Permis de conduire
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à faciliter le passage et l'obtention de l'examen du permis de conduire.
Discussion générale
Mme Sonia Backès, secrétaire d'État chargée de la citoyenneté . - Le 31 décembre 1922, voyait le jour le « permis de conduire », devenu le premier examen de France, avec plus de 1,5 million de candidats chaque année. C'est dire son importance - même si les trois pages roses ont cédé la place à un format unique dans toute l'Union européenne.
Le Gouvernement n'ignore pas que la préparation à cet examen se révèle souvent laborieuse et coûteuse. La loi du 6 août 2015 a réduit les délais d'obtention, grâce à l'externalisation de l'épreuve théorique.
En 2019, le Gouvernement a présenté le plan « Un permis pour tous moins cher et plus rapide », avec des modes d'apprentissage plus modernes comme le simulateur de conduite et le développement de la conduite accompagnée. En 2021, la plateforme « Rendez-vous permis » a révolutionné le processus d'attribution des places à l'examen en responsabilisant les candidats.
L'heure est venue du bilan. Bien que diminués, les délais d'attente demeurent un frein.
L'article 1er de cette proposition de loi de la majorité présidentielle vise à créer une plateforme numérique pour recenser les aides financières existantes à la préparation du permis de conduire.
Son coût moyen est de 1 592 euros. Afin de capitaliser sur la visibilité de la plateforme développée par Pôle emploi, le Gouvernement la rendra accessible depuis un nouveau portail « 1 jeune, 1 permis » afin de l'élargir à tous les publics.
L'article 1er bis permet de préparer et passer l'examen dans les lycées, hors temps scolaire.
À l'article 2, la prise en charge via le compte personnel de formation (CPF) de la préparation à tous les permis sera un véritable atout. Le CPF, qui finance actuellement un tiers des candidats, sera étendu au permis moto, voiturettes et remorques.
Autre obstacle : l'insuffisance des créneaux d'examen. Un recrutement exceptionnel de cent nouveaux inspecteurs sera programmé. La suppression de la limite de 45 jours pour la mobilisation d'agents publics ou contractuels en renfort réduira aussi les délais.
Notre boussole demeure l'accès au permis pour tous.
Enfin, nous connaissons les préjugés parfois sexistes au sujet du permis de conduire. Le Gouvernement apportera son entier soutien aux travaux qui pourront être menés sur ce sujet.
M. Loïc Hervé, rapporteur. - Très bien !
Mme Sonia Backès, secrétaire d'État. - Lever les obstacles au passage du permis de conduire, c'est oeuvrer pour l'émancipation de tous, tant personnelle que professionnelle, et agir concrètement sur le quotidien des Français. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
M. Loïc Hervé, rapporteur de la commission des lois . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Xavier Iacovelli applaudit également.) La proposition de loi de Sacha Houlié vise à faciliter l'obtention du passage du permis de conduire, qui demeure structurant dans notre société.
Celui-ci coûte cependant très cher, 1 592 euros en moyenne. Une fois l'examen obtenu, l'achat et l'entretien du véhicule représentent également des sommes importantes.
La loi Macron de 2015 et la loi d'orientation des mobilités (LOM) de 2019 ont contribué à réduire le coût et les délais de passage.
La proposition de loi vise en premier lieu à mieux faire connaître les aides au passage du permis de conduire au travers d'une plateforme unique, « 1 jeune, 1 permis », construite à partir d'une plateforme similaire actuelle gérée par Pôle emploi - c'est une bonne idée.
L'article 2 prévoit d'élargir le bénéfice du CPF à l'ensemble des catégories du permis de conduire : motos, voiturettes et remorques.
L'article 2 bis vise à lutter contre la fraude au financement du permis de conduire. Il donne les moyens à la Caisse des dépôts de vérifier que les personnes bénéficiant d'un financement par le CPF sont bien celles qui passent l'examen.
