EXPOSÉ GÉNÉRAL
I. LA BAISSE DES CRÉDITS DÉDIÉS À L'ACCÈS ET AU RETOUR À L'EMPLOI S'EXPLIQUERAIT PAR L'AMÉLIORATION DE LA CONJONCTURE MAIS ÉGALEMENT PAR LA POURSUITE DE LA POLITIQUE INITIÉE EN 2018 EN MATIÈRE DE CONTRATS AIDÉS
Le programme 102 regroupe des crédits destinés à aider les personnes éloignées de l'emploi à retrouver un travail. Il finance, d'une part, des dispositifs relevant du service public de l'emploi et, d'autre part, des dispositifs ciblés en faveur de publics spécifiques.
Depuis la loi de finances pour 2018 1 ( * ) , ce programme comprend une troisième action regroupant des crédits correspondants au plan d'investissement compétences (PIC) annoncé à l'automne 2017 et qui doit couvrir la période 2018-2022.
Le programme 102 représente plus de la moitié (51,9 %) des crédits de la mission en 2019 (hors fonds de concours et attribution de produit). Ses crédits connaissent une baisse de 7,7 % en 2019 pour s'établir à 6,29 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 6,45 milliards d'euros en crédits de paiement (CP).
A. LES CRÉDITS DÉDIÉS À L'AMÉLIORATION DU SERVICE PUBLIC DE L'EMPLOI DIMINUERAIENT SOUS L'EFFET DE L'EXTINCTION PROGRESSIVE DE PLUSIEURS DISPOSITIFS, DE L'AMÉLIORATION DE LA CONJONCTURE ET D'UN EFFORT DE PRODUCTIVITÉ DEMANDÉ À PÔLE EMPLOI
L'action 1 regroupe les crédits accordés à Pôle emploi sous forme de subvention pour charges de service public (sous-action 2) et pour financer plusieurs dispositifs en faveur des demandeurs d'emploi qui ne relèvent pas du régime assurantiel (sous-action 1). Ces crédits représentent plus de la moitié (56 %) des crédits du programme. Ils s'élèveraient en 2019 à près de 3,6 milliards d'euros en AE comme en CP, soit une baisse de 11,5 % par rapport à la LFI pour 2018.
1. Une baisse des dépenses au titre du régime de solidarité de l'assurance chômage du fait notamment de l'extinction de plusieurs dispositifs et d'un moins grand nombre de bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique
La sous-action 1 finance à hauteur de 2,06 milliards d'euros le régime de solidarité d'indemnisation du chômage et notamment l'allocation de solidarité spécifique (ASS). Ces crédits baisseraient de 136,4 millions d'euros en 2019, du fait principalement de l'amélioration de la conjoncture économique et de l'extinction progressive de dispositifs créés sous les quinquennats précédents.
a) Une baisse notable des dépenses liées à l'ASS
L'ASS, attribuée sous condition de ressources à des demandeurs d'emploi qui ont épuisé leurs droits à l'assurance chômage, représente 97 % de la participation de l'État au financement du régime de solidarité de l'indemnisation chômage. Les crédits correspondant (1,99 milliard d'euros) baisseraient de 15,9 % en 2019, en lien avec une réduction de 17 % du nombre d'allocataires (339 300 en 2019 contre 409 000 prévus en 2018).
Selon les informations fournies à votre rapporteur par la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP), la baisse du nombre d'allocataires s'expliquerait « essentiellement » par l'amélioration de la conjoncture économique. Les réformes intervenues depuis 2014, et notamment la mise en place de droits rechargeables à l'assurance chômage aurait également un impact mais « de second ordre ».
En application de l'article 57 de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel 2 ( * ) , le Gouvernement a transmis en septembre 2018 aux partenaires sociaux un document de cadrage proposant de revoir l'articulation entre assurance et solidarité. Les négociations qui doivent se conclure en 2019 pourraient donc conduire à la mise en place d'une assurance chômage de longue durée qui substituerait à terme à l'ASS. Le financement de cette nouvelle allocation devra, le cas échéant, être précisé.
b) L'extinction progressive de plusieurs dispositifs de solidarité
L'allocation équivalent-retraite (AER), versée aux demandeurs d'emploi ayant cotisé suffisamment de trimestres mais n'ayant pas atteint l'âge de la retraite a été mise en extinction depuis 2009 même si des droits ont été à nouveau ouverts à titre exceptionnel en 2009 et 2010. Les dépenses correspondantes seraient de 3,3 millions d'euros pour 261 allocataires au titre de l'ASS mise en extinction par la loi de finances pour 2009 et de 4,1 millions d'euros au titre des nouveaux droits ouverts en 2009 et 2010 (326 allocataires).
Les dépenses au titre de l'allocation (ASS-F) versée aux bénéficiaires de l'ASS suivant une formation qui n'est pas rémunérée par ailleurs ainsi qu'aux bénéficiaires de l'allocation d'aide au retour à l'emploi progresseraient de 8,98 % pour atteindre 27,9 millions d'euros.
L'allocation complémentaire (ACO) 3 ( * ) représenterait un coût de 0,16 million d'euros en 2019 (- 38,5 %).
