Implantation locale des parlementaires
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi organique favorisant l'implantation locale des parlementaires, présentée par M. Hervé Marseille et plusieurs de ses collègues.
Discussion générale
M. Hervé Marseille, auteur de la proposition de loi organique . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur diverses travées du groupe Les Républicains) Ceux qui comme moi appartenaient déjà à notre Haute Assemblée en 2013 se rappellent sans doute des débats enflammés sur la réforme de non-cumul d'un mandat exécutif local avec un mandat parlementaire forgée pour plaire à l'opinion.
Nous n'étions déjà pas si loin du « tous pourris » des gilets jaunes. Malgré cette réforme vieille de plus de sept ans, les accusations contre les élus, notamment les parlementaires, n'ont pas disparu. Il arrive même que des élus soient agressés. Certains de nos concitoyens appellent de leurs voeux la suppression de la démocratie représentative.
Face à cela, François Rebsamen, maire de Dijon, ressort la vieille lune visant à faire du Sénat un Bundesrat. Belle réforme, en vérité !
« Supprimons le cumul », disait le ministre Manuel Valls.
Plusieurs études ont montré que les Français étaient contre le cumul des mandats, sauf pour leurs propres élus.
Un sondage IFOP, demandé par notre groupe, montre que les sondés sont à 57% favorables au cumul du mandat de maire d'une commune de moins de 10 000 habitants et d'un mandat parlementaire.
Cette proposition de loi organique a pour objet de faire vivre ce débat. Plusieurs années après la réforme, le non-cumul a-t-il amélioré le fonctionnement de la démocratie ? Le Président de la République lui-même a récemment reconnu que le débat était ouvert. Le non-cumul n'a pas ramené les Français aux urnes et l'on entend désormais dénoncer des élus hors sol.
Nous sommes nombreux ici à avoir été maires. Nous savons tous que c'est bien différent d'être conseiller municipal, départemental ou régional, et maire ou président de département ou de région.
Le rôle du Parlement a-t-il été renforcé depuis la révision de 2008 ? L'équilibre entre législatif et exécutif est-il satisfaisant en 2021 ? Non ! De plus, les maires, qui ne sont plus parlementaires, ont du mal à faire entendre leurs voix.
Faut-il modifier ou abroger la loi de 2014 ? Nous proposons un simple aménagement.
Nous reconnaissons que la charge de travail n'est pas la même pour un maire d'une grande ville ou d'une commune de moins de 10 000 habitants. Ce seuil nous paraît pertinent, notre rapporteur - que je félicite pour son travail - ayant rappelé qu'il figurait dans le code général des collectivités territoriales (CGCT).
Nous avons souhaité éviter la polémique sur d'hypothétiques motivations financières. Vous savez que les indemnités sont plafonnées. C'est pourquoi j'ai suivi le rapporteur en acceptant la suppression de l'article 2 pour échapper à tout problème constitutionnel.
La différence des règles de cumul pour les parlementaires et les élus locaux est frappante : nous avons été nombreux en commission à rappeler l'importance du cumul horizontal. Comme le rappelait l'étude d'impact du texte de 2014, l'engagement des élus locaux est très prenant, c'est peu de le dire.
Je vous invite à voter ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains)
M. Stéphane Le Rudulier, rapporteur de la commission des lois . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La question de la limitation du cumul des mandats est délicate et complexe.
Des cumuls excessifs sont aussi néfastes au Parlement qu'aux collectivités territoriales, mais l'interdiction absolue du cumul est tout aussi absurde que la liberté absolue d'avant 1985, d'où les lois restreignant le cumul qui ont suivi et qui ont été adoptées à une très large majorité. Mais après plus d'une décennie de débats, la loi organique de février 2014 a envoyé le balancier dans une direction mortifère pour le pouvoir législatif. Elle a rendu incompatible le mandat de parlementaire, soi-disant renforcé avec la révision de 2008, avec tout mandat exécutif local, au prétexte que ce dernier serait trop absorbant. Il s'agissait, après trois décennies de décentralisation, de libérer les maires et les présidents d'exécutifs locaux et de leur donner le temps d'exercer leurs mandats.
Les promoteurs de la réforme y voyaient aussi l'occasion de renouveler le personnel politique.
Mais aucune corrélation n'a jamais pu être établie entre non-cumul et la qualité du travail parlementaire.
