C. LA MISE EN OEUVRE INDISPENSABLE DU TAUX DIRECTEUR OPPOSABLE DOIT S'ACCOMPAGNER D'UNE RÉFLEXION SUR LES CONDITIONS DE FONCTIONNEMENT DES ÉTABLISSEMENTS
Selon
les données recueillies par l'UNIOPSS, les financements alloués
par les organismes sociaux et les collectivités publiques aux
établissements sanitaires, médico-sociaux et sociaux sans but
lucratif s'élèvent environ à 111 milliards de francs,
soit près de 30 % du financement des établissements du
secteur public, privé lucratif ou associatif.
Selon l'UNIOPSS, le secteur associatif est dominant dans les interventions
financées par l'aide sociale de l'Etat (93 %). Il intervient de
manière importante dans le secteur financé par les
départements (61 %) et pour le quart (25 %) des prestations
financées par l'assurance maladie.
Enfin, en 1996, il convient de noter que 71 % des ressources publiques du
secteur associatif provient de la sécurité sociale, 22 % de
l'aide sociale des départements et moins de 10 % de l'aide sociale
de l'Etat.
En pratique, les 111 milliards de francs de ce secteur évoluent
quasiment en fonction des besoins constatés par les associations, sans
que soient fixés des objectifs d'évolution annuelle de la
dépense permettant aux financeurs publics de connaître exactement
quelles sommes ils devront consacrer à l'aide sociale et gérer
leurs budgets et les prélèvements afférents en
conséquence.
Dans un contexte où comme on l'a vu ci-dessus, les dépenses
risquent d'augmenter considérablement, la mise en place d'un taux
directeur applicable à l'évolution des dépenses de ce
secteur devient de plus en plus nécessaire, à la condition que
cette réforme soit accompagnée d'une volonté
de mettre
à plat les conditions de fonctionnement des établissements et
associations
et que l'Etat prenne les mesures nécessaires pour
neutraliser les dérives de coût dont les associations ne sont pas
responsables.
Prestations servies aux établissements et services sanitaires et sociaux en 1996 13( * )
|
Total |
Associations |
|
|
Milliards de francs |
Milliards de francs |
% |
SÉCURITÉ SOCIALE, tous risques, tous régimes |
|
|
|
CNAM Activités sanitaires |
285,59 |
44,07 |
15,4 |
Activités médico-sociales |
39,34 |
28,68 |
72,9 |
Enfance inadaptée |
22,18 |
19,32 |
87,1 |
Adultes handicapés |
4,77 |
4,75 |
99,5 |
Personnes âgées |
12,39 |
4,61 |
37,2 |
Total CNAM |
324,93 |
72,74 |
22,4 |
CNAF Enfance famille |
7,28 |
4,05 |
55,7 |
CNAV Personnes âgées |
3,50 |
2,28 |
65,0 |
TOTAL SÉCURITÉ SOCIALE |
335,71 |
79,08 |
23,6 |
ETAT Adultes handicapés |
5,69 |
5,29 |
93,0 |
Adultes en difficulté |
2,22 |
2,02 |
91,0 |
TOTAL AIDE SOCIALE DE L'ETAT |
7,912 |
7,314 |
92,5 |
DÉPARTEMENTS |
|
|
|
Enfance |
20,00 |
10,16 |
50,8 |
Personnes âgées |
7,30 |
2,54 |
34,8 |
Adultes handicapés |
10,50 |
9,34 |
89,0 |
Adultes en difficulté |
3,10 |
2,79 |
90,0 |
TOTAL AIDE SOCIALE DES DÉPARTEMENTS |
40,90 |
24,83 |
60,7 |
TOTAL GÉNÉRAL |
384,52 |
111,23 |
28,9 |
Champ :
France métropolitaine
Source : UNIOPSS.
1. La mise en oeuvre du taux directeur est devenue indispensable
Aujourd'hui, le financement des établissements sociaux
et
médico-sociaux est assuré, directement ou indirectement, dans le
cadre de la technique du
prix de journée
; les dispositifs de
financement par dotation globale qui sont pratiqués dans certains
secteurs n'ont pas de valeur impérative.
Leurs dépenses sont donc prises en charge dans le cadre d'un tarif qui
résulte d'une véritable négociation entre
l'autorité tarifaire et l'association. Le prix de journée repose,
on le sait, sur la division du montant des dépenses
prévisionnelles de l'établissement par son activité
prévisionnelle, calculée en fonction du nombre de jours de
présence des personnes accueillies. Il est établi en fonction du
montant des dépenses prévisionnelles de l'établissement
après déduction des recettes en atténuation et
incorporation des excédents de l'antépénultième
exercice, et du nombre de journées d'activité prévues. Il
est utilisé comme une variable d'ajustement.
