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Table des matières
Salut à une délégation du Sénat de Madagascar
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion
Rémunération des intérimaires à l'hôpital
M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel
Pêche dans les aires protégées
M. Hervé Berville, secrétaire d'État chargé de la mer
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires
M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer
M. Olivier Véran, ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement
Police aux frontières dans les aéroports
M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer
Fermetures de classes en zone rurale
Mme Carole Grandjean, ministre déléguée chargée de l'enseignement et de la formation professionnels
Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité
M. Jean-Christophe Combe, ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées
Maillage territorial des maternités
M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention
Compensation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises
M. Gabriel Attal, ministre délégué chargé des comptes publics
Salut à une délégation parlementaire canadienne
Ticket restaurant étudiant (Deuxième lecture)
Mme Sylvie Retailleau, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche
M. Jean Hingray, rapporteur de la commission de la culture
Parité dans la haute fonction publique (Procédure accélérée)
Mme Annick Billon, auteure de la proposition de loi
Mme Françoise Dumont, rapporteure de la commission des lois
M. Stanislas Guerini, ministre de la transformation et de la fonction publiques
Ordre du jour du jeudi 6 avril 2023
SÉANCE
du mercredi 5 avril 2023
77e séance de la session ordinaire 2022-2023
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires : Mme Martine Filleul, M. Jacques Grosperrin.
La séance est ouverte à 15 heures.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Salut à une délégation du Sénat de Madagascar
M. le président. - (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mmes et MM. les membres du Gouvernement, se lèvent.) J'ai le plaisir de saluer la présence dans notre tribune d'honneur d'une délégation du Sénat de la République de Madagascar, conduite par son président, M. Herimanana Razafimahefa, et composée de trois sénateurs, dont le doyen et le questeur de cette assemblée. Elle est accompagnée par notre collègue Nassimah Dindar, présidente du groupe d'amitié France-Madagascar et pays de l'Océan indien.
La délégation, que j'ai reçue ce matin avec Roger Karoutchi, Hugues Saury et la présidente du groupe d'amitié, est en France jusqu'au 10 avril. Sa visite d'étude s'inscrit dans le cadre des relations privilégiées, que nous souhaitons renforcer, entre nos deux pays.
En fin de journée, elle rencontrera la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, présidée par notre collègue Françoise Gatel, ainsi que nos collègues du groupe d'amitié.
Le Sénat entretient d'excellents rapports avec le Sénat de Madagascar. Nous sommes particulièrement attentifs au renforcement de la coopération décentralisée entre les collectivités territoriales françaises et malgaches, dans la perspective des Assises de la décentralisation qui se tiendront l'an prochain à Madagascar. Je pense tout particulièrement à la coopération décentralisée avec La Réunion et Mayotte.
Mes chers collègues, permettez-moi de souhaiter, en votre nom à tous, la plus cordiale bienvenue à nos homologues du Sénat malgache, ainsi qu'un fructueux séjour dans notre pays. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mmes et MM. les membres du Gouvernement, applaudissent.)
Questions d'actualité
M. le président. - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.
Notre séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.
Chacun sera attentif au respect des uns et des autres et du temps de parole.
Plan de gestion de l'eau (I)
M. Mathieu Darnaud . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le Président de la République a enfin dévoilé le plan Eau. Nous souscrivons à certaines de ses orientations, d'autant qu'il rejoint le rapport de la délégation sénatoriale à la prospective.
Toutefois, la question des financements nous inquiète. Dans un rapport, notre collègue Rémy Pointereau avait dénoncé que l'eau payait, non plus l'eau, mais l'État. Après avoir ponctionné 400 millions d'euros par an sur les agences de l'eau pour financer l'Office français de la biodiversité (OFB), vous avez restitué 475 millions d'euros aux agences de l'eau. Habile tour de passe-passe ! Mais la ficelle est trop grosse : cela ne résoudra pas les problèmes liés à l'eau.
Nous avons noté la volonté du Président de la République de donner écho à la proposition de loi votée par le Sénat sur la gouvernance différenciée de l'eau. S'agit-il d'un écran de fumée ou d'une réelle volonté politique ? (Acclamations et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC ; applaudissements sur plusieurs travées du RDSE et du groupe INDEP)
M. Jean-François Husson. - Éteignez l'incendie !
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires . - Merci de vous être rendu hommage à vous-même ! (Sourires) J'avais dit à M. Chevrollier que vous retrouveriez dans le plan eau une grande partie de vos petits. Nous nous sommes appuyés sur le récent rapport de la Cour des comptes, mais aussi sur le rapport de la délégation sénatoriale à la prospective.
Mme Cécile Cukierman. - Aucun rapport !
M. Christophe Béchu, ministre. - Il est logique que vous saluiez des solutions déjà reprises.
La question des moyens est centrale. Nous avons échangé avec les agences de l'eau et les comités de bassin. La suppression des plafonds mordants était une demande unanime des territoires.
M. Jean-François Husson. - Et du Sénat, depuis longtemps !
M. Christophe Béchu, ministre. - Les près de 500 millions d'euros de crédits supplémentaires pour les agences de l'eau correspondent à une réponse claire du Gouvernement. Il faut y ajouter 1 milliard d'euros au titre de l'aqua-prêt de la Caisse des dépôts et consignations.
C'est tout sauf un écran de fumée ! Le Président de la République a répondu aux interrogations des élus locaux. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; M. Emmanuel Capus applaudit également.)
M. Mathieu Darnaud. - Comptez sur la vigilance du Sénat : nous voulons que vos propos se traduisent en actes. Il faut accompagner nos territoires. Les communes, en particulier, doivent pouvoir faire face aux défis de l'eau. En Ardèche, 26 communes viennent de se voir interdire de délivrer des permis de construire : c'est un véritable enjeu de développement local ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du groupe UC ; M. Alain Marc applaudit également.)
Plan de gestion de l'eau (II)
M. Jean-Michel Arnaud . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Le Président de la République est venu au lac de Serre-Ponçon, dans les Hautes-Alpes, présenter son plan Eau, appelant à une gestion concertée de l'eau. Ce plan a le mérite de fixer un cap, alors que la politique de l'eau tanguait depuis des années.
La tarification progressive, proche du prix coûtant pour les premiers mètres cubes, paraît simple sur le papier, mais sera compliquée à mettre en oeuvre. En effet, cela suppose une information en temps réel sur la consommation, alors que seuls 40 % des foyers disposent d'un compteur intelligent. Il faudra aussi prendre en compte l'usage fait de l'eau : établirez-vous une hiérarchie ?
Pouvez-vous également nous apporter des précisions sur la gouvernance locale de l'eau ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)
M. Loïc Hervé. - Excellent !
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires . - Monsieur le sénateur, vous étiez aux premières loges à Savines-le-Lac, lors de la présentation du plan Eau. Le Sénat s'est fait l'écho d'une inquiétude : pourquoi une règle unique et une marche forcée vers l'intercommunalité ? Des indicateurs y poussent. Préserver la gestion de l'eau par des communes isolées n'est pas une option. En effet, 80 % des communes privées d'eau potable l'an dernier sont dans ce cas, de même que 116 des 170 communes ayant plus de 50 % de fuites. Il faut sortir de la commune isolée, sans nécessairement aller vers l'intercommunalité,... (« Ah » sur plusieurs travées ; M. Jean-Michel Arnaud applaudit.)
M. Loïc Hervé. - Ça y est, on y arrive !
M. Christophe Béchu, ministre. - ... mais vers des coopérations qui tiennent compte de la topographie et de la géographie. (Marques de vive satisfaction sur plusieurs travées des groupes Les Républicains et UC ; Mmes Françoise Gatel et Vanina Paoli-Gagin, ainsi que M. Martin Lévrier, applaudissent.)
Un groupe de travail parlementaire devrait nous permettre d'avancer dans ce sens. (Mme Cécile Cukierman s'exclame.)
Mme Frédérique Puissat. - C'est une tactique !
M. Christophe Béchu, ministre. - Pour la tarification, il ne s'agit pas de désavantager les familles nombreuses, mais de faire le tri entre les usages. Nous confierons au Conseil économique, social et environnemental (Cese), dans un premier temps, une demande de préconisations, puis vous serez associés, tout comme les associations d'élus responsables de la tarification. (Applaudissements sur quelques travées du RDPI ; M. Emmanuel Capus applaudit également.)
M. Jean-Michel Arnaud. - Le Président de la République a appelé de ses voeux un modèle pluriel et différencié. Monsieur le ministre, vous annoncez le retour des syndicats pour gérer l'eau au plus près et la création d'une mission parlementaire. Nous y collaborerons, y compris en défendant la gestion communale là où c'est nécessaire, mais avec la volonté d'un compromis, pour que tout soit clair au 1er janvier 2026, date butoir du transfert de compétences. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
Réforme des retraites (I)
Mme Marie-Noëlle Lienemann . - Madame la Première ministre, votre réunion avec l'intersyndicale a échoué.
Une voix à droite. - Eh oui !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. - C'était prévisible, tant le Gouvernement et le Président de la République s'entêtent dans leur refus d'entendre les Français, le Parlement et le monde du travail. Votre stratégie jusqu'au-boutiste mène au désordre : imaginez-vous sortir de l'impasse par le rappel à l'ordre et la peur du chaos ?
Les Français ne sont pas dupes, et la crise démocratique s'ajoute à la crise sociale. L'avenir du pays et la confiance en la République sont en jeu. Il est temps d'atterrir : quand retirerez-vous la réforme des retraites ? (Applaudissements à gauche)
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion . - Ce matin, nous avons reçu toute l'intersyndicale. Une étape importante a été franchie.
M. Didier Marie. - Il ne s'est rien passé !
M. Olivier Dussopt, ministre. - Cette réunion a été l'occasion d'écouter chacun, dans le respect. (Marques d'ironie à gauche) Nous avons entendu des désaccords répétés...
M. Daniel Salmon. - Vous ne les aviez pas encore entendus ?
M. Olivier Dussopt, ministre. - ... et évoqué d'autres sujets : carrières longues et usure professionnelle, notamment. (Protestations à gauche)
Le désaccord qui persiste sur l'âge n'a pas permis d'aller plus avant sur ces thèmes. Les représentants, à la sortie de la réunion, ont fait part de leur souhait d'y travailler ultérieurement. Nous y sommes favorables.
M. Fabien Gay. - Soyons sérieux !
M. David Assouline. - Quel fiasco !
M. Olivier Dussopt, ministre. - La Première ministre a réaffirmé la conviction du Gouvernement que cette réforme est nécessaire, pour éviter d'aller dans le mur. Nous attendons la décision du Conseil Constitutionnel. (M. François Patriat applaudit.)
M. Éric Kerrouche. - Vous êtes seuls !
M. David Assouline. - Vous avez grillé toutes vos cartouches !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. - Il faut être archi-sourd pour ne pas avoir entendu les arguments des syndicats plus tôt. La pénibilité et les carrières longues étaient au coeur des débats au Sénat. Si cette réforme est indispensable, demandez l'arbitrage du peuple ! (M. Marc-Philippe Daubresse proteste.) C'est peut-être la seule issue. Nous exigeons un référendum ou le retrait. (Applaudissements à gauche)
Rémunération des intérimaires à l'hôpital
M. Michel Dagbert . - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Avant-hier, la loi Rist est entrée en vigueur, dont l'article 33 fixe un montant maximal de rémunération des praticiens intérimaires de 1 390 euros par vacation de 24 heures.
J'ai échangé avec le directeur adjoint de l'agence régionale de santé (ARS) des Hauts-de-France. La surenchère à laquelle étaient soumis les directeurs d'établissement nuisait aux finances des hôpitaux et fragilisait les équipes médicales en place, posant une question éthique.
Les nouvelles dispositions n'ont pas vocation à mettre fin à l'intérim, qui coûte 1,5 milliard d'euros, mais à appeler chacun à la responsabilité, en rappelant les principes déontologiques. Les grandes fédérations hospitalières s'y sont montrées favorables, de même que nos concitoyens.
Quel sera l'impact de cette mesure sur l'ensemble du territoire ? (Applaudissements sur quelques travées du RDPI)
M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention . - Je vous remercie de souligner que le Gouvernement fait bien appliquer la loi votée par le Parlement. (Exclamations sur de nombreuses travées à gauche et à droite)
Nous voulons lutter contre les dérives de l'intérim, financières notamment, qui entraînent la destruction de l'hôpital public. Comment expliquer à un médecin de l'hôpital qu'un intérimaire venu 24 heures gagne deux fois plus que lui en un mois ?
En parallèle, reconnaissons la pénibilité des carrières des praticiens hospitaliers, qui sont la colonne vertébrale de notre service public hospitalier. Je prolonge les discussions avec leurs représentants pour améliorer leurs conditions de travail.
Aucun territoire n'est sans solution. Certains étaient dans une situation très difficile - je pense aux maternités de Carhaix et Landerneau -, mais nous avons trouvé des solutions presque partout. Pour certains lieux souffrant de difficultés préexistantes, tels que les maternités de Sarlat et Sedan, nous avons mis en place des parcours de soins pour les parturientes.
Avec les ARS, nous continuons à lutter contre les inégalités territoriales. (Applaudissements sur quelques travées du RDPI)
Réforme des retraites (II)
Mme Corinne Féret . - Injuste, injustifiable, imposée, votre réforme des retraites, refusée par les Français, doit être retirée. (Marques d'agacement à droite ; quelques membres du groupe SER applaudissent.) Après deux mois d'un mouvement social inédit, largement soutenu par la population, demain, des centaines de milliers de Français vous le rediront. L'absence de réponse de l'exécutif a mené à une tension extrême. Vous avez opté pour le mépris, laissant sans réponse l'intersyndicale qui demandait à être reçue. Votre refus du débat parlementaire en dit long sur votre conception de la démocratie sociale.
Les Français ont compris que vous aviez essayé de les berner. Ce matin, la Première ministre a daigné recevoir l'intersyndicale, et cela a été un échec. Nous vivons une grave crise démocratique. Quand entendrez-vous la colère et retirerez-vous votre réforme ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur quelques travées du groupe CRCE et du GEST)
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion . - J'ai déjà dit à Mme Lienemann combien nous tenions à un dialogue social productif, dans le respect, et combien nous étions heureux que la rencontre de ce matin ait pu se tenir.
M. Hussein Bourgi. - C'est un grand succès !
M. Olivier Dussopt, ministre. - Retirer la réforme, c'est laisser les déficits s'accumuler. (Mmes Laurence Rossignol et Monique Lubin protestent.)
M. David Assouline. - Cela ne passera pas !
M. Olivier Dussopt, ministre. - Il n'y a que vous qui pensiez que la marche serait plus facile à gravir dans quelques années. Au contraire, les déficits s'accumulent. Nous voulons éviter que le niveau des pensions de retraite ne décroche par rapport au niveau de vie moyen. Nous ne souhaitons pas l'appauvrissement des retraités.
M. David Assouline. - Le disque est rayé !
M. Olivier Dussopt, ministre. - Chacune des contrepropositions a été examinée. Augmenter les cotisations, c'est diminuer le pouvoir d'achat et la compétitivité. (Exclamations à gauche)
J'ai le souvenir de l'esprit de responsabilité qui régnait en 2013, lors de la réforme que j'ai votée.
M. David Assouline. - Rien à voir !
M. Olivier Dussopt, ministre. - Vous l'avez votée aussi. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
Mme Corinne Féret. - Arrêtez de vouloir noyer le poisson. Les Français en ont assez ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains) Nous n'avons aucune leçon à recevoir de vous. La sagesse aurait été d'écouter les Français. On ne peut pas mettre les gens autour de la table et continuer comme si de rien n'était. Encourager les fractures dans un pays au bord de l'implosion ne peut que mener au pire. Donnez la parole au peuple ! (Applaudissements à gauche)
Service national universel
M. Henri Cabanel . - (Applaudissements sur les travées du RDSE ; M. Michel Canévet applaudit également.) Dans un contexte de défiance exacerbée envers les élus, il est urgent de resserrer les liens avec les citoyens. Il faut réinventer une culture citoyenne, notamment pour les jeunes, qui ne se sentent ni écoutés ni compris - l'abstention en témoigne. J'ai été rapporteur d'une mission à ce sujet présidée par Stéphane Piednoir. Plusieurs outils existent, dont le service national universel (SNU). Généralisé, obligatoire, abandonné ? Tout a été dit.
