B. MIEUX ACCOMPAGNER LA PROTECTION DU PATRIMOINE DANS LES TERRITOIRES

1. Le soutien de l'État aux projets conduits par les collectivités territoriales et les propriétaires privés

On peut regretter qu'une faible part des crédits du plan de relance soit allouée aux monuments appartenant aux collectivités territoriales et aux propriétaires privés. D'une part, ils représentent la très grande majorité des monuments protégés au titre des monuments historiques. D'autre part, le soutien de l'État aux opérations des collectivités et des propriétaires privés crée un effet de levier et génère donc plus d'activités et de chiffre d'affaires pour les entreprises, dans la mesure où des subventions de collectivités territoriales, des aides d'associations de sauvegarde du patrimoine et/ou une prise en charge des travaux par les propriétaires viennent s'ajouter aux crédits de l'État. C'est ce qu'avait observé la commission de la culture, lorsqu'elle a examiné les conclusions du groupe de travail relatif à l'impact de l'épidémie de la Covid-19 dans le secteur des patrimoines.

Les faibles dotations de l'État aux monuments qui ne lui appartiennent pas s'expliquent cependant par les contraintes du plan de relance , qui doit parvenir, en l'espace de deux ans, à consommer une quantité massive de crédits. C'est pourquoi ce sont majoritairement de grosses opérations, déjà prêtes, dont la maîtrise d'ouvrage relève de l'État ou de ses opérateurs, et susceptibles d'être bouclées en deux ans, qui ont été privilégiées.

Conscient de la faible mobilité des entreprises de restauration, le ministère de la culture a cependant assuré que des consignes avaient été données pour qu'il y ait au moins une opération par département et que la nature des travaux engagés permette de donner de l'activité à tous les corps de métiers.

D'autres ressources financent par ailleurs la restauration du patrimoine n'appartenant pas à l'État, en particulier :

- le fonds incitatif et partenarial pour les petites communes à faible ressources (FIP), dont les crédits sont revalorisés de 5 millions d'euros en CP en 2021 pour atteindre 15 millions d'euros en AE comme en CP. Ces crédits supplémentaires devraient permettre de financer davantage d'opérations, même si ses proportions demeurent encore modestes, puisque 85 % des communes françaises comptent moins de 2 000 habitants ;

- le Loto du patrimoine , dont l'édition 2020 a poursuivi le rééquilibrage engagé l'an dernier entre la part des monuments qui sont protégés au titre des monuments historiques et ceux qui ne le sont pas (46 %), ainsi que la part des monuments qui appartiennent à des collectivités publiques et ceux qui appartiennent à des personnes privées (44 %). Le nombre d'opérations sélectionnées a été réduit pour éviter l'effet saupoudrage qui avait été reproché au moment du lancement du Loto (119) ;

- l'avantage fiscal associé au label de la Fondation du patrimoine , qui a été étendu, dans le cadre de la LFR3, aux immeubles bâtis et non bâtis situés dans des communes de moins de 20 000 habitants, sur la base de l'initiative initialement portée par notre collègue Dominique Vérien dans le cadre d'une proposition de loi et unanimement soutenue par la commission de la culture 1 ( * ) . Grâce à l'élargissement de son champ d'application géographique, cet outil pourra désormais être mobilisé dans le cadre de la rénovation des centres-villes et centres-bourgs. Cette mesure parait d'autant plus appropriée que les acteurs du patrimoine constatent, dans le contexte de la crise sanitaire, que les chantiers des propriétaires privés ont eu davantage de facilité à reprendre, parce qu'il s'agit de chantiers de moindre envergure.

2. Quelques pistes

Comme la commission de la culture l'avait déjà indiqué dans le cadre des conclusions du groupe de travail relatif à l'impact de l'épidémie de la Covid-19 dans le secteur des patrimoines, il lui semble important que l'État augmente temporairement son taux de subvention aux opérations des collectivités et des propriétaires privés portant sur des monuments historiques , même lorsqu'il ne s'agit pas d'opérations financées par le FIP. Un soutien renforcé de l'État pourrait inciter des communes et des propriétaires à lancer des opérations pour lesquelles ils se montrent, dans le contexte actuel de la crise sanitaire, plutôt hésitants, et garantirait une bonne consommation des crédits déconcentrés qui, à défaut, sont transférés à l'administration centrale en fin d'exercice et sont donc perdus pour les territoires.

La commission de la culture reste également très attachée à l'importance des travaux d'entretien et des crédits qui y sont consacrés . Elle estime qu'il s'agit de chantiers à ne pas négliger dans le contexte actuel. Dans la mesure où leur lancement est à la fois plus facile et rapide, ils peuvent participer à la relance de l'activité dans le contexte de la crise sanitaire.

La commission de la culture insiste enfin une nouvelle fois sur l'enjeu de la relance de l'assistance à la maîtrise d'ouvrage par l'État . Trop de projets de collectivités territoriales et de propriétaires privés ne se concrétisent pas aujourd'hui parce qu'ils sont freinés par un déficit d'ingénierie. Les sous-effectifs des services déconcentrés constituent, à cet égard, un réel problème. La commission de la culture s'en inquiète d'ailleurs particulièrement, au regard de la manière dont ces services vont être sollicités par la mise en oeuvre du plan de relance, sans évolution de leurs moyens humains, alors qu'ils ont un rôle important à jouer pour identifier et accompagner les projets sur le territoire.

Un renforcement de la coordination de l'État et des collectivités territoriales pourrait sans doute favoriser la protection du patrimoine, protégé et non protégé au titre des monuments historiques dans l'ensemble des territoires. Il serait important que la signature des nouveaux contrats de plan État-région dans le courant de l'année 2021 soit l'occasion pour l'ensemble des collectivités publiques d'inscrire leurs engagements en faveur de la protection du patrimoine.

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Compte tenu de l'ampleur des efforts financiers consentis par l'État en faveur du secteur des patrimoines, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 175 « Patrimoines » du projet de loi de finances pour 2021.


* 1 Proposition de loi n° 381 (2018-2019), déposée par Mme Dominique Vérien, visant à moderniser les outils et la gouvernance de la Fondation du patrimoine

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