Avis n° 45 (2021-2022) de M. Pascal MARTIN et Mme Nicole BONNEFOY , fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, déposé le 12 octobre 2021

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N° 45

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2021-2022

Enregistré à la Présidence du Sénat le 12 octobre 2021

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (1) sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à réformer le régime d' indemnisation des catastrophes naturelles ,

Par M. Pascal MARTIN et Mme Nicole BONNEFOY,

Sénateur et Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-François Longeot , président ; M. Didier Mandelli, Mmes Nicole Bonnefoy, Marta de Cidrac, MM. Joël Bigot, Rémy Pointereau, Frédéric Marchand, Guillaume Chevrollier, Mme Marie-Claude Varaillas, MM. Jean-Pierre Corbisez, Pierre Médevielle, Ronan Dantec , vice-présidents ; M. Cyril Pellevat, Mme Angèle Préville, MM. Pascal Martin, Bruno Belin , secrétaires ; MM. Jean-Claude Anglars, Jean Bacci, Étienne Blanc, François Calvet, Michel Dagbert, Mme Patricia Demas, MM. Stéphane Demilly, Michel Dennemont, Gilbert-Luc Devinaz, Mme Nassimah Dindar, MM. Gilbert Favreau, Jacques Fernique, Mme Martine Filleul, MM. Fabien Genet, Hervé Gillé, Éric Gold, Daniel Gueret, Mmes Nadège Havet, Christine Herzog, MM. Jean-Michel Houllegatte, Olivier Jacquin, Gérard Lahellec, Mme Laurence Muller-Bronn, MM. Louis-Jean de Nicolaÿ, Philippe Pemezec, Mmes Évelyne Perrot, Marie-Laure Phinera-Horth, Kristina Pluchet, MM. Jean-Paul Prince, Bruno Rojouan, Mme Denise Saint-Pé, MM. Philippe Tabarot, Pierre-Jean Verzelen .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) :

3688 , 3785 et T.A. 557

Sénat :

325 (2020-2021)

L'ESSENTIEL

La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, réunie le mardi 12 octobre 2021, sous la présidence de Jean-François Longeot a examiné le rapport pour avis de Pascal Martin et Nicole Bonnefoy sur la proposition de loi visant à réformer le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, adoptée par l'Assemblée nationale le 28 janvier 2021, après engagement de la procédure accélérée.

La commission se satisfait de plusieurs évolutions apportées par ce texte, qui permettront de renforcer la transparence sur l'instruction des demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, de mieux accompagner les communes face à la gestion de tels évènements et d'améliorer la prise en charge des dommages par les assureurs .

Toutefois, elle a formulé plusieurs réserves et regrets .

D'abord, la commission considère que ce sujet aurait pu et dû être traité plus tôt : après l'adoption de la proposition de loi visant à réformer le régime des catastrophes naturelles de Nicole Bonnefoy et des membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain (SER), le 15 janvier 2020 à l'unanimité des présents, prolongeant les travaux de la mission d'information du Sénat sur la gestion des risques climatiques , présidée par Michel Vaspart et dont Nicole Bonnefoy était rapporteure, c'est la deuxième fois en moins de deux ans que la commission et le Sénat sont amenés à se prononcer sur des dispositions législatives modifiant les mêmes bases légales et avec les mêmes objectifs. La commission regrette que le Gouvernement n'ait pas « joué le jeu » du bicamérisme , qui fait la force du travail parlementaire, en repartant du texte du Sénat transmis en janvier 2020, plutôt qu'en soutenant une proposition de loi concurrente, enregistrée le 14 décembre 2020 à la présidence de l'Assemblée nationale. Du temps a donc été perdu .

Ensuite, la commission regrette que le texte comporte deux angles morts béants . D'une part, la dimension financière du texte est très limitée et il n'y a pas de mesures d'accompagnement sur le volet de la prévention des risques et du renforcement de la résilience du bâti face aux aléas naturels. D'autre part, les mesures relatives au traitement et à l'indemnisation des dommages résultant des mouvements de terrain consécutifs à des phénomènes de sécheresse-réhydratation des sols argileux ne sont pas à la hauteur des défis. En soutenant la demande de rapport inscrite à l'article 7, le Gouvernement montre qu'il n'a toujours pas pris la mesure des enjeux considérables tant pour les habitants des zones concernées que pour les élus. Les sénateurs de la commission ont partagé leur incompréhension face à des travaux administratifs qui se multiplient depuis 30 ans mais qui n'aboutissent jamais. Ce texte n'est donc qu'une réponse embryonnaire aux fortes attentes de nos concitoyens .

Sous le bénéfice de ces observations et sous réserve des 10 amendements qu'elle a adoptés sur les 3 articles délégués au fond, dont 8 du rapporteur Pascal Martin, la commission a émis un avis favorable à l'adoption de la proposition de loi.

I. LA RECONNAISSANCE ET L'INDEMNISATION DES CATASTROPHES NATURELLES : UN RÉGIME À BOUT DE SOUFFLE QUE LE SÉNAT PROPOSE DE RÉFORMER DEPUIS 2019

A. UNE RÉFORME NÉCESSAIRE ET ATTENDUE DU RÉGIME « CATNAT »

Le régime actuel d'indemnisation des victimes de catastrophe naturelle, défini par la loi du 13 juillet 1982 , repose sur le principe de solidarité affirmé dans le Préambule de la Constitution de 1946. Ce cadre a connu plusieurs évolutions et demeure d'actualité dans son principe. Toutefois, l'ensemble des parties prenantes (citoyens, parlementaires, fonctionnaires) s'accordent à reconnaître qu'il est aujourd'hui dépassé et souffre de faiblesses importantes , qui ne permettent pas aux victimes de catastrophes naturelles de pleinement faire valoir leur droit à réparation. La complexité des procédures , leur opacité e t leur inadaptation face à l'ampleur prise par certains risques naturels, à l'image des mouvements de terrain consécutifs de la sécheresse-réhydratation des sols argileux, justifient une intervention du législateur. D'ailleurs, aucune des initiatives législatives engagées depuis le début des années 2000 n'a abouti à ce jour 1 ( * ) .

B. UN TRAVAIL IMPORTANT RÉALISÉ AU SÉNAT ET UNANIMEMENT SALUÉ

Dans le prolongement des travaux de la mission d'information sur la gestion des risques climatiques et l'évolution de nos régimes d'indemnisation, présidée par Michel Vaspart et dont Nicole Bonnefoy était rapporteure, le groupe SER avait déposé une proposition de loi visant à réformer le régime des catastrophes naturelles le 27 novembre 2019 au Sénat. Ce texte avait été adopté par le Sénat à l'unanimité des présents moins une abstention le 15 janvier 2020 (texte n° 46, 2019-2020).

C. LE DÉPÔT D'UN TEXTE CONCURRENT PAR LES DÉPUTÉS, AVEC LE SOUTIEN DU GOUVERNEMENT

Le 14 décembre 2020, Stéphane Baudu et plusieurs députés du groupe Modem ont déposé un texte sur le même sujet, qui a été examiné dans le cadre de la niche de ce groupe à l'Assemblée nationale. C'est ce véhicule juridique qui a été privilégié par le Gouvernement pour aboutir à une réforme du régime des catastrophes naturelles d'ici la fin de la législature , par rapport à la proposition de loi de Nicole Bonnefoy. Outre le fait que la procédure accélérée n'avait pas été engagée pour l'examen de la proposition de loi de Nicole Bonnefoy en première lecture au Sénat, le Gouvernement avait indiqué être opposé à plusieurs de ses dispositions lors de son examen au Sénat.

Si la commission comprend que des divergences existaient sur la proposition de loi précitée, elle considère que le Gouvernement n'a pas « joué le jeu » du bicamérisme, en repartant d'un texte nouveau. Il aurait pourtant été plus rapide d'inscrire le texte du Sénat à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale et de le modifier dans le sens souhaité par la majorité présidentielle.

La proposition de loi n° 325 (2020-2021) visant à réformer le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, enregistrée à la Présidence du Sénat le 29 janvier 2021, comporte 8 articles , après son examen par les députés.

II. LES ARTICLES DU TEXTE TRAITÉS PAR LA COMMISSION

La commission a travaillé en étroite collaboration avec la commission des finances, comme lors de l'examen de la proposition de loi précitée de Nicole Bonnefoy et des membres du groupe SER en 2019, dont elle a reçu une délégation au fond pour traiter les articles 2, 4 et 7 du texte .

Elle s'est également saisie pour avis des articles 1 er (renforcement de la transparence de la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, motivation des décisions interministérielles, communication des rapports d'expertise) et 8 (extension de 18 à 24 mois du délai laissé aux communes pour présenter leurs demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle), qui reprennent des dispositions présentes dans la PPL précitée de Nicole Bonnefoy.

L 'article 2 tend à créer un référent préfectoral à l'indemnisation des catastrophes naturelles , dont le rôle sera d'informer, de conseiller et d'accompagner les communes. L' article 4 vise à inscrire dans la loi la Commission interministérielle de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle , créée en 1984, et tend à créer une Commission nationale consultative des catastrophes naturelles , chargée de rendre des avis annuels sur la pertinence des critères appliqués. L' article 7 prévoit la remise d'un simple rapport du Gouvernement au Parlement sur la sécheresse-réhydratation des sols argileux.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION : CONFORTER LES APPORTS DES DÉPUTÉS ET AVANCER SUR LE CHEMIN D'UNE MEILLEURE PRISE EN COMPTE DU RETRAIT-GONFLEMENT DES ARGILES

A. DES AVANCÉES À CONFORTER ET À APPROFONDIR, AU BÉNÉFICE DES COMMUNES ET DES SINISTRÉS

Dans l'objectif de conforter et d'améliorer les dispositions qui lui sont soumises par les députés, la commission a adopté 8 amendements , dont 6 à l'initiative du rapporteur Pascal Martin .

À l' article 2 , la commission a adopté 4 amendements , dont 3 du rapporteur visant à :

- prévoir l'intervention du référent préfectoral auprès des communes même lorsque celles-ci n'ont pas obtenu satisfaction de leurs demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle ( amendement COM-21 ) ;

- marquer l'importance de la mission du référent préfectoral en ce qui concerne l'information des collectivités territoriales (communes, département), des habitants, des entreprises et des sinistrés à la fois pour la gestion et la prévention des catastrophes naturelles. Le référent devra aussi informer les communes régulièrement sur les conditions d'utilisation du fonds de prévention des risques naturels majeurs dans le département ( amendements COM-22 et COM-23 ) ;

- réintroduire l'article 5 de la proposition de loi précitée de Nicole Bonnefoy , portant création d'une cellule de soutien aux maires face aux catastrophes naturelles, dans chaque département ( amendement COM-7 de Dominique Estrosi Sassone et plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains - LR).

À l' article 4 , la commission a adopté 4 amendements , dont 3 du rapporteur pour :

- prévoir explicitement la présence de représentants des sinistrés au sein de la Commission nationale consultative des catastrophes naturelles, supprimer la présence de parlementaires en son sein et lui permettre de procéder à l'audition de toute personne qui serait utile à ses travaux ( amendement COM-24 ) ;

- préciser et renforcer le rôle de la nouvelle Commission consultative nationale des catastrophes naturelles, s'agissant de l'évaluation des conditions d 'indemnisation des sinistrés , dans un souci de transparence ( amendement COM-25 ) ;

- accroître la transparence sur l'instruction des demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle ( amendement COM-26 ) ;

- prévoir la publicité des comptes rendus des débats de la Commission interministérielle ( amendement COM-9 rect . de Dominique Estrosi Sassone et plusieurs sénateurs du groupe LR).

B. ENRICHIR LE TEXTE POUR MIEUX APPRÉHENDER LES MOUVEMENTS DE TERRAIN LIÉS AU RETRAIT-GONFLEMENT DES ARGILES (RGA)

Le phénomène RGA pose des défis considérables à la politique de prévention des risques.

Selon un constat unanimement partagé, le régime « CatNat » n'est pas adapté à la prise en compte de ce phénomène. Des progrès ont été réalisés dans la connaissance scientifique du phénomène mais son appréhension dans nos politiques publiques demeure partielle et non satisfaisante . Cette situation alimente un légitime sentiment d'incompréhension et d'opacité chez les élus locaux par rapport à l'instruction de leurs demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle.

