III. LES APL EN TEMPS RÉEL, UNE RÉFORME DE BON SENS
La contemporanéisation des APL, c'est-à-dire leur versement en temps réel, a été votée dans la loi de finances pour 2019. Elle consiste à calculer les APL sur les douze derniers mois glissants et à réviser leur montant tous les trois mois. Mais son application a été reportée au 1 er janvier 2020.
A. UNE MISE EN oeUVRE RETARDÉE
Ce retard a coûté très cher à l'État, puisque dès la 2 nde lecture du PLF 2019, le Gouvernement avait dû par amendement majorer les crédits de 330 millions d'euros. Les nouveaux retards et le report à début 2020 a conduit le Gouvernement à demander une nouvelle rallonge de 627 millions d'euros en loi de finances rectificative pour 2019, soit, au total, 957 millions d'euros .
Le décalage de la réforme est essentiellement dû à la complexité du chantier informatique. Il nécessite une refonte totale du système d'information de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) qui assure le versement à plus de 15 millions de ménages d'une ou plusieurs aides (APL, prestation familiale, minima sociaux). Il a également fallu créer un dispositif automatique de transfert des données issues de la déclaration sociale nominative (DSN) et du prélèvement à la source (PAS) au profit des caisses.
C'est une mesure de bon sens .
Mais, en modifiant la période de référence du calcul des APL dans un contexte économique plus favorable, la réforme entraîne un gain budgétaire, la première année, qui sera de l'ordre de 1,3 milliard d'euros.
La commission regrette que cette somme ne soit pas réaffectée au logement social ou à la rénovation énergétique
B. DES IMPACTS INSUFFISAMMENT MESURÉS ?
T outes les craintes ne sont pas encore levées. Même si les paramètres de calcul sont inchangés, les simulations manquent pour savoir qui sera touché et comment .
Les impacts sur les bénéficiaires ne seront disponibles qu'après les phases de calcul à blanc incluant les données réelles. Cette opération essentielle pour tester l'opérationnalité des nouveaux moteurs de calcul mis en place dans les systèmes d'information des organismes payeurs, permettra également de préciser les variations d'APL observées sur le stock de ménages bénéficiaires.
Or ces calculs ne devraient pouvoir intervenir que dans les prochaines semaines soit à très faible échéance de l'entrée en vigueur effective de la réforme qui doit s'appliquer aux APL versées début février .
Néanmoins, selon les informations transmises dans les questionnaires budgétaires, les évolutions tendancielles de l'APL en fonction du profil de ressources de certains ménages peuvent être précisées :
- Si les revenus récents sont en baisse , le ménage bénéficiera d'un relèvement beaucoup plus rapide de l'aide au logement. Cette situation peut être illustrée par des ménages dont l'un des membres passerait d'une activité à temps plein à un temps partiel.
- Dans le cas contraire , le montant sera ajusté pour tenir compte d'une amélioration de sa situation financière. Ce cas de figure sera observé pour des ménages dont l'un des membres voit son salaire évoluer positivement.
- Si les revenus perçus sont réguliers et stables , la réforme n'aura aucune incidence sur le montant de l'aide au logement. Les retraités dont la pension évolue peu dans le temps représentent un exemple concret de stabilité de l'aide avant et après la réforme
Par ailleurs, le Gouvernement a souhaité protéger les jeunes en situation potentielle de fragilité :
- Les planchers de ressources servant de calcul aux aides au logement pour les étudiants sont préservés. Ces planchers serviront également de référence pour les étudiants salariés ayant des revenus supérieurs à ces planchers, ce qui permettra d'améliorer la situation des jeunes qui doivent travailler pour financer leurs études. La situation des étudiants resterait donc inchangée, voire améliorée .
- L'abattement fiscal pour la prise en compte des revenus des apprentis et stagiaires (jusqu'à 17 982 € pour des revenus 2018) est maintenu . Les jeunes concernés continueront donc à bénéficier d'une APL adaptée.
- Le dispositif d'évaluation forfaitaire , qui pouvait avoir des effets défavorables sur les jeunes travailleurs en début d'activité mais aussi pour certains types d'activités saisonnières ou irrégulières, est supprimé .
Le projet de décret qui devait être examiné le 14 novembre dernier par le Conseil de l'habitat confirme ces éléments et apporte quelques précisions selon les informations parues dans la presse spécialisée.
Par exemple, la question du traitement des demandes des personnes qui sortiraient puis rentreraient à nouveau dans le périmètre des APL est abordée. Les droits pourraient être réexaminés, sans nouvelle demande, jusqu'à neuf mois après la perte de l'aide .
On peut également noter, dans les mesures transitoires, qu'un ménage dont l'un des membres subirait le chômage ou partirait en retraite au moment de la réforme et qui pourrait voir baisser subitement les aides perçues, bénéficiera du maintien des aides . Ce maintien disparaîtra au bout de 12 mois ou si la situation du ménage s'améliore.