Concernant les délais, l'article 3 élargit à l'ensemble des départements le recours aux agents publics ou contractuels comme examinateurs du permis de conduire. La commission des lois a renforcé l'article dans le sens d'un effort important de recrutement.
L'Assemblée nationale a également souhaité simplifier la possibilité d'organiser l'épreuve théorique hors temps scolaire dans les lycées. En commission, nous avons intégré dans cette décision la région, collectivité gestionnaire de ces établissements.
Enfin, l'Assemblée nationale a adopté un article 3 bis, qui prévoyait qu'un décret précise les cas dans lesquels la présentation de l'attestation scolaire de sécurité routière (ASSR) n'est pas nécessaire pour passer le permis de conduire - une vraie problématique pour les jeunes ne l'ayant pas passé. Ces exigences ne relevant pas du niveau législatif, nous avons supprimé l'article en commission - tout en comptant sur vous, Madame la ministre, pour y remédier.
Je vous proposerai un article additionnel aggravant les peines en cas d'agression sur les examinateurs du permis de conduire.
Enfin, l'Assemblée nationale avait adopté deux demandes de rapport. Concernant l'égalité entre les femmes et les hommes, nous avons obtenu des chiffres. Il existe de fait un écart dans le taux de réussite. Ce sujet mériterait une étude universitaire plus large et pourrait faire plutôt l'objet d'une étude par la délégation aux droits des femmes. La commission des lois a donc supprimé cette demande.
La deuxième demande de rapport concerne l'abaissement de l'âge d'obtention du permis de conduire. Nous l'avons conservée, les travaux ayant déjà commencé. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et du RDSE, et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)
Mme Cécile Cukierman . - En France, près de sept millions de personnes éprouvent des difficultés pour se déplacer, soit 20 % de la population en âge de travailler, et 28 % des personnes en insertion professionnelle abandonnent leur emploi ou leur formation pour des raisons de mobilité. Le prix moyen pour passer le permis s'élève à près de 2 000 euros. Que peut faire l'étudiant, le chômeur, le smicard face à cela ? Les freins à la mobilité sont nombreux : il y a aussi l'absence de transports en commun dans certaines communes, notamment rurales, rendant le permis indispensable. Le droit à la mobilité appelle des réponses concrètes.
Le permis conditionne fortement l'accès à l'emploi et à la formation. Ne pas répondre à ce défi, c'est accroître demain les inégalités.
En cette semaine d'initiative gouvernementale, nous aurions pu attendre un vrai projet de loi, mais nous devrons nous satisfaire de cette proposition de loi transmise par l'Assemblée nationale, qui crée une plateforme numérique pour rendre plus visibles les aides des collectivités territoriales. Souhaitons-lui plus de succès que la plateforme « 1 jeune, 1 solution »...
Ce ne sera pas une révolution : les problèmes du coût et des délais d'attente restent entiers. Une meilleure connaissance des aides financières dans certaines collectivités permettra-t-elle des progrès ? Les délais de passage pourront-ils être améliorés ? Nous verrons.
À l'heure où le CPF affiche ses limites, et où certaines auto-écoles n'acceptent pas ce mode de financement, nous nous interrogeons sur la pertinence de le mobiliser pour le permis de conduire.
Ces réserves émises, nous voterons la proposition de loi.
Mme Dominique Vérien . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) En France, sept millions de personnes, soit 20 % de la population en âge de travailler, ont des difficultés de mobilité. En zone rurale, la voiture individuelle est le seul moyen de se déplacer. Le permis de conduire constitue ainsi un sésame vers l'autonomie.
On l'obtient à 23 ans en moyenne. S'il n'a jamais été bon marché, passer le permis coûte désormais entre 1 600 et 2 000 euros. Les délais entre chaque examen pratique poussent les candidats à prendre plus d'heures de conduite pour ne pas perdre leur entraînement. Les taux de réussite ne sont que de 57,2 % pour l'examen de la conduite et de 50,2 % pour le code - c'est faible !
