N° 390

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2023-2024

Enregistré à la Présidence du Sénat le 6 mars 2024

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2023-389 du 24 mai 2023 modifiant les dispositions du code général de la propriété des personnes publiques relatives à la Polynésie française
(procédure accélérée),

Par M. Thani MOHAMED SOILIHI,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. François-Noël Buffet, président ; M. Christophe-André Frassa, Mme Marie-Pierre de La Gontrie, MM. Marc-Philippe Daubresse, Jérôme Durain, Philippe Bonnecarrère, Thani Mohamed Soilihi, Mme Cécile Cukierman, MM. Dany Wattebled, Guy Benarroche, Mme Nathalie Delattre, vice-présidents ; Mmes Agnès Canayer, Muriel Jourda, M. André Reichardt, Mme Isabelle Florennes, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Philippe Bas, Mme Nadine Bellurot, MM. Olivier Bitz, François Bonhomme, Hussein Bourgi, Ian Brossat, Christophe Chaillou, Mathieu Darnaud, Mmes Catherine Di Folco, Françoise Dumont, Jacqueline Eustache-Brinio, Françoise Gatel, Laurence Harribey, Lauriane Josende, MM. Éric Kerrouche, Henri Leroy, Stéphane Le Rudulier, Mme Audrey Linkenheld, MM. Alain Marc, Hervé Marseille, Michel Masset, Mmes Marie Mercier, Corinne Narassiguin, M. Paul Toussaint Parigi, Mme Olivia Richard, M. Pierre-Alain Roiron, Mmes Elsa Schalck, Patricia Schillinger, M. Francis Szpiner, Mmes Lana Tetuanui, Dominique Vérien, M. Louis Vogel, Mme Mélanie Vogel.

Voir les numéros :

Sénat :

279 et 391 (2023-2024)

L'ESSENTIEL

Prise sur le fondement de l'article 74-1 de la Constitution, l'ordonnance n° 2023-389 du 24 mai 2023 vient traduire dans le code général de la propriété des personnes publiques (CG3P) les principes fixés par la loi organique n° 2019-706 du 5 juillet 2019 concernant la répartition des compétences et le régime d'applicabilité du droit domanial en Polynésie française.

Considérant cette ordonnance comme un facteur d'amélioration de la cohérence et de la lisibilité des règles de droit domanial applicables en Polynésie française, la commission a approuvé sans modification sa ratification et le parachèvement de l'entreprise de codification, amorcée en 2016, des règles du CG3P relatives à l'outre-mer.

I. UNE MISE EN COHÉRENCE DU DROIT DOMANIAL APPLICABLE EN POLYNÉSIE FRANÇAISE, RENDUE NÉCESSAIRE PAR LA RÉFORME DE 2019

A. ENTRE L'ÉTAT ET LA POLYNÉSIE FRANÇAISE : DES SOCLES DE COMPÉTENCES DISTINCTS, UNE CLARIFICATION TARDIVE

La Polynésie française est une collectivité d'outre-mer régie par l'article 74 de la Constitution. Fixé par la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, son statut lui confère le pouvoir d'édicter des normes relevant du domaine de la loi. Marqué par une autonomie renforcée, ce statut encadre strictement le domaine d'intervention de l'État, qui conserve des compétences d'attribution limitativement énumérées tandis que la Polynésie française détient la compétence normative de droit commun.

Jusqu'à l'intervention de la loi organique n° 2019-706 portant modification du statut d'autonomie de la Polynésie française, la multiplicité des régimes applicables et des catégories de domaine rendait peu lisible le droit domanial applicable sur ce territoire.

1. La coexistence de différentes catégories de domaines appartenant à l'État et au territoire polynésien

La Polynésie française, constituée de 118 îles d'origine volcanique ou corallienne, réparties en cinq archipels, s'étend sur une superficie comparable à celle de l'Europe, avec une surface émergée de 4 200 km².

Historiquement, le domaine public de ce territoire était exclusivement détenu par l'État. La situation a évolué en 1977 avec la reconnaissance d'un premier domaine public polynésien puis, en 1996, avec le transfert du domaine public maritime de l'État vers les autorités polynésiennes1(*).

Ce partage du domaine polynésien est aujourd'hui consacré à l'article 46 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 précitée, qui énonce que « l'État, la Polynésie française et les communes exercent, chacun en ce qui le concerne, leur droit de propriété sur leur domaine public et leur domaine privé. ».

Cependant, bien que cet article confirme l'exercice par l'État de son droit de propriété, il ne lui accorde pas pour autant une compétence normative sur son propre domaine.

Domaines public et privé : définitions et régimes juridiques

Les biens immobiliers ou mobiliers, corporels ou incorporels, appartenant à l'État se répartissent entre :

1/ Son domaine public, qui comprend les biens qui sont affectés à l'usage direct du public, ou à un service public, dans la mesure où ils font l'objet d'un aménagement indispensable à l'exécution des missions de service public. Ces biens sont, compte tenu de leur intérêt public, protégés par un régime exorbitant qui assure leur inaliénabilité et leur imprescriptibilité.

Le domaine public de l'État en Polynésie française comprend divers bâtiments et installations abritant des aérodromes, des palais de justice, des ports, des bases militaires ou des écoles.

2/ Son domaine privé, qui regroupe, par défaut, tous les biens de l'État n'appartenant pas au domaine public. Font également partie du domaine privé par détermination de la loi les immeubles à usage de bureaux, les réserves foncières, les chemins ruraux, les bois et forêts relevant du régime forestier. Ces biens sont principalement soumis aux règles du droit privé. Du fait de leur appartenance à une personne morale de droit public, ils ont toutefois la particularité d'être incessibles à vil prix et insaisissables.

Le domaine privé de l'État représente, en Polynésie française, une superficie d'environ 12,5 km².

Quant au domaine des établissements publics nationaux présents en Polynésie, il comprend notamment des propriétés détenues par Météo-France, l'Institut français de recherches pour l'exploitation de la mer (IFREMER), l'Office national des anciens combattants et l'Office français de la biodiversité.

2. Jusqu'en 2019, un régime juridique du domaine de l'État en Polynésie française dont la lisibilité restait à parfaire

En matière domaniale, jusqu'en 2019, seul le « domaine public de l'État » figurait parmi les compétences reconnues à l'État par l'article 14 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 précitée et bénéficiait du régime de l'applicabilité de plein droit.

Une lecture a contrario de ces dispositions laissait entendre que l'État n'était pas compétent en Polynésie française pour établir les règles relatives à son domaine privé et à celui de ses établissements publics. Cette compétence revenait donc par défaut aux institutions de la Polynésie française, ce qui présentait un caractère inhabituel au regard des régimes en vigueur dans les autres collectivités d'outre-mer.

