II. LES DISPOSITIONS TECHNIQUES DE LA CONVENTION
Le
projet de convention fiscale signé par la France et l'Ukraine, à
Paris, le 31 janvier 1997 a été conclu en vue
d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion
et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la
fortune.
Ce projet est destiné à se substituer à la convention
fiscale franco-soviétique du 4 octobre 1985 qui régit
actuellement les relations fiscales bilatérales entre la France et
l'Ukraine et dont les dispositions sont inadaptées. Sur de nombreux
points, la rédaction est plus précise que la convention
signée avec l'Union des Républiques Socialistes
Soviétiques (URSS).
Les négociations du projet de convention franco-ukrainienne ont
débuté à Kiev en novembre 1994. Le texte a
été paraphé le 10 mars 1995 à l'issue d'un
second tour de négociations tenu à Paris. Conduites dans un
climat de compréhension mutuelle, les négociations n'ont pas
présenté de difficultés particulières.
L'entrée en vigueur de la convention fiscale nécessite, en
Ukraine comme en France, une approbation parlementaire. L'Ukraine a un
système parlementaire regrettablement monocaméral, la Rada
étant composée de 450 parlementaires. La partie ukrainienne
a fait part de l'approbation, le 3 mars 1998, de la convention fiscale par
son Parlement.
A. UNE CONVENTION GLOBALEMENT CONFORME AU MODÈLE DE L'OCDE
La
convention franco-ukrainienne en vue d'éviter les doubles impositions et
de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière
d'impôts sur le revenu et sur la fortune, signée à Paris le
31 janvier 1997, est conforme dans ses grandes lignes au modèle de
l'OCDE.
Les dispositions qui s'écartent du modèle résultent dans
la majorité des cas, soit d'une volonté de traitement plus
favorable des entreprises ou des particuliers, soit de demandes de la partie
française, soit de demandes ukrainiennes acceptables car correspondant
aux clauses figurant dans les conventions signées par la France avec les
principaux Etats de cette zone géographique.
1. Etablissements stables et revenus de biens immobiliers
L'article 5 de la convention, relatif à la notion
d'établissement stable, est globalement conforme au modèle de
l'OCDE. Néanmoins, à la différence de celui-ci, cet
article ajoute à la liste d'exemples traditionnels d'installations fixes
constitutives d'un établissement stable un local utilisé comme
point de vente et une structure utilisée pour l'exploration de
ressources naturelles, si sa durée est supérieure à six
mois.
L'article 6, relatif aux revenus de biens immobiliers, prévoit leur
imposition au lieu de situation de ces biens. De même,
conformément à la pratique conventionnelle française, cet
article ajoute au modèle de l'OCDE en prévoyant l'imposition des
revenus des immeubles dont le contribuable est propriétaire comme de
ceux qu'il détient au travers de sociétés.
2. Dividendes et intérêts
L'article 10 relatif aux dividendes prévoit la
possibilité d'appliquer des retenues à la source dont les taux
sont ceux prévus par le modèle de l'OCDE. Ainsi, l'Etat de la
source peut imposer les dividendes à un taux n'excédant pas
15 % de leur montant brut, ce taux pouvant être ramené
à 5 % lorsque ces dividendes sont payés à une
société qui détient directement ou indirectement au moins
10 % du capital de la société distributrice. Toutefois, cet
article s'écarte du modèle précité dans la mesure
où, dans le cas d'une société distributrice
résidente d'Ukraine, le bénéfice du taux de 5 % n'est
accordé que si le pourcentage de détention directe ou indirecte
est au moins égal à 20 % du capital de la
société.
En outre, la retenue à la source est supprimée pour les
dividendes payés aux sociétés qui détiennent
directement ou indirectement au moins 50 % du capital de la
société distributrice, si l'investissement dans cette
société atteint au moins 5 millions de francs ou, lorsqu'il
est inférieur à ce montant, s'il est garanti par l'Etat de
résidence du bénéficiaire des dividendes, sa banque
centrale ou toute autre personne agissant pour le compte de cet Etat.
