N° 128

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2023-2024

Enregistré à la Présidence du Sénat le 23 novembre 2023

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances, considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, pour 2024,

Par M. Jean-François HUSSON, 

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 20

OUTRE-MER

Rapporteurs spéciaux : MM. Georges PATIENT et Teva ROHFRITSCH

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Bernard Delcros, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; M. Michel Canévet, Mmes Marie-Claire Carrère-Gée, Frédérique Espagnac, M. Marc Laménie, secrétaires ; MM. Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mme Florence Blatrix Contat, M. Éric Bocquet, Mme Isabelle Briquet, M. Vincent Capo-Canellas, Mme Marie-Carole Ciuntu, MM. Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek, Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (16ème législ.) : 1680, 1715, 1719, 1723, 1745, 1778, 1781, 1805, 1808, 1820 et T.A. 178

Sénat : 127 et 128 à 134 (2023-2024)

L'ESSENTIEL

La mission « Outre-mer » a pour principal objectif le rattrapage des écarts persistants entre l'outre-mer et la métropole et la convergence des niveaux de vie. Elle rassemble les crédits du programme 138 « Emploi outre-mer » et du programme 123 « Conditions de vie outre-mer ».

I. UNE HAUSSE DES CRÉDITS DE LA MISSION SOUS L'EFFET DE L'AUGMENTATION DES EXONÉRATIONS DE CHARGES MAIS ÉGALEMENT POUR RENFORCER CERTAINS DISPOSITIFS

Les crédits présentés dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2024 s'élèvent à 2 944,8 millions d'euros en AE et 2 697,9 millions d'euros en CP, soit une hausse de 6,9 % en AE et une hausse de 4,6 % en CP par rapport à la LFI 2023.

Évolution LFI 2023 / PLF 2024 des crédits de la mission Outre-mer

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir du PLF 2024

A. LE PROGRAMME 123 « CONDITIONS DE VIE OUTRE-MER » ENREGISTRE UNE HAUSSE NOTABLE EN RAISON DU RENFORCEMENT DES AIDES AU LOGEMENT (LBU) ET DU DÉVELOPPEMENT DES AIDES À LA CONTINUITÉ TERRITORIALE

Entre la LFI 2023 et le PLF 2024, le programme 123 enregistre une hausse de 7,3 % en AE, soit 69,4 millions d'euros, et de 0,7 % en CP, soit 5,3 millions d'euros. En AE toutes les actions de ce programme sont stables ou à la hausse, à l'exception des actions « Aménagement du territoire » et « Appui à l'accès aux financements bancaires ». De même, en CP, toutes les actions sont stables ou en hausse exception faite des actions « Collectivités territoriales » et « Appui à l'accès aux financements bancaires ». La hausse des crédits concerne notamment :

la poursuite de la dynamique impulsée par le Plan logement outre-mer afin de développer et rénover l'habitat et de résorber l'habitat indigne (49 millions d'euros en AE et 10 millions d'euros en CP) ;

le renforcement de l'aide à la mobilité des populations, mise en oeuvre au travers des dispositifs opérés par l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité (LADOM), permettant d'élargir les publics éligibles afin de faciliter les déplacements professionnels entre les territoires d'outre-mer et la métropole (21,6 millions d'euros en AE et en CP) ;

la poursuite et le renforcement de l'aide ciblée vers certains territoires au travers des contrats de redressement outre-mer (COROM) pour 40 millions d'euros en AE et 16 millions d'euros en CP.

Cependant, l'appui aux financements bancaires et à l'ingénierie diminue de 7 millions d'euros en AE et de 3,3 millions d'euros en CP alors même que le besoin de financement des acteurs publics pourrait augmenter en 2024 dans un contexte de crise économique.

Enfin, le programme 123 fait également l'objet d'une mesure d'économie de 10 millions d'euros, l'aide à la collectivité territoriale de Guyane passant de 40 à 30 millions d'euros.

Évolution des crédits du programme 123 en 2023 et 2024

(en AE)

Source : commission des finances du Sénat à partir du PLF 2024

B. LE PROGRAMME 138 « EMPLOI OUTRE MER » ENREGISTRE UNE HAUSSE EN RAISON ESSENTIELLEMENT DU POIDS DES EXONÉRATIONS DE CHARGES

Entre la LFI 2023 et le PLF 2024, les crédits du programme 138 enregistrent une hausse de 6,7 % en AE soit 121,3 millions d'euros et de 6,4 % en CP soit 114,6 millions d'euros. Cette hausse résulte du solde entre la hausse des actions 1 (« soutien aux entreprises » et 2 (« aide à l'insertion et à la qualification » c'est-à-dire le service militaire adapté - SMA) et de la baisse de l'action 4 (« financement de l'économie).

En effet, en PLF 2024 les crédits de l'action 1 s'élèvent à 1,54 milliard d'euros soit une hausse de 8,7 % (123 millions d'euros) par rapport à la LFI 2023. Ce niveau 2024 s'appuie sur des prévisions de dépenses en hausse pour la compensation des exonérations produites en juin 2023 en raison des hypothèses d'évolution de la masse salariale des entreprises privées. Cependant, les variations des dernières années témoignent de la difficulté à établir des prévisions fiables, s'agissant de dépenses de « guichet » qui sont tributaires de la conjoncture économique.

Par ailleurs, les crédits alloués au SMA enregistre une hausse de près de 10 millions d'euros en AE sous l'effet de mesures catégorielles.

À l'inverse, les crédits alloués au financement de l'économie affichent une baisse de 11 millions d'euros en AE et CP du fait de la non reconduction d'une aide exceptionnelle adoptée en LFI 2023 pour répondre aux surcoûts d'approvisionnement en énergie des entreprises industrielles et de services des DROM.

Évolution des crédits du programme 138 en 2023 et 2024

(en AE)

Source : commission des finances du Sénat à partir du PLF 2024

II. DES DÉPENSES FISCALES UTILES ET POUR LESQUELLES TOUTE VOLONTÉ DE RESTRICTIONS DOIT FAIRE L'OBJET D'UNE CONCERTATION PRÉALABLE AVEC LES ACTEURS LOCAUX

Sur les deux programmes de la mission, les dépenses fiscales devraient s'établir, en 2024, à 5 559 millions d'euros soit quasiment 2 fois plus que les crédits budgétaires portés par la mission « Outre-mer ». Entre 2023 et 2024, elles enregistrent une hausse de 2,23 % soit 121 millions d'euros. Cette progression est sensiblement identique à celle constatée entre 2022 et 2023 (2,5 % soit 174 millions d'euros).

Cependant, en PAP 2023, le montant des dépenses fiscales était estimé à près de 7 milliards d'euros. Cet écart de 1,5 milliard d'euros par rapport aux montants du PAP 2024 résulte d'un changement de méthode concernant la comptabilisation de l'ensemble des dépenses fiscales en matière de TVA. En effet, ces dernières tiennent désormais compte de la seule incidence de ces dispositifs sur la part des recettes nettes de TVA restant à l'État, c'est-à-dire diminuées des recettes de TVA transférées aux collectivités territoriales et organismes de sécurité sociale. Pour les dépenses fiscales outre-mer, ce changement touche essentiellement la dépense fiscale relative aux taux réduits de TVA en Guadeloupe, en Martinique et à La Réunion.

Si les rapporteurs spéciaux estiment que les dépenses fiscales sont un outil indispensable pour l'économie ultramarine, ils reconnaissent la nécessité de mieux les évaluer. Ils saluent les démarches entreprises dans ce sens depuis ces dernières années et invitent le Gouvernement à les poursuivre. Cependant, ils alertent sur le fait que ces évaluations ne doivent pas servir de justifications systématiques pour restreindre ces dépenses. À cet égard, concernant la récente évaluation de l'inspection générale des finances portant sur le régime d'aide fiscale à l'investissement productif, les rapporteurs spéciaux partagent certains constats et recommandations notamment pour étendre ces dispositifs à la transition écologique ou pour limiter les fraudes. Ils se montrent en revanche plus prudents sur les préconisations relatives au ciblage et soulignent qu'une restriction trop importante du régime ne serait pas sans conséquence sur l'économie ultramarine. Aussi, ils estiment nécessaire, avant toute décision, de mettre en place une consultation avec les acteurs locaux et les parlementaires.

III. UN EFFORT ACCRU EN PROVENANCE DES AUTRES MISSIONS DU BUDGET GÉNÉRAL MAIS DES CRÉDITS « PLAN DE RELANCE » INFÉRIEURS AUX ANNONCES INITIALES

A. DES CRÉDITS EN PROVENANCE DES AUTRES MISSIONS EN HAUSSE

En complément des crédits portés par la mission « Outre-mer » et des dépenses fiscales, les territoires d'outre-mer bénéficient de crédits en provenance d'autres programmes du budget général. Ainsi, le montant total des contributions budgétaires s'élève, en PLF 2024, à 21,1 milliards d'euros en AE et 28,8 milliards d'euros en CP soit une hausse de 0,93 % en AE et de 2,92 % en CP par rapport à la LFI 2023. Cette augmentation représente 195 millions d'euros en AE et 647,6 millions d'euros en CP.

Au total, en PLF 2024, les dépenses de l'État en faveur de l'outre-mer (crédits de la mission « Outre-mer », dépenses fiscales et contributions des programmes du budget général) seront d'environ 26,7 milliards d'euros en AE et 28,4 milliards d'euros en CP, soit une hausse de 316 millions d'euros en AE et de 647,6 millions en CP par rapport à 2023.

Ces crédits pluri ministériels permettent notamment le financement des plans thématiques outre-mer : le plan d'actions pour les services d'eau potable et d'assainissement, le plan séismes Antilles, le plan Sargasses, le plan logement outre-mer et le plan chlordécone.

Part des missions dans l'effort total en faveur de l'outre-mer

(en AE)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents de politique transversale outre-mer

B. LES CRÉDITS EN PROVENANCE DU PLAN DE RELANCE ET DU FONDS VERT

Lors des premières annonces relatives au plan de relance, les crédits alloués à l'outre-mer devaient atteindre 1,5 milliard d'euros avec des engagements étalés entre 2021 et 2022 et au-delà de 2022, à la marge, pour des projets complexes d'infrastructures ou de rénovation lourde. Fin 2022, environ 1 milliard d'euros d'AE a été consommé au titre des crédits « relance » en outre-mer soit 0,5 milliard de moins que les montants d'ouverture d'AE annoncés initialement.

Cette consommation en deçà des attentes et des besoins s'explique en partie par la faiblesse de l'ingénierie en outre-mer et d'autres spécificités locales comme la difficulté à trouver du foncier disponible.

S'il en était besoin, la mise en oeuvre du plan de relance, comme celle d'autres dispositifs auparavant, met en exergue l'absolue nécessité de tenir compte des spécificités territoriales et de développer des approches différenciées entre la métropole et les territoires d'outre-mer mais également entre les territoires d'outre-mer eux-mêmes.

Le fonds vert a été fortement sollicité en outre-mer. Il en résulte qu'au regard du nombre de dossiers et du montant d'aide demandé, le montant des crédits alloués en 2023 ne permettra pas l'instruction de tous les dossiers déposés en 2023. Les porteurs de projet ont donc été invités à présenter leurs dossiers non retenus en 2023 à l'appel à candidature 2024. Pour autant, il n'y a pas de garantie que les crédits permettront de répondre positivement à l'ensemble des demandes.

La commission a proposé au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Outre-mer », sous réserve de l'adoption de ses amendements.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 55.

Réunie à nouveau le jeudi 23 novembre 2023 sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé sa décision de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Outre-mer » tels que modifiés par ses amendements. Elle a confirmé sa décision de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 55. Elle a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 55 bis.

L'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 100 % des réponses étaient parvenues aux rapporteurs spéciaux en ce qui concerne la mission « Outre-mer ».

PREMIÈRE PARTIE
LES TERRITOIRES D'OUTRE-MER : DES ENJEUX INÉDITS,
DES RÉPONSES EN DEMI TEINTE

I. LES RÉCENTES CRISES SANITAIRE ET INFLATIONNISTE ONT MIS EN ÉVIDENCE LES GRANDS ENJEUX À VENIR POUR LES TERRITOIRES D'OUTRE-MER QUI S'AJOUTENT AU PROBLEME RÉCURRENT D'ÉCART DES NIVEAUX DE VIE

À titre liminaire, les rapporteurs spéciaux rappellent que le principal objectif de la mission « Outre-mer » du budget général de l'État est le rattrapage des écarts persistants entre les territoires d'outre-mer et la métropole et la convergence des niveaux de vie dans le domaine socio-économique.

Ce rattrapage des niveaux socio-économiques par rapport à la métropole, eu égard aux écarts persistants, doit donc demeurer une priorité.

Pour autant, de nouveaux enjeux se font jour pour les territoires d'outre-mer et les crédits de la mission « Outre-mer » devront en tenir compte à l'avenir.

En effet, la crise sanitaire a souligné la très grande dépendance des territoires ultramarins aux importations alimentaires quand la crise économique et l'inflation sous-jacente ont mis en exergue la dépendance énergétique des outre-mer. Il en résulte que l'autonomie alimentaire et la transition écologique doivent constituer les deux défis majeurs pour les territoires d'outre-mer dans les années à venir.

À cet égard, les annonces faites à l'issu de comité interministériel des outre-mer (CIOM) représentent une avancée notable mais ne répondent cependant pas à toutes les attentes et devront se concrétiser par des moyens budgétaires.

A. UN RATTRAPAGE DES NIVEAUX SOCIO-ÉCONOMIQUES PAR RAPPORT À LA MÉTROPOLE QUI DOIT SE POURSUIVRE

1. Des indicateurs économiques qui se détériorent en outre-mer

Des écarts forts et persistants demeurent entre les territoires d'outre-mer et la France métropolitaine dans le domaine économique. De surcroît, dans certains territoires, ces écarts ont tendance à s'accroitre.

a) Un PIB par habitant dans les DROM toujours en deçà des niveaux constatés en métropole

Entre 2017 et 2021, le PIB par habitant des départements et régions d'outre-mer (DROM) a augmenté mais à un rythme plus faible qu'en métropole de sorte qu'il est, de manière récurrente, inférieur au niveau constaté dans les autres départements français.

Classement des PIB régionaux par habitant des DROM en 2021

(en euros)

Source : commission des finances à partir des données Insee

Ainsi, alors que les PIB par habitant régionaux ont enregistré, en moyenne, une hausse de 7,56 % entre 2017 et 2021, ceux des DROM n'ont augmenté que de 5 %.

Le PIB par habitant dans les DROM représente seulement 55,9 % du PIB par habitant en France métropolitaine. Cette proportion varie d'un territoire à l'autre entre 22,66 % (à Mayotte) et 68,4 % (en Martinique).

Évolution du PIB par habitant des DROM entre 2017 et 2021

(en euros, estimation)

Source : commission des finances à partir des données Insee - Comptes régionaux base 2014, Estimations de population

Alors qu'en 2017, le PIB moyen par habitant dans les DROM représentait 57,3 % de celui de métropole, en 2021, il ne représente plus que 55,9 %.

Les rapporteurs spéciaux notent également qu'en Guadeloupe et en Guyane, le PIB par habitant a diminué entre 2019 et 2021 et n'a pas retrouvé son niveau d'avant la crise sanitaire.

b) Des taux de chômage toujours plus importants qu'en métropole

En moyenne, sur les territoires d'outre-mer, la population a enregistré une augmentation de 5,6 % entre 2011 et 2021 contre 3,6 % en métropole.

Cette évolution est cependant très variable d'un territoire à l'autre mais créée, dans tous les cas, une déformation démographique et partant, des difficultés économiques et sociales.

En effet, en Guyane, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie, la croissance démographique est importante et l'indice de vieillissement (part des plus de 65 ans par rapport aux moins de 20 ans) est beaucoup plus faible qu'en métropole. À l'inverse, en Guadeloupe et Martinique, l'évolution démographique est à la baisse, ce qui génère une part des personnes âgées de plus de 65 ans supérieure à la métropole.

Population outre-mer : évolution et ratios

(1) : rapport de la population de plus de 65 ans sur la population de moins de 20 ans.

(2) : le rapport entre la population des jeunes et des personnes âgées (moins de 20 ans et 65 ans et plus) et la population de 20 à 65 ans. Il est défavorable lorsqu'il est supérieur à 100 (ou « fort »), c'est-à-dire lorsqu'il y a davantage de jeunes et seniors que de personnes en âge de travailler.

Source : commission des finances à partir des données de l'INSEE, ISPF, ISEE et STSEE

Ces caractéristiques démographiques couplées à un marché du travail restreint ainsi qu'à un niveau de qualification relativement faible (les jeunes ultramarins plus diplômés partant en métropole ou à l'étranger), permettent difficilement d'absorber la croissance de la population active. Il en résulte des taux de chômage dans les territoires d'outre-mer beaucoup plus élevés qu'en métropole et atteignant 35 % à Mayotte.

Taux de chômage en 2021 (% de la population active de 15 ans et plus)

Source : commission des finances à partir du tableau de bord des outre-mer (IEOM) - données arrêtées au 1er aout 2022 et de l'enquête Emploi Insee de 2022

2. Des indicateurs sociaux très dégradés
a) Un illettrisme et un illectronisme importants dans les DROM

Les taux de jeunes rencontrant des difficultés dans le domaine de la lecture atteignent 71 % à Mayotte, 47 % en Guyane, 28 % en Guadeloupe et en Martinique et 25 % à la Réunion en 2020, contre 9,5 % pour l'ensemble des jeunes de 16 à 25 ans de nationalité française ayant participé à la Journée défense et citoyenneté en 2020.

Par ailleurs, en 2019, le taux d'illectronisme est de 26 % dans les départements d'outre-mer (hors Mayotte), contre 16 % en France métropolitaine (Legleye, Rolland, 2019). Les taux d'équipement numérique et d'accès à Internet sont inférieurs dans les DROM.

Dans ce contexte, les taux de réussite au baccalauréat sont inférieurs de 1 à 16 points dans les territoires d'outre-mer par rapport à la métropole, à l'exception de la Guadeloupe et de la Martinique où ils se rapprochent sensiblement des taux métropolitains. Ces écarts, déjà inquiétants dans certains territoires, doivent de surcroit être interprétés avec prudence dans la mesure où les décrochages scolaires interviennent avant la terminale et ne sont donc pas comptabilisés dans les taux susmentionnés.

Taux de réussite au baccalauréat en 2021

(en %)

Source : commission des finances du Sénat à partir des données Insee

b) Une espérance de vie moins élevée

L'espérance de vie dans les territoires d'outre-mer est inférieure à celle de métropole avec un écart allant de 2 ans à plus de 11 ans.

Cette situation s'explique par de nombreux facteurs au titre desquels l'offre de services de santé de proximité, moins importante en outre-mer, a un impact important. Le niveau d'éducation, les conditions de vie et en particulier de travail, de logement et de qualité de l'environnement, fortement liés à l'espérance de vie, doivent également être pris en considération.

Comparaison de l'espérance de vie en 2021
entre la métropole et les territoires d'outre-mer

(en années)

Source : commission des finances du Sénat à partir des données Insee

3. Des collectivités territoriales ultramarines en tension financière

Les collectivités des territoires d'outre-mer, et surtout celles des DROM, connaissent des difficultés financières structurelles. Sur ce sujet, les rapporteurs spéciaux renvoient à l'analyse développée dans leur récent rapport sur les contrats de redressement outre-mer (COROM)1(*). Si les collectivités d'outre-mer ne constituent pas un ensemble homogène et si les explications de ces situations financières globalement moins favorables qu'en métropole varient d'un territoire à l'autre, des causes communes peuvent cependant être dégagées.

Ainsi, l'insularité ou la faiblesse des interconnexions pour la Guyane génère des surcoûts importants sur les charges à caractère général des communes d'outre-mer, les dépenses de personnel sont également plus élevées en raison d'une faible intégration intercommunale, de la majoration des traitements des fonctionnaires et de taux d'administration élevés.

Dès lors, les taux d'épargne brute et nette des communes d'outre-mer restent très inférieurs à ceux constatés dans les communes de métropole. Il résulte de cette situation des marges d'autofinancement réduites dans les communes d'outre-mer approchant ou dépassant régulièrement le seuil d'alerte fixé à 100 %.

Sur les 129 communes des DROM, 30 sont actuellement dans le réseau d'alerte de la DGFIP en raison d'une situation financière dégradée et nécessitant une vigilance particulière soit 24 % des communes.

Par ailleurs, si la situation d'ensemble des EPCI est plutôt favorable, certains points doivent être mis en exergue. En effet, la situation de certains EPCI est moins solide. À titre d'exemple, la communauté d'agglomération Grand Sud Caraïbes en Guadeloupe présente un encours fournisseurs de 32,5 millions d'euros, notamment à l'égard des communes membres.

De surcroit, cet équilibre financier d'ensemble s'explique de manière quasi générale dans les DROM par la faible surface financière des EPCI en raison de transferts de compétence très limités à ce jour et subséquemment d'un faible niveau d'investissement des EPCI. Pour autant, ces transferts devraient s'accentuer à l'avenir jusqu'en 2026.

Le contexte inflationniste actuel devrait contribuer à une aggravation de ces situations financières déjà dégradées. Ainsi, la hausse des prix des biens et services pourrait générer une diminution de l'épargne brute des communes.

En effet, les dépenses à caractère général devraient augmenter sous l'effet de l'inflation et notamment les dépenses énergétiques et celles relatives à l'entretien et aux réparations qui intègrent la hausse des coûts de la construction et des travaux publics.

Les dépenses de personnel augmenteront également sous l'effet de la revalorisation du point d'indice2(*). Or, la part des charges de personnel étant particulièrement importante dans les communes des DROM, la revalorisation du point d'indice devrait peser encore plus fortement qu'en métropole notamment en raison du taux d'administration.

Dans ce contexte, il semble nécessaire de renforcer les aides de l'État aux collectivités en difficultés. C'est le sens des 12 recommandations formulées par les rapporteurs spéciaux dans leur rapport susmentionné sur les COROM.

B. DE NOUVEAUX ENJEUX À VENIR POUR LES OUTRE-MER : TRANSITION ÉCOLOGIQUE ET AUTONOMIE ALIMENTAIRE

1. Un objectif d'autonomie énergétique des départements et région d'outre-mer (DROM) pour 2030 

La loi n° 2015-992 du 17 aout 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte a fixé comme objectif de parvenir à l'autonomie énergétique dans les DROM à l'horizon 2030. En effet, dans les territoires d'outre-mer, l'acheminement d'électricité constitue un enjeu particulier dans la mesure où pour ces territoires insulaires et/ou faiblement interconnectés, la production et la livraison finale est fortement carbonée. Il en résulte des coûts d'approvisionnement en électricité très supérieurs à ceux constatés en métropole.

Le développement des énergies renouvelables (EnR), dont les coûts sont aujourd'hui bien inférieurs, représente donc une nécessité d'autant que certaines filières liées à ces énergies, comme celle de la bagasse3(*) et de l'éthanol à La Réunion, peuvent générer de nombreux emplois. Cette transition énergétique permettrait donc de répondre aux problèmes de dépendance des territoires d'outre-mer aux énergies importées et de créer des emplois nouveaux dans un contexte de taux de chômage bien plus élevé qu'en métropole (cf. supra).

Selon une étude de l'ADEME relative à l'autonomie énergétique des zones non interconnectées (ZNI) de janvier 2021, malgré des gisements très différents d'un territoire à l'autre, pour des raisons géographiques ou de choix politiques, les potentiels EnR locaux seraient suffisants pour assurer un mix électrique 100 % renouvelable tout en satisfaisant l'ensemble de la demande électrique à tout instant. L'atteinte de l'autonomie énergétique ne semble toutefois pas réalisable d'ici 2030 en raison du rythme élevé qu'elle impliquerait pour le déploiement des filières renouvelables.

Sur la question de la transition écologique des territoires d'outre-mer, les annonces du CIOM sont très ciblées (déplacer le village de Miquelon en risque submersion, réviser le plan Eau DOM...) et ne concernent pas le développement des énergies renouvelables. À ce stade, la mesure 63 prévoit simplement de définir en 2024 une stratégie d'atténuation et d'adaptation au changement climatique pour chaque territoire.

Les rapporteurs spéciaux appellent de leurs voeux un volet spécifique au développement des énergies renouvelables incluant les modalités de financement y afférentes.

2. L'indispensable autonomie alimentaire

L'autonomie alimentaire des territoires d'outre-mer est un autre objectif à horizon 2030, ce qui implique de rechercher de nouveaux modèles de développement agricoles et alimentaires. Ces évolutions sont à envisager sous deux angles :

- celui de l'offre, avec une préservation des surfaces agricoles, des métiers plus attractifs et un accompagnement vers de nouvelles pratiques ;

- celui de la demande, en s'efforçant d'orienter la demande vers des produits plus locaux, de la part des ménages comme des acteurs publics ou privés, comme les opérateurs de la restauration collective.

Cette recherche de l'autonomie alimentaire est d'autant plus nécessaire que les écarts de prix à la consommation continuent à se creuser. En effet, en 2022, le niveau général des prix à la consommation est plus élevé dans les départements d'outre-mer (DOM) qu'en France métropolitaine. Il est supérieur de 16 % en Guadeloupe, 14 % en Martinique et en Guyane et 9 % à La Réunion. À Mayotte, il dépasse celui de la France métropolitaine de 10 % sur un champ d'étude plus restreint excluant les loyers4(*).

Par rapport à la dernière étude menée par l'INSEE en 2015, ces taux ont augmenté de 2 à 3 points.

Ces comparaisons se font sur la base d'une méthode tenant compte des différences de paniers de consommation moyens entre chaque DROM et la France métropolitaine.

Écarts de prix entre les DROM et la France métropolitaine en 2010, 2015 et 2022

(en %)

Nd : non déterminé.

Source : commission des finances du Sénat à partir des données Insee, enquête de comparaison spatiale des prix 2022 En pourcentage par rapport aux prix constatés en France métropolitaine

Ainsi, dans le détail entre 2015 et 2022, les écarts de prix (indices de Fisher) par rapport à la France métropolitaine s'accroissent dans tous les DOM. L'augmentation est de plus de 3 points à Mayotte et en Guadeloupe, contre 2 points de plus en Guyane, à La Réunion et en Martinique. Par rapport à 2010, la hausse est également plus marquée en Guadeloupe (+ 8 points, contre + 4 points en Martinique, + 3 points à La Réunion et + 1 point en Guyane).

Écarts de prix (Fisher) entre les DOM et la métropole en 2010, 2015 et 2022

Source : Insee, enquêtes 2010, 2015 et 2022 de comparaison spatiale des prix

Ces écarts s'expliquent avant tout par la cherté des biens et en particulier des produits alimentaires, pour lesquels les prix payés par les ménages sont de 30 % à 42 % plus élevés. Ils sont plus faibles pour les services, qui restent cependant globalement plus chers outre-mer, notamment les services de communication.

Écarts de prix (Fisher) par grandes fonctions de consommation
entre les DOM et la France métropolitaine en 2022

Source : Insee, enquête 2022 de comparaison spatiale des prix

De surcroit, les rapporteurs spéciaux soulignent que les écarts de prix entre les DROM et la métropole ont augmenté alors même que les niveaux d'inflation constatés dans les territoires ultramarins sont inférieurs à ceux de métropole et que les territoires ultramarins bénéficient d'un bouclier qualité prix (BQP)5(*) mis en place en 2012.