Comparaison du cadre juridique tenant au domaine de l'État dans les collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie en 2018

 

Domaine public de l'État

Domaine privé de l'État

Compétence de l'État

Applicabilité du CG3P

Compétence de l'État

Applicabilité du CG3P

Saint-Pierre-et-Miquelon

Oui

De plein droit

Oui

De plein droit

Saint-Barthélemy

Oui

De plein droit

Oui

De plein droit

Saint-Martin

Oui

De plein droit

Oui

De plein droit

Wallis et Futuna

Oui

Sur mention expresse

Oui

Sur mention expresse

Nouvelle-Calédonie

Oui

De plein droit

Oui

Sur mention expresse

Polynésie française

Oui

De plein droit

Non

-

Source : Livre V du CG3P applicable au 31 décembre 2018.

Bien qu'ayant la compétence théorique pour légiférer par des lois de pays sur le domaine privé de l'État ou de ses établissements publics, la collectivité de Polynésie française n'a jamais concrétisé cette possibilité. Une tentative en ce sens a certes été initée avec le dépôt en 2011 d'un projet de loi du pays portant sur le code de la propriété publique en Polynésie française, mais il n'a pas abouti.

Dès lors, les domaines privés de l'État et de ses établissements publics étaient en pratique régis, à l'instar du domaine public de l'État, par des dispositions issues principalement l'ancien code du domaine de l'État, maintenues en vigueur à titre dérogatoire pour les collectivités ultramarines lors de l'adoption en 2006 du CG3P métropolitain2(*).

Le projet d'un code de la propriété publique en Polynésie française

En 2011, le gouvernement polynésien a présenté un projet de loi du pays visant à établir un code de la propriété publique en Polynésie française. Ce projet visait à consolider les règles régissant à la fois les domaines public et privé de la collectivité, ainsi que les domaines privés de l'État et de ses établissements publics.

Dans une démarche de conciliation avec le droit métropolitain, l'article LP. 245 de ce projet prévoyait que, en l'absence de dispositions contraires, les règles relatives au domaine privé de l'État et de ses établissements publics maintenues en vigueur par l'ordonnance du 21 avril 2006 relative à la partie législative du code général de la propriété des personnes publiques demeuraient applicables.

Ce projet de loi, émaillé de controverses, n'a finalement pas abouti. Était notamment prévue une procédure visant à intégrer au domaine de la collectivité les biens fonciers dépourvus de titre de propriété privée. Cette approche entrait en conflit avec le système coutumier polynésien, fondé sur la tradition orale, présageant en cela une difficile identification des détenteurs des droits de propriété.

3. La réforme du droit domanial des outre-mer de 2016 : un rendez-vous manqué

Alors que d'aucuns jugeaient le régime juridique de la propriété publique outre-mer « tellement dérogatoire qu'il en [devenait] illisible et injustifiable »3(*), la réforme de 2016 est intervenue avec l'ambition d'harmoniser les règles applicables4(*).

L'ordonnance n° 2016-1255 du 28 septembre 20165(*) a, à cette fin, réorganisé la cinquième partie législative du CG3P relative à l'outre-mer en sept livres, codifiant ainsi les règles applicables aux domaines public et privé de l'État dans chacune des collectivités concernées.

La codification de dispositions relatives au domaine privé de l'État a néanmoins dû être abandonnée pour la Polynésie française à la suite de l'avis du Conseil d'État du 15 septembre 2016, aux termes duquel a été retenue une interprétation stricte de la compétence de l'État sur son seul domaine public et celui de ses établissements publics6(*).

B. UNE CLARIFICATION OPPORTUNE DES COMPÉTENCES DE L'ÉTAT SUR SON DOMAINE EN POLYNÉSIE PAR LA LOI ORGANIQUE DE 2019

1. Une clarification de la répartition des compétences entre l'État et la Polynésie française en matière domaniale

La loi organique n° 2019-706 portant modification du statut d'autonomie de la Polynésie française a entendu combler ce qui apparaissait comme une omission, en étendant expressément la compétence de l'État à son domaine privé ainsi qu'au domaine public et privé de ses établissements publics en Polynésie française.

Modifié par cette loi organique, l'article 14 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 précitée prévoit désormais que les autorités de l'État sont compétentes en ce qui concerne le « domaine public et privé de l'État et de ses établissements publics ».

Consultée sur le projet de loi organique en 2019, l'assemblée de Polynésie française avait émis un avis favorable sur cette évolution, tandis que la commission des lois du Sénat jugeait cette clarification de nature à « parfaire la coordination entre l'État et le pays »7(*).

2. Une extension subséquente du régime de l'applicabilité de plein droit

À l'initiative de la commission des lois du Sénat, le régime de l'applicabilité de plein droit a été étendu, par la même loi organique de 2019, à l'ensemble des dispositions relatives aux domaines public et privé de l'État et de ses établissements publics.

Répartition des compétences et régime d'applicabilité des dispositions législatives et réglementaires en Polynésie française

L'article 13 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française confie une compétence de droit commun à la Polynésie française, tandis que les autorités de l'État ne bénéficient, pour leur part, que d'une compétence d'attribution

Les compétences de l'État sont limitativement énumérées à l'article 14 de cette loi organique et concernent principalement les domaines régaliens. Dans ces matières, les dispositions législatives et réglementaires ne sont, en principe applicables en Polynésie française que si elles comportent une mention expresse à cette fin, conformément au principe de spécialité législative.

L'article 7 de cette loi organique énumère les domaines pour lesquels, par dérogation à ce principe, les lois et actes réglementaires sont applicables de plein droit en Polynésie française. Cette liste découle de la jurisprudence relative aux « lois de souveraineté », désignant les textes destinés, en raison de leur objet même, à régir l'ensemble du territoire de la République.

Ainsi, depuis 2019, les dispositions législatives et réglementaires relatives aux domaines public et privé de l'État et de ses établissements publics sont applicables de plein droit, sans qu'une mention expresse ne soit nécessaire.

3. Une réforme à la portée limitée du fait de l'absence d'actualisation des dispositions du code général de la propriété des personnes publiques

En dépit de l'évolution de la loi statutaire de la Polynésie française en 2019, les dispositions du CG3P applicables à la collectivité n'avaient toujours pas fait l'objet d'une actualisation. En conséquence, la nouvelle répartition des compétences et la transition vers le régime d'applicabilité de plein droit qui l'a accompagnée sont demeurées, jusqu'à présent, lettre morte.

En effet, pour produire des effets juridiques et devenir pleinement applicable, cette réforme implique une mise en cohérence globale des dispositions du livre VI du code général de la cinquième partie du CG3P, consacré à la Polynésie française.

