Questions d'actualité
M. le président. - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement. Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet. Chacun sera attentif au respect des uns et des autres et au temps de parole.
Réforme des retraites (I)
M. Jean-Claude Requier . - (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur des travées du groupe INDEP) Avec la réforme des retraites, il y a de quoi faire sauter plusieurs gouvernements, disait Michel Rocard. C'est avec courage que, madame la Première ministre, vous vous y attelez. Vous avez beaucoup consulté, partis politiques et syndicats. Lorsque vous m'avez reçu à Matignon avec Henri Cabanel, nous vous avons fait part de nos interrogations au cours d'une discussion franche et ouverte, sur tous les sujets : pénibilité, carrières longues, emploi des seniors, régimes spéciaux, pensions minimales...
Vous avez dévoilé hier votre projet, avec un report de l'âge légal de départ à 64 ans au lieu des 65 ans envisagés. Pourquoi ne pas maintenir l'âge à 62 ans et moduler la durée de cotisations ? Ne serait-ce pas plus équitable ? Faisons une réforme dans la tradition radicale, mais sans radicalité ! (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur quelques travées du groupe UC)
Mme Élisabeth Borne, Première ministre . - Meilleurs voeux à tous.
Le système de retraite par répartition est au coeur de notre modèle social. Les Français y sont profondément attachés, moi aussi. Mon Gouvernement entend le préserver, car la baisse du nombre d'actifs par rapport à celui des retraités le menace.
Mon projet garantit son avenir. C'est un projet d'équilibre, qui n'augmente pas les impôts ni ne réduit les pensions. Le seul chemin est de travailler plus longtemps, progressivement. L'âge légal de départ à la retraite sera donc porté à 64 ans en 2030. Nous allons également accélérer la mise en place de la réforme Touraine pour atteindre 43 années de cotisations en 2027. Cela rejoint le dispositif voté par le Sénat depuis plusieurs années. L'âge de la décote sera fixé à 67 ans (M. Fabien Gay proteste), ce qui bénéficiera notamment aux femmes.
Mme Cathy Apourceau-Poly. - Et l'égalité salariale ?
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. - Je suis bien consciente des difficultés pour nos compatriotes, mais c'est un projet de justice (vives protestations à gauche) : départ anticipé pour celles et ceux qui ont commencé à travailler plus tôt ; meilleure prise en compte des carrières des femmes ; meilleure reconnaissance de la pénibilité des métiers. Un départ à 62 ans sera toujours possible pour les personnes en invalidité, en incapacité ou en inaptitude. (Protestations à gauche) Au total, quatre Français sur dix pourront partir avant 64 ans. Et nous fermerons la plupart des régimes spéciaux, car le même métier doit donner la même retraite.
Notre projet est aussi porteur de progrès sociaux. (Exclamations ironiques à gauche) Celles et ceux qui ont des métiers difficiles pourront partir avant 64 ans. La retraite ne pourra être inférieure à 85 % du Smic, soit une hausse de 100 euros par mois dès 2023. Nous avons entendu les organismes syndicaux et patronaux : la revalorisation de la retraite minimale concernera bien les retraités actuels. Au total, près de deux millions de Français verront leur pension revalorisée dès 2023, notamment des femmes, des commerçants, des artisans. Nous voulons rendre aux salariés proches de la retraite toute leur place en entreprise, notamment avec un cumul emploi-retraite plus avantageux.
Nous voulons convaincre, améliorer le projet avec le Parlement, pour construire un système juste, équilibré et porteur de progrès social. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées des groupes INDEP et UC)
M. Jean-Claude Requier. - Au Sénat, le débat ira à son terme, car il n'y aura ni 49.3 ni question préalable. Le RDSE y prendra toute sa part.
Appelé comme contrôleur général des finances, Turgot a proposé des réformes audacieuses : la réforme plutôt que la révolution. Il n'y a pas eu de réforme ; quelques années plus tard, il y eut une révolution. J'espère que cette réforme n'amènera pas la révolution. (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe SER, ainsi que sur quelques travées des groupes INDEP et UC)
Réforme des retraites (II)
Mme Raymonde Poncet Monge . - (Applaudissements sur les travées du GEST et sur quelques travées du groupe SER) Votre projet repousse de deux ans l'âge de départ à la retraite. Vous avez balayé toutes les solutions alternatives. Mais il n'y aurait pas eu de problème de déficit si le fonds de réserve des retraites n'avait pas été siphonné.
Vous vous apprêtez à copier la contre-réforme de 2010 qui, selon la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees), a fait perdre un an de retraite à la génération 1980. En cumulant toutes les réformes depuis 2010, plusieurs générations perdront jusqu'à vingt mois de durée de retraite.