Évolution de l'inflation entre janvier 2022 et juin 2023 - comparaison entre la France et les territoires d'outre-mer

Source : commission des finances du Sénat à partir des données de l'INSEE, ISPF et ISEE

Comme pour la transition écologique, les annonces du CIOM pour renforcer la souveraineté alimentaire des territoires d'outre-mer sont limitées et se bornent à :

- apporter un soutien de 10 millions d'euros pour les producteurs ultramarins de fruits et légumes en vue de compenser les surcoûts des intrants et de l'énergie, et de 15 millions dans le cadre du complément national du programme d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité (POSEI) en 2024 ;

- donner aux agriculteurs ultramarins des moyens de protection adaptés contre les organismes et adventices nuisibles ;

- permettre le renouvellement des flottes de pêche en demandant à la Commission européenne, une évolution de certains critères et en renforçant les moyens financiers et humains destinés à la collecte des données sur les stocks de poissons dans les outre-mer.

À ce stade, rien n'est prévu concernant la préservation des surfaces agricoles ou le développement de nouvelles pratiques.

II. LES ANNONCES DU COMITÉ INTERMINISTERIEL DES OUTRE-MER : UNE AVANCÉE NOTABLE QUI NE RÉPOND CEPENDANT PAS À TOUTES LES ATTENTES

A. UN COMITÉ INTERMINISTERIEL TARDIF POUR RÉPONDRE À L'APPEL DE FORT-DE-FRANCE

1. Un contexte de tension sociale à l'origine de l'appel de Fort-de-France

Face à des tensions sociales récurrentes dans les territoires d'outre-mer depuis 2006, les présidents des régions de Guadeloupe, Réunion, Mayotte, Martinique, Saint-Martin et Guyane avaient lancé, en mai 2022, un appel à l'État pour un changement des politiques d'aide au développement dans les territoires d'outre-mer. Ils y dénonçaient « une situation de mal-développement structurel » et des inégalités « de plus en plus criantes » dont souffrent les populations.

Cette déclaration de Fort-de-France visait à mettre en place rapidement une concertation avec les populations et les acteurs locaux pour agir autour de trois axes :

- refonder la relation entre les territoires d'outre-mer et la République par la définition d'un nouveau cadre permettant la mise en oeuvre de politiques publiques conformes aux réalités de chacune des régions ;

- conjuguer la pleine égalité des droits avec la reconnaissance des spécificités, notamment par une réelle domiciliation des leviers de décision au plus près des territoires ;

- instaurer une nouvelle politique économique fondée sur les atouts des territoires d'outre-mer notamment géostratégiques et écologiques.

Les signataires de l'appel de Fort-de-France avaient alors été reçus le 7 septembre 2022 par Emmanuel Macron et par Gérald Darmanin, ministre de l'Intérieur et des outre-mer afin d'évoquer la situation en matière de vie chère, d'accès aux soins, à l'éducation, à l'emploi ou au logement et la Première ministre s'était engagée à tenir un comité interministériel consacré à l'outre-mer (CIOM) dans un délai de 6 mois afin d'acter une première série de décisions.

2. Les 72 annonces du CIOM

Après plusieurs reports, le CIOM s'est réuni le 18 juillet 2023, soit plus de 4 mois après le délai initialement annoncé par la Première ministre.

72 annonces ont été faites, orientées sur 5 axes :

- transformer les économies ultramarines pour créer de l'emploi et lutter contre la vie chère avec des mesures concernant la fiscalité locale outre-mer, la croissance des entreprises, l'insertion économique régionale ou la souveraineté alimentaire ;

- améliorer la vie quotidienne dans les outre-mer en luttant contre le mal logement, en renforçant l'offre médico-sociale et en réformant la politique de mobilité ;

- mieux accompagner les enfants, les jeunes et les étudiants à grandir, créer, se former, se cultiver et enrichir en compétences les outre-mer notamment en créant des solutions d'accueil supplémentaires, en investissant dans l'apprentissage et en facilitant les mutations dans les territoires de fonctionnaires ultramarins ;

- garantir un environnement normatif adapté aux spécificités des outre-mer ;

- construire l'avenir avec des équipements et infrastructures adaptés aux nouveaux défis en continuant la contractualisation des investissements publics, en sécurisant l'accès au foncier aménageable et en anticipant la transition écologique.

B. CERTAINS SUJETS IMPORTANTS NE SONT CEPENDANT PAS ÉVOQUÉS DANS LES ANNONCES ET LA MISE EN oeUVRE DE CES DERNIÈRES NÉCESSITERA LA PLUS GRANDE VIGILANCE

1. Les questions institutionnelles et sécuritaires écartées

La question d'une réforme institutionnelle, notamment abordée par les élus lors de l'appel de Fort-de-France de mai 2022, n'a pas été abordée dans le cadre du CIOM alors même que le Président de la République s'était déclaré ouvert sur la question des évolutions institutionnelles et statutaires lorsqu'il avait rencontré les élus ultramarins le 7 septembre 2022. Sur ce point, les services de la Première ministre ont indiqué que les questions institutionnelles seront « renvoyées plutôt en fin d'année ».

Par ailleurs, les enjeux sécuritaires, pourtant au coeur des préoccupations ultramarines, n'ont également pas été abordés, la Première ministre indiquant que la sécurité et l'immigration seront les sujets d'une prochaine loi sans préciser s'il s'agissait de la loi immigration ou si un texte spécifique à l'outre-mer serait présenté.

Enfin, outre cet engagement relatif à un CIOM, la possibilité d'un « Oudinot du pouvoir d'achat » avait également été évoquée en septembre 2022. Force est cependant de constater que si des annonces ont été faites dans ce sens lors du comité, notamment la réforme de l'octroi de mer qui pèse sur le prix des biens et celle de la régulation des prix et du système de distribution des carburants, aucune mesure d'ensemble sur le pouvoir d'achat n'a été actée.

2. L'enjeu de la mise en oeuvre des mesures annoncées

Nombre de ces annonces prennent la forme d'intention sans mesure réellement concrète : définir une stratégie, examiner un sujet, évaluer tel dispositif, donner les moyens, conclure une convention, proposer une loi, résoudre les difficultés...

Des réponses concrètes devront donc suivre ces annonces.

D'autres mesures sont plus précises et prévoient notamment des actions à court ou moyen terme comme porter de 35 à 50 % l'aide à la rénovation de logement pour les propriétaires modestes, créer un service incendie à Saint-Martin, créer 10 000 places d'accueil pour les jeunes enfants, rénover 600 logements étudiants, augmenter les bourses étudiantes, créer un conservatoire en Martinique...

Cependant, aucun chiffrage sur le coût de ces mesures n'est avancé à ce stade. Or, leur mise en oeuvre nécessitera, pour certaines d'entre elles, des moyens budgétaires conséquents et une réelle volonté politique.

Dans ce contexte, si les rapporteurs spéciaux saluent cette feuille de route, ils demeureront vigilants aux réalisations et avancées concrètes.

À ce stade, ils estiment que les crédits budgétaires de la mission outre-mer pour 2024 (cf. analyse infra) constituent un premier pas pour contribuer à la mise en place des premières actions. Ainsi, les crédits de la ligne budgétaire unique dédiée au logement augmentent de 49 millions d'euros en AE et les aides à la continuité territoriale enregistrent une hausse de 22 millions d'euros pour intégrer trois nouveaux dispositifs (cf. commentaire de l'article 55 rattaché). Cependant, d'autres ouvertures de crédits seront nécessaires afin de financer l'ensemble des annonces du CIOM.

Afin d'assurer la mise en application des mesures du Comité interministériel des outre-mer, il est prévu qu'un comité de suivi se réunira régulièrement. Le prochain Comité interministériel des Outre-mer devrait donc se tenir dans 12 mois.

Si un suivi régulier et exhaustif, mesure par mesure, parait indispensable, les rapporteurs spéciaux rappellent cependant, non sans regret, qu'un CIOM annuel était déjà souhaité par Édouard Philippe lors du dernier comité tenu en 2019 mais qu'aucune suite n'avait cependant été donnée jusqu'au comité du 18 juillet dernier, soit 4 ans plus tard.

DEUXIÈME PARTIE
LES CRÉDITS DE LA MISSION OUTRE-MER

Les crédits de la mission « Outre-mer » présentés dans le projet de loi de finances pour 2024 s'élèvent à 2 944,8 millions d'euros en AE et 2 697,9 millions d'euros en CP soit une hausse de 6,9 % en AE et une hausse de 4,6 % en CP par rapport à la LFI 2023.

Les rapporteurs spéciaux saluent cette hausse supérieure au taux prévisionnel d'inflation pour 2024 qui s'établit à 2,5 %.

Évolution LFI 2023 / PLF 2024 des crédits de la mission « Outre-mer »

(en euros)

FDC : fonds de concours - ADP : attributions de produits.

Source : commission des finances du Sénat à partir du PLF 2024

Cette évolution à la hausse des AE et CP s'explique notamment, en sus d'un tendanciel en augmentation pour les deux programmes, par le renforcement ou la création des dispositifs suivants :

Sur le programme 138 « Emploi outre-mer » :

- la mise en oeuvre du plan « SMA 2025 + », qui a pour ambition de permettre de renforcer les compétences et qualifications des volontaires à l'issue de leur parcours de service militaire adapté, et de prendre en compte des publics supplémentaires spécifiques (mères célibataires, mineurs décrocheurs) (+ 4,7 millions d'euros en AE et en CP) ;

- l'expérimentation d'un programme de formation des cadres en Guadeloupe, en Martinique et à Saint-Martin qui a pour objet de soutenir, d'une part, la formation des étudiants à hauts potentiels des territoires visés et, d'autre part, les besoins en recrutement des entreprises (+ 1,9 million d'euros en AE et + 0,4 million d'euros en CP) ;

- le renforcement de l'aide à la mobilité des populations, mise en oeuvre au travers des dispositifs opérés par l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité (LADOM), permettant d'élargir les publics éligibles (1,4 million d'euros en AE et en CP).

Parallèlement, le programme 138 fait l'objet d'une mesure d'économie de 8,8 millions d'euros en AE et en CP suite au transfert à Pôle emploi de certaines formations assurées jusqu'alors par LADOM.

Sur le programme 123 « Conditions de vie outre-mer » :

- la poursuite de la dynamique impulsée par le Plan logement outre-mer afin de développer l'habitat et de le rénover, ainsi que de résorber l'habitat indigne (49 millions d'euros en AE et 10 millions d'euros en CP) ;

- le renforcement de l'aide à la mobilité des populations, mise en oeuvre au travers des dispositifs opérés par l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité (LADOM), permettant d'élargir les publics éligibles (21,6 millions d'euros en AE et en CP) ;

- la poursuite et le renforcement de l'aide ciblée vers certains territoires, au travers des contrats de redressement outre-mer (COROM) pour 40 millions d'euros en AE et 16 millions d'euros en CP ;

- la poursuite de l'aide aux collectivités dans la lutte anti-sargasses (1,4 million d'euros en AE et en CP).

Le programme 123 fait également l'objet d'une mesure d'économie de 10 millions d'euros, l'aide à la collectivité territoriale de Guyane passant de 40 à 30 millions d'euros.

Enfin, il convient de souligner que les deux programmes de la mission ont été mis à contribution afin de participer aux financements de la transition écologique, conformément à une demande de la Première ministre, à hauteur de 5,3 millions d'euros en AE et 3 millions d'euros en CP sur le programme 138 et de 2,9 millions d'euros en AE et CP sur le programme 123.

I. L'ÉVOLUTION DU PROGRAMME 123 « CONDITIONS DE VIE OUTRE-MER »

Le programme 123 « Conditions de vie outre-mer » se compose de huit actions et rassemble les crédits des politiques publiques en faveur de l'amélioration des conditions de vie dans les outre-mer.

À ce titre, il porte le financement des priorités suivantes : le logement social, l'aménagement du territoire (contrats de convergence et de transformation), les aides à la continuité territoriale, les dotations spéciales destinées à financer des projets structurants et/ou de reconversion) et le fonds exceptionnel d'investissement.

Entre la LFI 2023 et le PLF 2024, il enregistre une hausse de 7,3 % en AE, soit 69,4 millions d'euros, et de 0,7 % en CP, soit 5,3 millions d'euros. En AE toutes les actions de ce programme sont stables ou à la hausse à l'exception des actions « Aménagement du territoire » et « Appui à l'accès aux financements bancaires ». De même, en CP, toutes les actions sont stables ou en hausse, exception faite des actions « Collectivités territoriales » et « Appui à l'accès aux financements bancaires ».

Évolution des crédits du programme 123

(en euros)

FDC : fonds de concours - ADP : attributions de produits.

Source : commission des finances du Sénat à partir du PLF 2024

A. LA LIGNE BUDGÉTAIRE UNIQUE (ACTION 1) : UN NIVEAU HISTORIQUEMENT HAUT POUR CONSTRUIRE DE NOUVEAUX LOGEMENTS ET LUTTER CONTRE L'HABITAT INSALUBRE

La LBU finance :

- le développement du logement locatif social (PLS6(*) et LLS7(*)) et du logement locatif très social (LLTS8(*)) et la réhabilitation de ces logements (SALLS9(*)) ;

- l'accession sociale - via le dispositif « logement évolutif social (LES), mais également le PTZ10(*) et le PSLA11(*) - ainsi que l'amélioration de l'habitat des propriétaires- occupants via l'aide à l'amélioration de l'habitat (AAH) ;

- la résorption de l'habitat insalubre (RHI) et spontané (RHS) ainsi que l'aménagement et la viabilisation des terrains en vue d'assurer la constitution de réserves foncières grâce au fonds régional d'aménagement foncier et urbain (FRAFU)12(*).

1. Des tensions sur le marché du logement en outre-mer qui s'expliquent par les spécificités démographiques, géographiques et économiques ultramarines
a) Des logements sociaux plus nombreux mais toujours insuffisants

Hormis la Guyane, les DROM sont des îles et archipels dans lesquels le foncier est rare et qui, pour des raisons de topographie, se prêtent parfois difficilement à la construction de logements. Par ailleurs, la situation géographique de ces territoires les expose également à des risques naturels importants générant ainsi une limitation, de fait, des terrains constructibles, renchérissant le coût de la construction et rendant nécessaire un effort permanent de construction, de réhabilitation et d'adaptation des logements.

De surcroit, les évolutions démographiques liées soit au vieillissement de la population (Martinique, Guadeloupe), soit à la forte croissance de la population (Guyane, Mayotte), l'évolution des modes de vie et les caractéristiques propres de la structure des ménages (importance des familles monoparentales, aspiration croissante des plus jeunes à la décohabitation) liées à un niveau de vie inférieur à la métropole créent un besoin de logements sociaux considérable.

Croissance démographique comparée entre la métropole
et les territoires d'outre-mer entre 2019 et 2022

(en %)

Sources : commission des finances du Sénat à partir des données Insee - recensement de la population

Évolution du revenu disponible brut des ménages entre 2017 et 2019 - comparaison métropole / territoires d'outre-mer

Sources : Insee - Comptes économiques régionaux des ménages

À ce constat, s'ajoutent de nombreux logements insalubres qui pèsent sur l'offre globale de logements.

Il résulte de ce qui précède que 80 % des ménages des DROM sont éligibles au logement social (contre 66 % en métropole) et 70 % au logement très social alors que la part des ménages des DROM bénéficiant d'un logement social n'est que de 15 %13(*).

Aussi, même si la part de logements sociaux dans les outre-mer atteint 21,6 % du parc de logements en 2022, pour une moyenne nationale de 17,2 %, les besoins ne sont pas satisfaits et la tension sur la demande de logements sociaux demeure très forte par rapport à l'offre disponible.

Les rapporteurs spéciaux soulignent, par ailleurs, que si le nombre de logements sociaux dans les DROM a augmenté entre 2021 et 2022, passant de 172 966 à 178 083, soit 5 117 logements sociaux supplémentaires, la part des logements sociaux dans le total des logements diminue de près d'un point.

Part des logements sociaux

Source : commission des finances du Sénat à partir du rapport de la Cour des comptes « Le logement dans les DROM » (septembre 2020) + données INSEE + réponses au questionnaire budgétaire

b) Des logements indignes et insalubres très difficiles à comptabiliser

Les DROM présentent une proportion de logements indignes et insalubres nettement supérieure à la métropole. En effet, près de 18 % du parc de logements (soit environ 147 500 habitations14(*) sur les 824 418 résidences principales que compte le parc) sont concernés, contre 1,2 % en France métropolitaine.

Cette situation s'explique en partie par la construction d'un habitat informel important, notamment dans un contexte de pénurie de logements.

La nature même de ces logements informels (auto-constructions sans déclaration et titres de propriété) rend leur recensement très complexe et peu fiable avec une multitude de situations hétérogènes allant de l'habitat dégradé à indigne voire insalubre.

Logements indignes, insalubres et informels dans les DROM

Source : Fondation Abbé Pierre, rapport annuel sur l'état du mal-logement en France - 2022

c) La nécessaire évolution du troisième plan logement outre-mer pour tenir compte de la situation

L'État a mis en place un plan logement outre-mer pour la période 2015-2019 (PLOM 1) avec un objectif de construction et de réhabilitation de 10 000 logements par an. Cet objectif n'a cependant pas été atteint en raison, notamment, d'une insuffisante prise en compte des spécificités de chaque territoire.

Un deuxième PLOM, signé le 2 décembre 2019, a été lancé pour les années 2019-2022. Il regroupe 77 mesures, autour de 4 axes :

- mieux connaître et mieux planifier pour mieux construire ;

- adapter l'offre aux besoins des territoires ;

- maîtriser les coûts de construction et de réhabilitation ;

- accompagner les collectivités territoriales en matière de foncier et d'aménagement.

Ce deuxième plan a été prolongé en 2023 afin de permettre à la fois d'achever sa mise en oeuvre, d'en faire le bilan et de lancer une réflexion associant les différents partenaires sur le contenu d'un futur nouveau plan.

La différence majeure entre le PLOM 1 et le PLOM 2 réside dans l'ambition affichée de prendre plus spécifiquement en compte les particularités de chaque DROM, partant du constat que le PLOM 1 était insuffisamment différencié par territoire.

Les ministères chargés du logement et des outre-mer ont confié à l'Inspection générale de l'environnement et du développement durable (IGEDD) une mission d'évaluation du PLOM 2 devant aboutir à la remise d'un rapport fin 2023, afin de cadrer les réflexions autour de la future feuille de route du logement outre-mer pour la période 2024-2027. Cette dernière a, dès à présent, la volonté de développer une plus grande territorialisation, afin de répondre de manière plus ciblée aux besoins des populations ultramarines.

Dans l'attente de cette l'évaluation, aucun bilan chiffré sur le nombre de constructions dans le cadre du PLOM 2 n'a été réalisé.

À noter par ailleurs, que contrairement au PLOM 1, ce deuxième plan n'a pas fixé d'objectifs quantitatifs et la mesure 2.1.1 précise simplement que « les objectifs annuels assignés à chaque territoire seront désormais à la fois quantitatifs, par type de produits, et qualitatifs, selon une grille d'objectifs adaptée à chaque territoire ».

À l'inverse, la loi de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer (loi EROM)15(*) et portant autres dispositions en matière sociale et économique prévoit, dans son article 3, que « la République s'assigne pour objectif la construction et la réhabilitation de 150 000 logements dans les outre-mer au cours des dix années suivant la promulgation de la présente loi. Cet objectif est décliné territorialement, en tenant compte des besoins de réhabilitation ».

Cet objectif de 150 000 logements recouvre tous les logements, sociaux, intermédiaires ou autres bénéficiant d'un soutien de l'État par des aides à la pierre ou des aides fiscales. L'objectif de production de logements directement subventionnés par l'État s'établit, pour sa part, à environ 130 000 logements sur 10 ans ce qui permettrait de répondre au déficit de logements sociaux estimé à plus de 100 00016(*) sur l'ensemble des DROM. Cet objectif a été territorialisé.

Objectifs annuels territorialisés de production de logements bénéficiant
de subventions de l'État

Source : commission des finances du Sénat à partir des réponses au questionnaire budgétaire

Cependant, le nombre de constructions de logements (livrés) entre 2017 et 2022 s'élève à près de 24 000. En ajoutant les logements réhabilités, pour les 6 premières années, 2017-2022, le nombre de logements sociaux et intermédiaires aidés (financés par la LBU et crédit d'impôt) s'élève à 54 930.

À ce rythme, l'objectif de 130 000 logements d'ici 2027 ne sera pas tenu.

Nombre de logements neufs livrés entre 2017 et 2022

Source : commission des finances du Sénat à partir des réponses au questionnaire budgétaire

De surcroit, il convient de souligner que le PLOM 2 ne faisait aucune mention des objectifs de la stratégie nationale du Logement d'abord (LDA)17(*), alors que certains territoires ultra marins, en particulier Mayotte et la Guyane, comptent un grand nombre de personnes sans domicile.

À contre-courant même de cette stratégie, le Plan prévoyait la construction d'hébergements temporaires en Guyane et à Mayotte pour accueillir transitoirement les occupants des bidonvilles dont les modalités d'évacuation et de destruction ont été accélérées par l'article 19718(*) de la loi ELAN.

Il en résulte que le nombre des logements sociaux alloués aux personnes sans-abri est très faible dans l'ensemble des DROM et particulièrement en Martinique, Guadeloupe et à Mayotte.

Évolution du nombre d'attribution de logements sociaux à des personnes sans abri entre 2017 et 2022

Source : Baromètre Logement d'abord

Dans ce contexte, il semble utile aux rapporteurs spéciaux d'intégrer, dans le prochain PLOM, un volet dédié au logement des sans abri.

Enfin, le PLOM 2 ne présentait un volet dédié à la lutte contre l'habitat indigne que pour la Guyane et Mayotte en axant les actions à mettre en oeuvre que sur le développement de bâtiment modulaire ou de centres d'hébergement. Or, comme vu supra, tous les territoires d'outre-mer sont touchés par l'habitat indigne, insalubre, précaire ou dégradé.

Dès lors, les rapporteurs spéciaux estiment que le prochain PLOM devra également présenter une stratégie plus large dans ce domaine en sortant d'une logique de construction d'habitats temporaires pour aller vers une logique d'habitats pérennes.

2. La programmation budgétaire de la LBU et le niveau de consommation des dernières années
a) Une programmation en hausse significative permettant d'atteindre un niveau historique mais un flou très regrettable sur la ventilation de ces crédits

Entre la LFI 2023 et le PLF 2024, l'action 1 « Logement » enregistre une hausse de 20,2 % soit 49 millions d'euros en AE et une hausse de 5,5 % en CP soit 10 millions d'euros.

Cette augmentation s'inscrit dans une tendance haussière amorcée en 2021 après plus de dix années de diminution des crédits de la LBU. En effet, entre 2011 et 2020, les crédits dédiés au logement ont diminué de 24 % passant de 274,5 millions d'euros à 206,6 millions d'euros avant de repartir à la hausse à compter de 2021.

Ainsi, les hausses constatées, en AE, depuis 2021 permettent, en 2024 et pour la première fois, de dépasser le niveau du début des années 2010.

Évolution des crédits ouverts en LFI entre 2011 et 2024 (PLF)

(en euros)

Source : commission de finances du Sénat à partir des documents budgétaires (projets annuels de performances)

Source : commission de finances du Sénat à partir des documents budgétaires (projets annuels de performances)

L'effort réalisé en PLF 2024 sur les AE et le CP, que les rapporteurs spéciaux saluent, est sans précédent. Cependant, il est regrettable, en termes d'information des parlementaires, que le projet annuel de performances pour 2024 ne permettent pas d'identifier sur quelles sous action précisément seront affectés ces crédits supplémentaires.

En effet, afin de laisser une plus grande souplesse et ainsi améliorer le niveau de consommation des crédits de la LBU, ces derniers ne sont pas fléchés, ex ante, sur des priorités précises, de sorte qu'il n'est pas possible de savoir quelle part des 49 millions d'euros sera allouée à l'accroissement du nombre de logements sociaux, à l'amélioration de la sécurité du parc social au regard des risques sismiques, à l'accession sociale à la propriété ou à la résorption de l'habitat insalubre et informel.

Or, les rapporteurs spéciaux soulignent que cette répartition était disponible dans les précédents projets annuels de performances. Il leur parait absolument nécessaire, l'année prochaine, de la réintégrer afin de permettre des comparaisons d'une année sur l'autre.

Cependant, une répartition des crédits de la LBU par sous action a été transmise aux rapporteurs spéciaux lors de leur audition de la DGOM. Il en résulte que sur les 49 millions d'euros d'AE supplémentaires, 19 millions d'euros seront alloués à la construction de logements, 12 millions d'euros financeront l'amélioration du parc locatif social, 16 millions d'euros bénéficieront à la réhabilitation de l'habitat insalubre et 2 millions d'euros permettront des études.

b) Une consommation qui peine à se redresser

Alors que la consommation des crédits de la LBU s'est écroulée entre 2011 et 2019 suivant ainsi la contraction des crédits ouverts, elle repart légèrement à la hausse depuis 2020 mais peine à se redresser.

Évolution de la consommation des AE et CP de la LBU entre 2011 et 2022

(en euros)

Source : commission de finances du Sénat à partir des documents budgétaires (rapports annuels de performances)

Il en résulte une sous-consommation récurrente qui persiste.

Ainsi, en 2020, la consommation des AE enregistre une hausse pour s'établir à 217,9 millions d'euros19(*) pour une LFI de 206,6 millions d'euros. Le taux de consommation des CP s'améliore également (98,6 % avec une consommation de 179,3 millions d'euros pour une LFI de 181,9 millions d'euros). Cette amélioration du taux de consommation résulte cependant très largement d'une baisse des crédits ouverts en LFI en 2020 (- 37,6 millions d'euros par rapport à l'année précédente).

En 2021, les opérations nouvelles sur AE s'élèvent à 247,41 millions d'euros20(*) soit un montant supérieur aux crédits ouverts en LFI (224,6 millions d'euros). Cependant, en CP le taux de consommation s'établit à 83 % malgré la baisse des CP ouverts en LFI générant ainsi un niveau historiquement bas de consommation de CP (146,7 millions d'euros).

En 2022, la consommation des AE s'établit à 220,4 millions d'euros d'AE21(*) pour des ouvertures de crédits de 234,6 millions d'euros en LFI. Ce niveau de consommation est en baisse par rapport à l'année précédente. La consommation de CP s'élèvent à 174,5 millions d'euros soit 87 % et enregistre une hausse notable par rapport à 2021.

Niveau de consommation des crédits de la LBU entre 2011 et 2022 en AE et CP

(en euros et en %)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires (rapports annuels de performances)

Taux d'exécution des crédits de la LBU entre 2011 et 2022 en AE et CP

(en %)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires (rapports annuels de performances)

Les facteurs de cette sous-consommation sont multiples et identifiés pour certains, notamment le manque d'ingénierie. Dans ce contexte, les rapporteurs regrettent que le montant des crédits alloués aux interventions en ingénierie ne soit pas indiqué dans le projet annuel de performances de la mission « Outre-mer ».

Ils rappellent que ces crédits avaient enregistré une diminution de 3,3 millions d'euros en AE et 2,7 millions d'euros en CP entre 2022 et 2023.

Aussi, dans un contexte de hausse des crédits de la LBU, ils alertent sur la nécessité de développer l'aide en ingénierie pour prévenir autant que possible un risque de sous exécution.

B. LES CRÉDITS DE SOUTIEN AUX COLLECTIVITÉS (ACTIONS 2 ET 6) : UN ENGAGEMENT DE L'ÉTAT QUI SE MAINTIENT À UN NIVEAU ÉLEVÉ

1. Des crédits reconduits au titre des contrats de convergence et de transformation en l'absence de signature des nouveaux contrats
a) La préparation des nouveaux contrats 2024-2027

Prévus par la loi du 28 février 2017 relative à l'égalité réelle Outre-mer qui avait pour but de réduire les écarts de développement persistants avec la métropole, les contrats de convergence et de transformation (CCT) succèdent aux contrats de plan État-Région (CPER). Ils ont pour objectif d'investir en faveur du développement des territoires tout en prenant en compte les spécificités et les besoins de l'outre-mer et s'inscrivent, par ailleurs, dans la « Trajectoire 5.0 » déclinée pour les territoires ultramarins, à savoir zéro carbone, zéro déchet, zéro vulnérabilité au dérèglement climatique, zéro intrant polluant, zéro exclusion.

