B. LE PROGRAMME 159 « INFORMATION GÉOGRAPHIQUE ET CARTOGRAPHIQUE »
1. L'institut national de l'information géographique et forestière (IGN)
a) Un établissement issu de la fusion entre l'Institut géographique national et l'Inventaire forestier national
Le programme 159 « Information géographique et cartographique » comprend les moyens dévolus à la production de l'information géographique et aux activités de recherche menées dans cette discipline .
La quasi-totalité des crédits du programme est consacrée à la subvention pour charges de service public de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN), qui résulte de la fusion de l'Institut géographique national et de l'Inventaire forestier national 14 ( * ) (IFN), et est placé sous la double tutelle des ministres chargés de l'écologie et des forêts 15 ( * ) .
La vocation principale de cet opérateur est de rendre compte de la surface du territoire national et de l'occupation de son sol, ainsi que d'élaborer et d'actualiser l'inventaire permanent des ressources forestières nationales .
Par ailleurs, l'Institut conçoit et commercialise des produits et services à partir des données recueillies dans le cadre de ses missions de service public.
Le cadre juridique de l'IGN est défini par le décret n° 2011-1371 du 27 octobre 2011.
b) Les orientations stratégiques du nouvel établissement
L'Institut national de l'information géographique et forestière est doté d'un contrat d'objectifs et de performance (COP) pour la période 2010-2013, qui reprend aussi les orientations de celui de l'IFN (période 2007-2012). Le nouvel établissement vise notamment à :
- promouvoir une politique nationale d'information géographique partagée, renforcer la coopération entre ses différents acteurs et mettre en oeuvre la directive INSPIRE ;
- généraliser l'accès à l'information géographique par Internet ;
- dresser l'inventaire de la ressource forestière et observer l'évolution des écosystèmes forestiers.
2. l'évolution des moyens par rapport à 2013
a) Des crédits en légère hausse
(1) Les déterminants du projet de budget pour 2014
Le projet de loi de finances pour 2013 propose pour le programme 159 « Information géographique et cartographique » une dotation de 96,9 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) comme en crédits de paiement (CP) . Ce montant est en légère hausse par rapport à 2012 (+ 0,9 %).
Cette budgétisation prend en compte la maîtrise de la masse salariale de l'IGN, une réduction des dépenses de fonctionnement de l'établissement, la couverture de ses besoins en investissement (notamment l'immobilisation des bases de données), ainsi que l'accompagnement du changement de son modèle économique, marqué par la chute des recettes commerciales de l'IGN sur les marchés professionnels et grand public.
La dotation prévue pour 2014 est inférieure à celle qui était prévue par le triennal (- 0,33 million d'euros), évolution qui est permise par un effort particulier sur les dépenses de personnel en 2014.
L'IGN estime que l'évolution prévue en 2014 de sa subvention pour charges de service public conduira à un prélèvement de l'ordre de 5 millions d'euros sur le fonds de roulement .
(2) Une ventilation entre trois actions
Les crédits sont ventilés entre trois actions :
- l'action 1 « Production de l'information géographique » : dotée de 81,2 millions d'euros (+ 0,9 % par rapport à 2013), soit 83,7 % des crédits du programme, elle retrace la part de la subvention pour charges de service public de l'IGN consacrée au financement des activités exercées par l'Institut dans le cadre de la mission de service public en matière de production de l'information géographique et cartographique, de réalisation de l'inventaire permanent des ressources forestières 16 ( * ) et de formation.
Cela comprend notamment les activités relatives au maintien des réseaux géodésiques 17 ( * ) , de prise de vue aérienne et de documentation, ainsi que des travaux d'entretien, de mise à jour et de diffusion du référentiel à grande échelle (RGE) et de celles des autres bases de données, des fonds cartographiques et du Géoportail de l'Institut . Ce dernier permet à tout citoyen connecté au réseau Internet de visualiser un ensemble de couches d'informations géographiques de la zone de son choix.
