Sécuriser et réguler l'espace numérique (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi visant à sécuriser et réguler l'espace numérique.

Discussion générale

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications .  - L'insécurité que rencontrent nos concitoyens sur internet sape leur confiance dans la transition numérique. Nous sommes tous concernés. Les plus modestes, les plus âgés, victimes privilégiées des cybercriminels ; nos enfants, exposés précocement à des contenus inappropriés ; nos entreprises, sous le joug des géants du numérique ; notre démocratie, en butte aux coups de butoir des professionnels de la désinformation.

Face aux désordres, la France agit résolument depuis cinq ans. Au niveau national, avec des initiatives parlementaires sur la protection des mineurs ou la lutte contre la désinformation. Au niveau européen, avec deux règlements majeurs, adoptés sous présidence française. Au niveau international, avec les initiatives multipartites lancées par le Président de la République qui contribuent à éveiller la conscience mondiale.

Ce projet de loi poursuit le même objectif d'instaurer un ordre public numérique et de créer des protections nouvelles.

Il s'est formé à partir de trois affluents. Le premier, ce sont les deux règlements européens adoptés l'année dernière qui, bien que d'application directe, nécessitent de modifier notre droit. Le règlement sur les services numériques (Digital Services Act, ou DSA) fait rentrer les plateformes de réseaux sociaux dans l'ère de la responsabilité - les récents événements montrent que c'était urgent. Le règlement sur les marchés numériques (Digital Markets Act, ou DMA) rétablit une forme d'équité commerciale, pour mettre fin à des d'abus de position dominante. Vingt-six pratiques anticoncurrentielles seront interdites.

Deuxième affluent : les travaux du Sénat. Je pense au rapport de Mmes Billon, Borchio-Fontimp, Cohen et Rossignol sur la pornographie, au rapport de Mmes Primas, Gacquerre, M. Montaugé sur la souveraineté numérique, au rapport de Mmes Morin-Desailly, Blatrix Contat et M. André Gattolin sur le règlement sur les données, dont nous reprenons nombre de propositions.

Troisième affluent : les consultations menées lors du Conseil national de la refondation (CNR), qui ont inspiré certaines mesures, notamment en matière de lutte contre le cyberharcèlement.

Trois mesures fortes visent à protéger nos concitoyens.

Le filtre anti-arnaques préviendra les internautes en cas d'hameçonnage. Qui n'a pas reçu un jour un mail frauduleux émanant du compte personnel de formation ou de la sécurité sociale ? L'année dernière, dix-huit millions de nos concitoyens ont été victimes d'escrocs en ligne. Les plus fragiles, les plus éloignés du numérique, sont les premières victimes de l'usurpation d'identité. Avec ce filtre, nous agissons à la racine du mal.

La peine complémentaire de bannissement des réseaux sociaux de six mois - un an en cas de récidive - est prévue pour les auteurs de cyberharcèlement et de violences en ligne, qui se comportent parfois en chefs de meute.

En nous inspirant de la peine complémentaire d'interdiction de stade, nous voulons couper le mal à la racine en privant les chefs de meute de leur caisse de résonance et en empêchant la récidive. Je salue à cet égard son extension par Loïc Hervé.

Troisième mesure de protection, un régime encadrant les nouveaux jeux en ligne fondés sur la technologie du Web3, pour protéger les mineurs et lutter contre le blanchiment d'argent et le terrorisme. Je salue sur ce point la législation directe écrite par Patrick Chaize - la copie initiale prévoyait une ordonnance.

Au chapitre de la protection des mineurs, nous donnons à l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) la possibilité d'ordonner le blocage, le déréférencement et une amende pour les sites pornographiques qui ne vérifient pas l'âge des utilisateurs, en application de la loi du 30 juillet 2020. Le tribunal judiciaire de Paris rend un jugement vendredi, cela concernera donc les affaires à venir.

Ainsi, nous irons plus vite et plus fort. Nous prévoyons également une amende de 250 000 euros pour les hébergeurs qui n'enlèveront pas leurs contenus pédopornographiques sous 24 heures, à l'instar des contenus terroristes : 74 000 contenus ont été signalés en 2022.

Nous protégeons également nos entreprises en encadrant les avoirs commerciaux dans le domaine de l'information nuagique - le cloud. Il faut en finir avec la loi du plus fort. Avec Bruno Le Maire, nous sommes très sensibles à la souveraineté numérique. Ainsi, nous rendrons un peu d'air à nos entreprises.

Nous protégeons aussi nos collectivités, avec une expérimentation regroupant cinq d'entre elles et cinq plateformes visant à faire respecter le plafond de 120 unités via un interlocuteur unique.

Enfin, nous protégeons notre démocratie : l'Arcom pourra mettre en demeure et ordonner le blocage de médias sanctionnés, comme RT France ou Sputnik. En effet, les ennemis de la démocratie dévoient la liberté d'expression.

Ce projet de loi a vocation à être enrichi par le Parlement et en particulier par le Sénat. Deux lignes rouges demeurent toutefois : en premier lieu, le respect des compromis auxquels la France est parvenue à l'échelle européenne, notamment sur le DSA et le DMA. Les sanctions ne seront dissuasives que si elles sont européennes. Ensuite, il faut préserver nos libertés fondamentales - expression, information, communication. Je compte sur le Sénat. (Applaudissements sur les travées du RDPI, du groupe UC et au banc des commissions ; M. Bruno Belin applaudit également.)

M. Pierre Laurent.  - Monsieur le ministre, je salue la présence à vos côtés de Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de l'enfance.

M. Loïc Hervé, rapporteur de la commission spéciale .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains) Le constat est partagé : il n'est plus possible d'imaginer la vie sans internet. Le numérique a changé, sans retour possible, nos manières de penser et de voir le monde. Formidable vecteur de transparence, internet donne un nouveau champ d'action à certaines dérives : criminalité, harcèlement, arnaques.

Il faut faire du continent internet un lieu plus sûr pour les plus vulnérables. Sécuriser l'espace numérique, c'est garantir le respect des règles qui s'appliquent au quotidien. La liberté n'est pas une excuse pour se livrer à la haine ou exposer nos enfants à des contenus illicites.

Le DSA a permis de grandes avancées. Le Gouvernement a voulu aller plus loin, notamment sur l'interdiction d'accès des mineurs aux contenus pornographiques.

Le Sénat apporte sa pierre à l'édifice, monsieur le ministre, si bien que nous avons enrichi le texte, en bonne intelligence avec les acteurs concernés et en dépit des délais trop brefs. Les articles 1er et 2 prévoient la définition par l'Arcom d'un référentiel de vérification d'âge. Nous l'approuvons, comme les nouveaux pouvoirs de l'Autorité, qui aideront à massifier la réponse contre la prolifération des contenus pédopornographiques.

Pour renforcer la solidité du dispositif, nous avons fusionné la mise en demeure et la sanction. Après la mise en demeure, l'Arcom pourrait demander des mesures de blocage et de déréférencement aux fournisseurs d'accès à internet et aux moteurs de recherche.

Nous étendons la peine complémentaire de bannissement à ceux qui intimident les élus, dans notre rôle de défenseurs de la démocratie locale. Je vous proposerai la mise en oeuvre d'un délit d'outrage en ligne passible d'une amende forfaitaire délictuelle (AFD), et souhaite, monsieur le ministre, que nous allions plus loin sur la plainte en ligne. Nous enverrons un message clair à ceux qui pensent que l'écran les protège de la loi : ce qui est interdit dans le monde réel l'est en ligne.

Nous débattrons des émeutes suivant la mort du jeune Nahel, prétexte aux violences les plus abjectes, contre les élus notamment, lâchement attaqués. Les réseaux sociaux les ont démultipliées.

Je ne doute pas que nous en débattrons, sans tabou, mais sans nous éloigner de l'État de droit. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et du RDPI, ainsi que sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

M. Patrick Chaize, rapporteur de la commission spéciale .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Annick Billon applaudit également.) Ce projet de loi, sous couvert d'un vernis médiatique, est un projet de loi adaptant les dispositions du droit de l'Union européenne, un Daddue qui ne dit pas son nom. Il est toutefois très attendu par les citoyens ou les entreprises. Nous regrettons le manque de concertation, mais la navette parlementaire est encore longue.

Le projet de loi permet de nous adapter à plusieurs règlements européens sur l'environnement numérique, avec la protection en son coeur. Les actes de cybermalveillance sont désormais, tristement, monnaie courante, mais nous ne devrions pas nous habituer au piratage de nos comptes ou à l'usurpation de notre identité en ligne. C'est pourquoi nous avons renforcé le dispositif national de filtrage des sites frauduleux prévu à l'article 6.

Il faut apaiser et protéger. L'actualité de ces derniers jours nous a marqués. Les réseaux sociaux massifient les appels à la violence à l'égard des élus ou des installations publiques. Nous devons apporter une réponse ferme à leur passivité. Au-delà des réunions bien-pensantes, il faut agir. C'est pourquoi j'ai déposé, à titre individuel, un amendement visant à responsabiliser les réseaux sociaux dans la modération des appels à la violence.

Nous devons nous attaquer aux problématiques économiques pour favoriser des solutions souveraines. L'entrée sur le marché de l'informatique en nuage est facile, grâce à l'octroi de « crédits cloud ». Nous les avons plafonnés à un an. La sortie l'est beaucoup moins, les acteurs dominants ayant mis en place des frais de sortie, péages s'apparentant à de la facturation abusive. Nous les avons autorisés, sous réserve qu'ils soient facturés à des coûts réels sous le contrôle de l'Arcep (Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse).

Nous devons néanmoins permettre et anticiper les innovations numériques afin de n'en tirer que le meilleur. J'ai donc souhaité réécrire intégralement l'article 15 - une ordonnance était inacceptable - sur les jeux à objets numériques monétisables (Jonum). Nous avons proposé une première définition et les avons autorisés à titre expérimental pendant trois ans sous le contrôle de l'Autorité nationale des jeux (ANJ).

Nous avons également renforcé les pouvoirs du Pôle d'expertise de la régulation numérique (PEReN), afin de mieux comprendre les logiques de fonctionnement des plateformes et des moteurs de recherche.

La France doit demeurer avant-gardiste et continuer à être plus exigeante face aux grands acteurs du numérique. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et du RDPI)

Mme Florence Blatrix Contat .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) La révolution numérique transforme nos sociétés : 40 % des vingt plus grandes entreprises mondiales ont pour modèle économique le capitalisme des plateformes. Nos démocraties sont inondées de fake news et d'algorithmes opaques.

Il était temps d'agir. Nous saluons l'action de l'Union européenne pour réguler cette jungle numérique. L'interdiction par le DSA de la publicité ciblée vers les mineurs, comme les mesures du DMA contre les pratiques anticoncurrentielles, sont une bonne chose.

Avec Catherine Morin-Desailly, nous avions porté l'ambition du Sénat. Certaines de nos propositions ont été retenues, comme la meilleure prise en compte des écosystèmes des plateformes ainsi que l'inclusion des plus grands moteurs de recherche dans le périmètre des obligations ou l'interdiction de la publicité ciblée pour les mineurs. (Mme Catherine Morin-Desailly le confirme.)

Le projet de loi que nous examinons aujourd'hui adapte ces règlements européens et anticipe le règlement sur les données, ou Data Act.

Sur la forme, les délais sont très courts. Faute de concertation, le texte n'est pas abouti, mais je salue le travail des rapporteurs.

Concernant le volet économique, le projet de loi propose de remédier aux dysfonctionnements du marché de l'informatique en nuage, dont les enjeux sont énormes, notamment en matière de souveraineté. Si le marché numérique européen doit passer de 53 milliards d'euros en 2020 à 560 milliards en 2030, 80 % de la croissance est captée par trois acteurs américains, qui ont totalement verrouillé le marché. Les acteurs européens sont relégués dans une niche, de 27 % de part de marché en 2017 à 13 % en 2022. Face à ce rouleau compresseur, nous proposons d'aller plus loin dans l'encadrement des crédits cloud et contre les freins à l'interopérabilité des données.

Il faut plus de transparence contre l'extraterritorialité, qui permet à certains États d'accéder à des données sensibles. Les utilisateurs de cloud doivent savoir où sont leurs données, qui y accède et comment elles sont utilisées.

Les années à venir seront déterminantes. Il faut mobiliser l'ensemble des parties prenantes. Notre pays doit reprendre la main sur son destin numérique : plus qu'une régulation, il faut une impulsion. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Mme Catherine Morin-Desailly.  - Bravo !

M. Pierre Ouzoulias .  - Comme tous les ans depuis dix ans, nous examinons un texte sur le numérique. Mais la loi sur la confiance dans l'économie numérique (LCEN) du 21 juin 2004, dernier grand texte sur ce sujet, n'a été suivie que de rustines comme les articles 36 à 46 de la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, qui suivaient la censure quasi-totale de la loi du 24 janvier 2020 contre la haine en ligne.

Cette stratification pourrait ravir l'archéologue que je suis, mais notre législation s'en trouve de moins en moins intelligible. Ce foisonnement législatif amphigourique marque le renoncement de l'État à une stratégie nationale globale.

En matière juridique, il serait peut-être utile de mettre en chantier un code du numérique. Dans l'immédiat, nous en sommes à nouveau réduits à adapter des règlements européens, travail déjà réalisé pour l'essentiel par la loi confortant le respect des principes de la République.

Certains craignent des freins à l'innovation. Pour ma part, j'ai confiance dans le discernement des utilisateurs, qui préféreront des systèmes leur donnant la maîtrise de leurs données. Je regrette ainsi que l'article 8 consacre une responsabilité limitée des hébergeurs. Dans la résolution européenne du Sénat du 14 janvier 2022, Florence Blatrix Contat et Catherine Morin-Desailly avaient vivement déploré l'absence de remise en cause de ce principe. (Mme Catherine Morin-Desailly le confirme.)

Monsieur le ministre, il serait de bonne politique que vous engagiez, avec la représentation nationale, une réflexion de fond sur la responsabilité des hébergeurs. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur quelques travées des groupes SER et UC)

Mme Catherine Morin-Desailly .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC et au banc des commissions) J'interviens au nom du groupe UC et comme présidente de la commission spéciale. Je remercie les rapporteurs qui, sur ce projet de loi protéiforme et dans des délais resserrés, ont montré un effort exceptionnel, avec 66 amendements améliorant ce texte.

Ancienne présidente de la commission de la culture, et comme membre de la commission des affaires européennes, j'alerte depuis longtemps sur le risque de dépendance de l'Union européenne, condamnée à devenir une colonie du monde numérique faute d'une stratégie globale et offensive. J'espère ne pas subir la malédiction de Cassandre, condamnée par Apollon à voir ses oracles ignorés.

Gageons que nous rattraperons notre retard.

Les travaux du Sénat n'ont jamais remis en cause les potentialités d'internet. Nous constatons cependant, chaque jour, des dérives et des menaces croissantes, y compris étrangères. Il suffit de voir les terribles événements montrant que les réseaux sociaux sont souvent asociaux, faisant monter, par le jeu des algorithmes opaques, l'incitation à la violence.

Les travaux de la commission de la culture sur la désinformation et le cyberharcèlement et ceux de la délégation aux droits des femmes sur l'industrie pornographique ont montré les ravages d'une absence de régulation d'internet sur les jeunes.

Nous mesurons la mainmise de grands acteurs extra-européens, prédateurs aux profits insensés qui ont verrouillé le marché.

Trop longtemps, le « réseau des réseaux » n'a été envisagé que par ses usages, sans se demander si nous en serions acteurs. Il suffirait de nous caler sur la législation américaine et la directive e-commerce de 2000. Quelle erreur ! Malgré les affaires Snowden et Cambridge Analytica, c'est la guerre en Ukraine qui a été l'électrochoc.

Après le règlement général sur la protection des données (RGPD), l'adoption du DSA et du DMA est une étape importante, comme l'ont dit la commission des affaires européennes et la commission d'enquête TikTok. Il faudra aller plus loin et donner aux plateformes une véritable responsabilité, mais nous devons saluer les efforts de Thierry Breton et leur adoption sous la présidence française de l'Union européenne.

Ce texte est ambitieux et nous vous en faisons crédit, monsieur le ministre. Je pense notamment à l'application par anticipation du Data Act sur le cloud : trois acteurs américains captant 70 % des parts du marché mondial, qui représentera plus de 1 200 milliards d'euros en 2025.

Il faut une doctrine de responsabilité numérique. Travaillons à notre autonomie technologique, dans les domaines du renseignement comme de la protection des données. Le recours à des technologies extraeuropéennes doit devenir une exception à motiver. Le recours aux acteurs américains n'est plus acceptable. Pensons au Health Data Hub.

La sécurité nationale justifie une exemption aux règles de l'OMC, d'autant que les marchés étrangers sont fermés. Un Buy European Act doit booster la compétitivité de l'information en nuage.

Un cahier des charges doit tenir compte des valeurs européennes, de la souveraineté, des emplois locaux et de la portabilité des données. Le numérique doit être traité comme un sujet régalien et prendre toute sa place dans notre réarmement industriel et technologique.

Il est plus que temps de prendre en main notre destin numérique, comme j'y appelais dans un rapport de 2018 sur la formation.