Quatre ans plus tard, l'ordonnance du 24 mai 2023 que le présent projet de loi tend à ratifier a procédé aux adaptations nécessaires du droit domanial applicable en Polynésie française.

La commission tient à souligner le caractère tardif de cette ordonnance au regard des enjeux particulièrement prégnants d'intelligibilité et de lisibilité du droit en Polynésie française, maintes fois mis en lumière.

II. L'ORDONNANCE SOUMISE À RATIFICATION PROCÈDE, DE FACON TARDIVE MAIS COHÉRENTE, AUX ADAPTATIONS NÉCESSAIRES DU CODE GÉNÉRAL DE LA PROPRIÉTÉ DES PERSONNES PUBLIQUES

A. UNE ORDONNANCE PRISE SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE 74-1 DE LA CONSTITUTION, DONT LA RATIFICATION DOIT INTERVENIR RAPIDEMENT

L'ordonnance du 24 mai 2023 a été prise sur le fondement de l'habilitation permanente conférée au Gouvernement par l'article 74-1 de la Constitution. Elle doit, sous peine de caducité, être ratifiée par le Parlement avant le 25 novembre 2024.

L'habilitation permanente prévue par l'article 74-1 de la Constitution

L'article 74-1 de la Constitution prévoit un mécanisme permanent d'habilitation permettant au Gouvernement d'intervenir par ordonnances, dans les matières relevant de la compétence de l'État, pour étendre et adapter les dispositions de nature législative en vigueur en métropole aux collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution et à la Nouvelle-Calédonie.

Cette faculté est doublement encadrée sur le plan procédural8(*) :

- d'une part, l'ordonnance ne peut être prise qu'après avis de l'assemblée délibérante de la collectivité concernée ;

- d'autre part, elle doit être ratifiée par le Parlement, sous peine de caducité, dans un délai de dix-huit mois à compter de sa publication.

Interrogée par le rapporteur, l'assemblée de Polynésie française a indiqué avoir été saisie du projet d'ordonnance, sans avoir toutefois été en mesure de rendre son avis en raison du contexte d'élections territoriales polynésiennes (qui se sont tenues les 16 et 30 avril 2023).

Dans ces conditions, l'avis de l'assemblée a été réputé favorable, en l'absence de réponse à l'issue d'un délai d'un mois. Au cours de ses travaux, conduits dans un esprit d'ouverture et de concertation, le rapporteur s'est donc attaché à recueillir l'avis et les observations des représentants polynésiens.

B. UNE ACTUALISATION COHÉRENTE DES DISPOSITIONS DU CODE GÉNÉRAL DE LA PROPRIÉTÉ DES PERSONNES PUBLIQUES, DANS LE PROLONGEMENT DE LA RÉFORME DE 2019

1. Une codification fidèle aux principes fixés par la loi organique de 2019

L'ordonnance du 24 mai 2023 réforme le chapitre du CG3P consacré à la Polynésie française, dont le premier article (L. 5611-1) énonce désormais que les dispositions du code sont « applicables de plein droit en Polynésie française au domaine public et privé de l'État et de ses établissements publics », sous réserve des adaptations prévues par le même chapitre.

Par conséquent, est abrogé l'article L. 5611-2 qui énumérait par mention expresse les articles du code applicables à la Polynésie française, conformément à la technique du « compteur Lifou ».

Les compteurs Lifou

Les « compteurs Lifou » constituent une technique de rédaction des dispositions d'application outre-mer des textes législatifs et réglementaires visant à assurer la traçabilité de l'extension des dispositions normatives et de leurs modifications pour les collectivités soumises au principe de spécialité législative.

En effet, dans sa décision d'assemblée du 9 février 1990, « Élections municipales de Lifou »9(*), le Conseil d'État a jugé qu'une loi ou qu'un décret modifiant le droit en vigueur dans une collectivité d'outre-mer doit comporter la mention expresse d'application outre-mer. À défaut, le texte antérieur demeure en vigueur dans le territoire concerné.

Cette jurisprudence a fait évoluer les règles d'écriture, induisant des rédactions différentes de cette mention en fonction de l'auteur du texte qui ont engendré des incohérences et incertitudes sur le droit applicable.

Afin d'harmoniser les pratiques, le Conseil d'État, dans un avis du 7 janvier 201610(*), a proposé au Gouvernement, qui l'a accepté, l'adoption d'une technique de rédaction désignée comme « compteur Lifou », du nom de cette commune française de la Nouvelle-Calédonie.

Désormais, la disposition du texte applicable dans une collectivité soumise au principe de spécialité est signalée par la mention que ce texte est désormais applicable « dans sa rédaction résultant de la loi (ou du décret) n° ...du ... ». Chaque modification ultérieure est opérée par une modification de la référence du texte. Dans les codes figurent désormais un tableau indiquant, en deux colonnes, pour chaque collectivité concernée, les dispositions du code qui sont étendues et la rédaction dans laquelle elles sont applicables.

2. La mise en oeuvre des adaptations techniques nécessaires au respect des spécificités et des compétences polynésiennes

En corollaire de la mise en oeuvre d'un régime d'applicabilité de plein droit, les articles 2, 3 et 4 de l'ordonnance visent à adapter au cadre administratif et juridique de la Polynésie française les règles de droit commun applicables en matière d'acquisition, de gestion et de cession des biens du domaine de l'État.

À cet effet, quinze nouveaux articles sont insérés au livre VI de la cinquième partie du CG3P, qui tendent à couvrir trois principaux enjeux.

a) Écarter l'application de règles domaniales relevant de compétences réservées à la Polynésie française

La loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 précitée réserve, en ses articles 19 et 47, à la Polynésie française une compétence exclusive pour recourir à certaines méthodes d'acquisition de biens.

Tendant à éviter tout empiètement sur le domaine de compétence de la Polynésie française, l'article 2 de l'ordonnance exclut, dès lors, expressément l'application par l'État de ces procédures d'acquisition, dont la dation en paiement, le droit à la préemption ou encore les procédés d'acquisition à titre gratuit que sont les biens sans maîtres, les successions en déshérence et les sommes et valeurs prescrites.

Dans la même logique, les articles 3 et 4 de l'ordonnance écartent également les dispositifs relatifs, respectivement, à la gestion et à la cession des biens acquis selon les procédés susmentionnés.

En tout état de cause, les autres mesures d'acquisition par l'État à titre gratuit ou selon des procédés de contrainte s'appliquent en Polynésie française selon les règles de droit commun. Il en va notamment ainsi des règles d'expropriation.