De fausses informations, concernant une militarisation des jeunes par exemple, circulent. Il faut coconstruire le SNU avec les parties prenantes, dont les élus. Le service civique, qui a fait ses preuves, doit être maintenu. Quel est l'avenir de ces dispositifs ? Quid de la généralisation du SNU ? Envisagez-vous un débat parlementaire ? (Applaudissements sur les travées du RDSE ; MM. François Patriat et Xavier Iacovelli applaudissent également.)
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel . - Vous avez mille fois raison : nous manquons d'une culture citoyenne. (M. David Assouline proteste.)
Mme Laurence Rossignol. - Elle est dégradée ! On s'essuie les pieds sur les Français et après...
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État. - Elle se construit en transversalité. (Exclamations à gauche) Citons aussi le rapport Jeansannetas sur le financement du SNU.
La culture citoyenne commence à l'école, de la démocratie scolaire à l'éducation civique, sans oublier la relation avec les élus. Neuf jeunes sur dix ont boudé les urnes aux élections régionales. (Mme Laurence Rossignol et M. Bernard Jomier protestent.) Le SNU sera un temps pivot, mais non exclusif, complétant la journée défense et mémoire. Cela renforcera la force morale de la jeunesse qui a besoin de confiance dans nos institutions. (Mme Éliane Assassi et M. Pierre Laurent protestent.)
Le SNU permet aussi aux jeunes ultramarins de venir en métropole...
M. David Assouline. - Comme si avant, ils ne venaient pas !
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État. - ... aux jeunes ruraux de venir en zone urbaine, et aux urbains de découvrir la beauté des territoires ruraux. Je me tiens à votre disposition pour un débat parlementaire sur le sujet. (Applaudissements sur les travées du RDPI, du RDSE et sur quelques travées du groupe UC)
Mme Laurence Rossignol. - La ministre d'un pays imaginaire !
M. Henri Cabanel. - Nous voulons ce débat, essentiel pour notre jeunesse. Le SNU et le service civique doivent devenir des moyens d'intégration sociale et d'éducation à la citoyenneté.
Pêche dans les aires protégées
M. Jacques Fernique . - (Applaudissements sur les travées du GEST) Dimanche, monsieur le secrétaire d'État à la mer, vous avez crânement annoncé avoir fait reculer Bruxelles sur le chalutage de fond dans les aires marines protégées. Non, vous n'avez pas fait plier la Commission européenne puisque dès le départ, son plan d'action n'était pas obligatoire. En racontant aux pêcheurs que la Commission allait condamner la pêche artisanale française dès demain, vous avez joué un jeu dangereux et aggravé un climat déjà électrique à l'encontre des défenseurs de l'environnement. (Marques d'agacement sur les travées du groupe Les Républicains)
Vous prévaloir de la cause de la pêche artisanale pour soutenir le chalutage industriel était assez gonflé... C'est comme si vous subventionniez Amazon en prétendant défendre le commerce de proximité !
Nos pêcheurs, qui refusent la casse sociale, n'ont pas besoin d'une telle duperie, mais d'un écosystème en bon état pour pouvoir pêcher dans vingt ou trente ans. Vous vous érigez en héraut de la pêche artisanale alors que vous laissez des chalutiers géants détruire la pêche côtière.
Les pêcheurs sont en colère. Mais sans solution durable, pas d'apaisement. Nous ne voulons pas qu'un incendie comme celui qui a touché le site de Brest de l'Office français de la biodiversité (OFB) de Brest se reproduise. Plutôt que de stigmatiser les défenseurs de l'environnement, quand mettrez-vous en cohérence vos déclarations et vos actes ? (Applaudissements sur les travées du GEST et sur plusieurs travées du groupe SER)
M. Hervé Berville, secrétaire d'État chargé de la mer . - Je suis désolé, monsieur Fernique, mais où êtes-vous allé pêcher tout ça ? (Sourires) C'est faux ! Comme au Sénat, je n'ai fait que confirmer que ce plan de communication n'avait pas vocation à être traduit en actes législatifs. Mais il y avait à craindre que la Commission européenne ne veuille le rendre obligatoire. Je lui ai donc demandé de préciser ses intentions, qui sont floues : comme vous le savez, il peut y avoir un loup... (M. Jacques Fernique le confirme.)
M. Marc-Philippe Daubresse. - ... un loup de mer !
M. Hervé Berville, secrétaire d'État. - La majorité dont votre groupe faisait partie a créé des aires marines protégées entre 2012 et 2014 : tout n'y était pas interdit ! Il existe des gradations. Certaines activités de pêche sont vertueuses.
Depuis vingt ans, nous avons montré qu'on pouvait avoir une pêche côtière respectueuse : les pêcheurs de coquilles ou de langoustines respectent la planète !
Nous assumons le maintien de cette pratique de pêche côtière. (On le conteste sur les travées du groupe SER ; applaudissements sur les travées du RDPI, du groupe INDEP et sur quelques travées du groupe UC.)
M. Jacques Fernique. - Votre communiqué victorieux du 1er avril sonnait comme un poisson d'avril un peu décalé.
Où sont les mesures structurelles pour nos pêcheurs artisanaux et pour une pêche durable ? Protéger le statu quo, c'est, à terme, couler les pêcheurs ! (Applaudissements sur les travées du GEST et sur plusieurs travées du groupe SER ; Mme Laurence Cohen applaudit également.)
Démissions d'élus locaux (I)
M. Franck Menonville . - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) Près de quatre mille élus ont démissionné depuis le début de leur mandat en 2020, et le seuil de mille maires démissionnaires a été passé. Dans la Meuse, on recense les démissions de dix maires, 64 adjoints et 207 conseillers.
Les élus de proximité exercent leur mission dans un climat délétère et subissent transferts de compétences et lourdeurs administratives et bureaucratiques. Il est de plus en plus difficile de concilier mandat et vie personnelle et professionnelle, et je ne parle pas des intimidations, de la radicalisation, de l'agressivité, de l'individualisme et du durcissement de la société post-covid. Trois ans avant les prochaines élections municipales, il faut restaurer l'attractivité de cet engagement. Comment y parviendrez-vous ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur quelques travées du groupe UC ; M. Paul Toussaint Parigi applaudit également.)
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires . - Pas moins de 1 293 maires ont démissionné depuis le début de leur mandat en 2020. Entre 2014 à 2020, il y en avait eu 2 925 : nous sommes sur une moyenne comparable de 40 démissions par mois. Beaucoup ont démissionné en début de mandat, certainement à cause du covid. Je vois dans mon département du Maine-et-Loire des équipes dans lesquelles la mayonnaise n'a pas pris, faute d'avoir pu travailler ensemble.
Mais cela n'explique pas tout. Je salue les efforts d'Éric Dupond-Moretti et de Gérald Darmanin. Il faut aller plus loin. La mission sénatoriale sur l'avenir de la commune objectivera la situation. La semaine prochaine, Élisabeth Borne recevra les associations d'élus. Nous avons commencé à travailler avec le président de l'Association des maires de France, David Lisnard. Les maires sont les fantassins de la République, à portée de baffe de nos concitoyens ; nous devons mieux les accompagner. (Applaudissements sur quelques travées du RDPI et du groupe INDEP)
Fusillades à Marseille
M. Stéphane Le Rudulier . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Ces dernières heures, la guerre des gangs a fait rage à Marseille : trois morts de plus, et nous nous dirigeons vers un nouveau record après les 39 victimes de 2021. Ces 300 morts en dix ans font du Vieux-Port un nouveau Medellin, une nouvelle French Connection. Marseille est l'otage des cartels, alors que les moyens sécuritaires sont mis en oeuvre : plus de 300 policiers supplémentaires, 39 points de deal démantelés, des forces de l'ordre combattant au quotidien. Certes, c'est une guerre d'usure, mais l'arsenal juridique semble marquer le pas. La réponse judiciaire est-elle à la hauteur ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer . - Je vous prie d'excuser le garde des sceaux. Je tiens à saluer l'engagement de nos forces de l'ordre, qui mènent dans cette ville magnifique mais gangrenée par le trafic des opérations antidrogue toutes les demi-heures. Depuis le début de l'année, 1,2 tonne de cannabis a été saisie et 509 interpellations ont été effectuées.
Mais il faut faire davantage ; la justice doit pouvoir suivre cette activité de police. C'est pourquoi magistrats - cent pour la seule ville de Marseille -, juges du siège et greffiers sont déployés. Le parquet de Marseille a reçu des moyens importants. Il y a également le fisc, la douane, le soutien de la ville et de la métropole.
Des moyens législatifs doivent aussi être mobilisés : l'une des difficultés est que les écoutes téléphoniques à la papa, si vous me passez l'expression, fonctionnent mal face à des réseaux qui passent par internet et des conversations cryptées. Il faudrait pouvoir utiliser, contre le grand banditisme, les moyens mobilisés face au terrorisme. Je soumets cette proposition à la sagacité de votre assemblée. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
M. Stéphane Le Rudulier. - Il faut améliorer la chaîne pénale, avec des places de prison supplémentaires, moins de non-lieux et de classements sans suite qui nourrissent un sentiment de superpuissance des cartels. Le ministre de la justice a récemment déclaré qu'il n'y avait pas de coupe-gorge en France : qu'il vienne voir dans ces narco-cités de Marseille où la kalachnikov a remplacé Marianne ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; MM. Alain Duffourg et Stéphane Ravier applaudissent également ; murmures sur les travées du groupe SER)
Utilisation du S-métolachlore
Mme Florence Blatrix Contat . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Le S-métolachlore est un herbicide agricole qui a un impact avéré sur la qualité de l'eau. Ses produits de dégradation s'accumulent dans les nappes phréatiques. Depuis le 1er janvier 2021, ses métabolites font partie des molécules recherchées dans l'eau : dans de nombreuses collectivités territoriales, sa concentration est supérieure à la norme et 1,6 million de nos concitoyens sont concernés.
En juin dernier, l'Agence européenne des produits chimiques a classé la substance comme cancérogène et perturbateur endocrinien suspectés.
Le 15 février, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), après plusieurs études, engageait logiquement une procédure de retrait de cet herbicide. Puis, la veille de la présentation du plan Eau par le Président de la République, le ministre de l'agriculture annonçait devant la FNSEA avoir demandé à l'Anses de revenir sur sa décision...
La souveraineté alimentaire a parfois bon dos. Voulez-vous jouer avec la santé de nos concitoyens ? Le Gouvernement entend-il réellement revenir sur la décision de l'Anses ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur plusieurs travées du GEST)
M. Olivier Véran, ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement . - Veuillez excuser l'absence de Marc Fesneau, qui accompagne le Président de la République en Chine.
Nous avons l'objectif partagé de nous débarrasser des pesticides. Comme vous l'avez dit, cette substance est un cancérogène suspecté : le principe de précaution commande de le retirer. C'est le sens de l'Histoire.
Mais nous devons avancer en Européens sur cette question : si la France était le seul pays à interdire le S-métolachlore, nous serions dans la situation abracadabrantesque de devoir importer des produits que nous ne serions plus capables de produire, mais qui auraient été traités aux mêmes substances !
L'Union européenne s'est donné deux ans pour relever ce défi. Nous allons y arriver. (M. François Patriat applaudit.)
Mme Florence Blatrix Contat. - C'est une question de santé publique : il faut trouver d'autres solutions pour nos agriculteurs. Prenons de l'avance sur nos partenaires européens. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur plusieurs travées du GEST)
Police aux frontières dans les aéroports
Mme Anne Chain-Larché . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) En septembre, la France accueille la coupe du monde de rugby, en août 2024, les jeux Olympiques. On attend 10 millions de voyageurs supplémentaires dans nos aéroports, principalement à Roissy-Charles-de-Gaulle, vaisseau amiral d'Aéroports de Paris (ADP). Rappelez-vous, le groupe ADP, c'est cette entreprise que Bruno Le Maire voulait à tout prix privatiser pour payer la facture des gilets jaunes... Elle va rapporter 150 millions d'euros de dividendes à l'État actionnaire : nous avons bien fait de nous y opposer. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées des groupes UC, SER et CRCE)
Les sas de passage rapide aux frontières extérieures (Parafe) ne sont pas assez nombreux et souvent fermés, faute de personnel : 355 postes de la police aux frontières ont été supprimés... Il y a donc parfois jusqu'à deux heures d'attente à ces portiques. Belle première image de la France ! Les voyageurs qui en ont les moyens préféreront atterrir à Bruxelles ou Francfort, pour terminer le voyage en train. Nous nous dirigeons vers une pagaille qui ternira encore plus l'image de notre pays. Que comptez-vous faire pour l'éviter ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer . - L'accueil de ces voyageurs est-il parfait ? Non. Les responsabilités sont partagées entre ADP et la police aux frontières. Le nombre de portiques Parafe est insuffisant ; c'est pourquoi ADP prévoit l'installation de 40 % de portiques supplémentaires, dont une cinquantaine avant l'été.
Y a-t-il assez de personnel pour contrôler les arrivants ? Non. C'est pourquoi 510 personnes sont en cours de recrutement, dont 300 d'ici avril. Après ce cap, je m'engage à ce que les choses se passent au mieux dès cet été. Chacun peut désormais connaître le temps d'attente terminal par terminal, publié chaque semaine.
La solution n'est pas forcément dans les recrutements à la police aux frontières, qui a des tâches plus importantes à mener, comme les reconduites. En revanche, nous pourrions mobiliser du personnel civil et militaire du ministère de l'intérieur formé à la fraude documentaire, ainsi que des contractuels. Nous ferons tout pour être prêts dès le mois de mai. (Applaudissements sur quelques travées du RDPI)
Mme Anne Chain-Larché. - Nous ne demandons qu'à vous croire. La France fait peur aux visiteurs. Avec Sainte-Soline, les émeutes, les mairies en flammes, les black blocs, elle est bien loin, notre douce France ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Évelyne Perrot applaudit également.)
Fermetures de classes en zone rurale
Mme Nadia Sollogoub . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) « On est dans de telles circonstances exceptionnelles que les ouvertures et fermetures de classes qui se prévoient en ce moment, nous les revoyons... Il ne doit pas y avoir de querelle entre quiconque sur ces sujets actuellement. » Ainsi s'exprimait, le 27 mars 2020, le ministre de l'éducation nationale. Les circonstances exceptionnelles, c'était la crise sanitaire.
Or nous vivons à nouveau des circonstances exceptionnelles avec la crise des territoires ruraux. En visite à Nevers voici quelques jours, madame la Première ministre, vous avez dit que les fermetures seraient désormais annoncées trois ans à l'avance : ce n'est pas ce que j'attendais. Que répondez-vous aux maires désemparés, déçus mais qui espèrent encore que vous ne fermerez pas leurs 1 500 classes ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Jean-Pierre Sueur applaudit également.)
Mme Carole Grandjean, ministre déléguée chargée de l'enseignement et de la formation professionnels . - Veuillez excuser M. le ministre de l'éducation nationale, retenu à l'Assemblée nationale. Deux chiffres dessinent une nouvelle réalité : 300 000 élèves en moins en cinq ans, et 500 000 en moins prévus entre 2022 et 2027. La Première ministre et le ministre de l'éducation nationale l'ont rappelé à Nevers.
Une fermeture de classe a un impact important pour les communes rurales. La méthode d'anticipation à trois ans, annoncée par la Première ministre, permettra un dialogue avec les élus tout en tenant compte de la baisse démographique. Car le taux d'encadrement progresse : 5,98 enseignants pour 100 élèves en 2023, contre 5,46 en 2017.
Il n'y a aucune classe à plus de 24 élèves dans votre département. Nous avons d'ailleurs décidé de maintenir trois classes qui devaient fermer.
Nous voulons étendre la méthode présentée à tous les territoires.