S'agissant des
établissements relevant de l'aide sociale de l'Etat,
le décret n° 88-279 du 24 mars 1988
a instauré un
mécanisme dit de " dotation globale " qui concerne les
dépenses liées à l'activité sociale des CAT et des
CHRS.
Concernant les organismes d'assurance maladie, une circulaire du
31 décembre 1996 prise conjointement par la direction de l'action
sociale, la direction de la sécurité sociale et la direction du
budget a instauré de nouvelles méthodes de suivi des
dépenses et en 1998 des enveloppes ont été mises en place.
Pour autant,
les dotations versées ne peuvent être
considérées comme ayant valeur limitative
; cela revient en
définitive à calculer le prix de journée en tenant compte
non seulement des prévisions "
justifiées et non
excessives
" des établissements, mais également des
circulaires ministérielles qui définissent les taux
d'évolution forfaitaire.
En effet, la procédure de tarification est placée sous le
contrôle d'un juge administratif spécialisé -
les
commissions du contentieux de la tarification
- dont la jurisprudence est
fondée sur des textes relevant d'une conception plus étroitement
budgétaire qu'économique.
Aujourd'hui, les établissements peuvent poursuivre les dépenses,
même si l'enveloppe des prévisions initiales a été
dépassée, puisque la jurisprudence ne reconnaît pas de
caractère opposable aux enveloppes ou au taux d'évolution : les
budgets notifiés par les autorités tarifaires peuvent être
contestés par les établissements qui obtiennent alors des
crédits supplémentaires de la part des commissions de la
tarification sanitaire et sociale qui ne considèrent pas que les normes
d'évolution revêtent, dans ce cas, un caractère
juridiquement opposable.
Il convient d'ailleurs de ne pas exagérer la portée de ces
contentieux les représentants de l'UNIOPSS ont souligné que
4 % des décisions tarifaires faisaient l'objet d'un recours
.
Cela prouve que les cas de dépassement des prévisions initiales
demeurent relativement localisées et que le taux directeur peut
être mis en place sans perturber globalement l'équilibre du
dispositif.
Dans son dernier rapport sur la Sécurité Sociale
14(
*
)
, la Cour des Comptes, se fondant sur
les enquêtes de l'IGAS, souligne le caractère
inflationniste
du dispositif, que révèlent les
écarts entre les taux directeurs appliqués lors de la
préparation du budget, et les taux réellement constatés.
Taux directeur d'évolution des budgets des établissements pour adultes handicapés et enfance inadaptée sous compétence tarifaire de l'Etat
(en %)
|
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
Taux directeur budget de reconduction |
6,14 |
3,42 |
3,44 |
2,66 |
1,65 |
Taux directeur modifié en cours d'exercice |
7,31 |
3,72 |
4,58 |
3,20 |
2,00 |
Taux d'évolution réellement constaté |
9,10 |
9,20 |
2,20 |
10,00 |
2,00 |
Source : DAS/CNAMTS
Sur les trois dernières années, il est frappant de constater que,
si l'année 1995 était satisfaisante, avec un taux
prévisionnel de 3,4 % qui passe à 2,2 % en
exécution, l'année 1996 fait apparaître un écart
spectaculaire avec un taux prévisionnel de 2,66 % qui
s'élève en définitive à 10 % en
exécution. L'année 1997 montre une amélioration avec un
taux initial de 1,65 % qui atteint 2 % en exécution.
A cela, la Cour évoque trois raisons :
- en début d'exercice, les établissements fonctionnent au
moins pendant trois mois sur la base de l'ancien prix de journée et
demandent donc une surévaluation du nouveau prix de journée en
compensation ;
- les recettes prévisionnelles des établissements sont
souvent sous-évaluées pour obtenir un prix de journée
supérieur, sachant que l'excédent éventuel
bénéficie à l'établissement, avant d'être
repris au compte administratif.
- enfin, le préfet ne dispose à l'évidence d'aucun
moyen de fléchir la négociation, dans la mesure où ses
décisions peuvent faire l'objet d'un contentieux, qui ne peut
qu'être gagné par l'établissement, aucune disposition
n'autorisant aujourd'hui la fixation d'une enveloppe opposable.