Ces contrats ont été signés le 8 juillet 2019 pour les collectivités territoriales de Guyane et de Martinique, les régions Guadeloupe et La Réunion, le département de Mayotte et les collectivités de Saint-Pierre-et-Miquelon et Wallis-et-Futuna, le 22 juin 2020 pour Saint-Martin22(*). Le contrat de développement et de transformation 2021-2023 a été signé le 14 avril 2021 pour la Polynésie pour son volet « Pays » et le 5 mai 2021 pour son volet « communes». La Nouvelle-Calédonie utilise un contrat de développement (CDEV), qui repose sur les dispositions spécifiques de l'article 210 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999.

L'ensemble de ces contrats devait initialement se terminer en 2022. Des avenants de reconduction ont été conclus afin d'assurer la continuité de la politique contractuelle jusqu'en décembre 2023 dans l'attente de nouvelles négociations.

La future génération de CCT sera signée à la fin d'année 2023. Les mandats de négociation des futurs CCT ont été signés par la Première ministre et ont été envoyés aux représentants de l'État dans les territoires ultramarins concernés. Ces contrats couvriront la période 2024-2027, harmonisant ainsi leur terme avec celui des CPER métropolitains. Afin de pouvoir disposer d'un contrat signé permettant une mise en oeuvre dès le début de l'année 2024, les territoires doivent communiquer, pour le 31 octobre 2023, leurs propositions établies à l'issue de leurs négociations avec les collectivités.

S'agissant plus particulièrement de la Nouvelle-Calédonie, le prochain contrat de développement 2024-2027 s'inscrira dans une démarche resserrée entre l'État, le gouvernement de Nouvelle-Calédonie et les trois Provinces, les communes étant associées aux contrats précédents.

Une réunion interministérielle s'est tenue le 24 mai 2023 afin de valider les montants à contractualiser pour les nouveaux CCT et CDEV pour la période 2024-2027. Le montant de cette contractualisation au titre du programme 123 de la mission « outre-mer » s'élève à 889,7 millions d'euros.

Sur cette base, en PLF 2024, les crédits alloués à l'action 2 s'élèvent à 209,6 millions d'euros en AE et 160,8 millions d'euros en CP soit respectivement une baisse de 1 % (- 2,1 millions d'euros) en AE et une hausse de 1,6 % (+ 2,6 millions d'euros) en CP par rapport à la LFI 2023.

Au titre de la contractualisation, 175,3 millions d'euros en AE et 132 millions d'euros en CP ont été ouverts (soit une stabilité en AE et une hausse de 10 millions d'euros en CP par rapport à 2023).

b) L'exécution des CCT 2019-2022

Au titre des seuls CCT, le montant contractualisé avec l'État sur le programme 123 s'élève à 387,33 millions d'euros pour la période 2019-2023. À l'issue de l'avant dernière année des contrats, l'exécution de ces contrats entre 2019 et 2022 est en deçà des montants attendus et ce d'autant plus que l'année 2022 était initialement la dernière année d'exécution des contrats.

Au regard des taux d'engagement fin 2022, la question de la consommation intégrale des crédits fin 2023 se pose pour certains CCT.

Exécution des contrats en cumulé 2019-2022

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires (rapport annuel de performances 2022)

Ainsi, le taux moyen d'engagement est de 63 % après 4 ans et le taux moyen de couverture des engagements est de 41 %. Le taux de consommation des CP est encore bien inférieur puisqu'il se situe entre 17,4 et 89,5 % avec une moyenne, sur l'ensemble des territoires, de 26 %.

Les faibles taux de consommation en 2020 et 2021 s'expliquaient en partie par l'impact de la crise sanitaire sur la vie économique des territoires d'outre-mer, et par voie de conséquence le ralentissement des chantiers et de la programmation des opérations. Les rapporteurs spéciaux avaient d'ailleurs alerté sur le risque de sous consommation à l'issu des contrats lors de leurs précédents rapports relatifs aux PLF 2022 et 2023.

L'exécution 2022, bien qu'en hausse par rapport aux exercices précédents, confirme ce risque avec des niveaux d'engagement relativement faibles pour les CCT de la Réunion, de la Martinique et de Mayotte.

Il en résulte que, pour ces trois contrats, le prolongement d'une année de ces CCT ne permettra vraisemblablement pas l'engagement des AE restantes. Or, les autorisations d'engagement (AE) et les crédits de paiement étant soumis au principe d'annualité, conformément à l'article 15-I de la LOLF, les AE non engagées à la fin des contrats ne pourront pas être reportées ou reconduites sur des nouveaux contrats et seront annulées. Cependant, les projets prévus par les contrats qui n'auraient pu faire l'objet d'un engagement pourront être repris dans les contrats suivants avec une nouvelle ouverture d'AE.

Concernant spécifiquement le contrat de développement et de transformation de la Polynésie, signé en 2021 et couvrant la période 2021-2023, le taux de consommation des AE fin 2022, s'élève à 71 % et le taux de couverture des engagements à 32 %. Le taux de consommation des CP est de 22,4 %. En maintenant ce rythme d'engagement les AE pourraient être intégralement engagées d'ici la fin du contrat.

Exécution du CCT pour la Polynésie 2021-2022

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires (rapport annuel de performances 2022)

Enfin, le contrat de développement de la Nouvelle-Calédonie, d'un montant total de 372,2 millions d'euros à partir du programme 123 a été porté à 423,7 millions d'euros à compter de 2020. Son exécution est la suivante :

Exécution du CDEV pour la Nouvelle-Calédonie en cumulé 2017-2022

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires (rapport annuel de performances 2022)

Avec un taux d'engagement de 84 % avant la dernière année du contrat, un engagement total d'ici fin 2023 parait possible.

2. Des aides aux collectivités ultramarines (action 6) maintenues à un niveau élevé en raison de la poursuite du dispositif des COROM et du maintien des aides exceptionnelles à la collectivité territoriale de Guyane et au syndicat des eaux de Guadeloupe

Cette action recouvre trois types de crédits :

- les dotations aux collectivités territoriales et financements adaptés à leurs spécificités afin de favoriser l'égal accès aux services publics locaux des populations ultramarines, notamment en termes d'éducation, en prenant en compte les particularités de ces collectivités et en répondant, par des crédits spécifiques, aux handicaps structurels des outre-mer. Il s'agit donc de maintenir la capacité financière des collectivités d'outre-mer par le versement de dotations ;

- les secours d'urgence et de solidarité nationale liés aux calamités ;

- les actions de défense et de sécurité civile.

En PLF 2024, les crédits de l'action 6 s'élèvent à 278,5 millions d'euros en AE et 237,9 millions d'euros en CP soit respectivement une hausse de 2,9 % des AE (soit 7,9 millions d'euros d'AE) et une baisse de 13,4 % des CP (soit 36,8 millions d'euros) par rapport à la LFI 2023.

Ce niveau des crédits s'explique par un effort maintenu de l'État dans les domaines suivants :

la poursuite du dispositif des COROM. En 2023, le Gouvernement avait initialement prévu l'ouverture de 10 millions d'euros pour les aides aux communes contractantes. Par amendement lors de l'examen du texte, ce montant avait été porté à 20 millions en CP et 10 millions en AE afin d'étendre le dispositif à de nouvelles communes en difficultés financières (2ème vague). Le PLF 2024 prévoit l'ouverture de 40 millions d'euros d'AE et de 16 millions d'euros de CP afin de financer les nouveaux contrats signés en 2023 (16 millions d'euros en AE et 8 millions d'euros en CP) et de permettre la signature d'une troisième série de contrats en 2024 (24 millions d'euros en AE et 8 millions d'euros en CP). Si les rapporteurs spéciaux saluent ces ouvertures de crédits, ils estiment nécessaire de renforcer encore ce dispositif au regard du nombre de communes en difficulté. En conséquence, l'amendement II-35 (FINC.1) vise à majorer de 18 millions d'euros en AE et 6 millions d'euros en CP les crédits de l'action 6 du programme 123 pour faire suite à leur recommandation d'étendre le dispositif à un nombre plus important de communes formulée dans leur rapport de juin 202323(*).

Le dispositif COROM

Pour aider les communes des DROM présentant des difficultés financières importantes, la loi de finances initiale pour 2021 a introduit par amendement les contrats de redressement outre-mer (COROM). Ce dispositif résulte des constats du rapport « Soutenir les communes des départements et régions d'outre-mer : pour un accompagnement en responsabilité » du député Jean-René Cazeneuve et du sénateur Georges Patient publié en décembre 2019 qui relevait que sur les 129 communes des DROM un tiers avait des délais de paiement supérieurs à 30 jours et plus de la moitié étaient inscrites dans le réseau d'alerte des finances publiques. Les critères d'éligibilité, modalités de signature et de suivi des contrats sont définis dans une circulaire conjointe des ministères de l'économie, des finances et de la relance, des collectivités territoriales et de la ruralité et des outre-mer du 2 février 2021.

Les COROM visent à apporter un soutien spécifique de l'État aux communes ultramarines souhaitant assainir leur situation financière et réduire les délais de paiement de leurs fournisseurs locaux. Les communes qui signent un COROM s'engagent, en contrepartie d'un soutien financier de l'État, à redresser leur situation financière.

Ce dispositif d'accompagnement est donc basé sur :

- un effort de diagnostic et d'ingénierie préalable qui doit être mené au niveau local avec l'appui de l'agence française de développement (AFD) ;

- un accompagnement afin de mener certaines réformes structurelles indispensables concernant par exemple la fiscalité (meilleure identification des bases), la maitrise de certaines dépenses de fonctionnement, l'amélioration de la gestion de la chaîne de la dépense ou de la sincérité des comptes ;

- la restauration des marges de manoeuvre en section de fonctionnement, notamment sur la maitrise des frais de personnel, qui reste un enjeu majeur dans les collectivités ultramarines ;

- une aide de l'État au processus de redressement, apportée en fonction des efforts de la collectivité ;

- une perspective pluriannuelle afin de redresser la situation financière de la collectivité contractante.

Source : commission des finances du Sénat

une nouvelle subvention exceptionnelle pour le syndicat des eaux de Guadeloupe : dans le cadre de la loi de finances pour 2023, une enveloppe exceptionnelle de 30 millions d'euros (10 millions d'euros dans le texte initial augmentés de 20 millions d'euros par amendement) avait été accordée afin d'accompagner le syndicat mixte pour la gestion de l'eau et de l'assainissement de Guadeloupe (SMGEAG) dans le but de pallier rapidement les difficultés rencontrées en termes de distribution et de desserte en eau potable. Dans ce contexte, un contrat d'accompagnement renforcé pour la période 2023-2025 a été signé avec pour objectif de définir une trajectoire budgétaire financière, de préciser les modalités de mise à disposition des assistants techniques et d'organiser la gouvernance et le suivi du contrat au regard du soutien de l'État. Cette nouvelle enveloppe de 20 millions d'euros en PLF 2024 est destinée à accompagner les efforts du SMGEAG pour le rétablissement de sa situation. L'aide porte prioritairement sur l'exploitation, les investissements et l'assistance technique, et sera versée sous réserve du respect des engagements de performance contractualisés ;

- dans la continuité de la signature de l'accord structurel en 2021 entre l'État et la Collectivité territoriale de Guyane, le soutien exceptionnel de l'État à la collectivité territoriale de Guyane en vue de rétablir sa capacité d'autofinancement en contrepartie d'engagements relatifs à la maitrise des dépenses de fonctionnement, de fiabilité des comptes ou de respect des délais de paiement est prolongé en 2024 à hauteur de 30 millions d'euros en AE et CP. Cette aide fait suite au montant inscrit en LFI 2022, de 20 millions d'euros, porté à 40 millions d'euros en LFI 2023. Pour 2024, il est prévu une aide de 30 millions d'euros. Le versement de cette aide est conditionné au respect d'engagements contractualisés dans l'accord (maîtrise des dépenses de fonctionnement, notamment en matière de ressources humaines, fiabilisation des comptes, respect des délais de paiement).

Cette action apparait plus que jamais nécessaire dans un contexte de crise économique et le prolongement de soutiens supplémentaires apportés dans le PLF 2024 est salué par les rapporteurs qui appellent de leurs voeux un maintien de l'effort de l'État dans ce domaine.

En effet, même si les collectivités d'outre-mer ne constituent pas un ensemble homogène et que les situations sont très variables d'un territoire à l'autre, sur l'ensemble des DROM, la situation financière des collectivités s'est fortement dégradée au cours des dernières années.

Ainsi, l'insularité (exception faite de la Guyane) génère des surcoûts importants sur les charges à caractère général des communes d'outre-mer, les dépenses de personnel sont également plus élevées en raison d'une faible intégration intercommunale, de la majoration des traitements des fonctionnaires et de taux d'administration élevés. Dès lors, les taux d'épargne brute et nette des communes d'outre-mer restent très inférieurs à ceux constatés dans les communes de métropole.

Évolution des taux d'épargne entre 2018 et 2021
dans les communes de métropole et d'outre-mer

Source : commission des finances à partir des données DGCL et DGFIP

Il résulte de cette situation des marges d'autofinancement24(*) réduites dans les communes d'outre-mer approchant ou dépassant régulièrement le seuil d'alerte fixé à 100 %.

Par ailleurs, à l'exception de la Réunion à compter de 2019, les taux d'endettement25(*) des communes des DROM sont inférieurs à ceux des communes de métropole. Ils se situent en moyenne à 56,6 % contre 78,8 %. Cependant, ce niveau d'endettement moyen plus faible dans les communes des DROM s'explique essentiellement par un niveau d'investissement plus bas qu'en métropole avec une dépense d'équipement par habitant de 264 euros en 2021 contre 301 euros pour les communes métropolitaines alors même que les besoins en termes d'équipements publics sont très importants.

Évolution du taux d'endettement entre 2018 et 2021
dans les communes de métropole et d'outre-mer

Source : commission des finances du Sénat à partir des données DGCL et DGFIP

Pour autant, même si le taux d'endettement est plus faible dans les communes des DROM, ces dernières présentent des délais de désendettement plus longs (plus de 10 ans sur la période 2018-2022) que les communes de métropole (5 ans en métropole pendant la même période).

De surcroit, les communes de Martinique présentent, en moyenne, des délais de désendettement compris entre 16 et 32 ans sur la période 2018-2022, soit des durées bien supérieures au seuil d'alerte établi à 12 ans.

Délai, en années, de désendettement des communes d'outre-mer
et de métropole entre 2018 et 2022

Source : commission des finances du Sénat à partir des données DGCL et DGFIP

Cette situation a pour conséquence l'allongement des délais de paiement. Il ressort des derniers rapports de l'Institut d'émission des départements d'outre-mer (IEDOM) sur les délais de paiement dans les DROM26(*) que le délai du secteur public local et hospitalier s'est globalement détérioré sur les dix dernières années, passant d'un peu moins de 40 jours en 2012 à près de 65 jours en 2021, soit un niveau largement supérieur au plafond réglementaire (30 jours pour les collectivités locales et 50 jours pour les établissements publics de santé). Au cours de la même période, le délai de paiement du secteur public local et hospitalier de l'Hexagone était stable à moins de 30 jours.

C. UNE EXTENSION BIENVENUE DE LA CONTINUITÉ TERRITORIALE QUI GÉNÈRE UNE HAUSSE DES CRÉDITS ALLOUÉS À L'ACTION 3

1. La continuité territoriale : une nécessité pour tenir compte de l'éloignement géographique des territoires ultramarins qui a évolué depuis 2021

La politique nationale de continuité territoriale est définie à l'article L. 1803-1 du code des transports comme « tendant à rapprocher les conditions d'accès de la population aux services publics de transport, de formation, de santé et de communication de celles de l'hexagone, en tenant compte de la situation géographique, économique et sociale particulière de chaque collectivité territoriale d'outre-mer ».

Cette politique prend la forme de plusieurs aides financières portées par le fonds de continuité territoriale créé par l'article 50 de la loi du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer.

Ce fonds de continuité territoriale globalise les crédits destinés au financement des trois catégories suivantes d'aide :

l'aide à la continuité territoriale (ACT) qui concourt au financement d'une partie des titres de transport entre la collectivité de résidence outre-mer et le territoire métropolitain et dans les deux sens pour les personnes rendant une dernière visite à un proche ou se rendant à ses obsèques ;

l'aide au rapatriement de corps qui permet la contribution au financement du transport du corps, que ce transport ait lieu vers l'hexagone ou vers l'outre-mer, et dans certains cas entre collectivités d'outre-mer ;

les passeports pour la mobilité.

Par décret n° 2021-845 du 28 juin 2021 modifiant le code des transports en matière de continuité territoriale entre les collectivités d'outre-mer et le territoire hexagonal et par arrêté du 28 juin 2021 modifiant les arrêtés pris en application des articles L. 1803-3, R. 1803-18, R. 1803-19 et D. 1803-42 du code des transports plusieurs mesures de simplification et plus favorables ont été mises en oeuvre concernant la continuité territoriale des outre-mer. Ainsi, les quatre mesures nouvelles de cette réforme, entrées en vigueur le 1er juillet 2021, ont été les suivantes :

- fusion de l'aide simple et de l'aide majorée sur la base du montant plus favorable : dorénavant, pour le dispositif d'aide à la continuité territoriale et pour le dispositif d'aide obsèques dans le cadre de la continuité funéraire, un montant d'aide unique existera pour chaque territoire ultramarin. Ce montant représente environ 50 % du prix moyen d'achat du billet d'avion constaté sur chaque liaison. L'application de ce principe a conduit à rehausser le montant de l'aide pour les Iles de Wallis-et-Futuna, la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie ;

- simplification et fixation d'un plafond unique de ressources : les résidents d'outre-mer souhaitant recourir à l'aide à la continuité territoriale classique ou à la continuité funéraire (obsèques et aide au transport de corps) devront justifier d'un quotient familial inférieur ou égal à 11 991 euros ;

- création d'un dispositif spécifique en faveur des trois nouveaux publics bénéficiaires : les doctorants et post-doctorants, pourront recourir une fois/an à l'aide à la continuité territoriale, les artistes et les acteurs culturels deux fois/an tandis que les jeunes espoirs sportifs, quatre fois/an. Ces publics pourront respectivement recourir au cours d'une même année civile à l'ensemble des dispositifs de mobilité de LADOM ;

- extension des droits d'accès à la continuité funéraire : afin de mieux accompagner les familles, l'aide obsèques est étendue à trois niveaux :

- les frères et soeurs des défunts sont dorénavant éligibles ;

- les déplacements peuvent se faire dans le cadre d'une dernière visite à un proche ;

- les déplacements deviennent possibles entre outre-mer. La prise en charge s'élèvera alors à 50 % du prix du billet d'avion aller/retour.

Par ailleurs, la loi de finances pour 2023 a permis d'augmenter une nouvelle fois les montants forfaitaires de prise en charge de l'aide à la continuité territoriale afin de mieux couvrir le prix moyen du billet d'avion aller/retour des usagers, pour une dépense annuelle supplémentaire de 6 millions d'euros.

Des dispositions spécifiques ont également été votées afin de renforcer les modalités de prise en charge d'un second accompagnant familial lors des évacuations sanitaires de mineurs âgés de moins de 16 ans dans l'hexagone et pour étendre l'éligibilité au Passeport pour la mobilité de la formation professionnelle (PMFP) aux demandeurs d'emploi inscrits dans une action de validation des acquis de l'expérience (VAE) en mobilité.

Après ces différentes modifications, les dispositifs portés par le fonds de continuité territoriale s'établissaient, en LFI 2023, à près de 40 millions d'euros.

2. Une nouvelle extension pour mieux prendre en compte les déplacements professionnels

Le PLF 2024 prévoit la création de trois nouveaux dispositifs d'aide à la continuité territoriale.

Le premier vise à accompagner les projets individuels d'installation professionnelle dans l'une des collectivités mentionnées à l'article L. 1803-227(*) du code des transports.

Le deuxième est destiné aux personnes morales de droit privé implantées dans l'une des collectivités susmentionnées afin de financer des déplacements de leurs salariés en vue d'une formation professionnelle.

Le troisième, enfin, prévoit une aide destinée aux personnes morales de droit privé implantées dans l'une des collectivités susmentionnées au titre du caractère innovant de l'entreprise afin de financer tout ou partie du coût des titres de transport liés à certains déplacements professionnels nécessaires au développement de son activité.

Le cout estimé de ces trois nouvelles mesures est de 21,6 millions d'euros en AE et CP.

Dans ce contexte, les crédits prévus en PLF 2024 au titre de la continuité territoriale s'élèvent à 73,5 millions d'euros en AE et CP soit une hausse de 41,5 % par rapport à la LFI 2022.

Ces mesures saluées par les rapporteurs spéciaux devront cependant faire l'objet d'une communication adéquate afin que les entreprises et les particuliers concernés s'en saisissent pleinement.

D. UN APPUI AUX FINANCEMENTS BANCAIRES ET À L'INGÉNIERIE QUI DIMINUE ALORS MÊME QUE LE BESOIN DE FINANCEMENT DES ACTEURS PUBLICS POURRAIT AUGMENTER EN 2024

L'action 9 du programme 123 vise à favoriser les investissements des acteurs publics en réduisant le coût des ressources empruntées et à assurer l'accompagnement des collectivités ultramarines dans la mise en oeuvre de leurs projets d'investissements. Cette action est mise en oeuvre par l'intermédiaire de l'Agence française de développement (AFD).

Cet appui se traduit par une bonification d'intérêt aux prêts accordés par l'AFD aux collectivités territoriales et aux personnes publiques mais aussi par la mise en oeuvre d'actions d'assistance à maîtrise d'ouvrage (AMO) dont l'exécution est confiée à l'AFD, via les dispositifs du Fonds outre-mer (FOM) et de l'initiative Kiwa.

En PLF 2024, les crédits ouverts au titre des financements bancaires et de l'ingénierie s'établissent à 46,3 millions d'euros en AE et 33 millions d'euros en CP soit une diminution de 13 % en AE (7 millions d'euros) et 9 % en CP (3,3 millions d'euros) en raison notamment de la non reconduction des abondements intervenus en LFI 2023 sur la société de gestion de fonds de garantie d'Outre-mer (SOGEFOM), l'initiative Kiwa et les bonifications de prêts (cf. infra).

1. Des crédits pour financer des taux bonifiés en baisse

Dans le cadre d'une stratégie de soutien au financement des personnes publiques et en lien avec le programme du Fonds exceptionnel d'investissement (FEI) ainsi qu'au travers de la politique contractuelle de l'État, le programme 123 porte les crédits destinés à la bonification des prêts octroyés aux personnes publiques pour leurs opérations d'investissement par l'Agence française de développement (AFD).

Au moyen des prêts qu'elle octroie au profit du secteur public, mais aussi par son rôle d'appui technique et d'accompagnement, l'AFD favorise le financement des projets d'investissement et la réalisation d'infrastructures et d'équipements publics, notamment dans les domaines de l'adduction d'eau potable, de l'assainissement, de la gestion des déchets mais aussi de la cohésion sociale et de l'aménagement urbain.

En PLF 2024, les crédits ouverts pour ces prêts à taux bonifiés sont stables en AE par rapport à la LFI 2023 mais diminuent de 4,7 millions d'euros en CP. Afin de porter un soutien croissant à ce projet, les crédits alloués à ces taux bonifiés sont majorés, en PLF 2023, de 8 millions d'euros en CP.

2. Un soutien maintenu à l'ingénierie

Le Fonds 5.0 a été doté, en 2019, de manière exceptionnelle, de 17,5 millions d'euros en AE et CP, transférés à l'AFD. Le contexte du plan de relance a renforcé la nécessité d'un appui à l'ingénierie au profit des collectivités territoriales, afin de leur permettre d'engager rapidement les nombreux projets qu'elles doivent réaliser. Ainsi, le Fonds 5.0 a été reconduit sous l'appellation « Fonds outre-mer » (FOM) et doté de crédits issus du plan de relance, à hauteur de 30 millions en AE pour 2021 et 2022.

Pour poursuivre ce soutien à l'ingénierie, via l'AFD, la LFI 2023 prévoyait un financement de ce dispositif à hauteur de 10 millions d'euros en AE et 4 millions d'euros en CP.

Cet effort est poursuivi en PLF 2024 avec des ouvertures de 10 millions d'euros en AE et 5 millions d'euros en CP. Cette hausse de 1 million d'euros en CP s'explique par la temporalité de mise en oeuvre des projets financés par le FOM qui s'accélère.

Si cet effort est salué par les rapporteurs spéciaux, ces derniers estiment cependant que des crédits supplémentaires sont nécessaires pour renforcer l'ingénierie financière des communes et intercommunalités de Polynésie française afin notamment qu'elles puissent améliorer et développer des outils de gestion et de pilotage financier.

Le rapport fait au nom de la commission des finances sur les COROM précité préconisait, à cet égard, de déployer, pour les collectivités du Pacifique, « une assistance technique et un appui en termes d'ingénierie financière ».

Dans ce contexte, l'amendement II-36 (FINC.2) vise à majorer les crédits du fonds outre-mer (FOM) portés par l'action 9 du programme 123 de 3 millions d'euros en AE et 1 million d'euros en CP.

3. Un soutien au financement des sociétés privées

La SOGEFOM, détenue à 58,7 % par l'AFD, a pour but d'apporter une garantie partielle à des opérations de financement engagées par les établissements de crédit en faveur des TPE et PME intervenant dans les collectivités d'outre-mer du Pacifique.

Cependant, au 31 décembre 2021, le niveau du potentiel d'engagement de la SOGEFOM ne permettait plus de poursuivre l'activité de garantie sur la totalité de l'année 2022. Aussi, le besoin 2022 a été comblé par la réallocation de 4 millions d'euros, depuis les disponibilités de la Caisse d'investissement des outre-mer (CIOM).

En LFI 2023, 3 millions d'euros en AE, avec une clé d'écoulement des CP de 1 million d'euros par an sur les trois prochaines années, avaient été prévus pour financer l'activité de cet établissement de crédit.

Dans cette continuité, le PLF 2024 ne prévoit pas d'ouverture d'AE mais une ouverture de 1 million d'euros en CP.

Cependant au regard des besoins de ce fonds de garantie dans le contexte économique actuel, il apparait nécessaire d'abonder les crédits qui lui sont alloués. À cette fin, l'amendement II-37 (FINC.3) vise à majorer les crédits de la SOGEFOM portés par l'action 9 du programme 123 de 3 millions d'euros en AE et 1 million d'euros en CP.

4. Une absence de nouvel abondement des crédits pour l'initiative Kiwa afin de compléter la contribution initiale intégralement consommée

L'initiative Kiwa, dotée de près de 41 millions d'euros, a été lancée par l'AFD en mars 2020. Elle vise à faciliter l'accès aux financements de porteurs de projets (incluant les collectivités locales) en lien avec le développement de solutions fondées sur la nature (SFN), à travers des subventions ou de l'assistance technique, avec pour objectif de lutter contre les effets du changement climatique.

Cependant, au début de l'été 2022, l'intégralité des AE issues de la contribution initiale du ministère chargé des outre-mer avait été consommée, excluant de fait la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie des prochains appels à projets.

Ainsi, la LFI pour 2023 a prévu un abondement complémentaire au bénéfice de l'Initiative Kiwa à hauteur de 4 millions d'euros en AE avec un décaissement de CP sur deux ans afin de compléter la contribution initiale intégralement consommée. Il en résulte une ouverture de 2 millions d'euros de CP en PLF 2024. .

