CHAPITRE 2
-
Dispositions financières
Section 1
-
Transferts financiers

En première lecture, votre rapporteur avait insisté sur la complexité des transferts financiers proposés par le Gouvernement en conséquence de la suppression de l'assurance personnelle.

En effet, ces mécanismes éclataient encore davantage l'affectation des droits sur les alcools et du prélèvement social de 2 % sur les revenus du patrimoine et les produits de placement.

De plus, le schéma proposé par le Gouvernement représentait pour l'Etat une économie sur le financement de la couverture de base, une charge accrue pour la CNAMTS et un manque à gagner pour la CNAF. Cette dernière perdait de surcroît une recette dynamique en contrepartie de l'abandon d'une dépense relativement stable.

Le Sénat, à l'initiative de votre commission, avait adopté un mécanisme alternatif, plus simple, et évitant à la CNAF d'enregistrer une aussi lourde perte. Ce mécanisme alternatif reposait sur le retour progressif de l'allocation parent isolé à la charge de la CNAF, l'Etat consacrant la somme ainsi économisée à une majoration des droits de consommation sur le tabac affectés à la CNAMTS.

L'affectation des droits sur les alcools et du prélèvement social sur les revenus du patrimoine restait en outre inchangée, ce qui permettait de répondre à l'objectif de simplification du financement de la sécurité sociale, qu'appelle de vos voeux votre commission 2( * ) .

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, a considéré que ce mécanisme alternatif était lié au " remodelage du projet de loi CMU opéré par le Sénat " et était ainsi " contradictoire avec les buts poursuivis par l'Assemblée nationale " 3( * ) .

L'Assemblée nationale est revenue au texte initial proposé par le Gouvernement sur les articles 9 à 11, l'article 12 ayant été adopté conforme.

Votre rapporteur observe que l'adoption de ce mécanisme alternatif du financement de la couverture maladie de base n'est en aucun cas une conséquence de l'instauration d'une allocation personnalisée à la santé.

Ce mécanisme est plus simple et plus respectueux des finances sociales que celui proposé par le Gouvernement, qui entraîne une perte de 1,6 milliard de francs sur les organismes de sécurité sociale.

Aussi votre commission vous propose-t-elle de rétablir le texte adopté par le Sénat aux articles 9, 10 et 11.

Art. 9
(art. L. 814-5 et L. 195-3 du code de la sécurité sociale)
Incidences financières sur le Fonds de solidarité vieillesse

Cet article vise à supprimer la prise en charge, par le Fonds de solidarité vieillesse (FSV), des cotisations d'assurance personnelle des titulaires de l'allocation spéciale et à réduire en contrepartie de cinq points la part des droits sur les alcools affectée au FSV.

En première lecture, le Sénat avait suivi la proposition de votre commission de supprimer le II de cet article, qui vise à baisser de 60 % à 55 % la part des droits sur les alcools affectée au FSV.

En effet, il n'est pas apparu nécessaire au Sénat de compliquer excessivement l'affectation de la fiscalité sur les alcools.

L'Assemblée nationale est revenue au texte adopté en première lecture.

Votre commission vous propose d'adopter un amendement visant à revenir au texte adopté par le Sénat en première lecture.

Art. 10
(art. L. 161-15, L. 381-2 et L. 245-16 du code de la sécurité sociale)
Incidences financières de la mise en place
de la couverture obligatoire sur la branche famille

Cet article vise à supprimer la prise en charge, par les caisses d'allocations familiales, des cotisations de certains bénéficiaires de l'assurance personnelle et à diminuer en contrepartie les ressources affectées à la CNAF.

En première lecture, le Sénat avait suivi la proposition de votre commission de ne pas pénaliser la branche famille. Il n'était pas apparu équitable de compenser de moindres dépenses par de moindres recettes. En outre, la différence entre les moindres dépenses pour la CNAF (- 2.386 millions de francs) et la perte de ressources, liée à une diminution de 50 à 22 % du produit du prélèvement social de 2 % sur les revenus du patrimoine et les produits de placement (- 3.022 millions de francs 4( * ) ) faisant apparaître un solde négatif pour la CNAF de 636 millions de francs.