Dispositions du CG3P non-applicables en Polynésie française

Mesure exclue

Disposition du CG3P visée

Fondement juridique

Acquisition

Gestion

Cession

Dation en paiement

L'article L.1111-5 fait référence à l'article 1716 bis du CGI qui énumère les cas où les droits de mutation à titre gratuit et le droit de partage peuvent être acquittés à l'Etat par dation en paiement.

   

La fiscalité relève de la compétence de la Polynésie française en tant qu'elle n'a pas été attribuée à l'État par l'article 14 de la loi organique statutaire.

L'article LP. 12 de la loi du pays n° 2021-53 du 21 décembre 2021 relative au domaine privé de la Polynésie française instaure ce procédé de dation en paiement, dans les conditions définies par le code des impôts polynésiens (art. LP 742-1 à 742-5).

Droit de préemption, à l'exception des biens mobiliers patrimoniaux

Les articles L. 1112-3 à L. 1112-5 prévoient le recours au droit de préemption comme mode d'acquisition des biens immobiliers.

L'article L. 1112-8 concerne le droit de préemption mobilier de la Bibliothèque nationale de France.

   

L'article 19 de la loi organique statutaire donne expressément la compétence à la Polynésie française, et plus particulièrement au conseil des ministres (article 91, 20°), pour exercer un droit de préemption immobilier « dans le but de préserver l'appartenance de la propriété foncière au patrimoine culturel de la population de la Polynésie française et l'identité de celle-ci, et de sauvegarder ou de mettre en valeur les espaces naturels ».

Est toutefois préservée la possibilité pour l'État de préempter, pour son propre compte, des biens mobiliers à valeur culturelle. Les dispositions pertinentes du code du patrimoine auxquelles renvoie l'article L. 1112-7 du CG3P sont, en effet, applicables en Polynésie française (article L. 750-1 du code du patrimoine).

Successions en déshérence

L'article L. 1122-1 habilite l'Etat à prétendre aux successions en déshérence.

 

L'article L. 3211-9 encadre l'aliénation par l'Etat des biens immobiliers et mobiliers provenant de successions en déshérence.

L'article 47 de la loi organique du 27 février 2004 inclut dans le domaine de la Polynésie française les biens des personnes qui décèdent sans héritier ou dont les successions ont été abandonnées.

Ce procédé est précisé dans la loi de pays n° 2021-53 du 21 décembre 2021 relative au domaine privé de la Polynésie française.

Biens sans maîtres

Les articles L. 1123-1 à L. 1123-3 définissent les biens sans maître et fixent la procédure d'acquisition de ces biens.

L'article L. 2222-20 est relatif aux conditions de restitution des biens sans maître qui relèvent de la compétence de la Polynésie française.

L'article L. 3211-8 est relatif aux cessions à l'amiable des immeubles à destination agricole au titre des biens sans maître.

L'article 47 de la loi organique de 2004 inclut dans le domaine de la Polynésie française les biens sans maître.

Ce procédé est précisé dans la loi de pays n° 2021-53 du 21 décembre 2021 relative au domaine privé de la Polynésie française.

Sommes et valeurs prescrites

Les articles L. 1126-1 à L. 1126-4 définissent et encadrent la remise à l'Etat des sommes et valeurs prescrites détenues par les banques et autres sociétés commerciales.

Les articles L. 2222-21 et L. 2222-22 instituent un droit de communication auprès des banques et établissements dans le cadre des sommes et valeurs prescrites.

 

L'article 47 de la loi organique de 2004 inclut dans le domaine de la Polynésie française les valeurs, actions et dépôts en numéraire atteints par la prescription dans les délais prévus pour l'Etat.

Ce procédé est précisé dans la loi de pays n° 2021-53 du 21 décembre 2021 relative au domaine privé de la Polynésie française

Mise en valeur des terres incultes

 

L'article L. 2222-23 est un article de renvoi à des dispositions du code rural et de la pêche maritime (CRPM) concernant les terres incultes ou manifestement sous-exploitées.

 

L'aménagement foncier rural relève de la compétence de la Polynésie française en tant qu'il n'a pas été attribué à l'État par l'article 14 de la loi organique statutaire.

Les dispositions du code rural et de la pêche maritime auxquelles renvoie le CG3P sont, au demeurant, inapplicables en Polynésie française (article L. 185-1 du CRPM).

Source : commission des lois

b) Ajuster les procédures au cadre juridique et administratif local

L'ordonnance prévoit plusieurs adaptations à l'endroit des articles mentionnant, d'une part, des dispositions législatives renvoyant à des codes inapplicables en Polynésie française et, d'autre part, des éléments qui n'ont pas d'équivalent local et qui ne sont donc pas pertinents dans le contexte polynésien.

Il est ainsi fait état à l'article 3 de l'inapplicabilité du code civil (articles L. 5632-1) et du code de la santé publique (L. 5632-4), ainsi que de l'absence de société d'aménagement foncier et d'établissement rural en Polynésie française (L. 5632-3)11(*).

En outre, l'article adapte au cadre institutionnel local la procédure d'affectation des biens transférés à l'État à la suite d'une décision judiciaire. La procédure antérieurement suivie était celle issue de l'article L. 69-2 du code du domaine de l'État, qui prévoyait un arrêté conjoint du ministre de l'intérieur et du ministre chargé du domaine. Conformément à ce qui est pratiqué en Nouvelle-Calédonie ou à Wallis-et-Futuna, la prise de décision est désormais déconcentrée au niveau du Haut-commissaire de la République en Polynésie française (article L. 5632-2).

c) Harmoniser les législations domaniales entre les différents textes

Dans un objectif d'amélioration de la cohérence et de la lisibilité des règles de droit domanial, l'ordonnance harmonise les conditions d'acquisition des biens culturels énoncées par le CG3P avec les dispositions du code du patrimoine applicables en Polynésie française.

Dans ce cadre, l'article 2 limite à droit constant l'acquisition gratuite par l'État des biens culturels maritimes prévue par l'article L. 532-2 du code du patrimoine à ceux « situés dans le domaine public maritime de l'État », selon les termes de l'article L. 750-2 du même code. Résiduel, le domaine public maritime de l'État se limite aux dépendances nécessaires à l'exercice par l'État de ses compétences en matière de défense et de sécurité.

Pour réduire la dispersion des normes, l'article 4 de l'ordonnance codifie un dispositif, figurant au III de l'article 169 de la loi de finances pour 201112(*), d'aliénation des terrains du domaine privé de l'État à un prix inférieur à la valeur vénale, en vue de la réalisation de programmes de construction de logements locatifs sociaux ou d'équipements collectifs13(*).