Mme Nadia Sollogoub. - Je ne comprends pas : oui, il y a moins d'enfants et le même nombre de professeurs... mais pourquoi fermer des classes ? (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC ; M. Jean-Pierre Sueur et Mme Victoire Jasmin applaudissent également.) Notre taux d'encadrement est le plus mauvais d'Europe, avec 24 élèves par classe contre 22 en moyenne européenne.
Ces fermetures à trois ans n'aident personne : les enfants seront mis sur les routes, avec des coûts supplémentaires en matière de transport scolaire pour les collectivités. Vous ajouterez de la fatigue à la colère. Il faut un geste d'apaisement. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains ; Mmes Martine Filleul et Victoire Jasmin applaudissent également.)
Démissions d'élus locaux (II)
Mme Véronique Del Fabro . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Pas moins de 4 751 élus ont raccroché leur écharpe depuis 2020 : 275 maires, 3 563 élus municipaux ont estimé que la violence, physique et morale, et la complexité étaient trop fortes pour continuer à exercer leur mandat. Les trois quarts des démissions ont eu lieu dans des communes de moins de 1 500 habitants.
Animateurs de leur équipe municipale, employeurs, garants des deniers publics, gestionnaires de classes : ils jettent l'éponge face à tant de missions et à l'inflation législative - le code général des collectivités territoriales a triplé en vingt ans. Certains parlent d'un harcèlement textuel !
Ces élus souffrent d'un manque de considération au plus haut niveau de l'État, d'un paternalisme exaspérant. Les maires aspirent à plus de liberté et moins de contraintes. Je suis sûre que vous connaissez ces difficultés, mais comment allez-vous y remédier ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité . - J'ai eu la chance d'exercer le mandat de maire pendant près de dix ans. Je réaffirme mon soutien à tous les parlementaires et à tous les élus locaux ayant récemment subi des agressions inacceptables.
Depuis juillet, j'ai rencontré plus de mille élus locaux qui témoignent du bonheur d'être maire. Mais il ne faut pas nier la lassitude des élus, sentiment exprimé par le président de l'Association des maires de France (AMF), David Lisnard.
Je sais le Sénat mobilisé aussi, comme en témoigne la mission d'information en cours sur l'avenir de la commune et du maire.
La loi Engagement et proximité de 2019 a permis une revalorisation des indemnités des élus des petites communes. Mais tout ne se résume pas à des dispositions statutaires ; je ne me résous pas à ce mal profond. J'essaie de comprendre les causes de ces décisions en rencontrant les élus concernés.
Dans les prochaines semaines, je formulerai des propositions en vue de bâtir une feuille de route commune sur la place de l'élu local au sein de notre République. Les maires sont le ciment, le pilier de notre démocratie. (M. François Patriat applaudit.)
Mme Véronique Del Fabro. - Merci pour votre réponse sincère ; je me félicite de votre soutien. J'étais moi-même encore maire il y a trois mois.
Le statut est important, mais ce n'est pas l'essentiel : les maires aspirent à plus de liberté. Pourquoi étatiser la tarification de l'eau ? Pourquoi tous ces schémas directeurs ? Faites confiance aux élus locaux ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Évelyne Perrot, MM. Pierre Louault et Jean-Marie Mizzon applaudissent également.)
Minima sociaux et inflation
Mme Michelle Meunier . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Je ne parlerai pas de fin de vie ni de fin de carrière professionnelle, mais de la fin du mois des plus précaires. Revenu de solidarité active (RSA), allocation adulte handicapé (AAH), minimum vieillesse : les minima sociaux ont été relevés de 1,6 % au 1er avril, après une hausse de 4 % en juillet 2022. Mais l'inflation, elle, était de 7 %, et celle du budget alimentation des plus modestes de 14 %. Les dépenses d'une femme seule avec deux enfants augmentent de 170 euros par mois, ses minima sociaux de 17 euros !
Le collectif Alerte, qui regroupe des organisations d'élus, demande l'indexation des minima sociaux sur le budget de référence des ménages modestes, et une hausse immédiate de 5 % Que leur répondez-vous ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER)
M. Jean-Pierre Sueur. - Voilà une question claire !
M. Jean-Christophe Combe, ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées . - Depuis 18 mois, le Gouvernement agit sans relâche et à la racine contre l'inflation, notamment avec le bouclier tarifaire. Nous avons en effet revalorisé de manière anticipée les minima sociaux en juillet 2022, à hauteur de 4 %. Nous avons distribué 160 euros en moyenne par ménage à la rentrée scolaire, auxquels s'ajoute un chèque énergie compris entre 100 et 200 euros. Au 1er avril, les prestations sociales ont augmenté de 5,6 % sur douze mois, soit le niveau de l'inflation calculé par l'Insee. Nous avons donc protégé les plus modestes.
En 2023, l'inflation continue pour les produits alimentaires. C'est pourquoi nous avons mis en place le trimestre contre l'inflation et le programme « Mieux manger pour tous », pour que les Français modestes puissent acheter des légumes, de la viande et du poisson de qualité.
Nous ferons le point dans deux mois avec les associations de solidarité, que j'ai récemment réunies. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
Mme Michelle Meunier. - Nous sommes loin du compte ! Pour répondre à cette situation, il faut sortir de votre politique fiscale qui concentre les aides sur les plus fortunés des Français. Votre politique était dangereuse pour le climat, elle est alarmante pour le climat social ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; M. Daniel Salmon applaudit également.)
Maillage territorial des maternités
Mme Else Joseph . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) En matière de santé, c'est un vrai désaménagement du territoire que nous vivons. Cela dure depuis vingt ans, mais le sujet n'était pas dans le programme de campagne du Président de la République.
Nous sommes sensibles aux excès de l'intérim, mais la loi Rist aggravera les déserts médicaux. Certains habitants sont en grand danger, notamment en milieu rural.
Une étude remise à l'Académie de médecine préconise la fermeture des maternités accueillant moins de 1 000 naissances par an. La maternité de Sedan, qui a dû suspendre provisoirement les accouchements faute de personnel, est visée. Ce critère arbitraire relève d'une vision purement comptable de la médecine et d'une approche réductrice de ce qu'est la naissance.
Certes, vous avez levé le numerus clausus, mais les places en faculté n'augmentent pas, et vos choix en matière de répartition des spécialités à l'internat ne sont pas judicieux. Les appels à la réserve sanitaire sont infructueux.
Qu'allez-vous faire pour ne pas sacrifier les femmes et enfants sur l'autel de la comptabilité technocratique ? Nous n'aurons bientôt plus qu'une seule maternité dans les Ardennes. La situation est extrêmement grave, les Français le savent. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention . - Lutter contre les inégalités territoriales est ma priorité. Mais il faut dire la vérité : malgré la fin du numerus clausus, nous n'aurons pas 10 000 médecins supplémentaires dès demain. Il y a déjà 15 % d'étudiants en plus en deuxième année de médecine, mais il faut dix ans pour former un médecin.
Le rapport du professeur Krivine n'est qu'un élément de la discussion et n'engage en rien le Gouvernement. Pour les maternités, il faut associer proximité et sécurité des soins. C'est ma responsabilité. Or nous manquons de professionnels. L'équation est complexe. Les maternités ferment non pour des raisons financières - c'était avant - mais par manque d'effectifs. Je m'engage à trouver une solution pour chaque territoire.
Nous construisons de nouveaux parcours de soins pour les parturientes, en lien avec la maternité de Charleville-Mézières. Il y a aussi la solution innovante des centres de maternité, comme à Autun, où la femme enceinte peut rester jusqu'à l'accouchement près de chez elle et revenir au même endroit douze heures après l'accouchement. Voilà les pistes de travail à explorer avec les élus. (M. François Patriat applaudit.)
Compensation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises
Mme Annick Jacquemet . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Quid de la compensation pour 2023 de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), dont la suppression a été décidée dans la dernière loi de finances ?
Les collectivités territoriales se voient affecter une fraction de la TVA nationale de manière pérenne et dynamique à titre de compensation. Toutefois, après avoir pris connaissance - avec trois mois de retard - du montant de leur compensation, les élus locaux concernés ont fait part de leur incompréhension. Selon l'Association des maires de France (AMF) et Intercommunalités de France, le montant de la compensation est nettement inférieur à ce qu'aurait été la CVAE en 2023. L'engagement du Gouvernement de compenser à l'euro près n'est donc pas tenu : il manquerait 650 millions d'euros.
Nous ne remettons pas en cause le choix de calculer la compensation sur la base de la CVAE moyenne perçue entre 2020 et 2023, pour lisser les écarts. Mais les élus demandaient l'exclusion de l'année 2021, année de baisse exceptionnelle de la CVAE en raison de la crise sanitaire. Quelles sont les intentions du Gouvernement pour compenser sans porter atteinte aux finances des collectivités ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; MM. Guillaume Chevrollier et André Reichardt applaudissent également.)
M. Gabriel Attal, ministre délégué chargé des comptes publics . - Il est un point sur lequel nous nous retrouvons : la volonté de restaurer notre industrie et de créer des emplois industriels. Le débat porte sur les moyens d'y parvenir : nous considérons qu'il faut baisser les impôts de production. Nous assumons la suppression de la CVAE, et je suis persuadé que le choix de la majorité sénatoriale de voter son rétablissement tenait davantage à des doutes concernant la compensation pour les collectivités territoriales.
Les engagements du Gouvernement ont été tenus : pas un euro n'est gardé par l'État, puisque sur les 650 millions d'euros que vous évoquez, 500 millions sont versés au fonds vert et 150 millions aux services départementaux d'incendie et de secours (Sdis).
L'écrasante majorité des communes voient les montants versés augmenter par rapport à 2022 ; c'est le cas dans le Doubs. La proposition de l'AMF de retirer l'année 2021 ferait 45 % de perdants au sein des EPCI et 40 % au sein des communes.
Nous poursuivons le travail de négociation avec les collectivités territoriales, en lien avec les parlementaires. (Applaudissements sur plusieurs travées du RDPI ; M. Bernard Fialaire applaudit également.)
La séance est suspendue à 16 h 15.
Présidence de Mme Pascale Gruny, vice-président
La séance reprend à 16 h 30.
Salut à une délégation parlementaire canadienne
Mme le président. - (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mme la ministre, se lèvent.) J'ai le plaisir de saluer une délégation de parlementaires canadiens conduite par Mme Marie-France Lalonde, présidente de l'association interparlementaire Canada-France. Ils sont accompagnés par notre collègue Yan Chantrel, président du groupe d'amitié France-Canada.
La délégation est arrivée en France le 1er avril pour une visite d'étude consacrée aux politiques environnementales et culturelles. Ses travaux porteront en particulier sur l'action de la France pour le développement des énergies renouvelables.
Après avoir visité ce matin le chantier du village olympique à Saint-Ouen, la délégation va poursuivre sa mission en Normandie.
Le Sénat français entretient d'excellentes relations avec le Parlement du Canada. Ces rapports de confiance et d'amitié sont à l'image du partenariat d'exception qui unit nos deux pays.
Mes chers collègues, en votre nom à tous, permettez-moi de souhaiter à nos homologues du Parlement du Canada la plus cordiale bienvenue, ainsi qu'un excellent et fructueux séjour. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mme la ministre, applaudissent.)
Accord en CMP
Mme le président. - J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire (CMP) chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et portant diverses autres dispositions est parvenue à l'adoption d'un texte commun.
CMP (Nominations)
Mme le président. - J'informe également le Sénat que des candidatures pour siéger au sein de la CMP chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes ont été publiées.
Ces candidatures seront ratifiées si la Présidence n'a pas reçu d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre Règlement.
Ticket restaurant étudiant (Deuxième lecture)
Mme le président. - L'ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale en première lecture, visant à favoriser l'accès de tous les étudiants à une offre de restauration à tarif modéré.
Discussion générale
Mme Sylvie Retailleau, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche . - Nous examinons la proposition de loi de M. Pierre-Antoine Levi visant à offrir des repas abordables à tous les étudiants. Dans la moitié des zones blanches, leur nombre ne dépasse pas la centaine ; le modèle du Crous (Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires) ne peut s'y appliquer, il faut donc s'appuyer sur d'autres acteurs.
Ainsi, 170 acteurs publics et privés ont pris part à une convention pour offrir leurs services à ces étudiants. La loi de finances pour 2023 a relevé de 33 % les crédits consacrés à ces conventions ; c'est en ce sens que j'avais porté votre proposition d'ouverture des centrales d'achat des Crous à d'autres acteurs. En contrepartie, les étudiants peuvent accéder à une restauration à tarification sociale. C'est un bon levier pour qu'ils augmentent leur activité, fassent des économies d'échelle, et pour aider les réseaux des oeuvres universitaires et les étudiants.
Cela étant, dans certaines communes, aucun acteur ne s'est engagé dans cette démarche. La proposition de loi de M. Levi y remédie, en prévoyant l'achat d'un repas à tarif modéré. Comme vous, je recherche les solutions collectives plutôt qu'individuelles pour garantir un repas complet à tarification modérée et proche de chez lui à chaque étudiant.
Mes services travaillent à rendre votre proposition opérationnelle si le Sénat devait l'adopter, pour une entrée en vigueur à la rentrée. C'est essentiel pour éviter l'inflation des prix à proximité des lieux d'enseignement et des effets d'aubaine préjudiciables.
Le Gouvernement est aux côtés des étudiants : cette mesure complétera, notamment, les mesures d'urgence pour le pouvoir d'achat que j'avais annoncées l'été dernier. Le 7 octobre dernier, à la demande de la Première ministre, j'ai lancé une large consultation sur la vie étudiante, qui traitait des bourses, de la restauration, du logement, mais aussi de l'accès au sport, à la santé et à la culture.
Sur les bourses, le système sur critères sociaux est efficace mais présente des limites. Conformément à l'engagement du Président de la République, une attention particulière devait être portée au coût de la vie. J'ai dressé une méthode et un calendrier clairs, que j'ai présentés devant votre commission de la culture. Cela représente un engagement de 500 millions d'euros.
Pour la prochaine rentrée, cela vise à aider plus d'étudiants, à mieux les aider et à neutraliser les effets de seuil. Ainsi, 35 000 étudiants supplémentaires seront boursiers, pour une hausse de 37 euros par mois pour tous les échelons, compensant au moins l'inflation. C'est sans précédent depuis dix ans.
De plus, 140 000 boursiers, soit 20 % du total, passent à l'échelon supérieur, pour une augmentation comprise entre 66 à 127 euros par mois.
Enfin, aucun étudiant ne verra sa bourse diminuer d'un montant supérieur à la hausse des revenus de ses parents.
Cela s'ajoute à la tarification sociale de la restauration étudiante, gelée à 3,30 euros et 1 euro pour le tarif très social. Les loyers Crous sont aussi gelés.
Ainsi, nous assurons un bon niveau de vie à nos étudiants. Les dernières années ont été difficiles. Nous aurons besoin de tous les outils et de toute la bonne volonté possibles pour aider tous les étudiants de tous les territoires. Je suis donc favorable à l'adoption de votre proposition de loi, sous réserve que la mesure principale ne soit pas dénaturée. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, du RDSE, du groupe INDEP, du RDPI et des groupes SER et CRCE)
M. Laurent Lafon, président de la commission de la culture. - Très bien !
M. Jean Hingray, rapporteur de la commission de la culture . - Je salue Pierre-Antoine Levi, à l'initiative de ce texte depuis mars 2021. Il est le fruit d'un combat pugnace, dans le prolongement du rapport de MM. Lafon et Ouzoulias. Nous souhaitons aujourd'hui un vote conforme, pour offrir un repas abordable aux étudiants sur l'ensemble du territoire. Certes, l'Assemblée nationale a apporté quelques modifications.
Nous prévoyions une contribution de 3,30 euros des étudiants non boursiers - nous avons tous été heurtés par les files d'attente durant la crise sanitaire. Nous proposons la généralisation du conventionnement, au-delà des 200 lieux déjà engagés, qui permettra à tous les étudiants boursiers de déjeuner pour 1 euro. Cela concernera les restaurants des établissements publics, dont les hôpitaux et les mairies, ainsi que les restaurants privés. Dans certains territoires, notamment ruraux, il n'y a pas de restaurant universitaire : les étudiants ne sont donc pas tous sur un pied d'égalité.
