Rapport n° 187 - Proposition de loi tendant à diminuer les risques de lésions auditives lors de l'écoute de baladeurs et de la fréquentation des discothèques
M. Jean-Louis LORRAIN, sénateur
Commission des Affaires sociales - Rapport n° 187 - 1997-1998
Table des matières
- TRAVAUX DE LA COMMISSION
-
INTRODUCTION
- I. DE LA " GÊNE DUE AU BRUIT " AUX " CONSÉQUENCES SANITAIRES DE L'EXPOSITION À DES NIVEAUX SONORES ÉLEVÉS " : DES ÉTUDES ÉPIDÉMIOLOGIQUES DE PLUS EN PLUS APPROFONDIES ET AUX RÉSULTATS CONCORDANTS
- II. DE LA PROTECTION DE LA TRANQUILLITÉ PUBLIQUE À LA PROTECTION DE LA SANTÉ PUBLIQUE : LES FINALITÉS DE LA LÉGISLATION DOIVENT ÊTRE ENRICHIES
-
EXAMEN DES ARTICLES
-
Article premier
Prévention des risques sanitaires liés à l'exposition à un niveau
sonore élevé
(Intitulé du chapitre V - II du titre premier du livre premier du code de la santé publique)
-
Art. 2
Limitation de la puissance sonore des jouets musicaux
(Art. L. 44-5 du code de la santé publique) -
Art. 3
Limitation du niveau sonore dans les lieux de production et de diffusion de musique amplifiée
(Art. L. 44-7 et art. L. 44-8 nouveaux du code de la santé publique)
-
Article premier
- CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
N° 187
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 17 décembre 1997.
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur la
proposition de loi de
MM. Louis SOUVET, Louis ALTHAPÉ, Roger
BESSE, Paul BLANC, Jean BIZET, Jacques BRACONNIER, Mme Paulette BRISEPIERRE,
MM. Robert CALMEJANE, Jean-Pierre CAMOIN, Gérard CÉSAR, Charles
de CUTTOLI, Désiré DEBAVELAERE, Michel DOUBLET, Daniel
ECKENSPIELLER, Yann GAILLARD, Alain GÉRARD, François GERBAUD,
Charles GINÉSY, Daniel GOULET, Alain GOURNAC, Adrien GOUTEYRON, Georges
GRUILLOT, Emmanuel HAMEL, Bernard HUGO, Roger HUSSON, André JOURDAIN,
Lucien LANIER, Edmond LAURET, Jacques LEGENDRE, Maurice LOMBARD, Pierre MARTIN,
Victor REUX, Roger RIGAUDIÈRE, Jean-Jacques ROBERT, Jean-Pierre
SCHOSTECK, Martial TAUGOURDEAU, René TRÉGOUËT, Alain
VASSELLE et Jean-Pierre VIAL,
tendant à diminuer les
risques
de
lésions auditives
lors de
l'écoute de
baladeurs
et de la fréquentation des
discothèques
,
Par M. Jean-Louis LORRAIN,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de :
MM.
Jean-Pierre Fourcade,
président
; Jacques Bimbenet, Mme
Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Guy Fischer, Claude Huriet, Bernard Seillier,
Louis Souvet,
vice-présidents
; Jean Chérioux, Charles
Descours, Roland Huguet, Jacques Machet,
secrétaires
;
François Autain, Henri Belcour, Paul Blanc, Mmes Annick
Bocandé, Nicole Borvo, MM. Louis Boyer, Jean-Pierre Cantegrit, Francis
Cavalier-Benezet, Gilbert Chabroux, Philippe Darniche, Mme Dinah Derycke, M.
Jacques Dominati, Mme Joëlle Dusseau, MM. Alfred Foy, Serge Franchis,
Alain Gournac, André Jourdain, Jean-Pierre Lafond, Pierre Lagourgue,
Dominique Larifla, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Jean-Louis Lorrain
,
Simon Loueckhote, Jean Madelain, Michel Manet, René Marquès,
Serge Mathieu, Georges Mazars, Georges Mouly, Lucien Neuwirth, Mme Nelly Olin,
MM. Sosefo Makapé Papilio, André Pourny, Mme Gisèle
Printz, MM. Henri de Raincourt, Gérard Roujas, Martial Taugourdeau,
Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vézinhet.
Voir le numéro :
Sénat
:
194
(1996-1997).
TRAVAUX DE LA COMMISSION
Le
mercredi 17 décembre 1997
, sous la
présidence de M. Jean-Pierre Fourcade, président
, la
commission a procédé à
l'examen du
rapport
de M. Jean-Louis Lorrain
sur la
proposition de loi
n° 194
(1996-1997) de M. Louis Souvet tendant à
diminuer les
risques de lésions auditives
lors de l'écoute
de baladeurs et de la fréquentation des discothèques.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur,
a estimé qu'après
l'adoption d'une réglementation protégeant les salariés
contre les nuisances sonores et celle de la loi du 28 mai 1996 limitant la
puissance sonore des baladeurs, la proposition de loi présentée
par M. Louis Souvet constituait une troisième étape dans
l'émergence d'une législation ayant pour objet exclusif la
protection de la santé contre les risques liés à
l'exposition à des niveaux sonores élevés.
Il a indiqué que la jeunesse subissait, non seulement les
conséquences d'un mode de vie urbain bruyant mais aussi celles de
pratiques musicales et de loisirs telles que la fréquentation des
concerts, discothèques ou " rave parties ", qui
présentent toutes des risques pour la santé. En effet, les
musiques écoutées par les jeunes, à l'exception de la
musique classique, se caractérisent le plus souvent par un niveau sonore
constamment élevé.