Nous légiférons, vingt ans après, sur Internet. J'espère que nous n'aurons pas à étudier un texte sur l'intelligence artificielle en 2043, rédigé par des cerveaux de silicium élaborés à l'étranger... (Sourires)

Nous avons amélioré ce texte qui tient un juste équilibre entre régulation et libertés fondamentales, entre le Business above all américain et le crédit social du Parti communiste chinois, pour un modèle humanocentré conforme aux règles européennes. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et du RDPI, ainsi que sur plusieurs travées du groupe Les Républicains ; M. Henri Cabanel applaudit également.)

M. Bernard Fialaire .  - La transition numérique est à la croisée des chemins entre promesses et menaces. Catalyseur d'un bouleversement profond, elle est porteuse de risques pour les entreprises et les individus. Défi pour notre société, nous devons développer une lecture claire et globale de son impact sur nos vies.

Bien que ce projet de loi soit réalisé à la hâte, j'espère qu'il se nourrira de nos débats. Il reste du chemin à parcourir, comme en témoigne l'actualité. Les nouvelles technologies, l'intelligence artificielle, smart et big data cristallisent la peur d'une perte de savoir-faire et de savoir-être.

Si les nouvelles technologies fascinent les imaginaires, alimentant utopies et dystopies, elles nous montrent comment nous appréhendons les transformations numériques de nos usages. Cela génère ambivalence et injonctions paradoxales. La technologie est source de progrès, mais, irréfléchi, son développement amène à des extrêmes. Cette course au progrès doit être encadrée. Le RDSE soutient donc l'initiative du ministre.

Je présenterai un amendement relatif aux menaces pesant sur nos hôpitaux, à savoir la consultation et l'usage des données piratées. Les cyberattaques déstabilisent durablement les administrations et entreprises victimes. L'usage de ces données doit être réprimandé.

Parlons aussi de ceux s'engageant bénévolement. Nous regrettons l'utilisation de l'article 45 de la Constitution par la commission spéciale contre les amendements de Nathalie Delattre sur les hackers éthiques.

La peine complémentaire de blocage d'un compte dont le propriétaire a été condamné pour haine en ligne est insuffisante : nous voulons le bannissement total des réseaux sociaux pour l'auteur des faits. L'impunité doit cesser au plus vite ; les auteurs ne doivent pas pouvoir se déporter sur d'autres plateformes.

C'est conscient de ces enjeux que le RDSE souhaite s'associer à la régulation de notre espace numérique. S'il faut changer la roue de la voiture sans l'arrêter, suivons la cadence. (Applaudissements sur les travées du RDSE et du RDPI)

Mme Alexandra Borchio Fontimp .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Annick Billon applaudit également.) Un viol psychique, voilà les termes des psychologues pour parler de l'exposition des plus jeunes aux contenus pornographiques, qui leur volent leur innocence. Internet favorise le développement de toutes les formes de criminalité, mais nous pouvons encore réagir pour protéger nos mineurs. Il faut sensibiliser les parents et leur rappeler leur responsabilité. C'est une chaîne collective qu'il faut bâtir pour qu'aucun contenu inapproprié ne soit accessible.

Le cyberharcèlement fauche en plein vol de nombreux enfants et adolescents. La pression numérique fait trop de victimes. Les marches blanches ne suffisent plus, les tweets ne valent pas des engagements.

Sur ce sujet qui fait consensus au Parlement et au Gouvernement, les récents textes montrent que des avancées sont possibles.

Coauteure du rapport sur les dérives de l'industrie pornographique et rapporteure de la proposition de loi instaurant une majorité numérique, j'ai constaté les obstacles pratiques s'imposant au législateur et la nécessité d'un dispositif protecteur. Je salue les propositions du Gouvernement, s'inspirant du Sénat, afin de mener ensemble cette bataille pour protéger l'enfant. Avec Annick Billon et Catherine Morin-Desailly, nous voulons impliquer les boutiques d'applications logicielles.

Je rappelle les apports de la commission spéciale, dont la procédure unique de mise en demeure et de sanction pour l'éditeur de site pornographique. Je souligne l'importance de la peine de bannissement, notamment pour les attaques contre les élus et dépositaires de l'autorité publique. Ce seront des réponses fortes contre les discours haineux.

Le deepfake concerne à 99 % des femmes. Il faut lancer un message contre ceux qui publient ces images, souvent à caractère sexuel. Un amendement du Gouvernement renforce la protection des victimes.

Il faut soutenir l'innovation et positionner nos entreprises comme un acteur du nouveau marché.

Le groupe Les Républicains soutient ce texte et sera attentif à sa bonne application. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que du RDPI)

M. Pierre-Jean Verzelen .  - Internet et les réseaux sociaux bouleversent nos sociétés, nos repères et nos démocraties. Chacun les utilise pour communiquer ou s'informer. Le temps passé par les jeunes sur leurs téléphones ne cesse d'augmenter, et les réseaux sont souvent leur unique fenêtre sur l'extérieur.

Par leur modèle économique fondé sur des contenus choquants, Twitter, TikTok, Snapchat et consorts radicalisent la pensée et aggravent les fractures. Internet pose les limites de la liberté d'expression. Si en septembre dernier, il a structuré la mobilisation des femmes iraniennes, il sert souvent la désinformation : nous l'avons vu avec les violences de ces derniers jours. La tenue de la commission d'enquête TikTok est d'autant plus justifiée.

Un État souverain dans l'Union européenne peut-il imposer un cadre aux réseaux sociaux ? Quel est notre poids face aux Gafam ? L'adoption du DSA permettra de donner sens à la formule de Thierry Breton, selon laquelle ce qui est interdit hors ligne doit être interdit en ligne.

L'Union européenne a interdit les canaux de désinformation de certains États. Ce texte prévoit d'accélérer, et c'est tant mieux.

Une infraction n'est pas moins grave sur internet, elle est parfois pire. Je pense au cyberharcèlement, mis en lumière par le rapport de Colette Mélot. Il est urgent d'agir.

La peine complémentaire de suspension de compte est pertinente si la personne condamnée ne peut la contourner en ouvrant d'autres comptes sous pseudonyme. La commission y a été attentive.

L'interdiction de la pornographie aux moins de 18 ans aurait dû être appliquée depuis longtemps - les effets sur leur santé mentale sont évidents.

Parallèlement à la lutte contre les contenus illégaux, nous devons assurer une concurrence saine et loyale. Les Gafam ne doivent pas nous dicter notre loi. Nous ne devons pas subir abus de position dominante et pratiques anticoncurrentielles.

Le DMA et le DGA doivent être salués. Nous devons rattraper notre retard et accompagner les entrepreneurs, les start-up et les licornes qui seront les leaders de demain.

Nous devons adapter notre droit pour l'application des règlements européens, mais je soulève un point de vigilance : le transfert des contentieux au régulateur irlandais. Il y a un risque d'embouteillage et surtout d'influence des Gafam, dont les sièges sociaux sont en Irlande.

Les Indépendants voteront le texte. Internet ne peut plus être un espace d'impunité. Continuons ce travail ensemble.

M. Thomas Dossus .  - Nos vies sont intriquées entre espace virtuel et réalité. La rapidité de propagation du sentiment d'injustice et de la violence doit beaucoup aux réseaux sociaux.

Les grandes plateformes ont capté l'attention et les données de la plupart d'entre nous. Une société fondée sur la disruption percute notre contrat social et les algorithmes trient nos données personnelles, fruit de la convoitise du capitalisme de surveillance.

L'Union européenne, avec le RGPD, le DMA et le DSA, a agi. Ce texte les transpose et va plus loin.

Il sécurise certains publics vulnérables comme les mineurs avec un âge légal effectif de l'accès à la pornographie. Mais je l'ai dit : personne n'a de solution technique efficace et protectrice des libertés individuelles. Je suis réservé sur l'opérationnalité du dispositif confié à l'Arcom. Nous proposerons des amendements pour mieux cerner ce référentiel.

Le texte comporte des mesures intéressantes sur la cyberviolence, notamment avec le bannissement ou la lutte contre la pédopornographie.

Les femmes sont particulièrement touchées, avec des phénomènes de meute. Nous proposons d'enrichir le texte avec une AFD pour les outrages sexistes en ligne et le renforcement de Pharos, entre autres. La peur doit changer de camp.

Réguler est la deuxième ambition du texte, par exemple le business des clouds, ou la location des biens meublés. Nos collectivités ont des attentes en la matière. Nous sommes en revanche plus circonspects sur la régulation des objets numériques monétisables, ou jetons non fongibles (NFT) ; le texte initial prévoyait une ordonnance, la commission l'a transformée en expérimentation : c'est mieux, mais insuffisant. Nous sommes entre le jeu vidéo et le jeu d'argent. (M. Patrick Chaize le confirme) Les enjeux - addiction, mise en danger financière - mériteraient un texte propre.

Pour réguler, il faut des régulateurs. Arcom, Arcep, Cnil se voient confier de nouvelles missions. Reste une inconnue : les moyens. Le projet de loi de finances devra prendre acte de ce projet de loi.

J'aborde ce texte dans un esprit constructif. Je constate un certain équilibre dans les mesures du texte. Nous voulons préserver la liberté, l'anonymat, et la dignité des personnes. Ni surveillance généralisée ni Far West, mais régulation. (Applaudissements sur les travées du GEST ; Mme Catherine Morin-Desailly applaudit également.)

M. Ludovic Haye .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Ce texte technique est particulièrement attendu. Il résulte de négociations internationales anciennes et soutenues. Il s'agit de protéger nos concitoyens, nos entreprises et notre démocratie, suivant un principe simple : ce qui est interdit dans le monde réel doit l'être aussi en ligne.

La transition numérique est une opportunité de croissance, mais elle fait aussi courir des risques majeurs à nos sociétés démocratiques : manipulations, fausses informations, harcèlement, violences.

Le titre Ier du projet de loi vise à protéger les mineurs. Je salue le travail mené sur ce sujet par le Gouvernement et mes collègues Iacovelli et Bargeton. La pornographie reste aujourd'hui trop accessible aux mineurs en quelques clics.

Le DMA, le DSA et le DGA (Data Governance Act), que la présidente de la commission spéciale connaît bien, permettront un traitement à la bonne échelle des problèmes liés à l'oligopole des Big Tech.

Complexe, notamment parce que le temps législatif est décalé par rapport au temps du numérique, la régulation du secteur n'en est pas moins nécessaire. Préserver les opportunités de développement économique tout en régulant les excès relève parfois de l'orfèvrerie. Il nous faut conserver une forme de souplesse : le filtre numérique est un bon exemple de cette démarche. Le monde entier sera appelé à coopérer pour lutter contre les usurpations d'identité et la cybercriminalité. Les pays les plus laxistes ne seront pas épargnés : ce n'est qu'une question de temps.

En matière d'inclusion numérique, les collectivités territoriales attendent un message clair et un accompagnement structuré. La stratégie nationale pour un numérique inclusif dans les territoires a permis de lancer de nombreux dispositifs, comme Aidants Connect. La feuille de route sur l'inclusion numérique crée un fonds d'accompagnement pour l'ingénierie. Sa bonne exécution est essentielle pour protéger nos concitoyens, nos collectivités territoriales et la démocratie.

Je salue le large spectre d'action qu'apporte ce texte salutaire. L'espace numérique est un bien commun qu'il faut protéger et réguler. L'écran n'arrête pas la loi ! Nous voterons le projet de loi. (Applaudissements sur les travées du RDPI et au banc des commissions ; Mme Annick Billon applaudit également.)

Mme Laurence Rossignol   - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Je me concentrerai sur l'article 1er et la question du référentiel.

Je salue l'intention du Gouvernement de faire un pas en avant pour lutter contre la toxicité de la pornographie. Mais j'ai le sentiment que nous nous laissons encore embrouiller par le lobby du porno, qui est puissant et insidieux - 19 millions d'utilisateurs en connexion unique par mois en France.

Prenons une comparaison : un buraliste n'applique pas l'interdiction de vente de tabac aux mineurs parce qu'il ne sait pas comment identifier l'âge de l'acheteur ; celui-ci considère que la vérification de son âge porte atteinte à sa vie privée. La ficelle serait un peu grosse... Pourtant, c'est ainsi que les choses se passent depuis trois ans en matière de porno.

Je crains, avec ce référentiel, qu'on n'entérine a posteriori un refus d'appliquer la loi. On inverse la charge de la preuve : l'Arcom devra apporter les outils nécessaires à l'application de la loi, alors que les sites devraient prouver qu'ils ont tout fait pour empêcher les mineurs d'accéder à leurs contenus.

L'obligation pesant sur les sites, c'est de bloquer l'accès à tous les mineurs par tous les moyens possibles, compte tenu de l'état de l'art. Pourquoi ne pas avoir dupliqué le dispositif applicable aux jeux d'argent ? Les sites pornographiques brandissent le secret de la vie privée, mais c'est une mystification : il faut distinguer le simple recueil de données de leur diffusion - nous confions bien des données sensibles à Doctolib.

Et quid du respect du droit supérieur de l'enfant ? Quand 2 millions de mineurs sont biberonnés aux vidéos pornographiques, je considère que c'est le secret de la vie privée qui doit s'adapter au devoir de protection des enfants, et non l'inverse ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE)

Mme Toine Bourrat .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC) Les magistrats dont les statues surplombent cet hémicycle ont débattu de questions auxquelles s'attachaient une valeur sociale et morale, ainsi qu'une dimension historique. Traiter du numérique et de son influence sur la jeunesse est un lourd défi pour l'avenir. Aucun de nous ne remet en cause le progrès technologique, mais nous sommes garants de l'ordre public et de l'intérêt général : ce qui est proscrit dans la vie réelle doit l'être aussi sur la toile.

Un sursaut est nécessaire pour sécuriser l'environnement numérique, aujourd'hui dénué de toute forme de responsabilité. Avec le numérique, nous faisons face à un bouleversement civilisationnel. Les dangers de la vie d'adulte sont entrés dans l'enfance. Notre énergie doit donc se concentrer sur les mineurs, qu'il faut protéger de la cybermalveillance à l'âge où ils se construisent.

Le bât blesse sur la réactivité dans le traitement des signalements de contenus inappropriés. Il faut parfois des mois pour qu'ils soient retirés, ce qui provoque des traumatismes parfois irréversibles sur la santé psychique des mineurs. Je défendrai un amendement pour un traitement spécial quand le signalement concerne directement un mineur victime.

Mais ne nous leurrons pas : il faut des moyens humains pour le traitement immédiat des signalements et le retrait rapide des contenus. Comme l'a dit ici même Frances Haugen, les contraintes légales n'auront des effets que si le traitement est localisé, réalisé par des équipes présentes dans le pays et maîtrisant la langue du contenu. (Mme Catherine Morin-Desailly renchérit)

Une machine ne peut pas protéger l'homme de son invention ; il faut des hommes formés, sensibles aux dérives. L'homme est irremplaçable pour éduquer et modérer.

Le Parlement a fixé une majorité numérique à 15 ans. Il place ainsi le parent au coeur de l'éducation du mineur. Mais préserver les acquis n'est plus suffisant, il faut faire preuve d'esprit de conquête - pour ne pas parler de révolution culturelle. Nous devons contraindre les plateformes pour protéger ceux qui sont encore dans la fleur de l'âge. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Joël Bigot applaudit également.)

Mme Patricia Demas .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Je salue le travail de la commission spéciale et des deux rapporteurs sur ce texte visant à protéger nos concitoyens et nos valeurs dans l'espace numérique. La transition numérique est un puissant levier de progrès économique et social, mais elle comporte des risques indéniables.

Le texte protège notamment les mineurs contre la pornographie. Je salue l'article 2, modifié en commission, qui renforce les prérogatives de l'Arcom dans le prolongement du rapport de notre délégation aux droits des femmes. Des mesures sont également prévues pour protéger les internautes contre la désinformation, le cyberharcèlement et l'hameçonnage. L'éducation au numérique et la lutte contre l'illectronisme sont aussi des enjeux essentiels pour mieux protéger.

Au-delà de la transposition des règlements européens DMA et DSA, ce texte doit faire de la France un moteur de la régulation du digital en Europe. Avec la loi Chaize, le Sénat a déjà oeuvré en ce sens.

La souveraineté numérique des pouvoirs publics et des collectivités territoriales est mise à mal par la dépendance aux Gafam. Ainsi, la hausse des tarifs de Microsoft a conduit des collectivités à chercher des alternatives bureautiques, mais cela est très complexe, pour des raisons techniques comme financières. Idem pour le cloud : on craint des utilisations malveillantes des données potentiellement récupérées.

Nous devons développer une offre française ou européenne de logiciels métiers et bureautiques et renforcer l'accompagnement des collectivités territoriales. L'État doit élaborer rapidement une stratégie nationale en la matière, en liaison avec les collectivités territoriales. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Discussion des articles

AVANT L'ARTICLE 1er

M. le président.  - Amendement n°33, présenté par MM. Dossus, Benarroche, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport établissant les besoins financiers et humains de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, de la Commission nationale de l'informatique et des libertés et de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse résultant des nouvelles missions qui leur seront confiées par la présente loi, ainsi que la manière dont ces besoins seront traduits lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2024.

M. Thomas Dossus, rapporteur.  - Cet amendement d'appel vise à obtenir du Gouvernement des informations sur les moyens des autorités administratives indépendantes (AAI).