L'article 11 relatif aux intérêts prévoit,
conformément au modèle de l'OCDE, qu'ils ne sont imposables que
dans l'Etat de résidence du bénéficiaire de ces revenus.
Toutefois, l'Etat de la source peut imposer les intérêts provenant
de contrats conclus à compter de la date d'entrée en vigueur de
la convention à un taux n'excédant pas :
- 2 % du montant brut des intérêts lorsqu'il s'agit
d'intérêts bancaires, d'intérêts payés
à une institution financière ou d'intérêts
payés par une entreprise à une autre entreprise dans le cadre de
crédits commerciaux ;
- 10 % dans tous les autres cas, à l'exclusion des
intérêts suivants qui sont exonérés dans l'Etat de
la source conformément aux suggestions des commentaires de l'OCDE sur
cet article : intérêts payés ou reçus par un
Etat contractant, sa banque centrale, l'une de ses subdivisions politiques ou
collectivités locales ; intérêts correspondant
à une dette assurée ou garantie par une de ces entités
publiques ou par une personne agissant pour son compte.
3. Redevances
L'article 12 dispose que les redevances sont imposables
dans
l'Etat de résidence de leur bénéficiaire,
conformément au modèle de l'OCDE. Toutefois, à la
différence de ce modèle, l'Etat de la source peut imposer les
redevances pour l'usage ou la concession de l'usage d'un droit d'auteur
(à l'exclusion des droits sur les logiciels) à un taux
n'excédant pas 10 % de leur montant brut.
En outre, au cours de la période de douze mois suivant la date
d'entrée en vigueur de la convention, l'Etat de la source peut imposer
les redevances payées en rémunération de l'usage ou de la
concession de l'usage d'une marque de fabrique ou de commerce, d'un dessin ou
d'un modèle à un taux n'excédant pas 5 % de leur
montant brut.
B. UNE CONVENTION LÉGÈREMENT DIFFÉRENTE DE LA CONVENTION FRANCO-RUSSE
Les
dispositions de la convention fiscale franco-ukrainienne et de la convention
fiscale franco-russe, signée le 26 novembre 1996, sont très
largement similaires sur la plupart des points.
En effet, les deux conventions prévoient les mêmes règles
d'imposition en ce qui concerne les revenus suivants : revenus
immobiliers, bénéfices des entreprises, bénéfices
tirés du transport international, bénéfices entre
entreprises associées, gains en capital, revenus des professions
indépendantes, salaires, rémunérations des administrateurs
de sociétés, pensions privées et autres revenus.
De même, ces deux textes retiennent des règles identiques
s'agissant du régime fiscal applicable aux étudiants et
stagiaires, de l'imposition de la fortune, des techniques d'élimination
de la double imposition et des dispositions habituelles relatives à la
procédure amiable et à l'assistance administrative.
Cela étant, ces deux textes diffèrent sur certains
points.
1. Sur les notions de résident, d'établissement stable et de bénéfice
En ce
qui concerne l'article "résident", toutes deux sont conformes au
modèle de l'OCDE et intègrent notamment dans la notion de
résident les Etats ainsi que leurs démembrements, de même
que les sociétés de personnes et les groupements de personnes
sont le siège de direction effective est situé dans un Etat.
Toutefois, dans le cadre de la convention fiscale avec l'Ukraine, cette
particularité n'est prévue qu'en ce qui concerne la France.
En ce qui concerne la notion d'établissement stable, la convention
franco-ukrainienne ajoute à la liste d'exemples traditionnels
d'installations fixes constitutives d'un établissement stable, un local
utilisé comme point de vente et une structure utilisée pour
l'exploration de ressources naturelles, si sa durée est
supérieure à six mois.