L'indemnisation des intermittents du spectacle par l'allocation de professionnalisation et de solidarité (APS) et l'allocation de fin de droits (AFD) représenteraient un montant total de 1,6 million d'euros, soit une progression de 60 % par rapport à 2018.
Le budget pour 2019 ne prévoit plus de crédit au titre de l'allocation temporaire d'attente (ATA), dont la suppression a été prévue par la loi de finances pour 2017 et qui représentait 6,3 millions d'euros en 2018 au titre du stock de bénéficiaires.
c) L'augmentation des crédits liés à la rémunération de fin de formation en raison d'une mesure de transfert
Les crédits prévus au titre de la rémunération de fin de formation (R2F) progressent de 68,8 millions d'euros (+ 52 %) pour atteindre 201 millions d'euros. Cette augmentation résulterait principalement de la prise en charge par l'État du financement qui était jusqu'à présent assuré par le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP), dont la suppression a été prévue par la loi du 5 septembre 2018.
2. Un effort important demandé à Pôle emploi
a) Une baisse substantielle de la subvention pour charges de service public et du plafond d'emploi
La sous-action 2 correspond à la subvention pour charges de service public (SCP) versée à Pôle emploi. Elle s'élèverait en 2019 à 1,37 milliard d'euros 4 ( * ) , en baisse de 84,7 millions d'euros (- 5,8 %) par rapport à la LFI 2018. Selon le PAP, cette baisse correspondrait à la poursuite de gains de productivité et, à hauteur de 26 millions d'euros, à une baisse des effectifs.
Le plafond d'emplois de l'opérateur serait en effet fixé pour 2019 à 46 045 équivalents temps plein travaillés (ETPT), soit 400 ETPT de moins qu'en 2018. Interrogé par votre rapporteur, le directeur général de Pôle emploi a indiqué que cette réduction d'emploi, qui correspond à moins de 0,9 % de ses effectifs, pouvait être absorbée en 2019 sans remettre en cause la capacité de Pôle emploi à remplir ses missions. Son opportunité peut toutefois être questionnée dans un contexte où le nombre de demandeurs d'emploi ne baisse que très lentement et où leur accompagnement est érigé en priorité.
La convention tripartite État-Unedic-Pôle emploi arrivera à échéance fin 2019. Une nouvelle convention doit donc être élaborée. Selon les informations communiquées à votre rapporteur par Pôle emploi, l'élaboration de cette convention pourrait être retardée afin de tenir compte de la nouvelle négociation sur l'assurance chômage voulue par le Gouvernement et prévue par la loi du 5 septembre 2018.
Des règles d'indemnisation des
démissionnaires
Pôle emploi devra mettre en oeuvre les nouvelles règles issues de la loi du 5 septembre 2018 5 ( * ) qui a notamment prévu l'ouverture, sous conditions, de l'indemnisation chômage aux salariés démissionnaires et aux indépendants. Cette réforme implique pour Pôle emploi des développements informatiques conséquents et la formation de ses personnels. La nouvelle négociation demandée par le Gouvernement aux partenaires sociaux pourrait à nouveau modifier les règles qui avaient été annoncées au moment de l'adoption de la loi du 5 septembre 2018, qui n'entreront donc vraisemblablement pas en vigueur le 1 er janvier 2019. |
b) Le retrait de l'État du financement des maisons de l'emploi
Le projet de loi initial ne prévoyait pas de crédit de l'État en faveur des maisons de l'emploi.
Par un amendement du rapporteur spécial de la commission des finances adopté en séance publique avec le soutien du Gouvernement, l'Assemblée nationale a prévu d'accorder 5 millions d'euros aux maisons de l'emploi. Ces crédits seraient retirés du programme 103.
Ce financement demeure nettement inférieur à celui qui avait été prévu par la loi de finances initiales pour 2018 (10,15 millions d'euros). Dans un rapport 6 ( * ) publié le 11 juillet 2018 et dont votre rapporteur partage les conclusions, nos collègues Emmanuel Capus et Sophie Taillé-Polian critiquaient le retrait de l'État du financement des maisons de l'emploi, mettant notamment en avant un risque d'accroissement des inégalités territoriales.
* 1 Loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018.
* 2 Loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.
* 3 L'ACO est versée à des demandeurs d'emploi âgés de plus de 60 ans qui ne peuvent percevoir qu'une partie de leur pension de retraite parce qu'ils ont effectué une partie de leur carrière dans une profession pour laquelle le régime de retraite de base ne prévoit le versement des retraites qu'à partir de 65 ans.
* 4 Pôle emploi est également financé notamment par une contribution de l'Unedic au moins égale à 10 % des contributions chômage collectées en année n-2, soit environ 3,5 milliards d'euros en 2019.
* 5 Loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.
* 6 Les maisons de l'emploi : renforcer leur gouvernance et pérenniser leur financement pour une politique territoriale de l'emploi vraiment efficace Rapport d'information de M. Emmanuel Capus et Mme Sophie Taillé-Polian, fait au nom de la commission des finances n° 652 (2017-2018) - 11 juillet 2018.