Le texte renforce leurs missions dans l'espace numérique : l'Arcom devient responsable du référentiel technique et se voit confier des pouvoirs d'injonction administrative et de sanction ; l'Arcep sera responsable du cloud ; la Cnil, de la protection des données personnelles. Ces missions requièrent des moyens humains et financiers, mais le Gouvernement est très discret sur la question. Il appartient au législateur de s'assurer que les moyens suivent.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Je comprends l'esprit de cet amendement. En effet, les missions des trois autorités seront considérablement renforcées. Mais ce débat relève du projet de loi de finances pour 2024. Retrait ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Qu'il s'agisse des règlements européens ou des dispositions nationales, les AAI doivent disposer des moyens nécessaires pour les faire appliquer. Dans la loi de finances initiale pour 2023, quinze ETP supplémentaires ont été prévus par anticipation pour l'Arcom. De son côté, la Commission européenne a procédé à une centaine de recrutements pour faire exécuter le DMA et le DSA. Retrait, sinon avis défavorable.

L'amendement n°33 est retiré.

ARTICLE 1er

Mme Annick Billon .  - Avec Alexandra Borchio Fontimp, Laurence Cohen et Laurence Rossignol, nous avons mené à bien un travail sur l'industrie pornographique, jusqu'alors grande absente du débat public. La pornographie a de graves conséquences sur les mineurs, comme sur l'ensemble de la société : addiction, comportements à risque, notamment. Notre rapport L'enfer du décor a souligné la nécessité d'un vrai contrôle de l'âge des internautes.

Il est urgent d'appliquer la loi. Depuis 2020 et grâce à Marie Mercier, le contrôle est obligatoire, mais l'Arcom ne suit pas. Elle n'a pas fait usage de sa compétence de fixer des lignes directrices. Elle doit adopter une démarche proactive et le contrôle de l'âge doit être effectif et fiable.

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Les services de communication au public en ligne qui mettent à disposition du public des contenus pornographiques mettent en place des mesures de vérification d'âge empêchant l'accès des mineurs à ces contenus.

Mme Laurence Rossignol.  - Cet amendement vise à supprimer le référentiel. Je crains vivement que cet article ne crée une obligation de moyens minimale pour les sites pornographiques, qui se contenteront de satisfaire au référentiel. Il faut inverser la charge de la preuve : à eux d'apporter la preuve qu'ils ont mis en oeuvre tous les moyens possibles pour instaurer un vrai contrôle de l'âge.

Nous sommes dans une mauvaise concomitance : nous attendons une décision du tribunal de Paris sur le sujet dans trois jours. Nous risquerions, en votant ce référentiel, de corroborer l'idée que les sites n'avaient pas à leur disposition les outils nécessaires.

À tout le moins, il faudrait préciser que ce référentiel est l'un des moyens, mais pas le seul, de se conformer à la loi.

Cet amendement est raisonnable et adapté au réel.

M. le président.  - Amendement identique n°88, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Laurence Cohen.  - C'est le même amendement que celui du groupe SER. Il faut responsabiliser davantage les plateformes pornographiques. Nul ne peut ignorer les ravages de l'accès des mineurs au porno. La suppression du référentiel ne veut pas dire absence de régulation, au contraire. Il faut explorer d'autres voies, plus efficaces, pour empêcher l'accès des mineurs à ces sites. La responsabilité de la protection des mineurs ne peut être laissée aux seuls parents : les plateformes doivent jouer un rôle actif dans la prévention.

M. le président.  - Amendement n°130, présenté par M. L. Hervé, au nom de la commission.

I. ? Alinéa 3

Supprimer les mots :

dans un délai de six mois après la promulgation de la présente loi,

II. ? Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

....? L'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique établit et publie le référentiel mentionné au I dans un délai de six mois après la promulgation de la présente loi.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Amendement rédactionnel.

M. le président.  - Amendement n°62 rectifié bis, présenté par M. Fialaire, Mme N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel, Corbisez, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.

Alinéa 3

Après le mot :

avis

insérer le mot :

conforme

M. Bernard Fialaire.  - Un avis conforme de la Cnil devrait être exigé, afin de veiller à la protection des libertés et de garantir l'élaboration d'un référentiel de qualité.

M. le président.  - Amendement n°34, présenté par MM. Dossus, Benarroche, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Alinéa 3

Remplacer les mots :

et de respect de leur vie privée

par les mots :

, de respect de leur vie privée et d'empreinte environnementale du numérique

M. Thomas Dossus.  - La série d'amendements que nous avons déposés visent à mieux définir le référentiel. Reste que je voterai les amendements identiques nos3 et 88.

L'amendement n°34 ajoute un critère relatif à l'empreinte environnementale. La consommation de ces vidéos étant massive, il est important qu'un critère d'écoconception s'applique à l'élaboration des solutions techniques de vérification de l'âge.

M. le président.  - Amendement n°37, présenté par MM. Dossus, Benarroche, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par les mots :

et de leur anonymat en ligne

M. Thomas Dossus.  - Nous souhaitons aussi garantir la protection de l'anonymat, base de la protection de la vie privée.

M. le président.  - Amendement n°36, présenté par MM. Dossus, Benarroche, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par les mots :

ainsi que de garantie de protection de leurs données personnelles, en s'assurant notamment que ces dernières ne soient ni exploitées, pour des fins autres que celles établies par le référentiel, ni cédées ni vendues à des tiers

M. Thomas Dossus.  - Nous devons veiller à la protection des données personnelles. La mention du respect de la vie privée est trop large et imprécise. Précisons que les données collectées ne pourront servir à aucune autre fin que le contrôle de l'âge.

M. le président.  - Amendement n°38, présenté par MM. Dossus, Benarroche, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Les systèmes de vérification de l'âge sont rendus accessibles au public sous un format ouvert et librement réutilisable.

M. Thomas Dossus.  - La transparence logicielle, l'open source, est une garantie fondamentale pour les libertés publiques. Cette exigence de transparence s'impose d'autant plus quand des données personnelles sont en jeu. Les utilisateurs ont le droit de connaître comment sont utilisées leurs informations personnelles.

M. le président.  - Amendement n°35, présenté par MM. Dossus, Benarroche, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Le référentiel interdit explicitement l'usage des technologies de reconnaissance biométriques.

M. Thomas Dossus.  - Nous proposons de proscrire le recours à des technologies de reconnaissance biométriques. La reconnaissance faciale comporte de nombreux risques en termes de protection de la vie privée.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Les amendements identiques nos3 et 88 m'étonnent un peu, dans la mesure où la création du référentiel reprend la recommandation 14 du rapport de la délégation aux droits des femmes. Il n'y a pas de risque de déresponsabilisation des plateformes : la responsabilité pénale de ne pas laisser les mineurs accéder aux contenus pèse sur elle.

L'amendement n°62 rectifié bis ne correspond pas à une demande de la Cnil. Il n'y a pas lieu de donner la prééminence à une autorité sur les autres. Avis défavorable.

Le principal objectif est d'avoir des systèmes de vérification de l'âge fiables et respectueux des données personnelles. L'empreinte environnementale doit être prise en compte, mais dans un second temps. Vu la bande passante des sites pornographiques, le visionnage a une empreinte bien supérieure à celle des contrôles... Avis défavorable à l'amendement n°34.

Le référentiel doit protéger la vie privée des utilisateurs. Cnil et Arcom recommandent un système de double anonymat, la levée de l'anonymat se faisant auprès d'un tiers de confiance. Il ne paraît pas utile d'entrer dans le détail des caractéristiques, pour qu'il reste possible de s'adapter aux évolutions technologiques. Avis défavorable à l'amendement n°37.

L'amendement n°36 est satisfait : retrait ou avis défavorable.

L'amendement n°38 est satisfait par le RGPD sur le format ouvert. S'agissant du format du logiciel, il convient de regarder l'état du marché. Avis défavorable.

Sur l'amendement n°35 et la biométrie, laissons la Cnil poser les limites. Elle s'est dite favorable à une analyse des traits par reconnaissance faciale, pour reconnaître la juvénilité, à condition qu'elle soit réalisée par un tiers. Je ne voudrais pas que cet amendement empêche la mise en oeuvre de solutions pratiques respectueuses de la vie privée. Avis défavorable.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Le principe du référentiel a pour origine le décret d'application de la loi du 30 juillet 2020, qui prévoit la procédure par laquelle l'Arcom peut mettre en demeure les sites pornographiques et saisir le tribunal judiciaire de Paris pour obtenir leur blocage et leur déréférencement.

Le référentiel est préconisé dans la recommandation n°14 du rapport de la délégation aux droits des femmes, comme condition pour que l'Arcom puisse ordonner le blocage des sites pornographiques avec une bonne sécurité juridique. En l'absence de référentiel, la responsabilité serait rejetée sur le juge. Les plateformes ne se précipiteront pas pour trouver des solutions fiables... En réalité, le référentiel sécurise la capacité de l'Arcom à demander des blocages et déréférencements.

Il ne doit y avoir aucune interférence entre la procédure judiciaire en cours depuis un an et demi devant le tribunal judiciaire de Paris et les articles 1er et 2 du projet de loi. Ces derniers ne seront applicables que pour des poursuites engagées à partir du 1er janvier prochain. D'ici là, le droit existant s'applique : il suffit aux plateformes de se baisser et de « ramasser » n'importe quel système de vérification d'âge pour que la loi soit satisfaite.

Je demande le retrait des amendements identiques nos3 et 88, visant à supprimer le référentiel. Nous demandons à l'Arcom de prendre de lourdes décisions : il convient qu'elle s'appuie sur un référentiel.

Retrait des amendements nos62 rectifié bis, 34, 37, 36, 38 et 35. Nous voulons un référentiel souple : le complexifier donnerait des raisons aux sites pornographiques de ne pas s'y conformer.

Je m'en remets à la sagesse du Sénat sur l'amendement n°130, qui demande à l'Arcom de publier ce référentiel dans les six mois.

Mme Laurence Rossignol.  - Ce n'est pas déjà dans le texte de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - C'est bien vous qui avez eu cette initiative en commission, ma chère collègue. Il ne s'agit que d'une question de positionnement : la mesure a sa place dans ce texte, pas dans la loi pour la confiance dans l'économie numérique.

Mme Laurence Rossignol.  - Il ne m'a pas échappé que le référentiel figure dans les préconisations du rapport sénatorial de septembre dernier, issu de travaux menés dans les mois précédents. Entre-temps, l'état de l'art a évolué. Mes discussions avec des spécialistes me laissent penser que ce référentiel ne sera qu'une obligation de moyens pour les sites. D'ailleurs, le ministre l'a dit : ils n'ont qu'à se baisser pour trouver un système de vérification de l'âge...

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Sous le contrôle du juge !

Mme Laurence Rossignol.  - Précisons que le référentiel n'est pas le seul outil possible pour appliquer la loi et qu'il sera régulièrement mis à jour pour suivre l'évolution technologique.

Oui, j'ai changé d'avis. J'espère que l'amendement n°83 de Mme Cohen, lui aussi issu de notre rapport, suscitera chez le rapporteur le même désir d'en appliquer les recommandations...

Monsieur le ministre, j'ai quelques notions de droit pénal : je sais bien que les affaires en cours seront jugées selon le droit actuel. Pour autant, ce qui se dit au Parlement peut peser.

Les amendements identiques nos3 et 88 ne sont pas adoptés.

L'amendement n°130 est adopté.

L'amendement n°62 rectifié bis est retiré.

L'amendement n°34 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos37, 36, 38 et 35.

M. le président.  - Amendement n°10, présenté par Mmes M. Vogel et Poncet Monge, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

Alinéa 4

Remplacer les mots :

de l'allocation mentionnée à l'article L. 544-1

par les mots :

des allocations mentionnées aux articles L. 168-8 ou L. 544-1

Mme Laurence Cohen.  - Conformément à la recommandation 13 du rapport de la délégation aux droits des femmes, nous proposons d'imposer aux sites pornographiques l'affichage d'un écran noir tant que l'âge de l'internaute n'a pas été vérifié. Cette mesure serait efficace pour empêcher l'accès des mineurs à des contenus pouvant leur porter préjudice.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Cela relève du contenu du référentiel lui-même. J'imagine que l'Arcom s'inspirera des travaux parlementaires. Laissons de la souplesse à l'Arcom et à la Cnil. Retrait, sinon avis défavorable.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Je comprends l'intention : même avec une vérification d'âge, le site peut afficher des images sur le côté. C'est la raison pour laquelle nous voulons un référentiel. Ainsi, il sera clair que la vérification de l'âge est une affaire sérieuse. Avant la vérification, l'utilisateur ne doit avoir accès à aucun contenu. Retrait, mais je m'engage à pousser l'Arcom à prendre en compte le principe de l'écran noir dans son référentiel.

Mme Laurence Cohen.  - Je m'étonne. Notre rapport est considéré comme sérieux et, quand nous sommes allées voir les différents ministères, nous avons été accueillies avec intérêt et bienveillance. Mais quand on propose de passer aux travaux pratiques, c'est : « circulez, il n'y a pas lieu de mettre en application les mesures »... Allez sur les sites dont nous parlons et vous comprendrez tout l'intérêt d'un écran noir !

Mme Laurence Rossignol.  - Monsieur le ministre, je vous donne acte de votre bénévolence. Vous avez envie de faire au mieux. Mais, comme législateurs, nous ne pouvons nous satisfaire d'une démarche consistant, selon vos termes, à pousser l'Arcom à prendre en compte nos propositions.

L'écran noir est efficace, vous le reconnaissez. Le meilleur moyen de le mettre en place n'est pas de pousser l'Arcom à le faire - même si vous avez probablement plus de moyens que nous  pour cela - mais de voter l'amendement.

Mme Annick Billon.  - L'écran noir fait partie des vingt-trois propositions du rapport de la délégation aux droits des femmes. Nos débats montrent qu'une volonté politique doit être affichée. Monsieur le ministre, il nous faut un engagement de votre part pour garantir le non-accès des mineurs à ces contenus. Lors de son audition, l'Arcom s'est montrée réticente à appliquer des dispositions déjà présentes dans la loi. Nous voulons des garanties qu'elle se pliera à la volonté politique.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Neuf des recommandations du rapport ont été retenues par mon ministère. Nous devons trouver une ligne de crête : maintenir une obligation de résultat pour les sites sans renoncer à fixer des moyens minimaux à mettre en oeuvre, dont l'écran noir. Je ne doute pas que l'Arcom tiendra compte des recommandations de votre rapport. Je préconiserai que le principe de l'écran noir soit pris en compte. Gardons dans la loi l'esprit d'un référentiel souple, qui puisse évoluer, mais aussi s'appliquer vite.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Je ne voudrais pas faire de mauvais esprit, mais vous venez de proposer la suppression du référentiel, et désormais vous demandez qu'il soit plus précis... (Mme Laurence Rossignol proteste.)

La proposition du rapport de la délégation aux droits des femmes est d'inscrire l'écran noir dans les directives à l'attention de l'Arcom, mais pas dans la loi ! Le Gouvernement propose de renforcer le contrôle de l'âge, et nous le suivons. Le ministre s'est engagé, et moi de même.

Nous aurions pu définir le référentiel dans la loi ou prévoir un décret en Conseil d'État, mais nous avons préféré confier ce soin aux deux autorités les plus compétentes.

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de l'enfance.  - Il n'y a pas de raison de douter de ma motivation pour que l'interdiction d'accès des sites pornographiques aux moins de 18 ans soit effective.

Pour donner plus de pouvoirs à l'Arcom, il fallait donner une base légale au référentiel. Mais définir la teneur du référentiel dans la loi serait trop rigide.

Comptez sur le Gouvernement pour que le délai de création du référentiel soit respecté. Mais gardons de la souplesse pour que le référentiel puisse s'adapter aux évolutions des technologies.

L'amendement n°83 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°84, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les services de communication au public en ligne diffusant des contenus pornographiques doivent afficher, dès l'entrée de l'internaute sur la plateforme, des messages d'avertissement concernant des contenus violents, précisant qu'il s'agit d'actes sexuels non simulés, pouvant constituer des infractions criminelles ou délictuelles.

Mme Laurence Cohen.  - Monsieur le rapporteur, il existe des amendements de repli...

Reprenant la troisième recommandation de notre rapport, l'amendement n°84 prévoit que les sites pornographiques affichent des messages d'avertissement sur les contenus violents, précisant qu'il s'agit d'actes sexuels non simulés, pouvant constituer des infractions criminelles ou délictuelles. Il faut que tous les utilisateurs sachent que ce n'est pas du cinéma, que la femme crie ou pleure vraiment.

Je me réjouis que notre rapport retienne l'attention du Gouvernement - il le mérite. L'Arcom réclame plus de moyens, mais nos auditions n'ont pas révélé une appétence particulière à travailler sur ces questions, c'est le moins qu'on puisse dire. (Mme Laurence Rossignol le confirme.)

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - L'amendement n°71 de Mme Billon propose un article additionnel avant l'article 4 qui va dans ce sens. J'en préfère la rédaction et l'emplacement. Retrait ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°84 est retiré.

L'article 1er, modifié, est adopté.