Le Géoportail Le Géoportail de l'administration française a vocation, au-delà de la visualisation en ligne des bases de données de l'IGN, à constituer un nouveau mode d'accès à l'information publique par une approche géographique. Il s'inscrit dans la dynamique de la « démocratie écologique » portée par le Grenelle de l'environnement, en donnant à chacun les clés pour mieux comprendre son environnement et contribuer à un aménagement durable. Il s'enrichit donc régulièrement de données provenant de partenaires. Il est développé par phases successives. La deuxième, commencée en 2007, offre des fonctionnalités nettement plus puissantes que la première puisqu'elle inclut notamment la visualisation en trois dimensions. Courant 2009, l'IGN a engagé la réflexion sur la troisième phase destinée à renouveler la version actuelle du Géoportail . Le Géoportail 3 est construit sur le principe du service des données en flux avec l'objectif : - d'une part, d'en faire l'élément structurant de la mise en oeuvre en France de la directive INSPIRE, qui vise à mettre en place une infrastructure européenne d'information géographique , c'est-à-dire un ensemble de services d'information disponibles sur Internet, répartis sur les sites web des différents acteurs concernés, et permettant la diffusion et le partage de données géographiques ; - d'autre part, de développer son utilisation par l'administration , les collectivités territoriales et, d'une manière générale, les prestataires de services publics pour offrir des services en ligne faisant appel à des données localisées. Source : réponses au questionnaire budgétaire de votre rapporteur spécial |
- l'action 2 « Recherche dans le domaine géographique » : dotée de 15,2 millions d'euros (+ 0,9 % par rapport à 2013), soit 15,7 % des crédits du programme, elle retrace la part de la subvention pour charges de service public de l'IGN consacrée au financement des activités de recherche et de développement de l'opérateur. Les principaux objectifs en la matière concernent la préparation du Référentiel à grande échelle de nouvelle génération, les infrastructures de données géographiques et la mise en oeuvre de la directive INSPIRE, la contribution à la réalisation des engagements du Grenelle de l'environnement, et la préparation de l'arrivée du système de référence terrestre Galileo.
La directive INSPIRE : de nouvelles obligations et
de nouveaux atouts
La directive européenne 2007/2/CE du 14 mars 2007, dite directive INSPIRE, vise à établir une infrastructure d'information géographique dans la Communauté européenne pour favoriser la protection de l'environnement . Ce que la directive appelle infrastructure d'information géographique est un ensemble de services d'information disponibles sur Internet, répartis sur les sites web des différents acteurs concernés, et permettant la diffusion et le partage de données géographiques. La directive s'adresse aux autorités publiques (l'Etat, les collectivités territoriales et leurs groupements, les établissements publics ainsi que « toute personne physique ou morale fournissant des services publics en rapport avec l'environnement » ). Elle s'applique aux données géographiques détenues par les autorités publiques, dès lors que ces données sont sous forme électronique et qu'elles concernent l'un des 34 thèmes figurant dans les trois annexes de la directive. Ces annexes correspondent à un ordre de priorité, l'annexe I devant être traitée la première. De surcroît, la directive impose aux autorités publiques, d'une part de rendre ces données accessibles au public en les publiant sur Internet, d'autre part de les partager entre elles. En outre, elle ne crée pas seulement des obligations : elle facilite leur mise en oeuvre grâce à la publication, en cours, de textes techniques : règlements européens (fixant les règles obligatoires) et guides de bonnes pratiques (contenant des recommandations). Enfin, la directive INSPIRE vise à faciliter et accélérer la réponse des autorités publiques à la forte demande des citoyens et des entreprises de disposer sur Internet d'informations géographiques : cadastre et plans locaux d'urbanisme (PLU) de leur commune, informations multimodales sur les services de transport (horaires, correspondances), informations environnementales (risques naturels et technologiques, zones protégées). Cette demande résulte du développement récent de l'utilisation de l'information géographique par des services en ligne, commerciaux, culturels ou administratifs, permettant d'obtenir des renseignements, d'effectuer des achats ou de réaliser une téléprocédure. Source : site Internet du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie (MEDDE) |
- l'action 3 « Pilotage de la politique d'information géographique » : dotée de 560 000 euros comme en 2013, soit 0,6 % des crédits du programme, elle retrace le financement de l'activité d'animation et de coordination interministérielle assurée par le ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et du Géoportail national. En outre, elle porte les moyens destinés au fonctionnement et aux activités du Conseil national de l'information géographique (CNIG), réorganisé par le décret n° 2011-127 du 31 janvier 2011, pour devenir la structure de coordination nationale prévue par la directive INSPIRE. Enfin, cette action intègre le soutien de l'Etat aux activités d'animation de la communauté des acteurs du domaine exercées par l'Association française pour l'Information géographique (AFIGEO).