Dans l'Yonne, un certain nombre de jeunes décrocheurs ne trouvent pas de travail, faute de disposer du permis et d'un véhicule. Ils ont souvent échoué au code et encombrent non pas les listes de ceux qui veulent passer l'examen pratique, mais bien celles du RSA.
Nous sommes nombreux ici à avoir notre permis, mais avez-vous eu la curiosité de vous pencher sur l'examen actuel du code ? On ne vous apprend pas à vous déplacer, on cherche plutôt à vous piéger avec des questions improbables qui ne se posent jamais, ou une fois tous les vingt ans. Vous hésitez entre deux réponses, jusqu'à apprendre que les deux sont justes et qu'il faut les sélectionner toutes les deux. Cette véritable machine à échec pousse ainsi de nombreux jeunes à conduire quand même, au mieux un scooter, au pire une voiture. Et quand vient la condamnation, on leur demande de se rendre à un tribunal à 50 km de là - sans transports en commun.
Comme tout cela relève du domaine règlementaire, je n'ai pas déposé d'amendement.
Votre proposition de loi vise à réduire coûts et délais pour passer le permis, mais nombre de mesures auraient pu être réglementaires, en particulier pour le recrutement des inspecteurs. Il faut croire que le calendrier parlementaire n'est pas aussi encombré que celui des centres d'examen du permis de conduire... Allons-y donc !
Beaucoup d'aides au permis existent : 12 dans les régions, 35 dans les départements, plus d'une centaine dans les communes et intercommunalités. C'est peut-être trop pour que l'aspirant conducteur le sache. L'article 1er, qui prévoit une plateforme en recensant l'intégralité, est donc bienvenu - même s'il est réglementaire.
Je salue la suppression par la commission de l'obligation pour les collectivités et structures finançant les candidats au permis de conduire d'établir un bilan annuel de leurs interventions. C'était la meilleure façon de les dégoûter d'aider !
L'article 1er bis simplifie le cadre juridique du passage du code dans les lycées. L'article 2 élargit à tous les types de permis l'éligibilité au CPF : attention toutefois à ne pas le dénaturer. L'article 3 étend le recours aux agents publics comme examinateurs des épreuves de conduite.
Le groupe UC votera ce texte.
Mme Maryse Carrère . - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Le 14 août prochain, nous fêterons les 130 ans du décret du préfet Lépine, selon lequel nul ne peut conduire un véhicule à moteur sans certificat prouvant qu'il possède l'expérience nécessaire pour l'emploi prompt et sûr d'un véhicule.
Le permis de conduire n'est pas anodin, mais bien primordial, notamment dans les zones rurales, en raison des lacunes de la mobilité collective. Alors que chacun scrute son bilan carbone et voit le prix de l'énergie s'envoler, l'État doit assurer la possibilité de recourir le moins possible à la voiture individuelle : en milieu rural, le chantier est immense.
Après une tendance à la baisse dans les années 2010, l'accidentalité stagne. Sans surprise, les jeunes conducteurs sont les plus touchés. Des améliorations sont possibles : développement de la conduite accompagnée ou campagnes de sensibilisation.
Enfin, il faut s'interroger sur le coût et les délais du permis de conduire. Cette proposition de loi n'est pas révolutionnaire, mais aborde une difficulté rencontrée par chaque jeune majeur. Le coût moyen du permis, 1 804 euros, est important, surtout lorsqu'il faut aussi financer études et logement. Tout le monde n'a pas la chance de pouvoir compter sur ses parents.
De nombreuses aides existent, comme le permis à un euro par jour ou la mobilisation du CPF : je suis donc favorable à la mise en place d'une plateforme numérique, mais je ne suis pas sûre qu'une loi soit nécessaire pour cela.
Je rejoins la commission : supprimons l'obligation de bilan annuel, trop lourde pour les collectivités et peu utile.
L'article 3 prévoit le recours élargi à des agents publics comme examinateurs du permis de conduire. C'est sans doute nécessaire pour réduire les délais, mais ce n'est pas pérenne : un corps de métier spécifique existe et devrait être mieux valorisé. Nous sommes contre la multiplication des agents contractuels dans la fonction publique.