Aussi, votre commission vous avait-elle proposé un mécanisme alternatif consistant à compenser une moindre dépense par une augmentation de dépenses. Son choix s'était porté naturellement sur l'allocation parent isolé, dont la charge a été transférée au budget de l'Etat par la loi de finances pour 1999.

En opérant un retour progressif dans le giron des allocations familiales, ce qui apparaît bien plus logique, l'Etat économisait ainsi 2,5 milliards de francs, qui pouvait en être affectés à la CNAMTS -via les droits de consommation sur les tabacs- sans que la branche famille ne soit lésée.

L'Assemblée nationale a rétabli son texte de première lecture, sans prendre en considération les observations formulées par le Sénat.

Votre commission vous propose d'adopter un amendement visant à revenir au texte adopté par le Sénat en première lecture.

Art. 11
(art. L. 241-2 du code de la sécurité sociale)
Enumération des ressources complémentaires
des régimes obligatoires de base

Cet article vise à préciser les nouvelles recettes de la CNAMTS, pour faire face aux dépenses résultant de la couverture maladie de base.

Le Sénat avait en première lecture adopté un amendement qui avait pour objet de supprimer, au titre des recettes de la CNAMTS, tant la fraction de 5 % du droit de consommation sur les alcools que la fraction de 28 % du prélèvement social sur les revenus du patrimoine et les produits de placement.

L'Assemblée nationale a rétabli son texte de première lecture.

Votre commission vous propose un amendement visant à revenir au texte adopté par le Sénat en première lecture.

Art. 13
(art. 38 et 42 de la loi n° 88-1088 du 1 er décembre 1998
relative au revenu minimum d'insertion, art. L. 2334-7-2 nouveau, L. 2334-1, L. 3334-7-1 nouveau, L. 3413-2 nouveau, L. 2321-2 du code général des collectivités territoriales, art. 93 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983,
art. 32 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983)
Transferts financiers entre l'Etat et les départements

L'Assemblée nationale a écarté la disposition introduite au Sénat à l'initiative de votre commission des Finances prévoyant que la mise en oeuvre du prélèvement sur la dotation générale de fonctionnement (DGF) des départements interviendrait à compter de l'extinction des droits à l'admission à l'aide médicale.

De même, elle n'a pas retenu l'amendement adopté à l'initiative de M. Yves Fréville prévoyant de porter de 3 à 6 % le plafond d'augmentation du contingent communal d'aide sociale au titre d'un exercice donné.

En revanche, l'Assemblée nationale a adopté un amendement présenté par le Gouvernement visant à supprimer les contingents communaux d'aide sociale en contrepartie d'une diminution théoriquement " au franc le franc " de la DGF des communes et d'une augmentation consécutive de celle des départements afin d'assurer la neutralité financière de l'opération.

I - Le dispositif proposé

Il convient de rappeler que le fondement législatif actuel des contingents résulte de l'article 93 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences qui dispose qu'un décret fixe les critères selon lesquels les communes sont amenées à participer aux dépenses des départements.

Le décret n° 87-1146 du 31 décembre 1987 précise ainsi comment est acquittée la contribution globale annuelle des communes.

La base de la contribution globale des communes d'un département a été constituée par le montant des contributions mises à leur charge au titre de l'exercice 1983.

Chaque année, le conseil général arrête pour l'exercice suivant, le montant de la contribution globale , en appliquant à celui de l'année précédente un coefficient de variation au plus égal au coefficient de variation des dépenses d'aide sociale prises en charge par le département.

Lorsque la dernière contribution globale des communes d'un département fait apparaître un taux de participation inférieur à la moyenne nationale, le conseil général peut augmenter d'un point ce dernier coefficient de variation (la moyenne nationale a été fixée à 15,1 % pour 1998).

La participation globale fait l'objet d'une évaluation provisoire à partir des prévisions budgétaires et d'un calcul définitif au vu des dépenses constatées au titre des deux exercices en cause.