La mission d'information sénatoriale sur la gestion des risques climatiques avait recommandé à titre principal :

- d'organiser une campagne d'information sur le risque de RGA pour sensibiliser massivement la population (proposition 49) ;

- de mettre à l'étude la mise en place d'un dispositif dédié au risque « sécheresse » au sein du Fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit fonds « Barnier » , pour financer les travaux des particuliers (proposition 55).

La commission regrette que ce texte ne permette pas de traiter effectivement les problématiques connues de longue date liées au RGA, qui vont en outre fortement s'accentuer dans les années à venir avec le réchauffement climatique .

La nouvelle carte d'exposition au RGA, réalisée en 2019, permet de cerner 93 % de la sinistralité potentielle, concentrée sur 48 % du territoire métropolitain.

Sources : ministère de la transition écologique,
ministère de l'intérieur, Caisse centrale de réassurance.

Au regard de la nécessité de mener des consultations approfondies avant toute réforme ambitieuse, ce que les délais d'examen du présent texte au Sénat ne permettaient pas, le rapporteur n'a pas souhaité proposer de modification d'ampleur du régime d'indemnisation du RGA. Le rapporteur s'est notamment interrogé sur l'opportunité de généraliser un diagnostic obligatoire de vulnérabilité pour les constructions existantes situées dans des zones fortement exposées au RGA. La prise en charge financière de telles opérations demeure cependant un point de difficulté à ce stade.

Toutefois, afin d'avancer sur le chemin d'une meilleure connaissance locale et d'une meilleure prévention du risque RGA , la commission a adopté un amendement COM-27 du rapporteur pour prévoir :

- l'établissement d'une liste des EPCI à fiscalité propre les plus exposés à ce phénomène (aléa fort, représentant 12 405 communes, 35,2 % des communes) ;

- l'obligation, pour le préfet de département, de réaliser un schéma de prévention des risques naturels majeurs spécifiquement pour ces EPCI exposés au RGA, alors que l'élaboration de ce schéma n'est actuellement qu'une faculté. Seule une dizaine de départements a mis en place un tel schéma. La commission souhaite que cette disposition soit utilisée effectivement ;

- l'obligation, pour le référent préfectoral, de réaliser une cartographie locale du RGA, à la maille intercommunale ;

- l'intervention d'un décret visant à préciser les conditions dans lesquelles les habitants des zones concernées pourront être accompagnés dans la connaissance de la vulnérabilité de leurs biens (diagnostic) et le renforcement de sa résilience face au RGA (travaux, etc.) par le fonds « Barnier » ou d'autres dispositifs existants .

Elle a adopté un second amendement COM-28 du rapporteur, visant à enrichir le contenu du rapport remis au Parlement, pour que celui-ci aille au-delà d'un catalogue de constats d'un intérêt limité pour le législateur, comme pour les services de l'État.

Source : ministère de l'intérieur

EXAMEN DES ARTICLES

TITRE IER
Faciliter les démarches de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle et renforcer la transparence des décisions
Article 2 (délégué)

Institution d'un référent à l'indemnisation des catastrophes naturelles

Cet article tend à instituer un référent à l'indemnisation des catastrophes naturelles auprès du représentant de l'État dans le département, chargé d'appuyer et de conseiller les communes dans leurs démarches de mobilisation des dispositifs d'aide et d'indemnisation après la survenue d'une catastrophe naturelle ainsi que de promouvoir une meilleure information sur ces dispositifs auprès des habitants, des entreprises et des associations de sinistrés. Il prévoit également la mise à disposition des communes, dans un délai d'un an, de supports de communication à destination des habitants sur les modalités d'indemnisation des évènements reconnus comme catastrophes naturelles.

Les députés ont apporté plusieurs modifications rédactionnelles tendant à préciser les missions et à élargir le champ d'intervention de ce référent, qualifié dans le texte initial de « délégué à la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle ».

La commission a souhaité conforter ces apports et la solution de « référent préfectoral » proposée par le texte, qui rejoint les mêmes objectifs que ceux poursuivis par la proposition de loi n° 46 de Nicole Bonnefoy et plusieurs de ses collègues, adoptée par le Sénat le 14 janvier 2020. Elle a ainsi adopté 3 amendements visant à :

- améliorer la rédaction des alinéas 2 à 4 et prévoir l'intervention du référent auprès des communes même lorsque celles-ci n'ont pas vu leurs demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle satisfaites ;

- marquer l'importance de la mission du référent préfectoral en ce qui concerne l'information des collectivités territoriales (communes, département), des habitants, des entreprises et des associations de sinistrés non seulement sur les modalités de gestion des catastrophes naturelles mais aussi sur les modalités de leur prévention. Le référent devra également informer les communes sur l'utilisation du fonds de prévention des risques naturels majeurs dans le département ;

- améliorer la rédaction de l'alinéa 8 (mise à disposition des communes de supports de communication à destination des habitants) ;

Elle a également donné un avis favorable à l'adoption d'un amendement de Dominique Estrosi Sassone et plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains visant à créer une cellule de soutien aux collectivités territoriales, dans chaque département, reprenant l'article 5 de la proposition de loi de Nicole Bonnefoy.

La commission propose à la commission des finances d'adopter l'article 2 ainsi modifié.

I. La nécessité d'un soutien renforcé de l'État aux communes face aux catastrophes naturelles

A. Une procédure complexe et opaque, des communes insuffisamment accompagnées

Lors de la survenue d'évènements climatiques exceptionnels pouvant être reconnus comme catastrophes naturelles, les maires peuvent se retrouver démunis lorsqu'ils doivent à la fois gérer les conséquences immédiates des sinistres et soutenir les personnes touchées , comme l'avait rappelé le rapport de la mission d'information sénatoriale sur la gestion des risques climatiques et l'évolution de nos systèmes d'indemnisation , présidée par Michel Vaspart et dont la rapporteure était Nicole Bonnefoy .

Au plan administratif, le dépôt des demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle et le suivi du dossier (éventuels recours gracieux et contentieux) aux fins d'information de la population, peut s'avérer lourd et complexe , notamment s'il s'agit de dater la survenance de l'évènement naturel en cause en cas d'épisodes de sécheresse . Il incombe également aux maires de mobiliser les différents dispositifs financiers destinés à soutenir les collectivités territoriales en cas de catastrophe naturelle et d'en gérer l'utilisation.

B. L'absence ou l'insuffisance de dispositions satisfaisantes en vigueur au plan réglementaire ou légal nécessite de légiférer pour répondre aux besoins des collectivités

La loi ne prévoit plus de cadre spécifique d'information des communes et des habitants sur la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle et sur les dispositifs d'indemnisation associés.

La commission départementale des risques naturels majeurs ( CDRNM ), dont le cadre juridique a été déclassé de la partie législative 2 ( * ) à la partie réglementaire 3 ( * ) du code de l'environnement en 2004, un an après sa création, 4 ( * ) a pour vocation de contribuer à l'information des élus communaux et intercommunaux qui en sont membres. Elle doit être informée « chaque année, des demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle et de l'utilisation du fonds de prévention des risques naturels majeurs » mais, dans les faits, la fréquence des réunions n'apporte pas l'accompagnement nécessaire : selon les informations recueillies par les rapporteurs, 73 % des départements auraient mis en place une telle commission et la fréquence varierait d'une réunion tous les ans à une réunion tous les 2 ou 3 ans . Qui plus est, cette instance a un objet plus vaste 5 ( * ) que le soutien aux collectivités face aux évènements climatiques exceptionnels reconnus, le cas échéant, comme catastrophes naturelles.

L' article 5 de la proposition de loi déposée par Nicole Bonnefoy et les membres du groupe socialiste , prolongeant les travaux de la mission d'information précitée, avait proposé la mise en place, dans chaque département, d'une cellule de soutien à la gestion des catastrophes naturelles, composée de personnalités qualifiées, d'élus locaux, de représentants de l'État, afin d'aider les maires confrontés à la survenance de tels évènements.

II. Initialement, un « délégué à la reconnaissance » de l'état de catastrophe naturelle

Le présent article s'inspire de la proposition sénatoriale en proposant une voie alternative, en lien avec le préfet de département.

Il vise, d'une part, à introduire dans le code des assurances un article L. 125-1-2 instituant un délégué à la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle auprès du représentant de l'État dans le département et nommé par ce dernier, pour accompagner les communes dans leurs démarches de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. En articulation avec les services de l'État compétents, le délégué est chargé d'une mission d'information, de communication et de conseil pour les communes (I).

D'autre part, il prévoit le lancement d'une campagne d'information par le Gouvernement dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi pour mettre à la disposition des communes des supports de communication à destination des habitants présentant les étapes de la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle et les processus d'indemnisation (II).

III. Après l'examen par les députés, un « référent à l'indemnisation » des catastrophes naturelles

Lors de l'examen du texte en commission des finances de l'Assemblée nationale, seules des modifications rédactionnelles ont été adoptées ( ici et ).

En séance, les députés ont apporté plusieurs évolutions concernant la dénomination , les missions et le champ d'intervention du « délégué préfectoral aux catastrophes naturelles » en adoptant un amendement d'un député du groupe LREM. Cet amendement a conduit à remplacer la notion de « délégué » par celle de « référent » pour mieux distinguer le rôle de ce nouvel acteur préfectoral par rapport aux fonctionnaires bénéficiant d'une délégation de la part d'un préfet, en particulier dans le cadre de la politique de la ville. Ce même amendement a limité le champ d'intervention de ce référent à la gestion des catastrophes naturelles et précisé que celui-ci sera chargé de mobiliser l'ensemble des dispositifs d'aide et d'indemnisation existants susceptibles d'être engagés après la survenance d'une catastrophe naturelle, au-delà des dispositifs entrant dans le champ de la procédure de catastrophe naturelle (dotations, subventions exceptionnelles, fonds d'urgence, etc.). L'amendement élargit également la mission de coordination du référent aux relations avec les assureurs, supprime la mission d'accompagnement des communes dans la constitution des dossiers , qui relève du service d'instruction et supprime son rôle de communication directe des rapports d'expertise , en prévoyant qu'il devra s'assurer que ces rapports ont bien été communiqués.

IV. Une proposition opportune mais qui doit être confortée pour assurer un soutien concret des élus par les services de l'État

La commission a validé la solution proposée au présent article d'instituer un référent préfectoral aux catastrophes naturelles. Elle a toutefois adopté trois amendements du rapporteur Pascal Martin :

- un amendement COM-21 , visant à améliorer la rédaction des alinéas 2 à 4 et à prévoir l'intervention du référent auprès des communes même lorsque celles-ci n'ont pas obtenu satisfaction de leurs demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle , pour assurer aux communes un soutien de l'État dans la mobilisation des dispositifs d'aide et d'indemnisation qui pourraient être engagés pour les soutenir après un évènement climatique exceptionnel ;

- un amendement COM-22 , visant à marquer l'importance de la mission du référent préfectoral en ce qui concerne l'information des collectivités territoriales (communes, département), des habitants, des entreprises et des associations de sinistrés non seulement sur les modalités de gestion des catastrophes naturelles mais aussi sur les modalités de leur prévention . Le référent devra également informer les communes sur les conditions d'utilisation du fonds de prévention des risques naturels majeurs dans le département, afin de relayer au plus près du terrain les informations dont bénéficient les membres de la commission départementale des risques naturels majeurs ;

- un amendement COM-23 , tendant à améliorer l'économie de l'alinéa 8 relatif à la mise à disposition des communes de supports de communication à destination des habitants visant à présenter la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, pour tenir compte de la décision du Conseil constitutionnel n° 2018-772 DC du 15 novembre 2018, et à faire le lien entre la mise à disposition des documents visés au II de l'article 2 et les missions du référent auprès des communes.

La commission propose, enfin, de donner un avis favorable à un amendement COM-7 rect. de Dominique Estrosi Sassone et plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains, tendant à réintroduire l'article 5 de la proposition de loi visant à réformer le régime des catastrophes naturelles précitées de Nicole Bonnefoy et plusieurs de ses collègues du groupe SER, qui vise à créer une cellule de soutien aux collectivités territoriales , dans chaque département, pour conseiller et accompagner les maires dans leurs démarches de prévention et de gestion des catastrophes naturelles.

