INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Contrairement à l'image traditionnelle d'une gendarmerie principalement
tournée vers les campagnes, l'Arme apparaît aujourd'hui en prise
avec tous les grands problèmes que connaît la
société française : phénomènes d'exclusion
en particulier dans les quartiers difficiles, développement de nouvelles
formes de criminalité (trafic de stupéfiants, menaces
terroristes, atteintes à l'environnement...), intensification de la
circulation des personnes aux frontières...
Avec le plan d'action " gendarmerie 2002 ", présenté au
début de l'année 1997, la gendarmerie a su prendre la mesure de
ces évolutions et se doter d'un projet ambitieux et mobilisateur. Ce
plan n'emporte aucun bouleversement des missions exercées par l'Arme, il
s'inscrit dans la continuité des priorités tracées par la
loi d'orientation et de programmation relative à la
sécurité de 1995 et de la loi de programmation militaire de 1996.
Ainsi la gendarmerie s'assigne quatre grands objectifs :
- assurer davantage de proximité et de professionnalisme dans la
sécurité de la population ;
- favoriser la cohésion des personnels au sein de l'institution ;
- organiser une coopération accrue avec les autres forces
chargées de la sécurité en France et à
l'étranger ;
- enfin, devenir un modèle de réforme de l'Etat.
Pour satisfaire ces grands objectifs, la gendarmerie envisage une série
d'actions concrètes qui peuvent se ranger sous quatre volets : la
rénovation des missions traditionnelles, le renforcement des missions
nouvelles, l'adaptation de l'organisation et, enfin l'intensification de la
coopération.
La gendarmerie aura-t-elle les moyens de mettre en oeuvre ces adaptations au
moment même où les moyens financiers lui sont comptés ?
Votre rapporteur souhaiterait apporter son soutien aux grandes orientations
adoptées par la gendarmerie sans éluder cependant les
difficultés que soulève la volonté d'obtenir de meilleurs
résultats dans un contexte budgétaire très contraint.
I. UN BUDGET EN STAGNATION
Les crédits destinés à la gendarmerie
progresseront de 3,5 %, passant de 21 320 millions de francs en 1997 à
22 071,4 millions de francs dans le projet de loi de finances soumis
aujourd'hui au Parlement.
Cette évolution pourrait surprendre au regard de la contraction du
budget de la défense pour 1998 de 3,3 % par rapport à la loi de
finances initiale pour 1997 (de 190,9 milliards de francs à 184,7
milliards de francs) si elle n'était pour une large part due à un
simple effet d'optique : l'inscription en loi de finances des crédits
budgétaires destinés au financement de dépenses
précédemment supportées par les fonds de concours
autoroutiers.
A structure constante, la croissance des crédits dévolus à
la gendarmerie est ramenée à une plus juste et modeste proportion
:
0,9 %.
La progression des crédits de la gendarmerie en 1998 recouvre en fait
deux évolutions contrastées : une hausse de 4 % des
dépenses ordinaires et une contraction de 3,05 % des dépenses en
capital (titres V et VI).
A. L'AUGMENTATION EN TROMPE-L'OEIL DES DÉPENSES ORDINAIRES
1. Un titre III sous contrainte
Titre III |
Crédits 1997 |
Crédits 1998 |
Variation |
31.03 Rémunérations |
14 066,9 |
14 720,4 |
4,6 % |
33.90 Cotisations socialese |
963,3 |
989,2 |
2,7 % |
33.91 Prestations sociales |
504,4 |
472,8 |
- 6,2 % |
34.06 Fonctionnement dont : |
3 159,2 |
3 309,2 |
4,7 % |
art. 10 Fonctionnement des for-mations |
1 632,9 |
1 707,4 |
4,5 % |
art. 20 Locations immobilières |
1 342,9 |
1 418,4 |
5,6 % |
art. 30 Frais généraux du service du Génie |
9,1 |
9,1 |
- |
art. 41 Dépenses centralisées de soutien |
133,2 |
133,2 |
- |
art. 50 Dépenses informatiques |
41,1 |
41,1 |
- |
34.07 Indemnités journalières d'absence temporaire |
266,1 |
268,7 |
0,9 % |
34.10 Alimentation |
199,7 |
212,1 |
6,2 % |
Total |
19 159,6 |
19 972,4 |
4,2 % |
a) Les rémunérations et les charges sociales : une progression très réduite
Les rémunérations et charges sociales
représentent 81 % du titre III. Les dotations progressent de 4,2 % mais
de 1,4 % si l'on ne tient pas compte de la budgétisation de 2 200
emplois de sous-officiers et de 400 emplois d'appelés sur les
autoroutes, soit une charge proche de 353 millions de francs assumée les
années précédentes, par le biais des fonds de concours,
par les sociétés concessionnaires d'autoroutes.