Votre rapporteur spécial relève que le dispositif de performance a subi deux modifications , à travers la création d'un indicateur relatif à la précision de l'inventaire forestier statistique et la suppression du sous-indicateur « Age moyen des cartes au 1 : 25 000 ».
b) Une réduction significative du plafond d'emplois
Le projet de loi de finances pour 2014 accorde à l'IGN 1 632 emplois sous plafond, contre 1 707 en 2012 (-75 ETP), soit une réduction de 4,4 %, supérieure à la moyenne de 2,5 % prévue pour les opérateurs du ministère.
Toutefois, sur les 75 ETP concernés, 33 correspondent à un « abattement technique visant à tirer les conséquences de la vacance structurelle observée au sein de l'établissement ». Le solde net des suppressions d'emplois prévu s'élève donc à 42 ETP en 2014 .
En revanche, le nombre d'emplois hors plafond augmentera de 37 à 42 entre 2013 et 2014, dont trois contrats aidés. Le projet annuel de performances de la mission « Ecologie, développement et mobilité durables » annexé au projet de loi de finances pour 2014 explique cette évolution par un recours à des agents sur contrats pour les projets de recherche et de développement menés par l'IGN , en particulier en réponse aux appels d'offres de l'Agence nationale de la recherche (ANR).
c) Une réflexion stratégique interne bienvenue
Une réflexion stratégique interne à l'Institut a été lancée en 2012 afin de repenser les activités, les conditions de leur mise en oeuvre et le modèle économique de l'IGN dans le cadre du nouveau contrat d'objectifs et de performance pour la période 2013-2016. Celui-ci, qui devrait être adopté d'ici la fin de l'année, articule les nouvelles orientations de l'établissement autour de trois axes stratégiques :
- contribuer à la souveraineté et à l'indépendance nationales en assurant la possibilité pour l'Etat et les collectivités locales de fonder leurs décisions et leurs actions sur des informations géographiques et forestières maîtrisées ;
- développer le rôle d'opérateur de référence auprès de l'ensemble des acteurs publics ;
- passer d'un positionnement centré sur la production et la diffusion de données géographiques et forestières à un positionnement de fournisseur de services de référence .
Cette réorientation stratégique se caractérisera par un recentrage sur la mission de service public de l'établissement, caractérisée notamment par des critères de disponibilité (couverture de l'ensemble du territoire...) et de qualité des données.
La mission de service public de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) La mission de service public de l'IGN se décline en quatre activités structurantes qui concernent aussi bien les activités civiles que de défense : - produire des connaissances, des compétences et des innovations dans le domaine de la géomatique 18 ( * ) , en propre ou en partenariat, voire en accompagnement d'acteurs privés ; - spécifier, collecter, agréger des données et produire des référentiels faisant autorité sur la géolocalisation et les ressources ou écosystèmes forestiers, à des fins civiles ou militaires, ce qui induit notamment une activité de fond en géodésie 19 ( * ) , indispensable pour la normalisation de toutes les informations géolocalisées et leur positionnement en général, et vis-à-vis de laquelle l'IGN doit entretenir le niveau d'excellence qui lui est reconnu aujourd'hui ; - assurer la diffusion à l'échelle nationale de données multithématiques produites par l'IGN ou provenant d'autres acteurs puis contrôlées et mises en cohérence par l'IGN, ce qui induit notamment un renforcement des activités de l'Institut dans le domaine du stockage et de la gestion des données , ainsi que de l'hébergement de données pour autrui ; - développer, en propre, en partenariat ou en accompagnement d'acteurs privés, des services d'accès personnalisé aux données et de croisement ou de traitement d'informations pour les professionnels du public ou du privé, ainsi que pour le grand public. Source : réponses au questionnaire budgétaire de votre rapporteur spécial |
3. Des efforts de rationalisation dans le domaine de la politique immobilière
Enfin, en 2014, l'IGN poursuivra son effort de réorganisation et de modernisation des sites en région engagé lors de la fusion au 1 er janvier 2012 avec l'Inventaire forestier national (IFN). Pour mémoire, cette fusion a enrichi le patrimoine mobilier de l'IGN de six sites supplémentaires en province, dont certains dans des agglomérations au sein desquelles l'ex-IGN était également présent.