Le RDSE votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du RDSE)
M. Antoine Lefèvre . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Hier sésame incontournable, le permis est aujourd'hui boudé pour son coût et son utilité jugée moindre.
Les contraintes et délais ont fait baisser le taux de réussite : 47 % pour l'examen pratique dans le Rhône ou à Paris, mais 75 % en Lozère.
Son coût a augmenté, de 1 500 francs en 1981, soit 200 euros, à 1 592 euros en 2022, avec une grande disparité territoriale.
Son obtention est moins nécessaire, notamment en ville, mais le permis de conduire demeure un passeport pour la liberté pour de nombreux jeunes. En zone rurale, il est indispensable et constitue parfois une condition sine qua non de l'obtention d'un emploi. Ainsi, 28 % des personnes en insertion professionnelle ont indiqué avoir dû refuser une formation ou un emploi faute de moyen de déplacement.
Je salue la suppression, à l'article 1er, du bilan imposé aux collectivités sur l'ensemble des financements apportés aux candidats : l'objectif de transparence est louable, mais la charge est lourde pour les petites collectivités.
Le texte ne répond pas aux plus grands problèmes identifiés, notamment le recrutement des inspecteurs.
Le financement par le CPF est une solution judicieuse pour les personnes ayant un emploi. La possibilité de céder ses droits au sein de son foyer part d'une bonne intention, mais devra être retravaillée pour éviter les fraudes et ne pas pénaliser les ménages les moins aisés, les droits à la formation variant selon les professions.
Les aides financières sont insuffisantes et la proposition de loi ne résout pas ce problème : le plan gouvernemental « 1 jeune, 1 solution » doit aller plus loin.
Je suis contre un abaissement trop important de l'âge légal d'obtention du permis de conduire, car la mortalité décroît avec l'âge : le ratio moyen atteint 101 tués par million d'habitants pour les jeunes de 18 à 24 ans, contre 61 pour les 25-34 ans et 52 pour les 35-74 ans. En cas d'abaissement de l'âge, il faudrait mettre les bouchées doubles sur la prévention.
La route est encore longue pour rendre le permis de conduire accessible à tous, la sécurité routière demeurant l'objectif suprême.
Le groupe Les Républicains votera cette proposition de loi, mais appelle le Gouvernement à intensifier ses efforts. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Jean-Pierre Decool applaudit également.)
M. Joël Guerriau . - Chaque année, 1,5 million de candidats se présentent à l'examen du permis de conduire, mais ils se heurtent à des difficultés financières ou pratiques.
Le permis de conduire demeure un outil d'insertion sociale, en particulier dans les territoires ruraux. Levons les obstacles à son obtention. La proposition de loi s'articule autour de six articles visant à rendre celle-ci moins coûteuse, plus simple et plus rapide.
L'article 1er, qui prévoit une plateforme numérique recensant les aides aux candidats, revêt une importance cruciale : il faut plus de visibilité pour les soutiens de l'État comme des collectivités territoriales, alors que, trop souvent, le candidat voit le coût du permis - 1 600 euros en moyenne - comme un obstacle.
L'article 1er bis simplifie la procédure de passage de l'épreuve théorique dans les établissements scolaires. Il présente une indéniable utilité en renforçant l'accessibilité des jeunes au permis de conduire, notamment dans les zones rurales.
L'article 2, en étendant le financement du permis de conduire à toutes les catégories grâce au CPF, offre une nouvelle perspective aux personnes en formation ou en recherche d'emploi.
L'article 2 bis donne de nouvelles prérogatives à la Caisse des dépôts et consignations, en tant que gestionnaire du système d'information du CPF.
L'article 3 pallie le manque d'inspecteurs, mais peut susciter une inquiétude catégorielle.
L'article 3 quater, qui prévoit un rapport sur l'abaissement de l'âge minimum pour obtenir son permis de conduire, est intéressant.