Comme votre rapporteur a déjà dû le souligner,
chacune
des parties prenantes au dispositif est donc poussée à une sorte
de " déresponsabilisation " :
- l'Etat, l'assurance maladie et les départements financent les
établissements médico-sociaux mais ils ne maîtrisent pas
les dépenses qui sont engagées par les gestionnaires des
établissements ;
- les autorités responsables des établissements, même
si elles sont soucieuses d'une bonne gestion, savent que leur financement sera
assuré
a posteriori,
en particulier pour faire face à
des dépenses, telles que les dépenses de personnel, qui
dépendent de décisions qui échappent à leur
sphère de contrôle.
Dans cette structure, chaque acteur se renvoie mutuellement la
responsabilité des dérives de coût, au détriment du
contribuable qui finit par solder les dépenses non
maîtrisées.
C'est pourquoi le Gouvernement a décidé de mettre en oeuvre,
à l'article 27 du projet de loi de financement de la
sécurité sociale, un taux directeur pour l'ensemble des
dépenses sociales et médico-sociales financées par
l'assurance maladie.
En outre, à l'initiative du Gouvernement un amendement a
été adopté à l'Assemblée nationale afin
d'instaurer, dans le secteur social et médico-social financé par
l'aide sociale de l'Etat, un dispositif de régulation fondé sur
des enveloppes limitatives (cf. commentaire de l'article 84 ci-après).
Cela étant, votre commission, tout en reconnaissant la
nécessité de l'introduction de l'opposabilité, souligne
que le taux directeur opposable doit être appliqué en veillant
à mettre à plat les conditions de fonctionnement du secteur
social et médico-social afin de prendre en compte les évolutions
de dépenses qui ne sont pas imputables aux gestionnaires
d'établissements.
2. La mise en oeuvre du taux directeur opposable doit permettre d'analyser les facteurs d'évolution des dépenses qui ne dépendent pas des responsables d'établissements
Le taux
directeur opposable ne peut avoir de sens que s'il incite les gestionnaires
d'établissement à assurer un service de meilleure qualité
en contrôlant mieux les dépenses dont ils ont la maîtrise.
Concernant un certain nombre de coûts induits qui dépendent
directement des décisions prises par l'Etat, il appartient à
celui-ci de mieux analyser les conséquences des dispositifs qu'il met en
place pour les compenser.
Si le Gouvernement ne prenait pas les mesures d'accompagnement
nécessaires, le taux opposable pourrait bien se transformer en un simple
indicateur budgétaire, fixé sous l'inspiration du
ministère des finances, qui risquerait, à terme, de
remettre
en question la survie des associations
, au lieu de devenir un instrument de
bonne gestion.
a) Le nécessaire bilan du coût résultant des diverses normes techniques
Parmi
les dépenses " subies " par les associations, il faut
souligner l'incidence des
normes techniques,
d'origines diverses, qui
conduisent à engager régulièrement des dépenses
d'investissement en fonction des mises à jour successives.
Aucune coordination ne semble être assurée pour éviter que
ne convergent vers les associations et par conséquent sur les
collectivités locales responsables, des demandes de remises aux normes
impératives qui peuvent conduire à des engagements de
responsabilité en cas de carence.
Dans un domaine qui ne relève pas directement de cet avis mais qui est
illustratif, l'UNIOPSS souligne que, compte tenu de l'accroissement des
situations de dépendance, les établissements d'hébergement
des personnes âgées conçus pour des personnes valides ne
sont plus aujourd'hui aux normes et que, faute d'aide, 20 % des
établissements seraient menacés de fermeture. De même les
établissements pour handicapés font l'objet de rénovation
pour s'adapter à de nouvelles normes de sécurité.
Il a été précisé à votre rapporteur, dans
les réponses aux questionnaires budgétaires sur l'incidence du
coût des normes techniques, que la rénovation avait
concerné plus particulièrement les établissements pour
enfants handicapés ou inadaptés. Ces derniers ont
bénéficié durant les années 1991 à 1995
d'une marge spécifique de financement dans les taux d'évolution
des dépenses prises en charge par l'assurance maladie de l'ordre de
0,3 point. Il conviendrait pour l'avenir de définir clairement,
chaque année, quelle sera la part du taux directeur opposable qui sera
consacrée aux rénovations dues aux normes.
Sur ce point, il est à noter que la loi n° 75-535 du
30 juin 1975 est encore insuffisante puisqu'elle se borne à
préciser que les normes minimales quantitatives et qualitatives des
établissements sont fixées par décret et que seuls le
comité national ou les comités régionaux d'organisation
sanitaire et sociale peuvent déroger à ces normes. Il
conviendrait de créer une instance qui recenserait de manière
exhaustive les différentes normes et en évaluerait les
coûts induits dans le secteur social et médico-social.
b) L'analyse des dépenses de personnel dans le cadre des conventions collectives
Le
second point de débat porte sur l'évolution des dépenses
de personnel dans le cadre des
conventions collectives
.