Vous allez empiéter sur les années de vie à la retraite en bonne santé, alors que l'écart est de dix ans entre les CSP. Votre réforme s'attaque au droit au repos de tous, mais vous cognez plus durement sur les catégories populaires, alors que vous réduisez les droits au RSA et au chômage. L'attaque est frontale. Vous proposez de travailler plus et de perdre sa vie à la gagner, tout en détruisant notre planète.
Combattons cette réplique de la réforme inégalitaire de 2010. (Applaudissements sur les travées du GEST et sur quelques travées des groupes CRCE et SER)
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion . - Faut-il faire une réforme des retraites ? Oui, ainsi que le dit le rapport du Conseil d'orientation des retraites (COR).
Premièrement, le régime est déficitaire dès 2023, avec une perte de 1,8 milliard d'euros en 2027 et de 25 milliards d'euros en 2040. Il faut préserver un système par répartition, d'autant que ces chiffres reposent sur la présomption, optimiste, du plein emploi.
Deuxièmement, le niveau de vie des retraités doit être maintenu.
Troisièmement, à la fin des années 1970, il y avait trois actifs pour un retraité. Le rapport est désormais d'1,5 pour un : cela ne tient pas. Il faut réparer, avec des mesures sur la pénibilité et les carrières longues.
La responsable de votre parti a appelé à ce que l'Assemblée nationale se transforme en ZAD. Ce n'est pas notre conception de la démocratie. (Applaudissements sur les travées du RDPI, du groupe INDEP et sur quelques travées du RDSE)
Mme Raymonde Poncet Monge. - La réponse vous sera donnée le 19 janvier par les Français, les syndicats et les partis de gauche et écologistes. (Huées sur des travées des groupes Les Républicains et INDEP, ainsi que du RDPI ; applaudissements à gauche)
Difficultés des boulangers face à la crise énergétique (I)
M. Franck Menonville . - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) Sept boulangers ont cessé leur activité dans mon département de la Meuse à cause de la hausse des coûts de l'énergie. D'autres ont augmenté leurs prix. La situation devient intenable.
Des mesures ont été annoncées le 4 janvier. En effet, 80 % des boulangeries ne peuvent prétendre au bouclier tarifaire, car elles dépassent le plafond de 36 kVA (kilovoltampères). Il y a certes l'amortisseur électricité, mais 180 euros par MWh, ce n'est pas assez protecteur. Les conditions d'éligibilité ne sont pas adaptées et les démarches complexes. Les accompagnements annoncés vont certes dans le bon sens, mais sont insuffisants.
Le Gouvernement entend-il créer un mécanisme plus protecteur ? Il faudrait commencer par lever le plafond de 36 kVA. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur quelques travées du groupe SER)
M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique . - Sur les 2,1 millions de TPE, 1,5 million sont protégées par les tarifs régulés, car leur puissance électrique est inférieure à 36 kVA. Aucun autre pays européen ne propose une telle protection à ses entreprises.
Étendre la mesure aux 600 000 TPE restantes aurait coûté 3 milliards d'euros. Certes, cela aurait profité aux boulangers, mais aussi à des entreprises n'en ont pas besoin.
Nous avons donc fait un choix différent : après négociation avec les fournisseurs, la facture ne dépassera pas 280 euros par MWh en moyenne sur 2023.
Les boulangers sont pris en tenaille entre l'augmentation des coûts de la farine et de l'électricité. Ils pourront aussi demander le report des charges et de nouvelles subventions en cas de besoin. Nous avons pris toutes les dispositions nécessaires pour protéger une profession à laquelle nous sommes attachés. Ma porte et celle d'Olivia Grégoire restent ouvertes. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
Hausse des factures d'électricité
M. Jean-François Husson . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) J'entends votre autosatisfaction, monsieur le ministre, mais il y a quelques instants encore, un chef d'entreprise me rapportait que les acteurs économiques ne comprennent pas l'absence de vision stratégique du Gouvernement. Vous parlez de 280 euros par MWh, mais c'est déjà 350 % d'augmentation ! Le risque, c'est un mur de faillites.
Le Gouvernement a-t-il pris toutes les mesures pour répondre aux besoins des entreprises qui font vivre la maison France ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)
M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique . - On n'est jamais certain d'avoir pris toutes les mesures. Ce n'est pas la première crise que je gère. Lors de la crise sanitaire, nous avons protégé le monde économique avec le « quoi qu'il en coûte », car la production s'était effondrée avec un risque de faillites et de chômage de masse.
Face à la crise énergétique, le « quoiqu'il en coûte » n'est pas la solution. Dans un contexte inflationniste, ce serait jeter de l'essence sur le feu.
M. Jean-François Husson. - Ce n'est pas ce que j'ai dit !
M. Bruno Le Maire, ministre. - Nous travaillons au contraire à réduire l'inflation, au bénéfice des entreprises et des ménages.