Je voudrais également aborder la dématérialisation des cartes grises et la possibilité de faire réaliser des plaques d'immatriculation à l'étranger : de nouvelles fraudes sont apparues. Certaines victimes de plaques dupliquées se retrouvent sans emploi et doivent suivre un parcours tortueux pour retrouver leur permis. Il faudra creuser ce sujet, pour lutter contre cette nouvelle forme de délinquance.
Dans les territoires ruraux, le permis de conduire est un passeport pour l'embauche et l'intégration sociale. Le groupe INDEP votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP)
Mme Mélanie Vogel . - Je remplace au pied levé M. Benarroche, qui a travaillé sur ce texte.
Les écologistes soutiennent ce texte, même si cela peut vous surprendre, notamment ceux qui aiment à nous dépeindre comme des anti-voitures.
Obtenir le permis plus facilement est une question de justice sociale. L'un des freins à son obtention est son coût. Or la voiture, pour les jeunes, c'est souvent le début de la liberté.
C'est aussi une question de justice territoriale. Lorsque la première gare est à 30 km et qu'il y a un train toutes les trois heures, comment demander aux gens de prendre le train ?
La voiture a un rôle environnemental à jouer : autopartage, covoiturage... Parfois, l'usage partagé de la voiture est la meilleure solution, même si nous voulons réduire son usage et sa place dans nos villes comme dans notre économie.
Nous soutenons donc cette proposition de loi, notamment l'utilisation du CPF pour financer le permis et le recensement des aides sur une plateforme dédiée, même si, évidemment, nous souhaitons la gratuité des formations théoriques.
Nous n'apprécions pas l'article 3 : demander à des personnes dont ce n'est pas le métier de faire passer le permis de conduire n'est pas anodin.
Au-delà de l'accès à la voiture, ce texte ne résoudra pas tous les problèmes. Il faut aussi développer notre réseau ferroviaire. Nous avions, à la sortie de la Première Guerre mondiale, 70 000 km de réseau de train, contre 30 000 seulement aujourd'hui. Ce n'est pas normal. Il faut des trains fréquents et abordables.
Ailleurs en Europe, où les écologistes gouvernent parfois, il existe des modèles attractifs, comme un ticket climat en Allemagne, où, pour 49 euros, on accède au réseau régional. (Applaudissements sur les travées du GEST)
M. Xavier Iacovelli . - Je salue l'excellent travail du rapporteur : nous souscrivons pleinement aux modifications apportées au texte d'Aurore Bergé et de Sacha Houlié.
Le permis de conduire est souvent qualifié de précieux sésame : il constitue un passeport vers l'autonomie personnelle et professionnelle. Nous nous souvenons tous de notre émotion à l'obtention du fameux papier rose...
Mais le permis est cher et long à obtenir, malgré les mesures adoptées depuis 2014. La crise sanitaire a allongé les délais d'attente : en 2021, les délais médians étaient de 53 jours entre deux présentations à l'examen pratique. Le coût moyen de la formation, 1 592 euros, reste élevé.
Ce texte est donc bienvenu, pour le premier examen de France en volume : le permis de conduire doit être plus simple, plus rapide et moins cher à obtenir. Concrétisons la promesse républicaine d'émancipation.
L'élargissement du recours au CPF et la possibilité pour des agents publics de devenir examinateurs vont dans le bon sens.
Synonyme d'émancipation, le permis de conduire l'est également de responsabilité. J'ai recueilli le témoignage poignant d'une jeune sportive, Pauline Déroulède, qui a perdu sa jambe dans un accident provoqué par un conducteur âgé. Sa vie a radicalement changé. Cette championne de tennis représentera la France aux jeux Paralympiques.
Je ne souhaite pas discriminer les plus âgés, mais de tels drames ont lieu trop régulièrement. Que les parlementaires se penchent donc sur les manières de prévenir ces accidents de la route. Des examens médicaux obligatoires permettraient par exemple de s'assurer de la capacité de chacun à conduire ; ils existent chez nos voisins.