Dès lors, il ne s'agit plus seulement de protéger le voisinage,
mais aussi les clients des discothèques, les spectateurs assistant
à des concerts, à des répétitions ou à des
projections cinématographiques, ainsi que les consommateurs dans les
grands magasins ou centres commerciaux.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur,
a ensuite précisé les
risques encourus pour la santé, à savoir la dégradation
précoce des performances auditives et l'apparition de troubles du
système nerveux, cardio-vasculaire, ou visuel. Il a rappelé que
si ces risques étaient certains, il était cependant très
difficile de les relier avec précision à des niveaux sonores
définis au décibel près et à des durées
d'exposition homogènes pour tous les individus.
Il a affirmé que de nombreuses études montraient une augmentation
des dégradations précoces des performances auditives chez les
jeunes et l'apparition de lésions auditives en conséquence de
l'exposition à des niveaux sonores très élevés, de
l'ordre de 120 décibels. Il a également cité les
résultats d'une étude réalisée à Nancy par
le docteur Meyer-Bisch auprès de 1.500 jeunes qui montrait que les
comportements les plus dangereux pour les jeunes étaient, par ordre
croissant, la fréquentation des discothèques, l'écoute
prolongée de musique sur un baladeur et la fréquentation assidue
de concerts.
Il a souligné la nécessité d'adopter une
législation qui protège la santé des jeunes en fixant des
niveaux sonores à ne pas dépasser. Il a estimé que ces
niveaux devaient correspondre à des valeurs très en
deçà de celles qui sont observées actuellement, sans pour
autant être trop sévères afin que la législation
puisse être respectée.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur,
a indiqué que la proposition
de loi présentée par M. Louis Souvet tendait à fixer trois
niveaux sonores limites, 85 décibels pour les baladeurs destinés
aux jeunes enfants, 100 décibels plus ou moins 2,5 décibels pour
les concerts et 90 décibels pour les discothèques.
Il a rappelé qu'un projet de décret fixant à 105
décibels le niveau sonore maximum dans les concerts et
discothèques était actuellement examiné par le Conseil
d'Etat et regretté qu'il ne s'applique pas aux concerts en plein air ni
aux salles de spectacles.
Présentant son projet de conclusions,
M. Jean-Louis Lorrain,
rapporteur,
a souhaité que la législation s'applique à
tous les lieux de production et de diffusion de musique amplifiée, y
compris les concerts en plein air, les salles de spectacles, les centres
commerciaux et les salles de cinéma. Il a proposé de fixer
à 90 décibels le niveau sonore maximal dans l'ensemble de ces
lieux, en tout endroit où peut se trouver le spectateur ou le client et
a reconnu que cette valeur était très inférieure aux
pratiques actuelles. Il a donc proposé également que des
décrets puissent prévoir, dans une limite de 10 décibels,
des valeurs supérieures ou inférieures pour certains lieux en
fonction des risques induits pour la santé.
En ce qui concerne la définition des modalités du contrôle
de l'application de la loi et des sanctions encourues en cas d'infraction,
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur,
a proposé de renvoyer aux
dispositions de la loi du 31 décembre 1992 relative à la lutte
contre le bruit.
Enfin, il a souhaité compléter le dispositif prévu par la
proposition de loi par un article imposant la détention d'un
sonomètre dans tous les lieux de diffusion de musique amplifiée
ainsi que l'apposition d'un message sanitaire à l'entrée de ces
lieux.
M. Jean-Pierre Fourcade, président,
s'est félicité
des propositions formulées par le rapporteur. Il a estimé que la
fixation à 90 décibels, plus ou moins 10 décibels, du
niveau sonore maximal dans les lieux de diffusion de musique amplifiée
correspondait à une norme claire et applicable. Il a jugé
très opportune l'obligation de détention d'un sonomètre
dans les lieux de diffusion.
M. Jean Madelain
a estimé que l'adoption d'une législation
limitant les niveaux sonores dans les concerts et discothèques
était très utile, certaines pratiques musicales des jeunes
comportant des risques excessifs pour leur santé.
Mme Dinah Derycke
a approuvé la limitation à 85
décibels de la pression sonore des jouets musicaux. En revanche, elle a
formulé des réserves d'ordre pratique sur la limitation à
90 décibels dans les concerts et discothèques, se demandant si
cette valeur n'était pas trop sévère. Elle a estimé
que des mesures de prévention et d'information seraient probablement
plus efficaces.
M. René Marquès
s'est fait le défenseur des
personnes qui habitent à proximité des lieux de concerts. Il a
estimé que si le principe du respect de la liberté individuelle
pouvait conduire à tolérer que des jeunes écoutent leur
baladeur à des niveaux manifestement trop élevés, les
nuisances sonores pour le voisinage lors de concerts n'étaient pas
tolérables.
Répondant aux orateurs,
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur,
a fait
siens les propos de Mme Dinah Derycke sur la nécessité d'une
politique de prévention et rappelé que son projet de conclusions
comportait l'obligation d'apposer un message sanitaire à l'entrée
des lieux de concerts. Il a rappelé que s'il fallait protéger la
santé des jeunes, la fixation d'une norme trop sévère
serait inefficace.
Répondant à M. René Marquès, il a rappelé
que, comme certaines personnes ont un " sentiment
d'insécurité ", il existait aussi un " sentiment de
bruit " qui n'est pas nécessairement corrélé à
un niveau sonore particulier.
La commission a alors
adopté les conclusions
dans le
texte
proposé
par
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur.