Nous tenons particulièrement à l'action des Crous, que nous saluons - j'en bénéficiais il n'y a pas si longtemps.
La proposition de loi prévoit une aide sociale directe de l'État : au décret d'application d'en tenir compte. Nous continuerons le combat.
L'Assemblée a prévu un rapport annuel, qui permettra au Parlement d'accéder aux conventionnements mis en place. Nous tenons particulièrement à l'échelon territorial de l'action publique.
Nous espérons que l'ensemble des groupes du Sénat votera ce texte qui fait oeuvre de justice sociale pour l'ensemble des étudiants, et que certains transformeront leur abstention bienveillante en vote favorable. Nous vous remercions, madame la ministre, de permettre cette avancée majeure. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains et INDEP)
M. Julien Bargeton . - En première lecture, le RDPI avait choisi une abstention bienveillante. Nous craignions alors la remise en cause du service public des Crous, qui repère les conventions et agréments possibles en zone blanche. Leur rôle, durant la crise du covid, a été fondamental pour servir 14,5 millions de repas à un euro. En outre, les Crous ont évolué, avec le click and collect, la livraison et la commande.
Ce texte a, lui aussi, beaucoup évolué, avec la territorialisation du dispositif. L'Assemblée nationale a rappelé l'universalité de l'accès des étudiants à la restauration universitaire. Elle a aussi rappelé la priorité à la restauration collective - le conventionnement reste un complément. Enfin, une aide financière, mieux ciblée, remplace le ticket restaurant. Compte tenu de ces trois évolutions, notre groupe votera ce texte.
Certaines questions demeurent, cependant. La première est l'effet prix : un versement - on l'a vu avec les aides personnalisées au logement (APL) - peut susciter l'inflation. La deuxième est la conditionnalité. La troisième est l'appréciation de la proximité et du besoin. Le texte allant dans le bon sens, nous le voterons tout de même. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
Mme Sabine Van Heghe . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Cette proposition de loi créait initialement un ticket restaurant similaire à celui des entreprises - c'était en juin 2021. Le groupe SER insistait sur le danger que cela posait pour les Crous, dont la restauration représente 30 % du chiffre d'affaires.
L'Assemblée nationale a proposé une réécriture qui ne nous satisfait pas pleinement, en raison de la difficulté à définir l'offre de restauration à tarif modéré et à proximité.
L'article 1er prévoit une aide lorsqu'une telle offre n'existe pas, auprès d'un organisme conventionné. Or ni la forme, ni le montant de l'aide ne sont mentionnés. Ce flou, autour d'un dispositif non contraignant, n'apporte donc aucune garantie supplémentaire.
Les modifications apportées par l'Assemblée nationale vont dans le bon sens, mais le dispositif reste complexe. Le groupe SER défend le ticket resto U à un euro pour tous les étudiants, simple et efficace, tel qu'il a été proposé à l'Assemblée nationale par les députés socialistes. Malheureusement, il a été rejeté, sous prétexte qu'il bénéficierait aux enfants de millionnaires... Je ne suis pas sûre qu'il y en ait beaucoup dans les Crous ! Ne sous-estimez pas le désespoir des jeunes privés d'études par la précarité.
Le groupe SER maintiendra son abstention, bienveillante, sur cette proposition de loi.
M. Jean Hingray, rapporteur. - Nous aurons essayé...
M. Pierre Ouzoulias . - Les universités souffrent d'un manque chronique d'investissements, et les disparités entre établissements s'accroissent sans cesse, notamment entre les établissements des métropoles, mieux dotés, et ceux des villes moyennes. Notre pays ne pourra affronter les défis de la décarbonation, de la réindustrialisation et de la confiance dans la science sans faire de la connaissance une priorité.
« Nation apprenante », « raison populaire » : ce large dessein, évoqué par Condorcet, suppose d'en rapprocher les publics les plus éloignés de l'université. Selon le rapport de la Cour des comptes, le taux de diplomation décroît avec l'éloignement des universités. Celles-ci doivent redevenir un instrument d'aménagement du territoire, comme le suggère le rapport Lafon. Ainsi, les politiques universitaires ne peuvent se faire sans les collectivités : logement, restauration, transport, santé, emploi sont autant de domaines où leur action est décisive.
La proposition de loi de Pierre-Antoine Levi apporte une première pierre à l'édifice, qui complète l'accès des collectivités et des établissements publics à la centrale d'achat du Centre national des oeuvres universitaires et sociales (Cnous), possible depuis la loi de finances pour 2023. Elle inscrit la possibilité d'un conventionnement, pour offrir une offre alternative de restauration. Le Cnous devra avoir les moyens suffisants pour assurer ce nouveau service, afin que tous les étudiants en bénéficient dès septembre.
Redisons à quel point le Cnous et les Crous, avec leur capacité d'innovation et d'adaptation, ont été décisifs durant la crise sanitaire. Cela montre toute l'utilité d'un tel organisme national. Une politique ambitieuse de collaboration avec les collectivités doit lui donner un nouvel élan. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
M. Pierre-Antoine Levi . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Le 3 mars 2021, je déposais ma proposition de loi pour créer un ticket restaurant étudiant, pour répondre notamment aux besoins dans les zones blanches, où les étudiants doivent parcourir de longues distances pour se restaurer à des prix abordables. Cosignée par 82 parlementaires de trois groupes politiques différents, elle entendait répondre aux situations que nous avons constatées durant la crise sanitaire. Nous avons progressé, et nous nous approchons du but : 500 000 étudiants auront ainsi accès à une alimentation saine à des prix abordables.
À l'Assemblée nationale, le texte a évolué, mais le repas à 1 euro ne répondait pas au problème des zones blanches. J'interpellais, sans succès, la ministre d'alors. Je salue sa successeure, Sylvie Retailleau, qui a finalement su proposer un dialogue constructif.
Cette proposition de loi a évolué. Certains penseront que le dispositif initial a été dénaturé ou qu'il ne va pas assez loin. Mais évitons une nouvelle navette vers l'Assemblée nationale en votant conforme, et satisfaisons-nous de cette victoire en faveur des étudiants. Notre objectif est bien d'améliorer leur vie. La hausse des prix affecte tous les aspects de la vie quotidienne, a fortiori le coût de l'alimentation.
Certains craignaient un affaiblissement des Crous. Je ne partage pas cette crainte. Mais le dispositif actuel sera bien organisé autour des Crous, que le conventionnement se fasse avec des maires, des hôpitaux ou des organismes privés.
De plus, une aide financière est prévue : jusqu'à 500 000 étudiants pourront être aidés. Cette mesure ne coûte pas cher, non, elle ne fait que rétablir l'égalité et mettre en oeuvre un droit existant non appliqué par manque de Crous dans les zones blanches.
J'espère que ce texte sera voté à une large majorité et adopté conforme.
Je remercie le rapporteur Jean Hingray pour son implication et le président Laurent Lafon pour son aide et ses conseils. Le groupe UC votera unanimement cette proposition de loi. Il reste cependant beaucoup à faire pour nos étudiants, qui peuvent compter sur mon engagement le plus total pour les aider à réussir leurs études. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains ; M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)
Mme Esther Benbassa . - Le 29 mars dernier, le Gouvernement annonçait les premières mesures de revalorisation des bourses : 35 000 étudiants supplémentaires, issus de la classe moyenne, et 37 euros de plus pour tous les échelons. Mais est-ce suffisant ? Il ne faut pas s'habituer aux files d'attente d'étudiants devant les banques alimentaires. Payer son loyer ou manger, voilà la question : un quart des étudiants fréquentant les associations d'aide alimentaire évoquent une faim modérée à importante, et nombre d'entre eux sont en dépression. Comment réussir ses études quand on a faim ?
Cette proposition de loi ne précise pas les modalités de mise en place de la contribution financière prévue, dont le montant n'est pas indiqué. Le parti socialiste avait proposé le repas à 1 euro pour tous les étudiants. La droite et la majorité présidentielle avaient voté contre, sous prétexte de réserver les aides à ceux qui en ont le plus besoin. Quelle contradiction ! Difficile de voter contre un tel texte : je m'abstiendrai, car c'est un texte plus ambitieux que je réclame.
Le communard Eugène Varlin disait : « Tant qu'un homme pourra mourir de faim à la porte d'un palais où tout regorge, il n'y aura rien de stable dans les institutions humaines. » (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)
M. Bernard Fialaire . - Cette proposition de loi est plus qu'une nécessité, c'est un devoir. La crise sanitaire a accentué les inégalités et révélé les failles structurelles de la restauration universitaire : maillage territorial insuffisant, délais d'attente et plages d'ouverture inadaptées, modèle économique déséquilibré.
Notre débat est un premier pas vers un système de restauration étudiant plus juste et plus vertueux.
Les étudiants font face à une inégalité d'accès en fonction des territoires d'études.
Comme nous le montrions dans notre rapport avec Mme Boulay-Espéronnier, les 40 millions d'euros de la contribution vie étudiante et campus (CVEC) ne permettent pas aux étudiants d'accéder à une restauration abordable.
Aujourd'hui, on propose une aide financière et un conventionnement. L'aide financière pourra prendre plusieurs formes pour s'adapter au terrain. Le groupe RDSE comprend le souhait de vote conforme, mais il ne peut occulter ce fait : la réécriture à l'Assemblée nationale a introduit une complexité inquiétante, qui risque de rendre le texte non opérationnel.
Madame la ministre, n'hésitez pas à privilégier l'échelon local pour mettre en oeuvre la réforme. Les conventionnements avec les Crous sont insuffisants : peut-être avons-nous une chance de recréer un lien intergénérationnel avec les lycées et les Ehpad.
De plus, ce texte ne répond pas aux problèmes structurels d'attente ou de plages d'ouverture inadéquates. Le RDSE votera cette proposition de loi, mais nous garderons un oeil vigilant. (Applaudissements sur les travées du RDSE et au banc des commissions)
M. Bruno Belin . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions) Nous voterons cette proposition de loi, et nous remercions MM. Lafon, Hingray et Levi.
M. Ouzoulias a évoqué l'état des universités. Il faut bien le rappeler : les étudiants arrivent à l'université essorés par Parcoursup, dans des structures dans un piètre état. L'université Paris-Sud... Il était grand temps de raser le site de Châtenay-Malabry ! À Poitiers, la faculté de médecine a été reconstruite uniquement grâce à la volonté du président Monory et du conseil général !
Quant au contexte, c'est celui du covid et de l'inflation, qui pèse lourdement sur les étudiants. Le quotidien, c'est la précarité alimentaire, la difficulté de trouver un logement, la nécessité de travailler pour payer ses études.
À cela s'ajoutent la disparité et, oui, la discrimination territoriale. Il faudrait sans doute élargir le dispositif à d'autres domaines. Pensez aux transports, a fortiori dans les territoires isolés !
Notre avenir dépend du traitement que nous réserverons à nos étudiants, qui portent l'avenir de la France. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC ; M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)
Mme Colette Mélot . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Lors de la crise sanitaire, nous avons tous été heurtés par les files d'attente d'étudiants attendant leur colis alimentaire. Les difficultés sont toujours là avec l'inflation. Il est impérieusement nécessaire de soutenir nos étudiants, qui ne peuvent plus se nourrir comme avant. L'alimentation est la variable d'ajustement pour boucler les fins de mois. Toute aide est donc la bienvenue. La hausse des bourses est une excellente nouvelle.
Jean-Anthelme Brillat-Savarin écrivait : « La destinée des Nations dépend de la manière dont elles se nourrissent ». Nos étudiants doivent manger à leur faim. En première lecture, nous voulions une aide territorialisée pour aider les étudiants des zones rurales et de montagne. Depuis son dépôt au Sénat, le texte a évolué, c'est peu de le dire.
Je regrette que l'Assemblée nationale ait complexifié le texte. Cependant, il va dans le bon sens. Le Gouvernement devra remettre chaque année un bilan de la mise en oeuvre. Nous y serons attentifs ; nous voterons le texte. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains)
Mme Monique de Marco . - Cette proposition de loi poursuit un objectif louable. Depuis son dépôt en mars 2021, la situation n'a malheureusement pas évolué. La première version des tickets restaurant avait le mérite de plus de précision. Quelque 48 % des étudiants doivent travailler, et un tiers d'entre eux ont recours à des banques alimentaires.
La réponse du Gouvernement ne semble pas à la hauteur. La revalorisation des bourses est inférieure à l'inflation. Le Gouvernement a dû débloquer une aide d'urgence de 10 millions d'euros en ouvrant les repas à 1 euro à plus d'étudiants. Ce n'est pas grand-chose, lorsque l'on sait que 250 millions d'euros seraient nécessaires pour financer cette proposition de loi.
Quant à l'augmentation des bourses, elle n'offre aucune garantie réelle pour les étudiants.
Les étudiants ultramarins sont particulièrement pénalisés, puisque le coût de la vie y est de 26 % supérieur pour eux. Pourquoi 70 centimes supplémentaires pour les frais d'emballage et de transport, qui doublent alors le reste à charge pour les repas à 1 euro ? Comment justifier cette rupture d'égalité ?
La réécriture à l'Assemblée nationale ne nous satisfait pas. Elle est trop vague. Nos amendements de précision visant à assurer un reste à charge identique sur tout le territoire ont été déclarés irrecevables. Il n'est pas trop tard, car il faut répondre réellement aux difficultés des étudiants.
Nous nous abstiendrons, avec bienveillance. (Applaudissements au banc des commissions ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)
M. François Bonhomme . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC) Nous espérions une amélioration de la situation des étudiants après la crise sanitaire, mais il n'en est rien. Les 700 000 boursiers touchaient une somme allant de 103 à 573 euros par mois, sur dix mois. Souvent, ils doivent renoncer à se nourrir ou à se soigner.
L'aide des associations est souvent insuffisante, malgré la rallonge du Gouvernement de 10 millions d'euros. L'augmentation des APL de 3,5 %, l'extension des bourses à 35 000 bénéficiaires sont elles aussi insuffisantes, de même que la rallonge de 37 euros pour tous.
Ainsi, il faut aider les étudiants à se nourrir dans des conditions acceptables. Le système de restaurants universitaires reste inégalitaire. Dans les zones périphériques, l'offre manque. Les étudiants en zone blanche auront ainsi droit à un tarif préférentiel, pour répondre au principe universel d'accès à une offre de restauration à prix modéré.
Les modalités de mise en place de cette aide posent problème. On proposait d'abord un ticket restaurant. Or l'Assemblée nationale a fait le choix d'une aide financière et du recours à des bons alimentaires dans des lieux conventionnés. Un rapport gouvernemental a été prévu pour évaluer le dispositif. Le ticket restaurant étudiant paraissait simple d'utilisation.
L'Assemblée nationale a modifié cette disposition. Entre ces deux options, la commission de la culture du Sénat a tranché : elle a voté conforme le texte de l'Assemblée nationale. Je me range à cet avis, car l'urgence de la situation le commande : il faut un dispositif rapide et opérationnel pour les étudiants. Nous espérons que le Gouvernement prévoira les financements nécessaires. Je voterai ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP)
Rappel au Règlement
Mme Monique de Marco. - L'article 44 ter du Règlement autorise le ministre et le rapporteur à déposer des amendements en séance. Je vous appelle à faire application de ce droit afin de préciser le texte et le rendre réellement applicable.
En effet, deux de mes amendements ont été déclarés irrecevables, ce que je conteste.
Nous voulons une égalité entre tous les étudiants, quel que soit leur positionnement géographique. Tous doivent pouvoir avoir accès au prix subventionné. Si le reste à charge est supérieur au prix d'un sandwich, la proposition de loi est inutile.
Le texte de l'Assemblée prévoit également que l'organisme conventionné devra se trouver à proximité du lieu d'études...
Mme le président. - Ce n'est plus un rappel au Règlement ; vous pourrez vous exprimer sur le fond dans la défense de vos amendements.
Mme Monique de Marco. - Ils ont été jugés irrecevables !
Mme le président. - Acte est donné de votre rappel au Règlement.
Discussion des articles
ARTICLE 1er
Mme le président. - Amendement n°4 rectifié, présenté par Mme de Marco, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.