La commission propose à la commission des finances d'adopter l'article 2 ainsi modifié.

TITRE II
Sécuriser l'indemnisation et la prise en charge des sinistrés
Article 4 (délégué)

Inscription dans la loi de la Commission interministérielle
de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle et création
d'une Commission nationale consultative des catastrophes naturelles

Cet article vise à créer une Commission nationale consultative des catastrophes naturelles, chargée de rendre un avis annuel simple sur les critères utilisés par la Commission interministérielle de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle pour déterminer la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle et à inscrire dans la loi l'existence de cette Commission interministérielle.

Dans l'objectif d'accroître encore davantage la transparence sur l'instruction des dossiers de demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, la commission a adopté 3 amendements du rapporteur, visant à :

- prévoir explicitement la présence de représentants des sinistrés au sein de la Commission nationale consultative des catastrophes naturelles, à supprimer la présence de parlementaires au sein de cette commission et à lui permettre de procéder à l'audition de toute personne qui pourrait éclairer la conduite de ses travaux ;

- préciser et renforcer le rôle de la nouvelle Commission consultative nationale des catastrophes naturelles, en prévoyant explicitement qu'elle sera chargée d'évaluer les conditions effectives de l'indemnisation des sinistrés par les assureurs et la Caisse centrale de réassurance, pour lui permettre d'aborder de manière transparente les sujets de refus de prise en compte de sinistres par les assureurs et de disposer de données partagées sur les montants d'indemnisation réellement accordés ;

- accroître la transparence sur l'instruction des demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle en prévoyant, d'une part, la transmission de l'avis annuel rendu par la Commission nationale consultative des catastrophes naturelles et un bilan synthétique des avis simples rendus par la Commission interministérielle au Conseil d'orientation pour la prévention des risques naturels majeurs, qui comprend notamment six parlementaires, et, d'autre part, la transmission de l'avis annuel rendu par la Commission nationale consultative des catastrophes naturelles et du rapport annuel établi par la Commission interministérielle au Parlement.

Elle a également proposé un avis favorable à l'adoption d'un amendement de Dominique Estrosi Sassone et plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains prévoyant que les comptes rendus des débats de la Commission interministérielle sont rendus publics.

La commission propose à la commission des finances d'adopter l'article 4 ainsi modifié.

I. L'instruction des demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, une procédure longue, opaque et frustrante pour les élus locaux et les sinistrés

Aux termes de la loi n° 82-600 du 13 juillet 1982 relative à l'indemnisation des victimes de catastrophes naturelles 6 ( * ) , pour que les personnes sinistrées puissent bénéficier d'une indemnisation au titre du régime « CatNat », il convient au préalable que les biens endommagés soient couverts par un contrat d'assurance « dommages » 7 ( * ) et que l'aléa naturel 8 ( * ) ayant provoqué des dommages matériels soit reconnu comme catastrophe naturelle, c'est-à-dire qu'il présente une intensité anormale 9 ( * ) et qu'il soit constaté par arrêté ministériel publié au Journal officiel 10 ( * ) .

À cette fin, le maire d'une commune touchée par un sinistre doit informer ses administrés de la possibilité de demander en mairie la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle et préciser aux sinistrés qu'ils sont tenus de déclarer les dommages subis à leur assureur. Saisi par ses administrés, le maire doit formuler une demande de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle auprès des services préfectoraux (formulaire Cerfa) en précisant le type de phénomène naturel concerné et la date à laquelle l'évènement s'est produit. Les communes disposent actuellement d'un délai de 18 mois après le début de l'évènement naturel pour formuler cette demande 11 ( * ) . Le maire doit recenser les dommages subis dans sa commune, établir un rapport descriptif de l'évènement, situer les lieux touchés et transmettre le dossier au service compétent de la protection civile. Depuis 2019, cette procédure peut d'ailleurs être effectuée de manière dématérialisée 12 ( * ) .

Après avoir regroupé l'ensemble des demandes communales pour le même phénomène, la préfecture sollicite les rapports techniques nécessaires auprès des experts compétents (Météo France, Cerema, BRGM, BCSF, Dreal, DDT,  tc.) et transmet les dossiers au ministère de l'intérieur .

Ces demandes sont ensuite instruites par une Commission interministérielle dédiée , mise en place par la circulaire n° 84-90 du 27 mars 1984 13 ( * ) , qui est chargée de se prononcer sur le caractère anormal de l'agent naturel. D'autres circulaires ont ensuite été prises par le Gouvernement pour encadrer cette procédure 14 ( * ) . L' avis simple de la Commission interministérielle est transmis aux ministres concernés, qui peuvent procéder à la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle par arrêté interministériel. Cet arrêté fixe la liste des communes concernées et identifie les zones géographiques, la période de référence pour la catastrophe naturelle en cause et la nature des dommages couverts. Il donne droit à une indemnisation au titre des contrats d'assurance « dommages » . Le préfet de département notifie ensuite la décision interministérielle, assortie d'une motivation, aux communes concernées, qui ont elles-mêmes la responsabilité d'en informer les habitants.

Depuis 2012, près de 5 500 demandes communales de reconnaissance sont traitées annuellement en moyenne, avec un taux de rejet moyen de 34 % . Le nombre de dossiers traité varie fortement d'une année à l'autre en fonction de la fréquence des phénomènes naturels et les taux de reconnaissance varient également en fonction du type de phénomène. Depuis 2017, la proportion de dossiers « sécheresse » est supérieure à 60 % , exception faite de l'année 2018 marquée par de nombreuses inondations. En dehors des dossiers liés à la sécheresse, la part des dossiers relatifs aux inondations est prépondérante, de l'ordre de 70 à 90 % des dossiers traités annuellement par la Commission interministérielle.

Les tableaux ci-après, transmis au rapporteur par la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises font le point sur les principales statistiques disponibles en la matière.

Dossiers traités en Commission interministérielle
par année de traitement en commission

Source : DGSCGC

Dossiers traités en Commission interministérielle
par année de traitement en commission, hors dossiers « sécheresse »

Source : DGSCGC

Le nombre de recours gracieux déposés contre les décisions de non-reconnaissance varie de 300 à 400 recours par an et concerne à plus de 90 % le phénomène de sécheresse-réhydratation des sols .

En outre, au 1 er janvier 2021, selon les informations transmises par la DGSCGC, 466 recours contentieux étaient pendants devant les juridictions administratives, dont 93 % concernaient des décisions adoptées en matière de sécheresse-réhydratation des sols.

Une procédure accélérée de reconnaissance , créée par une circulaire du 23 juin 2014, peut être enclenchée par le Gouvernement lors de la survenance d'évènements à caractère exceptionnel 15 ( * ) .

Comme l'a relevé la mission d'information sénatoriale sur la gestion des risques climatiques , l'opacité du fonctionnement de cette commission interministérielle et de la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle actuelle nourrit un sentiment d'arbitraire chez les sinistrés et les élus , qui ont parfois du mal à comprendre comment les décisions de reconnaissance ou de non-reconnaissance sont prises et, partant, à les accepter. Pour renforcer la légitimité et l'acceptabilité des décisions prises, il convient donc de renforcer la transparence sur leur mode d'élaboration et de notification.

S'agissant des organes consultatifs actifs en matière de risques naturels, seul le Conseil d'orientation pour la prévention des risques naturels majeurs (COPRNM) peut être recensé à ce jour 16 ( * ) .

II. L'inscription dans la loi de la Commission interministérielle de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle et la création d'une commission nationale dédiée pour faciliter les démarches des élus et renforcer la transparence des décisions du Gouvernement

Le présent article tend à insérer un nouvel article L. 125-1-1 au sein du code des assurances.

D'une part, il tend à instituer une Commission nationale consultative des catastrophes naturelles , chargée de rendre annuellement un avis simple sur la pertinence des critères retenus pour déterminer la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle et composée de huit représentants de l'État, de six élus locaux, de deux représentants des assureurs, du directeur général de la Caisse centrale de réassurance et de six personnalités qualifiées dont deux au moins en raison de leur compétence scientifique dans le domaine des catastrophes naturelles.

D'autre part, il tend à inscrire dans la loi la Commission interministérielle de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle , créée par la circulaire précitée de 1984, commission technique chargée d'émettre un avis simple sur les demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle sur lesquelles elle est saisie par les ministres concernés. Elle serait composée de cinq représentants de l'État, nommés par arrêté conjoint des ministres en charge de l'économie, du budget, de la sécurité civile, des outre-mer et de l'environnement et d'un représentant de la Caisse centrale de réassurance.

III. Des précisions rédactionnelles apportées par les députés sur la composition et le fonctionnement de ces deux commissions

En commission, les députés ont principalement apporté des modifications rédactionnelles à cet article ( ici , par amendement du rapporteur, et par quatre amendements identiques à un amendement du rapporteur corrigeant une erreur de référence). Ils ont également rappelé le caractère consultatif de la Commission nationale des catastrophes naturelles en adoptant un amendement de députés issus du groupe Agir ensemble .

Les députés ont enfin adopté deux amendements simplifiant la rédaction des dispositions relatives à la composition des deux commissions :

- un amendement de députés issus du groupe Agir ensemble renvoie la définition de la composition, des missions, de l'organisation et du fonctionnement de la commission nationale consultative à un décret , tout en prévoyant que cette commission devra comprendre quatre titulaires de mandats locaux , un sénateur et un député ;

- un amendement d'un député du groupe LREM , renvoyant la rédaction des dispositions relatives à la composition, à l'organisation et au fonctionnement de la Commission interministérielle de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle à un décret.

En séance, les députés ont adopté deux amendements d'un député LREM : un amendement rédactionnel et un amendement précisant les conditions de nomination des parlementaires au sein de la Commission nationale consultative des catastrophes naturelles, tirant les conséquences des modifications apportées en commission.

IV. Accroître encore davantage la transparence sur les modalités d'instruction des demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle

La commission partage naturellement l'objectif de renforcer la transparence sur la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle , dans le droit fil de la position qu'elle a pu exprimer lors de l'examen de la proposition de loi déposée par Nicole Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. L'article 4 de ce texte prévoyait également d'inscrire dans la loi l'existence de la Commission interministérielle chargée d'instruire les demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle.

Afin de conforter cet objectif du texte qui lui est soumis, la commission, sur proposition de son rapporteur a adopté trois amendements visant à :

- prévoir explicitement la présence de représentants des sinistrés au sein de la Commission nationale consultative des catastrophes naturelles, à supprimer la présence de parlementaires au sein de cette commission et à lui permettre de procéder à l'audition de toute personne qui pourrait éclairer la conduite de ses travaux ( amendement COM-24 ) ;

- préciser et renforcer le rôle de la nouvelle Commission consultative nationale des catastrophes naturelles, en prévoyant explicitement qu'elle sera chargée d' évaluer les conditions effectives de l'indemnisation des sinistrés par les assureurs et la Caisse centrale de réassurance, pour lui permettre d'aborder de manière transparente les sujets de refus de prise en compte de sinistres par les assureurs et de disposer de données partagées sur les montants d'indemnisation réellement accordés ( amendement COM-25 ) ;

- accroître la transparence sur l'instruction des demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle en prévoyant, d'une part, la transmission de l'avis annuel rendu par la Commission nationale consultative des catastrophes naturelles et un bilan synthétique des avis simples rendus par la Commission interministérielle au Conseil d'orientation pour la prévention des risques naturels majeurs, qui comprend notamment six parlementaires, et, d'autre part, la transmission de l'avis annuel rendu par la Commission nationale consultative des catastrophes naturelles et du rapport annuel établi par la Commission interministérielle au Parlement ( amendement COM-26 ).

En outre, elle propose de donner un avis favorable à un amendement de Dominique Estrosi Sassone et plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains, prévoyant que les comptes rendus des débats de la Commission interministérielle sont rendus publics ( amendement COM-9 rect .).

La commission propose à la commission des finances d'adopter l'article 4 ainsi modifié.