La politique immobilière du nouvel établissement s'oriente donc vers une rationalisation de leur occupation et une modernisation de ce patrimoine public qui se traduit par les regroupements des unités IFN et IGN sur un même site à Lyon, Bordeaux et Nancy, ainsi que la remise à France Domaine des sites IFN dont l'IGN n'a plus l'utilité (Bordeaux, Lattes, Bron). Ces éléments ont été présentés au conseil d'administration du 1 er février 2013, dans le cadre du suivi du schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI). D'importants travaux ont commencé à Lyon, qui doivent permettre le regroupement et l'installation des services d'ici la fin de l'année.
De surcroît, le vaste projet de restructuration immobilière du site de Saint-Mandé se poursuit. Son but est de valoriser le site en mettant à disposition de l'IGN des locaux plus performants en termes de surface et de confort, mieux adaptés à son activité. Pour mémoire, ce site a également vocation à accueillir le siège de Météo-France ainsi que l'antenne parisienne du Service hydrographique et océanographique de la marine.
Outre l'optimisation de la gestion et du fonctionnement de l'IGN, le but de ce projet est également de libérer, en vue de sa cession, la moitié de la surface de terrain, propriété de l'Etat, que l'institut occupe actuellement. Dans le cadre de cette opération, l'IGN espère pouvoir réaliser divers investissements, notamment les aménagements d'une nouvelle salle pour ses serveurs et d'espaces de stockage adaptés, mais dont le financement n'est pas encore précisé .
4. Une situation financière toujours fragile
a) Une hausse des charges de personnel en 2013
En 2013, L'IGN constate une hausse des charges de personnel par rapport à l'exécution 2012, à hauteur de 1,1 million d'euros, dont 0,8 million d'euros sur la masse salariale, du fait des facteurs suivants :
- l'effet de la progression du taux du CAS pension de 68,59 % à 74,28 % ;
- les mesures catégorielles et le glissement vieillesse technicité (GVT) ;
- 0,25 million d'euros au titre de la taxe sur les salaires.
En conséquence, les charges de personnel, d'un montant de 114 millions d'euros, représentent près de 75 % des charges décaissables de l'Institut .
Comme le souligne le projet annuel de performances de la mission « Ecologie, développement et mobilité durables » annexé au projet de loi de finances pour 2014, « la hausse du taux de la contribution au CAS « Pensions » représente une dépense supplémentaire qui porte l'essentiel de l'augmentation de la masse salariale, en dépit des gels du point fonction publique et du point ouvrir, et de l'effort de réduction des effectifs ».
b) Un résultat net déficitaire
La situation financière de l'IGN reste proche de celle constatée l'année dernière. Le rapport annuel de performances précité indique que l'exercice 2013 devrait se solder par un résultat net déficitaire de l'ordre de 0,38 million d'euros , un prélèvement sur le fonds de roulement de 5,28 millions d'euros, conduisant à un niveau de fonds de roulement de 28,3 millions d'euros et une trésorerie de l'ordre de 12,5 millions d'euros, correspondant à trente-deux jours de fonctionnement. De surcroît, la capacité d'autofinancement (8,89 millions d'euros) reste insuffisante pour financer les investissements.
* 14 Jusqu'en 2012, celui-ci était rattaché au programme 149 « Forêt » du ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.
* 15 Pour mémoire, cette fusion résulte d'une décision du conseil de modernisation des politiques publiques, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP).
* 16 Cette mission inclut l'observation et la surveillance des écosystèmes forestiers, la diffusion des données d'inventaire sur les milieux forestiers, ainsi que la fourniture, à l'Etat, des éléments nécessaires à la définition, à la mise en oeuvre et à l'évaluation des orientations de la politique forestière nationale.
* 17 Un réseau géodésique est un ensemble de points matériels dont les coordonnées ont été déterminées. Sa fonction est de réaliser un système de référence terrestre. Il constitue une composante d'un processus de positionnement (source : IGN).
* 18 La géomatique recouvre l'ensemble des outils et méthodes permettant d'acquérir, de représenter, d'analyser et d'intégrer des données géographiques.
* 19 La géodésie est une science ayant pour objet de déterminer la forme et la dimension de la Terre.