ARTICLE 2

Mme Annick Billon .  - En septembre, nous avons publié le rapport « Porno, l'enfer du décor ». Le Sénat a permis d'éveiller la conscience collective sur la pornographie et la nécessité de protéger les victimes.

Merci, monsieur le ministre, d'avoir intégré une dizaine de recommandations dans ce texte. Un tiers des moins de 13 ans et deux tiers des moins de 15 ans ont déjà eu accès au porno.

L'article 2 confie à l'Arcom, déjà compétente pour la haine en ligne, un pouvoir de sanction dans ce domaine. Actuellement, elle doit saisir le tribunal judiciaire de Paris, mais les sites sont trop nombreux pour que ce soit efficace.

Pour reprendre les mots de Gordon Choisel, président de l'association Ennocence, vous avez quelqu'un qui deale au coin de la rue et vous le mettez en demeure ? Il faut des amendes administratives plus lourdes pour rendre la vie impossible à cette industrie qui se développe massivement depuis vingt ans, aux mains d'experts de la finance.

M. le président.  - Amendement n°82, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Alinéa 3, première et deuxième phrases, alinéa 4, alinéa 6, première phrase, alinéa 9, première et dernière phrases, alinéas 11 et 18

Remplacer le mot :

peut

par le mot :

doit

II.  -  Alinéa 23 

Remplacer le mot :

peuvent

par le mot :

doivent

Mme Laurence Cohen.  - Nous souhaitons une obligation, et non une possibilité de sanction lorsque la loi n'est pas respectée.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Lorsqu'on dote une AAI d'un pouvoir de mise en demeure et de sanctions, il faut lui laisser l'indépendance de décider ou non de l'engagement de ces procédures. C'est la rédaction habituelle. Avis défavorable.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°82 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°41, présenté par MM. Dossus, Benarroche, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

I.  -  Alinéa 3, première phrase

Remplacer les mots :

mettre en demeure

par les mots :

saisir le président du tribunal judiciaire de Paris aux fins d'ordonner, selon la procédure accélérée au fond, que

et les mots :

de se conformer

par les mots :

se conforme 

II.  -  Alinéa 4

Remplacer le mot :

prononcer

par les mots :

saisir le président du tribunal judiciaire de Paris aux fins d'ordonner, selon la procédure accélérée au fond,

M. Thomas Dossus.  - Nous voulons rétablir le rôle du juge avant chaque injonction ou sanction de l'Arcom. Si la protection de l'enfance est importante, il faut éviter de potentielles dérives ou instrumentalisations. Revenons sur le principe d'une sanction purement administrative et refermons la boîte de Pandore.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - La commission spéciale est favorable à un changement de méthode, conformément à la recommandation 12 du rapport de la délégation aux droits des femmes.

Ce même changement a été fait pour l'Autorité nationale des jeux, qui a désormais une procédure administrative de blocage, avec pour effet une accélération des procédures. J'espère qu'il en sera de même ici. Avis défavorable.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Même avis défavorable.

L'amendement n°41 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°131, présenté par M. L. Hervé, au nom de la commission.

Alinéa 4

Remplacer les mots :

mettant à la disposition du public

par les mots :

permettant d'avoir accès à

et les mots :

de ce délai

par les mots :

du délai de quinze jours mentionné au second alinéa du I

L'amendement rédactionnel n°131, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°63 rectifié bis, présenté par M. Fialaire, Mme N. Delattre, MM. Bilhac, Corbisez, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier, Roux et Cabanel.

I.  -  Alinéa 6

1° Première phrase

Supprimer les mots :

75 000 euros ou

et les mots :

, le plus élevé des deux montants étant retenu

2° Seconde phrase

Supprimer les mots :

150 000 euros ou

II.  -  Alinéa 7

1° Première phrase

Supprimer les mots :

250 000 euros ou

et les mots :

, le plus élevé des deux montants étant retenu

2° Seconde phrase

Supprimer les mots :

500 000 euros ou

III.  -  Alinéa 21

1° Première phrase

Supprimer les mots :

la somme de 75 000 euros ou

et les mots :

, le plus élevé des deux montants étant retenu

2° Seconde phrase

Supprimer les mots :

à 150 000 euros ou

M. Bernard Fialaire.  - Nous voulons durcir les sanctions. Si 1 à 6 % du chiffre d'affaires mondial est proportionné, ce n'est pas le cas des montants de 75 000 à 500 000 euros. Les plateformes pourraient être tentées de budgétiser les amendes. De plus, il n'est pas clair que c'est le montant le plus élevé qui sera retenu.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Il est nécessaire de conserver un plancher exprimé en euros. C'est le montant le plus élevé qui sera retenu. Une amende de 75 000 euros ne serait encourue que par les sites réalisant un très faible chiffre d'affaires.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Même avis. C'est bien le plus fort des deux montants qui sera retenu.

L'amendement n°63 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°66 rectifié bis, présenté par M. Fialaire, Mme N. Delattre, MM. Bilhac, Corbisez, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier, Roux et Cabanel.

Alinéas 6, 7 et 21, secondes phrases

Remplacer le mot :

cinq

par le mot :

dix

M. Bernard Fialaire.  - Nous voulons étendre le délai pendant lequel une récidive provoque une amende accrue de cinq à dix ans, pour rendre le dispositif plus dissuasif.

Un site pornographique français comme xvideo.com a enregistré 3,22 milliards d'euros de visites. Le site canadien Pornhub a un chiffre d'affaires de 500 millions de dollars ! Il faut frapper plus fort et plus longtemps pour éviter toute budgétisation des amendes.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - La durée de cinq ans correspond aux dispositions du code pénal en cas de récidive délictuelle. Elle nous a paru proportionnée. Avis défavorable.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°66 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°46 rectifié quater, présenté par Mmes Noël et Garriaud-Maylam, MM. Gremillet, D. Laurent et Chatillon, Mme Muller-Bronn, MM. Charon, Joyandet et Bouchet et Mmes Thomas, Belrhiti, Pluchet et Berthet.

I. - Alinéa 9, première phrase

Après le mot :

internet

insérer les mots : 

ou aux fournisseurs de systèmes de résolution de nom de domaine définis au II de l'article 12 de la présente loi

II. - Alinéa 12

Après le mot :

internet

insérer les mots : 

, aux fournisseurs de systèmes de résolution de nom de domaine

Mme Sylviane Noël.  - Nous voulons élargir la liste des acteurs susceptibles de contribuer à la lutte contre les sites pornographiques en y incluant toutes les personnes pouvant prendre des mesures utiles sur demande de l'autorité administrative, comme les navigateurs et les systèmes d'exploitation, en plus des fournisseurs d'accès.

M. le président.  - Amendement n°47 rectifié ter, présenté par Mmes Noël et Garriaud-Maylam, MM. Gremillet, D. Laurent et Chatillon, Mme Muller-Bronn, MM. Charon, Joyandet et Bouchet et Mmes Thomas, Belrhiti, Del Fabro, Pluchet et Berthet.

I.  -  Alinéa 9, deuxième phrase

Remplacer les mots :

quarante-huit heures

par les mots :

, fixé par l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, qui ne peut être inférieur à deux jours ouvrés

II.  -  Alinéa 11

Remplacer les mots :

cinq jours

par les mots :

, fixé par l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, qui ne peut être inférieur à deux jours ouvrés

Mme Sylviane Noël.  - Cet amendement uniformise les délais de déréférencement prévus aux différents articles en se fondant sur le délai de deux jours ouvrés minimum.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Avis favorable à l'excellent amendement n°46 rectifié quater.

L'amendement n°47 rectifié ter reprend les demandes des opérateurs télécoms. Le délai de 48 heures est suffisamment clair et les fournisseurs d'accès disposent des services spécialisés. L'Arcom ne nous a signalé aucun problème. Avis défavorable.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - L'amendement n°46 rectifié quater retient à la fois les résolveurs DNS et les fournisseurs d'accès ; on y retrouve le même esprit que dans les amendements que vous proposez aux articles 4 et 6, auxquels je serai également favorable.

Avis défavorable à l'amendement n°47 rectifié ter pour les mêmes raisons que le rapporteur.

L'amendement n°46 rectifié quater est adopté.

L'amendement n°47 rectifié ter n'est pas adopté.

L'article 2, modifié, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 2

M. le président.  - Amendement n°121 rectifié, présenté par Mmes Morin-Desailly, Billon, Borchio Fontimp et M. Mercier.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 6-7 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique dans sa rédaction résultant de la loi n° ... du ... visant à instaurer une majorité numérique et à lutter contre la haine en ligne, il est inséré un article 6-... ainsi rédigé :

« Art. 6 - .... - I.  -  Les boutiques d'applications logicielles vérifient l'âge de leurs utilisateurs.

« Les boutiques d'applications logicielles, pour satisfaire à l'obligation mentionnée au premier alinéa du présent I, utilisent des systèmes de vérification de l'âge dont les caractéristiques techniques sont conformes à un référentiel élaboré par l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.

« II.  -  Le fait pour une boutique d'applications logicielles de ne pas satisfaire à l'obligation prévue au I est puni d'une amende ne pouvant excéder 1 % de son chiffre d'affaires mondial pour l'exercice précédent. »

Mme Catherine Morin-Desailly.  - Les amendements nos121 rectifié et 111 rectifié bis s'inscrivent dans la suite des débats de la loi sur la majorité numérique.

L'amendement n°121 rectifié vise à imposer aux boutiques d'application logicielle la vérification de l'âge des utilisateurs suivant un référentiel élaboré par l'Arcom.

M. le président.  - Amendement n°111 rectifié bis, présenté par Mmes Morin-Desailly, Billon, Borchio Fontimp et M. Mercier, M. Levi, Mme Noël, MM. Laugier, Duffourg, Le Nay et Kern, Mme Guidez, MM. Canévet et Détraigne et Mmes Jacquemet, Férat et Herzog.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 6-7 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique dans sa rédaction résultant de la loi n° ... du ... visant à instaurer une majorité numérique et à lutter contre la haine en ligne, il est inséré un article 6-... ainsi rédigé :

« Art. 6-....  -  I.  -  En cas d'inexécution de la mise en demeure prévue au II de l'article 6-7, l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique peut demander aux boutiques d'applications logicielles d'empêcher le téléchargement de l'application logicielle en cause. Elles disposent d'un délai de quarante-huit heures pour satisfaire cette demande.

« II.  -  En cas d'inexécution de la mise en demeure prévue au I de l'article 10-1 et dans l'hypothèse où l'éditeur du service de communication au public en ligne concerné donne accès aux contenus pornographiques au moyen d'une application logicielle ou édite des applications qui reprennent ces contenus, en totalité ou de manière substantielle et selon les mêmes modalités d'accès, l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique peut demander aux boutiques d'applications logicielles d'empêcher le téléchargement des applications logicielles en cause. Elles disposent d'un délai de quarante-huit heures pour satisfaire cette demande.

« III.- Les mesures prévues aux I et II du présent article sont demandées pour une durée maximale de vingt-quatre mois. Leur nécessité est réévaluée, d'office ou sur demande, au minimum tous les douze mois. Lorsque les faits justifiant les demandes prévues aux I et II ne sont plus constitués, l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique avise sans délai les destinataires de celles-ci de la levée des mesures.

« IV.  -  Le fait pour une boutique d'applications logicielles de ne pas satisfaire aux obligations prévues aux I à III du présent article est puni d'une amende ne pouvant excéder 1 % de son chiffre d'affaires mondial pour l'exercice précédent.

« V.  -  Un décret en Conseil d'État, pris après avis de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, détermine les modalités d'application du présent article. »

Mme Catherine Morin-Desailly.  - L'amendement n°111 rectifié bis responsabilise les gestionnaires de magasin d'applications, dont le rôle est sous-estimé. L'Arcom pourrait leur demander d'empêcher le téléchargement d'applications à caractère pornographique ou de réseaux sociaux ne respectant pas la vérification de l'âge.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Il manque une partie de la procédure à l'amendement n°121 rectifié, qui ne précise pas les suites à donner. Qui empêcherait le téléchargement : le magasin ou les éditeurs ?

On pourrait adopter l'amendement en prévoyant de l'améliorer dans la navette, mais je souhaiterais connaître l'avis du Gouvernement.

L'amendement n°111 rectifié bis est un complément bienvenu aux dispositions du projet de loi Majorité numérique, qui sera bientôt promulgué par le Président de la République. Avis favorable.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Ces deux amendements nous permettent d'avancer dans notre réflexion sur la vérification de l'âge, mais le premier pourrait être retiré au profit du second.

Nous parlons de la vérification de l'âge pour l'accès au porno, mais le Sénat a adopté une autre proposition de loi qui impose une même vérification aux réseaux sociaux.

Il faut aussi regarder ce qui se passe dans les magasins d'applications, vecteur par lequel nos enfants ont accès à ces applications.

L'amendement n°121 rectifié impose à la boutique de vérifier l'âge, quelle que soit l'application qu'il y trouvera. Cela va plus loin, madame Morin-Desailly, que l'amendement que vous aviez déposé sur la proposition de loi Majorité numérique : la vérification est très large.

Je signerai ce soir le décret d'application de la loi Studer, qui fait de la France le premier pays au monde à généraliser le contrôle parental. Cela satisfera votre amendement.

Enfin, il faut tenir les éditeurs comme responsables, et non les magasins d'application. Si aujourd'hui, ces derniers sont en duopole, le DMA va instaurer la concurrence et faciliter l'entrée de nouveaux magasins français et européens qu'il ne faudrait pas lester d'une nouvelle obligation...

En revanche, l'amendement n°111 rectifié bis a un très grand mérite : il oblige les gestionnaires d'applications à vérifier l'âge, sous peine de déréférencement sur les magasins. Cela renforce considérablement les dispositifs existants.

Mme Catherine Morin-Desailly.  - Cet échange a été utile. L'amendement n°121 rectifié est un amendement d'appel : il rappelle l'importance du contrôle de l'âge. Un mineur ne peut pas accéder à tout et n'importe quoi. Les boutiques portent aussi leur part de responsabilité. M. le ministre m'a toutefois convaincu en rappelant la loi Studer. Je me satisfais de son avis favorable à l'amendement n°111 rectifié bis, qui correspond à nos échanges sur mon amendement incomplet à la loi Majorité numérique.

L'amendement n°121 rectifié est retiré.

L'amendement n°111 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.

ARTICLE 3

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission spéciale .  - Dans le cadre de ses travaux, la commission spéciale a entendu les responsables de Pharos, qui effectue un travail remarquable en traquant les contenus illicites en matière de pédopornographie et de terrorisme. Elle peut imposer des blocages et des déréférencements. Le mécanisme fonctionne bien, encore mieux avec l'entrée en vigueur du règlement sur les services numériques. La question s'est posée d'élargir ses pouvoirs à d'autres infractions, comme la torture, le viol ou l'inceste, infractions particulièrement graves qui n'ont pas leur place en ligne. Les responsables de Pharos nous ont indiqué que cela nécessiterait beaucoup plus de moyens, ce qui implique d'agir en loi de finances. Monsieur le ministre, quel est votre avis sur une éventuelle extension des missions de Pharos ?

Mme Annick Billon .  - Je souhaite alerter sur le revenge porn, qui consiste à rendre accessibles en ligne des contenus sexuels à l'insu des personnes filmées, en très grande majorité des femmes. La loi pour une république numérique sanctionne lourdement ces actes, la loi pour la confiance dans l'économie numérique prévoit le retrait rapide des contenus illicites, mais les témoignages glaçants que nous avons recueillis révèlent une très grande méconnaissance de ces dispositions. À quoi cela sert-il de voter des lois que leur méconnaissance rend inutiles ? Monsieur le ministre, que prévoyez-vous pour y remédier ?

Mme Laurence Cohen .  - Nous voterons cet article 3, qui crée une sanction pénale applicable aux hébergeurs qui ne satisferaient pas à la demande émise par l'Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information de la communication de procéder au retrait en 24 heures d'un contenu en ligne d'images ou de représentations de mineurs présentant un caractère pédopornographique.

Nous avions déposé un amendement qui a été déclaré irrecevable au titre de l'article 40, afin de renforcer les pouvoirs de police administrative de Pharos, en introduisant de nouveaux critères sur la torture ou le viol, comme l'a indiqué Mme Morin-Desailly. La diffusion de tels actes peut avoir des conséquences particulièrement graves. Les auditions de la délégation aux droits des femmes ont révélé les limites du dispositif actuel. La lutte contre de tels contenus nécessite une action coordonnée des autorités compétentes.

L'amendement de coordination n°132, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°79, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 3, au début

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Tout contenu à caractère sexuellement explicite doit être retiré ou bloqué à la demande de la personne filmée, immédiatement et gratuitement, sans avoir à attendre une collaboration des plateformes.

Mme Laurence Cohen.  - Reprenant la recommandation 10 du rapport, nous souhaitons que tout contenu à caractère sexuel explicite puisse être retiré immédiatement et gratuitement à la demande de la personne filmée. D'après les associations qui sont aux côtés des victimes, faire retirer ces contenus est un véritable parcours de la combattante qui leur coûte très cher.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Retrait ou avis défavorable. Cet amendement n'est pas à la bonne place, puisque l'article porte sur les pouvoirs de Pharos. Il remet aussi en cause le droit des contrats : une personne ayant cédé son droit à l'image pourrait ainsi faire retirer le contenu. Je préfère la rédaction de l'amendement n°70 de Mme Billon portant article additionnel avant l'article 4.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Même avis.