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
La proposition de loi n° 194 présentée par M. Louis
Souvet et plusieurs de ses collègues tendant à diminuer les
risques de lésions auditives à l'occasion de l'écoute de
baladeurs et de la fréquentation des discothèques a pour ambition
de répondre au problème de santé publique induit par
certains comportements et pratiques de loisir, appréciés
notamment par les jeunes.
Il est en effet clairement établi que l'exposition à des niveaux
sonores élevés a des conséquences sur la santé.
Il convient donc en premier lieu d'engager des campagnes d'information pour
favoriser une prise de conscience chez les professionnels et les jeunes afin
qu'ils modifient leur comportement aussi spontanément que possible.
Les auteurs de la proposition de loi ont également estimé,
à juste titre, qu'il était de la responsabilité des
pouvoirs publics, dans l'intérêt de la santé publique, de
fixer des niveaux sonores maxima dans les discothèques et lors des
concerts.
Votre commission, sensible à leur argumentation, a adopté des
conclusions qui élargissent la portée du texte initial de la
proposition de loi.
Cet élargissement concerne à la fois l'ambition et le champ
d'application de la loi :
- l'ambition de la loi, d'abord, doit être la prévention, non
seulement des risques de lésions auditives à proprement parler,
mais aussi de tous les risques pour la santé : de nombreuses
études ont en effet démontré que l'exposition à des
niveaux sonores élevés induit des risques de dégradation
précoce des performances auditives (avec ou sans lésion), et
qu'elle a des conséquences pour le système nerveux,
cardio-vasculaire et visuel ;
- le champ d'application de la loi, ensuite, ne saurait être
réduit aux concerts, aux discothèques et aux baladeurs
destinés aux jeunes enfants. Il doit être élargi à
tous les lieux de production ou de diffusion de musique amplifiée. Les
conclusions adoptées par la commission concernent donc aussi, par
exemple, les lieux de répétition, les salles de cinéma,
les bars musicaux ou les animations musicales dans les centres commerciaux.
Le texte proposé fixe à 90 décibels le niveau sonore
maximum dans tous ces lieux : il édicte donc une règle
très souple, dont le champ d'application ne souffre aucune
dérogation de principe. La simplicité de ce dispositif lui
confère donc de surcroît une portée éducative qui ne
saurait être négligée.
I. DE LA " GÊNE DUE AU BRUIT " AUX " CONSÉQUENCES SANITAIRES DE L'EXPOSITION À DES NIVEAUX SONORES ÉLEVÉS " : DES ÉTUDES ÉPIDÉMIOLOGIQUES DE PLUS EN PLUS APPROFONDIES ET AUX RÉSULTATS CONCORDANTS
Dans l'étude des phénomènes liés
à l'exposition à des niveaux sonores élevés,
l'approche dominante s'est longtemps limitée à la
" gêne " due au " bruit ", perçu comme
une
contrainte extérieure difficilement maîtrisable.
De plus en plus cependant, des études épidémiologiques
sont consacrées aux conséquences pour la santé de
l'exposition à des niveaux sonores élevés.
Il apparaît en effet que de plus en plus de personnes, non seulement
vivent dans un environnement " bruyant ", mais adoptent des
pratiques
culturelles dont l'une des composantes est la recherche de niveaux sonores
constamment élevés.
De fait, certaines personnes, et notamment des jeunes, peuvent tout à la
fois fuir le " bruit " imposé par d'autres ou par
l'environnement et apprécier certaines musiques qui se
caractérisent à la fois par leur faible dynamique
(c'est-à-dire par la faible différence de niveau entre les
passages les moins forts et les plus forts) et par le fait qu'elles appellent
des niveaux sonores d'écoute très élevés. Ainsi,
non seulement l'oreille doit supporter des niveaux de crêtes très
élevés, qui peuvent être à l'origine de
lésions auditives, mais elle ne peut jamais vraiment se reposer entre
deux crêtes.
En conséquence, le Conseil supérieur d'hygiène publique de
France, dans ses avis du 15 septembre 1994 et du 4 avril 1996, a
souhaité alerter les pouvoirs publics et l'opinion publique sur les
risques encourus en raison de ces pratiques :
1/ Avis du 15 septembre 1994
Le conseil :
1°) estime que les pratiques d'écoute de la musique à
haut niveau sonore font courir des risques non seulement pour l'audition du
public et des utilisateurs d'appareils, mais aussi pour celle des personnes
travaillant dans ces lieux musicaux bruyants, et constate de surcroît que
ces pratiques peuvent provoquer une gêne pour l'environnement, voire des
atteintes à la santé des habitants du voisinage ;
2°) rappelle que l'écoute de la musique à haut niveau
sonore peut entraîner aussi des effets extra-auditifs sur la santé
des individus et que l'impact vibratoire touche l'ensemble du corps humain ;
3°) demande que :
- des recherches complémentaires soient poursuivies, afin
d'apporter les précisions souhaitables à la connaissance des
dégradations de l'audition pour le public et pour les utilisateurs
d'appareils qui écoutent la musique à haut niveau sonore ;
- une meilleure diffusion des connaissances sur ces risques puisse
être effectuée dans les milieux scientifiques et notamment
auprès des médecins ;
- des actions d'information soient entreprises, non seulement
auprès du grand public, mais aussi de manière spécifique
auprès des personnes fréquentant les lieux de loisirs musicaux
bruyants ou utilisant des appareils de diffusion de la musique à haut
niveau sonore ;
4°) estime nécessaire la mise en place d'une action
d'éducation pour les jeunes, avec le ministère chargé de
l'éducation nationale, dans le cadre des programmes de l'enseignement
primaire et secondaire ;
5°) souhaite qu'une action particulière soit menée pour
limiter les risques dus aux baladeurs, aussi bien en direction des utilisateurs
que vis-à-vis des fabricants et importateurs, et que soient
étudiées les mesures pouvant être envisagées pour
les cas dangereux ;
6°) souhaite que les moyens de réduire les niveaux de la
musique dans les divers lieux musicaux de loisirs tels que concerts,
discothèques, soient examinés et que des mesures puissent
être prises pour la protection de la santé.