Alinéa 3
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Dans le réseau des oeuvres universitaires et scolaires comme au sein des organismes conventionnés, les horaires d'accès à l'offre de restauration à tarif modéré sont établis en fonction des besoins des étudiants, après la consultation des associations les représentant.
Mme Monique de Marco. - Cet amendement est passé entre les mailles...
Les restaurants universitaires répondent de moins en moins aux attentes des étudiants. Nous proposons que les horaires d'ouverture de ces lieux soient soumis à la consultation des syndicats étudiants.
M. Jean Hingray, rapporteur. - Avis défavorable. Nous souhaitons un vote conforme.
La consultation des syndicats étudiants relève d'un conventionnement au niveau local, non de la loi.
Mme Sylvie Retailleau, ministre. - Même avis.
L'amendement n°4 n'est pas adopté.
L'article 1er est adopté.
ARTICLE 1er BIS
Mme le président. - Amendement n°3, présenté par Mme de Marco.
Compléter cet article par les mots :
comportant une évaluation de l'évolution de la précarité alimentaire des étudiants en France
Mme Monique de Marco. - L'article 1er bis prévoit un bilan gouvernemental annuel de l'accès à l'offre de restauration à tarif modéré. Je propose de l'étendre à la précarité alimentaire des étudiants.
Alors que la crise alimentaire étudiante a atteint son paroxysme en 2022, la dernière étude de l'Observatoire de la vie étudiante date de 2021. Il a fallu attendre la forte mobilisation des étudiants contre les retraites pour qu'une nouvelle étude soit menée en mars. Nous avons besoin de données objectives, car il faut évaluer une situation pour y répondre !
M. Jean Hingray, rapporteur. - Avis défavorable. Le conventionnement vise à lutter contre la précarité étudiante ; tous les syndicats étudiants que nous avons reçus se sont déclarés favorables à cette proposition de loi.
Mme Sylvie Retailleau, ministre. - Même avis. Je vous rejoins sur le besoin d'évaluation. Nous attendons un bilan sur l'aide de 10 millions d'euros pour les associations et banques alimentaires. L'enquête de l'Observatoire de la vie étudiante sera publiée à la fin de l'année. Les outils existent, nous y serons attentifs.
L'amendement n°3 rectifié n'est pas adopté.
L'article 1er bis est adopté.
À la demande du groupe UC, la proposition de loi est mise aux voix par scrutin public.
Mme le président. - Voici le résultat du scrutin n°259 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 267 |
Pour l'adoption | 267 |
Contre | 0 |
La proposition de loi est adoptée. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains, INDEP, CRCE, du RDPI et du RDSE)
La séance est suspendue quelques instants.
Parité dans la haute fonction publique (Procédure accélérée)
Mme le président. - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à renforcer l'accès des femmes aux responsabilités dans la fonction publique, présentée par Mmes Billon, Filleul, Vérien et plusieurs de leurs collègues.
La procédure accélérée a été engagée sur ce texte.
Discussion générale
Mme Annick Billon, auteure de la proposition de loi . - (Mme Dominique Vérien applaudit.) Je me réjouis de l'examen de cette proposition de loi, corédigée avec mes collègues Vérien et Filleul, qui fait suite au rapport de la délégation aux droits des femmes de juin 2022 intitulé « Parité dans la haute fonction publique : changer de braquet dix ans après la loi Sauvadet ».
La loi Sauvadet impose aux employeurs publics de respecter une proportion minimale de chaque sexe pour les primo-nominations dans près de 6 000 emplois d'encadrement supérieur et de direction. Depuis 2017, ce quota est de 40 % et est assorti de pénalités financières : 90 000 euros par unité manquante.
La loi a fait effet : le taux a progressé de dix points entre 2013 et 2020, année où le quota a été atteint dans les trois fonctions publiques.
Les résultats sont toutefois instables d'une année sur l'autre. En outre, les quotas Sauvadet concernent les flux et non le stock, et n'ont pas conduit à une augmentation notable de la proportion de femmes dans les emplois d'encadrement supérieur : un tiers seulement. La proportion de femmes reste plus faible dans les ministères historiquement masculins et dans les emplois considérés comme plus prestigieux ou plus techniques.
Au sein de la fonction publique d'État, on comptait en 2020 33 % de femmes dans des emplois supérieurs, avec des variations : 46 % au ministère des affaires sociales, 31 % à la culture, 27 % au ministère de l'économie et des finances.
Dans la fonction publique territoriale, la proportion de femmes nommées à des postes de responsabilité a également augmenté : 41 % des postes de directeur général adjoint des services (DGA) sont occupés par des femmes, mais 20 % seulement des postes de directeur général des services (DGS) et 15 % des postes de directeur général des services techniques (DGST).
Dans la fonction publique hospitalière, historiquement féminisée, la situation est contrastée : 42 % de femmes dans des emplois d'encadrement supérieur, 53 % à la tête d'établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux, mais 27 % et 39 % respectivement à la tête des hôpitaux et CHU, postes jugés plus prestigieux. Cette disparité se retrouve au niveau des salaires.
Pour y remédier, notre délégation recommandait notamment d'élargir les obligations paritaires et de mobiliser les employeurs publics autour d'une politique d'égalité professionnelle et salariale ambitieuse. Nos recommandations ont abouti à cette proposition de loi. Je salue le travail de la rapporteure Dumont, ainsi que l'ouverture du ministre Guerini, qui s'est engagé à avancer sur certaines de nos recommandations d'ordre réglementaire, comme la transparence des données.
Cette proposition de loi comprend trois grandes avancées. D'abord, elle renforce l'exigence des quotas de flux, en les rehaussant de 40 à 45 %. Ensuite, elle introduit un quota de stock de 40 % de personnes de chaque sexe à compter de 2029. Enfin, elle impose la publication d'indicateurs relatifs aux écarts de rémunération et de représentation dans les emplois supérieurs.
L'index de l'égalité professionnelle a fait ses preuves dans le secteur privé : je me réjouis de le voir appliqué dans le public. Nous devons disposer de statistiques genrées objectivant les inégalités. Comme j'aime à dire, il faut compter les femmes pour que les femmes comptent !
Si les quotas font débat, ils font toujours la preuve de leur efficacité.
Les employeurs publics doivent être exemplaires en matière de parité. Ils emploient 6 millions d'agents, dont 62 % de femmes. Ils doivent donc jouer un rôle moteur en faveur de l'égalité, qui ne progresse, hélas, que sous la contrainte.
Depuis la loi du 8 juillet 1999, plusieurs lois ont favorisé l'accès des femmes aux responsabilités. Ce texte marque une nouvelle étape sur la longue route escarpée vers l'égalité, au bénéfice de tous. (Applaudissements)
Mme Françoise Dumont, rapporteure de la commission des lois . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Dominique Vérien applaudit également.) Cette proposition de loi découle des travaux menés par la délégation aux droits des femmes sur le bilan des dix ans d'application de la loi Sauvadet.
Le texte initial proposait de relever à 50 % le taux de personnes de chaque sexe pour les primo-nominations, d'élargir le champ d'application de la loi Sauvadet, de systématiser les pénalités financières en cas de non-respect des obligations en matière de nomination et d'instaurer un index de l'égalité professionnelle.
Dix ans après la loi Sauvadet, la présence des femmes à des postes à responsabilité est encore minoritaire : il convient d'y remédier. La commission a toutefois considéré que cet objectif louable devait se concilier avec des impératifs d'efficacité et de proportionnalité.
Aux articles 1er, 2 et 3, elle a apporté des modifications en ce sens. À l'article 4, elle a consolidé la mise en place d'indicateurs des écarts de rémunération et de représentation afin d'en renforcer la portée.
La commission a considéré que l'augmentation du taux à 50 % de personnes de chaque sexe se heurterait à des difficultés d'applications, voire serait contre-productive : elle serait inapplicable en cas de nominations en nombre impair et ne laisserait aucune marge de manoeuvre aux employeurs publics. Faute de pouvoir respecter l'obligation, les administrations seraient contraintes de payer la pénalité.
Instaurer un taux de 50 % serait également contraire à l'intérêt des femmes, en empêchant un ratio plus favorable, et freinerait la progression de carrière des fonctionnaires qui ne seraient pas « du bon sexe ». Ne sous-estimons pas le risque de voir les considérations liées au sexe l'emporter sur celles liées à la compétence. C'est pourquoi la commission a opté pour un taux de primo-nominations de 45 % au moins de personnes de chaque sexe.
Il convient de laisser le temps aux administrations de s'adapter, et éviter tout effet sur les cycles de nominations en cours dans le versant territorial. C'est pourquoi la commission a prévu une entrée en vigueur au 1er janvier 2025 dans la fonction publique de l'État (FPE) et la fonction publique hospitalière (FPH), et à l'issue du prochain renouvellement général des assemblées délibérantes pour la fonction publique territoriale (FPT).
L'élargissement du champ des emplois proposé à l'article 3 ne nous a pas paru opportun. L'étendre aux emplois dits d'encadrement supérieur créerait une insécurité juridique, cette notion n'étant pas définie par la loi.
D'autre part, abaisser à 20 000 habitants le seuil des communes et EPCI concernés risquerait d'accentuer leurs difficultés de recrutement.
La commission a salué l'instauration, à l'article 4, d'indicateurs relatifs aux écarts de rémunération et de représentation. Un tel index existe déjà dans le secteur privé. Elle en a renforcé la portée et a créé une nouvelle section dédiée dans le code général de la fonction publique.
Pour permettre des statistiques significatives, la commission a limité ces nouvelles obligations aux administrations d'au moins 50 agents en gestion. Pour les collectivités territoriales, ce critère se cumule avec le seuil de 40 000 habitants.
La commission a prévu des sanctions financières en cas de non-publication. Celles-ci pourraient également être prononcées si les écarts sont supérieurs à un niveau défini par décret.
Nous proposons une entrée en vigueur au 1er juin 2024 pour la fonction publique d'État et au 1er juin 2025 dans les deux autres versants.
Enfin, la commission a souhaité aller plus loin sur le stock en instaurant un taux minimal de 40 % de personnes de chaque sexe. Cette recommandation est d'autant plus justifiée qu'une obligation analogue existe pour les entreprises de plus de 1 000 salariés. La commission a également décidé de sanctionner le non-respect de cette obligation par une pénalité financière maximale de 1 % de la masse salariale.
C'est donc un texte alliant ambition et opérationnalité que je vous propose d'adopter. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)
M. Stanislas Guerini, ministre de la transformation et de la fonction publiques . - Nous nous apprêtons à franchir une étape importante pour l'égalité professionnelle dans la fonction publique.
Grâce à l'engagement de la délégation aux droits des femmes et de sa présidente, au travail de la rapporteure, nous examinons un texte d'utilité publique appelé à rassembler largement. C'est un honneur de travailler avec la Chambre haute à cette noble cause et, en ces temps agités, de mener ensemble un travail serein et sérieux.
Nous avançons sur un chemin ouvert par la loi Sauvadet de mars 2012, puis par l'accord de novembre 2018, qui a créé des référents égalité professionnelle dans chaque versant de la fonction publique, et par la loi de 2019, qui impose aux employeurs publics de publier des plans d'action sur l'égalité professionnelle. En dix ans, nous avons réduit de 10 % l'écart de rémunération et atteint 40 % de primo-nominations féminines dans les emplois supérieurs, dans les trois versants de la fonction publique.
Mais le salaire moyen des femmes fonctionnaires reste inférieur de 12 % à celui des hommes, alors qu'elles représentent 62 % des agents publics. C'est inacceptable, car nous avons un devoir d'exemplarité. Mais c'est aussi, et surtout, un enjeu d'attractivité et d'efficacité.
Nous avons travaillé ensemble, dès ma prise de fonction, avec la présidente de la délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale. Nos échanges ont renforcé ma conviction qu'il fallait briser le plafond de verre et réduire les inégalités de rémunération dans l'ensemble de la fonction publique. Je me réjouis que cette proposition de loi reflète ces deux priorités.
Je veux garantir que chaque femme puisse accéder aux plus hauts postes. Ce sont les talents qui fondent les promotions, mais pour combattre des pesanteurs culturelles et sociologiques, nous devons fixer un cap et sanctionner si nécessaire.
C'est pourquoi nous élargissons le champ des employeurs publics concernés, et fixons un objectif de 45 % pour les primo-nominations. Mais il ne faut pas s'en tenir au flux, d'autant que le turnover est plus important pour les femmes. Le Gouvernement souhaitait donc y ajouter une ambition en termes de stock ; je remercie la commission d'y avoir veillé.
Être plus ambitieux, c'est porter une ambition d'égalité salariale dans toute la fonction publique. Il n'était pas normal que l'index d'égalité professionnelle n'existe que dans le privé. Un index est fait pour pointer - pointer les inégalités et les efforts qu'il reste à faire.
Nous préciserons les modalités de cet index par décret. Nous adapterons l'index Pénicaud pour mesurer les écarts de rémunération, mais aussi en matière de promotion et de nomination aux postes les plus influents et les mieux rémunérés. La non-publication ou l'absence de progrès donnera lieu à sanction.
Cet index ne remplace pas les plans d'action. Avec les organisations syndicales, je souhaite que nous négociions un nouvel accord ambitieux.
Je souhaite que ce texte puisse être promulgué dès l'été, raison pour laquelle le Gouvernement a engagé la procédure accélérée.
Je vous proposerai, à travers cinq amendements, quatre évolutions.
Premièrement, pour introduire une obligation de progression par rapport à la situation de départ.
Deuxièmement, pour harmoniser les sanctions sur le stock avec celles en vigueur pour les primo-nominations.
Troisièmement, pour viser 50 % de nominations de femmes dans les emplois à la décision du Gouvernement et dans les cabinets ministériels - je m'y étais engagé le 8 mars dernier.
Enfin, pour que l'index rentre en vigueur le plus vite possible.
Franchissons ensemble cette nouvelle étape attendue par beaucoup de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, du RDPI et du RDSE ; Mme Victoire Jasmin applaudit également.)
Mme Martine Filleul . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Après notre bilan d'application de la loi Sauvadet, avec l'égalité chevillée au corps, nous avons souhaité porter une proposition de loi sur la fonction publique, pilier de notre démocratie, dont les 5,5 millions d'agents, guidés par le sens du devoir, incarnent le pacte républicain sur tout le territoire.
Mais elle est en perte de sens et d'attractivité - on le voit à la baisse du nombre de candidats aux concours. La baisse des moyens alloués aux services publics et du pouvoir d'achat des agents y est pour beaucoup, comme le recours accru aux contractuels.
Valoriser, moderniser, rendre exemplaire le service public est indispensable dans une société fracturée. Exemplaire, il est loin de l'être pour l'égalité salariale - les hommes sont payés 12 % de plus -, ou pour la parité : alors que 62 % des agents publics sont des femmes, les postes de direction sont majoritairement occupés par des hommes.
Le quota Sauvadet de 40 % de femmes fut un progrès, mais le compte n'y est toujours pas : la cible de primo-nominations ne permet pas d'avoir suffisamment de femmes aux postes de direction. Le nombre de postes concernés par la loi Sauvadet reste réduit ; il n'y a pas eu de ruissellement et les sanctions sont trop souvent contournées.
Il faut faire preuve d'intransigeance, en supprimant toute exemption de sanction ; d'ambition, en relevant le quota du sexe sous-représenté à 45 % des primo-nominations et en élargissant le nombre d'emplois concernés ; de cohérence, en instaurant un quota de 40 % du stock ; de rigueur, pour que la fonction publique soit aussi exigeante que le secteur privé en étendant l'index, publié annuellement.
Le groupe socialiste vous proposera d'aller plus vite et plus loin. La parité, ce n'est pas 45 % mais 50 %. Nous devons graver cet objectif dans le marbre. Sur le stock, il faut agir dès 2027, sans attendre 2029.
Nous proposons de dépasser le débat sur le seuil de population - 40 000 ou 20 000 habitants - en se concentrant sur le nombre d'emplois fonctionnels, supérieur ou égal à trois.
Paris, Lille ou d'autres villes ne devraient pas être sanctionnées pour avoir nommé trop de femmes à des postes à responsabilité, alors qu'il y a un déséquilibre majeur au niveau national.