Mme Laurence Cohen.  - Si l'amendement de Mme Billon est dans le même esprit, je retire le mien sans difficulté. En revanche, votre argumentation, monsieur le rapporteur, me pose problème. Droit des contrats... On parle de personnes exploitées, contraintes de réaliser des actes extrêmement violents et dont le consentement a été extorqué. (M. le rapporteur le concède.)

L'amendement n°79 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°126, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 8

Remplacer cet alinéa par cinq alinéas ainsi rédigés :

« III.- Lorsqu'un fournisseur de services d'hébergement retire une image ou représentation de mineurs présentant un caractère pornographique relevant de l'article 227-23 du code pénal, il en informe, dans les meilleurs délais, le fournisseur de contenu en précisant les motifs qui ont conduit au retrait de l'image ou de la représentation, la possibilité de solliciter la transmission d'une copie de l'injonction de retrait et les droits dont il dispose pour contester la demande de retrait devant la juridiction administrative compétente.

« Sur demande du fournisseur de contenus, le fournisseur de services d'hébergement transmet une copie de l'injonction de retrait.

« Les obligations prévues aux deux premiers alinéa ne s'appliquent pas lorsque l'autorité compétente qui a émis la demande de retrait décide qu'il est nécessaire et proportionné de ne pas divulguer d'informations pour ne pas entraver le bon déroulement des actions de prévention, de détection, de recherche et de poursuite des auteurs de l'infraction prévue au même article 227-23.

« En pareil cas, l'autorité compétente informe le fournisseur de services d'hébergement de sa décision en précisant sa durée d'application, aussi longue que nécessaire mais ne pouvant excéder six semaines à compter de ladite décision, et le fournisseur de services d'hébergement ne divulgue aucune information sur le retrait du contenu au fournisseur de ce dernier.

« Ladite autorité compétente peut prolonger cette période d'une nouvelle période de six semaines, lorsque la non-divulgation continue d'être justifiée. En pareil cas, elle en informe le fournisseur de services d'hébergement. » ;

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Nous voulons autoriser Pharos à différer l'information des éditeurs du retrait de contenus pédopornographiques, si cette information peut gêner la recherche des auteurs de la diffusion. Cela existe dans d'autres domaines.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Avis très favorable.

L'amendement n°126 est adopté.

L'article 3, modifié, est adopté.

La séance est suspendue à 19 h 15.

Présidence de Mme Pascale Gruny, vice-président

La séance reprend à 21 h 30.

APRÈS L'ARTICLE 3

Mme le président.  - Amendement n°89, présenté par Mme M. Vogel, MM. Dossus, Benarroche, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge et M. Salmon.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 9° de l'article 222-24 du code pénal est ainsi rétabli :

« 9° Lorsque des images ou vidéos de la commission du viol sont transmis en temps réel par un moyen de communication électronique à un ou plusieurs commanditaires. »

M. Thomas Dossus.  - Nous créons une nouvelle infraction de viol d'enfant retransmis en direct en ligne. Cette pratique particulièrement choquante suit trois étapes : le commanditaire contacte le futur auteur des faits via une plateforme en ligne, détaille la manière dont le crime doit se dérouler, puis assiste aux faits en visioconférence. Le commanditaire est bel est bien responsable : sans paiement, le viol n'aurait pas eu lieu. Nous proposons de rehausser la peine à vingt ans pour tous les viols en ligne, et non uniquement ceux qui sont commis sur des mineurs de quinze ans.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  -  Je vous rejoins sur le fond, bien sûr. Toutefois, cet amendement est satisfait par le droit en vigueur. Le code pénal prévoit deux circonstances aggravantes : la peine encourue est de vingt ans lorsque la victime est âgée de moins de 15 ans et lorsque la mise en relation entre l'auteur et la victime a été faite par l'utilisation d'un réseau de communications électroniques. Demande de retrait.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Même avis.

Mme Laurence Rossignol.  - Monsieur le rapporteur, êtes-vous sûr que l'auteur visé par l'article du code pénal est bien le commanditaire et non l'auteur du viol ?

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État.  - Par le biais de la complicité, on aboutit aux mêmes peines pour le commanditaire. L'important, c'est que la répression soit efficace.

Mme Laurence Rossignol.  - Les juges ne manquent pas d'articles du code pénal, mais bien d'enquêteurs pour poursuivre les auteurs. Les services de cybercriminalité ont identifié 150 commanditaires pour une trentaine de poursuites engagées. Nous avons besoin d'enquêteurs !

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - À l'article 222-24 du code pénal, le viol est puni de vingt ans de réclusion pour les actes commis sur un mineur de quinze ans, quoi qu'il arrive.

L'amendement n°89 n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°90, présenté par Mme M. Vogel, MM. Dossus, Benarroche, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge et M. Salmon.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, dans les six mois à compter de la promulgation de la loi, un rapport dressant les moyens mis en oeuvre pour lutter contre les viols commandités en ligne via des plateformes de retransmission en direct.

M. Thomas Dossus.  - Amendement de repli pour demander un rapport sur les viols retransmis en ligne : quels sont les moyens mis en oeuvre pour lutter contre ce phénomène inquiétant et mal connu ? En décembre 2021, 300 personnes étaient poursuivies pour ce chef.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Vous connaissez la jurisprudence du Sénat sur les demandes de rapports : retrait.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°90 n'est pas adopté.

AVANT L'ARTICLE 4

Mme le président.  - Amendement n°71 rectifié, présenté par Mmes Billon, Borchio Fontimp et M. Mercier.

Avant l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 1-2 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, dans sa rédaction résultant de l'article 22 de la présente loi, il est inséré un article 1-... ainsi rédigé :

« Art. 1-.... - Les personnes dont l'activité est d'éditer un service de communication au public en ligne mettant à disposition du public des contenus pornographiques affichent, avant tout accès à un contenu simulant la commission d'un crime ou d'un délit mentionné au deuxième alinéa du présent article, un message avertissant l'utilisateur du caractère illégal des comportements ainsi représentés. Ce message est clair, lisible, unique et compréhensible.

« Le premier alinéa est applicable aux infractions prévues par la section 3 du chapitre II et par le paragraphe 2 de la section 5 du chapitre VII du titre II du livre II du code pénal.

« La commission simulée d'un crime ou d'un délit est appréciée en fonction du titre du contenu ainsi que des mots-clés, expressions ou autres entrées renvoyant vers ledit contenu.

« Tout manquement à cette obligation est puni des peines prévues à l'article 1-2 de la présente loi.

« Tout contenu qui ne fait pas l'objet d'un message d'avertissement en violation du présent article est illicite au sens de l'article 3, paragraphe h, du règlement (UE) 2022/2065 du Parlement européen et du Conseil du 19 octobre 2022 relatif à un marché unique des services numériques et modifiant la directive 2000/31/CE. »

Mme Annick Billon.  - Les travaux du Sénat ont montré le caractère massif et systémique des violences envers les femmes dans le milieu de la pornographie. L'industrialisation du secteur favorise la domination et l'affirmation d'une division sexuée et racialisée des rôles dans les représentations sexuelles, charriant de nombreux stéréotypes.

Cet amendement impose aux éditeurs de sites pornographiques de faire apparaître un message alertant le consommateur sur le caractère illégal des comportements représentés. Les publicités pour l'alcool doivent bien afficher un message de prévention ! Le non-respect serait sanctionné de 75 000 euros d'amende et d'un an d'emprisonnement.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Cet amendement complète l'article 2 visant à empêcher l'accès des mineurs aux contenus pornographiques. Avis favorable.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Nous partageons l'intention, mais il faut encore y travailler au cours de la navette : sagesse.

Mme Laurence Cohen.  - Nous voterons cet amendement, que nous avions défendu à l'article 1er. Rappelons que certains producteurs et acteurs sont actuellement mis en examen pour proxénétisme aggravé, traite d'êtres humains et viol en réunion.

Mme Laurence Rossignol.  - Nous voterons cet amendement, dont nous connaissons la genèse et la portée. Ces contenus constituent des infractions pénales et pourraient déjà être poursuivis. Or ils ne le sont pas, et ne le seront pas plus demain. Cet amendement permettra d'identifier la nature de l'infraction commise et compliquera la vie des éditeurs de sites pornographiques. C'est bien le but.

Mme Marie Mercier.  - Je voterai moi aussi cet amendement. Je souhaite que cette loi protège réellement les enfants, mais j'en doute.

La loi du 30 juillet 2020 n'est toujours pas appliquée. Nous avons attendu le décret quatorze mois ! L'obligation pour les sites de contrôler l'âge n'a pas été respectée. L'Arcom les a déférés en justice et a dénoncé la proposition de médiation faite par le tribunal. Vendredi 7 juillet, celui-ci se prononcera, et nous saurons si la justice est capable de faire appliquer la loi.

L'amendement n°71 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

Mme le président.  - Amendement n°70 rectifié, présenté par Mmes Billon, Borchio Fontimp et M. Mercier.

Avant l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 6-1 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, il est inséré un article 6-1 ... ainsi rédigé :

« Art. 6-1 .... - Les fournisseurs de services d'hébergement définis au 2 du I de l'article 6 de la présente loi agissent promptement pour retirer tout contenu pornographique signalé par une personne représentée dans ce contenu comme étant diffusé en violation de l'accord de cession de droits, ou pour rendre l'accès à celui-ci impossible, dès lors que ce signalement est notifié conformément à l'article 16 du règlement (UE) 2022/2065 du Parlement européen et du Conseil du 19 octobre 2022 relatif à un marché unique des services numériques et modifiant la directive 2000/31/CE. »

Mme Annick Billon.  - Le droit à l'oubli existe pour les contenus à caractère pornographique diffusés à l'insu des personnes concernées - le revenge porn. En revanche, une telle possibilité n'existe pas quand la vidéo a fait l'objet d'un contrat - souvent un contrat de cession du droit à l'image, sur un territoire et pour une durée limitée. Les producteurs réclament en général 3 000 à 5 000 euros pour retirer la vidéo, soit bien plus que la rémunération pour la scène concernée.

Cet amendement va dans le sens des travaux du groupe de travail conjoint avec la Chancellerie. Il devra être complété par un meilleur encadrement des relations contractuelles, pour protéger les femmes victimes de l'industrie pornographique.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Cet amendement clarifie la situation des vidéos diffusées au-delà du cadre du contrat initial et donne une base légale claire aux plateformes et hébergeurs. Toutefois, il faudrait aussi imposer des modalités de cession plus claires dans les contrats. Avis favorable néanmoins.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Retrait ou avis défavorable. Si la période contractuelle est terminée et si les conditions ne sont pas respectées, le contenu devient de fait illicite et son retrait peut être demandé. Nos consultations ont montré que les personnes réussissent généralement à faire retirer les contenus.

En revanche, il peut y avoir des abus dans le cadre du contrat. Nous devons réunir les experts du droit des contrats et du RGPD pour faire aboutir votre proposition, madame la sénatrice.

Mme Laurence Rossignol.  - Cet amendement est très important.

Le Parlement européen examine actuellement une directive sur les violences sexuelles faites aux femmes. Une première version a été adoptée en commission et sera votée en plénière le 13 juillet. Le trilogue pourra ensuite débuter. Mais la version du Conseil est très inquiétante : la diffusion de vidéos sexuelles explicites sans le consentement des personnes ne pourrait être pénalisée, au nom de la liberté d'expression ! C'est inconcevable. Nous devons voter cet amendement pour affirmer la position de la France.

Mme Laurence Cohen.  - Cet amendement est très important. Nous en avions présenté un similaire, moins bien placé apparemment. Pour les actrices, faire retirer des vidéos pornographiques est un parcours de la combattante : on leur demande des sommes excédant largement les rémunérations reçues lors du tournage.

Monsieur le ministre, j'attire votre attention sur la notion de contrat. Dans notre rapport, nous avons constaté que les femmes qui tournent des films pornographiques sont précarisées et fragilisées : elles sont à la merci des réalisateurs. Le rapport de domination rend caduque la notion de contrat. On extorque des images à ces femmes. Dès lors, difficile de faire valoir les termes du contrat. Mon groupe votera cet amendement.

Mme Dominique Vérien.  - Nous parlons de femmes qui ont été abusées et à qui on a fait croire que les images seront diffusées très loin de chez elles. Or leurs voisins y ont accès. Certaines, qui travaillaient par exemple au guichet d'une banque, ont été reconnues et ont dû démissionner. Le contrat devrait être mieux cadré. On leur a menti.

Votons-le cet amendement dès aujourd'hui, quitte à en améliorer la rédaction au cours de la navette.

Mme Laurence Cohen.  - Très bien !

Mme Annick Billon.  - Merci au rapporteur pour son avis favorable. Je maintiens mon amendement : la navette permettra de l'améliorer. Avec les trois autres rapporteures de la mission d'information, toutes présentes ce soir, nous avons été profondément marquées par une audition à huis clos. On doit écouter le témoignage de ces femmes qui ont été piégées. Oui, certaines ont signé un contrat, pour pouvoir payer leur loyer pendant le confinement, et subi, le temps du tournage, des actes de barbarie. Votons cet amendement !

L'amendement n°70 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

Mme le président.  - Amendement n°87, présenté par M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Avant l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai d'un an, le Gouvernement présente sa stratégie de développement et de déploiement d'un système d'exploitation français à l'ensemble du matériel numérique des administrations publiques, permettant d'assurer une souveraineté numérique.

M. Pierre Ouzoulias.  - Le « G » et le « A » de Gafam contrôlent 99 % des systèmes d'exploitation de vos téléphones. Ajoutez le « M », et on atteint 93 % des ordinateurs. Les systèmes d'exploitation alternatifs n'existent quasiment pas. C'est un problème pour les administrations de l'État : on ne peut pas garantir l'absence de portes dérobées permettant de voler des données...

On me signale qu'il existe une version d'un système d'exploitation Clip OS développé par l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi) depuis 2011, mais toujours pas de version prête à l'emploi.

Il est temps de lancer un plan pour doter les administrations françaises d'un système d'exploitation alternatif et indépendant.

M. Patrick Chaize, rapporteur.  - Ce sujet est très important. Le marché des systèmes d'exploitation est très concentré, dans les mains d'acteurs américains. Utiliser une solution étrangère n'est pas forcément une mauvaise chose, mais les risques liés à l'extraterritorialité du droit existent bien.

Préciser que le Gouvernement présente une stratégie à ce sujet relève de la communication du Gouvernement : quel est son avis ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Retrait ou avis défavorable. Le Gouvernement a déjà présenté sa stratégie en vue d'atteindre la souveraineté numérique. Le plan France 2030 identifie les briques de souveraineté sur lesquelles nous faisons porter nos efforts : le cloud, l'intelligence artificielle, le cyber, le quantique, les réseaux de 5G et de 6G. S'agissant du cloud, le Secrétariat général pour l'investissement (SGPI) a lancé un appel à manifestation d'intérêt pour développer en France les suites collaboratives, c'est-à-dire la façon dont nous interagissons avec l'ordinateur. Des acteurs tels que Jamespot ou Wimi ont pu bénéficier de millions d'euros.

Et ce n'est là qu'un exemple ! Bref, la stratégie du Gouvernement est connue et explicitée dans le cadre de France 2030.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission spéciale.  - Je comprends M. Ouzoulias, car la stratégie de souveraineté numérique du Gouvernement est restée longtemps peu claire, notamment sur la plateforme des données de santé... Le Sénat se réjouit que le Gouvernement ait enfin décidé de changer de braquet. Il est temps que l'État se dote d'une doctrine claire.

Il n'est sans doute pas nécessaire de l'inscrire dans un texte de ce type, mais nous y serons attentifs.

M. Patrick Chaize, rapporteur.  - Même avis que le Gouvernement.

M. Pierre Ouzoulias.  - J'utilise une suite collaborative libre de droits, LibreOffice, que je vous recommande. Sans système d'exploitation, toutefois, les failles resteront béantes. Ce doit être une priorité de la stratégie de souveraineté. Je maintiens mon amendement.

L'amendement n°87 n'est pas adopté.

ARTICLE 4

Mme le président.  - Amendement n°48 rectifié quater, présenté par Mmes Noël et Garriaud-Maylam, MM. Gremillet, D. Laurent et Chatillon, Mme Muller-Bronn, MM. Charon, Joyandet et Bouchet et Mmes Thomas, Belrhiti, Pluchet et Berthet.

Alinéa 16

Après le mot :

internet

insérer les mots :

ou aux fournisseurs de systèmes de résolution de nom de domaine définis au II de l'article 12 de la présente loi

Mme Sylviane Noël.  - Cet amendement élargit aux navigateurs et systèmes d'exploitation la liste des acteurs susceptibles de contribuer à la lutte contre les sites faisant l'objet de sanctions européennes.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Par cohérence, avis favorable.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°48 rectifié quater est adopté.