Améliorer la mobilité, favoriser le désenclavement des territoires ruraux, faciliter l'accès à cet outil indispensable : voilà les objectifs. Les plus précaires doivent recevoir une attention accrue, car ils subissent une immobilité imposée, ayant des conséquences en matière d'accès à l'emploi, à la santé ou la vie sociale. Le RDPI votera cette proposition de loi.
M. Loïc Hervé, rapporteur. - Magnifique !
M. Hussein Bourgi . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Cette proposition de loi, votée à l'unanimité à l'Assemblée nationale, ne soulève pas de difficulté particulière. Le groupe SER approuve l'objectif de mieux informer nos concitoyens éligibles aux aides existantes. La commission des lois a insisté sur la nécessité de mettre à jour ces informations, et renvoyé les modalités à un décret.
L'amendement du Gouvernement vise à ce que la nouvelle plateforme numérique envisagée soit celle issue des travaux déjà engagés par Pôle emploi, dans un souci d'économie. Nous n'y voyons pas d'inconvénient. Le permis de conduire est essentiel à l'insertion sociale et professionnelle, en particulier en zone rurale. Nous saluons donc l'amendement d'appel du GEST demandant un rapport sur un service public gratuit de l'enseignement théorique du permis B.
Le permis est synonyme de liberté et d'indépendance pour de nombreux jeunes ; il est indispensable dans les territoires ruraux. En alléger le coût est donc un enjeu majeur.
L'article 1er bis introduit la possibilité de préparer et de passer l'épreuve théorique du permis dans les lycées. Le rapporteur a amélioré la rédaction, tout en maintenant le contrôle de la collectivité propriétaire des locaux. Je regrette toutefois que le conseil d'administration de l'établissement ne soit pas consulté, car cette mesure s'inscrit dans un objectif pédagogique global.
Nous approuvons l'article 2, qui étend l'utilisation du CPF à tous les types de permis de conduire.
Je vais vous parler d'un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître : le temps du service national, que j'ai effectué à Nîmes.
M. Laurent Burgoa. - Belle ville !
M. Hussein Bourgi. - Nombreux étaient les enfants de familles modestes à profiter du service national pour passer le permis de conduire. Mobilisons les outils qui existent aujourd'hui, comme le CPF, avec les garde-fous proposés.
Vu l'indisponibilité chronique, dans certains territoires, des inspecteurs du permis, l'article 3 permet le recours à des contractuels pour compléter les effectifs. Si nous partageons le constat, nous ne partageons pas nécessairement la solution... Cela dit, la loi de programmation du ministère de l'intérieur prévoit le recrutement de cent nouveaux examinateurs.
Malgré la suppression de la demande de rapport introduite par les députés socialistes, notre groupe votera ce texte.
Je conclus en regrettant l'ambition bien mince des textes inscrits à l'ordre du jour du Sénat cette semaine, au vu des crises qui traversent notre société... (Applaudissements sur les travées du groupe SER)
M. Xavier Iacovelli. - Il faut soutenir les textes du Gouvernement !
Mme Else Joseph . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Pour nombre de Français, la conduite est une condition sine qua non de l'exercice de leur vie professionnelle. L'apprentissage de la conduite coûte cher, même si les collectivités locales, souvent pionnières, apportent des aides. Le coût, variable selon les départements, est d'environ 1 500 euros, et les délais parfois très longs pour obtenir le fameux sésame.
Ce texte propose d'apporter un peu de fluidité dans ce parcours. D'abord, en améliorant l'information : une plateforme numérique recensera les dispositifs de financement existants et permettra de choisir son établissement et de s'inscrire à l'examen. Je m'étonne que cela n'ait pas été fait plus tôt. C'est à l'honneur du Parlement d'avoir pris les choses en main.
Ensuite, en facilitant la vie des candidats, notamment des jeunes. La préparation et le passage de l'épreuve théorique pourront être organisés dans les lycées, j'y souscris. Le Sénat avait ouvert la voie en loi de finances avec un amendement permettant de financer l'aide au passage du permis de conduire des apprentis par France compétences.