Parachevant cet exercice de codification, l'article 5 de l'ordonnance procède à l'abrogation des dispositions devenues en conséquence obsolètes, dont le III de l'article 169 de la loi des finances pour 2011 susmentionné.

Plus généralement, l'application des règles domaniales de droit commun permet d'abroger, en tant qu'elles s'appliquent en Polynésie française, les différentes mesures, dont celles du code du domaine de l'État, qui avaient été maintenues en vigueur, pour les collectivités ultramarines, par l'article 10 de l'ordonnance n° 2006-460 du 21 avril 2006 relative à la partie législative du code général de la propriété des personnes publiques.

C. LA COMMISSION A APPROUVÉ LA RATIFICATION DE L'ORDONNANCE, QU'ELLE A JUGÉE UTILE À L'INTELLIGIBILITÉ DU DROIT DOMANIAL APPLICABLE À LA POLYNÉSIE FRANÇAISE

1. Le contrôle, par la commission, du respect des compétences de la Polynésie française

À l'initiative de son rapporteur, la commission a tenu à s'assurer du respect, par les dispositions de l'ordonnance, de la répartition des compétences entre l'État et la Polynésie française.

En effet, l'application de l'article L. 1127-1 du CG3P14(*) a soulevé un certain nombre d'interrogations quant à son articulation avec les compétences reconnues à la Polynésie française par la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 précitée. Cet article, rendu « applicable en Polynésie française en tant qu'il concerne les biens situés dans le domaine public maritime de l'État » prévoit l'acquisition par l'État des biens culturels maritimes situés dans son domaine public maritime, dans les conditions prévues par l'article L. 532-2 du code patrimoine.

La Polynésie française est certes compétente en matière culturelle, toutefois l'avis du Conseil d'État du 21 septembre 1991 précise que la collectivité n'est compétente qu'en ce qui concerne les biens culturels maritimes « situés dans le domaine public maritime du territoire ». Or, si le domaine public maritime appartient quasi-exclusivement à la collectivité, cette règle s'applique « sous réserve des droits de l'État et des tiers »15(*).

Le code du patrimoine de la Polynésie française précise d'ailleurs lui-même, en son article LP. 111-6, que la collectivité peut acquérir des biens culturels maritimes, à l'exception de ceux « situés dans le domaine public maritimes de l'État ».

Au demeurant, l'ordonnance se contente de mettre en cohérence ces règles avec celles qui figurent actuellement dans le code du patrimoine, lequel réserve également au seul domaine public maritime de l'État le droit d'acquisition des biens publics maritimes reconnu à l'État en Polynésie française16(*). Ce droit n'est susceptible d'être exercé que de manière très résiduelle dès lors que le domaine public maritime de l'État en Polynésie française se limite principalement à des installations portuaires affectées à la Marine nationale.

Par ailleurs, l'ordonnance n'entraîne pas non plus d'empiétement sur la compétence de la Polynésie française pour l'exploitation des ressources naturelles biologiques et non biologiques situées dans les sous-sols marins de la collectivité17(*). Les biens culturels maritimes sont définis comme « les gisements, épaves, vestiges ou généralement tout bien présentant un intérêt préhistorique, archéologique ou historique qui sont situés dans le domaine public maritime ou au fond de la mer dans la zone contiguë » par l'article L. 532-1 du code du patrimoine.

La notion de gisement au sens du code du patrimoine n'est, en effet, pas équivalente à celle figurant dans le code minier ; elle revêt ici un caractère archéologique et correspond à une épave présentant un intérêt archéologique en raison de sa cargaison ou de sa bonne conservation18(*). Sont ainsi exclues du champ des biens culturels maritimes les ressources naturelles biologiques et non biologiques.

2. L'approbation, sans modification, de la ratification de l'ordonnance

La commission a approuvé, sur proposition de son rapporteur, la ratification sans modification de l'ordonnance n° 2023-389 du 24 mai 2023 modifiant les dispositions du code général de la propriété des personnes publiques relatives à la Polynésie française.

Les adaptations auxquelles procède l'ordonnance viennent en effet parachever l'entreprise de codification du droit domanial applicable aux collectivités d'outre-mer engagée en 2016.

La commission a considéré, de surcroît, que l'ordonnance traduisait fidèlement les principes de répartition des compétences et d'applicabilité fixés par la loi organique de 2019, sans empiéter sur les compétences de la Polynésie française.

*

* *

La commission des lois a adopté le projet de loi de ratification sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

__________

MERCREDI 6 MARS 2024

M. François-Noël Buffet, président. - Nous allons désormais procéder à l'examen du rapport sur le projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2023-389 du 24 mai 2023 modifiant les dispositions du code général de la propriété des personnes publiques relatives à la Polynésie française.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur. - Prise sur le fondement de l'article 74-1 de la Constitution, l'ordonnance du 24 mai 2023 soumise à notre ratification vient compléter le livre du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P) consacré à la Polynésie française.

Au-delà de son aspect profondément technique, cette ordonnance est emblématique des difficultés juridiques auxquelles sont confrontées les collectivités d'outre-mer. Celles-ci résultent, en premier lieu, de la difficile appréhension de l'état du droit applicable, souvent peu lisible et accessible. Elles se conjuguent, en second lieu, à la nécessité de veiller à ce que cet objectif de clarté ne fasse pas fi des spécificités locales et ne conduise pas à omettre toute adaptation et toute prise en compte du statut particulier de la collectivité.

C'est à la lumière de ce double équilibre, dont la présente ordonnance me semble être une bonne illustration, que je souhaiterais aborder l'examen de ce texte.

L'une des spécificités du cadre juridique de la Polynésie française réside dans le croisement de différents niveaux de compétences normatives. La collectivité dispose, comme vous le savez, d'une compétence normative de principe, tandis que l'État ne peut agir qu'au sein d'un périmètre de compétences qui lui est dévolu par la loi statutaire de 2004. À cela s'ajoute la coexistence de différentes catégories de domaines.

Depuis 1977, la Polynésie française est propriétaire de son propre domaine, auquel l'État a transféré l'entièreté de son domaine public maritime, à l'exception - il est bon de le noter - des dépendances affectées à l'exercice de sa souveraineté, comme celles de la marine nationale. Dans cette collectivité d'outre-mer particulièrement autonome en matière domaniale, l'État et ses établissements publics conservent néanmoins la propriété d'un vaste domaine public, qui comprend des aérodromes, des palais de justice, des ports ou des écoles, et d'un domaine privé.

