B. LE RECOURS DE L'IRLANDE AU MÉCANISME EUROPÉEN DE STABILISATION ET AU FMI
Selon les dernières prévisions de la Commission européenne, l'Irlande aura en 2010 un déficit public de 32,3 points de PIB (12,5 points de PIB hors mesures exceptionnelles d'aide au secteur bancaire) et connaîtra une croissance de - 0,2 %.
En conséquence du pessimisme croissant sur ses perspectives économiques et de finances publiques, elle a vu ses conditions de financement de dégrader au cours du second semestre 2010, pour se retrouver en novembre, comme la Grèce, avec un écart de près de 10 points par rapport à l'Allemagne, comme le montre le graphique ci-après.
Ecart de taux d'intérêt à 10 ans par rapport à l'Allemagne
(en %)
Source : Natixis
L'Irlande a ainsi décidé de faire appel au mécanisme européen de stabilisation (mécanisme européen de stabilisation financière et fonds européen de stabilité) ainsi qu'au FMI.
1. Une aide de 67,5 milliards d'euros
Contrairement à ce qui est souvent indiqué, le montant total des prêts ne pourra pas aller jusqu'à 85 milliards d'euros, mais seulement jusqu'à 67,5 milliards d'euros.
En effet, le montant de 85 milliards d'euros comprend 17,5 milliards d'euros fournis par l'Irlande elle-même, correspondant symboliquement à la moitié des ressources destinées au système bancaire (35 milliards d'euros au total).
L'aide internationale se décomposerait en trois parts de 22,5 milliards d'euros :
- 22,5 milliards d'euros pour le mécanisme européen de stabilisation financière ;
- 22,5 milliards d'euros pour un ensemble constitué par le fonds européen de stabilité financière (17,7 milliards d'euros) et des prêts bilatéraux du Royaume-Uni, de la Suède et du Danemark (4,8 milliards d'euros) ;
- 22,5 milliards d'euros pour le FMI.
Le plan de financement de l'Irlande
(en milliards d'euros)
Ressources |
Charges |
|||
Irlande (ressources de trésorerie et Fonds national de réserve pour les retraites) |
17,5 |
Recapitalisation immédiate des banques |
10 |
|
Aide internationale |
67,5 |
Réserve de précaution pour la recapitalisation des banques |
25 |
|
Mécanisme européen de stabilisation financière |
22,5 |
Besoins de financement des administrations publiques |
50 |
|
Fonds européen de stabilité financière |
17,7 |
|||
Royaume-Uni |
3,8 |
|||
Suède |
0,6 |
|||
Danemark |
0,4 |
|||
FMI |
22,5 |
|||
Total |
85 |
Total |
85 |
Source : d'après le communiqué de presse du Conseil Ecofin du 7 décembre 2010
2. Une procédure toujours en cours
Le prêt n'a encore été accordé ni par le FMI, ni par l'Union européenne, ni par le FESF.
Le 28 novembre 2010, le directeur général du FMI a annoncé que ses services et l'Irlande étaient convenus d'une contribution sous la forme d'un prêt triennal de 19,5 milliards de DTS (soit quelque 22,5 milliards d'euros), au titre du mécanisme élargi de crédit (MEDC). La demande de financement de l'Irlande doit encore être soumise à l'approbation du Conseil d'administration en décembre.
Le 3 décembre 2010 a été adopté le document essentiel, le memorandum of understanding (MoU), qui synthétise l'ensemble des engagements de l'Irlande vis-à-vis de ses partenaires, définis chaque trimestre jusqu'à la fin de l'année 2013. L'Irlande s'est explicitement engagée à s'y conformer dans deux lettres d'intention, adressées respectivement aux principaux responsables de l'Union européenne 5 ( * ) et au directeur général du FMI. Ce document d'une quarantaine de pages indique précisément les mesures que l'Irlande entend prendre chaque année sur les dépenses et les recettes.
L'Union européenne a ensuite adopté ses propres dispositions juridiques relatives à l'aide à l'Irlande, lors du conseil Ecofin du 7 décembre 2010 :
- une recommandation dans le cadre du volet « coercitif » du pacte de stabilité, repoussant à 2015 l'année fixée pour la fin du déficit excessif (initialement fixée à 2013, cette échéance avait déjà été repoussée à 2014 le 2 décembre 2009) ;
- une décision accordant à l'Irlande, dans le cadre du mécanisme européen de stabilisation financière, un prêt d'un montant maximum de 22,5 milliards d'euros, dont la conditionnalité doit encore être précisée par un accord de prêt.
Le FESF n'a pas non plus encore formellement accordé de prêt.
3. Une nécessaire information du Parlement français
Le IV de l'article 2 de la loi n° 2010-606 du 7 juin 2010 de finances rectificative pour 2010 prévoit que « lorsqu'il octroie la garantie de l'Etat (...) et lorsque [le FESF] apporte un financement ou consent des prêts, le ministre chargé de l'économie informe les commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances ».
Les modalités pratiques de mise en oeuvre de cette disposition restent à déterminer.
Votre rapporteur général examinera avec intérêt les informations que le Gouvernement pourra lui transmettre à cette occasion. Il tient à protester contre l'apparent abandon, parmi les conditionnalités de l'aide du FESF, de l'exigence d'une attitude plus coopérative de l'Irlande dans le domaine fiscal, concernant en particulier le relèvement de son taux de l'impôt sur les sociétés, de seulement 12,5 %.
* 5 Le président de l'Eurogroupe, le président de l'Union européenne, le commissaire en charge des affaires économiques et monétaires et le président de la Banque centrale européenne.