Le montant de la contribution globale doit ensuite être répartie entre les communes du département. Deux parts doivent être distinguées dans le contingent communal.

La première part varie en fonction des critères retenus par le département. Trois critères, ainsi que leur pondération respective, peuvent être librement choisis par le conseil général dans chacune des trois rubriques suivantes :

- une ou plusieurs des dotations composant la dotation globale de fonctionnement, ou la totalité de la dotation globale de fonctionnement, ou encore le potentiel fiscal de chaque commune ;

- le nombre de bénéficiaires , dans chaque commune, des prestations d'aide sociale légale effectivement prises en charge par le département ou le nombre dans chaque commune des admissions à l'aide sociale à la charge effective du département ;

- la structure par classe d'âge de la population de chaque commune ou la situation de l'emploi dans chacune d'elles.

La seconde part, égale à la différence entre la contribution globale annuelle et la première part, est divisée entre les communes du département au prorata des contributions mises à la charge de chaque commune, au titre de l'exercice 1984.

Une clause de sauvegarde est prévue. L'application de ces règles de calcul ne peut avoir pour effet d'augmenter la contribution annuelle d'une commune, de plus de trois points par rapport au pourcentage de variation constaté pour l'ensemble des communes. Si ce pourcentage est supérieur, la contribution de la commune intéressée est réduite en conséquence et la somme non mise à sa charge est répartie entre les autres communes.

Evolution des contingents depuis 1984

 

Dépenses nettes d'aide sociale des départements

Contingents communaux

DGF

 

Montant (1)

Evolution

Montant (1)

Evolution

Evolution

1984

35.096

 

5.743

 
 

1985

36.371

3,63 %

6.031

5,01 %

5,18 %

1986

37.702

3,66 %

6.284

4,19 %

4,69 %

1987

39.193

3,95 %

6.332

0,76 %

5,16 %

1988

40.908

4,38 %

6.590

4,07 %

4,73 %

1989

42.845

4,74 %

6.875

4,32 %

9,28 %

1990

46.293

8,05 %

7.453

8,41 %

2,50 %

1991

50.533

9,16 %

7.990

7,21 %

7,51 %

1992

55.378

9,59 %

8.716

9,09 %

4,42 %

1993

60.254

8,80 %

9.452

8,44 %

4,33 %

1994

64.472

7,00 %

10.160

7,49 %

2,00 %

1995

67.839

5,22 %

11.010

8,37 %

1,70 %

1996

71.504

5,40 %

11.450

4,00 %

3,55 %

1997

73.993

3,48 %

11.581

1,14 %

1,36 %

(1) Montant en millions de francs.

Evolution cumulée de 1984 à 1997

Dépenses nettes d'aide sociale des départements

110,83 %

Contingents communaux

101,65 %

DGF

73,23 %

Le dispositif proposé est inséré aux paragraphes IV à VIII de cet article.

Le paragraphe IV insère dans le code général des collectivités territoriales un article L. 2334-7-2 nouveau qui porte sur les modalités du prélèvement sur la DGF communale, conséquence de la suppression du contingent.

•  Le prélèvement est opéré sur la dotation forfaitaire de la DGF communale : il est égal au montant de la participation au titre du contingent communal d'aide sociale versée par la commune en 1999.

Le choix de l'année 1999 est justifié par le souhait d'une cohérence avec le dispositif de réduction de la DGF des départements : il convient de rappeler à cet égard que la référence pour le calcul du prélèvement consécutif à l'instauration de la CMU correspond aux dépenses consacrées à l'aide médicale en 1997 revalorisées en fonction du taux de croissance de la DGF pour 1998, 1999 et 2000. Il n'a donc pas été prévu de référence à une moyenne triennale.

Le montant des dépenses d'aide sociale des départements s'élève à 79,8 milliards de francs dans les budgets primitifs des départements pour 1999, soit une hausse de 2,5 % par rapport à 1998. En appliquant le taux moyen de 15,1 %, il apparaît que le montant total du contingent communal devrait atteindre 12,05 milliards de francs en 1999.