La proposition de loi n'est pas un aboutissement, mais elle s'inscrit dans le sens de l'histoire, du progrès et du féminisme - « ce combat valeureux qui n'a jamais versé de sang » disait Gisèle Halimi. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et UC ; Mme Elsa Schalck et M. Marc Laménie applaudissent également.)
Mme Marie-Claude Varaillas . - Dans leur vie professionnelle, les femmes subissent des contraintes qui les pénalisent et privent le monde du travail de talents. « L'égalité des sexes est plus qu'un objectif en soi. C'est une condition préalable pour relever le défi de la réduction de la pauvreté, de la promotion du développement durable et de la bonne gouvernance », disait Kofi Annan. Si les femmes gagnaient autant que les hommes, le PIB bondirait de 6,9 %, réglant par là même le déficit des retraites...
Les résultats de la politique pour l'égalité sont en demi-teinte. En 2021, le Haut Conseil à l'égalité parlait de politique des petits pas, dénonçant les résistances. De fait, le quota de 40 % de primo-nominations féminines en vigueur depuis 2017 n'a été atteint qu'en 2020.
Dans la fonction publique d'État, 33 % d'emplois supérieurs sont occupés par des femmes - les ministères des affaires étrangères, des armées, de l'économie et des finances ainsi que les services du Premier ministre ont même dû acquitter des pénalités.
Les femmes ne sont que 27 % à diriger un hôpital et 39 % un CHU. Enfin, les progrès dans la fonction publique territoriale ne doivent pas masquer une sous-représentation aux postes de directeur général des services (DGS) et directeur général de service technique (DGST).
Ce texte va dans le bon sens : quota porté de 40 à 45 % pour les primo-nominations - même si la parité, c'est 50 % ; fixation d'un objectif sur le stock ; sanctions financières pour renforcer la portée de l'index.
Notre groupe votera ce texte. Mais n'oublions pas celles qui, en première ligne, ont porté le service public quand le pays était à l'arrêt, et qui ne sont pas reconnues à leur juste valeur - je pense notamment aux secrétaires de mairie, objet d'une proposition de loi de notre groupe qui sera débattue demain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Annick Billon et M. Marc Laménie applaudissent également.)
Mme Dominique Vérien . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Abordons d'emblée le sujet qui fâche : les quotas. En confidence, je ne les aime pas.
M. André Reichardt. - Nous non plus !
Mme Dominique Vérien. - Je préférerais ne pas en avoir besoin.
On m'opposera qu'il y a des femmes aux plus hautes fonctions ; mais comme dirait Audiard, si les poissons volants existent, ils ne sont pas la majorité du genre ! (Sourires)
Souvent, les femmes doutent et n'osent pas revendiquer. Un homme qui brigue une augmentation est audacieux ; une femme, arriviste. Un séminaire a été organisé dernièrement par une association de femmes ingénieures pour apprendre à parler d'argent ! Apprendre à oser demander ce qu'elles estiment mériter, en 2023 ! Il est vrai qu'elles n'ont la liberté d'ouvrir un compte en banque et de travailler sans le consentement de leur mari que depuis 1965...
M. Didier Marie. - Eh oui !
Mme Dominique Vérien. - Dix ans après la loi Sauvadet, le compte n'y est toujours pas. C'est qu'on s'en tient aux primo-nominations : on compte +1 quand une femme est nommée, mais pas -1 quand elle quitte le poste. (M. le ministre opine.)
Dans la fonction publique territoriale, on ne compte que 20 % de femmes DGS, 15 % de femmes DGST. Si la fonction publique hospitalière est féminisée à 75 %, elle ne compte que 27 % de directrices d'hôpital. Le quantitatif ne doit pas occulter le qualitatif.
En rehaussant à 45 % le quota sur les primo-nominations, et surtout en instaurant un quota de 40 % sur les emplois occupés, le texte aura un véritable impact à moyen terme.
La publication d'un index de l'égalité professionnelle objectivera les écarts de rémunération et de représentation. Je sais, monsieur le ministre, que vous souhaitez fixer la sanction par décret. Attention à ce qu'elle reste dissuasive. Il faudrait que ces sanctions soient publiques, pour identifier les administrations concernées.
Ce texte aurait pu être plus ambitieux, comme l'a dit Martine Filleul. Mais je salue le travail de notre rapporteure, qui a su trouver un compromis pour le rendre plus équilibré et plus opérationnel.
Merci, monsieur le ministre, pour votre engagement sincère sur ce sujet et pour votre volontarisme. Le groupe UC votera ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, SER et CRCE, ainsi que sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)
Mme Nathalie Delattre . - (Applaudissements sur les travées du RDSE) La fonction publique, premier employeur de France, se doit d'être exemplaire. Les femmes managers travaillent plus souvent dans le public que dans le privé. Mais si la catégorie A est féminisée à 65 %, la catégorie A+ ne l'est qu'à 42 %, avec un écart de rémunération de 13 %.
Le vivier est donc là, mais il reste encore des réticences à nommer des femmes aux postes les plus prestigieux. Seule la contrainte permet de renverser le statu quo.
La loi Sauvadet a permis un bond de dix points, mais l'évolution est loin d'être linéaire. Au législateur de faire évoluer le droit. Même s'il reste des opposants aux quotas, ces derniers se sont avérés efficaces. L'introduction d'un quota de 40 % dans les emplois supérieurs et de direction est une réelle avancée, d'autant que l'entrée en vigueur en 2029 laisse un temps d'adaptation.
Je serais pour ma part favorable à un relèvement du quota de primo-nominations de 40 % à 50 %.
M. Didier Marie. - Très bien.
Mme Nathalie Delattre. - Avec l'arrondi à l'unité inférieure, le taux de 45 % retenu par la commission aura un effet quasi nul : sur quatre nominations, il suffira de nommer une femme.
Les arguments invoqués me laissent perplexe. Le taux de 50 % serait « contraire à l'intérêt des fonctionnaires, dont les chances de carrière seraient amoindries s'ils ne sont pas du bon sexe » ? C'est précisément le cas des femmes compétentes, dont l'ascension professionnelle est entravée par des stéréotypes de genre. Il n'y a pas plus de femmes incompétentes que d'hommes incompétents.
Pour la fonction publique territoriale, l'application d'un taux de primo-nominations ne devrait pas dépendre de la démographie des communes ou des intercommunalités, mais plutôt du nombre d'emplois fonctionnels.
M. Didier Marie. - Très juste.
Mme Nathalie Delattre. - Enfin, je salue l'introduction de l'index de l'égalité professionnelle, assorti de pénalités financières.
Certes, la loi ne réglera pas tout. Il faut s'inspirer des pays nordiques afin de mieux concilier vie professionnelle et vie privée, en poursuivant l'évolution amorcée lors de la crise sanitaire. La fonction publique a la capacité de le faire, notamment pour les postes à responsabilités.
Je salue le travail des auteures de la proposition de loi. Le RDSE votera ce texte qui apporte une pierre à l'édifice.
Mme Laure Darcos . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La proposition de loi de nos collègues Billon, Filleul et Vérien est l'aboutissement d'un travail approfondi de notre délégation aux droits des femmes.
Dix ans après son entrée en application, le bilan de la loi Sauvadet est contrasté : si le quota de 40 % de primo-nominations a été atteint en 2020 dans les trois fonctions publiques, les femmes ne représentent qu'un tiers des titulaires d'emploi hautement qualifié. Cela résulte d'un biais de la loi Sauvadet, qui a agi sur les flux mais pas sur les stocks.
En outre, le champ ciblé ne comprend que 6 000 postes. Le nombre de femmes à ces emplois progresse lentement, trop lentement, alors que le vivier existe : les femmes sont toujours plus nombreuses dans les grandes écoles.
Devons-nous nous résoudre à cette portion congrue de femmes dans certains emplois, à leur moindre présence dans les emplois les plus prestigieux et les plus techniques ? Les résistances à la nomination de femmes sont une réalité : nous devons en cerner les ressorts pour mieux les combattre.
Soyons lucides, les petits pas ne suffiront pas pour atteindre l'égalité : il faut contraindre. Ainsi, la proposition de loi élargit progressivement les obligations paritaires et incite à une égalité salariale et professionnelle plus ambitieuse. C'est le sens du relèvement du quota de primo-nominations à 45 %, qui s'appliquera en 2025 dans les fonctions publiques d'État et hospitalière, et à compter du prochain renouvellement de l'assemblée délibérante au sein de la fonction publique territoriale.
En outre, au 1er janvier 2029, le taux sur le stock devra atteindre 40 % : même si je ne néglige pas les difficultés de recrutement à venir pour certaines collectivités, c'est une mesure nécessaire pour accélérer l'accès des femmes aux postes à responsabilité.
En outre, assujettir les employeurs publics d'au moins 50 agents à la publication d'un index, avec sanction en cas de résultats insatisfaisants, est bienvenu.
Tandis que loi Copé-Zimmermann et la loi de décembre 2021 sur l'égalité économique et professionnelle auront un impact sensible dans le champ des entreprises, ce texte parachève la loi Sauvadet.
Mesurons tout le chemin parcouru dans un temps relativement court : le plafond de verre disparaît peu à peu, ce qui permet aux femmes de mettre en évidence leur rôle indispensable à la bonne marche des administrations publiques. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe SER ; Mme Annick Billon applaudit également.)
M. Pierre Médevielle . - Cette proposition de loi est le fruit des travaux menés l'année dernière par la délégation aux droits des femmes pour les dix ans de la loi Sauvadet.
Cette dernière a imposé une proportion minimale de femmes pour les primo-nominations sur un stock de 6 000 emplois supérieurs, avec un calendrier échelonné : 20 % en 2013 et 40 % depuis 2017, sous peine de pénalités financières, à hauteur de 90 000 euros par unité manquante.
Cependant, des différences notables persistent entre les versants et les cadres d'emploi.
La proposition de loi de Mmes Billon, Filleul et Vérien a pour objet d'accélérer la féminisation : elle systématise les pénalités en cas de non-respect de l'obligation de nominations équilibrées, relève le quota de primo-nominations à 45 %, élargit le périmètre des emplois concernés et instaure un index de l'égalité professionnelle.
Les apports de la commission vont dans le bon sens ; je me réjouis qu'ils aient reçu l'accord des auteures de la proposition de loi.
Je remercie la délégation aux droits des femmes d'avoir montré le chemin parcouru et les efforts restant à accomplir. Le groupe INDEP votera ce texte, qui permettra de franchir une nouvelle étape. (Mme Annick Billon applaudit.)
Mme Mélanie Vogel . - On peut tourner les choses comme on voudra : l'égalité entre les genres est loin d'être atteinte. Il n'y a que 3 femmes pour 65 hommes à la tête des entreprises du CAC 40, les secteurs à prédominance féminine sont sous-valorisés et seulement un tiers des postes publics à responsabilité sont occupés par des femmes, une proportion similaire à celle des femmes sénateurs - même si, cette après-midi, elle est inversée...
La situation s'améliorerait, nous dit-on : avant la loi Sauvadet, seuls 25 % des postes publics à responsabilité étaient occupés par des femmes. Ce raisonnement vicié n'aboutira jamais à l'égalité. Est-il juste de laisser perdurer une situation d'inégalité ? Jamais ! La loi Sauvadet n'est pas suffisante : il faut donc changer la loi.
Le GEST votera ce texte qui va dans le bon sens. Je salue l'élargissement opéré par la rapporteure. En revanche, la commission a abaissé le taux de primo-nominations de 50 à 45 %. Pour nous, seule la parité est envisageable : pourquoi se contenter de juste un peu moins ?
Par ailleurs, nous nous opposons à tout délai supplémentaire dans l'application des nouvelles règles.
Enfin, les inégalités salariales doivent être envisagées de façon holistique : il faut considérer les inégalités entre postes de même valeur dans les secteurs à prédominance masculine et à prédominance féminine, comme au Canada, où les femmes lésées, notamment les infirmières, ont été remboursées par l'État. Oui, l'État a une dette envers les femmes : faute d'action, elles pourraient bien en réclamer le remboursement ! (Applaudissements à gauche)
M. Didier Marie. - Très bien !
Mme Nicole Duranton . - Attachée au principe constitutionnel de parité, j'ai cosigné cette proposition de loi.
Nous voulons changer ce qu'il y a de plus profond et durable dans l'État : le caractère très masculin de la haute fonction publique.
Ce texte renforce les obligations et les sanctions au sein du secteur public. Alors que 63 % des agents publics sont des femmes, celles-ci n'occupent que 41 % des emplois de direction, 35 % dans les ministères traditionnellement masculins. Elles ne représentent que 25 % des directeurs d'hôpital et 20 % des directeurs généraux des services. Leur rémunération est de 11 % inférieure à celle de leurs homologues masculins.
Beaucoup a été fait, avec le plan pluriannuel d'action pour la mobilité en 2019. Le quota de 40 % a été atteint en 2020. Nous devons poursuivre les efforts.
La Première ministre a présenté un nouveau plan pour l'égalité : je salue le haut niveau d'ambition du Gouvernement, notamment pour faciliter la vie des femmes fonctionnaires.
Le RDPI accueille favorablement les apports de la commission, cohérents avec le plan interministériel.
En octobre 2021, lors de l'examen de la proposition de loi accélérant l'égalité économique et professionnelle, notre groupe avait proposé des indicateurs annuels, alors refusés par la commission des affaires sociales. Nous nous réjouissons de la reprise de cette mesure dans le texte.
Nous défendrons par voie d'amendement l'application du taux de 45 % dans certains territoires oubliés par la commission, un renforcement de la publication des écarts et l'alignement des seuils de population pour les collectivités territoriales sur celui applicable à l'index professionnel dans les entreprises.
Mme Elsa Schalck . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Annick Billon applaudit également.) L'égalité femmes-hommes est un enjeu collectif majeur, qui renvoie à notre devise républicaine.
Malgré des avancées significatives, la situation des femmes reste plus fragile : temps partiel, plafond de verre, carrières hachées, inégalités salariales.
Dix ans après la loi Sauvadet, nous examinons un texte relatif à la fonction publique, premier employeur de France et qui compte 63 % de femmes en son sein. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : la proportion de femmes dans les postes à responsabilité a augmenté de façon notable et le quota de 40 % est atteint depuis 2020.
La délégation aux droits des femmes a formulé des recommandations, dont ce texte est le fruit. J'en remercie les trois auteurs, ainsi que la rapporteure. Le texte est équilibré, applicable et réaliste pour les collectivités territoriales. Le taux de 45 % de primo-nominations est un compromis qui laissera aux administrations le temps de s'adapter. De même, le maintien du seuil de 40 000 habitants évitera d'accentuer les difficultés des collectivités territoriales.
Pour objectiver les écarts de salaire, l'utilisation de l'index de l'égalité professionnelle, en usage dans le secteur privé depuis 2019, est bienvenue. Attention, toutefois : les index sont un outil, ils ne font pas une politique. (M. André Reichardt abonde.)
Nous devons aussi accompagner les femmes dans leurs parcours de carrière et améliorer leur orientation. Les doutes sur leur propre légitimité restent encore ancrés chez trop de femmes. De ce point de vue, il faut agir dès le plus jeune âge.
Pour conclure, je tiens à souligner que, si la loi permet des avancées, nos territoires aussi sont à l'origine de belles initiatives, comme les Marianne de la parité décernées par l'association Femmes d'Alsace : les communautés de communes du Ried de Marckolsheim, de Niederbronn-les-Bains et de Sélestat ont ainsi été primées. C'est ainsi que nous avancerons ! (Applaudissements)
Discussion des articles
ARTICLE 1er
Mme le président. - Amendement n°2, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge et M. Salmon.
Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
Mme Mélanie Vogel. - Je serai rapide dans la présentation de nos amendements, car nous tenons à ce que la proposition de loi soit adoptée...
Supprimons tout délai d'entrée en vigueur : la loi doit s'appliquer le plus rapidement possible.
Mme le président. - Amendement identique n°15 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Cabanel, Corbisez, Fialaire et Gold, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et M. Requier.