L'article 4, modifié, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 4

Mme le président.  - Amendement n°127, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 226-8 du code pénal est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Est assimilé à l'infraction mentionnée au présent alinéa et puni des mêmes peines le fait de publier par quelque voie que ce soit, un contenu visuel ou sonore généré par un traitement algorithmique et reproduisant l'image ou les paroles d'une personne, sans son consentement, s'il n'apparaît pas à l'évidence qu'il s'agit d'un contenu généré algorithmiquement ou s'il n'en est pas expressément fait mention. » ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Ces peines sont portées à deux ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende lorsque la publication du montage ou du contenu généré par un traitement algorithmique a été réalisé en utilisant un service de communication au public en ligne. »

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Cet amendement renforce l'article 226-8 du code pénal qui sanctionne la diffusion de fausses nouvelles par montage en y incluant les hypertrucages, ou deepfakes, conçus à l'aide d'algorithmes. Ces pratiques exposent massivement le public à de fausses informations, et peuvent même déclencher des cyberattaques.

Nous débattrons tout à l'heure d'un amendement de Mme Borchio Fontimp concernant l'usage des deepfakes en pornographie.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Dans leur rapport d'information, les députés Gosselin et Latombe craignaient que les deepfakes ne soient pas couverts par l'article 226-8, s'agissant non de montages mais d'images créées de toutes pièces. Avis favorable.

M. Pierre Ouzoulias.  - J'ai un doute sur les modalités techniques, même si je souscris à l'objet.

Un exemple : la reconstitution par algorithme de la voix du général de Gaulle prononçant l'appel du 18 juin. Son consentement n'ayant pas été recueilli, tomberait-on sous le coup de cet amendement ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Non, car il y a une condition complémentaire : s'il n'apparaît pas à l'évidence qu'il s'agit d'un contenu généré algorithmiquement ou s'il n'en est pas expressément fait mention.

M. François Bonhomme.  - Le sujet n'est pas anodin. Les deepfakes sont inquiétants, compte tenu du développement de l'intelligence artificielle. Europol a identifié des risques de déstabilisation des États. Nous soutenons donc cette initiative.

L'amendement n°127 est adopté et devient un article additionnel.

Mme le président.  - Amendement n°5 rectifié, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le dernier alinéa de l'article 227-23 du code pénal est ainsi rédigé :

« Les dispositions du présent article sont également applicables aux images pornographiques revêtant l'intention de représenter un mineur, intention appréciée par le contenu, par les images ou par les titres donnés aux images. »

Mme Laurence Rossignol.  - Cet amendement et les suivants ont le même objet. L'article 227-23 punit le fait de diffuser, enregistrer ou transmettre l'image ou la représentation d'un mineur lorsque celle-ci présente un caractère pornographique.

Mais il est appliqué de manière restrictive, sans doute pour s'adapter aux moyens dont disposent les enquêteurs. Pharos et Europol distinguent entre la pédocriminalité, qui consiste à commettre des abus sexuels et viols sur mineurs et à en diffuser les images, et la pédopornographie, qui consiste à représenter un mineur.

Dans les sites pornographiques, il y a quantité d'images qui représentent des mineurs subissant des abus sexuels, par exemple sous l'intitulé « écolière ». L'intention est bien de mettre en scène la sexualité d'un majeur avec une mineure, peu importe que la jeune fille ait 18 ans ou non. Du moment qu'elle est pubère, Pharos laisse passer.

Mme le président.  - Amendement identique n°78 rectifié, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Laurence Cohen.  - Défendu.

Mme le président.  - Amendement n°7 rectifié, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le dernier alinéa de l'article 227-23 du code pénal est ainsi rédigé :

« Les dispositions du présent article sont également applicables aux images pornographiques d'une personne dont l'aspect physique est celui d'un mineur. »

Mme Laurence Rossignol.  - Défendu.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Je comprends votre intention. Sous couvert de fiction, il ne faut pas faire l'apologie d'actes visés par le code pénal. La cause est bonne, mais les difficultés juridiques sont réelles : dans les faits, nous pourrions condamner des personnes majeures qui représentent des personnes mineures. De plus, vous viseriez tout type d'images, et non seulement les sites pornographiques. C'est dangereux, surtout associé à votre amendement n°8 rectifié. Il serait alors interdit à deux majeurs de se filmer, si l'un est déguisé en mineur.

Cela compliquerait la tâche des agents de Pharos, qui font un travail remarquable. Les critères sont actuellement relativement simples, ce qui permet des blocages massifs et rapides. En exigeant une analyse au cas par cas, vous risquez de déstabiliser Pharos.

Mme Laurence Rossignol.  - C'est l'inverse !

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Le rapport de la délégation aux droits des femmes rappelle que les principaux responsables des contenus hardcore sont les grandes plateformes, les tubes, prêtes à diffuser n'importe quoi du moment que c'est rentable. Cette primauté de plateforme favorise les violences sexuelles contre les femmes, et des contenus de plus en plus indignes et violents. Nous sommes tous les deux membres de la délégation, madame Rossignol.

Mme Laurence Rossignol.  - Je suis même auteure du rapport ! (Sourires)

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Je l'ai voté !

Il faut donc viser les plateformes et non modifier le code pénal. De ce point de vue, l'amendement de Mme Billon est préférable.

Enfin, ne mettons pas sur le même plan des jeux de rôle entre adultes consentants et un viol d'enfant. J'en suis navré, avis défavorable aux trois amendements.

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État.  - Même avis.

L'amendement n°8 rectifié est retiré.

Mme Laurence Cohen.  - Monsieur le rapporteur, vous faites une confusion : nous parlons de représentation ! Il s'agit d'un homme face à la représentation d'une mineure par une personne majeure : une personne avec des couettes, que l'on va violer - c'est une pure incitation à l'inceste ! Un adulte pourrait donc abuser un enfant ? Il est inacceptable de véhiculer de telles incitations au crime. Allez voir sur les sites, il n'y a aucun doute possible.

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État.  - Nous supprimons le terme de pédopornographie, à la demande des associations, pour ne parler que de pédocriminalité. (On acquiesce au banc des commissions.)

Dans une logique d'image, intégrer la notion d'intention, de déguisement, créerait des difficultés juridiques. Concentrons les moyens sur la répression des crimes réels. (Mme Laurence Cohen manifeste son scepticisme.)

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Nous touchons à des dispositions qui donneront lieu à des procès pénaux. Restons concrets. En droit pénal, on ne criminalise pas l'intention. Elsa Schalck l'a rappelé en commission de manière éloquente. Membre de la commission des lois, je me fais aussi le gardien du droit pénal.

De plus, la matérialité des faits prime sur la fiction et nous rappelle qu'il s'agit soit d'adultes, soit d'enfants ! Avec un tel élargissement, nous encourrons la censure du Conseil constitutionnel. L'intentionnalité n'est pas matérialisable, la matérialité des faits primera toujours !

Mme Laurence Rossignol.  - Je ne m'attendais pas à cette argumentation, mais plutôt à ce qu'on me dise que l'amendement est satisfait. (Mme la secrétaire d'État le confirme.)

L'article 227-23 du code pénal parle bien d'image ou de représentation. Aussi permet-il le retrait de toutes les rubriques qui inondent les sites pornographiques et dont l'intention est bien pédocriminelle ! Les enquêteurs travaillent image par image : nous leur proposons de poursuivre de manière large.

Et l'affaire Bastien Vivès ? Où la situez-vous ?

Les amendements identiques nos5 rectifié et 78 rectifié ne sont pas adoptés, non plus que l'amendement n°7 rectifié.

Mme le président.  - Amendement n°6 rectifié, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 227-23 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions du présent article sont applicables dès lors qu'elles ont pour intention de représenter des relations sexuelles de caractère incestueux. »

Mme Laurence Rossignol.  - Les discussions sont difficiles, tant l'écart est grand entre la loi, les infractions commises et la réalité des possibilités d'enquête. Charger la loi n'est pas toujours la solution, mais la loi ne permet pas de poursuivre.

Les sites qui représentent l'inceste sont pléthore. Deux enfants par classe sont victimes d'inceste. Les enfants sont surexposés ! Comment lutter, si l'on peut voir autant de représentations ? Nous ne légiférons pas sur des fantasmes, mais sur des contenus qui banalisent l'inceste et en font une pratique excitante pour les hommes qui regardent ces sites.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Avis défavorable. Je parle bien de l'inceste réprimé par le code pénal, pas de la définition du Larousse.

Mme Laurence Rossignol.  - Je veux bien le préciser !

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État.  - Même avis, les textes permettent déjà de criminaliser l'inceste.

Sur l'affaire Bastien Vivès, une enquête pénale est en cours. C'est pourquoi je n'ai pas fait de saisine en application de l'article 40 du code pénal. La loi actuelle suffit.

Le problème est surtout celui des moyens des services d'enquête.

L'amendement n°6 rectifié n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°122 rectifié quater, présenté par MM. Chaize, Retailleau, Bascher et Mandelli, Mmes Demas, Dumont, Jacques et Berthet, MM. Somon, Burgoa et C. Vial, Mmes Malet, V. Boyer et Eustache-Brinio, M. Bouchet, Mmes Lavarde et Bourrat, M. Calvet, Mme Bellurot, MM. Sido, Allizard, Bazin et Mouiller, Mmes Deseyne, Estrosi Sassone et Joseph, M. Perrin, Mmes Garnier et Gosselin, MM. Rapin et Brisson, Mmes Di Folco, Richer et L. Darcos, MM. Panunzi et Genet, Mmes Puissat, F. Gerbaud, Chauvin, M. Mercier et Borchio Fontimp, MM. Hugonet et D. Laurent, Mmes Micouleau et Belrhiti, M. B. Fournier, Mmes Del Fabro et Lassarade, MM. Klinger, Chevrollier, Piednoir et Gremillet, Mme Ventalon, MM. Lefèvre et Anglars, Mmes Pluchet et Schalck, MM. Malhuret, Tabarot et Bouloux et Mme de Cidrac.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Lorsqu'il est constaté des émeutes ou des mouvements populaires portant atteinte à l'ordre public ou à la sécurité publique et incitant de façon manifeste à la violence contre des personnes dépositaires de l'autorité publique, à la dégradation des bâtiments ou des installations publics ou à l'intrusion en leur sein, l'autorité administrative compétente peut émettre des injonctions de retrait à l'encontre de tout service de réseau social en ligne pour retirer ou bloquer l'accès des contenus, dans un délai de deux heures à compter de la réception de ladite injonction, incitant de façon manifeste aux émeutes, à la violence contre les personnes dépositaires de l'autorité publique, à la dégradation des bâtiments ou des installations publics ou à l'intrusion en leur sein.

II.  -  La méconnaissance de l'obligation mentionnée au présent I est punie d'un an d'emprisonnement et de 250 000 € d'amende.

III.  -  Les modalités d'application du présent article sont définies par décret en Conseil d'État.

M. Patrick Chaize.  - La portée des émeutes et des mouvements populaires violents est amplifiée par les réseaux sociaux, dont la passivité appelle une réponse plus ferme. L'autorité administrative doit pouvoir prononcer des injonctions de retrait sous deux heures de contenus qui appellent à la violence.

Je rends hommage aux forces de l'ordre qui oeuvrent pour faire régner l'ordre. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Pierre-Jean Verzelen applaudit également.) Il est injuste que les casseurs bénéficient des réseaux sociaux.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Je comprends cet amendement d'appel, et m'associe à votre salut aux forces de l'ordre, comme j'assure le maire de L'Haÿ-les-Roses de mon soutien. Je rends aussi hommage au jeune pompier décédé. Nous devons être inflexibles face à ceux qui prétextent de la mort d'un jeune de 17 ans pour incendier et casser.

Les réseaux sociaux ont joué un rôle important dans la propagation des violences et pillages de toute nature. L'écran ne protège pas : toute incitation à la violence est punie de prison ferme. Bientôt, ils encourront la peine de bannissement, grâce au Sénat, tout comme ceux qui harcèlent les élus.

Le garde des sceaux entend « péter les comptes Snapchat » : la justice peut-elle déjà le faire ? Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Merci pour cet amendement qui me permet de rendre compte de l'action du Gouvernement au cours de cette semaine tragique. Oui, les réseaux sociaux ont amplifié le phénomène, même si les racines des problèmes sont ailleurs. Leurs fonctionnalités favorisent les regroupements et les dynamiques émeutières, et ils ont diffusé des images qui glorifient ou banalisent la violence.

Dès les premières heures, avec le ministre de l'intérieur, nous avons rappelé les plateformes à leurs responsabilités légales : les contenus doivent être promptement retirés et les données des comptes transmises sur injonction des autorités judiciaires. Puis, nous leur avons demandé l'anticipation du DSA, que transpose ce projet de loi : corriger le risque systémique qu'elles font peser sur la sécurité publique.

Nous avons convoqué une réunion pour dresser le bilan de la semaine avec les quatre principales plateformes. Force est de constater qu'elles ont retiré des milliers de contenus, supprimé des centaines de comptes, satisfait des dizaines de réquisitions. Elles ont pris des mesures contre la viralité de la diffusion de la violence.

Je suis très défavorable à cet amendement, à cause de son risque d'inconstitutionnalité. La loi Avia a été censurée par le Conseil constitutionnel, saisi par le Sénat, alors qu'elle prescrivait des retraits en 24 heures. Ici, vous proposez deux heures ! Le motif de censure était que les hébergeurs, qui encourent des peines très lourdes, allaient retirer des contenus même licites. C'est enfreindre la liberté d'expression.

Il faut rester constructif pour que les plateformes agissent dès la première heure. La navette suivra son cours. Le Président de la République appelle à ne pas prendre de mesures trop dures à chaud. J'espère que nous aboutirons à une rédaction collective efficace à l'Assemblée nationale, puis en CMP. Je vous propose donc le retrait. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - M. Chaize voulait que nous ayons un débat de nature à éclairer notre vote. Le ministre vient de faire une proposition de travail très honnête, à laquelle je souscris. L'objectif est d'aboutir à une rédaction fluide et respectueuse de la Constitution. Il faut nous mettre autour de la table.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission spéciale.  - Je rappellerai les travaux antérieurs du Sénat : j'ai rapporté la loi relative à la lutte contre la manipulation de l'information et la loi Avia. Celle-ci avait été censurée, car le délai de retrait des contenus était fixé à 24 heures. L'amendement prévoit un retrait en deux heures : c'est contradictoire avec tous nos votes antérieurs.

M. Ludovic Haye.  - Très juste !

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission spéciale.  - Je comprends cet amendement. Monsieur le ministre, le travail que vous proposez est nécessaire. Nous verrons comment fonctionne le DSA, mais les plateformes, qui amplifient considérablement les actes, doivent être tenues responsables. Les TikTok bots, depuis l'étranger, contribuent à la diffusion d'images répréhensibles, confortant les émeutiers dans leur action. Nous devrons être intraitables dans l'application du DSA, comme l'a dit Thierry Breton à Elon Musk.

M. Pierre Ouzoulias.  - Je souscris au constat sur les réseaux sociaux et rends à mon tour hommage aux élus et aux forces de police.

Cela dit, chers collègues, vous avez déféré la loi Avia devant le Conseil constitutionnel en dénonçant une atteinte disproportionnée à la liberté d'expression et des sujétions impossibles à satisfaire entraînant une rupture d'égalité devant les charges publiques. Le Conseil constitutionnel vous a donné raison. Pour rédiger un nouvel amendement, il faudrait partir de cette décision du 18 juin 2020.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Absolument !

M. Pierre Ouzoulias.  - Mon cher collègue, vous vous êtes écarté de sa jurisprudence. Le Conseil constitutionnel censurerait sans doute votre amendement.

M. Thomas Dossus.  - Les plateformes ont joué un rôle propagateur effrayant de ces émeutes, multipliant les pillages inacceptables.

Il y a une semaine, j'interrogeais Gérald Darmanin sur la loi Cazeneuve de 2017. Il m'accusait de vouloir légiférer à chaud. Or six jours plus tard, voilà un amendement rédigé à chaud, qui a peu de chances de survivre à la navette comme à l'examen du Conseil constitutionnel !

En commission, nous avons élargi le bannissement : c'est déjà une étape.

J'ajoute que la vérité sur le drame de Nanterre a été révélée par une vidéo sur les réseaux sociaux : ce n'était pas la version de la police. Demain, en demanderait-on le retrait ? (M. Patrick Chaize manifeste son désaccord.) Ce genre d'amendement m'inquiète.

M. Didier Mandelli.  - J'ai écouté l'ensemble des arguments. Nous avons déjà eu ces discussions, à l'occasion de la loi Avia et de la loi d'orientation des mobilités (LOM). Nous avions inscrit dans celle-ci la possibilité de faire retirer, sous deux heures, les publications d'une communauté comme Coyote pour éviter qu'une personne en délit de fuite puisse être informée de la position des forces de l'ordre, à la suite d'un précédent en Bretagne, ce que le Conseil constitutionnel n'a pas censuré. J'encourage Patrick Chaize à maintenir son amendement, que j'ai cosigné et que je voterai.

M. Cédric Vial.  - Je rejoins M. Mandelli. Nous sommes tous d'accord sur l'intention, qui fait consensus, hormis peut-être pour M. Dossus.

La rédaction de l'amendement pourrait être améliorée : dont acte. Votons-le et faisons progresser les choses au cours de la navette !