2/ Avis du 4 avril 1996
Le conseil :
Attire l'attention sur les effets physiologiques et psychologiques possibles du
bruit qui, par son intensité, sa durée, son spectre, sa
répétition, son émergence, son moment d'apparition, touche
une large partie de la population, risque d'altérer sa santé et
constitue un problème préoccupant de santé publique.
Estime que la prévention doit être sous-tendue par une approche
sanitaire du bruit, en orientant prioritairement les règles, normes et
critères vers la protection de la santé des personnes
susceptibles d'être soumises à ces atteintes et en s'appuyant
davantage sur les acteurs de la santé publique.
Affirme que dans les zones bruyantes, il est indispensable de traiter le bruit
lui-même, si possible à la source ; le traitement médical
de ses effets, les compensations financières ou le confinement ne sont
que des palliatifs insatisfaisants pour la santé publique.
Souhaite que les recherches soient davantage orientées vers les risques
et les conséquences sanitaires, que les évaluations soient
complétées et que les études soient
développées sur les coûts sociaux, les risques auditifs et
extra-auditifs.
Estime qu'une éducation du public sur les effets du bruit sur la
santé est indispensable ; elle devrait viser à sensibiliser le
public aux risques, induire des modifications dans les comportements abusifs,
favoriser la compréhension entre les parties en cause, éclairer
davantage les décideurs et préparer l'avenir en informant mieux
les jeunes.
Les risques encourus par les jeunes sont en effet, non seulement des atteintes
ou des lésions auditives, mais aussi des troubles du système
nerveux, cardio-vasculaire ou visuel.
On sait que ainsi que l'oreille moyenne est lésée par le bruit
à des niveaux sonores très élevés, de l'ordre de
120 décibels.
Cependant, si les risques pour la santé sont certains, il est
très difficile de les relier avec précision à des niveaux
sonores et à des durées d'exposition. En effet, non seulement ces
risques varient fortement selon les individus, mais, en dehors des accidents
auditifs, il est difficile d'établir une corrélation
scientifiquement rigoureuse, c'est-à-dire quasiment mathématique,
entre des pratiques bien caractérisées (niveau et durée
d'exposition au bruit) et un chiffrage précis de la dégradation
des performances auditives.
En fait, deux éléments importants sont connus :
- de nombreuses études démontrent la fréquence et la
gravité des dégradations auditives précoces chez les
jeunes. Ainsi, une étude française réalisée par le
Professeur Buffé sur les appelés d'un régiment montre que
56 % seulement d'entre eux avaient une audition normale et que la perte
moyenne subie par ces jeunes gens âgés de 20 ans
correspondait à celle d'une personne de 25 ans exposée
quotidiennement pendant cinq ans à un niveau sonore de
80 décibels, huit heures par jour.
- une étude réalisée à Nancy montre aussi les
effets comparés sur l'audition de divers comportements culturels tels
que l'écoute de baladeurs et la fréquentation de concerts et
discothèques.
Menée par le Docteur Meyer-Bisch et publiée dans la revue
Audiology
(1996 ; 35 : 121-142), cette étude a été
menée auprès de 1.500 jeunes volontaires. Elle montre que
l'usage intensif de baladeurs et la fréquentation
régulière de concerts de rock ou de variétés est
à l'origine de pertes auditives significatives. Par ordre croissant, les
comportements les plus dangereux sont : la fréquentation de
discothèques, l'écoute prolongée de musique sur un
baladeur et la fréquentation assidue de concerts.
II. DE LA PROTECTION DE LA TRANQUILLITÉ PUBLIQUE À LA PROTECTION DE LA SANTÉ PUBLIQUE : LES FINALITÉS DE LA LÉGISLATION DOIVENT ÊTRE ENRICHIES
La législation limitant les nuisances sonores a
longtemps eu pour seul objectif de protéger la tranquillité
publique. Toutefois, depuis quelques années, l'on assiste à
l'émergence d'une législation protectrice de la santé
publique, dont la proposition de loi n° 194 constitue la
troisième étape.
Le socle le plus important de la législation protégeant les
citoyens contre le bruit réside dans la définition des pouvoirs
de police du maire. L'article L. 2212-2 du code général des
collectivités territoriales dispose en effet que la police municipale,
dont le maire est chargé sous le contrôle administratif du
représentant de l'Etat, comprend notamment
" le soin de
réprimer les atteintes à la tranquillité publique telles
que (...) le tumulte excité dans les lieux d'assemblée publique,
les attroupements, les bruits, y compris les bruits de voisinage, les
rassemblements nocturnes qui troublent le repos des habitants et tous actes de
nature à compromettre la tranquillité publique
".
Pour autant, l'exposition d'autrui à des niveaux sonores
élevés, si elle entraîne des risques sanitaires, n'est pas
impunie même si elle est consentie : les articles 222-19 et
222-20 (atteintes involontaires à l'intégrité de la
personne) ou 223-1 (des risques causés à autrui) du code
pénal, par exemple, constituent à cet égard un arsenal
législatif suffisant.