Nous avons choisi une voie plus difficile, mais c'est souvent la meilleure. (Brouhaha ironique sur les travées du groupe Les Républicains) Nous ciblons les entreprises qui en ont le plus besoin. Les TPE bénéficient de nombreuses mesures d'aide : tarifs préférentiels, report de charges, numéro d'appel... (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Marc-Philippe Daubresse. - Un numéro vert !
M. Bruno Le Maire, ministre. - Nous discutons avec les PME, ainsi que les ETI qui sont exposées à la concurrence internationale et ne peuvent donc augmenter les prix. Nous travaillons à la protection immédiate de ceux qui ont besoin, à moyen terme pour réduire l'inflation et à long terme sur une politique de l'offre favorable à notre compétitivité. (Applaudissements sur les travées du RDPI et du groupe INDEP, ainsi que sur quelques travées du RDSE)
M. Jean-François Husson. - Monsieur le ministre, vous voulez parler avec les fournisseurs d'énergie ? Vous en avez un sous la main : EDF. Mettez-vous au travail ! Nous payons les choix funestes faits depuis dix ans en matière de nucléaire ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du groupe UC)
Nous avons besoin d'une vision énergétique stratégique. Il faut travailler sur les énergies renouvelables et l'autonomie énergétique. Cela améliorera notre balance commerciale.
TPE, PME, ETI, grandes entreprises : toutes ont besoin d'un soutien adapté. La France a besoin d'un État fort. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)
Difficultés des boulangers face à la crise énergétique (II)
Mme Catherine Morin-Desailly . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur quelques travées du groupe Les Républicains) Récemment, la baguette française était inscrite au patrimoine mondial immatériel de l'Unesco. Serait-elle menacée ?
Les maires nous alertent sur les graves difficultés rencontrées par les boulangers dont les factures d'électricité explosent. Certes, ils peuvent bénéficier de l'amortisseur, du report de leurs charges, de l'étalement du paiement de leurs factures, du plafonnement des tarifs. C'est une bonne chose, mais ces dispositifs sont complexes et ne s'appliqueront qu'à la fin du mois. Or la hausse des matières premières atteint 30 % et ne peut être répercutée sur les prix. De nombreux boulangers sont au bord du dépôt de bilan. C'est dramatique pour nos territoires, car la boulangerie est souvent le dernier commerce qui reste en zone rurale. Je vous appelle à travailler de concert avec les régions qui ont la compétence économique. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique . - Que M. Husson se rassure (exclamations sur les travées du groupe Les Républicains) : je n'ai pas de goût pour la fainéantise, et je reçois EDF au moins chaque semaine.
Madame Morin-Desailly, nous demandons aux boulangers d'aller sur leur site dédié ou sur impots.gouv.fr afin de se déclarer comme TPE et d'indiquer qu'ils souhaitent bénéficier du tarif moyen garanti. Leurs anciens contrats seront immédiatement résiliés. Si cela ne suffit pas, il y a le guichet unique, l'amortisseur et le report des charges.
Reste les ETI, exposées à la concurrence internationale. À Charleville-Mézières, une entreprise fabrique des plateaux en aluminium pour refroidir les voitures écologiques. Son client allemand refuse toute augmentation de prix, menaçant de se fournir ailleurs. Notre industrie ne doit pas sortir affaiblie de cette crise énergétique. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; Mme Colette Mélot applaudit également.)
Service universel de La Poste (I)
Mme Marie-Claude Varaillas . - (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE) J'aurais pu vous adresser ma question par La Poste, monsieur le ministre, mais j'aurais dû prendre mon mal en patience avec le timbre vert, livré à J+3, ou scanner ma lettre et la télécharger sur le site internet de La Poste, autorisant cette dernière à lire ma correspondance confidentielle.
Le timbre rouge n'est plus et vous entendez faire passer cela « comme une lettre à La Poste » - expression vouée à disparaître - , alors que c'est un pas de plus vers la désagrégation du service public.
Or la fracture numérique touche 13 millions de Français.
En outre, dans 70 communes, la réduction de la tournée du facteur va être expérimentée. Or un facteur noue des liens humains avec les habitants, notamment les plus fragiles. Tout ce qui nuit aux liens sociaux abîme la démocratie. La machine à exclure tourne à plein régime.
Quand allez-vous arrêter cette casse du service public et entendre qu'il n'est pas voué à être rentable ? (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER ainsi que du GEST, du RDSE et sur plusieurs travées des groupes UC et Les Républicains)
M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications . - Nous sommes très attentifs à l'évolution de la politique courrier du groupe La Poste. Les récentes évolutions ont suscité des inquiétudes légitimes chez certains.
Cela dit, les usages ont évolué : un Français envoyait 45 lettres prioritaires en 2010, cinq en 2021. (M. Pierre Laurent proteste.) Par ailleurs, ces évolutions permettraient d'économiser 60 000 tonnes de CO2 par an (protestations à gauche et sur quelques travées du groupe Les Républicains), grâce à l'arrêt du transport aérien pour le courrier dans l'Hexagone.