En fait la hausse, somme toute réduite, de ce poste, repose
principalement sur la création de 230 emplois d'officiers, soit un
coût de 70 millions de francs. En revanche, les mesures de revalorisation
indiciaire touchent, cette année, à leur terme (11 millions de
francs au titre d'une tranche tardive de la bonification indiciaire
arrêtée pour l'année 1994...). Quant aux requalifications
des emplois, elles se traduisent en fait par des économies
budgétaires : ainsi la création de 565 emplois de soutien en
contrepartie de la suppression équivalente d'emplois de sous-officiers
de gendarmerie se solde par une réduction des dépenses de
rémunération de 17 millions de francs.
b) L'insuffisance des ressources destinées au fonctionnement des unités
Les crédits de fonctionnement de la gendarmerie
s'élèvent à 3 790 millions de francs pour 1998
(chapitres 34-06, 34-07, 34-10), soit une hausse de 4,5 % par rapport au budget
voté de 1997. Si l'effort n'est pas négligeable, il demeure
insuffisant pour résorber les déficits structurels liés
aux dépenses de maintien de l'ordre.
L'augmentation de la dotation permet seulement, en effet, de couvrir, en
premier lieu, une part des dépenses liées à la suppression
des fonds de concours autoroutiers et, ensuite, les besoins liés aux
locations immobilières. Ce dernier poste de dépenses laisse en
effet apparaître, depuis plusieurs années, un déficit
structurel. Même si une meilleure maîtrise des loyers avait permis
de stabiliser le déficit en 1994 et 1995, celui-ci demeurait à un
niveau élevé de l'ordre de 300 millions de francs. C'est pourquoi
les budgets 1996 et 1997 avaient prévu une mesure d'ajustement aux
besoins (respectivement 171,2 millions de francs et 120,9 millions de francs).
Le projet de loi de finances pour 1998 continue dans cette voie avec une mesure
de 75,7 millions de francs.
Les crédits-loyers ont-ils pour autant retrouvé un niveau
suffisant ? On peut en douter. Certes, la rationalisation des emplois de
soutien conduira à terme à une diminution du parc de logements
dans la mesure où les personnels intégrés dans le nouveau
corps ne sont pas logés par la gendarmerie. Cependant, dans
l'immédiat deux facteurs pèseront sur ce poste de dépenses
: d'une part le paiement des redevances locatives pour l'occupation de certains
sites sur lesquels sont implantés les relais du réseau de
télécommunications Rubis, d'autre part, la
nécessité de prendre à bail temporairement des locations
externes pour répondre aux mouvements de personnels consécutifs
aux réformes en cours.
Ce sont toutefois les
dépenses de maintien de l'ordre
hors
indemnités journalières d'absence temporaire qui posent
aujourd'hui le problème le plus préoccupant. En effet la dotation
pour ce poste a été reconduite d'année en année au
même niveau alors que son montant -133 millions de francs-
apparaît très en-deçà des besoins constatés :
230 millions de francs en 1996 et, sans doute, 300 millions de francs en 1997.
Par ailleurs, la
dotation en carburants et combustibles
pour la
gendarmerie a été évaluée au plus juste (255
millions de francs) : elle assurera le maintien de l'activité
opérationnelle des unités au niveau atteint en 1997. La poursuite
de la diésélisation du parc automobile permet, dans une certaine
mesure, d'atténuer les conséquences d'une dotation très
serrée.