TITRE III
Traiter les spécificités du risque sécheresse-réhydratation des sols
en matière d'indemnisation et de prévention
Article 7 (délégué)

Demande de rapport sur les réponses à apporter aux phénomènes
de retrait-gonflement des argiles (RGA)

Cet article prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement visant à étudier l'opportunité et les moyens de renforcer les constructions existantes exposées au retrait-gonflement des argiles (RGA) dû aux phénomènes de sécheresse-réhydratation des sols, ainsi qu'à formuler des propositions en vue de l'indemnisation des dommages causés par ce phénomène.

La commission a adopté deux amendements du rapporteur pour avis du présent article délégué au fond prévoyant :

- l'établissement d'une liste des EPCI à fiscalité propre les plus exposés à ce phénomène (aléa fort, représentant au total 12 405 communes, soit 35,2 % des communes) par décret -- nouvel article L. 567-1 du code de l'environnement ;

- l'obligation, pour le préfet de département, de réaliser un schéma de prévention des risques naturels majeurs spécifiquement pour ces EPCI exposés au RGA, alors que l'élaboration de ce schéma n'est actuellement qu'une faculté -- nouvel article L. 567-2 du même code. Selon les informations recueillies par le rapporteur au cours de ses auditions, seule une dizaine de départements a mis en place un schéma de prévention des risques naturels. La commission souhaite que cette disposition permette de faire « vivre » cette possibilité, pour contribuer à une meilleure appréhension du RGA ;

- l'obligation, pour le référent institué par l'article 2 de la présente proposition de loi, de réaliser une cartographie locale, à la maille intercommunale permettant une connaissance plus fine des effets potentiels de ce phénomène -- nouvel article L. 567-3 du code de l'environnement. Cette cartographie serait établie prioritairement pour les communes dont le territoire ne serait pas couvert, à la date d'entrée en vigueur de la liste des EPCI fixée en application du nouvel article L. 567-1du même code, par un plan de prévention des risques naturels majeurs prescrit ou approuvé (PPRN) ;

- l'intervention d'un décret pour préciser les conditions dans lesquelles les habitants des zones concernées pourront être accompagnés sur le plan financier dans la connaissance de la vulnérabilité de leurs biens (diagnostic) et le renforcement de leur résilience face au RGA (travaux, etc.) par le fonds « Barnier » ou par d'autres dispositifs d'aide et d'indemnisation existants ;

- d'enrichir le contenu du rapport remis au Parlement, pour que celui-ci aille au-delà d'un catalogue de constats d'un intérêt limité pour le législateur, comme pour les services déconcentrés de l'État.

La commission propose à la commission des finances d'adopter l'article 7 ainsi modifié.

I. Les mouvements de terrain consécutifs aux phénomènes de sécheresse-réhydratation des sols : un angle mort de notre politique de prévention et de gestion des risques

Comme l'a mis en évidence le rapport de la mission d'information sénatoriale sur la gestion des risques climatiques , la prise en compte du phénomène de « sécheresse-réhydratation des sols » dans la garantie catastrophe naturelle n'était pas prévue lors de la création du régime CatNat . Lors de l'instauration de la garantie catastrophe naturelle en 1982, seuls les phénomènes irrésistibles , imprévisibles et marqués par une cinétique rapide étaient envisagés comme devant donner lieu à la mobilisation de la solidarité nationale (inondations, mouvements de terrain, submersions marines, etc.).

Les dégâts provoqués sur les biens assurables par les phénomènes de sécheresse par retrait-gonflement des argiles n'ont été intégrés dans le régime d'indemnisation des victimes de catastrophes naturelles qu'en 1989 , sept ans après sa mise en place.

Ce choix s'explique par la succession de plusieurs sécheresses exceptionnelles à la fin des années 1980, qui avaient provoqué sur le bâti des dégâts dont les caractéristiques dépassaient le champ couvert par la garantie décennale des travaux ou le régime de l'assurance dommage-ouvrage.

Le phénomène de retrait-gonflement des sous-sols

Les argiles sont constituées de minéraux empilés en feuillets, entre lesquels peut se glisser de l'eau. Par conséquent, le volume de certaines argiles sera très différent selon la présence ou l'absence d'eau :

- en période humide, les argiles gonflent et deviennent plastiques ;

- en période de sécheresse, l'eau s'évapore et les argiles se rétractent, occasionnant un phénomène de tassement sur la tranche superficielle (un ou deux mètres).

La France est un pays à climat tempéré, ce qui implique une imbibition des sols en temps normal : seul ce phénomène de tassement des argiles est considéré comme problématique.

Les argiles ne réagissent pas de manière homogène à la sécheresse, de par leurs caractéristiques intrinsèques, et surtout du fait du milieu environnant, qui peut favoriser l'évapotranspiration (présence végétation, mise en place de drains).

Ce tassement peut donc être hétérogène -- il est alors qualifié de « tassement différentiel » -- et provoquer des dégâts importants et irrémédiables sur les bâtiments : fissurations en façade, décollements entre éléments jointifs, distorsion des portes et des fenêtres, dislocation des dallages et des cloisons, rupture des canalisations enterrées, etc.

Au fur et à mesure du rétablissement des conditions hydrogéologiques initiales, ce tassement différentiel peut être suivi de phénomènes de gonflement, accentuant les dommages.

Source : Bureau de recherche géologique et minier (BRGM).

Avant la mise à jour de la cartographie du risque de retrait-gonflement des argiles en 2019 , le phénomène était appréhendé sur 24 % du territoire et la sinistralité réelle appréhendée à 59 %. La nouvelle carte d'exposition au RGA permet de cerner 93 % de la sinistralité potentielle, concentrée sur 48 % du territoire métropolitain.

Aujourd'hui, d'après les informations recueillies par les rapporteurs auprès de la Caisse centrale de réassurance (CCR), 18,9 millions de maisons sont concernées par le retrait-gonflement des argiles, tous aléas confondus (faible, moyen et fort). Dans le détail :

- 6,1 millions de maisons sont faiblement exposées ;

- 9 millions de maisons sont moyennement exposées ;

- 3,8 millions de maisons sont fortement exposées.

À l'échelle territoriale, le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) a dénombré les communes « touchées » par le phénomène de RGA, sans considération de seuil sur les surfaces. Il relève ainsi :

- 24 112 communes avec une exposition faible, soit 68,4 % des communes ;

- 29 819 communes avec une exposition moyenne, soit 84,5 % des communes ;

- 12 405 communes avec une exposition forte, soit 35,2 % des communes ;

- 31 135 communes avec une exposition moyenne ou forte, soit 88,3 % des communes.

- 34 978 communes touchées par des zones exposées, tous niveaux confondus, soit 99,2 % des communes 17 ( * ) .

Des progrès ont été réalisés dans la connaissance scientifique du phénomène, même si des différences de périmètres sont à relever selon les bases statistiques utilisées 18 ( * ) . Toutefois, l'appréhension de ce phénomène dans notre politique de prévention et de gestion des risques demeure partielle et non satisfaisante .

Selon un constat unanimement partagé par les administrations et organismes sollicités par les rapporteurs, le régime « CatNat » n'est pas adapté à la prise en compte de ce phénomène : dans les faits, le critère de l'intensité « anormale » est inadapté, car difficile à établir, le régime ne peut pas prendre en compte la gravité des dommages et la logique de reconnaissance du phénomène à l'échelle d'un territoire communal s'accorde mal avec les effets parfois très localisés du phénomène, sur certains quartiers, voire sur certaines habitations.

Cette difficulté d'appréhension du RGA par le régime « CatNat » de droit commun conduit à des décisions de refus de la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle pour de nombreuses communes, qui alimentent un légitime sentiment d'incompréhension et d'opacité chez les élus locaux.

Même si la révision des critères 19 ( * ) permettant de caractériser l'intensité des épisodes de sécheresse-réhydratation des sols à l'origine de mouvements de terrain différentiels a permis de renforcer la reconnaissance de ce phénomène, le nombre de communes non reconnues demeure significatif, comme le souligne la direction de la sécurité civile et de gestion des crises (DGSCGC) dans ses réponses au questionnaire de la commission :

- 30 % pour la sécheresse 2018 ;

- et près de 50 % pour les épisodes de sécheresse 2019 et 2020.

Les tableaux ci-dessous font le point sur le traitement des dossiers relatifs à la sécheresse-réhydratation des sols par la Commission interministérielle de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle.

Source : DGSCGC.

L'intervention de la garantie « CatNat » nécessite, là encore, la publication d'un arrêté interministériel de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, mais le caractère déterminant du facteur sécheresse est constaté par un expert (par rapport à d'autres phénomènes comme un défaut de construction, les effets de la végétation environnante, des fuites potentielles de canalisation, etc.). Aussi, la DGSCGC indique que « dans les communes reconnues, environ 50 % des dossiers de sinistres ne sont pas pris en charge par les assureurs », ce qui complique encore davantage la vie des habitants concernés.

Sur la période 1990-2013 , les indemnisations au titre du retrait-gonflement des argiles se sont élevées à 8,6 milliards d'euros . Les années les plus marquantes en termes de sécheresse ont été 2003, 2005, 2011 et 2017.

Pour les constructions nouvelles , un dispositif créé par l'article 68 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN) rend obligatoire la réalisation d'une étude géotechnique préalablement à la vente d'un terrain non bâti constructible, dans des zones exposées au RGA définies par arrêté des ministres chargés de la construction et de la prévention des risques majeurs . Initialement inscrites aux articles L. 112-20 à L. 112-25 du code de la construction et de l'habitation, ces dispositions ont été déplacées aux articles L. 132-4 à L. 132-9 du même code, par l'ordonnance n° 2020-71 du 29 janvier 2020, au sein d'une section 4 « Risques liés aux sols argileux » du chapitre II du titre III du livre I er .

Si ce dispositif permet d'avancer dans la bonne direction, il ne traite pas de la situation des constructions existantes, qui est particulièrement préoccupante. S'agissant des coûts nécessaires au renforcement de la résilience des habitations face au RGA, les enjeux sont colossaux : la CCR estime que « si nous devions équiper de micropieux (au titre de mesures préventives ou réparatrices) toutes les maisons actuellement en zone d'aléa fort RGA uniquement, le coût global atteindrait un montant de l'ordre de 285 milliards d'euros ».

Lors des travaux préparatoires à l'examen de la présente proposition de loi, plusieurs pistes ont été évoquées pour mieux prendre en compte le RGA dans notre politique de prévention des risques. Dans un premier temps, la mise en place d'un régime d'indemnisation ad hoc en lien avec le régime « CatNat » a été évoquée, couplée avec l'adoption de critères d'indemnisation nouveaux fondés sur le caractère exceptionnel des dommages causés sur le bâti et non plus sur l'intensité des phénomènes naturels en cause. Ce système devrait être accompagné par une procédure d'indemnisation rapide et efficace , s'appuyant sur des analyses très localisées (à l'échelle d'un quartier, d'une petite série de bâtiments, pour mutualiser les coûts des études géotechniques à réaliser). À très court terme, les rapporteurs partagent l'objectif que les efforts d'indemnisation soient concentrés sur les sinistrés les plus touchés .

La mission d'information sénatoriale sur la gestion des risques climatiques avait en effet recommandé à titre principal :

- d'organiser une campagne d'information sur le risque de RGA pour sensibiliser massivement la population 20 ( * ) ;

- de mettre à l'étude la mise en place d'un véhicule dédié au risque « sécheresse » au sein du Fonds de prévention des risques naturels majeurs dit fonds « Barnier » , afin de financer partiellement les travaux effectués par les particuliers pour renforcer la résilience de leurs habitations 21 ( * ) .

II. Une demande de rapport sur le renforcement de la résilience des constructions existantes face au RGA et sur des propositions en vue de l'indemnisation des dommages causés par ce phénomène

Le présent article prévoit la remise, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi examinée, d'un rapport du Gouvernement au Parlement portant sur deux objets principaux :

- d'une part, évaluer l'opportunité et les moyens d'un renforcement des constructions existantes dans un objectif de prévention des dommages causés par le retrait-gonflement des argiles ;

- d'autre part, formuler des propositions en vue de l'indemnisation des dommages causés par ce phénomène qui ne sont ni couverts par le régime de catastrophe naturelle ni par la garantie décennale.