Les timbres rouges achetés avant la fin de l'année restent valables. De plus, la présence du facteur six jours sur sept n'est pas remise en cause. Tout usager pourra se faire conduire au bureau de poste à tout moment par un facteur. (Exclamations sur les travées du groupe CRCE) La lettre Services Plus et la lettre verte restent disponibles.
Madame la sénatrice, l'expérimentation que vous avez évoquée ne remet pas en cause la présence du facteur tous les jours. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
Mme Marie-Claude Varaillas. - Après l'hôpital, le rail, l'énergie, la disparition du timbre rouge symbolise le démantèlement de nos services publics, patrimoine de ceux qui n'en ont pas. C'est l'ensemble du système de solidarité qui est remis en cause, sous les injonctions de Bruxelles. Allez-vous enfin entendre les Français ? (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER ; Mme Sonia de La Provôté applaudit également.)
Soutien aux TPE et PME face à la hausse du prix de l'énergie
M. Didier Rambaud . - (Applaudissements sur les travées du RDPI) L'année change, les défis demeurent. Nous sommes tous interpellés par les élus locaux sur la crise énergétique. Être entrepreneur demande beaucoup de sang-froid et d'abnégation, plus encore par les temps qui courent.
À l'image des boulangers, rares survivants du commerce de proximité, particulièrement touchés, de nombreux professionnels n'arrivent pas à identifier les aides auxquelles ils peuvent prétendre ni les décrypter.
Une voix à gauche. - Parce que ce n'est pas clair !
M. Didier Rambaud. - Les aides disponibles sont considérables, mais sont-elles efficaces ? Sont-elles suffisantes ? Suffisamment connues ? Comment l'État entend-il accompagner les professionnels pour faciliter leurs démarches ? (Applaudissements sur les travées du RDPI ; plusieurs « Allô, allô » sur les travées du groupe Les Républicains)
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme . - Nous nous adaptons à une situation particulièrement difficile en mobilisant 12 milliards d'euros. Plus vous êtes petit, plus vous êtes exposé, plus vous êtes protégé. Comme près de 80 % des boulangers dépassent les 36 kVA de puissance, ils bénéficieront du prix garanti en cochant une case sur le site de leur fournisseur ou sur le site des impôts. Cela se traduira sur leur facture dans les prochaines semaines. Si cela ne suffit pas, l'amortisseur s'enclenchera.
Je répondrai aussi à M. Husson...
M. le président. - On ne répond pas à toutes les questions ! (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains, UC et SER)
M. Jean-François Husson. - Expliquez cela aux boulangers !
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. - Je passe mon temps à expliquer les aides. Elles sont simples.
Les artisans peuvent aussi se tourner vers leur expert-comptable en cas de doute. Travaillons tous ensemble. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
Réforme des retraites (III)
Mme Monique Lubin . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur quelques travées du groupe CRCE ; Mme Monique de Marco applaudit également.) Hier soir, en écoutant la Première ministre, j'ai pensé à certains de mes amis : l'une, depuis quarante ans dans l'agroalimentaire, devra travailler un an et trois mois de plus ; l'autre, charpentier, plusieurs mois de plus ; le dernier, qui vient de perdre son emploi à 60 ans, verra son assurance chômage se réduire et la perspective de la retraite s'éloigner.
Vous faites payer votre réforme idéologique par ceux qui travaillent depuis longtemps, dans des métiers difficiles et précaires. Vous ne demandez aucune contrepartie aux employeurs. Vous refusez obstinément de mobiliser les gains faramineux de certains.
Pourquoi maltraiter à ce point les travailleurs, alors que vous dites défendre la valeur travail ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE, ainsi que du GEST)
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion . - La réforme est nécessaire pour sauver notre système par répartition. Mais il faut la faire avec le plus de justice possible.
Durant la concertation menée depuis plusieurs mois, j'ai travaillé avec tous les partenaires sociaux et tous les groupes politiques. (Protestations sur les travées du groupe SER) Malgré les désaccords sur l'âge, des convergences sont apparues sur la question de la pénibilité : assouplissement du compte personnel de prévention, création d'un congé de reconversion, engagement d'un travail sur les horaires de nuit, le port de charges, les postures pénibles, les vibrations. Nous consacrerons 1 million d'euros sur cinq ans à la prévention. Un suivi médical renforcé pourra ouvrir droit à un départ anticipé.
Pour les carrières longues, le départ à 58 ans pour ceux ayant cotisé cinq trimestres avant 16 ans est maintenu, de même que le départ à 62 ans pour ceux ayant cotisé cinq trimestres avant 20 ans. Nous créons aussi, notamment pour les apprentis, une possibilité de départ à 60 ans pour ceux ayant cotisé cinq trimestres avant 18 ans.