En LFI 2023, les différents dispositifs relatifs aux financements bancaires avaient été abondés pour faire face des saturations de capacités (SOGEFOM) ou à des consommations très importantes (Kiwa).

En PLF 2024, ces abondements ne sont pas reconduits en AE. Or, au regard des besoins dans ce domaine, notamment dans un contexte de crise économique, de remontée des taux d'intérêt et de détérioration en cours ou à prévoir de la santé financière des collectivités comme des entreprises du secteur privé, les rapporteurs spéciaux tiennent à souligner que les besoins pourraient être plus importants que le niveau des crédits ouverts et craignent, subséquemment, un accès limité à l'emprunt pour certains acteurs économiques locaux.

E. UNE STABILITÉ DES AUTRES ACTIONS DU PROGRAMME EN L'ABSENCE DE MESURES NOUVELLES OU D'ÉCONOMIES ET D'ÉVOLUTION LÉGISLATIVE ET RÉGLEMENTAIRE

Les crédits des actions 4, « sanitaire, sociale, culture, jeunesse et sports », 7 » Insertion économique et coopération régionales » et 8 « Fonds exceptionnel d'investissement » restent stables entre la LFI 2023 et le PLF 2024 à respectivement 12,1 millions d'euros, 1 million d'euros et 110 millions d'euros en AE.

Concernant les crédits alloués à l'action 4, suite à l'achèvement, en 2020, de la contribution financière au Régime de solidarité de la Polynésie française (RSPF)28(*) une « convention globale de santé 2021-2023 » a été signée le 14 octobre 2021 entre l'État et le Pays. Dans le cadre de cette nouvelle convention, le ministère des outre-mer s'est engagé à verser annuellement sur la durée de la convention 4 millions d'euros en AE et CP à la collectivité de Polynésie Française au-delà des 4 millions d'euros prévus dans le contrat de développement et de transformation de ce territoire. Ces crédits ont été inscrits pour la première fois depuis la signature, en LFI 2023. Ils sont reconduits en PLF 2024.

Concernant le FEI (action 8), les rapporteurs spéciaux saluent la reconduction de 110 millions d'euros en AE. Ils notent par ailleurs une hausse notable des CP ouverts à hauteur de 77,3 millions d'euros contre une moyenne de 64 millions d'euros les 5 années précédentes. Par ailleurs, ils soulignent une amélioration des taux de consommation des CP en 2022 (100 % contre 72 % en 2021). Ils regrettent cependant qu'une partie de ces crédits soit fléchés sur les constructions scolaires de Mayotte. Dans ce domaine, les besoins sont considérables et le FEI « scolaire » est devenu une pratique depuis 2017. Il n'en demeure pas moins en contradiction avec le principe de limitation des cofinancements entre le FEI et les autres crédits du budget de l'État. Il est également révélateur des besoins importants dans ce domaine, besoins auxquels il est nécessaire de répondre par une hausse des crédits de l'action 6 du programme 123 et non par redéploiement des crédits du FEI dont l'objectif n'est pas de financer ce type d'investissements. Sur ce sujet, les rapporteurs spéciaux renvoient au rapport29(*) fait au nom de la commission des finances sur le fonds exceptionnel d'investissement et publié en juin 2022 et à leurs recommandations en vue d'améliorer l'utilisation du fonds et la consommation des crédits.

Ouverture et consommation des crédits du fonds exceptionnel d'investissement (FEI) entre 2018 et 2024

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires (projets et rapports annuels de performances)

II. L'ÉVOLUTION DU PROGRAMME 138 « EMPLOI OUTRE-MER »

Le programme 138 « Emploi outre-mer » se compose de quatre actions et rassemble les crédits des politiques publiques en faveur de la compétitivité des entreprises, de l'amélioration de l'employabilité des jeunes et de la qualification des actifs ultramarins. À ce titre, il porte notamment les crédits relatifs à la compensation des exonérations de cotisations patronales, au financement du service militaire adapté (SMA) et divers dispositifs de financement de l'économie.

Entre la LFI 2023 et le PLF 2024, il enregistre une hausse de 6,7 % en AE soit 121,3 millions d'euros et de 6,4 % en CP soit 114,6 millions d'euros.

Cette hausse résulte du solde entre la hausse des actions 1 (« soutien aux entreprises » et 2 (« aide à l'insertion et à la qualification » c'est-à-dire le SMA) et de la baisse de l'action 4 (« financement de l'économie).

Évolution des crédits du programme 138

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir du PLF 2024

A. LES CRÉDITS DESTINÉS À L'EXONÉRATION DES CHARGES SOCIALES (ACTION 1) : UNE HAUSSE QUI SE POURSUIT EN LIEN AVEC L'ACTIVITÉ MAIS DES PRÉVISIONS TOUJOURS DÉLICATES À ÉTABLIR

1. Évolution et description du dispositif

Afin de diminuer le taux de chômage outre-mer (compris entre 9,5 % et 30 % en 2021, contre 7,4 % en métropole) d'une part, d'améliorer la compétitivité des entreprises ultramarines et de favoriser la création d'emplois, d'autre part, un dispositif d'allègement et d'exonération de cotisations de sécurité sociale a été mis en place par la loi du 25 juillet 1994 tendant à favoriser l'emploi, l'insertion et les activités économiques dans les départements d'outre-mer et à Saint-Pierre-et-Miquelon, et la loi du 13 décembre 2000 d'orientation pour l'outre-mer.

Ce dispositif d'exonérations de cotisations de sécurité sociale spécifiques aux outre-mer, dit « LODEOM », résulte des dispositions de l'article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale en ce qui concerne les entreprises implantées outre-mer et des articles L. 756-4 et L. 756-5 de ce même code pour les travailleurs indépendants ultramarins.

Il a fait l'objet de plusieurs modifications depuis sa création. En effet, la loi de finances pour 2014 et la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2016 ont ainsi abaissé les niveaux de salaires concernés par les exonérations de charges patronales afin de recentrer l'application de celles-ci sur les bas et moyens salaires, compte tenu de l'importance plus grande que joue, à ce niveau, le facteur du coût du travail sur l'emploi.

Par ailleurs, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 a poursuivi ces recentrages, cette fois, sur le dispositif d'exonérations applicables aux cotisations dont les travailleurs indépendants sont redevables.

Enfin, le dispositif d'allègements et d'exonérations de charges patronales de sécurité sociale spécifiques aux outre-mer a été modifié par la loi de financement pour la sécurité sociale de 2019 afin de compenser la suppression du CICE (crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi) au 1er janvier 2019 en renforçant les exonérations de charges patronales.

Cette réforme avait entrainé, en 2019, une augmentation de plus de 42 % des crédits affectés à la compensation de ces exonérations de charges.

Le nouveau régime des exonérations de cotisations patronales en outre-mer

Les niveaux d'exonération de cotisations patronales se déclinent dorénavant comme suit :

•Barème dit de « compétitivité » : une exonération totale jusqu'à un seuil de 1,3 SMIC suivie d'une dégressivité de cette exonération avec un point de sortie désormais fixé à 2,2 SMIC pour toutes les entreprises de moins de 11 salariés et pour les employeurs occupant plus de onze salariés et relevant des secteurs du bâtiment et des travaux publics, de la presse, de la production audiovisuelle, du transport aérien, maritime et fluvial pour les personnels assurant la desserte des départements d'outre-mer, de Saint-Martin et Saint-Barthélemy.

•Barème dit de « compétitivité renforcée » : une exonération totale jusqu'à un seuil de 1,7 SMIC suivie d'une dégressivité avec un point de sortie fixé à 2,7 SMIC pour les employeurs occupant moins de 250 salariés, ayant réalisé un chiffre d'affaires annuel inférieur à 50 millions d'euros et qui :

- soit relèvent des secteurs de l'industrie, de l'environnement, de l'agronutrition, des énergies renouvelables, des nouvelles technologies de l'information et de la communication, des centres d'appel, de la pêche et des cultures marines, de l'aquaculture, de l'agriculture, du tourisme y compris les activités de loisirs s'y rapportant, du nautisme, de l'hôtellerie, de la recherche et du développement ;

- soit sont situés en Guyane et exercent une activité principale relevant de l'un des secteurs d'activité éligibles à la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B du code général des impôts, ou correspondant à l'une des activités suivantes : comptabilité, conseil aux entreprises, ingénierie ou études techniques.

•Barème dit « innovation et croissance » : une exonération totale jusqu'au seuil de 1,7 SMIC, le maintien de l'exonération calculée pour un salaire de 1,7 SMIC jusqu'au seuil de 2,5 SMIC, seuil à partir duquel elle décroît avec un point de sortie fixé à 3,5 SMIC pour la catégorie des employeurs occupant moins de 250 salariés et ayant réalisé un chiffre d'affaires annuel inférieur à 50 millions d'euros, au titre de la rémunération des salariés concourant essentiellement à la réalisation de projets innovants dans le domaine des technologies de l'information et de la communication.

Source : commission des finances à partir du PAP

2. Une mesure de périmètre importante intervenue en LFI 2023 qui a masqué une hausse notable des exonérations de charges sociales

En LFI 2023, les crédits de l'action 1 se sont élevés à 1 416,2 millions d'euros soit une baisse de 4,19 % représentant 61,9 millions d'euros par rapport à la LFI 2022.

Cette baisse apparente résultait en réalité de la mise en oeuvre d'une mesure de périmètre visant à rationaliser les modalités de compensation des exonérations, afin de simplifier les relations financières entre l'État et la sécurité sociale. Ainsi, le « bandeau maladie » (abattement de 6 points de la cotisation des employeurs au titre de l'assurance-maladie pour les salaires de moins de 2,5 SMIC) a été transféré vers la sécurité sociale pour un montant de 264,53 millions d'euros sans modification du dispositif sur le fond. Retraitement fait de cette mesure de périmètre, c'est-à-dire à périmètre constant, les crédits prévus par la loi de finances pour 2023 au titre de la compensation des exonérations de cotisations sociales enregistraient une hausse de plus de 202,7 millions d'euros en raison de la reprise de l'activité après la crise sanitaire et la fin du recours massif au chômage partiel par les entreprises, ce qui avait généré une baisse importante lors des exécutions 2020 et 2021.

3. Une nouvelle hausse qui s'appuie sur les dernières prévisions disponibles

Pour rappel, les dépenses de cette action sont des dépenses de guichet. Il en résulte que le niveau des crédits ouverts en 2024 pourrait être ajusté.

En PLF 2024, les crédits ouverts s'élèvent à 1,54 milliard d'euros soit une hausse de 8,7 % (+ 123 millions d'euros) par rapport à la LFI 2023.

La dépense budgétisée dans le PLF 2024 s'appuie sur les prévisions produites par l'ACOSS lors des groupes de suivi, en juin 2023. Ces prévisions se construisent sur la base d'un relevé mensuel des déclarations nominatives des entreprises ainsi que des données statistiques et des réalisations comptables intégrées a posteriori, auxquels l'ACOSS applique un pourcentage correspondant à la part outre-mer. Les prévisions de dépenses de compensation des exonérations progressent essentiellement du fait des hypothèses d'évolution de la masse salariale des salariés des entreprises privées, retenues par l'Urssaf-Caisse nationale pour ses prévisions techniques.

Les variations constatées ces dernières années témoignent cependant de la difficulté à établir des prévisions fiables, s'agissant de dépenses de « guichet » qui sont tributaires de la conjoncture économique et ne sont confirmées qu'à l'issue des exercices budgétaires.

La prise en compte décalée des différentes réformes et élargissement du dispositif à de nouveaux secteurs professionnels accentuent encore cette difficulté. À cet égard, un projet de décret pour 2024 prévoit une revalorisation de la déduction forfaitaire pour les particuliers employeurs à Mayotte.

Dans leur précédent rapport budgétaire, les rapporteurs spéciaux avaient alerté sur les conséquences d'une reprise de l'activité en 2022 par rapport à 2020 et 2021, et qui pourrait générer une consommation plus importante que les crédits prévus en LFI 2022. À cet égard, les niveaux d'exécution leur ont donné raison dans la mesure où, en 2022, l'exécution de l'action 1 du programme 138 s'est établie à 1 725,9 millions d'euros pour des ouvertures à hauteur de 1 478 millions d'euros.

Concernant l'exercice 2023, la LFI prévoyait une ouverture de crédits à hauteur de 1 416,2 millions d'euros. Au 17 octobre 2023, la consommation s'établit à 1 167 millions d'euros.

Face aux prévisions actualisées de consommation, le projet de loi de finances de fin de gestion prévoit une ouverture de crédits sur le programme 138 à hauteur de 409,2 millions d'euros en AE et 433,4 millions d'euros en CP essentiellement pour couvrir la hausse des exonérations de cotisations patronales.

Les rapporteurs spéciaux saluent cette ouverture de crédits supplémentaires qui permettra de financer les besoins de fin d'année sans redéploiement au sein du programme.

Le contexte économique incertain de 2023 perdure en 2024 et accroit encore les difficultés rencontrées par certaines entreprises, et de fait les difficultés à établir une prévision fine de ce que pourrait être le besoin réel en 2024 en raison des éventuelles conséquences de l'inflation sur l'emploi et les salaires. Les rapporteurs spéciaux se montreront donc attentifs, en cours d'année, au niveau de consommation de ces crédits.

B. UNE AUGMENTATION DES CRÉDITS ALLOUÉS AU SERVICE MILITAIRE ADAPTÉ (ACTION 2) ESSENTIELLEMENT LIÉE À UNE MESURE CATÉGORIELLE

Les crédits de l'action 2 financent, à titre principal, le service militaire adapté (SMA) mais également la subvention pour charges de service public de l'agence de l'outre-mer pour la mobilité (LADOM) ainsi que des actions de formations en mobilité à destination des ressortissants des départements et collectivités outre-mer de 18 à 30 ans notamment via le passeport mobilité formation professionnelle (PMFP) et enfin la subvention versée à l'institut de formation aux carrières administratives, sanitaires et sociales (IFCASS).

1. Le SMA, une évolution constante du dispositif pour s'adapter au mieux aux besoins

Le service militaire adapté (SMA) est un dispositif militaire d'insertion socioprofessionnelle créé en 1961 au profit des jeunes ultramarins, de 18 à 25 ans, éloignés de la qualification et du marché de l'emploi qui permet d'apporter une réponse ciblée à l'exclusion, au chômage, à la désocialisation et à l'illettrisme dans les territoires d'outre-mer. Sa mission principale est donc de faciliter l'insertion dans la vie active de jeunes adultes, volontaires, en situation d'échec et/ou en voie de marginalisation résidant dans les départements et collectivités d'outre-mer.

À cette fin, le SMA propose, sous statut de volontaire dans les armées, un parcours complet pour développer et renforcer les compétences sociales et professionnelles des bénéficiaires. Il est articulé autour d'une formation militaire initiale, d'une remise à niveau dans les savoirs de base, d'une éducation civique, d'une formation aux premiers secours et d'une préformation professionnelle. Ce parcours est sanctionné par un certificat d'aptitude personnelle à l'insertion et complété par l'obtention du permis de conduire.

Déployé en Martinique, en Guadeloupe, en Guyane, à La Réunion, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, ainsi qu'à Périgueux (24) avec un centre dédié à la mobilité et à la formation, le SMA initialement prévu pour accueillir 3 000 jeunes est, depuis 2017, en capacité d'accueillir chaque année 6 000 bénéficiaires depuis la mise en oeuvre, sur la période 2012-2017 du Plan « SMA 6000 » qui visait à atteindre le doublement du nombre de bénéficiaires.

Cette montée en puissance rapide a nécessité des évolutions du dispositif. Ainsi, le modèle « SMA 6 000 » a laissé place au projet « SMA 2025 » qui poursuit quatre finalités :

- développer l'employabilité initiale des jeunes par le renforcement de leurs compétences individuelles ;

- renforcer la qualité du parcours pour une efficacité durable ;

- engager le virage du numérique dans les formations avec des outils pédagogiques adaptés ;

- amplifier le rôle de chaque régiment comme plate-forme locale.

Celles-ci répondent notamment aux préconisations faites par la Cour des comptes ou le Conseil économique, social et environnemental, et s'inscrivent dans les politiques publiques centrées sur l'emploi, la formation et la jeunesse.

Dans ce cadre deux nouvelles compagnies ont été ouvertes en juillet 2022 : une en Polynésie, sur l'île de Hao et une à Mayotte.

Dans la continuité du « SMA 2025 », le « SMA 2025 + » a pour ambition de renforcer l'actuel plan en prolongeant son action qualitative tout en s'ouvrant à d'autres publics également en grande difficulté.

Son expérimentation a débuté à Mayotte en 2022 et est déployée, depuis 2023, dans les autres territoires d'outre-mer.

Le projet « SMA 2025 + » se concentre sur les neuf projets opérationnels concrets et chiffrés suivants :

- allonger d'un mois la durée moyenne de formation des volontaires stagiaires, et développer des filières en apprentissage, pour augmenter la proportion des filières qualifiantes ;

renforcer les savoirs de base (lire, écrire, compter, maîtriser l'accès à internet) ;

- accueillir, dans tous les RSMA, les mineurs décrocheurs de 16 à 18 ans, dans le cadre du volontariat jeune cadet (VJC) ;

- accueillir 200 mères célibataires supplémentaires par la création de places en crèches et de maisons des familles au sein des régiments ;

- présenter 100 % des volontaires au permis de conduire, avec un taux de réussite de 100 % (contre 87 % et 75 % aujourd'hui) ;

- développer des formations de chefs d'équipe et de cadres intermédiaires à destination des volontaires ;

- accueillir 320 jeunes métropolitains (service civique ou étudiants) pour favoriser le brassage social et géographique ;

- augmenter de 11 % le nombre de bénéficiaires, soit 380 volontaires stagiaires et 280 volontaires techniciens par an ;

- relocaliser le centre de formation du SMA de Périgueux avant de le rendre plus accessible, et porter sa capacité d'accueil de 100 à 300 stagiaires, en partenariat avec l'association pour la formation professionnelle des adultes (Afpa).

2. Un dispositif confronté à des difficultés de recrutement de volontaires

Le recrutement de 6 000 bénéficiaires a été confronté à plusieurs difficultés depuis 2017 :

un décalage de la croissance démographique entre les différents territoires d'outre-mer avec une baisse démographique en Guadeloupe et à la Martinique (respectivement - 7,1 % et - 9,5 % entre 2011 et 2021) et une croissance importante en Guyane et à Mayotte ce qui est venu perturber la répartition territoriale des recrutements en compensant les moindres recrutements des Antilles par des sur recrutements dans d'autres territoires. Cependant, ces transferts, sans investissements importants pour accroitre les capacités d'accueil de certains centres, rencontrent des limites venant ainsi freiner le nombre total de recrutements. Afin de remédier à cette difficulté, une modification des critères de recrutement a été actée dès 2020 avec un abaissement de l'âge des recrutés (16 ans au lieu de 18 ans) ;

la crise sanitaire a affecté les recrutements à compter de 2020 ;

l'obligation vaccinale contre le COVID pour les militaires a également pesé sur les recrutements, particulièrement aux Antilles où le refus de la vaccination est venu ajouter un frein supplémentaire s'ajoutant à la baisse démographique. Toutefois, le 23 août 2023, le service de santé des armées a publié une instruction ministérielle précisant que la vaccination contre la covid-19 dans les forces armées et formations rattachées n'était plus obligatoire pour intégrer le SMA, ce qui devrait permettre de lever ce frein au recrutement ;

- la concurrence avec d'autres dispositifs d'insertion pour des populations proches de celles ciblées par le SMA mais moins contraignants et parfois plus lucratifs.

Dès lors, depuis 2017, le nombre de volontaires a enregistré une baisse notable jusqu'à 2020. Le nombre de recrutements est de nouveau en hausse depuis 2021.

Évolution du nombre de volontaires stagiaires (VS), volontaires jeunes cadets (VJC) et volontaires techniciens (VT) par régiment entre 2016 et 2023

Source : DGOM - Les chiffres de 2023 correspondent aux objectifs annuels. Compte tenu des difficultés de recrutement actuelles les objectifs ne seront pas atteints. Depuis 2014, les volontaires stagiaires en poursuite de formation à Périgueux ne sont plus comptabilisés car ils l'ont déjà été au sein d'un régiment outre-mer

3. Des taux d'insertion qui attestent de l'efficacité du SMA

Depuis 2018, et à l'exception de l'année 2020 en raison des confinements, le taux d'insertion des volontaires en fin de contrat, est supérieur à 80 % et a dépassé la cible fixée pour 2022 à 81 % pour atteindre 84,1 %. Parallèlement, le taux de sortie anticipé est passé, en 2022, sous la barre des 10 %.

Évolution des taux d'encadrement et d'insertion entre 2017 et 2024

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires et des réponses au questionnaire budgétaire

Les rapporteurs spéciaux saluent cette progression mais s'interrogent sur la capacité à tenir le taux d'insertion cible en 2023 et en 2024 dans un contexte de difficultés économiques.

4. Des crédits en hausse en raison de mesures catégorielles

Le SMA a désormais atteint un certain niveau de maturité après son extension importante entre 2017 et 2023. Les crédits hors titre 2 alloués à ce dispositif sont, subséquemment, relativement stables et devraient le rester sauf volonté politique marquée d'investissement de manière plus massive pour adapter les capacités d'accueil et faciliter les transferts d'une compagnie à l'autre.

Aussi, la hausse constatée en PLF 2024 résulte quasi exclusivement des dépenses de personnels. En effet, en PLF 2024, les crédits de l'action 2 s'élèvent à 355,6 millions d'euros en AE et 344,6 millions d'euros en CP (avec les fonds de concours) soit une hausse de 2,8 % en AE et 0,8 % en CP qui représente respectivement 9,6 millions en AE et 2,6 millions en CP par rapport à la LFI 2023.

Au titre du seul SMA, les crédits hors titre 2, s'élèvent à 71,8 millions d'euros en AE et 67,6 millions d'euros en CP soit une stabilité en AE et une baisse de 6 millions d'euros en CP en raison du rythme d'achèvement des principales opérations sur les infrastructures d'accueil, par rapport à l'année précédente.

Les crédits de titre 2 enregistrent, à l'inverse, une hausse de plus de 10 millions d'euros qui s'explique notamment par :

- des mesures catégorielles estimées à 6,8 millions d'euros ;

- l'impact du schéma d'emploi fixé à + 25 ETP (effectifs temps plein) de cadres et volontaires techniciens pour 1,8 million d'euros ;

- de l'effet en année pleine de la revalorisation du point d'indice pour 0,8 million d'euros ;

- l'impact du glissement vieillesse technicité (GVT) pour 1,5 million d'euros.

C. LES OUTILS DE FINANCEMENT DE L'ÉCONOMIE (ACTION 4) : UNE BAISSE DES CRÉDITS EN RAISON DE LA NON RECONDUCTION DE L'AIDE EXCEPTIONNELLE POUR RÉPONDRE AUX SURCOUTS D'APPROVISIONNEMENT EN ÉNERGIE

Cette action créée en loi de finances pour 2019 porte des mesures transférées depuis l'action 1 du programme 138, ainsi que des dispositifs nouveaux issus d'une partie des ressources dégagées par les réformes fiscales d'extinction de la TVA non perçue récupérable (NPR) et de réforme de l'impôt sur le revenu.

Ces mesures spécifiques de soutien aux entreprises et associations ultramarines ont pour objectif d'accompagner le développement économique et l'attractivité des territoires ultramarins par la mise en oeuvre de plusieurs dispositifs :

- le prêt de développement outre-mer (PDOM) Bpifrance ;

- les subventions d'investissement ;

- le soutien au microcrédit outre-mer.

1. Une aide exceptionnelle mise en place en LFI 2023

En PLF 2023, les crédits de l'action 4 s'élevaient à 24,3 millions d'euros en AE et 21,8 millions d'euros en CP soit un niveau strictement équivalent à celui de la LFI 2022 en AE et en légère baisse (1,2 million d'euros) en CP.

Ce niveau de crédits, identique à celui des années précédentes, avait alors suscité quelques interrogations de la part des rapporteurs spéciaux dans un contexte économique dégradé. Aussi, à l'initiative de plusieurs députés, un amendement avait été adopté majorant de 10 millions d'euros les crédits de l'action 4 du programme 138 afin de créer une aide budgétaire pour répondre de manière urgente aux surcoûts d'approvisionnement en énergie des entreprises industrielles et de services des DROM.

En effet, le décret n° 2022-967 du 1er juillet 2022, modifié par le décret n° 2022-1250 du 23 septembre 2022, instituant une aide visant à compenser la hausse des coûts d'approvisionnement de gaz naturel et d'électricité des entreprises particulièrement affectées par les conséquences économiques et financières de la guerre en Ukraine présentait des critères trop restrictifs qui, en l'état, ne répondaient pas à la situation préoccupante des entreprises ultramarines industrielles ou de service notamment dans la mesure où le gazole non routier (GNR) n'était pas intégré dans le périmètre de l'aide. D'autre part, le critère du doublement du prix du gaz et/ou de l'électricité sur la période éligible par rapport à une moyenne de prix sur l'année 2021 ne permettait pas d'intégrer des entreprises pourtant très énergétivores qui subissaient des augmentations de leur facture énergétique à date, certes moindres que le doublement exigé, mais suffisamment conséquentes en termes d'impact sur le chiffre d'affaire ou sur la marge pour mettre en péril leur modèle économique. C'était notamment le cas des entreprises de l'eau de la Réunion.

2. La non reconduction de cette aide en PLF 2024

En PLF 2024, cette aide n'est pas reconduite. Il en résulte que les crédits ouverts au titre de cette action s'élèvent à 23,1 millions d'euros en AE et 21 millions d'euros en CP soit une baisse de 11,2 millions d'euros en AE et 10,8 millions d'euros en CP.

En sus de cette non reconduction, le PLF 2024 prévoit une diminution des crédits alloués à cette action de 1,2 million d'euros en AE et de 0,8 million en CP par rapport à la LFI 2022 et aux précédentes.

Dans ce contexte, les rapporteurs spéciaux s'interrogent sur la pertinence d'une telle baisse dans un contexte de crise économique qui pourrait pourtant pousser les entreprises ultramarines à avoir recours de manière accrue à ces outils de financement.

En effet, l'année 2022 a été soutenue en termes d'accords PDOM (+ 18 % à 36,4 millions d'euros) et d'engagements (33 millions d'euros). Cette tendance dynamique s'est confirmée au 1er semestre 2023 avec respectivement 29 millions d'euros et 25,8 millions d'euros.

Le PDOM finance les investissements matériels et immatériels des TPE/PME, qui ont dû, dès 2022, construire la relance post crise sanitaire dans un nouveau contexte de crise.

À ce titre, Bpifrance estime que la majorité des PDOM mis en place en 2022 et 2023 concernent des dossiers avec des retombées polyformes de la crise (inflation des matériaux, de matières premières et du fret, sur-stockage indispensable pour pallier les difficultés d'approvisionnement et éviter la pénurie et la rupture de l'offre, hausse taux crédit...).

Aussi, les prévisions de consommation pour 2024 pourraient suivre la tendance 2023, au regard du plus grand nombre d'entreprises demandeuses et de l'augmentation du coût du crédit.

Si les projections restent délicates à bâtir au regard du contexte géopolitique et économique, les rapporteurs spéciaux estiment que cette contraction des crédits, même minime, va à l'inverse des besoins réels de financement.

Par ailleurs, ils rappellent que l'action 4 a été créée en 2019 avec une partie du gain budgétaire généré par la suppression de la dépense fiscale du mécanisme de TVA NPR. Très rapidement, les rapporteurs avaient mis en exergue les risques de cette rebudgétisation craignant pour la pérennité de ces nouveaux crédits budgétaires.