Le CPF pourra désormais être mobilisé. C'est l'exemple d'une formation indispensable à privilégier, et une façon de donner de la visibilité au CPF, qui reste encore peu connu et compliqué à utiliser.
Ce texte montre que le législateur sait se saisir des sujets du quotidien. L'intelligence collective, c'est aussi celle de nos assemblées. Notre groupe votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions)
M. Olivier Jacquin . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Cette proposition de loi va dans le bon sens, en agissant sur le coût du permis de conduire, principal obstacle pour les jeunes et leurs familles. Je m'étonne néanmoins du peu de cas que vous faites des taux de réussite à l'examen : 57 % seulement au niveau national, et même 52 % dans mon département.
La conduite accompagnée a fait ses preuves : le taux de réussite passe à 75 % pour les candidats au permis qui en ont bénéficié. Elle rend en outre le permis moins onéreux, en évitant aux candidats de prendre des heures supplémentaires au forfait de base.
J'avais déposé un amendement demandant un rapport pour dresser le bilan des dispositifs actuels, comme la possibilité de préparer le permis dès 17 ans. Ce rapport aurait permis de mieux comprendre les freins à la conduite accompagnée, que je souhaite encourager.
Je suggérais aussi que le Gouvernement étudie l'opportunité de créer un vivier d'accompagnateurs bénévoles pour accompagner les jeunes dont les parents n'ont pas de voiture ou ne sont pas en mesure d'assurer cet accompagnement. Un tel vivier officiel, voire labellisé, serait un moyen de rétablir l'égalité entre ceux qui peuvent bénéficier de la conduite accompagnée et les autres.
Madame la ministre, je profite de mon intervention pour vous demander d'expérimenter un tel vivier, en lien avec les missions locales. Le permis de conduire est un sésame indispensable. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)
Discussion des articles
ARTICLE 1er
M. le président. - Amendement n°4, présenté par le Gouvernement.
I. - Alinéa 2
Remplacer les mots :
créée et gérée par l'État
par les mots :
gérée par Pôle emploi
II. - Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
Un décret en Conseil d'État précise les modalités de mise en oeuvre du présent article.
Mme Sonia Backès, secrétaire d'État. - Cet article vise à mieux faire connaître les aides au financement du permis de conduire, nombreuses mais pas toujours lisibles. Pôle emploi a déjà développé une plateforme « mes-aides.pole-emploi.fr », qui recense les aides de 250 collectivités territoriales, en lien avec les préfectures. Il faut capitaliser sur cette plateforme, qui a déjà une certaine visibilité. Pôle emploi fera évoluer la plateforme pour s'adresser aux jeunes, avec un nouveau portail « 1 jeune, 1 permis » ; l'outil sera aussi disponible sur Mon Compte Formation, avec une bannière gouvernementale. La plateforme sera accessible à tous les publics.
France Travail permettra d'assurer la maintenance de cette plateforme. Les modalités de mise en oeuvre seront précisées par décret.
M. Loïc Hervé, rapporteur. - Avis favorable.
L'amendement n°4 est adopté.
L'article 1er, modifié, est adopté.
Les articles 1er bis, 2 et 2 bis sont successivement adoptés.
ARTICLE 3
M. le président. - Amendement n°2, présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.
Supprimer cet article.
Mme Mélanie Vogel. - Nous nous opposons au recours aux agents publics et contractuels pour remplacer les inspecteurs formés. Ce n'est pas le meilleur chemin à suivre.
M. Loïc Hervé, rapporteur. - Cet article doit permettre de réduire les délais d'attente pour le passage de l'épreuve pratique du permis de conduire. Il ne s'agit pas de supprimer le corps des inspecteurs. Au contraire : 38 agents de La Poste recrutés en tant qu'examinateurs ont choisi l'intégration dans le corps, et la Lopmi prévoit le recrutement de cent nouveaux inspecteurs d'ici 2026. Avis défavorable.