•  Le dispositif prévoit par ailleurs un dispositif d'abattement forfaitaire pour les communes éligibles à la dotation de solidarité urbaine (DSU) dont le montant du contingent communal rapporté au nombre d'habitant est supérieur de 30 % au montant moyen du contingent communal par habitant.

Ce dispositif a fait l'objet de simulations dans le cadre du groupe de travail constitué entre la DGCL, l'Assemblée des départements de France, l'Association des maires de France (AMF) et l'Association des maires des grandes villes de France (AMGVF) : il devrait concerner 250 communes environ et représente un montant total qui devrait avoisiner 260 millions de francs suivant les simulations réalisées sur la base provisoire des comptes pour 1997.

L'abattement est calculé en fonction de la population de la commune en 1999 et de l'écart entre le montant du contingent par habitant de la commune par rapport à la moyenne départementale, d'une part, et à la moyenne nationale, d'autre part (soit environ 201 francs par habitant en 1998).

Le tableau ci-après montre quelle devrait être l'ampleur du montant des abattements pour les dix communes pour lesquelles il sera le plus important.

Les dix communes bénéficiant de l'abattement le plus important

(en milliers de francs)

Marseille

40.816,00

Fos sur mer

10.053,00

Montpellier

9.693,00

Strasbourg

7.904,00

Toulouse

6.702,00

Toulon

6.618,00

Lille

6.510,00

Grenoble

4.699,00

Perpignan

4.416,00

Clermont-Ferrand

3.644,00

NB : Simulation provisoire à partir des données disponibles sur 1997

Les sommes sont réparties entre les départements proportionnellement aux participations communales aux dépenses d'aide sociale constatées en 1999. L'effet de l'abattement forfaitaire de 250 millions de francs est donc automatiquement pris en charge et réparti entre l'ensemble des départements.

•  Le présent article envisage les modalités du prélèvement qui interviendra sur la DGF communale de l'an 2000, à partir du calcul du montant des contingents communaux établi par arrêté du préfet avant le 30 octobre 1999 au vu des prévisions des départements.

Une régularisation est prévue sur la DGF de 2001. Il s'agit de tenir compte du fait que l'évaluation définitive du contingent communal est établi à partir des comptes définitifs du département des deux années précédentes qui permettent de connaître exactement l'évolution des dépenses sociales départementales d'une année sur l'autre.

De fait, il est difficile de savoir suivant quel calendrier les départements exigent le versement du contingent communal. Il peut sans doute apparaître des pratiques variables suivant les départements.

Il n'est pas interdit de penser que suivant les départements les situations de trésorerie des communes sont très variables en matière de versement des contingents aux départements. Il importe que la mise en oeuvre pratique de la réforme ne pénalise pas à l'excès les situations qui s'écartent de la moyenne.

•  Le présent article prévoit l'hypothèse d'un prélèvement sur la fiscalité directe des communes lorsque le montant du contingent communal versé en 1999 sera supérieur à celui de la dotation forfaitaire de la DGF perçue par la commune (paragraphe III de l'article L. 2334-7-2).

Pour les communes membres d'un groupement à fiscalité propre, il est prévu, en cas d'insuffisance des ressources fiscales disponibles, un prélèvement sur l'attribution de compensation versée par le groupement à la commune.

Il sera opéré un prélèvement sur le produit des impôts directs locaux perçus par la commune dont le montant sera égal à celui du contingent communal versé par la commune diminué du montant de la dotation forfaitaire de la DGF communale.

Cette hypothèse concernerait environ 50 communes pour un montant total du prélèvement sur la fiscalité directe locale de près de 45 millions de francs. Cette évaluation basée sur des comptes administratifs provisoires de 1997 pourrait être modifiée d'ici à 1999.

Cette disposition s'inscrit dans la logique d'un transfert de compétences : dès lors que la participation communale aux dépenses d'aide sociale du département est supprimée, il doit être opéré une réduction d'un montant équivalent sur les recettes de la commune. A cette fin, le Gouvernement a effectué le choix d'une compensation portant en priorité sur la DGF des communes et, subsidiairement, sur le produit de la fiscalité directe locale de la commune. Le prélèvement direct sur le produit des quatre " vieilles " représente toutefois une nouveauté juridique en matière de financement des transferts de compétences .