Aussi, si la baisse constatée n'est pas substantielle, ils souhaitent toutefois rappeler avec fermeté que le niveau des crédits de l'action 4 doit rester stable pour répondre aux engagements du Gouvernement.

III. FOCUS SUR LES MOYENS ALLOUÉS À L'AGENCE DE L'OUTRE-MER POUR LA MOBILITÉ

L'Agence de l'outre-mer pour la mobilité (LADOM) est, depuis le 1er janvier 2016, un établissement public administratif (EPA), en vertu des articles 4 et 6 de la loi n° 2015-1268 du 14 octobre 2015 d'actualisation du droit des outre-mer (LODEOM).

Le financement en provenance de l'État de l'agence provient des deux programmes de la mission « Outre-mer ».

Des crédits du programme 123 « Conditions de vie outre-mer » : l'action 3 du programme 123 retrace la subvention allouée à LADOM, pour le financement des dispositifs du fonds de continuité territoriale (FCT), et notamment les aides ACT, PME, PMFP et PMSP30(*) et l'aide au transport de corps, versées sous conditions de ressources.

Ces crédits s'élèvent à 57,2 millions d'euros en AE et CP en 2024 contre 28,6 millions d'euros en 2023. Cette hausse résulte des engagements pris par le Gouvernement lors du comité interministériel outre-mer (CIOM) du 18 juillet 2023. Ainsi, plusieurs mesures viennent élargir le champ de la continuité territoriale :

- trois nouvelles mesures prévues dans l'article 55 rattaché (cf. commentaire d'article) ;

- l'amélioration des conditions d'accès à la mobilité des ménages résidant dans les outre-mer : les seuils fixés à ce jour pour l'éligibilité des ménages au dispositif de continuité territoriale sont réévalués et passent de 11 991 euros à 18 000 euros. Cette revalorisation portera le taux de population éligible dans les cinq DROM de 62 % à 77 % ;

- le renforcement des aides au déplacement des étudiants, avec la prise en charge à 100 % d'un aller-retour par an jusqu'à 28 ans et d'un aller-retour supplémentaire la première année, pour tous les étudiants ultramarins dont le quotient familial est inférieur à 26 631 euros ;

- l'élargissement de l'accompagnement des talents du monde de la culture et du monde sportif pour les déplacements des troupes artistiques, et des équipes sportives ;

- l'accompagnement des mobilités dans des situations d'urgence, notamment pour les victimes de violences intra-familiales ;

- l'amélioration des modalités de la continuité funéraire.

Des crédits du programme 138 « Emploi outre-mer » : l'action 2 du programme 138 porte la subvention pour charges de service public (SCSP) allouée à l'établissement. Cette subvention s'élève en 2024, à 7 447 074 euros en AE et CP, soit le même montant que celui attribué en 2023. Par ailleurs, l'action 2 du programme 138 porte également les crédits d'intervention de l'agence pour les formations professionnelles en mobilité. Ces crédits, qui visent à financer la formation et l'emploi des jeunes, s'élèvent, en PLF 2024, à 11,1 millions euros en AE et 5,9 millions euros en CP soit une baisse de 12,4 millions d'euros en AE et CP par rapport à la LFI 2023 en raison du transfert à Pôle emploi de la mission relative à la formation professionnelle en mobilité jusqu'alors gérée par LADOM.

Enfin, l'agence est dotée de 127 ETPT sous plafond et 15 ETPT hors plafond en 2023 soit un niveau stable depuis 2016.

TROISIÈME PARTIE
LES DÉPENSES FISCALES EN FAVEUR DE L'OUTRE-MER

I. UNE AMÉLIORATION DE LA PRÉSENTATION DES DÉPENSES FISCALES PRÉCONISÉE MAIS TOUJOURS PAS MISE EN oeUVRE DANS LE PROJET ANNUEL DE PERFORMANCES (PAP) DE LA MISSION « OUTRE-MER »

A. LES INSTRUCTIONS ISSUES DE LA CIRCULAIRE DE LA DIRECTION DU BUDGET SUR LA PRÉPARATION DES PAP 2024

La circulaire 1 BLF- 23-3468 du 15 juin 2023, dans son annexe 10 relative aux dépenses fiscales, présente peu d'évolution par rapport à l'année précédente et prévoit, de nouveau, que dans une logique d'agrégation par politique publique, les PAP devront présenter « les imbrications qui existent entre crédits budgétaires et dépenses fiscales, afin que l'ensemble des moyens mis en oeuvre par politique puisse être apprécié de façon agrégée. À ce titre, le ratio entre dépenses fiscales et crédits budgétaires sera calculé sur chaque programme conformément aux dispositions de la loi organique du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques »31(*).

Par ailleurs, la circulaire invite les ministères, pour le PLF 2024, à « justifier de manière plus systématique le rôle de ces dépenses fiscales au sein de leur programme de rattachement ». Doit ainsi apparaitre, pour chaque dépense fiscale, l'objectif qu'elle recherche.

Cette amélioration s'impose tout particulièrement aux dépenses fiscales relativement coûteuses, notamment au regard des crédits budgétaires concourant aux mêmes objectifs, et dont l'action n'est pas ou peu mentionnée dans les PAP. Cette exigence avait été formulée par les commissions des finances des deux assemblées, ce que rappelle d'ailleurs l'annexe relative aux dépenses fiscales.

Ces compléments concernent tout particulièrement :

- la présentation stratégique du projet annuel de performances : il est notamment demandé aux ministères de mentionner dans cette partie les dépenses fiscales rattachées les plus coûteuses, en précisant leur contribution aux objectifs mis en avant dans le programme d'affectation au même titre que les crédits budgétaires. Il s'agira en particulier de montrer en quoi la dépense fiscale participe à la mise en oeuvre de la politique publique ;

- la présentation des actions dans la JPE : lorsque cela est possible, il est demandé aux ministères de mentionner une ou plusieurs dépenses fiscales considérées comme des leviers d'action pour chaque action du programme en décrivant l'articulation entre les dépenses fiscales mentionnées et les crédits budgétaires poursuivant un objectif similaire.

B. LA NON APPLICATION DE CES INSTRUCTIONS AUX DÉPENSES FISCALES OUTRE-MER MALGRÉ LE POIDS DE CES DERNIÈRES

Cependant, et comme l'année dernière, concernant les dépenses fiscales rattachées aux deux programmes de la mission « Outre-mer », force est de constater que les améliorations susmentionnées n'ont pas été mises en oeuvre.

Ainsi, le ratio entre dépenses fiscales et crédits budgétaires sur chaque programme n'est toujours pas indiqué.

Par ailleurs, aucune mention n'est faite dans la présentation stratégique de la mission et des programmes des dépenses fiscales rattachées les plus coûteuses.

Enfin, dans les parties « justification au premier euro » (JPE) le lien entre certaines dépenses fiscales et les politiques publiques mises en oeuvre n'est pas décrit, de même que l'articulation entre les dépenses fiscales et les crédits budgétaires n'est pas précisée. L'objectif de chaque dépense fiscale n'est pas non plus indiqué dans le tableau récapitulatif.

Pourtant, comme l'avaient déjà précisé les rapporteurs spéciaux dans leur rapport 2023, les exemples de dépenses fiscales servant de levier aux actions budgétaires sont nombreux. À titre d'exemple, les dépenses fiscales afférentes aux crédits et réductions d'impôts dans le secteur du logement (710110, 110210, 110256, 320136) pourraient être reliées aux dépenses budgétaires de la LBU (action 1 du programme 123).

Sur le programme 138, l'abattement sur les bénéfices dans les ZFANG (210322), en ce qu'il a pour objectif l'amélioration de la rentabilité des entreprises situées dans les DOM pourrait être mis en regard de l'action 1 qui vise à diminuer leurs coûts de production et à améliorer leur compétitivité.

Ce travail permettrait de surcroit de mieux comprendre le rattachement de certaines dépenses fiscales à un programme plutôt qu'à l'autre. Ainsi, les abattements de fiscalité directe locale dans les zones franches d'activité sont rattachés au programme 123 alors que, contribuant à la compétitivité des entreprises, ils pourraient être rattachés au programme 138.

Inversement la non applicabilité de la TVA en Guyane et à Mayotte, concourant au même objectif de baisse des prix pour le consommateur final que les taux réduits de TVA en Guadeloupe, Martinique et à la Réunion, pourrait être rattachée au programme 123 relatif aux conditions de vie outre-mer.

Dans ce contexte, et alors même que les dépenses fiscales pèsent plus de 5,5 milliards d'euros, soit près de deux fois plus que les crédits de la mission, les rapporteurs spéciaux estiment nécessaire que le niveau d'information sur ces dernières soit amélioré et, qu'à tout le moins, les préconisations de l'annexe sur les dépenses fiscales soient respectées.

II. UN OUTIL CONTESTÉ MAIS POURTANT NÉCESSAIRE POUR CONTRIBUER À L'ATTRACTIVITÉ DES TERRITOIRES D'OUTRE-MER

A. LES DÉPENSES FISCALES : DES OUTILS CONTESTÉS DE LONGUE DATE MALGRÉ LES TENTATIVES DE RATIONALISATION INTERVENUES CES DERNIÈRES ANNÉES

En sus des crédits budgétaires, les dépenses fiscales contribuent à la dynamisation de l'économie, à l'attractivité des territoires et à l'effort général de rattrapage de l'écart de niveau socio-économique entre l'outre-mer et la métropole.

Sur les deux programmes de la mission, elles devraient s'établir, en 2024, à 5 559 millions d'euros soit quasiment 2 fois plus que les crédits budgétaires portés par la mission « outre-mer ».

En raison des montants en jeu, les dépenses fiscales sont cependant des outils contestés pour plusieurs raisons mises en exergue de manière récurrente, en particulier par la Cour des comptes dans ses rapports sur l'exécution budgétaire, dans son rapport sur le logement outre-mer32(*), et dans son rapport sur les financements de l'État en outre-mer.

Elle estime, en effet, que l'efficacité de ces dépenses n'est pas avérée et que leur surcoût est important par rapport à d'autres dispositifs en raison notamment :

- des difficultés de chiffrage et, de fait, du coût réel qu'elles représentent pour l'État ;

- des difficultés de pilotage ;

- de l'absence d'évaluation de l'efficacité et de l'efficience des dépenses fiscales et, à tout le moins, des plus significatives ;

- de l'absence de règles précises et formalisées relatives à la définition et à la modification du périmètre des dépenses fiscales.

Dans ce contexte, le Gouvernement et le Législateur ont tenté de rationaliser les dépenses fiscales et notamment celles applicables à l'outre-mer. Ainsi, récemment, les réformes de 2019 ont notamment concerné :

la suppression du dispositif de la TVA non perçue récupérable33(*) (ce qui représente une économie d'environ 100 millions d'euros) rattachée au programme 138 ;

la réfaction de la réduction d'impôt sur le revenu spécifique pour les contribuables résidant dans les DOM34(*) (ce qui représente une économie d'environ 7035(*) millions d'euros) rattachée au programme 123 ;

- la diminution du régime classique de défiscalisation prévu aux articles 199 undecies B et C du CGI au profit d'un crédit d'impôt en faveur de l'investissement dans les DROM (article 244 quater W du CGI) ce qui a diminué la dépense fiscale de 700 millions d'euros à 377 millions d'euros et a augmenté parallèlement le crédit d'impôt qui atteint un niveau de 150 millions d'euros en 2021.

De surcroit, la loi de finances pour 202036(*) a supprimé deux dispositifs non chiffrables :

- dépense fiscale n° 170308 : exclusion temporaire du revenu imposable des bénéfices provenant de l'exploitation de terrains auparavant non cultivés affectés à des cultures agréées pour la détermination du revenu imposable afférent aux exploitations agricoles situées dans les DOM ;

- dépense fiscale n° 710106 : exonérations de TVA relatives à la mise en valeur agricole de terres dans les DOM.

La LFI 2022 a acté la suppression de l'exonération des bénéfices réinvestis dans l'entreprise pour les sociétés de recherche et d'exploitation minière dans les départements d'outre-mer, cette dépense fiscale apparaissant comme obsolète et sans objet depuis l'extinction de son fait générateur en 2001.

Enfin, la LFI 2023 a supprimé l'exonération d'impôt sur les sociétés pour les entreprises nouvellement créées en outre-mer dans la mesure où cette dépense fiscale était devenue sans objet depuis l'extinction de son fait générateur depuis le 31 décembre 2006.

B. POUR AUTANT, LES DÉPENSES FISCALES REPRÉSENTENT UN OUTIL INDISPENSABLE QU'IL EST NÉCESSAIRE DE MAINTENIR

1. Un outil indispensable pour l'économie ultra marine

Malgré les critiques récurrentes, les rapporteurs spéciaux estiment que ces dépenses représentent un outil essentiel pour contribuer à la dynamisation de l'économie, à l'attractivité des territoires et à l'effort général de rattrapage de l'écart de niveau socio-économique entre l'outre-mer et la métropole. À ce titre, elles sont considérées par le droit de l'Union européenne comme des aides à finalité régionale, placées sous le régime du règlement général d'exemption par catégorie37(*), car considérées comme de faible ampleur sur la concurrence et de nature à compenser les surcoûts liés à cette situation géographique particulière.

Elles ont un effet incitatif notamment sur la construction de logements et répondent ainsi à un besoin prégnant en outre-mer.

Hors dépenses fiscales relatives au logement, elles permettent un maintien du pouvoir d'achat des ultramarins et contribuent aux tentatives de réalignement des niveaux de vie avec la métropole. C'est notamment le cas des exonérations ou des taux réduits de TVA.

Elles concourent, enfin, à l'amélioration de la compétitivité des entreprises ultramarines dans un marché plus contraint qu'en métropole et favorisent l'investissement privé.

Les dépenses fiscales ont, enfin, une portée politique dont il ne faudrait pas négliger l'impact en termes de climat social dans les territoires d'outre-mer.

2. Des évolutions dans le bon sens avec la prolongation de plusieurs dépenses fiscales en LFI 2023

Dans plusieurs de leur rapport (PLF 2022 et PLF 2023), les rapporteurs spéciaux avaient alerté sur le fait que « nombre de dépenses fiscales présentaient un fait générateur qui s'éteindra en 2025 voire en 2023 ».

Dans ce contexte, ils saluent les prolongations intervenues en LFI 2023. En effet, l'article 13 de la loi de finances pour 2023 prévoit la prolongation, jusqu'en 2029, de plusieurs dispositifs fiscaux applicables en outre-mer permettant ainsi d'offrir une visibilité suffisante et un cadre fiscal stable aux investisseurs.

Sont ainsi concernés les dispositifs définis aux articles suivants du code général des impôts :

- l'article 199 undecies A qui prévoit une réduction d'impôt sur le revenu pour les contribuables domiciliés en France qui investissent, dans divers secteurs, en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte, à La Réunion, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy, dans les îles Wallis et Futuna et les Terres australes et antarctiques françaises ;

l'article 199 undecies B qui prévoit une réduction d'impôt sur le revenu pour les contribuables domiciliés en France à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy, dans les îles Wallis-et-Futuna et les Terres australes et antarctiques françaises, dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale ;

l'article 217 undecies qui prévoit que les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés réalisant un chiffre d'affaires inférieur à 20 millions d'euros peuvent déduire de leurs résultats imposables une somme égale au montant des investissements productifs qu'elles réalisent dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique, de Mayotte et de la Réunion ;

l'article 244 quater Y qui prévoit une réduction d'impôt pour les entreprises à raison des investissements productifs neufs qu'elles réalisent, dans certaines conditions, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy, dans les îles Wallis et Futuna et les Terres australes et antarctiques françaises ;

l'article 244 quater W qui prévoit que les entreprises imposées d'après leur bénéfice réel ou exonérées, exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt à raison des investissements productifs neufs qu'elles réalisent dans un département d'outre-mer ;

l'article 244 quater X qui prévoit que les organismes d'habitations à loyer modéré et les sociétés d'économie mixte exerçant une activité immobilière outre-mer peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt à raison de l'acquisition ou de la construction de logements neufs dans les départements d'outre-mer, lorsqu'ils respectent certaines conditions.

D'autres dispositions ont, par ailleurs, été adoptées en LFI 2023 concernant les navires de pêche, les frais d'inscription au livre foncier de Mayotte, la prolongation de la majoration à Mayotte des seuils de revenus pour le bénéfice des allégements de TFPB et le régime de vente hors taxe au bénéfice des touristes arrivant en Guadeloupe et en Martinique dans le cadre de croisières maritimes.

III. LA DIFFICILE ANALYSE DE L'ÉVOLUTION DES DÉPENSES FISCALES ENTRE 2023 ET 2024

A. L'ÉVOLUTION DES DÉPENSES FISCALES EN PLF 2024

Les dépenses fiscales présentées dans le PAP « outre-mer » 2024 s'établissent comme suit :

Évolution des dépenses fiscales entre 2022 et 2024

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir PAP 2024

Entre 2023 et 2024, elles enregistrent une hausse de 2,23 % soit 121 millions d'euros.

Cette progression est sensiblement identique à celle constatée entre 2022 et 2023 (2,5 % soit 174 millions d'euros).

Cependant, en PAP 2023, le montant des dépenses fiscales était estimé à près de 7 milliards d'euros.

Estimation des dépenses fiscales entre 2021 et 2023 en PAP 2023

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir du PAP 2023

Cet écart de 1,5 milliard d'euros résulte d'un changement de méthode concernant la comptabilisation de l'ensemble des dépenses fiscales en matière de TVA. En effet, ces dernières tiennent désormais compte de la seule incidence de ces dispositifs sur la part des recettes nettes de TVA restant à l'État, c'est-à-dire diminuées des recettes de TVA transférées aux collectivités territoriales et organismes de sécurité sociale. Pour les dépenses fiscales outre-mer ce changement touche essentiellement la dépense fiscale 710103 (niveau des taux en Guadeloupe, en Martinique et à La Réunion : 8,5 % pour le taux normal et 2,1 % pour le taux réduit).

Ainsi, au niveau de l'ensemble des dépenses fiscales, la dernière prévision 2022 estimée à 94,2 milliards d'euros dans le Voies et moyens tome II annexé au PLF 2023 a été réévaluée, selon cette nouvelle présentation, à 84,3 milliards d'euros dans les PLF 2024. De même, la prévision 2023 de 89,1 milliards d'euros a été réévaluée à 77,7 milliards d'euros.

Par ailleurs, concernant la DFI 800401 (réduction du champ de l'accise sur les produits énergétiques à usage carburants, dans les collectivités régies par l'article 73 de la Constitution, aux seuls essences et gazoles et faculté pour ces collectivités de minorer les tarifs), l'évolution à la hausse (+ 511 millions d'euros) entre les PLF 2023 et 2024 résulte essentiellement d'un changement de la méthode de chiffrage sans que ce changement ne soit explicité précisément.

B. L'IMPORTANCE DES DÉPENSES FISCALES POUR L'ÉCONOMIE ULTRAMARINE REND NÉCESSAIRE DES ÉVALUATIONS PRÉCISES SUR LEUR IMPACT

Les rapporteurs spéciaux ne remettent donc pas en cause le principe même des dépenses fiscales en ce qu'elles constituent un complément indispensable aux crédits budgétaires et présentent des avantages connexes en termes de compétitivité des entreprises ultramarines et de création d'emplois.

Cependant, ils partagent le constat récurrent de la Cour des comptes sur la nécessité de mieux les évaluer pour, au besoin, mieux les cibler ou les étendre.

1. Les évaluations déjà menées

Sur la période 2021 à 2023, la direction générale des outre-mer a coordonné trois évaluations portant sur des dépenses fiscales suivantes :

- l'évaluation des abattements applicables dans les collectivités d'outre-mer en application des articles 44 quaterdecies, 1388 quinquies, 1395 H et 1466 F du code général des impôts, dit dispositif des « zones franches d'activité nouvelle génération » (2021) ;

- l'évaluation de l'augmentation du seuil pour bénéficier de la franchise en base de TVA en Guadeloupe, en Martinique et à La Réunion (2022) ;

- l'évaluation de l'impact de l'aide fiscale à l'investissement productif neuf en outre-mer (rapport de l'IGF paru en juillet 2023).

En revanche, le programme d'évaluation des dépenses fiscales pour 2024, présenté dans le Tome 2 - Voies et moyens, annexé au PLF 2024, ne prévoit pas d'évaluation sur des dépenses fiscales rattachées à la mission « Outre-mer ».

Les rapporteurs spéciaux sont pleinement conscients des difficultés qui pèsent sur l'évaluation des dépenses fiscales.

L'impact sur la création d'emplois est délicat à déterminer dans la mesure où les emplois mentionnés dans les agréments correspondent aux engagements de créations de la société bénéficiaire de l'agrément fiscal et non à une réalité mesurée ex-post.

Par ailleurs, par manque de données disponibles, il est difficile de reconstituer le niveau de recettes potentiel avant la mise en place d'une dépense fiscale.

L'évaluation des dépenses fiscales demeure donc un exercice très complexe, subséquemment incomplet et à la fiabilité relative.

Il apparait cependant nécessaire de poursuivre ces travaux d'évaluation et de fiabilisation des montants, préalable nécessaire à une réflexion relative à l'extension et/ou prorogation de certains dispositifs existants à l'efficacité démontrée ou à la suppression des dépenses fiscales les moins efficientes avec possibilité d'une réallocation de ces montants pour renforcer d'autres dispositifs (dépenses fiscales ou rebudgétisation).

2. Focus sur l'évaluation du régime d'aide fiscale à l'investissement productif (RAFIP)

Les ministres chargés de l'économie, des comptes publics, de l'intérieur et de l'outre-mer ont demandé à l'inspection générale des finances de conduire des travaux sur ce régime qui comporte cinq dispositifs en :

- analysant la répartition actuelle des aides fiscales à l'investissement en outre-mer ;

- évaluant l'impact de ces aides fiscales sur le tissu productif ultramarin ;

- appréciant les conditions de fonctionnement et de contrôle de cette dépense fiscale.

Il résulte des travaux de la mission 16 propositions destinées à :

- mieux cibler le RAFIP au bénéfice de l'exploitant, en favorisant notamment la montée en charge des dispositifs désintermédiés (crédit d'impôt) ;

- améliorer le pilotage et le suivi de la dépense fiscale, tout en simplifiant son fonctionnement ;

- renforcer les prérogatives et contrôles assurés par les services de l'État ;

- réorienter le RAFIP vers des actifs productifs, les petites entreprises et le verdissement des économies ultramarines ;

- réguler davantage l'activité des intermédiaires, et singulièrement celle des « monteurs en défiscalisation ».

Si les rapporteurs spéciaux partagent certains constats et recommandations notamment pour étendre ces dispositifs à la transition écologique ou pour limiter les fraudes, ils se montrent plus prudents sur les préconisations relatives au ciblage et alertent sur le fait qu'une restriction trop importante du régime ne serait pas sans conséquence sur l'économie ultramarine.

Aussi, ils estiment nécessaire, avant toute décision, de mettre en place une consultation avec les élus locaux et les parlementaires sur ce sujet.

QUATRIÈME PARTIE
LES CRÉDITS HORS MISSION OUTRE-MER
EN FAVEUR DES OUTRE-MER

I. UN EFFORT EN PROVENANCE DES MISSIONS SECTORIELLES DU BUDGET DE L'ÉTAT

A. DES CRÉDITS RETRACÉS DANS UN DOCUMENT DE POLITIQUE TRANSVERSALE (DPT) ALLÉGÉ DEPUIS 2023

En complément des crédits portés par la mission « Outre-mer » et des dépenses fiscales rattachées aux programmes 138 et 123, les territoires d'outre-mer bénéficient de crédits en provenance d'autres programmes du budget général qui sont retracés dans le document de politique transversale « Outre-mer ».

Ce document, bien que permettant d'avoir une vision exhaustive des crédits alloués à l'outre-mer, a été largement critiqué par les parlementaires (notamment dans un rapport d'information des rapporteurs spéciaux38(*) faisant suite au rapport de la Cour des comptes sur les financements de l'État en outre-mer) en raison d'insuffisances et de biais structurels.

Ainsi, les modalités de confection de ce document (contributions de près de 100 programmes) coordonné par la seule DGOM, dont les moyens pour cette mission restent relativement limités, engendrent des fragilités et des inconvénients. Il en résultait un document très lourd et peu lisible avec des incohérences, des redondances ou le maintien de paragraphes obsolètes qui ne permettaient pas une information optimale des parlementaires.

En 2023, la rédaction du DPT a été resserrée autour de 6 axes (contre 9 auparavant) plus en lien avec la loi EROM et le livre bleu :

- axe n° 1 : développer l'emploi, la production et l'investissement outre-mer ;

- axe n° 2 : promouvoir l'égalité des chances en outre-mer ;

- axe n° 3 : valoriser les atouts et favoriser les conditions de vie en outre-mer ;

- axe n° 4 : promouvoir l'aménagement durable et la transition écologique des territoires ultramarins ;

- axe n° 5 : relations avec les collectivités territoriales ;

- axe n° 6 : plan d'urgence face à la crise sanitaire / plan de relance.

Le sixième axe a été supprimé dans le DPT 2024.

Il résulte des différentes modifications opérées que les DPT relatifs à l'outre-mer 2023 et 2024 ont été considérablement allégé par rapport au précédent (300 pages contre 480 en 2022) et sa lisibilité a été améliorée.

Dans leur précédent rapport relatif au PLF 2023, les rapporteurs spéciaux soulignaient que des progrès étaient cependant encore possibles notamment concernant le tableau de suivi des contrats de convergence et de transformation.

Ils préconisaient, notamment, une présentation distincte pour chacun des contrats de convergence et de transformation (et contrat de développement et de transformation pour la Polynésie et contrat de développement pour la Nouvelle-Calédonie) ainsi que l'établissement d'une liste, par contrat, des projets financés et de leur état d'avancement. Ils regrettent que ces évolutions n'aient pas été mises en oeuvre dans le DPT 2024 à l'heure où les nouvelles générations de CCT sont en négociation

B. L'ÉVOLUTION DES CRÉDITS EN PROVENANCE DES AUTRES MISSIONS DU BUDGET DE L'ÉTAT

1. Une hausse notable sous l'effet de la mission «Enseignement scolaire »

Le montant total des contributions budgétaires s'élève, en PLF 2024, à 21,1 milliards d'euros en AE et 28,8 milliards d'euros en CP soit une hausse de 0,93 % en AE et de 2,92 % en CP par rapport à la LFI 2023.

Cette augmentation représente 195 millions d'euros en AE et 647,6 millions d'euros en CP.

Évolution de l'effort financier de l'État en faveur de l'outre-mer
entre 2022 et 2024 par mission

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents de politique transversale outre-mer

En sus de la mission « Outre-mer » les missions contributrices sont essentiellement les missions « Enseignement scolaire », « Relations avec les collectivités territoriales », « Écologie », « Solidarité, insertion et égalité des chances », et « Sécurités ». Ces 6 missions représentent environ 75 % du total de l'effort financier de l'État. Ce ratio est stable sur les dernières années.

Part des missions dans l'effort total en faveur de l'outre-mer entre 2018 et 2024 (en AE)

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents de politique transversale Outre-mer

Au total, en PLF 2024, les dépenses de l'État en faveur de l'outre-mer (crédits de la mission « Outre-mer », dépenses fiscales et contributions des programmes du budget général) seront d'environ 26,7 milliards d'euros en AE et 28,4 milliards d'euros en CP soit une hausse de 316 millions d'euros en AE et de 647,6 millions en CP.

Depuis 2018, cet effort total a progressé de 13,7 % en AE et 21,5 % en CP soit, respectivement 3,2 milliards en AE et 5 milliards en CP.

