loïc HERVÉ, Annick JACQUEMET, Micheline JACQUES, Victoire JASMIN, Else JOSEPH, Marc LAMÉNIE, Claudine LEPAGE, Viviane MALET, Pierre MÉDEVIELLE, Marie-Pierre MONIER, Sylviane NOËL, Guylène PANTEL, Kristina PLUCHET, Raymonde PONCET MONGE, Laurence ROSSIGNOL, Marie-Pierre RICHER, Elsa SCHALCK, Lana TETUANUI, Sabine VAN HEGHE, Marie-Claude VARAILLAS.

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