B. LES DÉPENSES D'INDEMNISATION DU CHÔMAGE
Alors que les dépenses d'assurance devraient augmenter l'an prochain, les dépenses de solidarité à la charge de l'Etat s'inscrivent en diminution dans le projet de budget.
1. L'augmentation des dépenses de l'Unedic
Avant l'été, l'Unedic envisageait un retour à l'équilibre de ses comptes dès 2012. En raison de la révision des perspectives de croissance, l'assurance chômage table, à présent, sur un déficit de près de 2 milliards d'euros l'an prochain.
Sur l'ensemble de l'année 2011, l'assurance chômage s'attend à une hausse modérée du nombre de demandeurs d'emploi indemnisés (21 500). Le nombre total de chômeurs indemnisés devrait être de l'ordre de 2,1 millions de personnes à la fin de l'année.
L'an prochain, la poursuite de la hausse du nombre de demandeurs d'emploi devrait creuser encore un peu plus le déficit de l'Unedic. En septembre, sur la base d'une prévision de croissance du PIB de 1,2 %, l'Unedic estimait que son déficit atteindrait près de 1,8 milliard d'euros en 2012. Il pourrait être proche de 2 milliards si la croissance ne dépasse pas 1 %.
Il en résulterait une nouvelle augmentation de la dette accumulée par l'assurance chômage, qui dépasserait les 12 milliards d'euros.
(en millions d'euros)
Situation financière |
2008
|
2009
|
2010
|
2011 (P ) |
2012 (H) |
Recettes |
30 522 |
30 310 |
31 188 |
32 042 |
32 814 |
Dépenses |
25 924 |
31 482 |
34 158 |
33 646 |
34 589 |
Résultat de l'année (R -D) |
4 598 |
- 1 172 |
- 2 970 |
- 1 605 |
- 1776 |
Endettement net bancaire au 31 décembre |
4 992 |
6 139 |
8 571 |
11 044 |
12 819 |
(R) : réalisé - (P) : prévision - (H) : hypothèse Source : Unedic
Par un accord en date du 25 mars 2011, les partenaires sociaux gestionnaires de l'Unedic ont décidé de prolonger, jusqu'à la fin de l'année 2013, la convention d'assurance chômage entrée en vigueur en 2009. Cette décision s'explique par la volonté de stabiliser les règles applicables à l'indemnisation des demandeurs d'emploi et par le contexte d'incertitude sur le plan économique qui rend délicat tout exercice de prévision.
Deux modifications ponctuelles ont cependant été apportées à la convention : la première, qui devrait coûter à l'Unedic 10 millions d'euros en année pleine, permet le cumul entre une pension d'invalidité et une allocation chômage ; la seconde, qui devrait entraîner 7 millions de dépenses supplémentaires en année pleine, améliore les conditions d'indemnisation des travailleurs saisonniers.
La création du contrat de sécurisation professionnelle (CSP) devrait également occasionner 60 millions de dépenses supplémentaires qui sont prises en compte dans les prévisions pour 2012.
Un groupe paritaire réfléchit aux évolutions qui pourraient être apportées, à plus long terme, aux modalités de financement de l'assurance chômage et aux règles d'indemnisation des demandeurs d'emploi. Il lui appartient d'étudier différentes hypothèses de réforme, comme par exemple le retour à une allocation dégressive, la mise en place de cotisations chômage variables en fonction du recours à l'emploi précaire ou encore l'instauration de droits « rechargeables » 5 ( * ) . Il est encore trop tôt pour indiquer ce que pourraient être les orientations retenues par ce groupe de travail.
2. La baisse des dépenses du régime de solidarité
Depuis 1982, le fonds de solidarité rassemble les moyens de financement des allocations versées aux demandeurs d'emploi en fin de droit, notamment l'allocation de solidarité spécifique (ASS).
Le fonds dispose d'une ressource propre, la contribution de solidarité des agents du secteur public, qui devrait rapporter 1,35 milliard d'euros en 2012, à laquelle s'ajoute une part du produit de la taxe sur les tabacs, pour un montant prévisionnel de 125,5 millions d'euros.
Ces ressources sont complétées par une subvention d'équilibre, versée par l'Etat. Le montant de cette subvention s'inscrit en forte baisse : alors qu'il atteignait 1,6 milliard dans la loi de finances initiale pour 2011, il est ramené à un peu moins de 906 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2012.
Cette baisse de la dotation de l'Etat serait rendue possible par la diminution du nombre de bénéficiaires des allocations financées par le fonds de solidarité.