III. Une demande de rapport étoffée par les députés

En commission, les députés ont adopté deux amendements :

- le premier amendement de députés du groupe Agir ensemble vise à ce que le rapport demandé au Gouvernement examine avec précision les modalités de financement et d'attributions d'aides de l'État permettant d'indemniser l'ensemble des propriétaires concernés ;

- le second amendement d'une députée du groupe LREM prévoit que le rapport devra traiter des possibilités de réforme à apporter au dispositif de franchise spécifique pour les dommages consécutifs à la sécheresse , pour remédier à l'application de franchises différentes pour la sécheresse par rapport à d'autres sinistrés « catastrophe naturelle ».

En séance, les députés ont adopté un amendement de députés du groupe LREM visant à prévoir que le rapport devra également traiter des pistes d'amélioration des délais d'instruction des demandes d'indemnisation des sinistrés auprès des assureurs.

IV. Améliorer la connaissance et la prévention du risque de RGA à l'échelle territoriale

La commission regrette que ce texte ne permette pas de traiter effectivement les problématiques connues de longue date s'agissant du retrait-gonflement des argiles (RGA), qui vont en outre fortement s'accentuer dans les années à venir avec le réchauffement climatique .

Elle remarque que le présent article concerne un rapport inter-inspections (CGEDD--IGA-IGF) en cours de finalisation mais qui, d'après les éléments recueillis par les rapporteurs, ne contiendrait pas de pistes de réforme. Par ailleurs, un autre rapport sera réalisé par la Cour des comptes sur le même sujet, à la demande de l'Assemblée nationale, en application de l'article 58-2 de la loi organique relative aux lois de finances.

Compte tenu du retard pris dans la constitution d'un régime juridique et financier permettant de traiter l'ensemble des problématiques liées au RGA, le rapporteur souhaite que la réforme à venir puisse permettre de renforcer durablement la résilience des habitations concernées et de coupler ces travaux à des opérations de rénovation énergétique . Des outils spécifiques devront être mobilisés : fonds « Barnier », dispositifs fiscaux, prêt à taux zéro, etc.

Au regard de la nécessité de mener des consultations approfondies avant toute réforme d'ampleur, ce que les délais d'examen du présent texte au Sénat ne permettaient pas, le rapporteur n'a pas souhaité proposer de modification d'ampleur du régime d'indemnisation du RGA. Le rapporteur s'est notamment interrogé sur l'opportunité de généraliser un diagnostic obligatoire de vulnérabilité pour les constructions existantes situées dans des zones fortement exposées au RGA. La prise en charge financière de telles opérations demeure cependant un point de difficulté à ce stade.

Toutefois, afin d'avancer sur le chemin d'une meilleure connaissance locale et d'une meilleure prévention du risque RGA , la commission a adopté un amendement COM-27 du rapporteur tendant à insérer un nouveau chapitre VII relatif à l'évaluation et à la gestion des risques de mouvements de terrain consécutifs à la sécheresse ou à la réhydratation des sols au sein du code de l'environnement pour prévoir :

- l'établissement d'une liste des EPCI à fiscalité propre les plus exposés à ce phénomène (aléa fort, représentant au total 12 405 communes, soit 35,2 % des communes) par décret
-- nouvel article L. 567-1 du code de l'environnement ;

- l'obligation, pour le préfet de département, de réaliser un schéma de prévention des risques naturels majeurs spécifiquement pour ces EPCI exposés au RGA, alors que l'élaboration de ce schéma n'est actuellement qu'une faculté
-- nouvel article L. 567-2 du même code. Selon les informations recueillies par le rapporteur au cours de ses auditions, seule une dizaine de départements a mis en place un schéma de prévention des risques naturels. La commission souhaite que cette disposition permette de faire « vivre » cette possibilité, pour contribuer à une meilleure appréhension du RGA ;

- l'obligation, pour le référent institué par l'article 2 de la présente proposition de loi, de réaliser une cartographie locale , à la maille intercommunale permettant une connaissance plus fine des effets potentiels de ce phénomène -- nouvel article L. 567-3 du même code. Cette cartographie serait établie prioritairement pour les communes dont le territoire ne serait pas couvert, à la date d'entrée en vigueur de la liste des EPCI fixée en application du nouvel article L. 567-1 du code de l'environnement, par un plan de prévention des risques naturels majeurs prescrit ou approuvé ( PPRN ) ;

- l'intervention d'un décret pour préciser les conditions dans lesquelles les habitants des zones concernées pourront être accompagnés sur le plan financier dans la connaissance de la vulnérabilité de leurs biens (diagnostic) et le renforcement de sa résilience face au RGA (travaux, etc.) par le fonds « Barnier » ou par d'autres dispositifs d'aide et d'indemnisation existants .

Elle a adopté un second amendement COM-28 du rapporteur visant à enrichir le contenu du rapport remis au Parlement, pour que celui-ci aille au-delà d'un catalogue de constats d'un intérêt limité pour le législateur, comme pour les services déconcentrés de l'État.

La commission propose à la commission des finances d'adopter l'article 7 ainsi modifié.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 12 octobre 2021, la commission a examiné le rapport pour avis sur la proposition de loi n° 325 (2020-2021) visant à réformer le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles.

M. Jean-François Longeot , président . - Nous examinons cet après-midi la proposition de loi visant à réformer le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles qui a été transmise au Sénat par l'Assemblée nationale le 29 janvier dernier. Ce texte, déposé à l'origine par des députés du groupe Mouvement Démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés, comprend désormais huit articles.

Dire que nous examinons cette proposition de loi en première lecture ne serait pas tout à fait exact : en effet, les dispositions qu'elle comporte s'inspirent largement d'une autre proposition de loi sénatoriale, déposée par notre collègue Nicole Bonnefoy et plusieurs de ses collègues du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain (SER)et adoptée par le Sénat le 14 janvier 2020 à l'unanimité des présents, dont notre commission s'était également saisie pour avis et pour laquelle elle avait bénéficié d'une délégation au fond de la commission des finances pour traiter deux des cinq articles que le texte comprenait initialement.

La proposition de loi des députés que nous examinons aujourd'hui concerne l'un des champs privilégiés de l'expertise de notre commission, à savoir la prévention des risques naturels, et six des huit articles qui le composent entrent dans le champ de la délégation reçue par notre commission au moment de l'examen du texte de Nicole Bonnefoy et des membres du groupe SER. Il ne contient pas de disposition fiscale ou de disposition relative à des lois de finances, qui avaient justifié le renvoi de la proposition de loi du groupe SER à la commission des finances.

Ce texte a cependant été envoyé au fond à la commission des finances, au regard de certaines dispositions assurantielles dont elle avait eu à connaître dans le cadre du texte du groupe SER.

La commission des finances nous a délégué au fond trois articles : il s'agit des articles 2, 4 et 7, sur lesquels notre collègue Pascal Martin a été désigné en qualité de rapporteur. Notre commission a également décidé de se saisir pour avis des articles 1 er et 8, sur lesquels Nicole Bonnefoy a été désignée comme rapporteure pour avis.

Je crois savoir que les deux corapporteurs de la commission ont travaillé en concertation, ce dont je me réjouis s'agissant d'un sujet très important pour les communes et les sinistrés d'évènements climatiques exceptionnels.

Le calendrier était resserré puisque le texte sera examiné en séance le 21 octobre prochain. Je vous remercie donc de la disponibilité dont vous avez fait preuve et sans plus attendre vous laisse la parole pour présenter votre rapport et la position que vous proposerez à la commission de définir. Je salue aussi la présence parmi nous de Christine Lavarde, rapporteur pour la commission des finances.

Mme Nicole Bonnefoy , rapporteure pour avis . - Nous sommes amenés à nous prononcer pour la deuxième fois en deux ans sur la réforme du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles.

Vous connaissez l'implication qui a été la mienne, la nôtre, sur ce sujet et les travaux de la mission d'information sur la gestion des risques climatiques, dont j'étais rapporteure et qui était présidée par notre ancien collègue Michel Vaspart.

Je rappelle que ce travail avait été à l'époque unanimement salué et que la proposition de loi, conçue pour traduire une quinzaine de propositions de la mission sur une cinquantaine de propositions au total, avait été adoptée à l'unanimité des présents par le Sénat en janvier 2020.

Au moment d'examiner le texte qui nous est soumis par les députés et le Gouvernement, qui a d'ailleurs engagé la procédure accélérée pour tenter de le faire aboutir avant les élections de 2022, je suis partagé entre deux sentiments contradictoires.

Le premier est la satisfaction de voir que nous allons enfin avancer dans le sens d'une plus grande transparence sur la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, dans le sens d'un meilleur accompagnement des élus par les services de l'État face aux évènements climatiques exceptionnels - qui deviennent de plus en plus fréquents - ou encore dans le sens d'une meilleure indemnisation des sinistrés.

Le second sentiment est la déception et j'ai plusieurs regrets à la lecture de ce texte.

Un regret sur la procédure d'abord : je regrette que le Gouvernement ne soit pas reparti du texte que nous avions transmis aux députés il y a plus d'un an pour conduire cette réforme nécessaire de l'indemnisation des catastrophes naturelles. Je comprends l'argument de la procédure accélérée, qu'il n'était pas possible d'engager après la première lecture du texte au Sénat. Toutefois, je considère que le Gouvernement ne s'est pas donné les moyens de travailler le texte que nous lui avons soumis dans des délais sereins et ne s'est pas donné les moyens de le faire aboutir dans le cadre d'une procédure normale de bicamérisme, qui fait la force du travail parlementaire, alors que cela aurait été possible.

Ensuite, je regrette que la proposition de loi des députés n'aille pas aussi loin que je l'aurais souhaité sur deux sujets. D'abord, la dimension financière du texte est limitée au volet « indemnisation des sinistrés », qu'elle traite d'ailleurs partiellement, et ne comporte pas de mesures d'accompagnement sur le volet prévention pour soutenir les particuliers dans le diagnostic de la vulnérabilité de leurs habitations puis dans le renforcement de la résilience de leurs bâtiments. Je ne retrouve pas d'éléments importants tels qu'un crédit d'impôt ou de nouvelles aides pour soutenir les particuliers. En outre, les dispositions de l'article 5, dont nous aurons l'occasion de reparler en séance, ne me semblent pas satisfaisantes pour traiter la situation des sinistrés exposés aux mouvements de terrain consécutifs du retrait-gonflement des argiles.

Second point : les dispositions relatives au traitement du retrait-gonflement des argiles issu des phénomènes de sécheresse-réhydratation des sols sont clairement en deçà des enjeux. Les députés nous proposent une demande de rapport du Gouvernement au Parlement alors que le rapport est quasiment déjà rédigé par plusieurs inspections. Lorsque j'avais interrogé les services de l'État, en particulier Bercy à travers la direction générale du Trésor, sur la prise en charge de ce risque, on m'avait dit : « Attendez encore un peu, 6 mois, 1 an, et nous vous proposerons une réforme ». Lorsque nous avons mené les auditions sur ce texte avec Pascal Martin, les mêmes arguments ressortent : « Nous travaillons sur ce sujet depuis 30 ans mais laissez-nous encore 6 mois, 1 an, pour proposer une réforme ». J'avoue que je m'interroge parfois sur l'activité réelle de ces services ou alors sur leur volonté de répondre aux préoccupations d'intérêt général de nos concitoyens, ce qui doit pourtant être la boussole des fonctionnaires, sauf erreur de ma part.

Je rappelle que la proportion de dossiers « sécheresse » est supérieure à 60 % dans les dossiers traités chaque année par la commission interministérielle de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle depuis 2017. Si les nouveaux critères posés pour la sécheresse depuis la circulaire du 10 mai 2019 ont conduit à une hausse importante du taux de reconnaissance en catastrophe naturelle des épisodes de sécheresse, il reste encore beaucoup à faire. Je rappelle également que le nombre de recours gracieux déposés contre les décisions de non-reconnaissance varie entre 300 et 400 par an et concerne à plus de 90 % le phénomène de sécheresse-réhydratation des sols. En outre, au 1 er janvier 2021, sur les 466 recours contentieux pendants devant les juridictions administratives, 93 % concernent des décisions adoptées par la commission interministérielle en matière de sécheresse-réhydratation des sols.

