D. LES DÉPENSES FISCALES : UNE DÉMARCHE D'ÉVALUATION QUANTITATIVE ET QUALITATIVE INSUFFISANTE

Les dépenses fiscales représentent une part importante des dépenses de l'État : au nombre de 449, elles devraient atteindre 83,4 milliards d'euros en 2016 , en hausse de 1,5 milliard d'euros par rapport à l'année 2015, soit un montant supérieur, par exemple, à la mission « Enseignement scolaire » .

Graphique n° 60 : Évolution du coût des dépenses fiscales de 2011 à 2016

(en milliards d'euros et en %)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Tableau n° 61 : Dépense fiscale par impôt de 2014 à 2016

(en millions d'euros)

2014

2015

2016

Impôt sur le revenu

34 571

32 009

29 341

Impôt sur le revenu et impôt sur les sociétés

14 939

21 403

22 184

Taxe sur la valeur ajoutée

17 464

17 499

17 610

Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques

3 598

3 898

4 228

Impôts locaux

2 047

2 137

1 710

Impôt sur les sociétés

2 832

2 104

1 622

Autres impôts directs

998

1 111

1 126

Autres droits

1 075

1 052

1 049

Droits d'enregistrement et de timbre

813

831

837

Total général

78 337

82 044

79 707

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses du Gouvernement au questionnaire du rapporteur général

L'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés totalisent à eux seuls 53,1 milliards d'euros de dépenses fiscales , dont plus de 13 milliards d'euros de crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) et 5,5 milliards d'euros de crédit d'impôt recherche (CIR).

Si ces dispositifs, qui viennent d'atteindre leur régime de croisière, devraient être stabilisés, des marges de manoeuvre paraissent exister pour réduire le nombre des « niches » et simplifier la législation fiscale. 18 dépenses fiscales ne devraient avoir aucun bénéficiaire en 2016 et 57 « niches » fiscales sont chiffrées « epsilon » par le ministère du budget, soit moins d'un million d'euros : de façon similaire aux « petites taxes » dont le rendement est très faible, ces « petites niches » devraient être rationalisées .

Le coût de gestion des « niches » par les services fiscaux doit être mis au regard du gain pour les contribuables et du caractère incitatif de la mesure : par exemple, il est permis de douter de l'effet réellement déclencheur des abattements exceptionnels prévus successivement par les deux précédentes lois de finances pour l'imposition des plus-values de cessions immobilières, ou de l'exonération d'impôt sur les plus-values immobilières réalisées par les particuliers qui cèdent leur logement à des bailleurs sociaux. De même, l'exonération de deux ans de taxe foncière sur les propriétés bâties pour les constructions nouvelles ne paraît pas contribuer à favoriser la construction de logements : selon les informations recueillies par le groupe de travail mis en place par votre commission des finances, cette exonération est très peu connue et n'a que peu d'impact sur la prise de décision des personnes accédant à la propriété.

À cet égard, la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 a considérablement assoupli les obligations d'évaluation des dépenses fiscales par rapport à la précédente loi de programmation, qui n'était d'ailleurs pas respectée. Il paraît cependant anormal que le coût de 88 dépenses fiscales ne soit pas connu, pour certaines depuis plusieurs années. L'évaluation du coût d'un dispositif est un prérequis indispensable à l'appréciation de sa pertinence. Force est donc de constater que la démarche d'évaluation des dépenses fiscales par le Gouvernement reste insuffisante et que la plupart des travaux conduits le sont par le Parlement. Il serait d'ailleurs utile que les documents transmis au Parlement indiquent systématiquement le nombre de bénéficiaires des dépenses fiscales , et non seulement leur coût. À défaut d'une démarche gouvernementale rigoureuse d'évaluation des dépenses fiscales, il s'agit à tout le moins de donner au Parlement les moyens de son contrôle.

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