Mme Nathalie Delattre. - Le rapport de la délégation aux droits des femmes relève que les employeurs préfèrent payer des pénalités plutôt que de recruter des femmes. Le relèvement du taux de primo-nominations à 45 % en 2025 ne changera pas la donne, puisqu'une unité pour quatre nominations suffit à remplir le critère. Pour que les choses changent, il faut supprimer rapidement la possibilité d'une dispense de pénalité.
Mme Françoise Dumont, rapporteure. - La commission considère qu'il ne serait pas juste de pénaliser un employeur dès lors qu'au moins 40 % du stock de postes sont occupés par des femmes et qu'aucune autre obligation n'est prévue. Avis défavorable.
M. Stanislas Guerini, ministre. - Avis défavorable également. Il faut respecter les équilibres trouvés par la commission sur les dates et les niveaux d'ambition. Au-delà de cette position de principe, la principale avancée du texte est l'objectif de stock : ne l'opposons pas à un objectif temporaire de flux, qui pourrait conduire à privilégier des rotations à la féminisation du stock.
M. Didier Marie. - Nous voterons ces deux amendements, car reporter l'application du texte à 2029 n'est pas souhaitable.
Les amendements identiques nos2 et 15 rectifié ne sont pas adoptés.
L'article 1er est adopté.
ARTICLE 2
Mme le président. - Amendement n°17 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Cabanel, Corbisez et Gold, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et M. Requier.
Rédiger ainsi cet article :
L'article L. 132-5 du code général de la fonction publique est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « au moins 40 % » sont remplacés par le taux : « 50 % » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Si les emplois assujettis à l'obligation prévue au présent article sont occupés par moins de 40 % de personnes de chaque sexe, ou si l'objectif tendant à ce que les emplois assujettis à l'obligation prévue au présent article soient occupés par au moins 40 % de personnes de chaque sexe n'est pas atteint dans l'ensemble de la fonction publique au niveau national, les nominations peuvent concerner 50 à 60 % de personnes du sexe sous-représenté. »
Mme Nathalie Delattre. - Nous proposons de rétablir le taux de 50 % qui figurait dans la rédaction initiale du texte. Les 45 % arrondis à l'unité inférieure ne nous feront pas franchir un cap par rapport au droit actuel. L'amendement rétablit aussi la possibilité de rattrapage, avec un quota de 50 à 60 % si le taux de 40 % sur le stock n'est pas respecté.
Mme le président. - Amendement n°16 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Cabanel, Corbisez, Fialaire et Gold, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et M. Requier.
Rédiger ainsi cet article :
Au premier alinéa de l'article L. 132-5 du code général de la fonction publique, les mots : « au moins 40 % » sont remplacés par le taux : « 50 % ».
Mme Nathalie Delattre. - Amendement de repli : il est défendu.
Mme Françoise Dumont, rapporteure. - La commission estime que le taux de 50 % poserait des difficultés d'application et serait contre-productif. Le relèvement à 45 % permet de nommer 55 % de femmes ou d'hommes. Avis défavorable.
M. Stanislas Guerini, ministre. - Même avis.
L'amendement n°17 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°16 rectifié.
Mme le président. - Amendement n°1, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge et M. Salmon.
Alinéa 1
Remplacer le taux :
45 %
par le taux :
50 %
Mme Mélanie Vogel. - On nous explique que les 50 % seraient difficiles à appliquer en cas de nombre impair, mais le code général de la fonction publique prévoit déjà ce cas de figure ; il n'y a donc aucune difficulté d'application.
Et le taux de 50 % serait contre-productif pour les femmes ? Soyons sérieux ! Dites que vous ne voulez pas des 50 %, mais ne prétendez pas protéger les femmes.
Mme le président. - Amendement n°6, présenté par Mme M. Filleul et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
I. - Alinéa 1
Remplacer le taux :
45 %
par le taux :
50 %
II. - Alinéa 2
Remplacer l'année :
2025
par l'année :
2027
Mme Martine Filleul. - Depuis 2017, les chiffres stagnent. Il faut changer de braquet. Un taux de primo-nomination faible implique un renouvellement du stock qui l'est aussi. Optons pour les 50 %, applicables en 2027.
Mme le président. - Amendement n°7, présenté par Mme M. Filleul et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
I. - Alinéa 1
Remplacer le taux :
45 %
par le taux
50 %
II. - Alinéa 2
Remplacer l'année :
2025
par l'année :
2029
Mme Martine Filleul. - Amendement de repli, qui prévoit une application en 2029.
Mme le président. - Amendement n°8, présenté par M. Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
I. - Alinéa 2
Remplacer les mots :
aux 1°, 2°, 3° et 5° de
par le mot :
à
II. - Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
M. Didier Marie. - La fonction publique territoriale serait exclue du relèvement du taux de primo-nominations en 2025. Nous considérons que cette mesure doit concerner les trois versants de la fonction publique en 2025.
Mme le président. - Amendement n°26 rectifié ter, présenté par le Gouvernement.
I. - Alinéa 2
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Par dérogation, les employeurs mentionnés aux mêmes 1°, 2°, 3° et 5° pour lesquels les nominations ont concerné moins de 40 % de personnes de chaque sexe en moyenne au titre des années 2020 à 2022 sont soumis d'une part, dès l'entrée en vigueur de la présente loi et jusqu'au 1er janvier 2025, à une obligation de progression de ce taux de trois points, et d'autre part, à compter du 1er janvier 2025, à une obligation de progression de ce même taux de trois points tous les trois ans, jusqu'à ce que le taux mentionné au premier alinéa de l'article L. 132-5 du même code, dans sa rédaction résultant du I du présent article, soit atteint.
II. - Alinéa 3
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Par dérogation, les employeurs mentionnés au même 4° pour lesquels les nominations ont concerné moins de 40 % de personnes de chaque sexe en moyenne au titre des années 2020 à 2022 sont soumis d'une part, dès l'entrée en vigueur de la présente loi et jusqu'au 1er janvier 2025, à une obligation de progression de ce taux de trois points, et d'autre part, à compter du 1er janvier 2025, à une obligation de progression de ce même taux de trois points tous les trois ans, jusqu'à ce que le taux mentionné au premier alinéa de l'article L. 132-5 du même code, dans sa rédaction résultant du I du présent article, soit atteint.
M. Stanislas Guerini, ministre. - Il faut un dispositif efficace, notamment pour les collectivités qui partent de plus bas. Nous proposons une première obligation en 2025 : une évolution de plus 3 points pour ceux qui partent de plus bas. Ainsi nous tiendrons compte de la réalité des nominations. Voyez dans les ministères sociaux : 61 % de femmes primo-nommées en 2020 ! Adoptons un dispositif proportionné, donc efficace.
Mme le président. - Amendement n°21, présenté par Mmes Duranton, Cazebonne et Havet, MM. Patriat, Mohamed Soilihi, Richard, Théophile, Bargeton, Buis, Dagbert, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne, Lévrier, Marchand et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch et Mme Schillinger.
Alinéa 3
Après le mot :
délibérantes
insérer les mots :
des régions, des départements,
Mme Nicole Duranton. - Cet article prévoit que le nouveau taux entrera en vigueur dans la fonction publique territoriale au prochain renouvellement général des instances délibérantes. Nous nous réjouissons qu'on laisse aux collectivités territoriales le temps de s'adapter aux nouvelles exigences. Cependant, aucune disposition n'est prévue pour les départements et les régions, dont les assemblées délibérantes seront renouvelées en 2027. L'amendement répare cet oubli.
Mme Françoise Dumont, rapporteure. - Avis défavorable aux amendements nos1, 6, 7 et 8. Avis favorable à l'amendement n°21, un complément utile, et à l'amendement n°26 rectifié ter du Gouvernement, une souplesse bienvenue.
M. Stanislas Guerini, ministre. - Mêmes avis.
L'amendement n°1 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos6, 7 et 8.
L'amendement n°26 rectifié ter est adopté, de même que l'amendement n°21.
Mme le président. - Amendement n°5, présenté par M. Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
.... - Si les emplois assujettis à l'obligation prévue au I sont occupés par moins de 40 % de personnes de chaque sexe, ou si l'objectif tendant à ce que les emplois assujettis à la même obligation soient occupés par au moins 40 % de personnes de chaque sexe n'est pas atteint dans l'ensemble de la fonction publique au niveau national, les nominations peuvent concerner 50 à 60 % de personnes du sexe sous-représenté.
M. Didier Marie. - Nous voulons éviter que les villes qui ont été les plus ambitieuses dans le recrutement de femmes fassent l'objet de sanctions, comme cela s'est produit, dès lors que l'objectif de 40 % n'est pas atteint à l'échelle de la fonction publique dans son ensemble. Évitons de pénaliser les employeurs les plus volontaristes.
Mme Françoise Dumont, rapporteure. - Je me suis déjà exprimée sur ce point à propos des amendements nos16 et 17 : avis défavorable.
M. Stanislas Guerini, ministre. - Sagesse.
L'amendement n°5 n'est pas adopté.
Mme le président. - Amendement n°25 rectifié, présenté par le Gouvernement.
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
.... - Le taux mentionné au premier alinéa de l'article L. 132-5 du code général de la fonction publique est porté à 50 % pour les emplois à la décision du Gouvernement et les emplois des cabinets ministériels, dont la liste est définie par décret. Le nombre de personnes de chaque sexe devant être nommées en application de cette règle est arrondi à l'unité inférieure. Le respect de cette obligation est apprécié pour une période fixée par décret. Les dispositions de l'article L. 132-8 ne sont pas applicables en cas de non-respect de l'obligation prévue par le présent alinéa.
M. Stanislas Guerini, ministre. - Pour les emplois au sein des cabinets ministériels, le vivier est de 311 emplois. Fixons-nous un objectif de parité parfaite pour les emplois à la décision du Gouvernement et inscrivons-le dans la loi. C'est un engagement du Gouvernement, qui entend être exemplaire.
Mme Françoise Dumont, rapporteure. - Je comprends l'intention d'exemplarité, mais je maintiens mes réserves sur le taux de 50 %, qui présente des difficultés intrinsèques. Sagesse.
L'amendement n°25 rectifié n'est pas adopté.
L'article 2, modifié, est adopté.
ARTICLE 3
Mme le président. - Amendement n°9, présenté par M. Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Après l'alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
...° Au 4° , les mots : « de plus de 40 000 habitants » sont remplacés par les mots : « disposant d'un nombre d'emplois fonctionnels créés par leur organe délibérant supérieur ou égal à trois » ;
M. Didier Marie. - Nous voulons exprimer le seuil pour les collectivités territoriales en nombre d'emplois fonctionnels, pour éviter des seuils démographiques qui ne font pas consensus.
Mme le président. - Amendement identique n°18 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Cabanel, Corbisez et Gold, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et M. Requier.
Mme Nathalie Delattre. - Défendu.
Mme Françoise Dumont, rapporteure. - Je comprends le souhait de simplification, mais ce n'est pas opérationnel. En outre, ce critère ne permet pas de s'assurer que les emplois soient de catégorie A+. De plus, nous risquons de rendre les collectivités territoriales réticentes à créer des emplois fonctionnels élevés. Avis défavorable.
M. Stanislas Guerini, ministre. - Je souscris à l'analyse, mais je pense qu'il vaut mieux s'en tenir à la rédaction initiale, plus robuste juridiquement, car fondée sur des données objectives établies par l'Insee. Avis défavorable.
Les amendements identiques nos9 et 18 rectifié ne sont pas adoptés.
Mme le président. - Amendement n°11, présenté par M. Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Après l'alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
...° À l'avant dernier alinéa, le mot : « inférieure » est remplacé par le mot : « supérieure ».
M. Didier Marie. - Nous proposons d'opter pour l'arrondi supérieur, plutôt que l'arrondi inférieur. Quand quatre personnes sont concernées, ce sera une femme contre trois hommes : ce n'est pas ainsi qu'on avancera. (Mme Nathalie Delattre abonde.)
Mme Françoise Dumont, rapporteure. - Les effets d'une telle règle seraient variables. La combinaison du taux de 45 % avec l'arrondi supérieur pour la fonction publique territoriale équivaudrait à 50 %, sans aucune marge de manoeuvre possible. Ce taux irait de 47 à 50 % pour les autres fonctions publiques. Nous avons envisagé le passage à la règle de l'arrondi supérieur avec 40 %, mais le maintien du taux de 45 % avec arrondi inférieur reste l'option la plus lisible et la plus efficace. Avis défavorable.
M. Stanislas Guerini, ministre. - Quelle précision ! Même avis.
L'amendement n°11 n'est pas adopté.
Mme le président. - Amendement n°19 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Cabanel, Corbisez, Fialaire et Gold, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et M. Requier.
Après l'alinéa 3
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
...° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque la création ou la modification du périmètre d'une commune ou d'un établissement public de coopération intercommunale conduit, de ce seul fait, la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale à franchir le seuil fixé au 4° du présent article, la présente obligation ne s'applique à l'autorité territoriale concernée qu'à échéance d'une durée de deux ans à compter de la date à laquelle le transfert des compétences résultant de la création ou de la modification de périmètre a pris effet. »
Mme Nathalie Delattre. - Communes nouvelles, fusions d'intercommunalités et extension d'un périmètre intercommunal ont de lourdes conséquences. Il faut plus de souplesse pour permettre aux collectivités territoriales concernées de se mettre en conformité.
Mme Françoise Dumont, rapporteure. - Je comprends l'intention, mais cette disposition n'est pas nécessaire. Le seuil d'application des nominations équilibrées n'est pas modifié, et le droit existant offre de la souplesse : des délais dérogatoires de six mois sont prévus. La population moyenne des communes nouvelles est de 3 500 habitants, très peu seront donc concernées - seules 36 communes nouvelles dépassent 10 000 habitants. Les regroupements se font souvent autour d'une commune importante, déjà soumise aux règles. Avis défavorable.
M. Stanislas Guerini, ministre. - Demande de retrait ou avis défavorable. Le droit satisfait votre amendement.
L'amendement n°19 rectifié est retiré.
L'article 3 est adopté.
APRÈS L'ARTICLE 3
Mme le président. - Amendement n°14, présenté par M. Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Après l'article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 132-8 du code général de la fonction publique est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque cette contribution est due, elle est rendue publique sur le site internet du ministère chargé de la fonction publique, dans des conditions déterminées par décret. »
M. Didier Marie. - La sanction financière étant parfois contournée, nous proposons de la rendre publique. En la matière, la discrétion n'est pas la bienvenue.
Mme Françoise Dumont, rapporteure. - La contribution financière est retracée dans le bilan des nominations équilibrées établi par la direction générale de l'administration et de la fonction publique. La publicité des sanctions est déjà prévue par décret, inutile de la prévoir dans la loi. Demande de retrait ou avis défavorable. Il faudrait néanmoins réduire le décalage entre nominations et bilan, actuellement de deux ans.
M. Stanislas Guerini, ministre. - Demande de retrait, car satisfait. Mais j'entends rendre le dispositif plus opérant : deux ans de décalage, c'est trop. Je veux un droit performatif et prends l'engagement que, dès l'année prochaine, le bilan portera sur les nominations de l'année précédente. (Mme Mélanie Vogel s'en félicite.)
M. Didier Marie. - Je prends acte de cet engagement ; nous veillerons à ce qu'il soit respecté. Je retire cet amendement.
L'amendement n°14 est retiré.
ARTICLE 3 BIS
Mme le président. - Amendement n°28, présenté par le Gouvernement.
Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Le montant de la pénalité est fixé en tenant compte de la situation initiale s'agissant de la représentation des femmes et des hommes dans le département ministériel, la collectivité territoriale, l'établissement public de coopération intercommunale ou l'établissement mentionné à l'article L. 5, des efforts constatés en la matière ainsi que des motifs du non-respect du taux fixé. La pénalité ne peut dépasser un montant forfaitaire fixé par décret.
M. Stanislas Guerini, ministre. - Nous voulons harmoniser le dispositif de sanctions dans les trois cas possibles : non-respect du taux sur le flux, non-respect du taux sur le stock et non-publication de l'index. Une sanction forfaitaire, de 90 000 euros par unité manquante, serait plus opérationnelle.