Notre corapporteur Pascal Martin nous proposera des amendements intéressants sur le sujet, qui vont dans le sens d'une meilleure connaissance des risques et de leur appréhension par les services de l'État, les communes et les habitants mais les règles constitutionnelles, notamment de recevabilité financière des amendements, nous empêchent malheureusement d'aller beaucoup plus loin et de traiter le volet indemnitaire.

En outre, les délais très contraints pour l'examen de ce texte ne nous permettaient pas de mener des consultations nécessaires avec les parties prenantes pour définir un régime adapté et ambitieux.

C'est pourquoi j'ai déposé deux amendements au nom du groupe SER, qui traitent de ce sujet et reprennent des dispositions adoptées par le Sénat lors de l'examen de la proposition de loi que nous avions déposée avec le groupe SER en 2019, à savoir la mise en place d'un crédit d'impôt et l'instauration d'une prescription quinquennale, en matière assurantielle, pour les dommages résultant du retrait-gonflement des argiles (RGA). Ils seront examinés par la commission des finances demain.

Après cette introduction, où je tenais à rappeler le contexte d'examen de ce texte, j'en viens à la présentation des deux articles dont la commission m'a confié l'examen pour avis et sur lesquels je n'aurai pas de proposition d'amendements à vous soumettre, car je considère que le texte qui nous est proposé par les députés est globalement satisfaisant.

L'article 1 er vise à modifier la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle en prévoyant la motivation systématique des décisions interministérielles de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, là où les communes sont parfois dans l'incompréhension face aux décisions des ministres. L'article clarifie également les conditions dans lesquelles il sera possible d'accéder aux rapports d'expertise ayant fondé cette décision, ainsi que les voies pour former un recours contre la décision interministérielle, le cas échéant. Ces dispositions explicitent le droit en vigueur et apportent certains ajustements qui vont dans le bon sens.

L'article 8 constitue une reprise intégrale de trois alinéas de l'article 4 de la proposition de loi que nous avions déposée avec le groupe SER. Il permet d'allonger de 18 à 24 mois le délai laissé aux communes pour présenter une demande de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, ce qui est particulièrement nécessaire dans le cas des phénomènes de sécheresse-réhydratation des sols, dont les effets peuvent mettre du temps à apparaître.

Comme je vous le disais, je n'ai pas d'amendement à vous proposer sur ces deux articles. Les amendements déposés par le rapporteure de la commission des finances apportent des ajustements à la marge, qui n'appellent pas d'observation particulière de ma part à ce stade.

Les dispositifs qui me tiennent le plus à coeur concernent le crédit d'impôt pour les particuliers et la prescription quinquennale pour le risque sécheresse, car c'est actuellement, à mon sens, la seule solution à impact que nous ayons en l'absence de proposition du Gouvernement.

Avant de conclure, je souhaite remercier Pascal Martin pour la collaboration qui a été la nôtre sur ce texte. Nous aurons l'occasion de rediscuter de certains sujets en vue de l'examen du texte en séance publique la semaine prochaine. Il est probable que je redépose certains amendements, en fonction des résultats de l'examen du texte qui aura lieu en commission des finances demain.

M. Pascal Martin , rapporteur pour avis . - Au moment de présenter mon rapport sur cette proposition de loi, je voudrais remercier la commission, et en particulier Jean-François Longeot et Didier Mandelli, de m'avoir fait confiance pour cette tâche.

J'avais déjà eu à connaître de ce sujet lors de l'examen du projet de loi « Climat et résilience » au Sénat mais nous n'avions pas pu maintenir en commission mixte paritaire les dispositions introduites dans le texte du Sénat compte tenu de l'opposition du Gouvernement et des députés.

Si je connaissais quelque peu le sujet, je dois dire que les conditions de préparation du rapport sur ce texte ont été contraintes, avec à peine deux semaines pour organiser des auditions et définir une position politique et technique.

Je veux remercier Nicole Bonnefoy pour notre collaboration et le travail d'auditions que nous avons mené ensemble malgré ces délais très contraints. Je salue une nouvelle fois son engagement sur ce sujet de l'indemnisation des catastrophes naturelles et de l'appréhension du risque de sécheresse-réhydratation des sols.

Les travaux qui ont été conduits au Sénat sont riches et m'ont permis de comprendre rapidement les enjeux de ce texte. Je pense à la mission d'information sénatoriale sur la gestion des risques climatiques, présidée par notre ancien collègue Michel Vaspart et dont Nicole Bonnefoy était rapporteure, et à la proposition de loi adoptée par le Sénat en janvier 2020, à l'initiative de nos collègues du groupe SER et dans un esprit transpartisan.

Avant de vous présenter le contenu des trois articles dont j'avais la charge et les orientations des amendements que je proposerai à la commission d'adopter, je voudrais vous faire part d'un sentiment général mitigé sur ce texte : certes, les dispositions que les députés soumettent à notre examen vont dans le bon sens, car elles permettront de faciliter les démarches de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, de renforcer la transparence sur cette procédure et sur les décisions ministérielles actuellement jugées opaques et complexes, de mieux accompagner les communes sur le terrain face à ce type d'évènements et d'améliorer - un peu - l'indemnisation et la prise en charge des sinistres par les assureurs. Toutefois, l'ambition globale du texte me paraît insuffisante et certaines dispositions sont en deçà de ce que l'on pouvait attendre, notamment sur l'indemnisation des sinistrés, tandis que des sujets sont largement ignorés.

Je pense en particulier au traitement des risques de mouvements de terrain consécutifs aux épisodes de sécheresse et de réhydratation des sols, phénomènes que nous appelons également le retrait-gonflement des argiles (RGA).

Alors que cette problématique est identifiée, d'après ce que nous dit Bercy, depuis de nombreuses années, je ne comprends pas pourquoi le Gouvernement n'est toujours pas en mesure de proposer une réforme globale pour améliorer l'appréhension et la gestion de ce risque, traitant de l'ensemble des aspects du phénomène, de la connaissance fine des risques et de la vulnérabilité du bâti, jusqu'aux conditions d'indemnisation des sinistrés.

À cet égard, je rappelle que la nouvelle cartographie de ce risque, réalisée par les services de l'État en 2019, montre que 70 % des communes sont exposées faiblement à ce risque, soit 24 000 communes, 84 % exposées moyennement soit 29 000 communes et 35 % exposées fortement, soit 12 000 communes. Les enjeux sont donc énormes, avec près de 4 millions de maisons fortement exposées et 19 millions de maisons exposées au total.

Pour illustrer encore un peu plus l'ampleur du problème, je donnerai un chiffre : s'il fallait équiper de micropieux ou de mesures préventives et réparatrices toutes les maisons actuellement situées en zone d'aléa fort de retrait-gonflement des argiles (RGA), soit 4 millions de maisons, le coût global pourrait atteindre environ 285 milliards d'euros, 70 000 euros par maison en moyenne. C'est donc un véritable défi qui est posé à notre politique de prévention des risques naturels majeurs et qui ne trouvera, je le regrette, qu'une réponse partielle, un début de réponse, avec ce texte.

J'en viens maintenant à la présentation des articles dont j'avais la charge et des orientations des amendements que je propose à la commission d'adopter.

L'article 2 tend à instituer un référent à l'indemnisation des catastrophes naturelles auprès du préfet de département, pour informer, accompagner et conseiller les communes face aux évènements climatiques exceptionnels reconnus, le cas échéant, comme catastrophes naturelles. Il prévoit également la mise à disposition des communes de documents à destination des habitants pour améliorer la connaissance du public sur la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle.

La solution proposée par les députés de créer ce référent auprès du préfet me semble intéressante. Elle rejoint l'idée de Nicole Bonnefoy d'instituer une cellule de soutien aux maires dans chaque département, tout en étant plus souple. Sur cet article, je vous proposerai des améliorations rédactionnelles qui tendent à marquer l'importance de l'enjeu de la prévention des sinistres, ainsi qu'un amendement visant à prévoir que le référent devra également conseiller et accompagner les communes qui n'auraient pas vu leurs demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle satisfaites. Je vous proposerai enfin que les communes soient informées régulièrement de l'utilisation des crédits du fonds « Barnier », car l'accès à cette information peut être difficile pour les maires.

L'article 4 inscrit dans la loi la Commission interministérielle chargée d'émettre un avis sur les demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle formulées par les communes, qui a été créée par une circulaire du 27 mars 1984, et tend à créer une Commission nationale consultative des catastrophes naturelles, chargée d'émettre annuellement un avis simple sur la pertinence des critères retenus pour déterminer cet état de catastrophe naturelle.

Nous savons tous que cette procédure soulève des critiques pour son caractère opaque et la technicité parfois inadaptée des critères retenus pour constater l'état de catastrophe naturelle.

Cet article va donc dans le bon sens et permettra de disposer d'une analyse critique sur l'activité de la Commission interministérielle.

Sur ces dispositions, je vous proposerai trois amendements.

Le premier vise à prévoir explicitement la présence de représentants des sinistrés au sein de la Commission nationale consultative des catastrophes naturelles, à supprimer la présence de parlementaires en son sein et à lui permettre de procéder à l'audition de toute personne qui pourrait éclairer ses travaux.

Le deuxième amendement tend à prévoir explicitement que la Commission nationale consultative sera chargée d'évaluer les conditions effectives de l'indemnisation des sinistrés par les assureurs et la Caisse centrale de réassurance, afin d'aborder de manière transparente les sujets de refus de prise en compte de sinistres par les assureurs et de disposer de données partagées sur les montants d'indemnisation réellement accordés.

Le troisième amendement vise à accroître la transparence sur le fonctionnement et les travaux de la Commission nationale consultative des catastrophes naturelles et de la Commission interministérielle de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle en prévoyant la transmission de documents qu'elles produisent tantôt au Conseil d'orientation pour la prévention des risques naturels majeurs, qui comprend notamment six parlementaires - trois députés, trois sénateurs -, tantôt directement au Parlement.

Enfin, l'article 7 prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement sur la prévention et le traitement, notamment indemnitaire, des dommages causés par le retrait-gonflement des argiles.

Nous avons appris, lors des auditions, qu'un rapport inter-inspections serait bientôt rendu au Gouvernement sur le sujet, mais qu'il ne propose pas, à ce stade, de pistes de réforme concrètes pour bâtir un régime juridique et financier permettant de traiter globalement le problème. L'Assemblée nationale a par ailleurs demandé à la Cour des comptes de réaliser un rapport sur ce sujet, en application de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF).

Cela fait beaucoup de rapports, mais encore trop peu d'actions !

Aussi, pour avancer sur ce sujet sans pour autant inscrire des dispositifs qui n'auraient pas pu faire l'objet des concertations suffisantes avec les assureurs et les représentants des sinistrés, compte tenu des délais d'examen pour ce texte, je vous proposerai deux amendements à titre principal.

Le premier amendement vise à améliorer l'appréhension du phénomène de RGA par les pouvoirs publics en prévoyant : l'établissement d'une liste des EPCI à fiscalité propre les plus exposés à ce phénomène - l'aléa fort, représentant au total 12 405 communes, soit 35,2 % des communes ; l'obligation, pour le préfet de département, de réaliser un schéma de prévention des risques naturels majeurs spécifiquement pour ces territoires exposés au RGA, alors que l'élaboration de ce schéma est une faculté et que seule une dizaine de départements utilisent cette possibilité à l'heure actuelle ; la réalisation d'une cartographie locale, à la maille intercommunale, par le référent institué à l'article 2 de la présente proposition de loi, permettant une connaissance plus fine des effets potentiels de ce phénomène ; enfin, l'intervention d'un décret pour préciser les conditions dans lesquelles les habitants des zones concernées pourront être accompagnés sur les plans technique et financier dans la connaissance de la vulnérabilité de leurs biens, notamment par la réalisation de diagnostics, et pour le renforcement de la résilience de leurs habitations.

Enfin, le second amendement vise à compléter la demande de rapport prévu par cet article, pour que ce rapport propose des pistes permettant d'établir un régime juridique et financier global traitant de l'ensemble des aspects liés aux phénomènes de retrait-gonflement des argiles et soutenable sur le long terme, et non simplement un enchaînement de constats.