Évolution de l'effort financier de l'État en faveur de l'outre-mer
entre 2018 et 2024

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires (PAP et DPT) - BG : budget général

2. Des crédits pluri ministériels qui permettent notamment le financement des plans thématiques outre-mer

Il existe cinq plans thématiques outre-mer :

- le plan d'actions pour les services d'eau potable et d'assainissement en Guadeloupe, Guyane, Martinique, la Réunion, Mayotte et Saint-Martin (Plan eau DOM) ;

- le plan séismes Antilles ;

- le plan Sargasses II ;

- le plan logement outre-mer (PLOM) ;

- le plan chlordécone.

Malgré une demande des rapporteurs spéciaux concernant la consommation des crédits alloués à ces plans au 31 décembre 2022, la réponse transmise, non mise à jour par rapport à celle de l'année dernière, ne fournit des données chiffrées que jusqu'à juillet 2022, ce que regrettent les rapporteurs spéciaux.

a) Le plan d'action pour les services d'eau potable et d'assainissement en Guadeloupe, Guyane, Martinique, la Réunion, Mayotte et Saint-Martin (plan Eau DOM)

Le plan Eau DOM (PEDOM), adopté en 2016 pour une période de 10 ans, accompagne l'amélioration du service rendu aux usagers en matière d'eau potable et d'assainissement. Le ministère chargé des outre-mer cofinance, dans le cadre du programme 123, l'élaboration et la réalisation des contrats de progrès. Ainsi, depuis 2016, le ministère a engagé 126 millions d'euros et consommé, au 31 juillet 2022, 72,5 millions d'euros à partir des crédits de la mission « Outre-mer » :

- FEI : 58 millions d'euros en AE entre 2016 et 2022 et 39 millions d'euros en CP au 31 juillet 2022.

- CPER/CDEV : 43 millions d'euros en AE sur la période 2016-2022 et 28,5 millions d'euros en CP au 31 juillet 2022 ;

- CCT : 25 millions d'euros en AE entre 2016 et 2022 et 5 millions d'euros en CP au 31 juillet 2022.

D'autres partenaires cofinancent des opérations d'investissement en eau et assainissement dans le cadre de ce plan :

le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires (MTECT) : 5 millions d'euros en AE entre 2016 et 2022 et 3,1 millions d'euros en CP au 31 décembre 2021 ;

l'office français de la biodiversité (OFB) qui pilote le dispositif de solidarité interbassins (117 millions en AE sur la période 2016-2022 et 73 millions d'euros en CP au 31 décembre 2021) et les crédits du Plan de relance alloués au plan Eau (47 millions d'euros en AE sur la période 2016 à2022 et 12 millions d'euros en CP au 31 décembre 2021) ;

l'agence française de développement (AFD) qui octroie des prêts long terme bonifiés par le ministère des outre-mer (173 millions d'euros depuis 2016, ayant mobilisé 11,9 millions d'euros de bonifications), des préfinancements de subventions via des prêts court terme (48 millions d'euros depuis 2016) et qui subventionne des études, en direct et via le fonds outre-mer à partir de 2020 (7,4 millions d'euros en AE pour la période 2016-2022 et 4,5 millions d'euros en CP au 31 décembre 2021) ;

- la banque des territoires qui octroie des prêts pour un montant total de 114 millions d'euros depuis 2016.

Au total, entre 2016 et 2022, 625 millions d'euros se décomposant en 290 millions d'euros de subventions et 335 millions d'euros de prêts ont été mis à disposition des collectivités ultra-marines par l'État ou ses opérateurs bancaires sur les thématiques de l'adduction en eau potable et de l'assainissement.

b) Le plan séismes Antilles

Les Antilles sont les territoires où l'aléa et le risque sismique sont les plus forts à l'échelle nationale (classement en zone de sismicité 5, dite « forte »). Dans ce contexte, le Gouvernement a adopté, en 2007, le plan séisme Antilles (PSA), prévu pour une durée de 30 ans, dont l'objectif est d'améliorer la sécurité de la population.

Pour la période 2007-2019, plus de 562 millions d'euros ont été consacrés au confortement ou à la construction aux normes parasismiques pour la Martinique et 491 millions d'euros pour la Guadeloupe, soit plus d'un milliard d'euros au total.

Le troisième volet du plan séisme Antilles (PSA3) a été arrêté le 22 avril 2021. Il prévoit la construction ou la mise aux normes de bâtiments et infrastructures de gestion de crise, d'établissements d'enseignement, d'établissements de santé et de logements sociaux, et des actions de prévention à l'attention des populations, pour un montant global de 1,2 milliard d'euros entre 2021 et 2027, dont le financement assuré par l'État (MTECT) s'élève à 654,9 millions d'euros (dont 50 millions d'euros issus du plan de relance).

Le delta provient du fonds de prévention pour les risques naturels majeurs (FPRNM), du programme 123 de la mission « Outre-mer », du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État », du ministère de la santé et de la prévention via le fonds pour la modernisation et l'investissement en santé (FMIS) et du budget de la sécurité civile pour les opérations relatives au confortement des hôpitaux.

Le plan est suivi par la mission d'appui aux politiques publiques de prévention des risques naturels majeurs outre-mer (MAPPPROM), placée auprès du délégué interministériel aux risques majeurs, directeur général de la prévention des risques (DGPR - MTECT).

c) Le plan Sargasses II

Le plan Sargasses II (2022-2025) a été publié le 14 mars 2022. Le montant annuel total prévu par le plan Sargasses II s'élève à 7,6 millions d'euros et le montant total du plan sur la période 2022-2025 s'élève à 36,5 millions d'euros.

Les origines des financements annuels, décidées lors de la réunion interministérielle du 13 décembre 2021, se répartissent comme suit :

- programme 123 : 3,5 millions d'euros ;

- divers programmes du budget général et opérateurs : 4,13 millions d'euros.

À partir de 2023, une action « Sargasses » est créée au sein du programme des interventions territoriales de l'État (PITE) pour un montant total de 5,1 millions d'euros.

d) Le plan logement outre-mer (PLOM)

Le PLOM 2 (2019-2022) a été signé le 2 décembre 2019, suite à la conférence « logement outre-mer » qui s'est tenue de janvier à juillet 2019. Sa prolongation d'un an, actée au comité de pilotage de mai 2022, a permis de finir sa mise en oeuvre et de lancer une réflexion associant les différents partenaires du plan au premier semestre 2023 afin de définir le contenu du futur PLOM 3.

Le PLOM est constitué de mesures opérationnelles dont l'objectif est de lever les freins à la construction et la réhabilitation de logements dans les DROM. Il ne prévoit pas de crédits spécifiques. Il contribue donc indirectement à une meilleure utilisation des crédits affectés à la ligne budgétaire unique du ministère chargé des outre-mer, action 1 du programme 123.

L'élaboration du PLOM 3 a été décalée en attendant la remise d'un rapport d'évaluation concernant le PLOM 2. À ce stade, il n'y a pas de certitude qu'il puisse être signé d'ici la fin de l'année 2023.

e) Le plan chlordécone

Ce plan a été lancé le 24 février 2021 pour la période 2021-2027 pour un montant total de 92,3 millions d'euros. Les montants consommés au 31 décembre 2021 sont de 8,4 millions en AE et 5,5 millions en CP. Les origines de financement de ce plan sont :

- programme 162 « Interventions territoriales de l'État : 31 millions d'euros ;

- programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » du ministère en charge de la santé : 3 millions d'euros ;

- divers programmes du budget général et opérateurs : 18,47 millions d'euros ;

- assurance maladie : 20 millions d'euros ;

- plan de relance : 3 millions d'euros ;

- fonds européens et collectivités : 16 millions d'euros.

II. LES CRÉDITS EN PROVENANCE DU PLAN DE RELANCE ET DU FONDS VERT : DES DISPOSITIFS UTILES MALGRÉ UNE MISE EN oeUVRE DIFFICILE EN RAISON DES SPÉCIFICITÉS OUTRE-MER

A. UN NIVEAU DE CONSOMMATION DES CRÉDITS DU PLAN DE RELANCE QUI N'EST PAS À LA HAUTEUR DES BESOINS

1. Les annonces initiales en faveur des territoires d'outre-mer

Lors des premières annonces relatives au plan de relance, les crédits alloués à l'outre-mer devaient atteindre 1,5 milliard d'euros avec des engagements étalés entre 2021 et 2022 et au-delà de 2022, à la marge, pour des projets complexes d'infrastructures ou de rénovation lourde.

Par ailleurs, il avait été annoncé une contribution du « Ségur de la Santé » (financé par France Relance à hauteur de 6 milliards d'euros nationalement) de 1,06 milliard d'euros d'investissement pour les systèmes de santé ultramarins en sus du 1,5 milliard d'euros.

Les crédits estimés de France Relance dans les outre-mer devaient, initialement, se répartir comme suit entre les 3 axes prioritaires du plan de relance :

- écologie et transition énergétique : 640 millions d'euros ;

- compétitivité des entreprises : 316 millions d'euros dont 267 millions d'euros au titre de la baisse des impôts de production ;

- cohésion des territoires : 535 millions d'euros.

2. Le niveau de consommation fin 2022

Fin 2022, les consommations d'AE et de CP sur les trois programmes de la mission « Plan de relance » s'élèvent respectivement à 533,4 millions d'euros et 203,6 millions d'euros.

Consommation des crédits du plan de relance en outre-mer en 2021 et 2022

(en millions d'euros)

Source : DGOM en réponse au questionnaire budgétaire

En sus de ces crédits, les territoires d'outre-mer ont bénéficié :

- de 267 millions d'euros de réduction d'impôts de production ;

- d'abondements sur le programme 123 de la mission « Outre-mer » : 30 millions d'euros pour le fonds outre-mer (FOM), 20 millions d'euros pour les CCT et 20 millions d'euros pour la LBU soit un total de 70 millions d'euros entièrement consommés ;

- de 47 millions d'euros via l'Office français pour la biodiversité pour des projets « eau et assainissement dans les départements d'outre-mer », mis en oeuvre par le biais de subventions de projets portés par les collectivités territoriales et leurs groupements ;

- de 38,5 millions d'euros de dotation de soutien à l'investissement local exceptionnelle ;

- de 6,1 millions d'euros pour le plan Séisme Antilles (en sus de 50 millions d'euros intégrés dans la mission « Plan de relance »).

Au total, fin 2022, environ 1 milliard d'euros d'AE a été consommé au titre des crédits « relance » en outre-mer soit 0,5 milliard de moins que les montants d'ouverture d'AE annoncés initialement.

Les rapporteurs spéciaux saluent l'engagement de l'État mais soulignent des niveaux de consommation décevants au regard des besoins et enjeux des territoires d'outre-mer. Dans ce contexte, ils continueront de suivre la consommation des crédits « Plan de relance » l'année prochaine.

B. UNE CONSOMMATION EN DEÇA DES ATTENTES EN RAISON DE LA NON PRISE EN COMPTE DES SPÉCIFICITÉS ULTRAMARINES

1. Des difficultés communes à tous les territoires d'outre-mer

De manière générale, les territoires d'outre-mer interrogés par la DGOM regrettent un nombre trop limité de dispositifs du plan de relance spécifiques aux outre-mer.

Ils constatent, par ailleurs, que les délais de réponse aux appels à projets nationaux n'ont parfois pas permis aux territoires ultramarins de candidater en raison du principe adopté par le plan de relance du « premier arrivé, premier servi ».

En outre, nombre de territoires partagent le constat relatif à la difficulté de mise en oeuvre des projets liée au manque d'ingénierie et au manque de compétences techniques sur les territoires (dans le domaine de la rénovation énergétique par exemple). Il en résulte une difficulté récurrente des territoires à présenter des projets matures, prêts à être financés.

Par ailleurs, la situation financière tendue de certaines collectivités d'outre-mer a pu représenter un frein pour financer la part résiduelle des investissements soutenus par France Relance.

Enfin, les difficultés pour trouver du foncier économique ont parfois allongé les délais de réalisation des projets sélectionnés de même que la hausse du coût des matériaux et la disponibilité de certaines fournitures ont également fait peser un risque sur la réalisation des projets.

Cependant, les territoires ont salué la mise à disposition rapide des crédits et la simplicité de l'instruction de certains dispositifs tels que l'appel à projets « Territoires d'industrie », instruit localement, à la main des préfets.

Dans le même temps, le plan de relance a permis de développer des outils innovants d'appui aux territoires : appel à projets « Territoires d'industrie », fonds Outre-mer (FOM), plan « 1 jeune 1 solution », qui ont trouvé leur public dans les outre-mer.

2. Des difficultés spécifiques à certains territoires

De manière plus spécifique, certaines difficultés ont touché des territoires ciblés. Ainsi :

Wallis-et-Futuna relève un effet d'entonnoir avec un afflux d'argent trop important pour être absorbé par le territoire ;

- en Polynésie française, certains dispositifs se sont révélés inadaptés au statut d'autonomie de la Polynésie française. Certains prérequis, comme le SIRENE, n'ont pas permis de mettre en place des conseillers numériques, dispositif pourtant très attendu localement ;

- en Nouvelle-Calédonie, les acteurs ont souligné le manque de visibilité sur les diverses sources de financement ;

- le constat a été fait en Martinique de délais de réalisation accordés trop courts ;

- à Saint-Pierre-et-Miquelon, il a été souligné la nécessité d'une veille permanente pour identifier les dispositifs applicables dans les COM relevant de l'article 74 de la Constitution et l'inadéquation des enveloppes budgétaires aux réalités du territoire.

S'il en était besoin, la mise en oeuvre du plan de relance, comme celle d'autres dispositifs auparavant, met en exergue l'absolu nécessité de tenir compte des spécificités territoriales et de développer des approches différenciées non seulement entre la métropole et les territoires d'outre-mer, mais également entre les territoires d'outre-mer eux-mêmes.

C. UN FONDS VERT BIEN APPROPRIÉ PAR LES TERRITOIRES ULTRAMARINS

Les territoires d'outre-mer se sont saisis du fonds vert et ont déposé 403 dossiers pour un montant total de plus de 220 millions d'euros au 20 septembre 2023.

Ces dossiers concernent l'ensemble des actions du fonds. Les demandes les plus nombreuses ont porté sur les actions suivantes :

- accompagnement de la stratégie SNB 2030 ;

- renaturation des villes et villages ;

- rénovation énergétique des bâtiments publics locaux ;

- recyclage foncier ;

- renforcement de la protection des bâtiments contre les vents cycloniques ;

- ingénierie.

160 dossiers ont été sélectionnés, soit 40 % des dossiers déposés par les territoires d'outre-mer, pour un montant global de 93,2 millions d'euros de subventions attribuées.

Au 20 septembre 2023, 70,8 millions d'euros d'AE ont déjà été consommés soit 77 %.

Des projets ont été retenus dans chaque territoire d'outre-mer. Les dossiers acceptés sont plus nombreux à La Réunion (38), dans la zone constituée par la Guadeloupe/Saint-Martin/Saint-Barthélemy (30), en Guyane (28) et en Martinique (25).

État des financements recensés au titre du fonds vert pour les outre-mer
au 20 septembre 2023

(en euros)

Source : DGOM - Wallis et Futuna : dossiers en cours d'enregistrement dans l'outil Démarches-Simplifiées

Le fonds vert a donc été fortement sollicité par les territoires ultramarins. Il en résulte qu'au regard du nombre de dossiers et du montant d'aide demandé, les crédits alloués en 2023 ne permettront pas l'instruction de tous les dossiers déposés en 2023. Les porteurs de projet ont donc été invités à présenter leurs dossiers relatifs au fonds vert non retenus en 2023 à l'appel à candidature de 2024. Pour autant, il n'y a pas de garantie que les crédits ouverts en 2024 permettront de répondre positivement à l'ensemble des demandes.

LES MODIFICATIONS CONSIDÉRÉES COMME ADOPTÉES
PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3 DE LA CONSTITUTION

En première lecture à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a retenu, dans l'élaboration du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, un article additionnel rattaché à la présente mission (voir commentaire infra de l'article 55 bis).

En outre, il a retenu 27 amendements de crédits dont plusieurs identiques : 19 majorant les crédits du programme 123 et 8 majorant les crédits du programme 138.

I. LES AMENDEMENTS PORTANT OUVERTURE DE CRÉDITS SUR LE PROGRAMME 123 « CONDITIONS DE VIE OUTRE-MER »

L'amendement II-4119 du Gouvernement et cinq amendements identiques (déposés par les députés Guillaume Vuilletet, Bruno Millienne, Marie-Agnès Poussier-Winsback, Davy Rimane, Estelle Youssoufa et plusieurs de leurs collègues) majorent de 40 millions d'euros en AE et de 8 millions d'euros en CP les crédits alloués au fonds exceptionnel d'investissement (FEI) afin de répondre aux nombreux besoins d'investissement des territoires d'outre-mer. Ces crédits supplémentaires permettront, entre autre, de financer des opérations relatives aux réseaux d'eau et d'assainissement au traitement des déchets, aux infrastructures nécessaires pour lutter contre les sargasses en complément des crédits du programme 162 « Interventions territoriales de l'État » ou encore la rénovation des écoles. Sur ce dernier point, cet abondement du FEI répond en partie à la décision n° 32 du comité interministériel des outre-mer qui prévoit un plan pluriannuel de travaux de rénovation sur dix ans.

L'amendement II-4151 du Gouvernement majore, de surcroit, les crédits alloués au FEI de 10 millions d'euros en AE et de 2 millions d'euros en CP afin d'accroître les moyens dédiés aux investissements indispensables pour l'eau et l'assainissement à Mayotte dans un contexte de crise qui nécessite d'accélérer les investissements pour mettre à niveau les infrastructures sur le territoire.

L'amendement II-3673 déposé par le député Guillaume Vuilletet et plusieurs de ces collègues majore de 9 millions d'euros en AE et de 3 millions d'euros en CP les crédits alloués aux contrats de redressement outre-mer (COROM) afin d'accélérer le redressement des communes bénéficiant d'un COROM, d'améliorer les délais de paiement subis par les entreprises et de restaurer la capacité à investir des communes contractantes.

L'amendement II-1006 déposé par le député Philippe Dunoyer et plusieurs de ses collègues majore les AE et CP de l'action 2 «Aménagement du territoire » du programme 123 de 700 000 euros afin de financer, en Nouvelle-Calédonie, les mesures d'adaptation aux effets du réchauffement climatique prévues dans la loi Climat et Résilience du 22 aout 2021. Ces crédits permettront notamment de réunir les éléments scientifiques nécessaires à l'élaboration d'un schéma d'adaptation au réchauffement climatique, un soutien financier pour mener des premières actions concrètes telles que l'élaboration d'une carte globale de l'évolution du trait de côte, la priorisation d'opérations d'aménagement et la programmation pluriannuelle d'actions auprès des populations et des collectivités locales.

L'amendement II-3157 déposé par le député Christian Baptiste et plusieurs de ses collègues majore de 2,5 million d'euros les AE et CP du programme 123 afin d'équilibrer le budget de l'Agence de santé de Wallis et Futuna.

L'amendement II-4150 du Gouvernement et l'identique II-4174 déposé par le député Christophe Blanchet et plusieurs de ses collègues majore de 1 million d'euros les AE et CP du programme 123 pour le financement d'actions concernant la politique de sécurité routière outre-mer. Cet effort fait suite à la formalisation, pour la première fois, d'un axe dédié aux territoires d'outre-mer lors du dernier comité interministériel de la sécurité routière (CISR), tenu le 17 juillet dernier sous la présidence de la première ministre.

L'amendement II-4148 du Gouvernement et l'identique II-4175 déposé par la députée Maud Petit et plusieurs de ses collègues majore de 1 million d'euros les AE et CP du programme 123 pour le financement d'actions visant à améliorer la prise en charge des ultramarins souffrant d'un cancer se rendant dans l'hexagone pour leur traitement.

L'amendement II-3557 déposé par le député Max Mathiasin et plusieurs de ses collègues majore de 2 millions d'euros les AE et CP du programme 123 pour soutenir les associations du secteur sanitaire et social dans les territoires d'outre-mer qui oeuvre auprès des populations ultramarines fortement touchées par la pauvreté et la grande pauvreté, le chômage, les maladies chroniques, les difficultés d'accès aux soins, l'illettrisme et le décrochage scolaire notamment.

Les amendements identiques II-985 déposé par le député Max Mathiasin et plusieurs de ses collègues et II- 3167 déposé par le député Christian Baptiste et plusieurs de ses collègues majorent de 5 millions d'euros les AE et CP les crédits consacrés au fonds de secours porté par l'action 6 « Collectivités territoriales » du programme 123. Ce fonds finance les aides d'urgence et prend en charge l'indemnisation partielle des biens mobiliers des particuliers non assurés, des dégâts causés aux exploitations agricoles et aux infrastructures et équipements publics par des catastrophes naturelles.

L'amendement II-3174 déposé par les députés Christian Baptiste et Tematai Le Gayic majore les crédits alloués au fonds outre-mer (FOM) de 10 millions d'euros en AE et de 3 millions d'euros en CP afin de permettre à l'AFD, qui gère la mise en oeuvre de ce fonds, de recourir aux experts recrutés par Expertise France pour renforcer les aides à l'ingénierie dans les territoires d'outre-mer.

L'amendement II-487 déposé par le député Jiovanny William et plusieurs de ses collègues majore de 200 000 euros en AE et CP les crédits de l'action 04 « Sanitaire, social, culture, jeunesse et sports » de programme 123 pour aider les associations sportives à accompagner la jeunesse et notamment celle résidant au sein des quartiers de la politique de la ville (QPV) et mettre en place des actions permettant d'accueillir un public pour large et inciter les populations locales à pratiquer une activité physique régulière.

Au total les crédits du programme 123 sont majorés de 81,4 millions d'euros en AE et 28,4 millions d'euros en CP. Au stade du texte considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la constitution les gages ont été levés pour les amendements suivants 4119 et identiques, 4151, 4150 et identique et 4148 et identique.

II. LES AMENDEMENTS PORTANT OUVERTURE DE CRÉDITS SUR LE PROGRAMME 138 « EMPLOI OUTRE-MER »

L'amendement II-3622 déposé par le député Nicolas Metzdorf et plusieurs de ses collègues majore d'un millions d'euro en AE et CP les crédits alloués au SMA afin d'augmenter les moyens du Régiment du Service Militaire Adapté de Nouvelle-Calédonie.

Basé sur le constat d'une forte chute démographique en Guadeloupe, en Martinique et à Saint-Martin, le programme « cadres d'avenir » a été mis en place en 2023 et décliné sous forme expérimentale pour cinq ans. Il a pour objet de soutenir, d'une part, la formation des étudiants à hauts potentiels des territoires visés et, d'autre part, les besoins en recrutement des entreprises. Des secteurs d'emploi en tension ou porteurs sont donc définis et les étudiants recrutés selon des projets professionnels répondant à ces secteurs. Le programme permet un accompagnement financier (prise en charge des frais de transports et d'allocations d'installation et mensuelles) et psychopédagogique (accompagnement à la mobilité, durant la formation et à l'insertion professionnelle dans la collectivité d'origine) en contrepartie du retour des étudiants sélectionnés pendant une période donnée. Le non-respect des termes de la convention signée par chaque bénéficiaire peut entraîner le remboursement des aides reçues. La Martinique s'inscrira dans l'expérimentation à compter de la rentrée universitaire 2024/2025, alors que la Guadeloupe et Saint-Martin ont débuté l'expérimentation dès la rentrée 2023-2024. Dans ce contexte, 3 amendements ont été retenus par le Gouvernement.

L'amendement II-3409 déposé par le député Frantz Gumbs et plusieurs de ses collègues majore de 100 000 euros en AE et de 50 000 euros en CP les crédits consacrés à l'expérimentation du programme de formation « Cadre d'Avenir » à Saint-Martin.

L'amendement II-4241 déposé par le député Olivier Serva et plusieurs de ses collègues majore de 650 000 euros en AE et de 100 000 euros en CP les crédits consacrés à l'expérimentation du programme de formation « Cadre d'Avenir » en Guadeloupe.

L'amendement II-491 déposé par le député Jiovanny William et plusieurs de ses collègues majore de 650 000 euros en AE et de 100 000 euros en CP les crédits consacrés à l'expérimentation du programme de formation « Cadre d'Avenir » en Martinique.

Il est, par ailleurs, prévu de déployer le programme « cadres d'avenir » à Saint-Pierre-et-Miquelon et en Guyane en 2025. Deux amendements prévoient l'ouverture de crédits pour avancer ce déploiement, dans ces deux territoires, en 2024.

L'amendement II-3128 déposé par le député Christian Baptiste et plusieurs de ses collègues majore de 100 000 euros en AE et de 50 000 euros en CP les crédits consacrés à l'expérimentation du programme de formation « Cadre d'Avenir » pour permettre son déploiement à Saint-Pierre-et-Miquelon dès 2024.

L'amendement II-3281 déposé par le député Davy Rimane et plusieurs de ses collègues majore de 500 000 euros en AE et de 200 000 euros en CP les crédits consacrés à l'expérimentation du programme de formation « Cadre d'Avenir » pour permettre son déploiement en Guyane dès 2024.

L'amendement II-3120 déposé par les députés Christian Baptiste et Tematai Le Gayic majore de 2,5 millions d'euros en AE et CP les crédits alloués à LADOM et plus particulièrement la subvention pour charges de service public aujourd'hui fixée à 7,5 millions d'euros alors que les missions de l'agence de l'outre-mer pour la mobilité s'étendront, en 2024, à de nouveaux domaines d'activité, en particulier aux nouveaux dispositifs de continuité territoriale « passeport pour l'installation professionnelle en outre-mer » « passeport pour l'installation professionnelle en outre-mer » , « passeport pour la mobilité des entreprises innovantes ».

Les amendements identiques II-2592 déposé par le député Stéphane Lenormand et plusieurs de ses collègues et II-3569 déposé par la députée Nathalie Bassire et plusieurs de ses collègues majorent de 2 millions d'euros euros en AE et de 200 000 euros en CP les crédits de l'action 04 «Financement de l'économie» du programme 138 «Emploi Outre-mer» afin de soutenir financièrement l'installation en outre-mer de très petites entreprises et de petites et moyennes entreprises. L'objectif est ainsi d'inverser la tendance actuelle constatée dans nos territoires ultramarins visant uniquement à retenir ou à faire revenir sur leur territoire d'origine les jeunes après leurs études.

Au total les crédits du programme sont majorés de 7,5 millions d'euros en AE et de 6 millions d'euros en CP. Au stade du texte considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la constitution aucun gage n'a été levé pour les amendements susmentionnés.

Compte tenu, à ce stade, des gages existants sur les amendements précités (à l'exception de ceux déposés par le Gouvernement et les identiques), l'impact de ces modifications sur les crédits de la mission s'établit à 52 millions d'euros en AE et 5,9 millions d'euros en CP. Le Gouvernement a annoncé lever l'ensemble des gages lors de l'examen au Sénat. Dans cette hypothèse, l'impact de ces modifications sur les crédits de la mission s'établirait à 88,9 millions d'euros en AE et 34,4 millions d'euros en CP.

EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

ARTICLE 55

Extension du champ de la continuité territoriale en outre-mer

Le présent article prévoit la création de trois nouveaux dispositifs d'aide à la continuité territoriale.

Le premier vise à accompagner les projets individuels d'installation professionnelle dans l'une des collectivités mentionnées à l'article L. 1803-2 du code des transports c'est-à-dire l'ensemble des territoires d'outre-mer : en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à La Réunion, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Wallis-et-Futuna.

Le deuxième est destiné aux personnes morales de droit privé implantées dans l'une des collectivités susmentionnées afin de financer les déplacements de leurs salariés en vue d'une formation professionnelle qui n'est pas proposé sur le territoire ultramarin du salarié.