J'espère que vos amis sont imaginaires (Mme Monique Lubin le dément), car le principal décalage qu'ils vont subir est dû à l'augmentation des cotisations que vous avez votée en 2013. Vous avez perdu le sens de la raison et de la responsabilité. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; vives protestations sur les travées du groupe SER)
Mme Monique Lubin. - Que les reproches que vous adressez à ma famille politique sont doux à mes oreilles ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE, ainsi que sur quelques travées du groupe Les Républicains) J'ai quelques souvenirs dans les Landes, avec Henri Emmanuelli, que vous aimiez beaucoup à l'époque. (Applaudissements à gauche)
Selon le COR, la part des retraites dans le PIB se maintient à 14 % : le système n'est pas en danger. C'est vous qui avez supprimé les critères de pénibilité en 2018, à votre arrivée au Gouvernement. (Applaudissements à gauche) Vous faites payer votre réforme par les seuls salariés, et en particulier les plus modestes.
Mes amis ne sont pas imaginaires. Après avoir travaillé 42 ans, un an de plus, c'est un an de trop ! (Applaudissements nourris sur les travées des groupes SER et CRCE, ainsi que du GEST)
Marché de l'électricité dans l'Union européenne
Mme Sophie Primas . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Françoise Férat applaudit également.) Depuis un an, notre pays traverse une crise énergétique effroyable. Le Gouvernement allume des contre-feux, pour 24 milliards d'euros en 2022, et 43 milliards d'euros en 2023 ; mais ces outils sont mal calibrés et insuffisants. Vous arrosez le sable avec de l'eau, alors que la solution structurelle est européenne.
L'état de guerre, avec la disparition du gaz russe, a pulvérisé le marché européen de l'énergie. Tirons-en les conséquences. Il faut abolir immédiatement les mécanismes européens de concurrence qui définissent l'architecture des prix de l'électricité. Or de conseil européen en conseil européen, nous ne voyons rien venir.
À défaut d'un règlement définitif, demandez des dérogations immédiates. D'autres l'ont fait, même largement interconnectés. C'est urgent, nous ne pouvons plus attendre ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique . - Nous avons agi au service des ménages, des entreprises et des collectivités, de telle sorte que la France leur offre les prix les plus bas d'Europe. Ce n'est pas qu'une politique du chèque : grâce à la contribution sur la rente inframarginale des producteurs d'électricité, la contribution de l'État est proportionnée.
La concertation doit aussi se faire au niveau européen, en effet. Nous subissons un véritable acte de guerre, car 40 % du gaz consommé en Europe vient de Russie et 22 % de la production d'électricité dépend du gaz. La situation de notre parc nucléaire nous rend dépendants. (On se récrie sur les travées du groupe Les Républicains.) Nous devons en tenir compte.
Tout ce qui nous permet de passer cette crise avec des prix inférieurs à ceux prévus tient à nos décisions. La Commission européenne présentera au cours de ce trimestre des propositions, dans le sens que vous appelez de vos voeux. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
Mme Sophie Primas. - Je rêve d'une France forte en Europe - nous étions ce pays capable d'imposer des décisions. Il y a urgence : quand le marché de l'électricité sera enfin réformé, nous aurons dépensé des milliards ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)
Chlordécone aux Antilles
M. Victorin Lurel . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Compte tenu de la gravité du sujet et de son caractère interministériel, ma question s'adresse à la Première ministre ; elle porte sur le non-lieu prononcé le 2 janvier dernier à propos de la contamination au chlordécone. Je respecte les décisions de justice mais celle-ci constitue un indéniable déni qui risque d'allumer des brasiers. Il n'y aurait ni coupable ni responsable ? Au scandale d'État s'ajoute le scandale judiciaire. L'État est coresponsable de cette tragédie et doit en être comptable.
Quarante-six ans après les premières alertes et seize ans après les premières plaintes, vous ne pouvez rester indifférente. Êtes-vous prête à mobiliser le Parquet, à créer un fonds d'indemnisation comme pour l'amiante, à soutenir la recherche et la décontamination des sols ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)
Mme Catherine Conconne. - Bravo !
M. Jean-François Carenco, ministre délégué chargé des outre-mer . - Je constate comme vous la décision prise librement par les autorités judiciaires. Un membre du Gouvernement ne peut qu'en prendre acte. L'ordonnance pointe néanmoins une responsabilité collective. La responsabilité de l'État a été reconnue pour la première fois en 2018 par le Président de la République.
Notre priorité est de protéger la santé, d'aider les secteurs économiques touchés et de renforcer la recherche.
Plusieurs avancées fortes ont déjà été obtenues, telles que la reconnaissance du cancer de la prostate comme maladie professionnelle, l'analyse gratuite du taux de chlordécone dans le sang, l'analyse des sols, la dépollution.