Jusqu'en 2019, seul le « domaine public de l'État » figurait parmi les compétences reconnues aux autorités étatiques par le statut de 2004. A contrario, l'État n'était donc pas compétent pour établir les règles relatives à son domaine privé. Cette répartition des compétences était singulière par rapport aux autres collectivités d'outre-mer. À la lumière des auditions que j'ai conduites, elle semble davantage relever d'une omission que d'un choix délibéré.

Il en résultait une insécurité - si ce n'est un vide - juridique. En effet, bien qu'ayant la compétence théorique pour légiférer sur le domaine privé de l'État, la Polynésie française n'en a jamais fait usage. Dès lors, le domaine privé de l'État se trouvait, en pratique, régi par l'ancien code du domaine de l'État, maintenu en vigueur à titre dérogatoire.

Cette fragmentation normative a été naturellement préjudiciable à l'intelligibilité des normes, mais également à leur évolution. Comme le relevait le Conseil d'État en 2016, le législateur ordinaire demeurait, en effet, incompétent pour modifier une disposition touchant au domaine privé de l'État en Polynésie française.

Face à ce statu quo insatisfaisant, la loi organique de 2019 portant modification du statut d'autonomie de la Polynésie française a fait un premier pas vers la résolution de cette situation. Elle a ainsi étendu expressément la compétence de l'État en Polynésie française à son domaine privé et à celui de ses établissements publics. Par souci de simplification et de lisibilité, le régime de l'applicabilité de plein droit a été élargi, sur l'initiative de notre commission, au domaine privé de l'État et aux domaines public et privé de ses établissements publics.

Cependant, cette réforme ne peut être pleinement effective sans une mise en cohérence concrète du CG3P. L'ordonnance que le présent projet de loi tend à ratifier procède donc à cette actualisation, quatre ans après.

Vous connaissez mon engagement et l'attention que je porte à la qualité du droit applicable à nos collectivités d'outre-mer. Je tiens ici à déplorer les lenteurs de la réforme, au regard des enjeux particulièrement prégnants de lisibilité du droit en Polynésie. Ainsi, pendant vingt ans, une surface d'environ 15 kilomètres carrés a été régie en Polynésie française par des dispositions obsolètes depuis 2006 et maintenues en vigueur à défaut d'autre solution.

J'en viens au second enjeu, celui du respect des spécificités locales.

Outre son objectif de rendre le droit domanial plus lisible et cohérent grâce à l'application de plein droit du CG3P, cette ordonnance doit répondre à son corollaire, celui de respecter pleinement le périmètre de compétences de la Polynésie française et les réalités locales malgré l'application automatique de ces mêmes dispositions du CG3P.

À cet égard, quinze articles sont insérés à la cinquième partie du CG3P, afin d'adapter les dispositions applicables. Certains articles ne procèdent qu'à des ajustements mineurs, en supprimant, par exemple,


la mention de codes inapplicables en Polynésie ou encore des éléments qui n'ont pas d'équivalent local, comme les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural.

Le travail le plus important réside finalement dans l'identification des dispositions relevant de la compétence de la Polynésie française. Pour des motifs historiques et politiques, le statut de 2004 réserve en effet à la Polynésie française une compétence exclusive pour acquérir certains biens. Ainsi, la Polynésie française dispose d'un droit de préemption immobilier. Ce droit en faveur de la protection du patrimoine foncier et des espaces naturels locaux s'inscrit dans le cadre des mesures dites de « préférence locale » prévues à l'article 74 de la Constitution. Le statut d'autonomie inclut également dans le domaine de la Polynésie française - et, par conséquent, dans son champ de compétence - « les biens vacants et sans maître » ou « ceux des personnes qui décèdent sans héritier ». L'ordonnance exclut, dès lors, expressément l'application par l'État en Polynésie de ces procédures d'acquisition, qui risqueraient d'empiéter sur les compétences propres du pays.

Au cours de mes travaux, j'ai accordé une importance particulière à cet enjeu du respect des compétences de la Polynésie française. J'ai ainsi conduit mes travaux préparatoires dans un esprit d'ouverture et de concertation, en recueillant l'avis et les observations des représentants polynésiens, dont le syndicat pour la promotion des communes de Polynésie française (SPCPF), le président de l'assemblée de Polynésie française et notre collègue Lana Tetuanui.

Consultée par le Gouvernement sur le projet d'ordonnance - comme l'y oblige la Constitution -, l'assemblée de la Polynésie française n'avait pas pu émettre d'avis puisque cette saisine avait eu lieu en pleine période électorale d'avril 2023. Je précise avoir pris connaissance de ce fait grâce à l'audition du président de l'assemblée de Polynésie française.

Les membres de cette dernière m'ont fait part, au cours de leur audition, d'un certain nombre de réserves, auxquelles, soyez-en assurés, j'ai accordé une attention particulière. L'une de ces réserves concerne le renvoi à une disposition du code du patrimoine qui permet l'acquisition par l'État de biens culturels maritimes.

Après une analyse approfondie, je suis parvenu à la conclusion - je m'en expliquerai en détail lors de l'examen de l'amendement déposé par Lana Tetuanui - que les compétences de la Polynésie française sont préservées, dès lors qu'il est expressément prévu que la disposition en question ne s'applique qu'au seul domaine public maritime de l'État, au demeurant restreint. Cette répartition des compétences est, par ailleurs, conforme avec celle qui est déjà prévue par différentes dispositions du code du patrimoine métropolitain et du code du patrimoine local.

En définitive, ce texte met en cohérence, avec du retard, mais une certaine prudence, le droit domanial de l'État en Polynésie française : une cohérence qui, par la création d'un ensemble homogène, évite les vides juridiques et les « trous dans la raquette » ; une cohérence à l'égard du droit polynésien qui, en établissant un état de droit coordonné avec le droit local, prévient les contradictions ; une cohérence, enfin, parce qu'il s'agit d'une réforme de clarification pour un contenu intelligible et accessible à tous.

Considérant donc cette ordonnance comme un facteur d'amélioration de la cohérence et de la lisibilité des règles de droit domanial applicables en Polynésie française, je vous invite, chers collègues, à approuver sa ratification sans modification.

M. Jérôme Durain. - Je remercie le rapporteur pour la qualité de son travail. Notre groupe suivra son avis, l'ensemble des changements apportés s'inscrivant dans le prolongement logique de la loi organique de 2019 portant modification du statut d'autonomie de la Polynésie française. Lesdits changements viennent à la fois combler des lacunes, clarifier la loi et adapter celle-ci aux spécificités locales.

Ces modifications du CG3P sont bénéfiques pour le territoire, au-delà de l'alignement entre le droit positif en métropole et le droit spécifique à la Polynésie, puisqu'elles garantissent un accès facilité de la population aux logements sociaux. En effet, la réforme codifie les règles qui permettent à l'État de vendre des terrains de son domaine public à des prix très réduits afin d'y construire ce type de logements.