Le troisième, enfin, prévoit une aide destinée aux personnes morales de droit privé implantées dans l'une des collectivités susmentionnées au titre du caractère innovant de l'entreprise afin de financer tout ou partie du coût des titres de transport liés à certains déplacements professionnels nécessaires au développement de son activité.

Le coût estimé de ces trois nouvelles mesures est de 21,6 millions d'euros en AE et CP.

Elles devraient permettre de faciliter les déplacements professionnels entre les territoires d'outre-mer et la métropole.

La commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : LE PRINCIPE DE CONTINUITÉ TERRITORIALE, UNE POLITIQUE POUR LIMITER LES CONSÉQUENCES DE L'ÉLOIGNEMENT GÉOGRAPHIQUE DES TERRITOIRES D'OUTRE-MER

A. UNE POLITIQUE DE CONTINUITÉ TERRITORIALE NÉCESSAIRE AU REGARD DE LA SITUATION GÉOGRAPHIQUE, ÉCONOMIQUE ET SOCIALE DES TERRITOIRES D'OUTRE-MER

1. Des spécificités des territoires d'outre-mer nécessitant la mise en place d'aides

En raison de leur isolement, de leur éloignement et de leur dimension réduite, les pays et collectivités territoriales d'outre-mer représentent une réalité géographique et économique différente de celle des régions métropolitaines.

Ces caractéristiques rendent nécessaire la mise en oeuvre d'une politique de continuité territoriale au profit des résidents ultramarins et notamment ceux qui suivent à l'extérieur de leur collectivité d'origine une formation professionnelle ou des études supérieures.

Il s'agit de favoriser le désenclavement et de contribuer, sous conditions de ressources, à la prise en charge financière de dépenses liées aux déplacements entre l'hexagone et les territoires ultramarins par des aides au transport, y compris dans le cadre d'échanges éducatifs, culturels et sportifs mais également de soutenir financièrement les collectivités fortement soumises aux contraintes géographiques d'éloignement, comme Saint-Pierre-et-Miquelon et Wallis-et-Futuna, en leur accordant les subventions et compensations financières nécessaires au fonctionnement de leur desserte maritime et aérienne.

2. La concrétisation juridique de cette politique de continuité territoriale

La politique nationale de continuité territoriale est définie à l'article L. 1803-1 du code des transports comme « tendant à rapprocher les conditions d'accès de la population aux services publics de transport, de formation, de santé et de communication de celles de l'hexagone, en tenant compte de la situation géographique, économique et sociale particulière de chaque collectivité territoriale d'outre-mer ».

Cette politique prend la forme de plusieurs aides financières portées par le fonds de continuité territoriale créé par l'article 50 de la loi du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer.

Ce fonds de continuité territoriale globalise les crédits destinés au financement des trois catégories suivantes d'aide :

l'aide à la continuité territoriale (ACT) qui concourt au financement d'une partie des titres de transport entre la collectivité de résidence outre-mer et le territoire métropolitain et dans les deux sens pour les personnes rendant une dernière visite à un proche ou se rendant à ses obsèques ;

l'aide au rapatriement de corps qui permet la contribution au financement du transport du corps, que ce transport ait lieu vers l'hexagone ou vers l'outre-mer, et dans certains cas entre collectivités d'outre-mer ;

les passeports pour la mobilité qui correspondent à trois motifs de déplacement :

· le passeport pour la mobilité des études (PME) : cette mesure finance une partie du déplacement des étudiants de l'enseignement supérieur inscrits en dehors de leur collectivité de résidence, lorsque l'inscription dans cet établissement est justifiée par l'impossibilité de suivre localement un cursus universitaire dans la filière d'étude choisie ;

· le passeport pour la mobilité en stage professionnel (PMSP) est destiné aux élèves et étudiants inscrits en terminale professionnelle, en institut universitaire de technologie, en licence professionnelle ou en master qui, dans le cadre de leurs études, doivent effectuer un stage pour lequel le référentiel de formation impose une mobilité hors du territoire de la collectivité où l'intéressé réside ou lorsque le tissu économique local n'offre pas le stage recherché dans le champ d'activité et le niveau de responsabilité correspondant à la formation ;

· le passeport pour la mobilité de la formation professionnelle (PMFP) est attribué aux personnes poursuivant une formation professionnelle prescrite dans le cadre de la politique de l'emploi, en dehors de leur collectivité de résidence faute de disposer dans celle-ci de la filière de formation correspondant à leur projet professionnel. Cette aide permet également aux résidents ultramarins de se présenter aux épreuves d'admission de certains concours.

B. UN DISPOSITIF QUI A ÉVOLUÉ À PLUSIEURS REPRISES AU COURS DES DERNIÈRES ANNÉES

1. Les évolutions intervenues en 2021

Par décret n° 2021-845 du 28 juin 2021 modifiant le code des transports en matière de continuité territoriale entre les collectivités d'outre-mer et le territoire hexagonal et par arrêté du 28 juin 2021 modifiant les arrêtés pris en application des articles L. 1803-3, R. 1803-18, R. 1803-19 et D. 1803-42 du code des transports, plusieurs mesures de simplification et plus favorables ont été mises en oeuvre concernant la continuité territoriale des outre-mer. Ainsi, les quatre mesures nouvelles de cette réforme, entrées en vigueur le 1er juillet 2021, ont été les suivantes :

- fusion de l'aide simple et de l'aide majorée sur la base du montant plus favorable : dorénavant, pour le dispositif d'aide à la continuité territoriale et pour le dispositif d'aide obsèques dans le cadre de la continuité funéraire, un montant d'aide unique existera pour chaque territoire ultramarin. Ce montant représente environ 50 % du prix moyen d'achat du billet d'avion constaté sur chaque liaison. L'application de ce principe a conduit à rehausser le montant de l'aide pour les Iles de Wallis-et-Futuna, la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie ;

- simplification et fixation d'un plafond unique de ressources : les résidents d'outre-mer souhaitant recourir à l'aide à la continuité territoriale classique ou à la continuité funéraire (obsèques et aide au transport de corps) devront justifier d'un quotient familial inférieur ou égal à 11 991 euros ;

- création d'un dispositif spécifique en faveur des trois nouveaux publics bénéficiaires : les doctorants et post-doctorants, pourront recourir une fois par an à l'aide à la continuité territoriale, les artistes et les acteurs culturels deux fois par an tandis que les jeunes espoirs sportifs, quatre fois/an. Ces publics pourront respectivement recourir au cours d'une même année civile à l'ensemble des dispositifs de mobilité de l'agence de l'outre-mer pour la mobilité (LADOM) ;

- extension des droits d'accès à la continuité funéraire : afin de mieux accompagner les familles, l'aide obsèques est étendue à trois niveaux : les frères et soeurs des défunts sont dorénavant éligibles, les déplacements peuvent se faire dans le cadre d'une dernière visite à un proche et les déplacements deviennent possibles entre outre-mer. Dans ce dernier cas, la prise en charge s'élèvera alors à 50 % du prix du billet d'avion aller-retour.

2. Les évolutions intervenues dans la LFI pour 2023

La loi de finances pour 2023 a permis d'augmenter une nouvelle fois les montants forfaitaires de prise en charge de l'aide à la continuité territoriale afin de mieux couvrir le prix moyen du billet d'avion aller-retour des usagers, pour une dépense annuelle supplémentaire de 6 millions d'euros.

Des dispositions spécifiques ont également été votées afin de renforcer les modalités de prise en charge d'un second accompagnant familial lors des évacuations sanitaires de mineurs âgés de moins de 16 ans dans l'hexagone et pour étendre l'éligibilité au passeport pour la mobilité de la formation professionnelle (PMFP) aux demandeurs d'emploi inscrits dans une action de validation des acquis de l'expérience (VAE) en mobilité.

Après ces différentes modifications les dispositifs portés par le fonds de continuité territoriale s'établissent comme suit pour un montant total de près de 40 millions d'euros.

Panorama des aides portées par le fonds de continuité territoriale

Source : Projet annuel de performances de la mission « Outre-mer » annexé au PLF 2024

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : TROIS NOUVELLES MESURES QUI ÉTENDENT LE CHAMP DE L'AIDE À LA CONTINUITÉ TERRITORIALE DANS LE PROLONGEMENT DES ANNONCES DU COMITÉ INTERMINISTÉRIEL DES OUTRE-MER

A. UNE AIDE POUR LES PERSONNES RÉSIDANT EN MÉTROPOLE QUI SOUHAITENT S'INSTALLER PROFESSIONNELLEMENT EN OUTRE-MER

1. Champ et bénéficiaires du dispositif : une aide orientée vers les particuliers

Les 2e à 5e alinéas du III du présent article prévoit l'insertion d'un nouvel article (L. 1803-6- 1), au sein de chapitre III du titre préliminaire du livre VIII de la première partie de la partie législative du code des transports, portant création d'une aide destinée à accompagner les projets individuels d'installation professionnelle dans l'une des collectivités mentionnées à l'article L. 1803-239(*) du même code est dénommée « passeport pour l'installation professionnelle en outre-mer ».

Cette aide a pour objet le financement de tout ou partie du coût des titres de transport nécessités par cette installation ainsi que le versement d'une allocation d'installation.

Le 3e alinéa du III prévoit que cette aide est attribuée, à leur demande, aux personnes résidant en France métropolitaine justifiant d'un projet d'installation professionnelle durable dans l'une des collectivités d'outre-mer.

Son octroi est subordonné à la conclusion d'une convention entre son bénéficiaire et l'agence de l'outre-mer (LADOM) qui prévoit notamment les conditions de son remboursement en cas de non-respect de ses engagements par le bénéficiaire.

Le 5e alinéa du III précise, par ailleurs, que toute personne morale de droit public ou privé peut s'associer au financement de cette aide, par convention.

Enfin, le 4e alinéa du III renvoie à un décret la définition des critères d'éligibilité à l'aide, la procédure d'instruction des demandes et les règles de calcul du montant de l'aide.

2. Les effets attendus de cette nouvelle aide

La mesure proposée d'aide à la continuité territoriale pour l'installation outre-mer (ACTIOM) a pour objectif de faciliter l'installation outre-mer de personnes au profil et au projet en adéquation avec les métiers en tension ou porteurs pour le développement économique et social des territoires ultramarins.

En parallèle, cette mesure doit également avoir un impact sur la démographie de la population active des territoires ultramarins et amoindrir les tensions dans certains secteurs d'activité.

D'après l'évaluation préalable, cette mesure pourrait concerner 500 personnes par an.

B. UNE AIDE POUR LES FORMATIONS PROFESSIONNELLES D'ACTIFS

1. Champ et bénéficiaires du dispositif : une aide orientée vers les entreprises envoyant des salariés en formation en dehors de la collectivité d'implantation

Les 6e et 7e alinéas du III du présent article prévoit l'insertion d'un nouvel article (L. 1803-7), au sein de chapitre III du titre préliminaire du livre VIII de la première partie de la partie législative du code des transports, portant création d'une aide destinée aux personnes morales de droit privé implantées dans l'une des collectivités mentionnées à l'article L. 1803-2 du même code, accordée au titre de la formation professionnelle de leurs salariés.

Le 6e alinéa du III prévoit que cette aide, dénommée « passeport pour la mobilité des actifs salariés » est attribuée lorsque la formation professionnelle est assurée en dehors de la collectivité de résidence du salarié, en raison de l'absence, dans celle-ci, de la filière de formation correspondant au projet de formation.

Enfin, le 7e alinéa du III précise que le dispositif mis en place permet de financer tout ou partie du coût des titres de transport nécessités par cette formation, en complément, pour les collectivités concernées, de la participation financière des opérateurs mentionnés à l'article L. 6332-1 du code du travail c'est-à-dire des opérateurs de compétences.

2. Les effets attendus de cette nouvelle aide

Cette mesure vise à faciliter l'ancrage et le développement des acteurs économiques dans les territoires ultramarins en amenuisant certains surcoûts des charges d'exploitation liés à la formation des salariés. Elle permettra également d'accroître le niveau des compétences localement disponibles pour les entreprises.

D'après l'évaluation préalable, le passeport pour la mobilité des actifs salariés devrait être réservé aux entreprises de moins de 50 salariés (cette précision sera cependant apportée au niveau réglementaire) et pourra être mobilisée pour les déplacements entre l'outre-mer et l'hexagone mais également entre deux collectivités ultramarines au sens des articles 73 et 74 de la Constitution et la Nouvelle-Calédonie).

Il devrait concerner entre 1 000 et 1 500 salariés par an.

C. UNE AIDE POUR LES DÉPLACEMENTS PROFESSIONNELS RÉALISÉS POUR LE DÉVELOPPEMENT DES ENTREPRISES ULTRAMARINES INNOVANTES

1. Champ et bénéficiaires du dispositif : une aide orientée vers les entreprises innovantes

Le 8e alinéa du III du présent article prévoit l'insertion d'un nouvel article (L. 1803-7- 1), au sein de chapitre III du titre préliminaire du livre VIII de la première partie de la partie législative du code des transports, portant création d'une aide destinée aux personnes morales de droit privé implantées dans l'une des collectivités mentionnées à l'article L. 1803-2 du même code, au titre du caractère innovant de l'entreprise.

Cette aide, dénommée « passeport pour la mobilité des entreprises innovantes » a pour objet le financement au profit d'une entreprise innovante de tout ou partie du coût des titres de transport liés à certains déplacements professionnels nécessaires au développement de son activité.

Il s'agirait d'une aide directe budgétaire, sous enveloppe annuelle, attribuée à l'ensemble des acteurs économiques pour les opérations entrant dans le champ de l'aide telles :

- un rendez-vous avec un financeur potentiel (fonds d'investissement, fonds de capital-risque, institution bancaire) ;

- la participation à un événement « Tech » de type « hackathon », etc.

2. Les effets attendus de cette nouvelle aide

Cette mesure a pour objectif de réduire les surcoûts liés aux actions engagées pour le développement de l'activité d'entreprises innovantes et ainsi de faciliter le développement de ces dernières, créatrice d'emplois et de richesses sur un territoire.

D'après l'évaluation préalable, le nombre d'allers-retours annuels pris en charge au titre du passeport pour la mobilité au sein des entreprises innovantes serait de l'ordre de 250 à 300 pouvant bénéficier plusieurs fois à la même personne (dirigeant, salarié référent sur un projet...).

Le coût budgétaire de ces trois mesures est estimé, annuellement, à 4,5 millions d'euros, sans que la répartition entre chacune d'elle n'ait été précisée.

D. LE RESPECT DES RÈGLES EUROPÉENNES CONCERNANT LES AIDES DE MINIMIS

Les dispositifs « passeport pour la mobilité des actifs salariés » et « passeport pour la mobilité des entreprises innovantes » bénéficiant à des entreprises privées, les aides prévues doivent respecter le règlement européen relatif à l'application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne aux aides de minimis.

Il en résulte que le 9e alinéa du III du présent article créé un article nouveau (L. 1803-7- 2) afin de préciser que le bénéfice de ces deux nouvelles aides est subordonné au respect des règles européennes afférentes à ces aides de minimis.

E. DES MESURES DE COORDINATION NÉCESSAIRES POUR TENIR COMPTE DE L'ÉLARGISSEMENT DU CHAMP DE L'AIDE À LA CONTINUITÉ TERRITORIALE ET DE LA CRÉATION DE NOUVEAUX ARTICLES

Certaines mesures de coordination sont nécessaires afin de tenir compte de l'élargissement de l'aide à la continuité territoriale.

En effet, cette dernière est désormais ouverte à des résidents de métropole souhaitant s'installer dans une collectivité d'outre-mer, ce qui n'était pas le cas précédemment.

Dès lors, le I du présent article modifie l'article L. 1803-1 du code des transports afin de matérialiser cette possibilité et de préciser que la politique nationale de continuité territoriale est mise en oeuvre au départ ou à destination de l'outre-mer.

Le II du présent article procède à une simplification rédactionnelle.

Enfin, les IV et V du présent article procèdent à des coordinations afin de renvoyer à la correcte numérotation des articles au regard des 4 nouveaux articles créés.

III. LE DISPOSITIF CONSIDÉRÉ COMME ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3, DE LA CONSTITUTION

Cet article n'a pas été modifié par le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution.

IV. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UNE EXTENSION DE L'AIDE À LA CONTINUITÉ TERRITORIALE FAVORABLE À L'ACTIVITÉ ÉCONOMIQUE DES TERRITOIRES D'OUTRE-MER

Le présent article traduit un des engagements du comité interministériel des outre-mer (CIOM) du 18 juillet 2023.

Il prévoit d'élargir l'aide à la continuité territoriale en créant trois nouveaux dispositifs visant à faciliter les déplacements professionnels entre les outre-mer et la métropole.

Ainsi, le premier dispositif prévoit la création d'une aide aux personnes résidant en France hexagonale dans leur projet d'installation professionnelle dans une collectivité ultramarine. La finalité de cette mesure est à la fois de permettre la venue de personnes ayant un projet professionnel en lien avec les besoins recensés localement mais également de favoriser le retour des ultramarins ayant effectué leurs études ou leurs premières expériences professionnelles en France hexagonale.

Les deux autres nouveaux dispositifs prévoient la création d'aides aux entreprises : l'une au titre des déplacements professionnels liés à des formations professionnelles qui ne sont pas proposées sur le territoire ultramarin d'implantation du salarié de l'entreprise, et l'autre au titre de certains déplacements professionnels réalisés par les salariés ultramarins d'une entreprise ultramarine innovante pour le développement de cette dernière.

Le cout estimé de ces trois nouvelles mesures est de 21,6 millions d'euros en AE et CP.

Dans ce contexte, les crédits prévus en PLF 2024 au titre de la continuité territoriale s'élèvent à 73,5 millions d'euros en AE et CP soit une hausse de 41,5 % par rapport à la LFI 2022.

Ces mesures saluées par les rapporteurs spéciaux, dans la mesure où elles devraient contribuer à faciliter les déplacements professionnels, devront cependant faire l'objet d'une communication adéquate afin que les entreprises et les particuliers concernés s'en saisissent pleinement.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 55 bis (nouveau)

Extension du périmètre d'intervention d'Action logement
à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon

Le présent article prévoit d'étendre l'intervention d'Action logement à Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon.

En effet, en l'état actuel du droit, les dispositions relatives au groupe Action logement telles que définies dans le code de la construction et de l'habitation ne sont pas applicables aux collectivités régies par la loi organique du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnels.

Or, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon ont manifesté un intérêt particulier afin de bénéficier des actions mises en oeuvre par Action logement. Il en est résulté un article, dans la nouvelle convention quinquennale signé en juin 2023 entre l'État et le groupe, prévoyant cette possibilité, de même qu'un engagement du Gouvernement lors du comité interministériel outre-mer de juillet 2023.

Le présent article procède donc aux modifications nécessaires du code de la construction et de l'habitation afin de rendre applicable à ces deux territoires les dispositifs portés par Action Logement.

La commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : UN DISPOSITIF POUR FACILITER L'ACCÈS AU LOGEMENT POUR LES SALARIÉS

A. LES MISSIONS D'ACTION LOGEMENT SONT PORTÉES PAR UN GROUPE COMPOSÉ DE PLUSIEURS ENTITÉS

1. Un groupe structuré autour de 6 entités principales

Le groupe Action Logement est organisé autour de six entités principales, chacune spécialisée dans un domaine d'activité de l'habitat.

La structure du groupe ainsi que les modalités de fonctionnement des entités qui le compensent sont définies aux articles L. 313-17 à L. 313-36 du code de la construction et de l'habitation (CCH) au sein du titre 1er du livre 3.

Composition du groupe Action Logement

 Source : site internet d'Action logement

Action Logement Groupe est une association soumise aux dispositions de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association. Il s'agit d'une structure de pilotage chargée de donner l'impulsion politique et de garantir la cohérence stratégique de l'action du Groupe. Elle a notamment pour missions :

- de signer avec l'État les conditions d'emploi de la Participation des Employeurs à l'Effort de Construction (PEEC) ;

- de déterminer les conditions d'emploi des ressources financières ;

- de veiller à l'équilibre financier ;

- de veiller à ce que les aides et services soient distribués avec équité, dans tous les territoires.

Action Logement Services est une société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU) qui :

- assure la collecte et la gestion de la PEEC ;

- délivre les aides financières et les services pour les salariés et les entreprises ;

- contribue au financement de la production, de la réhabilitation et des politiques nationales du logement.

Action Logement Immobilier est également une société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU) qui :

- met en oeuvre la stratégie immobilière du groupe ;

- détient les titres des participations de l'ensemble des filiales immobilières, dont les 45 ESH ;

- s'assure des équilibres financiers et de gestion permettant la mise en oeuvre des objectifs attendus par le Groupe en matière de production et de réhabilitation.

L'association pour l'accès aux garanties locatives (APAGL) est un organisme paritaire régi par la loi de 1901 ayant pour mission principale, au sein du Groupe, d'organiser et de piloter les solutions pour faciliter et sécuriser l'accès au parc locatif privé. Dans ce cadre elle pilote un dispositif de cautionnement pour les jeunes et les salariés en mobilité professionnelle.

L'association foncière logement est une association à but non lucratif ayant pour vocation de produire des logements locatifs et en accession, afin de diversifier l'habitat dans les quartiers en renouvellement urbain et dans les villes où l'offre de logements est la plus tendue. Elle contribue, par ailleurs, à lutter contre l'habitat indigne, insalubre ou en péril, en appui des politiques publiques.

Enfin, Action Logement formation est une association qui intervient pour soutenir la transformation d'Action Logement. Son objectif est de renforcer l'expertise des parties prenantes du groupe.

Ces 6 structures sont complétées par des délégations régionales et des comités régionaux et territoriaux.

2. Des missions de construction de logements et d'accompagnement des salariés

Le groupe Action Logement, piloté par les organisations patronales et syndicales de salariés, gère paritairement la Participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC), définie à l'article L. 313-140(*) du code de la construction et de l'habitation, afin de faciliter l'accès au logement pour les salariés et de favoriser leur accès à l'emploi.

Par ailleurs, Action Logement accompagne les salariés dans leurs parcours résidentiel et professionnel en leur proposant des services et des aides financières qui facilitent l'accès au logement en concentrant ses efforts sur l'accompagnement des publics prioritaires que sont les salariés aux revenus modestes ou en mobilité, et les jeunes en accès à l'emploi ou en formation.

Les deux missions principales du groupe sont les suivantes :

- construire et financer des logements sociaux et intermédiaires, prioritairement dans les zones tendues, en contribuant aux enjeux d'éco-habitat, d'économies d'énergie et de décarbonation, de renouvellement urbain et de mixité sociale. À cette fin, le groupe Action Logement compte 45 entreprises sociales pour l'habitat (ESH) et 5 filiales de logements intermédiaires ;

- accompagner les salariés dans leur mobilité résidentielle et professionnelle.

B. LES NOUVELLES DISPOSITIONS DE LA CONVENTION QUINQUENNALE 2023-2027

1. L'impossibilité actuelle de bénéficier de la participation des employeurs à l'effort de construction dans les territoires d'outre-mer

En l'état actuel du droit, les dispositions relatives à Action logement telles que définies à la section 3 du chapitre 3 du titre I du livre 3 du code de la construction et de l'habitation ne sont pas applicables aux collectivités régies par la loi organique du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer.

En effet, conformément à l'article L371-2 du CCH, seules les dispositions des titres préliminaire et IV, du titre V, à l'exception de son chapitre Ier, du titre VI du livre 3 et de l'article L. 431-6, sont applicables à la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, La Réunion, à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy et à Mayotte, selon des modalités précisées par voie réglementaire.

De surcroit, elles ne s'appliquent par à Saint-Pierre-et-Miquelon à l'exception de quelques articles relatifs à l'attribution d'aides publiques en faveur de la construction, de l'acquisition, de la réhabilitation et de la démolition des logements locatifs sociaux ou de la rénovation de l'habitat privé.

2. Les changements opérés par la convention quinquennale 2023-2027

Le 16 juin 2023, la Première ministre, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, le ministre chargé de la Ville et du logement et le Président d'Action Logement Groupe ont signé la convention quinquennale 2023-2027.

L'État et les partenaires sociaux d'Action Logement ont fait le choix de réaffirmer leurs trois axes stratégiques prioritaires : accompagner les salariés dans leur parcours résidentiel en lien avec l'emploi, répondre à la diversité des besoins dans les territoires métropolitain et ultra-marins, contribuer à la transition écologique et à la stratégie bas-carbone.

L'article 6.2 de cette convention relatif aux prêts pour la construction et la réhabilitation de logements en outre-mer prévoit notamment que les collectivités d'outre-mer régies par la loi organique n° 2007-223 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer pourront bénéficier des emplois de la PEEC, sous réserve de modifications des dispositions prévues par le CCH. Les règles d'utilisation seront fixées par des directives d'Action Logement Groupe.

II. LE DISPOSITIF CONSIDÉRÉ COMME ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3, DE LA CONSTITUTION : UNE EXTENSION DE L'INTERVENTION D'ACTION LOGEMENT À SAINT-MARTIN ET À SAINT-PIERRE ET MIQUELON

Le présent article, retenu par le Gouvernement dans l'élaboration du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, reprend un amendement déposé par le Gouvernement et un amendement identique déposé par le député Frantz Gumbs et plusieurs de ses collègues, prévoyant d'étendre l'intervention d'Action logement à Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon.

À cette fin, le 1° du présent article prévoit de compléter l'article 313-17-1 du CCH41(*) pour préciser que les organismes du groupe Action logement peuvent exercer à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, à la demande de ces collectivités, les compétences qui leur sont reconnues par la loi dans des conditions prévues par convention entre l'État, Action logement Groupe et les collectivités de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Les 2°, 3° et 4° du présent article procèdent à des coordinations pour préciser que la section 3 du chapitre 3 du titre 1er du livre 3 du CCH sont applicables à Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UNE EXTENSION QUI RÉPOND À UNE ATTENTE DE SAINT-PIERRE-ET-MIQUELON ET DE SAINT-MARTIN ET QUI FAIT SUITE AUX ANNONCES DU COMITÉ INTERMINISTERIEL DES OUTRE-MER

La convention quinquennale État - Action Logement 2023-2027, prévoit que « les collectivités d'outre-mer régies par la loi organique n° 2007-223 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer (notamment Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon) pourront bénéficier des emplois de la participation de l'employeur à l'effort de construction »

Cet engagement a, par ailleurs, été confirmé par le Comité interministériel des outre-mer (CIOM) du 18 juillet 2023 pour Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon qui ont manifesté leur intérêt à mettre en place ce dispositif.

Pour rendre applicable cette annonce et permettre à Action Logement Groupe et l'ensemble de ses filiales d'intervenir sur le territoire de ces deux collectivités, il était donc nécessaire de modifier le code de la construction et de l'habitation.

Cette extension des dispositifs d'Action Logement à Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon sera de nature à faciliter l'accès au logement des salariés dans ces territoires et répond à une attente de ces territoires.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le jeudi 9 novembre 2023, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport de MM. Georges Patient et Teva Rohfritsch, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Outre-mer ».

M. Georges Patient, rapporteur spécial de la mission « Outre-mer ». - Le principal objectif de la mission « Outre-mer » du budget général de l'État est le rattrapage des écarts persistants entre les territoires d'outre-mer et l'hexagone. Ce rattrapage doit donc demeurer une priorité. Pour autant, de nouveaux enjeux se font jour pour les territoires d'outre-mer, et les crédits de la mission « Outre-mer » devront en tenir compte à l'avenir.

La crise sanitaire a souligné la grande dépendance des territoires ultramarins aux importations alimentaires, quand la crise économique et l'inflation ont mis en exergue la dépendance énergétique des outre-mer. Il en résulte que l'autonomie alimentaire et la transition écologique doivent constituer les deux défis majeurs pour les territoires d'outre-mer dans les années à venir.

