N° 70
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès-verbal de la séance du 19 novembre 1998.
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi de finances pour 1999 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
TOME I
SOLIDARITÉ
Par M. Jean CHÉRIOUX,
Sénateur.
(1)
Cette commission est composée de :
MM. Jean Delaneau,
président
; Jacques Bimbenet, Louis Boyer, Mme Marie-Madeleine
Dieulangard, MM. Guy Fischer, Jean-Louis Lorrain, Louis Souvet,
vice-présidents
; Mme Annick Bocandé, MM. Charles
Descours, Alain Gournac, Roland Huguet,
secrétaires
; Henri
d'Attilio, François Autain, Paul Blanc, Mme Nicole Borvo, MM.
Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Gilbert Chabroux, Jean Chérioux,
Philippe Darniche, Christian Demuynck, Claude Domeizel, Jacques Dominati,
Michel Esneu, Alfred Foy, Serge Franchis, Francis Giraud, Claude Huriet,
André Jourdain, Philippe Labeyrie, Roger Lagorsse, Dominique Larifla,
Henri Le Breton, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Simon Loueckhote, Jacques
Machet, Georges Mouly, Lucien Neuwirth, Philippe Nogrix, Mme Nelly Olin, MM.
Lylian Payet, André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de
Raincourt, Bernard Seillier, Martial Taugourdeau, Alain Vasselle, Paul
Vergès, André Vezinhet, Guy Vissac.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
1078
,
1111
à
1116
et T.A.
193
.
Sénat
:
65
et
66
(annexe n°
19
)
(1998-1999).
Lois de finances.
TRAVAUX DE LA COMMISSION
I. AUDITION DU MINISTRE
Réunie le
mercredi 21 octobre 1998
, sous la
présidence de M. Jean Delaneau, président,
la commission a
procédé à
l'audition de Mme Martine Aubry, ministre de
l'emploi et de la solidarité, sur les crédits de son
département ministériel.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a
déclaré tout d'abord que le recul du chômage constituait la
priorité du Gouvernement et que le projet de budget du ministère
avait été construit autour de cet objectif. Elle a observé
que l'augmentation de 4 % de ses crédits était deux fois
plus forte que la norme imposée à l'ensemble du budget de l'Etat.
Elle a remarqué que les trois priorités majeures à
financer en 1999, à savoir les emplois-jeunes, les aides à la
réduction du temps de travail et le programme de lutte contre les
exclusions, requéraient à elles seules un budget
complémentaire de l'ordre de 13 milliards de francs, alors que la
hausse des crédits du ministère ne représentait que
6,26 milliards de francs.
Elle a observé que ses services avaient procédé à
d'importants redéploiements de crédits pour parvenir à ce
résultat.
Evoquant les volets de son budget relatif à la santé et à
la solidarité,
Mme Martine Aubry
a indiqué que les
crédits correspondants, hors politique de la ville, atteignaient presque
80 milliards de francs.
Elle a précisé que ce montant comprenait pour 4,23 milliards
de francs la prise en charge par l'Etat de l'allocation parent isolé
(API) afin de compenser l'effet du retour à l'universalité des
prestations familiales sur les dépenses de la branche famille de la
sécurité sociale.
Evoquant les crédits relatifs à la solidarité, elle a
rappelé, au titre de la lutte contre l'exclusion, le financement du
programme TRACE, l'abondement de 120 millions de francs des fonds d'aide
aux jeunes (FAJ), ainsi que l'amélioration des crédits
d'accompagnement social individualisé (ASI).
Elle a mis l'accent sur les mesures d'extension du dispositif de veille et
d'accueil d'urgence et de développement des résidences sociales.
Rappelant que les Centres d'hébergement et de réadaptation
sociale (CHRS) demeuraient essentiels pour l'accueil et la réinsertion
sociale des plus démunis, elle a indiqué que le projet de budget
permettrait de transformer 500 places d'accueil d'urgence en places de
CHRS et de consacrer 75 millions de francs à la rénovation
et à la mise aux normes des centres vétustes ou inadaptés.
Elle a précisé en outre que 100 places nouvelles seraient
créées dans les Centres d'accueil des demandeurs d'asile (CADA).
Rappelant la nécessité de mieux coordonner l'action des
organismes qui dispensent des aides de secours aux personnes en situation de
détresse, elle a évoqué la création des commissions
d'aide sociale d'urgence par la loi d'orientation relative à la lutte
contre les exclusions, en précisant que le budget 1999 créait
80 emplois d'inspecteurs des affaires sociales ou de conseillers
techniques de service social qui seraient installés dans les
20 Directions départementale de l'action sanitaire et sociale
(DDASS) les plus sollicitées.
En matière d'accès aux soins, elle a indiqué que dans
l'attente de la couverture maladie universelle, un dispositif novateur sous la
forme de programmes régionaux d'accès à la
prévention et aux soins était mis en place afin d'amener le
système de santé à prendre en compte la
précarité, avec les pathologies et les risques qu'elle engendre,
sans jamais stigmatiser les personnes qui souffrent.
Insistant sur les décloisonnements au sein du ministère qui
seraient entraînés par la lutte contre l'exclusion, elle a
souligné la mobilisation intensive des dispositifs d'insertion vers
l'emploi au profit des allocataires du RMI et, en particulier, des 10 %
d'allocataires qui sont dans le dispositif depuis sa création.