En décembre, les nombreuses avancées ont été portées à la connaissance de tous. Mais il reste beaucoup à faire. Je note vos propositions avec attention. Je me rends en Martinique dès demain, en partie pour cela. La coordinatrice chlordécone m'accompagnera. (MM. Alain Richard et François Patriat applaudissent.)
M. Victorin Lurel. - Je regrette que la Première ministre ne m'ait pas répondu. La réponse du ministre est celle d'un communicant.
Le cadre est sous-financé : une enveloppe de 10,8 millions d'euros par an, contre 12 millions en 2010 et 13 millions en 2016, c'est insuffisant. Nous voulons bénéficier du préjudice d'anxiété, comme les victimes de l'amiante. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)
Crise du système de santé
M. Alain Milon . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le Président de la République veut reconstruire le système de santé. Une réforme globale de l'organisation des soins est nécessaire pour restituer une attractivité perdue et refonder un système innovant.
Hélas, ses déclarations appellent plus de questions qu'elles n'apportent de solutions.
Le financement est totalement absent. Sortir de la tarification à l'activité (T2A) pour lui substituer une rémunération basée sur des objectifs de santé publique sans critère populationnel défini, cela laisse perplexe. C'est sonner le glas de l'hôpital. Pendant trois ans, l'Assurance maladie paiera les 6 000 assistants médicaux : qui ensuite ? Actuellement, ils sont 4 000 et coûtent 160 millions d'euros.
Réformer la médecine de ville ne suffira pas pour faire face à la crise des vocations. Il faut refonder les financements entre la sécurité sociale et les mutuelles. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention . - Le 6 janvier, le Président de la République a annoncé devant les soignants un nouveau cap pour notre système de santé, avec un diagnostic lucide et un changement de méthode, se fondant non plus sur l'offre de soins mais sur les besoins de santé. Beaucoup a été fait, avec le Ségur et la suppression du numerus clausus.
Nous devons aller plus loin, plus vite, pour répondre aux défis qui se posent non seulement à la France mais à tous les pays industrialisés.
Il faut sortir d'une logique concurrentielle pour travailler en complémentarité entre l'hôpital et la médecine de ville, les hôpitaux et les cliniques, les médecins et les paramédicaux.
Redonner du temps médical est un enjeu majeur, car la suppression du numerus clausus n'aura pas d'effets tout de suite.
Les maisons de santé pluriprofessionnelles, l'intégration des administrateurs au sein de l'hôpital y participeront. Nous devons raisonner territoire par territoire.
Il faut réformer le financement et sortir de la T2A pour mieux répondre aux besoins de santé, en fonction de la qualité et de l'efficience.
Ce sont des engagements forts envers nos concitoyens et nos soignants. Les échéances sont courtes et vous pouvez compter sur ma mobilisation. (MM. François Patriat et Thani Mohamed Soilihi applaudissent.)
M. Alain Milon. - Ces propositions, nous les avons faites depuis des années ! Rien de nouveau. Ce Gouvernement n'a aucune vision réellement alternative. En voici une : les soins primaires, le panier de soins réguliers, un pilotage fort et décentralisé, une réflexion globale sur le financement, et notamment les dépenses... (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
Service universel de La Poste (II)
M. Pierre-Antoine Levi . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Pierre Médevielle applaudit également.) Comme Mme Varaillas, je me demande où va le service postal. Depuis le 1er janvier, le timbre rouge n'est plus commercialisé : il faut faire scanner sa lettre, l'envoyer par internet, avant qu'un employé de La Poste ne l'imprime et ne l'envoie. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Quid de la confidentialité ? Sans compter que l'illectronisme touche 14 % de nos concitoyens... Certes, ils pourront se rendre au bureau de poste pour envoyer leur lettre, mais il leur faudra alors utiliser un automate !
À partir de mars, le courrier sera distribué un jour sur deux, voire sur trois. L'expérimentation en cours risque d'être généralisée. Cela pourrait bien aboutir à la suppression de nombreux emplois.
Allez-vous laisser ce service public se déliter ? Agissez avant que nous ne devenions tous timbrés ! (Sourires ; applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées des groupes SER et CRCE)
M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications . - Je ne reviens pas sur les constats qui ont conduit La Poste à faire ces choix. Le Gouvernement est très attaché à l'universalité du service postal. La présence du facteur est maintenue six jours sur sept, et les personnes pourront se faire accompagner par des facteurs dans les bureaux de poste. Les services de lettre verte resteront assurés. Les expérimentations en cours dans 78 communes testent de nouveaux modes d'envoi.
Mais je ne peux laisser dire que ce Gouvernement se désintéresse de la fracture numérique : 2 600 maisons France Services, 4 000 conseillers numériques ayant accompagné 1,3 million de Français... (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et SER)
Une voix à gauche. - Et les trésoreries ?