Monsieur le ministre, vos collègues du Gouvernement, Bruno Le Maire, Gabriel Attal et Stanislas Guerini ont épuisé notre confiance : nous préférons voter l'amendement que de nous laisser bercer par les promesses d'un travail transpartisan futur. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

La séance est suspendue quelques instants.

M. Patrick Chaize.  - Nous parlons beaucoup de la loi Avia. J'ai rédigé mon amendement à la lumière de la LOM, qui prévoit un effet immédiat. Je ne vois pas pourquoi ce qui est possible pour Coyote ne le serait pas ici.

Ce matin même, le Président de la République est allé encore plus loin, en proposant de bloquer les réseaux sociaux. Ma proposition se limite au retrait de contenus.

Cet amendement a été cosigné par un grand nombre de mes collègues. Je le retire toutefois, pour que les réunions de travail puissent avoir lieu, mais je demande au ministre que, dès demain, il nous annonce la date de début de ces travaux. Je souhaite également qu'ils aient lieu sur la base de cet amendement.

L'amendement n°122 rectifié quater est retiré.

M. Cédric Vial.  - Je le reprends !

Mme le président.  - C'est impossible, mon cher collègue, car vous en êtes cosignataire.

Mme Sophie Primas.  - Vous pourriez répondre, monsieur le ministre...

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - En effet, je vous donnerai une date dès demain.

M. Olivier Rietmann.  - Promesses !

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Nous allons devoir apporter des réponses, mais il est difficile de le faire à chaud - c'est ce que le Président de la République a dit.

La navette permettra d'améliorer le texte, après quoi, je l'espère, la CMP aboutira à un accord et le texte sera validé par le Conseil constitutionnel.

Saisissons-nous de ce sujet en partant du travail de Patrick Chaize pour construire un dispositif équilibré et solide qui évite que de tels événements ne se reproduisent.

ARTICLE 5

Mme le président.  - Amendement n°68 rectifié bis, présenté par M. Fialaire, Mme N. Delattre, MM. Bilhac, Corbisez, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier, Roux et Cabanel.

Alinéa 3, première phrase

Après les mots :

ayant été utilisés

insérer les mots :

, ou non,

M. Bernard Fialaire.  - L'article 5 permet au juge de prononcer une suspension du ou des comptes utilisés pour commettre l'infraction, mais le délinquant pourra toujours se reporter sur d'autres plateformes. Nous proposons donc que le juge puisse ordonner la suppression de tous les comptes de l'auteur. Bien sûr, dans le respect du principe de proportionnalité, la peine sera facultative et laissée à l'appréciation du juge ; elle sera limitée aux infractions graves commises au moyen d'un service de plateforme en ligne.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Cette piste a été explorée par le Gouvernement et votre serviteur, mais semble contraire à la Constitution. La nouvelle rédaction adoptée par la commission spéciale garantit que le juge pourra ordonner le blocage de tous les comptes concernés par l'infraction. C'est une position intermédiaire qui vous satisfait en partie. Avis défavorable.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°68 rectifié bis n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°133, présenté par M. L. Hervé, au nom de la commission.

I. - Alinéa 5, seconde phrase

Remplacer le mot :

précités

par les mots :

faisant l'objet d'une suspension

II. - Alinéa 6

Remplacer les mots :

visés par la peine complémentaire

par les mots :

faisant l'objet d'une suspension

III. - Alinéa 21

Remplacer le mot :

accéder

par les mots :

utiliser un compte d'accès

IV. - Alinéa 24

Remplacer les mots :

accéder à certains services désignés par la juridiction

par les mots :

utiliser un compte d'accès à certains services en ligne désignés par la juridiction de condamnation ou par le juge d'application des peines

V. - Alinéas 25 et 26 

Rédiger ainsi ces alinéas :

II. - Après le 19° de l'article 41-2 du code de procédure pénale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Ne pas utiliser, pour une durée qui ne saurait excéder six mois, un compte d'accès à un ou des services de plateforme en ligne définis au 4° du I de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance en l'économie numérique, services de réseaux sociaux en ligne et services de plateformes de partage de vidéo au sens du règlement 2022/1925 du Parlement européen et du Conseil du 14 septembre 2022 relatif aux marchés contestables et équitables dans le secteur numérique et modifiant les directives (UE) 2019/1937 et (UE) 2020/1828. »

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Amendement rédactionnel et de clarification.

Mme le président.  - Amendement n°116, présenté par M. Haye et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

I.  -  Alinéa 21

Remplacer les mots :

lorsque l'infraction a été commise en recourant à un service en ligne, y compris si celui-ci n'a pas été le moyen unique ou principal de cette commission

par les mots :

pour les délits prévus au II de l'article 131-35-1 du présent code

II.  -  Alinéa 24

Remplacer les mots :

Lorsque l'infraction a été commise en recourant à un service en ligne, y compris si celui-ci n'a pas été le moyen unique ou principal de cette commission

par les mots :

Pour les délits prévus au II de l'article 131-35-1 du présent code

III.  -  Alinéa 26

Compléter cet alinéa par les mots :

. Les dispositions du présent alinéa s'appliquent pour les délits prévus au II de l'article 131-35-1 du code pénal

M. Ludovic Haye.  - Cet amendement calque la liste des délits pouvant déclencher le bannissement numérique sur celle des délits pouvant déclencher la peine complémentaire prévue à l'article 131-35-1 du code pénal. Les peines limitatives de la liberté d'expression doivent être entourées de garanties fortes.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - C'est tout l'inverse de ce que la commission spéciale a entendu faire. Votre liste ne comporte que des délits : le bannissement ne pourrait donc jamais viser l'auteur d'un crime. Il faut trouver le bon équilibre. Je serais ouvert à ce que le bannissement ne concerne que certains délits et certains crimes. Mais votre amendement, trop restrictif, priverait cette nouvelle arme de sa portée. Le bannissement ne pourra être prononcé qu'après une infraction commise en ligne : c'est déjà un garde-fou. Retrait ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Je salue le travail du rapporteur : partant de l'article 5, il a imaginé que le bannissement puisse être prévu dans le cas du sursis probatoire, de la composition pénale ou comme peine alternative à la prison. C'est une bonne chose, mais, pour en assurer la sécurité juridique, il faut préciser la durée du bannissement et les infractions concernées.

Dès lors, avis favorable aux amendements nos133 et 116. L'amendement de M. Haye circonscrit la liste des délits permettant au juge de prononcer un bannissement.

L'amendement n°133 est adopté.

L'amendement n°116 n'a plus d'objet.

Mme le président.  - Amendement n°117 rectifié, présenté par M. Haye et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

I.  -  Alinéa 9

Supprimer la référence :

222-33-1-1,

II.  -  Alinéa 11

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 3° Les délits prévus aux articles 226-1 à 226-2-1, 226-4-1, 226-8 et 226-8-1 ;

III.  -  Alinéa 15

Remplacer la référence :

431-6

par les mots :

et au deuxième alinéa de l'article 431-6

M. Ludovic Haye.  - Nous modifions la liste des délits concernés pour ne conserver que ceux punis de deux ans de prison et 30 000 euros d'amende, à l'exception des délits de presse. Il s'agit de garantir le respect de la proportionnalité des peines.

Mme le président.  - Sous-amendement n°143 à l'amendement n°117 rectifié de M. Haye et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, présenté par le Gouvernement.

Amendement 117, alinéas 4 à 11

Remplacer ces alinéas par dix-sept alinéas ainsi rédigés :

II. - Alinéa 10

Remplacer les mots :

, 225-6 et 225-10

par les mots :

et 225-6

III. - Alinéa 11

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 3° Le délit prévu à l'article 226-2-1 ;

IV. - Alinéa 13

Supprimer la référence :

, 226-10

V. - Alinéa 15

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 7° Les délits prévus aux articles 211-2, 223-13, 223-14, 227-18, 227-18-1, 227-21, 412-8 et au deuxième alinéa de l'article 431-6 ;

VI. - Alinéa 17

Supprimer la référence :

431-1,

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Ce sous-amendement va dans le sens de M. Haye. Il faut circonscrire le champ des délits concernés par le bannissement pour sécuriser le dispositif. Avis favorable à l'amendement n°117 rectifié, sous réserve de ce sous-amendement.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - La commission était favorable à la proposition de M. Haye, sous réserve de certaines modifications qu'il a apportées. Le sous-amendement du Gouvernement revient sur ces modifications. Avis favorable à l'amendement, mais très défavorable au sous-amendement.

Le sous-amendement n°143 n'est pas adopté.

L'amendement n°117 rectifié est adopté.

Mme le président.  - Amendement n°118, présenté par M. Haye et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Alinéa 21

Remplacer les mots :

trois ans

par les mots :

six mois

M. Ludovic Haye.  - Cet amendement calque la durée du bannissement numérique prononcé comme peine alternative ou complémentaire sur celle de la peine complémentaire prévue à l'article 131-35-1 du code pénal, soit six mois.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Je ne crois pas qu'un bannissement de trois ans comme alternative à l'emprisonnement pose un problème constitutionnel. Cela dit, je comprends l'intention des auteurs de l'amendement : une durée trop longue nuirait à la possibilité de mener une vie normale. Toutefois, la durée de six mois me semble trop courte. Courageusement, je m'en remets à la sagesse du Sénat...

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - La liberté d'expression a une valeur très élevée pour le Conseil constitutionnel. Je suis favorable à l'amendement n°118 de M. Haye. La peine de bannissement est nouvelle, et la commission a ajouté trois nouvelles modalités d'application. Entourons le dispositif des précautions nécessaires pour nous assurer que le juge constitutionnel le valide.

L'amendement n°118 est adopté.

L'article 5, modifié, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 5

Mme le président.  - Amendement n°106, présenté par MM. Dossus, Benarroche, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le I de l'article 222-33-1-1 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« 9° Lorsqu'il a été commis par l'utilisation d'un service de communication au public en ligne ou par le biais d'un support numérique ou électronique, que ce soit par la diffusion de contenus accessibles au public ou par l'envoi de messages émis par la voie de communications électroniques. »

II.  -  L'article 60-1-2 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« ...° La procédure porte sur l'infraction mentionnée au 9° de l'article 222-33-1-1 du code pénal. »

M. Thomas Dossus.  - Quelque 2 350 outrages sexistes ont été recensés entre 2018 et 2020, mais seuls 15 % des auteurs ont été identifiés. La Lopmi a prévu une amende de 3 750 euros, mais ces infractions sont difficiles à constater dans l'espace public. Le problème ne se pose pas en ligne, car les outrages sexuels et sexistes sur internet laissent des traces. Une amende forfaitaire de 3 750 euros serait dissuasive et permettrait de lutter plus efficacement contre ces outrages, inacceptables en ligne comme dans la rue.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Cet amendement intègre au délit d'outrage sexiste ou sexuel les infractions en ligne et instaure une amende forfaitaire délictuelle, pour assurer une répression rapide. J'en partage l'état d'esprit et j'ai déposé un amendement qui va dans le même sens. Mais la rédaction proposée pose deux problèmes juridiques : l'amendement vise des comportements, alors qu'il faudrait viser la diffusion des contenus ; le code de procédure pénale ne permet pas de réquisition pour rechercher l'auteur d'une infraction qui n'est pas punie d'au moins un an d'emprisonnement. Retrait ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°106 n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°134, présenté par M. L. Hervé, au nom de la commission.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après la section 4 du chapitre II du titre II du live II du code pénal, est insérée une section 4 ... ainsi rédigée :

« Section 4 ...

« De l'outrage en ligne

« Art. 222-33-1-2.  -  I.  -  Est puni de 3 750 euros d'amende et d'un an d'emprisonnement le fait, hors les cas prévus aux articles 222-17 à 222-18-1, 222-33-1 et 222-33-2 à 222-33-2-3 du code pénal et aux troisième et quatrième alinéas de l'article 33 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, de diffuser en ligne tout contenu qui soit porte atteinte à la dignité d'une personne ou présente à son égard un caractère injurieux, dégradant ou humiliant, soit crée à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.

« Est considéré comme diffusé en ligne au sens du présent article, tout contenu transmis au moyen d'un service de plateforme en ligne définis au 4° du I de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance en l'économie numérique, d'un service de réseaux sociaux en ligne ou d'un service de plateformes de partage de vidéo au sens du règlement 2022/1925 du Parlement européen et du Conseil du 14 septembre 2022 relatif aux marchés contestables et équitables dans le secteur numérique et modifiant les directives (UE) 2019/1937 et (UE) 2020/1828.

« Les personnes reconnues coupables du délit prévu au présent article encourent également les peines complémentaires suivantes :

« 1° La peine de stage prévue aux 1° , 4° , 5° ou 7° de l'article 131-5-1 du présent code ; 

« 2° L'interdiction d'utiliser un compte d'accès à un service en ligne prévue au 12° bis de l'article 131-6 ; cette interdiction est prononcée pour une durée de six mois au plus.

« II.  -  Pour le délit prévu au I du présent article, l'action publique peut être éteinte, dans les conditions prévues aux articles 495-17 à 495-25 du code de procédure pénale, par le versement d'une amende forfaitaire d'un montant de 300 euros. Le montant de l'amende forfaitaire minorée est de 250 euros et le montant de l'amende forfaitaire majorée est de 600 euros.

« Art. 222-33-1-3.  -  I.  -  L'infraction définie à l'article 222-33-1-2 est punie de 7 500 euros d'amende et d'un an d'emprisonnement lorsqu'elle est commise :

« 1° Par une personne qui abuse de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ;

« 2° Sur un mineur ;

« 3° Sur une personne dont la particulière vulnérabilité due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse est apparente ou connue de son auteur ;

« 4° Sur une personne dont la particulière vulnérabilité ou dépendance résultant de la précarité de sa situation économique ou sociale est apparente ou connue de son auteur ;

« 5° Par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteur ou de complice ;

« 6° En raison de l'orientation sexuelle ou de l'identité de genre, vraie ou supposée, de la victime ;

« 7° Par une personne qui commet la même infraction en étant en état de récidive dans les conditions prévues au second alinéa de l'article 132-11.

« II.  -  Pour le délit prévu au I du présent article, y compris en cas de récidive, l'action publique peut être éteinte, dans les conditions prévues aux articles 495-17 à 495-25 du code de procédure pénale, par le versement d'une amende forfaitaire d'un montant de 600 euros. Le montant de l'amende forfaitaire minorée est de 500 euros et le montant de l'amende forfaitaire majorée est de 1 200 euros. »

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Nos auditions ont montré les limites de la réponse pénale classique contre le harcèlement en ligne. Le cyberharcèlement n'a pas de définition autonome : il est couvert par les infractions existantes de harcèlement. Pourtant, ces faits sont graves et passibles de lourdes peines.

Nous proposons la création d'un délit d'outrage en ligne, pouvant faire l'objet d'une amende forfaitaire délictuelle. Cette nouvelle infraction porterait sur la diffusion de contenus portant atteinte à la dignité d'une personne. Elle serait passible d'une amende de 3 750 euros et d'un an d'emprisonnement ou d'une amende forfaitaire délictuelle de 300 euros - et, sous sa forme aggravée, d'une amende de 7 500 euros ou d'une amende forfaitaire délictuelle de 600 euros.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Dans sa décision du 19 janvier dernier relative à la Lopmi, le Conseil constitutionnel a estimé que la procédure d'amende forfaitaire ne pouvait porter que sur des montants faibles et des faits punis de moins de trois ans d'emprisonnement. Or les infractions dont il s'agit supposent des enquêtes parfois poussées, ce qui est peu compatible avec les amendes forfaitaires. Par ailleurs, de nombreuses zones grises persistent sur la nature des contenus illicites en ligne : le caractère automatique de l'amende forfaitaire n'est donc pas adapté. Retrait.

M. Thomas Dossus.  - Je ne comprends pas le dispositif proposé par le rapporteur car, dans l'objet de son amendement, il est précisé que l'infraction ne sera pas constituée si les faits tombent dans le champ des délits existants, comme l'outrage sexiste ou sexuel.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - En matière pénale, les faits sont rattachés à une infraction ou à une autre : l'amende forfaitaire est exclusive d'un autre dispositif.

L'amendement n°134 est adopté et devient un article additionnel.

Mme le président.  - Amendement n°128, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 226-8 du code pénal, il est inséré un article 226-8-1 ainsi rédigé :

« Art. 226-8-1.  -  Est puni de deux ans d'emprisonnement et de 60 000 euros d'amende le fait de publier, sans son consentement, par quelque voie que ce soit, le montage réalisé avec les paroles ou l'image d'une personne, et présentant un caractère sexuel. Est assimilé à l'infraction mentionnée au présent alinéa et puni des mêmes peines le fait de publier par quelque voie que ce soit, un contenu visuel ou sonore généré par un traitement algorithmique et reproduisant l'image ou les paroles d'une personne, sans son consentement, et présentant un caractère sexuel. »

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Vous avez adopté un amendement intégrant les hypertrucages, ou deepfake, au code pénal. Celui-ci traite de l'utilisation de loin la plus courante des hypertrucages, soit la création d'images à caractère pornographique. Je laisse Mme Borchio Fontimp présenter le dispositif qu'elle a conçu à cet égard.