À cet égard, les annonces faites à l'issue du Comité interministériel des outre-mer (Ciom) représentent une avancée notable, mais ne répondent pas à toutes les attentes et devront se concrétiser par des moyens budgétaires.

Les crédits présentés dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2024 s'élèvent à 2,9 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 2,6 milliards d'euros en crédits de paiement, soit une hausse respective de 6,9 % et 4,6 % par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2023. Nous saluons cette hausse supérieure au taux prévisionnel d'inflation pour 2024, qui s'établit à 2,5 %.

Entre la LFI 2023 et le PLF 2024, le programme 123, qui rassemble les crédits des politiques publiques en faveur de l'amélioration des conditions de vie dans les outre-mer, enregistre une hausse de 69,4 millions d'euros en AE et de 5,3 millions d'euros en CP. Cette hausse des crédits concerne principalement trois domaines : la poursuite de la dynamique impulsée par le plan Logement outre-mer afin de développer et rénover l'habitat et de résorber l'habitat indigne, avec un effort budgétaire par rapport à l'année dernière de 49 millions d'euros en AE et 10 millions d'euros en CP ; le renforcement de l'aide à la mobilité des populations à hauteur de 21,6 millions d'euros en AE et CP, avec la mise en place de trois nouveaux dispositifs qui permettront d'élargir les publics éligibles afin de faciliter les déplacements professionnels entre les territoires d'outre-mer et l'hexagone ; et enfin, la poursuite et le renforcement de l'aide ciblée vers certains territoires au travers des contrats de redressement en outre-mer (Corom) pour 40 millions d'euros en AE et 16 millions d'euros en CP.

Toutefois, il nous semble nécessaire de renforcer encore ce dispositif au regard du nombre de communes en difficulté. En effet, sur les 129 communes des départements et régions d'outre-mer (Drom), 30 sont dans le réseau d'alerte de la direction générale des finances publiques (DGFiP). C'est pourquoi nous vous proposons un amendement pour augmenter les crédits alloués aux Corom à hauteur de 18 millions d'euros en AE et 6 millions d'euros en CP.

En revanche, les crédits alloués à l'appui des financements bancaires et à l'ingénierie diminuent de 7 millions d'euros en AE et de 3,3 millions d'euros en CP, alors même que le besoin de financement des acteurs économiques locaux pourrait augmenter en 2024 dans un contexte de crise économique. C'est pourquoi nous proposons à l'initiative de mon collègue Teva Rohfritsch, deux amendements visant à augmenter de 3 millions d'euros en AE et de 1 million d'euros en crédits de paiement, d'une part, les crédits alloués à la société de gestion des fonds de garantie d'outre-mer (Sogefom), qui apporte une garantie partielle à des opérations de financement engagées par les établissements de crédit en faveur des très petites entreprises (TPE) et des petites et moyennes entreprises (PME) intervenant dans les collectivités d'outre-mer du Pacifique, et, d'autre part, les crédits alloués au fonds outre-mer (FOM) afin de développer le soutien à l'ingénierie des communes et intercommunalités de Polynésie. Ce deuxième point était d'ailleurs une préconisation de notre rapport sur les Corom, dans la mesure où les collectivités du Pacifique n'ont pas accès à ces contrats de redressement.

Le programme 138, qui rassemble les crédits des politiques publiques en faveur de la compétitivité des entreprises, de l'amélioration de l'employabilité des jeunes et de la qualification des actifs ultramarins, enregistre une hausse de 6,7 % en AE, soit 121,3 millions d'euros, et de 6,4 % en CP, soit 114,6 millions d'euros. Cette augmentation résulte des crédits alloués à l'exonération des charges sociales, dans un contexte d'augmentation régulière de la masse salariale en outre-mer depuis 2022 et la fin de la crise sanitaire.

Les variations constatées ces dernières années pour cette action témoignent cependant de la difficulté à établir des prévisions fiables, s'agissant de dépenses de « guichet », tributaires de la conjoncture économique.

À l'inverse, les crédits alloués au financement de l'économie, c'est-à-dire le soutien au microcrédit, les subventions d'investissement et les prêts de développement outre-mer, affichent une baisse qui s'explique par la non-reconduction d'une aide exceptionnelle adoptée en LFI 2023 pour répondre aux surcoûts d'approvisionnement en énergie des entreprises industrielles et de services des Drom.

M. Teva Rohfritsch, rapporteur spécial de la mission « Outre-mer ». - En sus des crédits budgétaires, les dépenses fiscales contribuent à la dynamisation de l'économie, à l'attractivité des territoires et à l'effort général de rattrapage de l'écart de niveau socioéconomique entre l'outre-mer et la métropole. En 2024, sur les deux programmes de la mission, ces dernières devraient s'établir à 5 559 millions d'euros, soit 1,9 fois plus que les crédits budgétaires portés par la mission « Outre-mer ». Entre 2023 et 2024, elles enregistrent une hausse de 2,23 %, soit 121 millions d'euros. Cette progression est sensiblement identique à celle constatée entre 2022 et 2023 - 2,5 %, soit 174 millions d'euros.

Dans la LFI 2023, plusieurs modifications étaient intervenues pour prolonger jusqu'en 2029 des dépenses fiscales dont le fait générateur allait s'éteindre, ou encore concernant les navires de pêche, les frais d'inscription au livre foncier de Mayotte, la prolongation de la majoration à Mayotte des seuils de revenus pour le bénéfice des allégements de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), et le régime de vente hors taxe au bénéfice des touristes arrivant en Guadeloupe et en Martinique dans le cadre de croisières maritimes.

Nous estimons que les dépenses fiscales sont un outil indispensable pour les économies ultramarines, mais reconnaissons aussi la nécessité de mieux les évaluer. Dans ce contexte, les démarches entreprises depuis ces dernières années vont dans le bon sens et doivent être poursuivies.

Cependant, nous tenons à alerter sur le fait que ces évaluations ne doivent pas servir de justifications systématiques pour restreindre ces dépenses. À cet égard, concernant la récente évaluation de l'inspection générale des finances portant sur le régime d'aide fiscale à l'investissement productif, nous partageons certains constats et recommandations, visant notamment à étendre ces dispositifs à la transition écologique ou à limiter les fraudes, mais nous sommes plus prudents sur les préconisations relatives au ciblage. Il est important de dire qu'une restriction trop forte du régime ne serait pas sans conséquence sur les économies ultramarines, et que toute évolution doit être envisagée avec une consultation préalable des acteurs locaux concernés et des parlementaires.

En complément des crédits portés par la mission « Outre-mer » et des dépenses fiscales, les territoires d'outre-mer bénéficient de crédits en provenance d'autres programmes du budget général. Ainsi, dans le PLF 2024, le montant total des contributions budgétaires s'élève à 21,1 milliards d'euros en AE et 22,8 milliards d'euros en CP, soit une hausse respective de 0,93 % et 2,92 % par rapport à la LFI 2023. Cette augmentation représente 195 millions d'euros en AE et 647,6 millions d'euros en CP.

Ces crédits pluriministériels permettent notamment le financement de plusieurs plans thématiques importants pour les territoires d'outre-mer : le plan d'actions pour les services d'eau potable et d'assainissement, le plan Séisme Antilles (PSA), le plan Sargasses, le plan Logement outre-mer (Plom) et le plan chlordécone ; nous saluons donc leur augmentation.

Enfin, les territoires d'outre-mer bénéficient des crédits du plan de relance et du fonds vert. Concernant le plan de relance, fin 2022, environ 1 milliard d'euros d'AE ont été consommés au titre de ces crédits en outre-mer, soit 0,5 milliard de moins que les montants d'ouverture en AE annoncés initialement. Cette consommation en deçà des attentes et des besoins s'explique par la faiblesse de l'ingénierie en outre-mer et d'autres spécificités locales, comme la difficulté à trouver du foncier disponible.

À titre d'exemple, en Polynésie française, certains dispositifs se sont révélés inadaptés au statut d'autonomie du pays. Certains prérequis, comme le Système national d'identification et du répertoire des entreprises et de leurs établissements (Sirene), n'ont pas permis de mettre en place des conseillers numériques, dispositif pourtant très attendu localement.

La mise en oeuvre du plan de relance, comme celle d'autres dispositifs auparavant, met en exergue l'absolue nécessité de tenir compte des spécificités territoriales et de développer des approches différenciées entre la métropole et les territoires d'outre-mer, mais également entre les territoires d'outre-mer eux-mêmes.

Le fonds vert, pour sa part, a été fortement sollicité en outre-mer. Ainsi, au 20 septembre 2023, 403 dossiers ont été déposés, dont 56 en Guyane et 16 en Polynésie, pour un montant total de plus de 220 millions d'euros ; et 160 dossiers ont été sélectionnés, dont 28 en Guyane et 2 en Polynésie, pour un montant total de 93 millions d'euros.

Au regard du nombre de dossiers et du montant d'aide demandé, le montant des crédits alloués en 2023 ne permettra pas l'instruction de tous les dossiers déposés en 2023. Les porteurs de projet ont donc été invités à présenter leurs dossiers non retenus en 2023 à l'appel à candidatures pour 2024. Ce succès démontre le dynamisme des territoires d'outre-mer dans les actions de transition écologique et de protection de l'environnement.

Nous vous proposons d'adopter les crédits de la mission « Outre-mer », modifiés par les amendements présentés, ainsi que l'article 55 rattaché.

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques sur la mission « Outre-mer ». - Souscrivant à la présentation complète de mes collègues, je souhaite d'abord souligner l'augmentation de la ligne budgétaire unique (LBU), ou plutôt le rattrapage effectué. En effet, après des années de baisse, le Gouvernement a beau jeu de parler d'augmentation.

Au-delà des montants, le principal défi concerne la consommation des crédits, avec en bout de chaîne la construction effective de logements dont nombre de nos territoires ont besoin. Pour construire, il faut des fonds, particulièrement en période d'inflation, et il faut également des entreprises capables de répondre aux appels d'offres et donc de s'approvisionner à des coûts compatibles avec les exigences du logement social.

Dans la lignée du Ciom et de la recommandation de mon avis budgétaire de l'année précédente, j'accueille favorablement la tenue prochaine des assises de la construction durable en outre-mer.

Pour construire, il faut également des emplois qualifiés, des compétences, de l'ingénierie. Se pose donc la question de la formation de nos jeunes, alors même que le chômage dans nos territoires ultramarins demeure structurellement élevé.

Un autre défi concerne la réhabilitation de quartiers entiers, notamment dans nos centres-villes. Je constate une réelle prise de conscience du Gouvernement ces dernières années.

Enfin, dans la lignée du rapport de mars 2023 de M. Guillaume Chevrollier et Mme Catherine Conconne, réalisé au nom de la délégation aux outre-mer, je me réjouis des mesures prises pour enfin adapter nos dispositifs de continuité territoriale à la réalité et à la diversité des besoins ultramarins, notamment ceux des étudiants et des actifs hexagonaux souhaitant travailler en outre-mer.

La réforme de l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité (Ladom) va également dans le bon sens. Je constate que nombre de recommandations ne sont pas encore suivies par le Gouvernement ; je pense notamment au sujet de la mobilité urbaine. Mais, dans ce budget, je salue des avancées réelles. La mobilité des ultramarins ne doit pas être un luxe mais un droit effectif. Pour ces raisons, je proposerai à mes collègues de la commission des affaires économiques d'adopter les crédits de la mission « Outre-mer ».

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Le climat autour de cette mission budgétaire me paraît moins tendu cette année que les précédentes.

Je note l'écriture diplomatique intéressante lorsque vous évoquez des dépenses fiscales « utiles ». J'ignorais qu'il en existât des « inutiles »...

On peut saluer la qualité des échanges entre l'État et les collectivités, alors que l'on déplore souvent le contraire. Une dépense efficace passe par un ciblage et un calibrage adaptés. Il ne sert à rien d'afficher un haut niveau de crédits si c'est pour ne pas pouvoir réaliser les dépenses.

Quel niveau de crédits était prévu pour cette mission dans le cadre du plan de relance ? Et quel fut le niveau de consommation de ces crédits ?

M. Michel Canévet. - Nous devons faire en sorte que les dépenses fiscales soient les plus performantes possibles. Dans ces dépenses, quelle part représente le transfert relatif à la TVA « décentralisée » ? Au niveau du logement, ces dépenses répondent-elles aux besoins des territoires ultramarins ?

Les problèmes d'infrastructures dans les territoires, notamment liés à l'eau comme à Mayotte et en Guadeloupe, nécessiteraient de grands programmes d'équipement. Ce sont des questions vitales pour les populations. Des crédits spéciaux sont-ils prévus pour apporter des réponses ?

M. Victorin Lurel. - Ayant été ministre, je suis toujours un peu gêné d'intervenir sur la mission « Outre-mer ». Cette mission présente aujourd'hui des AE et des CP en augmentation. En 2017, les crédits de la mission s'élevaient à 2,1 milliards d'euros, contre 2,9 milliards d'euros aujourd'hui ; je m'en réjouis, mais, au-delà des montants, l'important est de voir la philosophie à l'oeuvre. Or, nous avons cassé une dynamique qui s'exprime notamment dans les dépenses fiscales. L'augmentation de 600 millions d'euros tient pour une large part - 400 millions d'euros - à la transformation du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) en exonération de charges patronales de sécurité sociale.

Depuis 2017, les gouvernements successifs ont retiré 980 millions d'euros aux territoires d'outre-mer, notamment en supprimant la TVA non perçue récupérable (NPR), en abaissant le plafond de l'abattement de l'impôt sur le revenu, en corrigeant, au nom de la lutte contre la fraude, le périmètre des dépenses fiscales. Sur ce dernier point, le rapporteur général à l'Assemblée nationale vient de déposer un amendement afin de revoir les dépenses fiscales et sociales, notamment dans le secteur du tourisme ; il n'y a aucune discussion préalable, alors qu'il s'agit d'un secteur essentiel pour nos économies. Nous ne sommes d'accord ni sur la vision ni sur la méthode.

Depuis six ans, on augmente les crédits de la mission et, dans le même temps, on observe une attrition de tout ce qui constitue la dynamique de nos économies gérées en autonomie par les ménages, les entreprises, les collectivités et les associations. On a décidé de tout centraliser autour des préfets, avec pour résultat des restes à payer qui s'élèvent aujourd'hui à 2 milliards d'euros, contre 1,6 milliard d'euros en 2018. En termes d'exécution, c'est une catastrophe, nous ne dépensons pas l'argent. L'État nous reproche de manquer de compétences, alors qu'il a affaibli le dynamisme porté par les acteurs de terrain.

Je comprends les amendements déposés par les rapporteurs spéciaux. Mais je préfère, contestant la philosophie générale, m'abstenir de voter les crédits de la mission.

Mme Christine Lavarde. - Concernant le fonds vert, on constate le même phénomène dans tous les départements. L'enveloppe de crédits ouverte est largement inférieure aux besoins exprimés auprès des préfectures. Cet outil s'avère-t-il plus pertinent que les autres dispositifs de financement de l'État qui existaient auparavant ?

M. Victorin Lurel. - Je déplore l'absence d'un amendement sur l'augmentation de la dotation de continuité territoriale (DCT). La Corse, par exemple, reçoit 187 millions d'euros, contre seulement 73 millions d'euros pour les territoires ultramarins. Il faut revoir ce régime de la continuité territoriale, qui constitue une liberté d'aller et venir.

M. Claude Raynal, président. - Vous déposerez donc un amendement allant dans ce sens...

M. Victorin Lurel. - Nous le ferons.

M. Teva Rohfritsch, rapporteur spécial. - Concernant les dépenses fiscales, les taux réduits de TVA en outre-mer sont la deuxième dépense fiscale en montant, après la taxe spéciale de consommation (TSC) appliquée en outre-mer et présentant des tarifs plus bas et un champ plus étroit par rapport à la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques appliquée dans l'hexagone. Les dépenses fiscales pour le logement concernent principalement le logement social.

Pour les investissements en matière d'eau, notamment à Mayotte, on observe un abondement de 10 millions d'euros du fonds exceptionnel d'investissement (FEI). Il s'agit d'une première mesure ; l'expérience nous dira si elle suffit.

Au sujet du plan de relance, la prévision de consommation s'élevait à 1,5 milliard d'euros, et seulement 1 milliard d'euros ont été consommés. Pour expliquer cette sous-consommation, on peut avancer des difficultés liées à l'ingénierie et au foncier.

En revanche, on observe une meilleure appropriation du fonds vert, avec un nombre de projets supérieur à la disponibilité budgétaire. Et cela ne risque pas de changer en 2024 avec le report des projets de 2023.

M. Georges Patient, rapporteur spécial. - Concernant le plan de relance, dès le départ, le montant alloué - 1,5 milliard d'euros, 1,5 % de l'enveloppe globale - était inférieur à la part - 4 % - que les territoires ultramarins représentent dans le budget général. Par ailleurs, il était plus aisé pour nous d'intervenir dans le cadre du fonds vert, car nous disposions de davantage de possibilités d'adaptation pour consommer les crédits.

Il faudrait que nous ayons davantage de possibilités d'adaptation s'agissant de la consommation des crédits.

Article 35 (État B)

M. Georges Patient, rapporteur spécial. - L'amendement II-35 (FINC.1) concerne les Corom, dans un contexte où un tiers des communes des Drom se trouvent dans une situation difficile. Les Corom ayant démontré leur utilité en permettant à certaines d'entre elles de revenir à une situation d'équilibre, nous proposons une augmentation des moyens qui leur sont dédiés de 18 millions d'euros en autorisations d'engagement et 6 millions d'euros en crédits de paiement.

L'amendement II-35 (FINC.1) est adopté.

M. Teva Rohfritsch, rapporteur spécial. - L'amendement II-36 (FINC.2) vise à abonder le FOM afin de soutenir l'ingénierie financière des communes et des intercommunalités de Polynésie française.

Nous ne souhaitons pas étendre stricto sensu le dispositif Corom aux collectivités du Pacifique, mais au moins soutenir nos communes dans le domaine de l'ingénierie financière et éviter des procédures de redressement telles que celle qui avait concerné la commune de Mahina.

L'amendement II-36 (FINC.2) est adopté.

M. Teva Rohfritsch, rapporteur spécial. - L'amendement II-37 (FINC.3) vise à soutenir la Sogefom, qui permet d'apporter des garanties partielles à des prêts accordés aux TPE ainsi qu'aux PME.

L'amendement II-37 (FINC.3) est adopté.

La commission a proposé au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Outre-mer », sous réserve de l'adoption de ses amendements.

EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ

Article 55

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 55.

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 23 novembre 2023, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a procédé à l'examen définitif de l'équilibre, des missions, des budgets annexes, des comptes spéciaux et des articles rattachés de la seconde partie.

Articles 55 et 55 bis

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Réunie le 9 novembre, la commission a adopté les crédits de la mission tels que modifiés par trois amendements. Elle a adopté, sans modification, l'article 55. En application de l'article 49.3 de la Constitution, les crédits de la mission ont été considérés comme adoptés tels que modifiés par dix-neuf amendements de crédits par l'Assemblée nationale. L'article 55 a été adopté sans modification. Un article 55 bis rattaché a été ajouté. Après avoir pris acte de ces modifications, les rapporteurs spéciaux, MM. Georges Patient et Teva Rohfritsch, proposent de confirmer l'adoption des crédits tels que modifiés par l'Assemblée nationale et par leurs amendements de crédits, ainsi que l'adoption sans modification de l'article 55. Nous en venons à l'article 55 bis.

M. Georges Patient, rapporteur spécial. - Cet article 55 bis étend l'intervention d'Action Logement à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, qui ont souhaité en bénéficier. Les dispositions en vigueur qui concernent Action Logement ne sont en effet pas applicables aux collectivités régies par la loi organique du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer.

Un article de la nouvelle convention quinquennale signée le 16 juin 2023 entre l'État et le groupe Action Logement, de même qu'un engagement du Gouvernement pris lors du Comité interministériel des outre-mer (Ciom) du 18 juillet 2023, ont prévu la possibilité d'étendre l'application des dispositifs d'Action Logement à ces deux territoires.

L'article 55 bis procède aux modifications nécessaires du code de la construction et de l'habitation (CCH). Nous vous proposons de l'adopter sans modification.

M. Victorin Lurel. - L'article 55, en l'état me pose un problème et a provoqué une levée de boucliers de la plupart des parlementaires, en particuliers des députés. Cet article inclut un dispositif d'aide à l'installation outre-mer. Le ministre Gérald Darmanin a annoncé qu'il supprimera l'article et que le dispositif sera réécrit pour qu'il bénéficie prioritairement aux natifs qui reviennent au pays.

Je souhaitais attirer l'attention sur cet article, quoique nous ne puissions sans doute pas le supprimer en commission.

M. Claude Raynal, président. - Nous n'allons, en tout état de cause, pas prendre la décision à la place du Gouvernement. Attendons de voir si celui-ci présente effectivement un amendement.

La commission a confirmé sa décision de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Outre-mer » tels que modifiés par l'Assemblée nationale et par ses amendements. Elle a confirmé sa décision de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 55. Elle a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 55 bis.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Direction générale des Outre-mer (DGOM)

- M. Olivier JACOB, directeur général des outre-mer ;

- Mme Isabelle RICHARD, sous-directrice des politiques publiques ;

- M. Étienne GUILLET, sous-directeur de l'évaluation, de la prospective et de la dépense de l'État.

Fédération des Entreprises des Outre-mer (FEDOM)

- M. Hervé MARITON, président ;

- M. Laurent RENOUF, délégué général.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2024.html


* 1 Rapport d'information n° 756 (2022-2023), déposé le 21 juin 2023- par MM.  Georges Patient et Teva Rohfritsch.

* 2 Par décret du 7 juillet 2022, le Gouvernement a revalorisé la valeur de l'indice 100 applicable aux fonctions publiques d'État, territoriale et hospitalière en le fixant à 5 820,04 euros à compter du 1er juillet 2022, faisant ainsi passer la valeur du point d'indice de 4,686 euros à 4,85 euros soit une revalorisation de 3,5 % du point d'indice.

* 3 La bagasse est un résidu ligneux de la canne à sucre utilisé par les centrales thermiques pour la production d'électricité.

* 4 Ces écarts sont mesurés par l'indice de Fisher ( méthode). Ce dernier synthétise les différences de niveaux de prix entre deux territoires en tenant compte des habitudes de consommation à la fois des ménages de la France métropolitaine et de ceux du DOM considéré.

* 5 Dans les départements et régions d'outre-mer, la loi de régulation économique dite loi Lurel adoptée en novembre 2012 met en place le bouclier qualité-prix (BQP), qui « prévoit qu'un certain nombre de produits de la consommation courante voient leurs prix fixés par négociation, ou, en l'absence d'accord, par le préfet ». Ce dispositif s'applique en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Wallis-et-Futuna. Les négociations sont annuelles, l'accord devant être signé le 1er mars. Une signalétique « BQP » permet d'identifier les produits concernés par ce dispositif.

* 6 Prêt locatif social.

* 7 Logement locatif social.

* 8 Logement locatif très social.

* 9 Subvention à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale.

* 10 Prêt à taux zéro.

* 11 Prêt social de location accession.

* 12 Le Fonds régional d'aménagement foncier et urbain (FRAFU) coordonne les interventions financières de l'Union européenne, de l'État, des collectivités territoriales, en vue d'assurer la constitution de réserves foncières et la réalisation d'équipements.

* 13 Les chiffres clés du logement social - Union sociale pour l'habitat - Rapport 2022.

* 14 PAP 2024 mission « Outre-mer ».

* 15 Loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer.

* 16 Estimation de l'Union sociale pour l'habitat (USH).

* 17 Lancé en septembre 2017 à Toulouse par le Président de la République, le plan pour le Logement d'abord et la lutte contre le sans-abrisme fait de l'accès direct au logement une priorité pour la réinsertion des personnes sans domicile.

* 18 À Mayotte et en Guyane, lorsque des locaux ou installations édifiés sans droit ni titre constituent un habitat informel et présentent des risques graves pour la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publique, le représentant de l'État dans le département peut, par arrêté, ordonner aux occupants de ces locaux et installations d'évacuer les lieux et aux propriétaires de procéder à leur démolition à l'issue de l'évacuation.

* 19 Exécution retraitée du nettoyage d'anciens engagements juridiques, 182,5 millions d'euros sans retraitement.

* 20 Exécution retraitée du nettoyage d'anciens engagements juridiques, 182,6 millions d'euros sans retraitement.

* 21 Exécution retraitée du nettoyage d'anciens engagements juridiques, 181,7 millions d'euros sans retraitement.

* 22 En raison de cette signature tardive, les opérations prévues dans le cadre du CCT, et qui ont été engagées en 2019 pour un montant de 8,4 millions d'euros, ont été rattachées en exécution, au précédent contrat de développement, signé le 30 juillet 2014 et modifié par avenant du 11 juin 2018.

* 23 Rapport d'information fait au nom de la commission des finances par les rapporteurs Georges Patient et Teva Rohfritsch sur « Les contrats de redressement outre-mer (COROM) : pour des moyens à la hauteur des enjeux.

* 24 Capacité de la collectivité à financer ses investissements une fois les charges obligatoires payées. Plus le ratio est faible, plus la capacité à autofinancer l'investissement est élevée. Un ratio supérieur à 100 % indique un recours nécessaire aux recettes d'investissement pour financer la charge de la dette.

* 25 Encours de dette / recettes réelles de fonctionnement.

* 26 IEDOM, Rapport annuel sur les délais de paiement pratiqués par les entreprises et les organismes publics des DCOM, édition 2021, juin 2022.

* 27 Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à La Réunion, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Wallis-et-Futuna.

* 28 Cette contribution, encadrée par une convention du 16 avril 2015, s'élevait à 12 millions d'euros par an en contrepartie d'un engagement du Pays de poursuivre les réformes structurelles au redressement des comptes sociaux de Polynésie.

* 29 Rapport d'information n° 727 (2021-2022) du 22 juin 2022 - par MM. Georges Patient et Teva Rohfritsch, fait au nom de la commission des finances.

* 30 ACT : aide à la continuité territoriale, PME : passeport, mobilité études, PMFP : passeport pour la mobilité de la formation professionnelle, PMSP : passeport mobilité stage professionnel.

* 31 d du 3 du I de l'article 25.

* 32 Cour des comptes, Le logement dans les départements et les régions d'outre-mer, rapport public thématique, septembre 2020.

* 33 Article 17 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.

* 34 Article 15 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.

* 35 Chiffrage direction du budget. Celui de la DGOM s'établit à 55 millions d'euros.

* 36 Article 29 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.

* 37 Règlement d'exemption n° 651/2014 de la commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité (RGEC).

* 38 Rapport d'information n° 637 (2021-2022) du 24 mai 2022 - par MM.  Georges Patient et Teva Rohfritsch.

* 39 Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à La Réunion, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Wallis-et-Futuna.

* 40 Les employeurs occupant au moins cinquante salariés, à l'exception de l'État, des collectivités territoriales et de leurs établissements publics administratifs, assujettis à la taxe sur les salaires doivent consacrer des sommes représentant 0,45 % au moins des revenus d'activité versés par eux au cours de l'exercice écoulé au financement d'actions dans le domaine du logement, en particulier du logement des salariés. Cette obligation prend la forme d'un versement à Action Logement Service ou à un organisme agréé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État par le ministre chargé du logement aux fins de collecter la participation des employeurs à l'effort de construction.

* 41 Les organismes mentionnés aux articles L. 313-18, L. 313-19, L. 313-20, L. 313-33 et L. 313-34 du code de la construction et de l'habitation (c'est-à-dire les entités d'Action Logement) exercent les compétences qui leur sont reconnues par la loi en se conformant aux dispositions prévues au chapitre Ier de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire, sous réserve des dispositions du présent chapitre. Ces organismes sont soumis aux dispositions du code de la commande publique.

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