Les ressources prélevées ainsi sur la fiscalité communale sont reversées à un fonds qui vient abonder en recettes la DGF départementale.

Il est précisé que les sommes du fonds en question ne sont pas prises en compte pour le calcul de la progression de la DGF par application du taux d'évolution.

•  Le présent article prévoit le versement au département d'une somme correspondant au montant des contingents communaux perçus en 1999 dans le cadre d'une dotation particulière au sein de la DGF des départements (article L. 3334-7-1 du code général des collectivités territoriales introduit par le V de cet article) .

La dotation relative aux contingents communaux constituera un concours particulier au sein de la DGF des départements.

Son montant total sera égal à celui de la diminution de la DGF effectuée sur l'ensemble des communes en contrepartie de la suppression du contingent, majoré par les ressources du fonds alimenté par les prélèvements éventuels sur la fiscalité directe locale.

Cette somme présentera la particularité d'être indexée sur le taux d'évolution de la DGF.

Les départements sont donc assurés de l'évolution à un taux raisonnable d'une ressource dont la forte augmentation au cours de ces dernières années avait parfois suscité des reproches de la part des communes ; ces dernières ont la garantie que le montant des contingents ne connaîtra plus de progression erratique à l'avenir.

•  Il est expressément prévu que le dispositif ci-dessus n'est pas applicable à Paris . Le Conseil de Paris est habilité à fixer les conditions financières de la suppression de la participation de la commune aux dépenses d'aide sociale et de santé.

De fait, la participation de la commune de Paris, qui représente un " mouvement d'ordre " de nature comptable plutôt qu'un contingent communal au sens habituel, représente un montant de 2,814 milliards de francs sur un montant total de 3,761 milliards de francs de dépenses d'aide sociale inscrites au budget du département (données du compte administratif pour 1997).

•  Le présent article prévoit enfin diverses coordinations :

- la notion de participation des communes aux dépenses d'aide sociale est supprimée dans les dispositions applicables en matière de répartition des compétences issues de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 (1 du VIII de cet article) et de la loi n° 86-663 du 22 juillet 1983 ( 2 du VIII de cet article ) ;

- le principe selon lequel le montant de la dépense obligatoire des départements au titre du RMI est prise en compte pour le calcul du contingent communal (art. 42 de la loi n° 88-1088 du 1 er décembre 1988) est abrogé ( 3 du VIII de cet article ) ;

- à l'article L. 2321-2 du code général des collectivités territoriales qui détermine l'ensemble des dépenses obligatoires des communes, il est également mis fin à l'inscription, au rang de dépenses obligatoires, des dépenses relatives au contingent communal ( 4 du VIII de cet article ).

II - Les observations de votre commission

Le mouvement qui est opéré sur la DGF communale à l'occasion de la mise en place de la couverture maladie universelle est un mouvement de grande ampleur puisqu'il portera sur près de 12 milliards de francs à compter de l'exercice 2000.

Il est à noter que la suppression des contingents communaux est une mesure qui dépasse largement le seul enjeu de la prise en charge des dépenses d'aide médicale obligatoire. La part de ces dépenses dans les contingents communaux représente entre 10 et 14 % du montant de ces derniers en moyenne.

La suppression complète des contingents communaux, justifiée par la difficulté d'isoler la part médicale de la dépense stricto sensu , conduit à instituer deux mécanismes nouveaux.

Le premier consiste à instaurer une nouvelle forme de péréquation entre collectivités locales, d'un montant global de 260 millions de francs environ, en prévoyant un abattement forfaitaire en faveur des communes éligibles à la dotation de solidarité urbaine dont le montant du contingent communal rapporté au nombre d'habitants est sensiblement supérieur à la moyenne nationale. Ce montant est pris en charge par l'ensemble des départements.