S'agissant de l'imposition des bénéfices des entreprises, les
deux conventions reprennent les mêmes règles. Cela étant,
la convention franco-russe ne reprend pas le paragraphe 4 de
l'article 7 du modèle de l'OCDE qui permet, sous certaines
conditions, de déterminer les bénéfices d'un
établissement stable non pas sur la base d'une comptabilité
séparée, mais en procédant à une répartition
des bénéfices totaux de l'entreprise.
2. Sur les régimes applicables aux dividendes, aux intérêts et aux redevances
Pour ce
qui est du régime applicable aux dividendes, les deux conventions
retiennent le principe du partage d'imposition entre l'Etat de la source et
l'Etat de la résidence, en limitant le niveau des retenues à la
source applicables dans le premier Etat. A cet égard, la convention
franco-ukrainienne prévoit des taux de 5 ou 15 % ou, dans certains
cas, une imposition exclusive à la résidence, notamment en cas de
participation supérieure à 50 % du capital ou à
5 millions de francs dans la société distributrice, alors
que la convention franco-russe permet l'application de retenues à la
source de 5, 10 ou 15 % selon les cas. Le texte franco-ukrainien
prévoit en outre le transfert de l'avoir fiscal attaché aux
dividendes de source française.
En ce qui concerne les intérêts, la convention fiscale
franco-ukrainienne retient des taux de retenues à la source de 2 %
ou 10 % selon les cas, mais prévoit toutefois une
exonération à la source pour les intérêts
payés ou reçus par un Etat contractant ou l'un de ses
démembrements ou pour les intérêts correspondant à
une dette assurée ou garantie par une de ces entités publiques ou
par une personne agissant pour son compte. La convention franco-russe
prévoit, quant à elle, une imposition exclusive de ce type de
revenus dans l'Etat de résidence du bénéficiaire.
En matière de redevances, la convention franco-russe prévoit dans
tous les cas une imposition exclusive dans l'Etat de résidence du
bénéficiaire, alors que le texte franco-ukrainien, même
s'il retient ce principe, accorde toutefois à l'Etat de la source le
droit d'imposer les redevances pour l'usage ou la concession de l'usage d'un
droit d'auteur (à l'exclusion des droits sur les logiciels) à un
taux n'excédant pas 10 % de leur montant brut. En outre, au cours
de la période de douze mois suivant la date d'entrée en vigueur
de la convention, l'Etat de la source peut imposer les redevances payées
en rémunération de l'usage ou de la concession de l'usage d'une
marque de fabrique ou de commerce, d'un dessin ou d'un modèle à
un taux n'excédant pas 5 % de leur montant brut.
3. Sur les régimes applicables aux artistes et sportifs, ainsi qu'aux rémunérations et pensions publiques
S'agissant des revenus des artistes et sportifs, les
conventions
précitées posent le principe d'une imposition dans l'Etat
d'exercice de l'activité. Cela étant, elles comportent,
conformément à la pratique française, une exception en ce
qui concerne les revenus constitués (s'agissant de la convention
franco-russe) ou tirés d'activités financées (s'agissant
de la convention franco-ukrainienne) principalement par des fonds publics
provenant de l'autre Etat, étant toutefois observé que la
convention franco-ukrainienne retient cette exception y compris dans
l'hypothèse où les revenus sont attribués non pas à
l'artiste ou au sportif lui-même, mais à une autre personne,
qu'elle soit ou non résidente d'un Etat contractant.
Pour ce qui concerne les rémunérations et pensions publiques, les
deux conventions retiennent le principe internationalement reconnu de
l'imposition exclusive dans l'Etat qui paie les revenus en cause. Ces textes
prévoient par ailleurs une exception à ce principe lorsque les
bénéficiaires de ces revenus sont des résidents et des
ressortissants de l'autre Etat contractant et, s'agissant des
rémunérations, si l'activité est exercée dans ce
dernier Etat. Les deux textes diffèrent toutefois s'agissant du
traitement réservé aux bi-nationaux qui, dans le cadre de la
convention franco-ukrainienne, demeurent dans tous les cas imposables dans
l'Etat qui les paie dès lors qu'ils sont ressortissants de cet Etat.