M. Max Brisson. - Et La Poste ?
M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. - Soyez convaincu que ce Gouvernement est attaché à la résorption de cette fracture. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées du RDSE)
M. Pierre-Antoine Levi. - Je ne suis pas convaincu. La Poste ne distribue le courrier que quatre ou cinq jours par semaine. Les territoires sont inquiets. Qu'allez-vous faire pour éviter le délitement de ce service public ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains, ainsi que sur quelques travées des groupes SER et CRCE)
Influence française en Afrique
M. Hugues Saury . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Fin décembre, les autorités de Ouagadougou ont demandé le départ de l'ambassadeur de France sous d'obscurs prétextes. Cela rappelle le scénario du Mali et de la Centrafrique. La France est désormais indésirable là où elle a tant oeuvré.
Malgré le sacrifice de 53 de ses militaires et une large aide publique au développement (APD), jamais la France n'a été autant rejetée dans toute l'Afrique. Nos compatriotes en subissent les effets. Les parts de marché de la France ont fondu de moitié depuis les années 2000. La France n'est plus le premier partenaire commercial d'aucun pays du Maghreb. Le français est menacé par l'anglais jusque dans les programmes scolaires, voire cesse d'être une langue officielle, comme au Rwanda.
Avec ses formidables atouts humains et naturels, l'Afrique est un continent d'avenir, mais si nous ne voulons pas qu'elle écrive son histoire sans la France, nous devons remettre à plat notre stratégie. Comment le Gouvernement entend-il enrayer le déclin de l'influence française en Afrique ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Nassimah Dindar applaudit également.)
Mme Catherine Colonna, ministre de l'Europe et des affaires étrangères . - En Afrique comme ailleurs, la manipulation de l'information ne cesse de prendre de l'ampleur. La France est visée par des campagnes qui n'ont rien de spontané. Je remercie la secrétaire d'État aux partenariats internationaux qui s'est rendue au Burkina Faso hier.
Nous opérons un triple changement en Afrique. Nous changeons de contenu, pour mieux expliquer nos partenariats, et nous soutenons ceux qui luttent contre la désinformation. Nous changeons de support, en étant partout présents, y compris sur les réseaux sociaux où se forment les opinions publiques. Nous changeons d'échelle en augmentant le volume de notre production.
Tout cela se fait en complément de nos relations humaines et économiques, qui changent elles aussi.
Nous sommes pleinement mobilisés. J'étais à l'instant avec le Président de la République, qui recevait le Président des Comores ; je me rendrai bientôt à Addis Abeba, siège de l'Union africaine. Nous sommes actifs, vous le voyez. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
Pénurie de médicaments
Mme Émilienne Poumirol . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur quelques travées du GEST) La pénurie de médicaments, inexistante dans les années 2010, est devenue un problème de souveraineté et de sécurité nationales.
Nous achetons à la Chine plus de 80 % des matières premières ; moins de 40 % des médicaments sont fabriqués en Europe. Pourtant, dans le « monde d'après », tout devait être différent, disait le Président de la République....
À l'hôpital, certains anticancéreux manquent, obligeant à sélectionner les patients. C'est une perte de chance inacceptable. Les pharmaciens distribuent paracétamol ou amoxicilline au compte-gouttes.
Quelle est votre stratégie, monsieur le ministre, pour retrouver une production en France ou du moins en Europe ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur quelques travées du GEST)
M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention . - Je partage en partie votre diagnostic. Deux années de crise sanitaire ont bouleversé notre consommation et créé des problèmes d'anticipation.
Nous observons une hausse de la consommation de 13 % du paracétamol en France, comme à l'échelle mondiale.
Notre système d'alerte nous permet d'anticiper, grâce au suivi de nos stocks stratégiques. Mais je comprends les inquiétudes, tout en saluant la mobilisation des pharmaciens.
Nous avons agi tôt en interdisant les exportations ; nous contingentons les stocks, les répartissons, échangeons avec les laboratoires et priorisons certaines formes de médicaments. Nous avons autorisé la reproduction d'amoxicilline par certains laboratoires.
Nous reconstruisons notre souveraineté industrielle, mais cela prend du temps. Nous investissons via le plan de relance et France 2030 pour produire du paracétamol, des masques, des gants, des médicaments dérivés du sang avec une nouvelle usine à Arras. Nous faisons notre maximum pour que les Français disposent des médicaments nécessaires. (Applaudissements sur quelques travées du RDPI)
Mme Émilienne Poumirol. - Ne vous cachez pas derrière la crise. Notre groupe propose plusieurs solutions, comme le renforcement de nos capacités de production publique, avec la réquisition d'entreprises ou la mobilisation des pharmacies centrales des hôpitaux.
Les industriels se plaignent d'un prix trop bas des médicaments ? Jouons cartes sur table sur la fixation des prix, protégée par le secret des affaires, pour tenir compte des aides publiques directes ou indirectes.