Le second consiste à instaurer un prélèvement automatique sur le produit des quatre taxes directes locales, votées par la commune, lorsqu'il apparaîtra que le prélèvement sur la dotation forfaitaire de la DGF ne suffit pas à financer le montant de la suppression du contingent communal. En se référant aux travaux d'évaluation conduits sur la base des comptes administratifs actuellement disponibles, on peut estimer qu'une cinquantaine de communes pourraient entrer dans ce mécanisme pour un prélèvement direct de près de 50 millions de francs.

La réforme qui est ainsi présentée n'est pas minime ; elle intervient dans des conditions qui ne sont pas favorables à un examen approfondi par le Parlement. Issu d'un amendement déposé tardivement par le Gouvernement à l'occasion de la nouvelle lecture du projet de loi portant création de la couverture maladie universelle, le dispositif proposé s'inscrit dans une procédure qui ne favorise pas un dialogue constructif entre les deux assemblées.

Il est vrai que ce texte est largement le fruit d'une concertation qui s'est déroulée entre le Gouvernement, l'Association des maires de France, l'Assemblée des départements de France et l'Association des maires des grandes villes de France après que le comité des finances locales en eut suggéré la mise en place le 17 mai dernier.

Pour autant et même s'il n'est pas contestable que les grandes associations nationales se soient exprimées en faveur du principe de la suppression des contingents communaux, dans le respect de la neutralité financière, les modalités techniques du texte n'ont pas pu donner lieu à un avis détaillé des grandes associations -ni du comité des finances qui peut être spontanément consulté par le Gouvernement sur " tout projet d'amendement du Gouvernement (...) à caractère financier concernant les collectivités locales " aux termes de l'article. L. 1211-3 du code général des collectivités territoriales.

Engager un mouvement de réforme de cette ampleur nécessite de respecter certaines précautions. C'est pourquoi le président de votre commission a écrit à M. Alain Lambert afin de recueillir la position de la commission des Finances, qu'il préside, saisie pour avis du présent projet de loi.

Il était indispensable que le Sénat soit éclairé par sa commission des finances sur un dispositif de cette nature et votre commission n'a pas souhaité amender les nouvelles dispositions de l'article 13 en nouvelle lecture sans connaître cette position.

Pour autant, les débats devant votre commission ont reflété certaines interrogations dont votre rapporteur se doit de faire état.

En premier lieu, il ressort que les conséquences du mécanisme d'abattement financier en faveur des communes dont la participation au titre du contingent est la plus élevée compte tenu de leurs charges financières, sont encore difficiles à mesurer sachant que les simulations ne peuvent porter que sur les données provisoires des comptes de 1997. Le coût de l'abattement pris en charge directement représente pour les départements un manque à gagner de l'ordre de 260 millions de francs par rapport à la compensation intégrale. S'il doit être tenu compte de la situation particulière des départements pour lesquels le taux du prélèvement moyen peut être le double de la moyenne nationale, on peut néanmoins se demander si une réforme de la DGF ne serait pas un instrument mieux adapté pour mettre en place des mécanismes à vocation péréquatrice en prenant en compte l'ensemble des données.

Votre commission s'est également demandé si l'accent mis sur les communes éligibles à la DSU n'avait pas conduit à négliger, dans les départements pour lesquels le taux du prélèvement au titre du contingent est élevé, la charge qui pèsera sur certaines communes rurales du fait de la compensation intégrale de la suppression du contingent. Il serait utile de disposer de données qui permettent de s'assurer que toutes les communes urbaines ou rurales bénéficient d'un traitement équitable dès lors que le montant de leur participation excède le niveau moyen.

La seconde remarque porte sur l'incidence de la mise en place des données relatives au recensement général de la population en 1999 qui pourrait intervenir pour la DGF versée au titre de l'exercice 2000.

Pour une commune de taille moyenne qui enregistre une diminution de sa population, il peut en résulter une diminution de la DGF communale. En l'absence de réforme des contingents communaux cette commune aurait dû bénéficier, suivant les critères de pondération retenus par le département, d'une diminution de la somme à verser au titre du contingent. Si la réforme est mise en place, ce correctif mécanique ne jouera plus puisque les contingents donnent lieu automatiquement à compensation sur la base de la situation constatée en 1999.