Espérant une stabilisation du nombre des bénéficiaires du
RMI en fin d'année, elle a rappelé que l'évolution
était encore élevée au premier trimestre 1998 et que la
dotation budgétaire avait dû être revalorisée en
conséquence.
S'agissant de l'action en faveur des personnes handicapées, elle a
précisé que 2.000 places de centres d'aide par le travail
(CAT) seraient créées en 1999.
Signalant l'augmentation de la dotation relative à l'allocation aux
adultes handicapés (AAH), elle a précisé que
l'article 83 du projet de loi de finances entraînerait une
économie induite au titre de l'AAH de 300 millions de francs
environ sur cinq ans.
Concernant la famille,
Mme Martine Aubry
a indiqué que, outre la
prise en charge de l'API, les crédits d'action sociale consacrés
à la famille s'accroissaient de 63 millions de francs en faveur des
actions de soutien de la fonction parentale.
Elle a souhaité mentionner enfin l'action en faveur des droits des
femmes dans les domaines de l'égalité professionnelle et de la
contraception.
M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis des crédits de la
solidarité,
s'est demandé quelles conditions seraient
posées par le ministère pour agréer les conventions
collectives appliquant la réduction du temps de travail dans le secteur
social et médico-social. Il s'est interrogé sur la mise en place
d'un taux directeur opposable aux dépenses des établissements
sociaux et médico-sociaux financées par les départements.
Il s'est interrogé sur les difficultés soulevées par le
décret du 23 avril 1998 en matière de tutelle et de
curatelle d'Etat. Enfin, il a regretté la baisse sensible du niveau de
l'allocation aux adultes handicapés (AAH) versée à compter
du 60ème jour d'hospitalisation pour les personnes devant continuer
à assumer des frais fixes.
Mme Martine Aubry
a tout d'abord indiqué qu'elle n'avait pas
défini de critères a priori pour approuver ou non les conventions
collectives des personnels du secteur social et médico-social. Elle a
indiqué qu'elle était attachée à
l'amélioration, ou au moins à la préservation de la
qualité des services rendus, ainsi qu'à l'engagement d'une
réflexion sur les modes d'organisation des établissements. Elle a
précisé qu'une mission d'appui avait été
confiée à l'IGAS pour faciliter la mise en place de la
réduction du temps de travail dans le secteur couvert par la loi du
30 juin 1975.
Concernant la régulation des dépenses, elle a indiqué que
le taux directeur opposable rendu applicable aux dépenses couvertes par
l'assurance maladie par le projet de loi de financement de la
sécurité sociale avait vocation à être étendu
aux dépenses relevant du budget de l'Etat ou des départements.
En matière de tutelle et de curatelle, elle a indiqué que le
décret du 23 avril 1998, qui visait à diversifier les
sources de financement des mesures en question, avait vu son application
suspendue afin d'approfondir l'analyse des problèmes du secteur. A cet
effet, un bilan a été confiée à l'inspection
générale des finances, à l'IGAS et à l'inspection
générale des services judiciaires, qui servirait de base à
une concertation avec les associations tutélaires.
Concernant l'AAH, elle a indiqué que la question évoquée
par M. Jean Chérioux concernait 3 % des 630.000
bénéficiaires de l'AAH qui relevaient souvent d'une
hospitalisation psychiatrique de longue durée. Rappelant qu'il
n'était pas prévu d'atténuation du montant de l'AAH
lorsque la personne concernée avait un enfant à charge, elle
s'est néanmoins engagée à examiner la question.
M. Charles Descours
a demandé des précisions sur la
couverture maladie universelle.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard
s'est félicitée du
fonctionnement des commissions départementales des aides d'urgence.
Mme Nicole Borvo
a approuvé les dispositions financières
prises en matière d'urgence sociale, notamment pour distribuer des fonds
aux personnes les plus en difficulté. En revanche, elle a
regretté que le montant du plafond du RMI n'ait pas été
significativement relevé, même si la dotation globale est en
hausse cette année.
Evoquant le projet de couverture médicale universelle,
Mme Martine
Aubry
a indiqué qu'à la suite de la présentation d'un
rapport par M. Jean-Claude Boulard, elle avait demandé à ce
dernier de poursuivre son travail en ayant des contacts approfondis avec,
notamment, les conseils généraux, les assureurs et les
groupements mutualistes. Elle a indiqué que 400 à
500.000 personnes pourraient bénéficier de cette couverture
et qu'un projet de loi serait déposé dans les prochaines semaines.
S'agissant des commissions d'urgence sociale,
Mme Martine Aubry
a
indiqué que celles-ci avaient vocation à accorder directement une
aide d'urgence dès lors que les organismes présents
étaient en mesure de le faire et que dans le cas contraire elles
devaient accompagner la personne en difficulté pour l'aider à
constituer son dossier et l'orienter vers le guichet adéquat.
Concernant les commissions départementales de coordination, elle a
souligné que dans certains départements, les familles en
difficulté étaient mal repérées et qu'une mise en
coordination des différentes instances permettrait de mieux suivre les
intéressés, ainsi que d'éviter la fraude.
S'agissant du RMI, elle a rappelé que les montants des minima sociaux
seraient réévalués dans les conditions prévues par
la loi. Elle a précisé que l'augmentation de la dotation
était causée par l'accroissement des effectifs des titulaires du
RMI en 1998, même si un infléchissement du niveau des
entrées était observé depuis quelques mois.
Elle a mis l'accent sur les résultats positifs de l'opération de
suivi spécifique des personnes qui bénéficient du RMI sur
une longue durée.