En outre, l'ordonnance rend la législation plus claire, afin d'assurer un accès équitable aux services publics essentiels et de favoriser le développement économique et social de l'archipel polynésien. Le texte devrait également permettre une meilleure administration des terrains publics et une amélioration de la qualité de la vie.

Notre groupe votera donc en faveur de la ratification de l'ordonnance du 24 mai 2023 dans les termes que vous avez indiqués.

Mme Agnès Canayer. - Je félicite à mon tour le rapporteur pour la clarté de sa présentation sur ce sujet fort complexe mêlant de nombreux enjeux. Dans le cadre d'un déplacement de la délégation aux collectivités territoriales, en compagnie de Françoise Gatel, nous avions perçu le manque de lisibilité du droit applicable en Polynésie, les plus hautes autorités elles-mêmes éprouvant des difficultés à distinguer les champs d'application respectifs du droit commun et du droit dérogatoire, ou à identifier la répartition des compétences entre l'État et de la Polynésie.

Le principal enjeu du texte, auquel je souscris, consiste donc à clarifier et à codifier le droit applicable dans le territoire, tout en comblant une omission liée à ce manque de clarté du droit positif.

De manière plus concrète, de nombreux maires rencontrés lors de notre visite ont évoqué le statut des voies privées : ne pouvant actuellement être transférées dans le domaine public - notamment des collectivités territoriales -, celles-ci ne peuvent pas être entretenues ni raccordées à différents réseaux, ce qui suscite de réelles difficultés sur le terrain. Nous devrions nous pencher sur cette question et tâcher d'y apporter une solution juridique.

M. François-Noël Buffet, président. - En application du vade-mecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des présidents, il nous appartient d'arrêter le périmètre indicatif du projet de loi.

Je vous propose de considérer que ce périmètre comprend les dispositions relatives à la modification et à l'adaptation des dispositions du code général de la propriété des personnes publiques relatives à la Polynésie française.

Il en est ainsi décidé.

EXAMEN DE L'ARTICLE UNIQUE

Après l'article unique

Mme Lana Tetuanui. - Je remercie notre collègue rapporteur. Si mon amendement risque de ne pas être adopté, je maintiens le souhait d'ouvrir le débat en séance publique après avoir découvert avec stupéfaction que l'État est propriétaire d'un domaine public maritime en Polynésie française. J'aimerais savoir de quelle manière le Gouvernement délimite ce domaine, le sujet étant véritablement explosif et susceptible d'attiser un sentiment antifrançais, au risque de soulever la question de l'indépendance.

Je suis allée fouiller dans les textes adoptés à 20 000 kilomètres de notre territoire et j'ai nagé dans ce véritable dédale de corail que représente l'empilement de différents codes. Ainsi, la notion de « gisement » évoquée par le code du patrimoine soulève des difficultés d'interprétation : de quoi s'agit-il précisément ?

L'amendement COM-1 que je présente vise non pas à supprimer l'ensemble de l'ordonnance, mais à empêcher le Gouvernement et l'État d'empiéter sur l'autonomie de la Polynésie française en supprimant l'article L.5261-2 du CG3P rendant applicable au domaine public maritime de l'État en Polynésie française l'acquisition de biens culturels maritimes par l'État.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur. - Je vous remercie pour ces observations et tâcherai de vous rassurer, rappelant que j'accorde la plus grande attention aux réserves exprimées par les représentants de

Polynésie française. Permettez-moi de détailler les raisons pour lesquelles j'estime que l'ordonnance n'entraînera pas d'empiétements sur les compétences de la Polynésie française.

Il convient tout d'abord de rappeler que cet article ne fait que mettre en cohérence, à droit constant, le CG3P avec les dispositions du code du patrimoine. Ce dernier prévoit en effet, en Polynésie française, une procédure d'acquisition par l'État des biens culturels maritimes situés dans son domaine public maritime.

Pour être plus précis, les réserves exprimées à propos de l'application de l'article L. 1127-1 du CG3P sont en réalité de deux natures.

Premièrement, il serait à craindre que l'application de cet article en Polynésie française autorise l'État à empiéter sur la compétence culturelle de la Polynésie française. Les consultations et les travaux que j'ai conduits me permettent d'affirmer qu'un tel empiétement n'est en réalité pas à redouter. En effet, l'ordonnance précise bien que l'article est applicable « en tant qu'il concerne les biens situés dans le domaine public maritime de l'État ».

Or la quasi-totalité du domaine public maritime en Polynésie appartient à la collectivité. Le domaine public maritime de l'État est très résiduel, et il se limite en réalité à quelques installations portuaires affectées à la marine nationale.

La possibilité pour l'État d'acquérir des biens publics maritimes sera donc restreinte à son propre domaine, lui-même très résiduel : cela correspond à la répartition des compétences fixées par la loi organique statutaire de 2004.

Ainsi, l'avis du Conseil d'État du 21 septembre 1999 dispose bien que la Polynésie française est compétente pour les biens culturels « situés dans le domaine public maritime du territoire », et non pas dans celui de l'État.

J'ajouterai, par ailleurs, que cette compétence de l'État sur son domaine public maritime est reconnue par le code du patrimoine de Polynésie française lui-même, puisque ce dernier prévoit que la collectivité peut également revendiquer un bien culturel maritime hormis ceux qui sont « situés dans le domaine public maritime de l'État ».

Deuxièmement, les représentants de la Polynésie française considèrent que l'application de cet article présente un risque d'immixtion de l'État dans l'exploitation des ressources naturelles présentes dans les sous-sols marins polynésiens.

Cette crainte est liée à la définition des biens culturels maritimes qui nous est fournie par le code du patrimoine, à savoir « les gisements, épaves, vestiges ou généralement tout bien présentant un intérêt préhistorique, archéologique ou historique qui sont situés dans le domaine public maritime ou au fond de la mer dans la zone contiguë ».

Or la notion de « gisement » au sens du code du patrimoine n'est pas équivalente à celle qui est présente dans le code minier. Ici, la notion revêt une dimension archéologique et implique une intervention de l'homme : cela exclut donc toutes les ressources naturelles biologiques ou non biologiques, dont l'exploitation relève d'une compétence appartenant à la Polynésie française.

Plus spécifiquement, un gisement est « archéologique » lorsqu'il est constitué par une épave qui présente un intérêt archéologique de par sa cargaison ou de sa bonne conservation.

Ces dispositions s'appliquent d'ailleurs de manière identique en Nouvelle-Calédonie depuis 2016 et n'ont jamais conduit à des empiétements ou immixtions de l'État.