Voici les éléments dont je souhaitais faire part à la commission. Sous réserve de l'adoption des amendements que je vous présenterai, je propose à la commission d'adopter les articles que nous examinons au fond et de donner un avis favorable à l'adoption de ce texte.

Mme Christine Lavarde , rapporteur de la commission des finances . - Au fil de nos auditions, nous avons eu l'impression que l'on avait perdu du temps depuis l'adoption de la proposition de loi de Nicole Bonnefoy par le Sénat au début de l'année 2020 : plus d'un an déjà, alors que le texte actuel s'inspire largement de ses dispositions... Il aurait été plus efficace de poursuivre la navette parlementaire ! Nous aurions déjà un texte opérationnel.

Ensuite, ce texte ne traite pas l'aléa qui suscite le plus de contentieux, celui lié au retrait-gonflement des argiles (RGA). Tous les services de l'État n'ont pas la même position : certains estiment qu'il conviendrait de créer un régime d'indemnisation spécifique, d'autres que l'on peut corriger le dispositif « CatNat » actuel.

Il importe de réfléchir à la manière de nous préparer collectivement à ces risques. Les travaux de prévention pour renforcer la résilience du bâti face aux aléas climatiques sont très coûteux pour les particuliers, souvent supérieurs à la valeur de l'habitation lorsqu'il s'agit de RGA. Faut-il alors reconstruire l'existant en cas de catastrophe, ou bien favoriser une installation dans une région moins exposée ? La proposition de loi ne tranche pas la question.

De même, pour les nouvelles constructions, est-ce aux particuliers de payer les surcoûts liés à la construction d'un bâtiment résilient ? N'oublions pas que la majeure partie du territoire est concernée par le risque de RGA, y compris, je l'ai découvert à l'occasion de l'examen de ce texte, la ville de Boulogne !

Une action de l'État serait sans doute nécessaire pour nous adapter à ces nouveaux aléas, encourager de nouvelles pratiques, etc. Mais cela implique de quitter le dispositif assurantiel pour développer une logique de prévention. C'est une question essentielle pour notre politique d'aménagement du territoire, qui doit répondre aux aspirations d'une partie de nos concitoyens à vivre hors des villes. Si nous ne proposons pas de solution concrète, nous ne pourrons pas soutenir ce mouvement.

M. Pascal Martin , rapporteur pour avis. - Il me revient enfin de proposer à la commission un périmètre pour le texte, en application de l'article 45 de la Constitution. Au regard des articles traités par la commission, je vous propose de considérer que le texte de la proposition de loi visant à réformer le régime des catastrophes naturelles déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale comporte des dispositions relatives à la composition, aux missions, à l'organisation et au fonctionnement des instances chargées de l'instruction des demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, aux modalités d'instruction des demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle et d'évaluation des critères retenus pour constater l'état de catastrophe naturelle ; à la connaissance, à la prévention et à l'indemnisation des dommages causés par les mouvements de terrain consécutifs du retrait-gonflement des argiles, en particulier les pistes de réforme pouvant être envisagées dans le cadre d'un rapport du Gouvernement au Parlement ; enfin, à l'information des collectivités territoriales, des habitants, des entreprises et des associations de sinistrés, et à l'accompagnement des collectivités territoriales, en particulier des communes, concernant les démarches visant à mobiliser les dispositifs d'aide et d'indemnisation susceptibles d'être engagés après des événements climatiques exceptionnels pouvant donner lieu à la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle.

M. Didier Mandelli . - Comme nos rapporteurs, je ressens une certaine amertume : que de temps de perdu, que d'énergies dépensées en vain lors du travail de la mission sénatoriale sur la gestion des risques climatiques présidée par Michel Vaspart et dont Nicole Bonnefoy était rapporteure, et sur la proposition de loi qui a suivi... Cela mériterait un courrier de protestation formelle de la part du Sénat. La navette aurait pu se poursuivre.

Au lieu de cela, nous devons refaire le travail à nouveau. Ce n'est pas une bonne façon de procéder. Il ne faut pas s'étonner que nos concitoyens s'éloignent de la politique.

Le fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM) dit fonds « Barnier » vise à traiter les causes, la prévention, quand le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles traite les conséquences, la prise en compte des dommages. Les crédits de ce fonds ont été intégrés au budget général : or, sur cette somme, environ un milliard d'euros, en comptant les crédits à disposition des préfectures, très peu d'argent sera consacré à la prévention des risques naturels dans les faits. Les enjeux sont pourtant considérables, comme l'ont encore montré les travaux de l'Association nationale des élus du littoral (Anel). Il est dommage que le Gouvernement ne prenne pas ce problème suffisamment au sérieux.

Mme Nadège Havet . - Ce texte s'inscrit dans un contexte marqué par la multiplication d'intempéries toujours plus violentes, qui provoquent des drames matériels et humains considérables. Il est vrai que l'on aurait pu gagner du temps dans la procédure. Ce texte est utile et très attendu, tant par les élus que par les citoyens. Notre devoir est d'accompagner les victimes. J'espère que nous saurons unir nos forces.

M. Ronan Dantec . - Ce n'est pas en procédant de la sorte que l'on unit nos forces ! On ne peut que déplorer les mauvaises manières de l'Assemblée nationale...

Comme avec la loi « Climat », on agite de grands mots - « résilience », « indemnisation des catastrophes naturelles », etc. -, sans traiter les problèmes. Le périmètre de ce texte n'est pas le bon. Je m'abstiendrai donc sur la définition du périmètre proposée par le rapporteur pour avis. On ne peut plus se contenter de bricolages, sur des aspects partiels, alors que les enjeux financiers sont considérables et qu'il en va de la solidarité entre les territoires. Les collectivités sont laissées seules face à la multiplication des risques : RGA, montée des eaux, etc. L'État doit les accompagner et les aider. Il conviendrait de fixer un cadre d'actions global pour tous ces risques, pour intégrer les documents d'urbanisme et les différents mécanismes d'information et d'indemnisation.

Mme Pompili a annoncé une nouvelle loi « Énergie-Climat » en 2023, avec un volet consacré à l'adaptation. Une concertation va s'engager et des groupes de travail vont se mettre en place. Il faudra que cette loi comporte un dispositif complet de mise en cohérence de l'ensemble des mécanismes existants et des financements. Mais tout cela implique de définir une recette financière pérenne...

EXAMEN DES ARTICLES

Article 2 (délégué)

M. Pascal Martin , rapporteur pour avis . - Mon amendement COM-21 tend à améliorer la rédaction des alinéas 2 à 4 du présent article et à prévoir l'intervention du référent auprès des communes pour les soutenir après un évènement climatique exceptionnel, même lorsque celles-ci n'ont pas vu leurs demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle satisfaites.

L'amendement COM-21 est adopté.

M. Pascal Martin , rapporteur pour avis . - Mon amendement COM-22 vise à marquer l'importance de la mission d'information des collectivités territoriales par le référent préfectoral, notamment sur l'utilisation du fonds « Barnier », alors qu'aujourd'hui les élus peinent à accéder à cette information. L'amendement marque également l'importance de la prévention des catastrophes naturelles et pas seulement de leur « gestion ».

L'amendement COM-22 est adopté.

M. Pascal Martin , rapporteur pour avis . - Mon amendement COM-23 vise à améliorer la rédaction de l'alinéa 8.

L'amendement COM-23 est adopté.

M. Pascal Martin , rapporteur pour avis . - Avis favorable à l'amendement COM-7 rectifié qui reprend l'article 5 de la proposition de loi de Nicole Bonnefoy, adoptée par le Sénat en janvier 2020, et vise à créer une cellule de soutien aux élus. Le référent institué à l'article 2 de la PPL permettra d'accompagner concrètement les communes face aux catastrophes naturelles et il existe par ailleurs une commission départementale des risques naturels majeurs (CDRNM), composée notamment d'élus locaux. La proposition de créer une cellule de soutien aux élus s'inscrit donc dans une logique de complémentarité.

La commission proposera à la commission des finances d'adopter l'amendement COM-7 rectifié.

La commission proposera à la commission des finances d'adopter l'article 2 ainsi modifié .

Après l'article 2 (délégué)

M. Pascal Martin , rapporteur pour avis . - L'amendement COM-8 rectifié vise à créer un portail internet unique regroupant l'ensemble des informations sur la prévention et la gestion des risques naturels. À ce stade, j'émets un avis défavorable à cet amendement, car il s'insère mal dans le texte en l'état. Je proposerai cependant une nouvelle rédaction à notre collègue Dominique Estrosi Sassone en vue de la séance publique, pour qu'elle puisse déposer un amendement auquel je donnerai un avis favorable.

M. Ronan Dantec . - Il existe déjà le portail DRIAS. L'État et Météo France travaillent aussi sur un portail unique qui devrait être présenté fin novembre.

La commission proposera à la commission des finances de ne pas adopter l'amendement COM-8 rectifié.

Article 4 (délégué)

M. Pascal Martin , rapporteur pour avis . - Mon amendement COM-24 vise à prévoir explicitement la présence de représentants des sinistrés au sein de la Commission nationale consultative des catastrophes naturelles et à lui permettre de procéder à l'audition de toute personne qui pourrait éclairer la conduite de ses travaux. L'amendement vise aussi à supprimer la présence de parlementaires au sein de cette commission : nous devons rationaliser notre présence dans les organismes extraparlementaires (OEP) pour concentrer notre action sur le travail parlementaire et ne pas nous retrouver en porte-à-faux par rapport à l'activité et aux décisions de ces organismes, qui dépendent tout de même du Gouvernement. En outre, inclure des parlementaires dans la Commission nationale consultative des catastrophes naturelles ne me semble pas nécessaire : il y a déjà trois sénateurs et trois députés qui siègent au sein du Conseil d'orientation pour la prévention des risques naturels majeurs et je vous proposerai un amendement qui prévoit la transmission de certains documents de la Commission nationale consultative et de la Commission interministérielle à ce Conseil d'orientation et au Parlement, donc cela revient au même et les parlementaires seront informés.

L'amendement COM-24 est adopté.

M. Pascal Martin , rapporteur pour avis . - Mon amendement COM-25 vise à préciser et renforcer le rôle de la nouvelle Commission consultative nationale des catastrophes naturelles, en prévoyant explicitement qu'elle sera chargée d'évaluer les conditions effectives de l'indemnisation des sinistrés par les assureurs et la caisse centrale de réassurance. C'est un enjeu très important, surtout pour le risque de sécheresse-réhydratation des sols.

L'amendement COM-25 est adopté.

M. Pascal Martin , rapporteur pour avis . - Comme je vous l'annonçais, cet amendement COM-26 prévoit la transmission des travaux de la Commission nationale consultative des catastrophes naturelles et de la Commission interministérielle de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, tantôt au Conseil d'orientation pour la prévention des risques naturels majeurs, qui comprend notamment six parlementaires, tantôt directement au Parlement.

L'amendement COM-26 est adopté.

M. Pascal Martin , rapporteur pour avis . - L'amendement COM-9 rectifié propose que les comptes rendus de la Commission interministérielle soient rendus publics. Avis favorable.

La commission proposera à la commission des finances d'adopter l'amendement COM-9 rectifié.

La commission proposera à la commission des finances d'adopter l'article 4 ainsi modifié .

Article 7 (délégué)

M. Pascal Martin , rapporteur pour avis . - Mon amendement COM-27 vise à améliorer l'appréhension du phénomène de retrait-gonflement des argiles par les pouvoirs publics en prévoyant : l'établissement d'une liste des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre les plus exposés à ce phénomène ; l'obligation, pour le préfet de département, de réaliser un schéma de prévention des risques naturels majeurs spécifiquement pour ces territoires exposés au RGA, alors que l'élaboration de ce schéma est actuellement une simple faculté ; la réalisation d'une cartographie locale, à la maille intercommunale, par le référent institué par l'article 2 de la présente proposition de loi, permettant une connaissance plus fine des effets potentiels de ce phénomène ; enfin l'intervention d'un décret pour préciser les conditions dans lesquelles les habitants des zones concernées pourront être accompagnés sur les plans financier et technique dans la connaissance de la vulnérabilité de leurs biens et le renforcement de la résilience de leurs habitations.