Une interrogation existe également à l'égard de la situation de certains groupements ayant pris en charge le contingent communal. Mme la Ministre de l'emploi et de la solidarité a rappelé sur ce point, à l'Assemblée nationale, que le contingent communal était une dépense obligatoire mise à la charge des communes et que, n'étant pas lié à l'exercice de compétences par les communes, celui-ci n'était pas susceptible de faire l'objet d'un transfert à un établissement public de coopération intercommunale (EPCI). Il n'en demeure pas moins que, dans certains cas, des groupements semblent avoir effectivement inclus le versement du contingent parmi leurs attributions sans que les délibérations des communes concernées n'aient donné lieu à des observations de la part du contrôle de légalité. Il est indispensable que la suppression des contingents communaux n'emporte pas de conséquences préjudiciables aux groupements considérés et ne réduisent l'étendue de leurs compétences.

On notera également que le manque de transparence du mode de calcul des contingents communaux a souvent appelé des observations critiques de la part des communes. En particulier, il importe de rappeler que si les communes doivent participer aux dépenses légales d'aide sociale, elles sont exonérées en droit d'une participation aux dépenses provenant d'une amélioration des prestations légales ou de l'attribution de prestations librement créées par le département. En effet, l'article 34 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 prévoit que, dans le cas de prestations améliorées, " le département assure la charge financière de ces décisions ".

Le calcul des contingents communaux pour 1999 nécessitera une grande clarté de la part des services départementaux afin d'éviter que les communes ne considèrent que des dépenses d'ordre facultatif ont été abusivement prises en compte dans le contingent.

Les contingents communaux sont une survivance du système de financements croisés auquel la décentralisation s'est efforcée de mettre fin ; ils ont trop longtemps représenté une " pomme de discorde " entre les communes et certains départements pour que l'on ne se félicite pas de la recherche d'une solution plus simple. Au demeurant, le mécanisme issu de l'article 13 du projet de loi initial, qui maintenait le versement de la part des dépenses d'aide médicale au titre du contingent pour une compétence que les départements n'exerçaient plus, ne pouvait que soulever des critiques.

Sur le principe, le mécanisme de suppression s'efforce de répondre aux voeux émis par l'ADF et l'AMF.

Les dépenses d'aide sociale locale mieux maîtrisées depuis 1995 sont susceptibles de variations importantes du fait de l'importance des besoins sociaux : inscrire les contingents au sein d'un prélèvement sur la DGF apporte donc de sérieuses garanties aux communes pour l'avenir, en garantissant une plus grande stabilité des évolutions : le dispositif proposé est un facteur de réduction des risques de dérapage qui pourrait être dommageable aux communes aussi bien qu'aux départements.

Votre commission a donc décidé de ne pas présenter d'amendement à cet article.

Pour autant les conditions d'examen de ce dispositif ne doivent pas conduire à renoncer à en améliorer les modalités : votre commission sera donc extrêmement attentive aux amendements qui seront proposés, en particulier à la lumière de l'avis de votre commission des finances.

Sous réserve de ces observations et dans l'attente des amendements susceptibles d'être présentés, notamment par la commission des Finances, saisie pour avis, votre commission a adopté cet article sans modification.

Art. 13 bis
Rapport sur les conséquences de la couverture maladie universelle
sur les contingents communaux d'aide sociale

L'Assemblée nationale, par cohérence avec le dispositif de suppression des contingents communaux introduit à l'article 13 ci-dessus, a adopté un amendement du Gouvernement afin de supprimer cet article qui prévoyait le dépôt devant le Parlement, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2000, d'un rapport portant sur " les conséquences de l'éventuelle suppression des contingents communaux " .

Cet article, résultant d'une initiative de M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis de la commission des Finances, visait à permettre à la concertation entre associations nationales de collectivités territoriales de se poursuivre jusqu'à son terme.

Votre commission ne vous propose pas de rétablir cet article.

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