Pour l'ensemble de ces raisons, et même si j'entends les craintes qui ont été exprimées, j'émets un avis défavorable sur cet amendement.

L'amendement COM-1 n'est pas adopté.

L'article unique constituant l'ensemble du projet de loi est adopté sans modification.

Le sort de l'amendement examiné par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Article(s) additionnel(s) après l'article unique

Mme TETUANUI

1

Suppression de l'article rendant applicable au domaine public maritime de l'État en Polynésie française l'acquisition par l'État des biens culturels maritimes

Rejeté

RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45
DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS
DU RÈGLEMENT DU SÉNAT (« CAVALIERS »)

Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie » 19(*).

De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie20(*). Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte21(*). Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel ajoute un second critère : il considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial22(*).

En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.

En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission des lois a arrêté, lors de sa réunion du mercredi 6 mars 2014 le périmètre indicatif du projet de loi ratifiant l'ordonnance n°2023-389 du 24 mai 2023 modifiant les dispositions du code général de la propriété des personnes publiques relatives à la Polynésie française.

Elle a considéré que ce périmètre incluait les dispositions relatives à la modification et l'adaptation des dispositions du code général de la propriété des personnes publiques relatives à la Polynésie française.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
ET DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES

ASSEMBLÉE DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE

M. Anthony Geros, Président

M. Richard Tuheiava, directeur de cabinet du président

Mme Lana Tetuanui, sénatrice de Polynésie française

MINISTÈRE DES OUTRE-MER - DIRECTION GÉNÉRALE DES OUTRE-MER

M. Arnaud Lauzier, adjoint au sous-directeur des affaires juridiques et institutionnelles

DIRECTION GÉNÉRALE DES FINANCES PUBLIQUES - DIRECTION DE L'IMMOBILIER DE L'ÉTAT

M. Guillaume Decroix, sous-directeur de la DIE3

Mme Delphine Marekovic, chef de bureau DIE3B

M. Pierre Brun, DIE3B

CONTRIBUTIONS ÉCRITES

- SYNDICAT POUR LA PROMOTION DES COMMUNES DE POLYNÉSIE FRANÇAISE (SPCPF)

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjl23-279.html


* 1 Dans sa décision n° 96-373 DC du 9 avril 1996 sur le statut de la Polynésie française, le Conseil constitutionnel a toutefois posé des limites : les transferts de compétence et de biens aux collectivités ultramarines ne peuvent pas « affecter l'exercice de sa souveraineté par l'État ». L'État conserve ainsi les dépendances du domaine public maritime nécessaires à l'exercice de ses compétences (sécurité, défense et conventions internationales), il s'agit notamment des installations portuaires affectées à la Marine nationale.

* 2 Article 10 de l'ordonnance 2006-460 du 21 avril 2006 relative à la partie législative du code général de la propriété des personnes publiques.

* 3 C. Chamard-Heim, L'Etat et le CGPPP outre-mer : une politique de Gribouille, AJDA 2016. 1810

* 4 Prévue par la loi n° 2015-1268 du 14 octobre 2015 d'actualisation du droit des outre-mer, qui habilite, à son article 80, l'État à modifier le CG3P.

* 5 Ordonnance n° 2016-1255 du 28 septembre 2016 modifiant les dispositions du code général de la propriété des personnes publiques relatives à l'outre-mer.

* 6 Dans son avis du 15 septembre 2016, le Conseil d'État a explicitement jugé qu'il revenait « à la Polynésie française de déterminer les règles applicables au domaine privé de l'État. Par suite, le législateur ordinaire et le Gouvernement agissant par voie d'ordonnance sont incompétents pour modifier et abroger une disposition dont l'objet est de réglementer le domaine privé de l'État en Polynésie française. »

* 7 Rapport n° 292 (2018-2019) de Mathieu Darnaud, 6 février 2019.

* 8 L'article 74-1 de la Constitution dispose que ces « ordonnances sont prises en conseil des ministres après avis des assemblées délibérantes intéressées et du Conseil d'État. Elles entrent en vigueur dès leur publication. Elles deviennent caduques en l'absence de ratification par le Parlement dans le délai de dix-huit mois suivant cette publication ».

* 9 CE Ass., 9 février 1990, Élections municipales de Lifou, n° 107.400.

* 10 Conseil d'Etat, AG du 7 janvier 2016, n°391040.

* 11 L'article 4 de l'ordonnance adapte également des procédures basées sur des dispositions de textes et de codes inapplicables en Polynésie française. Il est ainsi fait état des conditions d'application du code de l'expropriation (art. L. 5641- 1), du code forestier et du code de la voirie routière (art. L. 5641-2 et, par coordination, art. L. 5641-7), de la loi du 9 février 1895 sur les fraudes en matière artistique (art. L. 5641-6) ainsi que du code du travail, du code du patrimoine et du code de l'environnement (art. L. 5641-8)

* 12 Loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011.

* 13 Le dispositif applicable en Polynésie française se fonde sur le mécanisme de droit commun, introduit par l'article 95 de la loi n°2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale. Il est toutefois plus favorable puisque la décote, répercutée intégralement sur le coût des opérations, est fixée à 100 % de la valeur vénale du bien.

* 14 Rendu application par l'article. L. 5621-2 du code général de la propriété des personnes publiques, créé par l'article 2 de l'ordonnance n° 2023-389 du 24 mai 2023.

* 15 Article 47 de la loi organique n° 2004-192, troisième alinéa.

* 16 L'article L. 532-2 du code du patrimoine n'est en effet applicable à la Polynésie française, aux termes de l'article L. 750-2 du même code, qu'en « tant qu'ils concernent les biens situés dans le domaine public maritime de l'État ».

* 17 En application du dernier alinéa de l'article 47 de la loi organique n° 2004-192 : « La Polynésie française réglemente et exerce les droits de conservation et de gestion, le droit d'exploration et le droit d'exploitation des ressources naturelles biologiques et non biologiques, notamment les éléments des terres rares, des eaux intérieures, en particulier les rades et les lagons, du sol, du sous-sol et des eaux sur-jacentes de la mer territoriale et de la zone économique exclusive dans le respect des engagements internationaux ».

* 18 Aux termes de l'article 26 du décret du 26 décembre 1961 fixant le régime des épaves maritimes. Le terme gisement est ensuite repris sans précision par la loi n° 89-874 du 1 décembre 1989 relative aux biens culturels maritimes et modifiant la loi du 27 septembre 1941 portant réglementation des fouilles archéologiques et le décret n°91-1226 du 5 décembre 1991 pris en l'application de cette même loi.

* 19 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.

* 20 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.

* 21 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.

* 22 Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France.

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