• Comme votre rapporteur l'a souligné les années
précédentes, un facteur incompressible d'évolution de la
dépense aux cours des prochaines années tient au
glissement-vieillesse-technicité
(GVT) qui entraînera
inéluctablement une progression de un à deux points par an de la
dépense de personnel.
Les effets du glissement-vieillesse-technicité
D'une
manière générale, le coût des mesures individuelles,
c'est-à-dire des mesures d'ancienneté et de promotion des agents
est mesuré par le glissement-vieillesse-technicité.
La masse des rémunérations évolue en raison des variations
des caractéristiques des personnes employées ; ce
phénomène est connu sous le nom de
glissement-vieillesse-technicité (GVT), qui se compose :
-
d'un effet de carrière
(ou GVT positif), qui retrace
l'incidence positive sur la masse salariale des avancements et promotions dont
bénéficient régulièrement les fonctionnaires ;
-
d'un effet de noria
(ou GVT négatif) qui traduit
l'incidence généralement négative sur la masse salariale
du jeu des entrées-sorties.
La somme algébrique des deux effets constitue
l'effet de
structure
(ou GVT solde) : il permet d'apprécier l'évolution
effective de la masse salariale due aux variations de structure de la
population étudiée.
Il est frappant de constater que de 1991 à 1996, le GVT
" positif " de la fonction publique de l'Etat n'est jamais
inférieur à 1,8 % et que de 1993 à 1996 il a toujours
été supérieur à la hausse de l'indice des prix
à la consommation.
L'effet " GVT positif " est également non négligeable
dans le secteur couvert par les
conventions collectives
du secteur
social et médico-social puisqu'il explique entre 0,8 et 1,3 point
l'augmentation de la rémunération moyenne des personnels en place
(RMPP) de 1991 à 1995.
Il devient essentiel de procéder à une évaluation
objective du coût des réformes engagées récemment
notamment de la réduction du temps de travail, du nouveau mode de calcul
des heures de veille et des emplois-jeunes.
• D'une manière générale, il est frappant de
constater que diverses dispositions contraignantes, telles que la prise en
compte du glissement GVT ou les normes d'encadrement, aboutissent à
donner au personnel de droit privé du secteur associatif un statut qui
est très proche de celui d'une " quasi-fonction publique "
alors que le recours aux associations devrait justement permettre de rendre la
gestion du personnel plus souple.
Il est symptomatique à cet égard que les personnels des
associations employés dans les départements d'outre-mer
bénéficient d'un coefficient multiplicateur du salaire, qu'ils
soient originaires de la métropole ou résidants permanents des
DOM, à l'image de ce qui existe pour les fonctionnaires.
Il convient de rappeler que les fonctionnaires de l'Etat qui servent dans les
départements, territoires et collectivités territoriales ont
droit à une rémunération majorée instituée
par un ensemble de dispositions législatives (lois du 3 avril 1950
pour les DOM et du 30 juin 1950 pour les TOM) et réglementaires. En
particulier, il est appliqué au traitement un coefficient multiplicateur
de 40 % en Guadeloupe, en Martinique et en Guyane et de 35 % à
la Réunion, ceci que l'agent public soit affecté depuis la
métropole ou résident permanent de la
collectivité
15(
*
)
.
Selon les informations fournies à votre rapporteur au cours de ses
auditions, un coefficient multiplicateur serait également
appliqué aux personnels des associations gestionnaires
d'établissements sociaux et médico-sociaux dans les DOM, ce qui
conduirait à
des niveaux significativement élevés des
prix de journée par rapport à la métropole
.
La mise en oeuvre du taux directeur doit donc être accompagnée
d'une remise à plat des situations accompagnées de mesures
correctrices, si nécessaire dans la plus grande transparence.
• Enfin, il est impératif de
mieux associer les
collectivités locales
à la procédure d'agrément
qui permet au ministre de l'emploi et de la solidarité de rendre
applicables les avenants aux conventions collectives. Elles doivent obtenir des
informations complètes et fiables sur les conséquences
financières des avenants qui sont présentés pour avis
à la commission consultative prévue à l'article 16
préalablement à l'agrément par le ministre.
La Cour des Comptes a montré que les accords Durafour avaient
été étendus en décembre 1992 aux secteurs social et
médico-social,
sans que les conséquences eussent
été réellement mesurées pour les finances
départementales
.