Pour construire une véritable indépendance de la production, il faut une politique forte et volontariste. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)
Filière automobile électrique
Mme Christine Lavarde . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) L'édition 2023 du CES (Consumer Electronics Show) de Las Vegas a vu le PDG de Stellantis lancer une nouvelle charge contre les prix très bas des constructeurs automobiles chinois. Trois producteurs chinois prévoient en effet d'exporter un million de véhicules vers l'Europe en trois ans et construisent déjà l'outil de distribution nécessaire.
Les véhicules électriques progressent, avec une hausse de 46 % d'immatriculations en 2021, mais 80 % de ces véhicules sont importés. Comme le dit la presse, le loup chinois est dans la bergerie : la Chine, c'est 50 % de la valeur totale d'un véhicule électrique, 75 % de la chaîne de valeur des batteries, 90 % des moteurs électriques produits dans le monde.
Dans cette bataille, quelles sont nos armes ? Allez-vous sortir de la tranchée pour engager une guerre de mouvement ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mmes Sonia de La Provôté et Anne-Catherine Loisier applaudissent également.)
M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique . - Nous sommes favorables à la guerre de mouvement (marques de satisfaction à droite), qui prend une forme offensive et défensive.
L'offensive, c'est une industrie de voitures électriques performantes. (Mme Sophie Primas objecte.) Nous avons décidé il y a quatre ans de mettre en oeuvre une filière de batteries électriques et deux usines vont ouvrir, avec pour objectif de produire l'équivalent de 100 à 20 gigawatts de puissance ; nous voulons ouvrir une mine de lithium et diversifier les approvisionnements ; concernant les semi-conducteurs, nous avons obtenu l'investissement de GlobalFoundries. Au bout du compte, nous produirons des véhicules électriques sur le sol français.
Jusqu'où aller dans le volet défensif ? Faut-il réserver les aides aux véhicules produits en France ?
Plusieurs voix à droite. - Oui !
M. Bruno Le Maire, ministre. - Faut-il intégrer dans l'ajustement carbone aux frontières non seulement l'acier ou l'aluminium mais des biens manufacturés comme des véhicules ? Nous n'avons pas la réponse mais nous avons l'audace de poser les bonnes questions. Nous en reparlerons dans le cadre du projet de loi de réindustrialisation verte. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
Mme Françoise Gatel. - Très bien !
Mme Christine Lavarde. - Vous aviez dit en octobre qu'il fallait réserver les aides aux véhicules produits en Europe. Mais dans le projet de loi de finances, vous n'avez pas suivi le Sénat qui proposait de diminuer de 500 millions d'euros les aides à l'achat de véhicules chinois ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)
TVA pour la filière équine
M. Jean Pierre Vogel . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La filière équine représente plus de 11 milliards d'euros de chiffre d'affaires et 66 000 emplois directs ; elle est présente dans 91 % des cantons. L'équitation, c'est 2 millions de pratiquants et 700 000 licenciés, c'est le premier sport féminin. C'est aussi des ressources pour l'État, avec 827 millions d'euros via les paris hippiques et 295 millions d'euros de TVA.
Dans la difficile période actuelle, ce n'est pas un luxe mais un volet de l'économie et une passion pour de nombreux compatriotes.
La filière se bat depuis plus de dix ans pour un taux de TVA plus conforme à la nature agricole de l'activité - en Irlande, concurrente directe des éleveurs français, le taux est de 4,1 %. Le Sénat avait voté un taux réduit dans la dernière loi de finances, mais le Gouvernement ne l'a pas retenu.
Le Président de la République a obtenu en 2022 la révision de la directive TVA pour revenir au taux réduit de TVA antérieur. Quand et comment le Gouvernement donnera-t-il à la filière équine un cadre fiscal garantissant sa pérennité et son développement, ainsi que le respect de la parole donnée ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mmes Françoise Gatel et Anne-Catherine Loisier applaudissent également.)
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme . - Le taux réduit de 5,5 % est réservé aux besoins de première nécessité. En généraliser le bénéfice à toutes les ventes et prestations relatives aux équidés ne serait pas équitable par rapport aux autres filières.
L'Institut français du cheval et de l'équitation (IFCE) dispose d'un budget de 43 millions d'euros, qui témoigne de l'engagement de l'État.
Nous continuons à accompagner la filière dans la valorisation de ses savoir-faire.
Le tourisme équestre rassemble un million de pratiquants. (M. François Patriat applaudit.)
M. Jean Pierre Vogel. - Les dispositions actuelles sont insuffisantes ; les distorsions de concurrence entre pays européens entraînent l'annulation de courses et des pertes de recettes pour le PMU, faute de concurrents ! La réforme de la TVA pour la filière équine est urgente. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mmes Françoise Gatel et Anne-Catherine Loisier applaudissent également.)
La séance, suspendue à 16 h 20, reprend à 16 h 40.