Mais il n'existait pas, jusqu'à une date récente, de
législation sanitaire spécifique concernant le bruit :
même le décret n° 95-408 du 18 avril 1995, pris sur la base
de l'article L. 1
er
du code de la santé publique, ne concerne
que "
les bruits de voisinage
" et les bruits
"
de
nature à porter atteinte à la tranquillité
publique
". En aucun cas, par exemple, l'article L.
1
er
du
code de la santé publique, qui fonde les mesures réglementaires
générales fixant les règles d'hygiène et toutes
celles qui sont de nature à protéger la santé de l'homme,
ne fait référence à la protection des individus contre
l'exposition à des niveaux sonores élevés (baladeurs,
discothèques, concerts, " rave parties "...).
En d'autres termes, et sans pour autant caricaturer l'état de notre
législation, seuls ses voisins peuvent protéger un individu
contre des nuisances sonores librement acceptées...
Certes, une loi de lutte contre le bruit, la loi n° 92-1444 du
31 décembre 1992, a eu pour ambition de
" prévenir,
supprimer ou limiter l'émission ou la propagation sans
nécessité ou par manque de précaution des bruits ou des
vibrations de nature à présenter des dangers, à causer un
trouble excessif aux personnes,
à nuire à leur
santé
ou à porter atteinte à
l'environnement ".
Mais, si la préoccupation sanitaire apparaît ainsi dans l'article
premier de cette loi, elle n'est pas la seule, et la finalité presque
trop générale de la loi de 1992, voulue par le législateur
pour combler tous les vides juridiques en la matière, n'est pas sans
présenter d'inconvénients. Ainsi, le projet de décret
actuellement à l'étude, pris sur la base de cette loi pour fixer
le niveau sonore maximal dans les concerts et les discothèques,
prévoit des dérogations qui ne sauraient être
fondées par des considérations de santé publique : il
exclut en effet de son champ d'application les concerts en plein air ou les
salles de spectacles, dans lesquels on peut souvent constater des niveaux
sonores excessifs.
En fait, la première étape de l'édification d'un corps de
règles protégeant spécifiquement la santé de
l'individu contre les nuisances sonores a pris place dans la
réglementation du travail. L'article R. 232-8 du code du travail dispose
ainsi que
" l'employeur est tenu de réduire le bruit au plus bas
niveau raisonnablement possible compte tenu de l'état des
techniques "
et que
" l'exposition au bruit doit
demeurer
à un niveau compatible avec la santé des travailleurs, notamment
avec la protection de l'ouïe "
. Et l'article R. 232-8-3
prévoit que,
" lorsque l'exposition sonore quotidienne subie par
un travailleur dépasse le niveau de 85 dB (A) ou lorsque la pression
acoustique de crête dépasse le niveau de 135 dB (A), des
protecteurs individuels doivent être mis à sa
disposition "
.
La seconde étape de l'édification d'une législation
à finalité exclusivement sanitaire résulte de l'article 2
de la loi n° 96-452 du 28 mai 1996 portant diverses dispositions d'ordre
sanitaire, statutaire et social.
D'origine parlementaire, cet article limite la puissance sonore maximale de
sortie des baladeurs musicaux commercialisés en France à une
pression acoustique de 100 décibels. Il prévoit aussi
l'apposition d'un message sanitaire sur les baladeurs, indiquant qu'
"
à pleine puissance, l'écoute prolongée du
baladeur peut endommager l'oreille de l'utilisateur
".
Enfin, la proposition de loi n° 194 présentée par M. Louis
Souvet et plusieurs de ses collègues constitue une troisième
étape dans l'enrichissement de cette législation. Elle concerne,
non seulement les baladeurs musicaux destinés aux jeunes enfants, mais
aussi et surtout les concerts et les discothèques : ce sont
là des domaines qui, à l'évidence, doivent faire l'objet
de règles spécifiques dans la mesure où l'exposition
à des niveaux sonores élevés est tolérée,
voire recherchée.
Des règles générales, applicables à tous, sont
souhaitables pour protéger les jeunes et éviter qu'un niveau
sonore excessif puisse constituer un avantage concurrentiel pour les
exploitants ou organisateurs.
Elles doivent fixer des valeurs de niveaux sonores en retrait significatif par
rapport aux pratiques actuelles, mais pas trop basses si l'on veut que la
législation soit applicable et appliquée.
Il convient en effet d'éviter les excès sans dénaturer
les pratiques culturelles des jeunes, et convaincre ces derniers de modifier
progressivement des comportements qui peuvent être nuisibles pour leur
santé.
Il est probable qu'à l'avenir, la législation française
sera relayée par la législation communautaire : en effet, le
Parlement européen a récemment adopté (JOCE du 30 juin
1996) une résolution sur le Livre vert de la Commission
européenne intitulé "
La politique future de lutte contre
le bruit
".
Le Parlement européen demande ainsi à la Commission de
" réaliser une étude sur le coût réel des
préjudices occasionnés par le bruit, notamment sur le plan de la
santé "
et l'invite à
" insérer dans la
proposition de directive-cadre des dispostions visant à limiter le
niveau sonore des appareils de musique portables (baladeurs, par exemple) ou
fixes "
.
Il est donc d'autant plus important que la France joue un rôle
précurseur en la matière.