La transposition des protocoles " Durieux-Durafour "
Une
circulaire du 23 décembre 1991 et deux décrets du 2 janvier 1992
ont étendu aux agents du secteur social et médico-social le
bénéfice du protocole " Durieux-Durafour " sur
l'amélioration des conditions de vie et de travail des personnels de la
fonction publique hospitalière.
Le but poursuivi était d'aligner le régime salarial des
personnels des établissements sociaux et médico-sociaux avec
celui des personnels salariés des établissements publics
sanitaires.
Cet objectif de parité entre le personnel de droit privé des
institutions sociales et médico-sociales et celui du personnel sous
statut de la fonction publique hospitalière est, au demeurant, reconnu
par les conventions collectives. C'est ainsi que l'article 36 de la
convention du 15 mars 1966 prévoit que "
les organisations
signataires se réuniront au moins chaque fois qu'interviendra une
modification des traitements et classements du secteur public de
référence, pour en déterminer obligatoirement les
incidences sur la présente convention ".
Sur la base du décret de janvier 1992, les partenaires sociaux ont
conclu en mars 1992 des avenants aux conventions collectives de 1951 et 1966,
lesquels, conformément à l'article 16 de la loi du 30 juin 1975
ont obtenu un agrément du ministre en 1992 et 1993.
Ces
décisions semblent avoir été prises, selon la Cour des
Comptes, sans que les services du ministère ne puissent
appréhender l'incidence de cette extension du protocole
" Durafour " sur les finances départementales et sans que les
marges de manoeuvre budgétaires des départements ne soient prises
en compte.
Ces accords ont eu
un coût salarial direct
auquel s'est
surajouté le
caractère rétroactif
de certaines
augmentations ce qui a conduit à creuser de soudains déficits
dans le budget des établissements. La rétroactivité a
fonctionné comme un véritable piège budgétaire et
comptable en conduisant à créer de soudains déficits dans
la gestion du budget social des établissements.
Les accords Durafour sont largement à l'origine de la forte
dérive des coûts dans le secteur social et médico-social
constatée à partir de 1992.
S'agissant de la mise en oeuvre des trente-cinq heures
, votre
commission ne ressent pas aujourd'hui la volonté du Gouvernement de
subordonner l'approbation des avenants à une
évaluation
préalable des conséquences financières de ces
dispositifs
.
Sur les normes aussi bien que sur les dépenses de personnel, l'Etat
doit ouvrir de véritables " tables rondes " et accepter
d'assumer les conséquences de décisions qu'il prend et qui vont
obérer les enveloppes budgétaires des gestionnaires
d'établissement encadrés par un taux directeur opposable.
L'Etat doit accepter de neutraliser, dans le calcul de ce taux, les coûts
structurels nouveaux qu'il impose au secteur social et médico-social.
De fait, bien que l'UNIOPSS émette de nombreuses critiques à
l'égard du taux directeur, votre rapporteur souligne qu'au fond, les
objectifs ne sont pas sur le fond éloignés, dans la mesure
où il considère que le taux directeur n'est pas une fin en soi,
mais un instrument permettant d'assurer, de manière plus transparente,
une meilleure gestion des établissements et surtout d'obliger l'Etat
à tenir compte de tous les aspects de cette gestion.
3. Le taux directeur opposable doit être étendu à l'ensemble du secteur social et médico-social
Si le
Gouvernement avait pu engager, au cours de 1998, la discussion de la
réforme de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975, la mise en
place du taux directeur aurait assurément pu s'inscrire dans une
réflexion d'ensemble.
Il reste que le taux directeur opposable maintenant annoncé au Parlement
depuis deux ans et préparé sur le terrain par la mise en place
progressive d'enveloppes prévisionnelles de dépenses, est
prêt à entrer en vigueur.
Il serait regrettable de perdre encore une année avant d'appliquer un
dispositif utile.
Votre commission estime donc qu'il est important d'appliquer la mesure
globalement à l'ensemble du secteur social et médico-social, ceci
quelle que soit l'origine du financement : la régulation par enveloppe
limitative a été introduite pour l'assurance maladie à
l'article 27 du projet de loi de financement de la sécurité
sociale et pour le financement sur le budget de l'Etat par l'article 84 du
projet de loi de finances.
Votre commission vous proposera d'adopter un amendement afin de rendre le taux
directeur opposable applicable dans les établissements sociaux et
médico-sociaux financés par les départements.
*
* *
Compte tenu des analyses et observations exposées ci-dessus, votre commission a décidé d'émettre un avis défavorable à l'adoption des crédits de la solidarité pour 1999.