Evolution des effectifs |
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Effectif |
2010 (Rap)* |
2011 (Pap)* |
2012 (PLF)* |
ASS |
343 104 |
400 000 |
388 000 |
Intéressement ASS |
30 015 |
23 332 |
24 032 |
AER |
41 019 |
27 864 |
11 255 |
AFF |
13 149 |
4 665 |
1 606 |
ASS-Accre |
5 858 |
5 548 |
5 774 |
APS |
79 |
198 |
200 |
AFD |
741 |
1 917 |
2000 |
TOTAL |
433 965 |
463 524 |
432 867 |
ASS : allocation de solidarité spécifique -
AER : allocation équivalent retraite - AFF : allocation
fin de formation - ASS-Accre : allocation de solidarité
spécifique - aide aux chômeurs créateurs ou
repreneurs d'entreprise -
*Rap : rapport annuel de performance - Pap : projet annuel de performance - PLF : projet de loi de finances |
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Source : ministère du travail, de l'emploi et de la santé |
Dans le détail, on observe d'abord que deux allocations verront le nombre de leurs bénéficiaires diminuer fortement en 2012 :
- créée en 2002, l' allocation équivalent retraite (AER) était versée aux demandeurs d'emploi qui ne pouvaient percevoir de pension de retraite, faute d'avoir atteint l'âge de soixante ans, alors qu'ils avaient validé 160 trimestres de cotisations au titre de l'assurance vieillesse ; elle a été supprimée le 1 er janvier 2009, le fonds de solidarité continuant à prendre en charge le versement des allocations dues aux personnes qui en étaient déjà titulaires à cette date, ce qui occasionnera une dépense proche de 122 millions en 2012 ;
- en 2001, une allocation de fin de formation (AFF) avait été créée afin que les demandeurs d'emploi qui effectuent une formation prescrite par le service public de l'emploi continuent à percevoir un revenu après l'expiration de leurs droits à l'assurance chômage ; l'AFF a été abrogée le 1 er janvier 2009 et le fonds de solidarité ne prendra plus en charge, en 2012, que le financement des allocations versées au petit nombre de bénéficiaires qui subsistent.
Par ailleurs, deux allocations financées par le fonds en 2011 ne seront plus à sa charge l'an prochain :
- le Gouvernement avait rétabli l'AER par décret, à titre exceptionnel, en 2009 puis en 2010 ; le financement de cette AER 2009 et 2010 n'est plus à la charge du fonds de solidarité mais est inscrit sur une autre ligne du budget de la mission (12,3 millions sont prévus pour 2012) ;
- le Gouvernement avait également institué pour les années 2009 et 2010, l'allocation en faveur des demandeurs d'emploi en formation (Afdef), qui obéissait aux mêmes conditions d'octroi que l'AFF ; en 2012, l'Etat ne contribuera plus au financement de l'Afdef ; en revanche, l'article 63 du projet de loi de finances, rattaché aux crédits de la mission, prévoit d'effectuer un prélèvement de 25 millions d'euros sur le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) et d'affecter cette somme au financement de l'allocation.
Enfin, le projet de loi de finances est construit en retenant l'hypothèse d'une baisse de 3 % du nombre de bénéficiaires de l'ASS en 2012. Cette prévision, qui aurait peut-être été crédible si la prévision de croissance pour l'économie française avait été maintenue à 1,75 %, paraît désormais exagérément optimiste. Votre commission redoute que le fonds de solidarité se révèle insuffisamment doté en cours d'année.
Son inquiétude est encore renforcée par le fait que le fonds devra également financer l'an prochain, par redéploiements, l'allocation transitoire de solidarité (ATS). Créée par le décret n° 2011-1421 du 2 novembre 2011, cette allocation remplace provisoirement l'AER. Elle est versée à des demandeurs d'emploi, nés entre le 1 er juillet 1951 et le 31 décembre 1953, qui étaient indemnisés par l'assurance chômage à la date du 10 novembre 2010, et qui ont suffisamment cotisé pour avoir droit à une retraite à taux plein sans avoir atteint l'âge légal de départ en retraite.
* 5 L'idée de créer des droits « rechargeables » a été lancée en 2009 par la CFTC. Ce dispositif permettrait aux chômeurs qui reprennent un emploi de conserver leurs droits à indemnisation non consommés et de pouvoir en bénéficier par la suite s'ils retombent au chômage, sans risquer d'être pénalisés en ce qui concerne le montant ou la durée de leur indemnisation. Le ministre du travail, Xavier Bertrand, s'est récemment prononcé en faveur de ce dispositif, qui inciterait selon lui à la reprise d'emploi.