" Les effets du bruit sur la santé "
Possibilité de conversation |
Sensation auditive |
Nbre dB |
Bruits intérieurs |
Bruits extérieurs |
Bruits des véhicules |
|
Seuil d'audibilité |
0 |
|
|
|
|
Silence inhabituel |
5 |
Laboratoire d'acoustique |
|
|
A voix chuchotée |
Très calme |
10 |
Studio d'enregistrement
|
|
|
|
|
15 |
|
Feuilles légères agitées par vent doux dans un jardin silencieux |
|
|
Calme |
20 |
Studio de radio |
|
|
|
|
25 |
Conversation à voix basse à 1,50 m |
|
|
|
|
30 |
Appartement dans quartier tranquille |
|
|
|
|
35 |
|
|
Bateau à voile |
A voix normale |
Assez calme |
40 |
Bureau tranquille dans quartier calme |
|
|
|
|
45 |
Appartement normal |
Bruits minimaux le jour dans la rue |
Transatlantique de 1ère classe |
A voix assez forte |
Bruits courants |
50 |
Restaurant tranquille Grands magasins |
Rue très tranquille |
Auto silencieuse |
|
|
60 |
Conversation normale Musique de chambre |
Rue résidentielle |
Bateau à moteur |
|
Bruyant mais supportable |
65 |
Appartement bruyant |
|
|
|
|
70 |
Restaurant bruyant musique |
Circulation importante |
Wagons-lits modernes
|
|
|
75 |
Atelier dactylo
|
|
|
Difficile |
Pénible à entendre |
85 |
Radio très puissante Atelier d'ajustage |
Circulation intense à 1 m |
Bruits de métro en marche |
|
|
95 |
Atelier de forgeage |
Rue trafic intense |
Klaxons d'autos Avions de transports à hélices à faible distance |
Obligation de crier pour se faire entendre |
Très difficilement supportable |
100 |
Scie à ruban Presse à découper de moyenne puissance |
Marteau piqueur dans une rue à 5 m |
Moto sans silencieux à 2 m |
|
|
105 |
Raboteuse |
Métro (intérieur sur certaines lignes) |
|
|
|
110 |
Atelier de chaudronnerie |
Rivetage à 10 m |
|
Impossible |
Seuil de douleur |
120 |
Banc d'essai de moteurs |
|
Moteurs d'avion à quelques mètres |
|
Exige une protection sociale |
130 |
Marteau-pilon |
|
|
|
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140 |
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Source : ministère de la santé
EXAMEN DES ARTICLES
Pour le titre de la proposition de loi, votre commission a retenu un intitulé de portée plus large que celui figurant dans le texte initial : elle a ainsi préféré la notion de diminution des " risques sanitaires liés à l'exposition à la musique amplifiée " à celle des " risques de lésions auditives lors de l'écoute de baladeurs et de la fréquentation de discothèques ".
Article premier
Prévention des risques
sanitaires liés à l'exposition à un niveau
sonore
élevé
(Intitulé du chapitre V - II du titre premier du
livre premier du code de la santé publique)
Cet article a pour objet de modifier l'intitulé du
chapitre V-II
(" Lutte contre les nuisances sonores
individuelles
") du titre
premier (" Mesures
sanitaires
générales ")
du livre premier
(" Protection
générale de la santé publique ")
du code de la
santé publique.
Ce chapitre V-II a été créé par l'article 2 de
la loi n° 96-452 du 28 mai 1996 portant diverses mesures d'ordre
sanitaire, social et statutaire. Il contient les articles L. 44-5 et
L. 44-6 consacrés à la limitation de la puissance sonore des
baladeurs musicaux.
Dans la mesure où il apparaît opportun que la nouvelle
législation proposée par la proposition de loi, qui concerne
notamment les concerts et les discothèques, figure dans ce chapitre,
l'intitulé de ce dernier
(" Lutte contre les nuisances sonores
individuelles ")
ne peut être conservé.
Votre commission a préféré retenir un intitulé de
portée plus large et qui affirme clairement la finalité sanitaire
de la législation :
" Prévention des risques sanitaires
liés à l'exposition à un niveau sonore
élevé ".
Art. 2
Limitation de la puissance sonore des
jouets musicaux
(Art. L. 44-5 du code de la santé publique)
Cet article, qui correspond à l'article premier du
texte initial de la proposition de loi, limite à 85 décibels
SPL la puissance sonore des jouets musicaux. Il s'insère dans
l'article L. 44-5 du code de la santé publique, issu de la loi
n° 96-452 du 28 mai 1996, qui limite à 100
décibels la puissance sonore des baladeurs musicaux
commercialisés en France.
L'exposé des motifs de la proposition de loi n° 194 indiquait
que son article premier avait pour objet d'abaisser de 100 à
85 décibels la puissance sonore de tous les baladeurs : en fait,
son article premier ne concerne que les baladeurs musicaux
" destinés aux jeunes enfants ".
Votre commission préfère d'ailleurs qu'il en soit ainsi. En
effet, la limitation à 100 décibels de la puissance sonore
des baladeurs n'est pas encore applicable faute de mesures
réglementaires d'application.
Conformément à la législation européenne, le projet
de décret et d'arrêté qui précise les
modalités d'application de l'article L. 44-5 a
été notifié à la Commission qui n'a pas encore
donné son avis.
En effet, la directive 83/189 CEE instituant une procédure
d'échange dans le domaine des normes techniques, qui a été
modifiée par la directive 94/10 CEE prévoit que,
préalablement à son entrée en vigueur, tout projet de
norme doit être notifié à la Commission.
Pendant trois mois, l'application de ce texte est donc suspendue, pour laisser
à tout Etat membre ou à la Commission le temps de réagir
s'il leur apparaît que cette norme peut entraver la concurrence.
Le projet d'arrêté transmis à Bruxelles définit
précisément les baladeurs musicaux, les modalités de
mesure de leur puissance sonore ainsi que les moyens d'information du
consommateur.
Il prévoit également qu'une déclaration de
conformité établie par le fabricant ou l'importateur doit
être présentée aux autorités de contrôle.