Mme Françoise Dumont, rapporteure. - Pour la commission, 1 % de la rémunération brute annuelle globale est un plafond. Le montant peut être modulé en fonction de la situation de chaque administration. Ce plafond est suffisamment dissuasif et correspond aux dispositions de la loi Rixain qui s'appliquent au secteur privé. De plus, la rédaction du Gouvernement affaiblit le caractère dissuasif de la sanction. Avis défavorable.
M. Stanislas Guerini, ministre. - Nous proposons un dispositif de sanction forfaitaire en cas de non-publication de l'index. Ensuite, en cas de non-évolution de situations défaillantes, la sanction peut atteindre 1 % de la masse salariale. Ainsi, nous nous calquons sur le privé. (Mme Annick Billon acquiesce.)
L'amendement n°28 n'est pas adopté.
Mme le président. - Amendement n°13, présenté par M. Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Après l'alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque la pénalité financière est appliquée, elle fait l'objet d'une publication sur le site internet du ministère chargé de la fonction publique, dans des conditions déterminées par décret.
M. Didier Marie. - Nous proposons de rendre publique la pénalité financière. À moins que le Gouvernement ne s'y engage...
Mme le président. - Sous-amendement n°30 à l'amendement n°13 de M. Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge et M. Salmon.
Alinéa 3
Après le mot :
publication
insérer les mots :
au plus tard trois mois après cette application
Mme Mélanie Vogel. - Merci à nos collègues du groupe SER pour cet amendement. Nous ajoutons un délai de publication, pour éviter un trop grand décalage entre la faute et la publication.
Mme Françoise Dumont, rapporteure. - Des publications sont déjà prévues, aux articles 4 et 3 bis, mais elles ne concernent pas les sanctions. Avis favorable à l'amendement n°13 et au sous-amendement n°30. (On s'en félicite à gauche.)
M. Stanislas Guerini, ministre. - Même avis. L'engagement est pris, nous pouvons l'inscrire dans la loi.
Le sous-amendement n°30 est adopté.
L'amendement n°13, sous-amendé, est adopté.
Mme le président. - Amendement n°10, présenté par Mme M. Filleul et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Alinéa 6
Remplacer l'année :
2029
par l'année :
2027
Mme Martine Filleul. - Nous ne pouvons attendre 2029. Nous proposons une application en 2027, à titre de compromis.
Mme Françoise Dumont, rapporteure. - La féminisation des nominations est progressive, et plus encore celle de l'occupation des emplois. L'échéance de 2029 laissera aux acteurs le temps de s'adapter.
Je rappelle que, dans le secteur privé, plus de sept ans ont été laissés aux entreprises de plus de 1 000 salariés pour se conformer à l'obligation de 40 %. Avancer la date à 2027 ne me paraît pas pertinent. Avis défavorable.
M. Stanislas Guerini, ministre. - Je souhaite respecter l'équilibre du texte adopté par la commission : même avis.
L'amendement n°10 n'est pas adopté.
Mme le président. - Amendement n°27 rectifié quater, présenté par le Gouvernement.
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Par dérogation, les employeurs mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 132-5 du code général de fonction publique pour lesquels les emplois sont occupés par moins de 37 % de personnes de chaque sexe en moyenne au titre des années 2020 à 2022 sont soumis d'une part, dès l'entrée en vigueur de la présente loi et jusqu'au 1er janvier 2029, à une obligation de progression de ce taux de trois points, et d'autre part, à compter du 1er janvier 2029, à une obligation de progression de ce même taux de trois points tous les trois ans, jusqu'à ce que le taux mentionné au premier alinéa de l'article L. 132-9-1 du même code, dans sa rédaction résultant du I du présent article, soit atteint.
M. Stanislas Guerini, ministre. - Nous voulons fixer des marches progressives, sans rien renier à l'objectif.
Mme Françoise Dumont, rapporteure. - Cet amendement accorde un peu plus de temps aux employeurs publics : la progression devrait être de 3 points tous les trois ans à compter de 2029, jusqu'à ce que le taux de 40 % soit atteint. Cette proposition est bienvenue. Avis favorable.
L'amendement n°27 rectifié quater est adopté.
L'article 3 bis, modifié, est adopté.
ARTICLE 4
Mme le président. - Amendement n°24 rectifié, présenté par le Gouvernement.
I. - Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Index égalité professionnelle »
II. - Alinéa 4
1° Première phrase
Remplacer les mots :
l'ensemble des indicateurs relatifs aux écarts de rémunération entre les femmes et les hommes ainsi qu'aux actions mises en oeuvre pour les supprimer, selon des modalités et une méthodologie définies par décret
par les mots :
des indicateurs relatifs aux écarts de rémunération entre les femmes et les hommes et à leurs situations respectives définis par la voie règlementaire
2° Seconde phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Ces indicateurs sont rendus publics sur le site internet de l'employeur ainsi que sur le portail du ministère chargé de la fonction publique.
III. - Alinéa 5
1° Après le mot :
intéressé,
insérer les mots :
par l'établissement public de l'État,
2° Remplacer les mots :
gestion mentionné à l'article L 453-1
par les mots :
la fonction publique territoriale ou par l'établissement public mentionné à l'article L. 5
IV. - Alinéa 6
Rédiger ainsi cet alinéa :
« En cas de non-respect de l'obligation de publication, une contribution forfaitaire est due.
IV. - Alinéa 7
Supprimer cet alinéa.
V. - Alinéa 8
Remplacer les mots :
décret, des objectifs de progression de chacun de ces indicateurs sont fixés et publiés dans des conditions définies par décret
par les mots :
voie réglementaire, l'employeur adopte et publie des mesures correctrices
VI. - Alinéas 10 et 11
Supprimer ces alinéas.
VII. - Alinéa 12
Remplacer les mots :
le 1er juin 2024
par les mots :
au plus tard le 31 décembre 2023
VIII. - Alinéa 13
Remplacer les mots :
le 1er juin 2025
par les mots :
au plus tard le 31 décembre 2024
M. Stanislas Guerini, ministre. - Je salue l'introduction de l'index dans la proposition de loi : cela représentera un pas important pour la fonction publique. Cet amendement renomme l'index en index de l'égalité professionnelle, afin d'adopter une approche plus large, mesurant les inégalités salariales, mais aussi les inégalités de nomination et la présence des femmes dans les postes à plus forte influence ou rémunération ; il précise ensuite la référence au CNFPT pour la FPT, et ajoute les établissements de la FPH ; enfin, il accélère la publication de l'index, à la fin de l'année pour la FPE - pour la FPT et la FPH, nous souhaitons favoriser une publication le 31 décembre 2024, au plus tard. Ces échéances sont issues du dialogue avec l'ensemble des employeurs territoriaux et hospitaliers.
Mme le président. - Amendement n°29, présenté par Mme Dumont, au nom de la commission.
Alinéa 5
I. - Après le mot :
ministériel
insérer les mots :
ou par l'établissement public de l'État
II. - Après le mot :
concerné
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
, par le Centre national de la fonction publique territoriale ainsi que par l'établissement public concerné mentionné à l'article L. 5.
Mme Françoise Dumont, rapporteure. - Nous complétons la liste des employeurs publics redevables de la pénalité en cas de non-publication. Pour la FPH, les établissements seraient responsables, et non le centre national de gestion.
Mme le président. - Amendement n°4, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge et M. Salmon.
Alinéas 12 et 13
Supprimer ces alinéas.
Mme Mélanie Vogel. - Je salue l'extension de l'index. Nous proposons que celui-ci s'applique au moment de l'entrée en vigueur de la loi, et non plus tard.
Mme Françoise Dumont, rapporteure. - L'amendement n°24 rectifié du Gouvernement apporte de nombreuses modifications : certaines sont bienvenues, d'autres sont rédactionnelles. J'estime que quelques-unes sont inopportunes : la suppression du non-cumul entre les sanctions pour non-publication de l'index et non-élaboration du plan ne paraît pas justifiée. En outre, les dates proposées ne me semblent pas opérationnelles. Avis défavorable à l'amendement du Gouvernement, au profit de l'amendement de la commission.
Il convient de supprimer le plus rapidement possible les écarts salariaux, mais l'amendement n°4 ne semble pas adapté. La base de données sociales suppose une entrée en vigueur différenciée pour la FPT et la FPH.
M. Stanislas Guerini, ministre. - Même avis que la rapporteure sur l'amendement n°4. Je partage certaines dispositions de l'amendement n°29, mais je plaide en faveur de l'adoption de l'amendement n°24 rectifié du Gouvernement, plus complet et conforme à nos discussions avec les employeurs publics.
L'amendement n°24 rectifié n'est pas adopté.
L'amendement n°29 est adopté.
L'amendement n°4 n'est pas adopté.
Mme le président. - Amendement n°20 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Cabanel, Corbisez et Gold, Mme Guillotin, M. Guiol et Mme Pantel.
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
.... - Lorsque la création ou la modification du périmètre d'une commune ou d'un établissement public de coopération intercommunale conduit, de ce seul fait, la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale à franchir le seuil fixé au présent article, les obligations prévues aux I et II ne s'appliquent à l'autorité territoriale concernée qu'à échéance d'une durée de deux ans à compter de la date à laquelle le transfert des compétences résultant de la création ou de la modification de périmètre a pris effet.
Mme Nathalie Delattre. - La création de l'index est cohérente avec les obligations prévues pour le secteur privé. Toutefois, tenons compte des difficultés d'application en cas de création ou de modification du périmètre d'une commune ou d'un EPCI qui entraîne le franchissement du seuil de 40 000 habitants. Nous proposons un délai de deux ans.
Mme Françoise Dumont, rapporteure. - De même que l'amendement n°19 rectifié, l'amendement n°20 rectifié prévoit une disposition transitoire. En plus des arguments déjà exposés, je veux rappeler que les collectivités territoriales sont tenues d'élaborer un rapport social unique, indépendamment de leur nombre d'habitants. De plus, les collectivités territoriales de plus de 40 000 habitants doivent préparer un plan pluriannuel d'action en faveur de l'égalité entre les hommes et les femmes. Avis défavorable.
M. Stanislas Guerini, ministre. - Même avis.
L'amendement n°20 rectifié n'est pas adopté.
L'article 4, modifié, est adopté.
APRÈS L'ARTICLE 4
Mme le président. - Amendement n°22 rectifié, présenté par Mmes Duranton, Cazebonne et Havet, MM. Patriat, Mohamed Soilihi, Richard, Théophile, Bargeton, Buis, Dagbert, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne, Lévrier, Marchand et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch et Mme Schillinger.
Après l'article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 132-9 du code général de la fonction publique, il est inséré un article L. 132-9-... ainsi rédigé :
« Art. L. 132-9-.... - Les employeurs mentionnés à l'article L. 132-6 publient chaque année les écarts éventuels de représentation entre les femmes et les hommes au sein des emplois assujettis à l'obligation prévue à l'article L. 132-5. Ces écarts de représentation sont rendus publics sur le site internet de l'employeur ainsi que sur le portail du ministère chargé de la fonction publique, dans des conditions déterminées par décret.
« Le non-respect de la publication mentionnée au premier alinéa du présent article peut être sanctionné par une pénalité égale au montant unitaire mentionné à l'article L. 132-8. »
Mme Nicole Duranton. - Je le retire, l'amendement n 24 du Gouvernement ayant été rejeté.
L'amendement n°22 rectifié est retiré.
Mme le président. - Amendement n°23, présenté par Mmes Duranton, Cazebonne et Havet, MM. Patriat, Mohamed Soilihi, Richard, Théophile, Bargeton, Buis, Dagbert, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne, Lévrier, Marchand et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch et Mme Schillinger.
Après l'article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À l'article L. 716-1 du code général de la fonction publique, les deux occurrences du nombre : « 80 000 » sont remplacées par le nombre : « 40 000 ».
Mme Nicole Duranton. - Dans un souci de cohérence, d'harmonisation et de lisibilité, nous proposons de réduire le seuil de publication de la somme des dix rémunérations les plus élevées à 40 000 habitants, pour l'aligner sur l'index de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
Mme Françoise Dumont, rapporteure. - Avis favorable : la coordination est bienvenue.
M. Stanislas Guerini, ministre. - Même avis.
L'amendement n°23 est adopté et devient un article additionnel.
Mme le président. - Amendement n°12, présenté par M. Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Après l'article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement avant le 1er janvier 2028 un rapport sur l'application de la présente loi, détaillant l'efficience de chacune de ses mesures.
M. Didier Marie. - Nous aurions souhaité plus d'ambition pour ce texte. Malheureusement, nos amendements n'ont pas été adoptés - sauf un. Je sais que le Sénat n'est pas friand des rapports. Toutefois, compte tenu de l'objectif, nous souhaitons que le Gouvernement présente un rapport sur les avancées relatives à la parité.
Mme Françoise Dumont, rapporteure. - Il importe de veiller à la bonne application des lois. Mais de telles publications sont déjà prévues : écarts de rémunération entre les hommes et les femmes, obligation de nominations équilibrées, notamment. Ne prévoyons pas le suivi des instruments de suivi !
De plus, la date n'est pas pertinente. Avis défavorable.
M. Stanislas Guerini, ministre. - Je souscris à l'analyse de la rapporteure : de nombreux documents sont déjà prévus par la loi, dont le rapport sur l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique. J'ai pris beaucoup d'engagements auprès du sénateur Marie... En voici un autre : je serais très heureux de présenter ces rapports chaque année devant la délégation aux droits des femmes.
Mme Annick Billon. - Très bien !
M. Didier Marie. - Nos amendements ne sont pas sans intérêt, puisqu'ils nous font obtenir du ministre de multiples engagements ! (Sourires)
L'amendement n°12 est retiré.
Interventions sur l'ensemble
Mme Annick Billon . - Je remercie la rapporteure et le ministre pour ce travail de coconstruction avec les auteures du texte. Même si de nombreux sénateurs ne sont pas favorables aux quotas et aux seuils, sans quotas, on recule. Il est important de cranter les étapes.
Nous serons sans doute conduits à légiférer à nouveau dans ce domaine ; je remercie le groupe UC d'avoir inscrit ce texte dans son ordre du jour réservé.
Ce texte nous permet de franchir un pas supplémentaire ; mon groupe votera cette proposition de loi. Merci à Martine Filleul et à Dominique Vérien pour leur travail à l'occasion des dix ans de la loi Sauvadet. (Mme Victoire Jasmin applaudit.)
M. André Reichardt . - Je rends hommage au travail d'amélioration de la commission.
Malgré cela, je m'abstiendrai : comme je le dis depuis de longues années, je n'aime pas les quotas. Je suis cohérent.
Mme Annie Le Houerou. - Sans les quotas, nous ne serions pas là !
La proposition de loi est adoptée. (Applaudissements)
Les conclusions de la Conférence des Présidents sont adoptées.
Prochaine séance demain, jeudi 06 avril 2023, à 10 h 30.
La séance est levée à 19 h 50.
Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,
Rosalie Delpech
Chef de publication
Ordre du jour du jeudi 6 avril 2023
Séance publique
De 10 h 30 à 13 h et de 14 h 30 à 20 h
Présidence : M. Roger Karoutchi, vice-président,Mme Laurence Rossignol, vice-présidente, Mme Pascale Gruny, vice-président
Secrétaires : Mme Esther Benbassa - M. Daniel Gremillet
(Ordre du jour réservé au groupe CRCE)
1. Proposition de loi visant à revaloriser le statut de secrétaire de mairie, présentée par Mmes Brulin, Cukierman, Gréaume, Varaillas, Assassi et plusieurs de leurs collègues (texte de la commission, n°467, 2022-2023)
2. Proposition de loi relative à la maîtrise de l'organisation algorithmique du travail, présentée par M. Savoldelli, Mmes Apourceau-Poly, Cohen et plusieurs de leurs collègues (n°770, 2021-2022)
(Ordre du jour réservé au groupe SER)
3. Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à protéger le groupe Électricité de France d'un démembrement (texte de la commission, n°465, 2022-2023)
4. Proposition de loi constitutionnelle visant à créer une loi de financement des collectivités territoriales et de leurs groupements et à garantir la compensation financière des transferts de compétences, présentée par M. Kerrouche et plusieurs de ses collègues (n°869 rect., 2021-2022)