N° 141 SÉNAT SESSION ORDINAIRE DE 2020-2021 |
Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 novembre 2020 |
AVIS PRÉSENTÉ
au nom de la commission des affaires sociales (1)
sur le projet de
loi
|
TOME III DIRECTION DE L'ACTION DU GOUVERNEMENT Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca) |
Par Mme Brigitte MICOULEAU, Sénatrice |
(1) Cette commission est composée de : Mme Catherine Deroche, présidente ; M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général ; M. Philippe Mouiller, Mme Chantal Deseyne, MM. Alain Milon, Bernard Jomier, Mme Monique Lubin, MM. Olivier Henno, Martin Lévrier, Mmes Laurence Cohen, Véronique Guillotin, M. Daniel Chasseing, Mme Raymonde Poncet Monge, vice-présidents ; Mmes Florence Lassarade, Frédérique Puissat, M. Jean Sol, Mmes Corinne Féret, Jocelyne Guidez, secrétaires ; Mme Cathy Apourceau-Poly, M. Stéphane Artano, Mme Christine Bonfanti-Dossat, MM. Bernard Bonne, Patrick Boré, Laurent Burgoa, Jean-Noël Cardoux, Mmes Catherine Conconne, Annie Delmont-Koropoulis, Élisabeth Doineau, MM. Alain Duffourg, Jean-Luc Fichet, Mmes Laurence Garnier, Frédérique Gerbaud, Pascale Gruny, M. Xavier Iacovelli, Mmes Corinne Imbert, Annick Jacquemet, Victoire Jasmin, Annie Le Houerou, M. Olivier Léonhardt, Mmes Viviane Malet, Colette Mélot, Michelle Meunier, Brigitte Micouleau, Annick Petrus, Émilienne Poumirol, Catherine Procaccia, Marie-Pierre Richer, Laurence Rossignol, M. René-Paul Savary, Mme Nadia Sollogoub, M. Dominique Théophile. |
Voir les numéros : Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 3360 , 3398 , 3399 , 3400 , 3403 , 3404 , 3459 , 3465 , 3488 et T.A. 500 Sénat : 137 et 138 à 144 (2020-2021) |
L'ESSENTIEL
1. SI LA CRISE SANITAIRE N'A PAS BOULEVERSÉ LE PAYSAGE DES ADDICTIONS, ELLE POURRAIT ENGENDRER, À MOYEN TERME, UNE AUGMENTATION DES CONSOMMATIONS ET DES USAGES ADDICTIFS
A. LES CONSOMMATIONS DE TABAC ET D'ALCOOL CONTINUENT LEUR DIMINUTION
Les consommations de substances addictives licites (tabac et alcool) continuent leur décrue. Si la politique vigoureuse de lutte contre le tabac a été efficace, comme en atteste la baisse du nombre de fumeurs depuis 2016, il faut se garder de tout triomphalisme. En effet, le tabac demeure responsable de 75 000 décès par an, et la trajectoire de baisse de 2019 est un peu moins favorable que celle de 2018. En outre, la diminution de la consommation tabagique est socialement marquée : les ouvriers demeurent deux fois plus nombreux à fumer que les cadres et le poste « tabac et boissons alcoolisées » est le seul pour lequel les ouvriers dépensent davantage que les cadres. L'écart de consommation entre hommes et femmes tend à se réduire. Suite à la diminution du nombre de fumeurs, il devient pertinent de repérer précocement les consommateurs afin de leur proposer un suivi personnalisé.
Si les consommations globales d'alcool diminuent en France, l'alcool demeure la substance psychoactive la plus précocement et fréquemment utilisée chez les jeunes. 53 % des Français âgés de 16 ans ont consommé de l'alcool dans le mois et 35 % ont connu une alcoolisation ponctuelle importante au cours du mois précédent. Ces chiffres classent la France au-dessus de la moyenne européenne. Responsable de 41 000 décès par an, l'alcool est en cause dans 40 % des crimes et délits commis dans notre pays. Il est aussi un puissant aggravateur des violences intrafamiliales. Malgré ces constats sans appel, la France peine à mettre en oeuvre une politique volontariste de lutte contre les méfaits de l'alcool, comme en témoigne, par exemple, la profonde méconnaissance des repères de consommation à moindre risque par la population. La politique de lutte contre les consommations excessives d'alcool semble inconsistante, voire accommodante. En application de la loi du 27 décembre 2019, une ordonnance doit être publiée avant fin avril 2021 ; elle réformera le code des débits de boissons pour favoriser la création de lieux de convivialité et, dans le même temps, rénovera l'encadrement de la vente d'alcool en alliant des objectifs de simplification administrative et de santé publique. Ce futur texte semble poursuivre des objectifs pour le moins contradictoires d'un point de vue de la prévention des consommations d'alcool.
Face au stress et à l'angoisse provoqués par la crise sanitaire et économique, les pouvoirs publics doivent redoubler de vigilance dans la lutte contre les addictions, avec ou sans substances.
Avec l'apparition de l'épidémie de Covid-19, des fortes craintes ont été émises de voir les addictions se développer, sous l'effet conjugué du risque de contracter le virus et du caractère potentiellement pathogène des confinements. La situation sanitaire crée de nombreuses incertitudes, voire des situations de stress et d'angoisse, qui peuvent générer un plus grand recours aux substances psychoactives et in fine la perte de contrôle de la consommation, caractéristique de l'addiction. En outre, l'offre d'alcool et de tabac est peu altérée en temps de confinement, cigarettes et boissons alcoolisées restant disponibles et accessibles.
Le choc redouté ne s'est néanmoins pas produit, la hausse des consommations de tabac et d'alcool ayant été contenue au cours de l'année 2020.
Lors du premier confinement, le volume des ventes de tabac a nettement augmenté, notamment durant le premier mois. Mais sur les trois premiers trimestres de 2020 les ventes sont en baisse de 1,4 %, comparées à janvier/septembre 2019.
Lors du confinement du printemps 2020, 65 % des usagers d'alcool ont déclaré une consommation similaire à leurs habitudes, 24 % l'auraient diminuée et 11 % auraient bu davantage. Les périodes de confinement diminuent les opportunités de consommation d'alcool, en particulier pour les jeunes ou les consommateurs occasionnels.
S'agissant de l'usage du cannabis, un quart des usagers a diminué sa consommation, 27 % l'a augmenté, 26 % ne l'a pas modifié et 32 % n'ont pas consommé. Le confinement strict a fait prendre conscience à certains usagers de leur dépendance au produit, son obtention étant moins aisée .