L'amendement COM-27 est adopté.

M. Pascal Martin , rapporteur pour avis . - Mon amendement COM-28 vise à prévoir que le rapport qui sera remis au Parlement devra également proposer des pistes permettant d'établir un régime juridique et financier global traitant de l'ensemble des aspects liés aux phénomènes de retrait-gonflement des argiles.

L'amendement COM-28 est adopté.

La commission proposera à la commission des finances d'adopter l'article 7 ainsi modifié.

Les sorts et avis des amendements examinés par la commission sont retracés dans le tableau suivant :

Proposition de loi visant à réformer le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles

TITRE I er : Faciliter les démarches de reconnaissance de l'État de catastrophe naturelle
et renforcer la transparence des décisions

Article 2

Auteur

Objet

Sort / avis de l'amendement

M. Pascal MARTIN, rapporteur pour avis

21

Améliorer rédaction alinéas 2 à 4 et prévoir l'intervention du référent y compris auprès des communes qui n'auraient pas vu leurs demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle satisfaites

Adopté

M. Pascal MARTIN, rapporteur pour avis

22

Renforcer l'information des collectivités territoriales sur la prévention et la gestion des catastrophes naturelles et sur l'utilisation du fonds « Barnier »

Adopté

M. Pascal MARTIN, rapporteur pour avis

23

Améliorer rédaction alinéa 8 sur la mise à disposition des communes de supports de communication présentant la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle

Adopté

Mme ESTROSI SASSONE

7 rect.

Instituer une cellule départementale de soutien à la gestion des catastrophes naturelles pour les maires

Favorable

Article(s) additionnel(s) après Article 2

Mme ESTROSI SASSONE

8 rect.

Créer un portail internet interministériel unique sur la prévention des risques, la gestion de crise et l'indemnisation des sinistrés

Défavorable

TITRE II : Sécuriser l'indemnisation et la prise en charge des sinistrés

Article 4

M. Pascal MARTIN, rapporteur pour avis

24

Prévoir la présence de représentants des sinistrés au sein de la Commission nationale consultative des catastrophes naturelles, supprimer la présence de parlementaires en son sein et lui permettre de procédure à l'audition de toute personne utile à ses travaux

Adopté

M. Pascal MARTIN, rapporteur pour avis

25

Prévoir que la Commission nationale consultative des catastrophes naturelles sera chargée d'évaluer les conditions effectives de l'indemnisation des sinistrés

Adopté

M. Pascal MARTIN, rapporteur pour avis

26

Accroître la transparence sur le fonctionnement de la Commission nationale consultative et sur de la Commission interministérielle en prévoyant la transmission de documents qu'elles produisent tantôt au Parlement, tantôt au Conseil d'orientation pour la prévention des risques naturels majeurs

Adopté

Mme ESTROSI SASSONE

9 rect.

Prévoir que les comptes rendus des débats de la Commission interministérielle sont rendus publics

Favorable

TITRE III : Traiter les spécificités du risque sécheresse-réhydratation des sols
en matière d'indemnisation et de prévention

Article 7

M. Pascal MARTIN, rapporteur pour avis

27

Évaluer et gérer les risques de mouvements de terrain consécutifs à la sécheresse ou à la réhydratation des sols (identification des EPCI à fiscalité propre fortement exposés, réalisation obligatoire d'un schéma de prévention des risques, réalisation d'une cartographie locale, prévoir les conditions de soutien aux particuliers pour l'identification des risques et le renforcement de la résilience du bâti)

Adopté

M. Pascal MARTIN, rapporteur pour avis

28

Prévoir que la demande de rapport devra proposera des pistes de réforme

Adopté

RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45
DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 bis
DU RÈGLEMENT DU SÉNAT

Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie » 22 ( * ) .

De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie 23 ( * ) . Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte 24 ( * ) . Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel ajoute un second critère : il considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial 25 ( * ) .

En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.

En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, au regard des 3 articles délégués au fond à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable , celle-ci, lors de sa réunion du mardi 12 octobre 2021, a proposé à la commission des finances de considérer que le texte qui lui était soumis comportait des dispositions relatives :

- à la composition, aux missions, à l'organisation et au fonctionnement des instances chargées de l'instruction des demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, aux modalités d'instruction des demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle et d'évaluation des critères retenus pour constater l'état de catastrophe naturelle ;

- à la connaissance, à la prévention et à l'indemnisation des dommages causés par les mouvements de terrain consécutifs du retrait-gonflement des argiles, en particulier les pistes de réforme pouvant être envisagées dans le cadre d'un rapport du Gouvernement au Parlement ;

- à l'information des collectivités territoriales, des habitants, des entreprises et des associations de sinistrés et à l'accompagnement des collectivités territoriales, en particulier des communes, concernant les démarches visant à mobiliser les dispositifs d'aide et d'indemnisation susceptibles d'être engagés après des évènements climatiques exceptionnels pouvant donner lieu à la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle.

En application du vademecum précité, la commission des finances a arrêté , lors de sa réunion du mercredi 13 octobre 2021, le périmètre indicatif de la proposition de loi n° 325 (2020-2021) visant à réformer le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles .

Ce périmètre comprend :

- toutes dispositions relatives à la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, et notamment celles relatives aux modalités de constatation et de notification de l'état de catastrophe naturelle, à la composition, aux missions, à l'organisation et au fonctionnement des instances chargées de l'instruction des demandes de reconnaissance, aux modalités de dépôt et d'instruction des demandes de reconnaissance et d'évaluation des critères retenus pour constater l'état de catastrophe naturelle ;

- toutes dispositions relatives à la connaissance, à la prévention et à l'indemnisation des dommages causés par les mouvements de terrain consécutifs du retrait-gonflement des argiles, en particulier les pistes de réforme pouvant être envisagées dans le cadre d'un rapport du Gouvernement au Parlement ;

- toutes dispositions relatives à l'information des collectivités territoriales, des habitants, des entreprises et des associations de sinistrés et à l'accompagnement des collectivités territoriales, en particulier des communes, concernant les démarches visant à mobiliser les dispositifs d'aide et d'indemnisation susceptibles d'être engagés après des évènements climatiques exceptionnels pouvant donner lieu à la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle ;

- toutes dispositions relatives au périmètre des effets des catastrophes naturelles devant être indemnisés par la garantie dite « catastrophes naturelles », à l'indemnisation des assurés, à la définition de la franchise applicable et de l'ampleur des désordres devant être couverts par les travaux pris en charge par l'indemnisation due.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Mardi 5 octobre 2021

- Ministère de la transition écologique et solidaire - Direction générale de la prévention des risques (DGPR) : Mme Véronique LEHIDEUX , cheffe du service des risques naturels et hydrauliques, M. Rodolphe VAN VLAENDEREN , chef du bureau des risques naturels terrestres.

Mercredi 6 octobre 2021

-  Ministère de l'intérieur - Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) : MM. Romain ROYET , directeur général adjoint, Yves HOCDÉ , sous-directeur de la préparation, de l'anticipation et de la gestion des crises (SDPACGC), Loïc GROSSE , adjoint au sous-directeur de la préparation, de l'anticipation et de la gestion des crises (SDPACGC), Guillaume FORNASIER , chef de la mission catastrophes naturelles.

- Ministère de l'économie, des finances et de la relance - Direction générale du trésor (DGT) : MM. Lionel CORRE , sous-directeur des assurances, Guillaume VIDAL , adjoint au chef du bureau des marchés et des produits d'assurance - ASSUR1.

Jeudi 7 octobre 2021

- Fédération française de l'assurance (FFA) : MM. Franck LE VALLOIS , directeur général, Christian PIEROTTI , directeur des affaires publiques, Mme Viviana MITRACHE-RIMBAULT , sous-directeur, responsable des affaires parlementaires, MM. Christophe DELCAMP , directeur adjoint du Pôle assurance de dommage et responsabilité, Alexis MERKLING , sous-directeur marchés particuliers - Pôle practices métiers - assurances dommages & responsabilité, Arnaud GIROS , chargé de mission - Département des affaires parlementaires - Pôle affaires publiques.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, visualiser les apports de chaque assemblée, comprendre les impacts sur le droit en vigueur, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl20-325.html


* 1 Deux propositions de loi sur le même sujet, n° 441 (2003-2004) et n° 302 (2004-2005), déposées au Sénat, et le projet de loi n° 491 (2011-2012) portant réforme du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, déposé le 3 avril 2012 au Sénat mais jamais examiné.

* 2 Art. L. 565-1 du code de l'environnement, abrogé par l'ordonnance n° 2004-637 du 1 er juillet 2004 relative à la simplification de la composition et du fonctionnement des commissions administratives et à la réduction de leur nombre.

* 3 Art. R. 565-5 à R. 565-7.

* 4 Art. 44 de la loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages.

* 5 Présenter la révision et la programmation des documents de planification (DDRM, PPRN, etc.), faire le bilan des arrêtés de constatation de l'état de catastrophe naturelle, envisager des actions de prévention, partager une culture de la sécurité sur le territoire.

* 6 Loi modifiée par les lois n° 90-509 du 25 juin 1990 et n° 92-665 du 16 juillet 1992, intégrée dans le code des assurances aux articles L. 125-1 et suivants.

* 7 Deux premiers alinéas de l'article L. 125-1 du code des assurances.

* 8 La garantie instituée par la loi est appelée à intervenir contre les risques d'inondation, de débordement de cours d'eau, de ruissellements d'eau, de boue ou de lave, de glissements ou d'effondrements de terrain, de subsidence (effondrement de terrain suite à la baisse de la nappe phréatique), de séismes, de raz-de-marée, de masses de neige ou de glace en mouvement ou encore de sécheresse-réhydratation des sols.

* 9 Troisième alinéa de l'article L. 125-1 du code des assurances.

* 10 Quatrième et cinquième alinéas de l'article L. 125-1 du code des assurances.

* 11 L'article 8 de la présente proposition de loi, reprenant les dispositions de l'article 5 de la proposition de loi de Nicole Bonnefoy, tend à porter ce délai à 24 mois.

* 12 Plateforme iCatNat.

* 13 Elle est composée d'un représentant du ministère de l'intérieur (direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises), d'un représentant du ministère de l'économie, des finances et de la relance (direction générale du trésor), d'un représentant du ministère de l'action et des comptes publics (direction du budget), d'un représentant du ministère de l'outre-mer (direction générale de l'outre-mer) lorsqu'un territoire ultramarin est concerné, d'un représentant de la Caisse centrale de réassurance et de deux experts désignés par le ministère de la transition écologique, spécialisés en fonction des phénomènes étudiés en commission.

* 14 Circulaire n° INTE980011C du 19 mai 1998 sur la procédure ordinaire, circulaire n° INTE1911312C du 10 mai 2019 sur l'instruction des demandes déposées au titre des épisodes de sécheresse-réhydratation des sols, circulaire n° INTE1917586C du 26 juin 2019 pour les aléas « mouvements de terrain » et « remontées de nappe ».

* 15 Circulaire n° INTK1405282C. Dans ce cas, les services préfectoraux fixent la liste des communes sinistrées et établissent un rapport circonstancié transmis au ministère de l'intérieur, qui sollicite des rapports d'expertise simplifiés. Ces rapports sont présentés à la Commission interministérielle, qui ne peut adopter que des avis favorables ou des décisions d'ajournement si les rapports ne lui permettent pas de se prononcer sur la situation d'une commune -- dans ce cas, les demandes communales sont réinstruites dans le cadre de la procédure normale.

* 16 Article L. 565-3 et D. 565-8 à D. 565-13 du code de l'environnement.

* 17 Chiffres transmis par la Direction générale de la prévention des risques (DGPR).

* 18 Les chiffres de la CCR sont issus du croisement de la base BD Topo de l'Institut géographique national (IGN) avec la couche du système d'information géographique (SIG) de la carte d'exposition au RGA. Les chiffres du Commissariat général au développement durable sont issus de la base Fideli 2017, fondée sur des données fiscales et des adresses postales.

* 19 Circulaire INTE1911312C du 10 mai 2019.

* 20 Proposition 49.

* 21 Proposition 55.

* 22 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.

* 23 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.

* 24 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.

* 25 .Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France.

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