IV. 15 PROPOSITIONS POUR RESTAURER LE NÉCESSAIRE DIALOGUE ENTRE LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ET LEURS ASSUREURS

Les collectivités territoriales ne sont pas responsables des difficultés qu'elles subissent. Pour autant, elles doivent permettre d'améliorer leur situation assurantielle par diverses mesures et les assureurs, ainsi que l'État, doivent renforcer leur accompagnement.

Les recommandations de la mission portent sur quatre axes :

- avant tout de chose, il convient de s'assurer de bonnes conditions de concurrence sur le marché de l'assurance ;

- deuxièmement, les collectivités doivent, en coopération avec les assureurs, mettre en place des actions visant à mieux connaître leur patrimoine à assurer, à mieux connaître leurs risques et à les prévenir le mieux possible, ce qui permettra de négocier des marchés au plus près de leurs besoins réels ;

- troisièmement, les conditions de passation des marchés publics d'assurance doivent être facilitées et sécurisées ;

- enfin, l'État doit élargir son intervention dans les situations exceptionnelles.

A. GARANTIR LA CONCURRENCE SUR LE MARCHÉ DE L'ASSURANCE : UN PRÉREQUIS POUR PROTÉGER LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES DES APPELS D'OFFRES INFRUCTUEUX ET DES HAUSSES TARIFAIRES EXCESSIVES

Le premier axe d'intervention consiste à éviter que les comportements ayant conduit à l'atrophie du marché et aux difficultés assurantielles touchant aujourd'hui les collectivités ne se reproduisent. On pourra en effet inciter tant que l'on voudra les collectivités à avoir une meilleure connaissance de leur patrimoine et de leur risque, cela servira peu si le marché de l'assurance des collectivités reste dysfonctionnel.

Pour cela, un diagnostic poussé des caractéristiques de ce marché doit être établi, et avec lui des recommandations précises sur les conditions d'une amélioration de son fonctionnement. Il s'agirait d'éviter la concentration du marché entre deux acteurs. Les deux principaux acteurs sur le marché - non seulement la Smacl mais aussi Groupama - ont en effet pratiqué des prix très bas et très attractifs pour les collectivités, mais au moment de leur inévitable augmentation, ces collectivités n'avaient plus d'autre assureur vers qui se tourner, du fait de la faible profitabilité de leurs activités sur ce marché.

La mission a, par conséquent, demandé à la commission des finances de saisir l'Autorité de la concurrence pour qu'elle lui rende un avis sur la situation du marché de l'assurance des collectivités. Cet avis pourrait s'accompagner d'une liste de recommandations visant à améliorer les conditions concurrentielles du marché, pour faire revenir sur celui-ci les assureurs qui l'ont déserté et éviter que ne perdure ou se reproduise la situation d'atrophie actuelle.

Recommandation n° 1 : saisir l'Autorité de la concurrence sur la situation du marché de l'assurance des collectivités pour garantir son bon fonctionnement (commission des finances du Sénat puis Autorité de la concurrence).

Il s'agirait également d'éviter que les pratiques agressives de certains assureurs étrangers ne viennent accentuer des baisses de tarifs pour se désengager ultérieurement du marché, constatant que les tarifs proposés ne permettent pas de couvrir dans des conditions correctes les risques assurés.

S'agissant du rôle de l'ACPR, un premier chantier consisterait à mettre en place un suivi spécifique à la catégorie de l'assurance des collectivités. En effet, comme l'a signalé le vice-président de l'ACPR lors de son audition par la mission, les données dont elle dispose sont pauvres du fait que le suivi des entreprises se fait par catégorie de risques et non de clientèle. Or, il y aurait du sens à faire une exception pour cette catégorie particulière de clientèle que sont les collectivités, soumises à des règles particulières de passation des marchés et assurant une mission de service public.

Le superviseur gagnerait également à avoir une interprétation plus extensive de ses prérogatives, lui permettant d'orienter plus facilement l'action des assureurs, en particulier par un recours plus fréquent à la mise en garde. En effet, alors que l'article L. 612-30 du code monétaire et financier dispose que, lorsqu'elle constate qu'une personne soumise à son contrôle a des pratiques susceptibles de mettre en danger les intérêts de ses clients, assurés, adhérents ou bénéficiaires, l'ACPR peut, après avoir mis ses dirigeants en mesure de présenter leurs explications, la mettre en garde à l'encontre de la poursuite de ces pratiques en tant qu'elles portent atteinte aux règles de bonne pratique de la profession concernée, l'ACPR estime devoir réserver cet outil aux pratiques commerciales vis-à-vis des particuliers. Or, rien dans l'article L. 612-30 ne l'indique. Le recours à la mise en garde, à condition qu'il soit suffisamment et correctement motivé, peut pourtant constituer un levier puissant d'incitation auprès d'un assureur, puisque l'article L. 612-39 du code monétaire et financier prévoit que l'ACPR peut sanctionner une entreprise lorsqu'elle n'a pas tenu compte d'une mise en garde.

Recommandation n° 2 : mettre en place un suivi spécifique à l'assurance des collectivités et mieux utiliser les prérogatives de supervision prévues par la loi (Autorité de contrôle prudentiel et de résolution - APCR).

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