Le projet de décret sanctionne enfin de l'amende prévue pour les
contraventions de cinquième classe, assortie le cas
échéant d'une peine de confiscation, la commercialisation en
France de baladeurs musicaux d'une puissance sonore supérieure à
100 décibels.
Votre commission estime prématuré, alors que la loi du
28 mai 1996 n'est pas encore opposable, d'abaisser le niveau sonore
maximal qu'elle prévoit -et cela même s'il semble que les
fabricants le respectent d'ores et déjà pour les produits
commercialisés en France.
En revanche, il est opportun de fixer un niveau sonore maximal inférieur
à 100 décibels pour les baladeurs destinés aux jeunes
enfants. En ce qui les concerne, le niveau choisi par la proposition de loi,
dans l'article premier de son texte initial, est de 85 décibels.
Ce niveau est conforme aux conclusions du Conseil supérieur
d'hygiène publique de France (avis du 4 avril 1996), selon
lesquelles "
parmi les appareils, seuls ceux qui sont limités
à un niveau sonore maximal de 85 décibels peuvent être
considérés comme ne présentant qu'un risque auditif
très faible
".
Certes, ce sont le bon sens et le principe de précaution, plus que des
résultats d'études épidémiologiques, qui commandent
d'éviter l'écoute prolongée de baladeurs chez les jeunes
enfants et de fixer, pour ce qui les concerne, un niveau de pression sonore
inférieur à celui qui est applicable pour les adultes ou les
adolescents.
Mais point n'est besoin d'attendre la survenue d'accidents auditifs chez de
très jeunes enfants pour édicter une mesure préventive.
Aussi, votre commission a retenu à la fois le principe d'une limitation
du niveau sonore des baladeurs destinés aux enfants et le niveau
proposé par la proposition de loi.
Elle a cependant préféré substituer à la notion de
"
baladeurs musicaux destinés aux jeunes enfants
"
celle de "
jouets musicaux
" : cette dernière
référence est en effet à la fois plus large et plus
précise que la première.
Les mesures de contrôle prévues à l'article L. 44-6
pour les baladeurs s'appliqueront aussi aux jouets musicaux, de même que
l'interdiction de commercialisation en France pour les jouets qui ne seraient
pas conformes à la norme de 85 décibels.
Art. 3
Limitation du niveau sonore dans les lieux
de production et de diffusion de musique
amplifiée
(Art. L. 44-7 et art. L. 44-8 nouveaux
du code de la santé publique)
I - Art. L. 44-7 du code de la santé
publique
L'article 3 qui correspond aux articles 2, 3 et 4 du texte initial de la
proposition de loi, propose une limitation du niveau sonore dans les lieux de
diffusion et de production de musique amplifiée. Il prévoit les
modalités de contrôle et les mesures judiciaires et
administratives applicables en cas de dépassement du niveau sonore
maximal. Ces dispositions sont rassemblées dans un article L. 44-7
nouveau du code de la santé publique, inséré dans le
chapitre V-II du titre premier de son livre premier.
Le texte initial de la proposition de loi prévoyait le dispositif
suivant :
1) Dans son article 2, il créait un nouveau chapitre V-III (et non
VIII, comme le laisse à penser le texte imprimé) dans le titre
premier du livre premier du code de la santé publique. Ce chapitre
était intitulé : "
Lutte contre les nuisances sonores
dans les lieux collectifs d'écoute des musiques amplifiées,
concerts et discothèques
"). Pour des raisons pratiques, votre
commission n'a pas retenu cette proposition et a préféré
rassembler toutes les dispositions (elles sont au nombre de deux) relatives
à la musique amplifiée dans un seul chapitre (chapitre V-II)
plutôt que deux.
2) L'article 2 du texte initial de la proposition de loi
prévoyait ensuite deux dispositions relatives aux concerts et
discothèques. Il fixait ainsi à 100 2,5 décibels la
limite du niveau sonore dans les concerts et à
90 2,5 décibels celle des discothèques. Bien que
la rédaction de la proposition de loi ne soit pas strictement
symétrique pour les concerts et les discothèques, on comprend que
ce niveau sonore devait être apprécié en moyenne pendant
une durée déterminée par décret, et que les
infractions donneraient lieu au paiement d'amendes dans les deux cas.
Votre commission, tout en respectant les intentions des auteurs de la
proposition de loi, a adopté un article qui se caractérise par
plusieurs éléments :
- son champ d'application est plus large que celui du texte initial de la
proposition de loi : en effet, il concerne, non seulement les concerts et
discothèques, mais aussi tous les lieux de production, lieux de
répétition, par exemple, et de diffusion de musique
amplifiée. Il concerne donc aussi notamment les salles de cinéma
ou les animations musicales dans les centres commerciaux ou dans les bars.
Par rapport au projet de décret d'application de la loi
n° 92-1444 du 31 décembre 1992 relative à la lutte
contre le bruit, actuellement examiné par le Conseil d'Etat, il inclut
aussi les concerts en plein air et les salles de spectacles au sens de
l'ordonnance n° 45-2339 du 13 octobre 1945 ;
- il renvoie, comme le faisait la proposition de loi initiale
(art. 4), au décret la détermination de la durée
pendant laquelle doit être mesuré le niveau sonore ainsi que les
modalités de cette mesure ;
- pour les vérifications, contrôles et mesures judiciaires
applicables, il renvoie aux articles 21 et 22 et au titre V de la loi
n° 92-1444 du 31 décembre 1992 relative à la
lutte contre le bruit. En effet, par souci de simplicité et dans la
mesure où le dispositif de portée générale
prévu en 1992 pour la lutte contre le bruit est très complet, il
n'est pas apparu utile à votre commission d'y déroger.