Mme le président.  - Sous-amendement n°129 rectifié bis à l'amendement n°128 du Gouvernement, présenté par Mme Borchio Fontimp, MM. H. Leroy, Tabarot et Bascher, Mme V. Boyer, M. Genet, Mme Pluchet, MM. Anglars et Bacci, Mmes Bellurot, Belrhiti et Berthet, MM. Bouchet, Bouloux, Calvet et Cambon, Mmes L. Darcos, Del Fabro, Di Folco, Garriaud-Maylam et F. Gerbaud, M. Houpert, Mmes Imbert et Joseph, M. Klinger, Mme Lassarade, M. Lefèvre, Mmes M. Mercier et Noël et MM. Pellevat, Perrin, Piednoir, Rapin, Reichardt, Rietmann et Saury.

Amendement n° 128

Compléter cet amendement par deux alinéas ainsi rédigés :

« Lorsque le délit prévu au premier alinéa est commis par la voie de la presse écrite ou audiovisuelle, les dispositions particulières des lois qui régissent ces matières sont applicables en ce qui concerne la détermination des personnes responsables.

« Ces peines sont portées à trois ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende lorsque la publication du montage ou du contenu généré par un traitement algorithmique a été réalisé en utilisant un service de communication au public en ligne. »

Mme Alexandra Borchio Fontimp.  - Les hypertrucages consistent à publier des montages à caractère pornographique à l'insu des personnes - dans 99 % des cas, des femmes. Ce sous-amendement vise à faciliter l'utilisation des moyens légaux pour déterminer les responsables et à prévoir une sanction suffisante.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Le Gouvernement propose une nouvelle infraction qui serait pénalisée de la même manière que le revenge porn, c'est judicieux. Reste qu'il faudra sans doute s'interroger sur les deepfake qui se présentent explicitement comme des faux et peuvent se rattacher au droit lié aux caricatures. Avis favorable à l'amendement n°128.

Avis favorable également au sous-amendement n°129 rectifié bis. C'est un travail de coconstruction intelligent.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Avis favorable au sous-amendement. Je m'engage à sécuriser le dispositif dans la suite de la navette.

Le sous-amendement n°129 rectifié bis est adopté.

L'amendement n°128, sous-amendé, est adopté et devient un article additionnel.

Mme le président.  - Amendement n°9 rectifié bis, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 3° bis de l'article 138 du code de procédure pénale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Ne pas être inscrit et ne pas se rendre sur certaines applications ou certains sites internet, déterminés par le juge d'instruction ou le juge des libertés et de la détention ; ».

Mme Laurence Rossignol.  - L'article 138 du code de procédure pénale prévoit que le juge des libertés et de la détention ou le juge d'instruction peut restreindre la liberté d'aller et venir, mais ne prévoit rien sur la fréquentation de certains sites. Nous proposons qu'il puisse interdire l'accès à des sites et applications dans le cadre du contrôle judiciaire.

Cet amendement fait suite à l'affaire du violeur de Tinder, qui a déjà fait deux ou trois nouvelles victimes depuis la fin de sa détention provisoire. On a reproché au juge de ne pas avoir prononcé cette interdiction, mais la loi ne le lui permettait pas. Le présent amendement y remédie.

Mme le président.  - Amendement n°44, présenté par MM. Dossus, Benarroche, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 3° bis de l'article 138 du code de procédure pénale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Lorsque l'infraction a été commise en recourant à un service en ligne, y compris si celui-ci n'a pas été le moyen unique ou principal de cette commission, ne pas accéder à certains services désignés par le juge d'instruction ou le juge des libertés et de la détention ; les dispositions du présent alinéa sont applicables aux services de plateforme en ligne tels que définis au 4° du I de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance en l'économie numérique, aux services de réseaux sociaux en ligne et aux services de plateformes de partage de vidéo au sens du règlement 2022/1925 du Parlement européen et du Conseil du 14 septembre 2022 relatif aux marchés contestables et équitables dans le secteur numérique et modifiant les directives (UE) 2019/1937 et (UE) 2020/1828 ; »

M. Thomas Dossus.  - Dans le même esprit, nous proposons que le bannissement puisse être ordonné comme mesure de contrôle judiciaire. Le juge pourra en demander l'application pendant l'instruction.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - L'amendement de Mme Rossignol permet au juge de prononcer un bannissement dans le cadre d'un contrôle judiciaire. Mais sa rédaction n'est pas harmonisée avec celle de la commission spéciale à l'article 5. L'expression « certaines applications ou certains sites internet » est beaucoup trop large.

Nous lui préférons l'amendement de M. Dossus, qui reprend les grandes lignes du travail de la commission spéciale sur les alternatives aux poursuites et l'exécution des peines. Reste que l'on imposerait le bannissement à des personnes seulement mises en cause, ce qui interroge au regard de la présomption d'innocence. Je m'en remets à l'avis du Gouvernement sur le bon équilibre entre ce principe et la prévention de la récidive.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - L'amendement n°9 rectifié bis prévoit l'interdiction de toute utilisation des plateformes, y compris à des fins d'information. Il est disproportionné dans son champ d'application, sa durée et ses effets.

Durée, infractions concernées, types de comptes et de plateformes concernés : voilà les points de vigilance que la commission spéciale a préservés. Demande de retrait de ces deux amendements, trop larges et qui seraient source d'insécurité.

Mme Laurence Rossignol.  - Je n'ai pas la même lecture de mon amendement que le ministre... Il ne s'agit pas de créer une interdiction générale, y compris pour des sites d'information. Je dépose des amendements au code pénal depuis longtemps : chaque fois, le garde des sceaux me dit qu'il faut faire confiance au juge... Ce soir, on m'explique que mon amendement peut donner lieu à toutes les dérives. Mais il ne peut donner lieu qu'à des mesures de contrôle judiciaire prises par le juge, auquel je fais toute confiance - parce que j'ai fini par être convaincue par le garde des sceaux ! (Sourires)

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Je suis l'avis du Gouvernement sur l'amendement n°44.

L'amendement n°9 rectifié bis n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°44.

Mme le président.  - Amendement n°43, présenté par MM. Dossus, Benarroche, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 6-1 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique est ainsi modifié :

1° À la première phrase du premier alinéa, après les mots : « même code », sont insérés les mots : « ou contre la diffusion de paroles ou d'images présentant un caractère sexuel en l'absence d'accord de la personne relevant de l'article 226-2-1 dudit code » et les mots : « et 227-23 » sont remplacés par les mots : « , 227-23 et 226-2-1 » ;

2° À la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « et 227-23 » sont remplacés par les mots : « , 227-23 et 226-2-1 » ;

3° À la première phrase du quatrième alinéa, les mots : « et 227-23 » sont remplacés par les mots : « , 227-23 et 226-2-1 ».

M. Thomas Dossus.  - Nous voulons renforcer les moyens de Pharos pour mieux lutter contre la pornodivulgation. Plus de 19 % des jeunes femmes entre 17 et 19 ans ont déjà reçu des messages de ce genre. Or retirer ces contenus reste très difficile.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Ces contenus constituent une infraction et peuvent donc être signalés aux plateformes et à Pharos. M. Dossus veut aller plus loin en lui permettant de prendre des mesures assimilables aux dispositifs de lutte contre la pédopornographie et le terrorisme.

Il ne me semble pas opportun de détourner Pharos du haut du spectre, en cohérence avec la législation européenne présente et future.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Même avis.

Mme Laurence Rossignol.  - Les articles 40 et 45 sont de vraies cavernes... Je ne suis pas d'une nature envieuse, mais pourquoi mon amendement est-il tombé, alors que celui de M. Dossus arrive en séance ? Un jour, peut-être, je comprendrai...

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Vous connaissez parfaitement la procédure de l'article 40. Votre amendement était sans doute plus explicite...

Mme Laurence Rossignol.  - Plus cher !

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - ... sur la nécessité de moyens pour assumer des missions complémentaires. Élargir la mission de Pharos à moyens constants lui créerait de grandes difficultés. Ces fonctionnaires de police passent leur journée à visionner des images atroces, et sont heureusement soutenus par des psychologues. Ayons une pensée pour eux, qui assument une mission si difficile et si utile.

M. Pierre Ouzoulias.  - Très bien !

L'amendement n°43 n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°39, présenté par MM. Dossus, Benarroche, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Afin de favoriser le développement et l'accès aux plateformes qui protègent efficacement les victimes des contenus haineux, les opérateurs de plateforme en ligne au sens du I de l'article L. 111-7 du code de la consommation, permettent à leurs utilisateurs de migrer vers des plateformes tierces tout en continuant à communiquer avec les personnes restées sur leur propre plateforme. Ils implémentent des standards techniques d'interopérabilité entre services de communication au public en ligne, conformes à l'état de l'art, documentés, stables et qui ne peuvent être modifiés de façon unilatérale.

M. Thomas Dossus.  - Il faut rendre les plateformes interopérables comme le sont les boîtes mail : moins captives, les victimes d'actes malveillants pourraient les quitter plus facilement. Il faut frapper les plus laxistes au portefeuille. Cela encouragerait de surcroît l'émergence de nouvelles plateformes, face au monopole actuel.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - J'ai auditionné la Quadrature du Net, qui a le mérite de la cohérence et alimente un débat sain sur internet et son avenir. Monsieur Dossus, vous avez sans doute travaillé cet amendement avec eux. Or la Quadrature du Net a reconnu que cette rédaction était contraire au DSA. Retrait ou avis défavorable.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - L'interopérabilité entre réseaux sociaux relève du DMA, qui a considéré qu'elle était impossible. Il prévoit en revanche l'interopérabilité des messageries, qui sera une avancée majeure. Votre amendement est donc partiellement satisfait. Avis défavorable.

L'amendement n°39 n'est pas adopté.

ARTICLE 6

Mme le président.  - Amendement n°60 rectifié bis, présenté par M. Fialaire, Mme N. Delattre, MM. Bilhac, Corbisez, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier, Roux et Cabanel.

Alinéa 2

Après les mots :

monétaire et financier,

insérer les mots :

ou rendant accessibles des données obtenues suite à la fraude d'un système de traitement automatisé des données,

M. Bernard Fialaire.  - Les cyberattaques sont l'une des principales menaces numériques dans l'Union européenne. L'article 6 prévoit un message d'avertissement en cas de risque avéré d'arnaque. Mon amendement précise que ce message s'affiche aussi lorsque l'internaute tente de se connecter à un site rendant accessibles des données obtenues par piratage.

J'espère que cet amendement servira de point de départ d'une réflexion plus poussée visant non seulement à avertir les utilisateurs, mais aussi à obtenir la suppression de la page incriminée.

M. Patrick Chaize, rapporteur.  - Satisfait par l'article L. 226-18 du code pénal. Retrait ou avis défavorable.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Même avis. La consultation de données issues d'un piratage n'expose pas l'internaute à un dommage direct. Les mesures de filtrage doivent rester proportionnées. Ne nous dispersons pas.

L'amendement n°60 rectifié bis est retiré.

Mme le président.  - Amendement n°49 rectifié ter, présenté par Mmes Noël et Garriaud-Maylam, MM. Gremillet, D. Laurent et Chatillon, Mme Muller-Bronn, MM. Charon, Joyandet et Bouchet et Mmes Thomas, Belrhiti, Pluchet et Berthet.

Alinéa 7

Supprimer les mots :

aux fournisseurs de navigateurs internet au sens du 11 de l'article 2 du règlement (UE) 2022/1925 du Parlement européen et du Conseil du 14 septembre 2022 relatif aux marchés contestables et équitables dans le secteur numérique, aux fournisseurs de services d'accès à internet ou

Mme Sylviane Noël.  - Cette précision rédactionnelle permet d'uniformiser les terminologies utilisées aux différents articles avec celle de l'article 32 du projet de loi de programmation militaire.

Mme le président.  - Amendement n°40, présenté par MM. Dossus, Benarroche, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

I.  -  Alinéa 7, première phrase

1° Supprimer les mots :

, aux fournisseurs de services d'accès à internet ou aux fournisseurs de systèmes de résolution de noms de domaine

2° Après le mot :

utile

insérer les mots :

, selon les choix des utilisateurs

II.  -  Alinéa 11

Supprimer cet alinéa.

M. Thomas Dossus.  - Le blocage des sites doit être facultatif, selon la volonté de l'utilisateur. Le filtre anti-arnaques prévoit l'affichage d'un message. Nous reprenons les préconisations de la Cnil. Limiter le filtrage par le navigateur est le meilleur moyen d'assurer le contrôle de l'internaute.

M. Patrick Chaize, rapporteur.  - Ces deux amendements modifient la liste des intermédiaires techniques. L'amendement n°49 n'est pas que rédactionnel : il exclut les fournisseurs d'accès internet et de navigateurs, alors que leur mobilisation est essentielle. La mobilisation de tous les acteurs techniques est indispensable, monsieur Dossus. Avis défavorable aux deux amendements.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Je propose à Mme Noël de retirer son amendement, même si j'en comprends l'intention : tous les acteurs doivent participer au filtre, dont l'objectif est de capter tous les messages diffusables.

Monsieur Dossus, le projet de loi initial a tenu compte des réserves de la Cnil : lorsque l'éditeur est connu, le blocage se fait par l'intermédiaire du navigateur. Retrait ?

L'amendement n°49 rectifié ter est retiré.

L'amendement n°40 n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°50 rectifié ter, présenté par Mmes Noël et Garriaud-Maylam, MM. Gremillet, D. Laurent et Chatillon, Mme Muller-Bronn, MM. Charon, Joyandet et Bouchet et Mmes Thomas, Belrhiti, Pluchet et Berthet.

Alinéa 7

Remplacer les mots : 

sans délai 

par les mots :

dans un délai, fixé par l'autorité administrative, qui ne peut être inférieur à deux jours ouvrés

Mme Sylviane Noël.  - Nous alignons les délais prévus dans ce projet de loi et dans la loi de programmation militaire à deux jours ouvrés minimum.

M. Patrick Chaize, rapporteur.  - La commission spéciale est favorable à l'adoption d'un dispositif réactif, pour une meilleure protection en ligne. Compte tenu des risques financiers et pesant sur les données personnelles, le délai de deux jours est trop important. Avis défavorable.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°50 rectifié ter est retiré.

Mme le président.  - Amendement n°135, présenté par M. Chaize, au nom de la commission.

Alinéa 10

Remplacer le mot :

deuxième

par le mot :

troisième

L'amendement de coordination n°135, accepté par le Gouvernement, est adopté.

Mme le président.  - Amendement n°136, présenté par M. Chaize, au nom de la commission.

I.  -  Alinéa 16

Remplacer la seconde occurrence du mot :

personne

par le mot :

personnalité

II.  -  Alinéa 17

Remplacer le mot :

personne

par le mot :

personnalité

L'amendement rédactionnel n°136, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 6, modifié, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 6

Mme le président.  - Amendement n°59 rectifié bis, présenté par M. Fialaire, Mme N. Delattre, MM. Bilhac, Corbisez, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier, Roux et Cabanel.

Après l'article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 323-3-2 du code pénal, il est inséré un article 323-3-... ainsi rédigé :

« Art. 323-3-.... Le fait de consulter, sans motif légitime, un service de communication au public en ligne mettant à disposition des données, tout en ayant connaissance du fait qu'elles ont été obtenues suite à la fraude d'un système de traitement automatisé de données, est puni de 30 000 € d'amende. »

M. Bernard Fialaire.  - Cet amendement crée une nouvelle infraction pour la consultation, sans motif légitime, d'un service mettant à disposition des données, lorsque l'auteur a eu connaissance du fait qu'elles ont été obtenues à la suite d'une fraude sur un système de traitement automatisé de données (Stad), c'est-à-dire d'une cyberattaque.

M. Loïc Hervé, rapporteur.  - Cet amendement répond à un motif légitime : mieux protéger les entités ayant fait l'objet d'une cyberattaque. Mais il pose des difficultés opérationnelles : comment les forces de l'ordre pourront-elles prouver le délit ? En outre, ces infractions sont déjà réprimées. L'amendement pose plus de problèmes qu'il n'en résout.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué.  - Même avis, d'autant qu'il y a un risque constitutionnel : le Conseil constitutionnel a censuré à deux reprises l'interdiction de consulter ponctuellement des sites terroristes, au nom de la liberté d'information.

M. Bernard Fialaire.  - J'insiste. Les cyberattaques contre les hôpitaux, par exemple, se multiplient. Des personnes consultent des données piratées en pleine connaissance de cause. Des compagnies d'assurances, par exemple, pourraient être tentées de le faire. Cela doit être réprimé.

L'amendement n°59 rectifié bis n'est pas adopté.

Mme le président.  - Je vais lever la séance, la dernière que je présidais. (Applaudissements) Je vous remercie.

Nous avons examiné 57 amendements, il en reste 50.

Prochaine séance aujourd'hui, mercredi 5 juillet 2023, à 15 heures.

La séance est levée à minuit dix.

Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication

Ordre du jour du mercredi 5 juillet 2023

Séance publique

À 15 h, 16 h 30 et le soir

Présidence :

M. Gérard Larcher, président, M. Alain Richard, vice-président, M. Vincent Delahaye, vice-président

Secrétaires : M. Dominique Théophile - Mme Corinne Imbert

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2. Suite du projet de loi visant à sécuriser et réguler l'espace numérique (Procédure accélérée) (Texte de la commission, n°778, 2022-2023)