Mme Sonia Backès, secrétaire d'État. - Même avis.
L'amendement n°2 n'est pas adopté.
L'article 3 est adopté.
APRÈS L'ARTICLE 3
M. le président. - Amendement n°6, présenté par M. L. Hervé, au nom de la commission.
Après l'article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le livre 2 du code de la route est ainsi modifié :
1° À la première phrase du I de l'article L. 211-1 A, les mots : « ou d'un examinateur, agent public ou contractuel » sont remplacés par les mots : «, d'un examinateur mentionné à l'article L. 221-5 du code de la route ou d'un examinateur auquel a recours l'organisateur agréé mentionné à l'article L. 221-6 du même code » et après le mot : « examen », sont insérés les mots : « théorique ou pratique » ;
2° À la première phrase du premier alinéa de l'article L. 211-1, les mots : « un inspecteur du permis de conduire et de la sécurité routière » sont remplacés par les mots : « l'une des personnes mentionnées au I de l'article L. 211-1 A » ;
3° Le deuxième alinéa de l'article L. 221-5 est supprimé.
M. Loïc Hervé, rapporteur. - Les examinateurs des centres exerçant pour le compte de l'État doivent bénéficier de la même protection que les inspecteurs.
Mme Sonia Backès, secrétaire d'État. - En effet, les examinateurs font régulièrement l'objet de menaces, voire d'agressions. Ils doivent bénéficier de la même protection que les inspecteurs. Avis favorable.
L'amendement n°6 est adopté et devient un article additionnel.
L'article 3 quater est adopté.
APRÈS L'ARTICLE 3 QUATER
M. le président. - Amendement n°3, présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.
Après l'article 3 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l'opportunité de mettre en oeuvre un service public gratuit de l'enseignement théorique du permis de conduire de catégorie B, afin de faciliter le passage et l'obtention de celui-ci.
Mme Mélanie Vogel. - Nous souhaitions un rapport sur l'opportunité de mettre en place un service public gratuit de l'enseignement théorique du permis B.
M. Loïc Hervé, rapporteur. - Le tarif de passage du code est de 30 euros ; la préparation est plus onéreuse, autour de 300 euros. Suivant la jurisprudence - presque - constante de la commission sur les demandes de rapport, avis défavorable. (Sourires)
Mme Sonia Backès, secrétaire d'État. - Avis défavorable.
L'amendement n°3 n'est pas adopté.
Intervention sur l'ensemble
M. Olivier Jacquin . - Madame la ministre, je vous interpelle à la suite de mon intervention en discussion générale. Comment répondre à l'injustice qui frappe ceux qui ne peuvent pas bénéficier de la conduite accompagnée, faute d'accompagnant ? Que pensez-vous de l'idée d'un vivier d'accompagnateurs bénévoles, issue du remarquable travail d'un stagiaire de troisième, présent en tribune ? Le préfet de Meurthe-et-Moselle et la générale de gendarmerie déléguée à la sécurité routière sont intéressés. C'est une piste à creuser. (MM. Jean-Claude Tissot et Guillaume Gontard applaudissent.)
La proposition de loi, modifiée, est adoptée.
Prochaine séance, mardi 16 mai 2023, à 9 h 30.
La séance est levée à 20 h 25.
Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,
Rosalie Delpech
Chef de publication
Ordre du jour du mardi 16 mai 2023
Séance publique
À 9 h 30, 14 h 30 et le soir
1. Questions orales
2. Proposition de loi visant à réduire les inégalités territoriales pour les ouvertures de casinos, présentée par Mme Catherine Deroche, MM. Stéphane Piednoir, Claude Nougein et plusieurs de leurs collègues (texte de la commission, n°585, 2022-2023) (demande du groupe Les Républicains)
3. Proposition de loi pour un choc de compétitivité en faveur de la ferme France, présentée par MM. Laurent Duplomb, Pierre Louault, Serge Mérillou et plusieurs de leurs collègues (texte de la commission, n°590, 2022-2023) (demande de la commission des affaires économiques)