Il n'est donc plus prévu, comme dans le texte initial de la proposition
de loi, que des vérifications seront faites "
deux fois par
an
". Ce dispositif s'analysait comme une injonction faite aux
services de contrôle ; il aurait pu être source de contentieux et
revêtait de surcroît peu de portée pratique dans certains
cas (concerts, par exemple). La commission n'a donc pas jugé utile de le
retenir ;
- en ce qui concerne le niveau sonore maximal, le texte adopté par
la commission retient une norme simple, à savoir 90 décibels
A en moyenne, sur une durée prévue par décret, pour tous
les lieux de production ou de diffusion de musique amplifiée. Cette
valeur de 90 décibels est très en deçà des
pratiques actuelles. Dans la mesure où elle ne se justifie que dans un
souci de protection de la santé publique, le texte adopté par la
commission prévoit la possibilité de dérogations,
établies par décret, pour certains lieux, en fonction des risques
induits pour la santé. Votre commission a souhaité limiter
à 10 décibels l'ampleur de ces dérogations.
La proposition de loi prévoyait aussi que les mesures seraient
effectuées "
dans l'axe des enceintes
" ou
"
à l'endroit le plus défavorable pour le
client
" : dans la mesure où l'application de cette disposition
pourrait générer d'inutiles contentieux, votre commission a
préféré retenir la référence à
"
tout endroit où peuvent se trouver le public ou les
clients
".
3) Le texte initial de la proposition de loi prévoyait, en son
article 3, que les frais de contrôle resteraient à la charge
des établissements.
Cette disposition doit être mise en regard de l'article 2 de la loi
n° 92-1444 précitée, qui évoque " les
conditions dans lesquelles l'autorité administrative peut
vérifier ou faire vérifier par ces organismes,
aux frais du
détenteur
, la conformité des objets et dispositifs aux
prescriptions mentionnées au deuxième alinéa ".
Votre commission a retenu ce principe dans le texte proposé pour le
troisième alinéa de l'article L. 44-7 du code de la
santé publique.
II - Art. L. 44-8 du code de la santé publique
L'article 3 des conclusions de votre commission prévoit que les
lieux de diffusion de musique amplifiée doivent être
équipés de sonomètres normalisés, dont les
caractéristiques seront prévues par décret. Il impose
également qu'un message sanitaire soit affiché à
l'entrée de ces lieux.
L'obligation de détention d'un sonomètre, également
proposée par la proposition de loi n° 2733 (dixième
législature) déposée à l'Assemblée nationale
par M. Claude Gaillard, député ("
Proposition de loi
rendant obligatoire l'installation d'un sonomètre dans tous les lieux de
diffusion de musique amplifiée et fixant les normes de mesure des
niveaux sonores
") constitue à la fois une mesure de
portée pédagogique et une disposition tendant à rendre les
contrôles plus aisés, les sonomètres pouvant être
enregistreurs.
Responsabilisant les professionnels, cette mesure complétera celle qui
concerne les messages sanitaires destinés aux clients ou au public afin
qu'ils modifient progressivement leurs comportements dans
l'intérêt de leur santé.
Sous réserve de ces observations, votre commission vous demande
d'adopter la proposition de loi dans le texte résultant de ses
conclusions tel qu'il est inclus dans le présent rapport.
CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
PROPOSITION DE LOI TENDANT À DIMINUER LES RISQUES
SANITAIRES LIES À L'EXPOSITION À LA MUSIQUE AMPLIFIÉE
Article premier
L'intitulé du chapitre V-II du titre Ier du livre Ier du code de la santé publique est ainsi rédigé : " Prévention des risques sanitaires liés à l'exposition à un niveau sonore élevé "
Art. 2
I- Il est inséré, après le premier
alinéa de l'article L. 44-5 du code de la santé publique, un
alinéa ainsi rédigé :
" Pour les jouets musicaux, cette valeur est limitée à 85
décibels S.P.L.. "
II- Dans le troisième alinéa de cet article, les mots :
" ou jouets " sont insérés après les mots :
" Les baladeurs ".
Art. 3
Après l'article L. 44-6 du code de la santé
publique, il est inséré deux articles L. 44-7 et
L. 44-8 ainsi rédigés :
"
Art. L. 44-7
. En vue de prévenir les risques pour la
santé, le niveau sonore dans les lieux de production ou de diffusion,
permanente ou non, de musique amplifiée, ne peut dépasser des
niveaux continus équivalents de pression sonore de 90 décibels A
pendant une durée déterminée par décret et en tout
endroit où peuvent se trouver le public ou les clients.
" Dans la limite de 10 décibels, des décrets peuvent
prévoir des valeurs supérieures ou inférieures pour
certains lieux en fonction des risques induits pour la santé.
" Les contrôles de l'application du présent article sont
effectués, aux frais des établissements ou des organisateurs,
dans les conditions prévues aux articles 21 et 22 de la loi n°
92-1444 du 31 décembre 1992 relative à la lutte contre le bruit.
Les mesures judiciaires et administratives applicables sont celles
prévues au titre V de ladite loi.
" Un décret précise les modalités de mesure du niveau
sonore dans les lieux de production ou de diffusion de musique amplifiée.
"
Art. L. 44-8
. Les lieux de diffusion de musique amplifiée
sont équipés de sonomètres normalisés, dont les
caractéristiques sont prévues par décret.
" Un message sanitaire destiné aux clients ou au public est
affiché à l'entrée de ces lieux. "