Le fort taux de renouveau de l'Assemblée nationale en 2017 a été plus lié à l'émergence d'un nouveau mouvement politique que de l'application du non-cumul.
M. Rémy Pointereau. - C'est juste !
M. Stéphane Le Rudulier, rapporteur. - Interdire le cumul aggraverait le déséquilibre des pouvoirs au profit de l'exécutif, disait-on en 2013. Doit-on souscrire à cette thèse ? Ce qu'on constate, c'est que le quinquennat qui s'achève, comme le précédent, marque l'affaiblissement continu du Parlement, contrairement à la volonté du constituant de 2008.
De plus, se pose le problème de l'attractivité du mandat parlementaire : beaucoup ont abandonné ce dernier au profit d'un mandat local, plus gratifiant.
Enfin, ce non-cumul participe du sentiment de déconnexion des représentants nationaux. Le mandat parlementaire est profitable aux territoires, et les responsabilités locales au mandat national. Elles permettent parfois d'anticiper les crises : en 2019, Olivia Gregoire, votre collègue, Madame la ministre, disait que les députés qui avaient été maires avaient pressenti l'émergence du mouvement des gilets jaunes. (On le confirme sur les travées du groupe UC.)
Le Président de la République lui-même s'est ouvertement interrogé sur un assouplissement de la règle du non-cumul, le 6 janvier 2019, devant des maires normands. Le débat a ressurgi avec l'abstention massive lors des élections locales du printemps.
Enfin, trois ministres restent titulaires d'un mandat exécutif local (quelques marques d'ironie sur les travées du groupe UC), sans contrition ni signe d'épuisement. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC ; M. Alain Marc applaudit également.)
Le texte de 2014 était mal bâti, voire démagogique. Il faut donc retrouver un équilibre : c'est l'objet de cette proposition de loi organique, dont l'article unique supprime l'incompatibilité entre le mandat parlementaire et le mandat de maire ou de maire adjoint dans les communes de moins de 10 000 habitants, soit 97 % des communes. Ce seuil paraît pertinent : il marque une différence en matière d'obligations des autorités municipales ; c'est une sorte de frontière entre le monde urbain et le monde rural.
Je ne doute pas que l'initiative du président Marseille suscitera des discussions. Il faut rapprocher l'exercice du pouvoir de la réalité des territoires et son texte y participe. (Vifs applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)
Mme Nadia Hai, ministre déléguée, chargée de la ville . - Le Gouvernement n'est pas favorable à cette proposition de loi organique (nombreuses marques de déception sur les travées de droite et du centre) pour plusieurs raisons.
L'article L. 141-1 du code électoral a été introduit par la loi de 2014 relative au non-cumul. Vous évoquez le grand débat national, où les citoyens ont, il est vrai, exprimé un besoin de proximité avec leurs élus et souligné l'importance du terrain. Mais ils y ont aussi formulé des critiques sur l'absence des élus aux assemblées dont ils sont membres.
Le cumul n'est donc pas une solution aux besoins exprimés par nos concitoyens. (Protestations à droite et au centre)
Il y a d'autres solutions que le cumul pour rester proches des enjeux locaux. La loi autorise déjà un mandat local (marques d'ironie et huées au centre et à droite) non exécutif : conseiller des assemblées locales.
Ainsi, 145 parlementaires, dont 80 sénateurs, ont un mandat de conseiller municipal au sein d'une commune de moins de 10 000 habitants. Le mandat de maire exige une forte mobilisation alors que le travail parlementaire s'est accru : je peux en témoigner comme ancienne députée. (Nombreuses exclamations à droite et au centre)
Une voix à droite. - Hors-sol ! Avez-vous déjà exercé un mandat ?
Mme Nadia Hai, ministre déléguée. - Oui, de députée ! (Marques d'ironie à droite) Le maire est aussi un point de référence essentiel dans les petites communes. Il assume le lien avec les services de l'État. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées)
Mme la présidente. - Il serait souhaitable de laisser Mme la ministre s'exprimer sans l'interrompre sans cesse.
Mme Nadia Hai, ministre déléguée. - De plus, le seuil de 10 000 habitants est discutable. Dans sa décision du 13 février 2014, le Conseil constitutionnel a rappelé le principe d'égalité devant la loi et admis que le législateur pouvait déterminer un seuil pour le non-cumul si ce seuil n'est pas arbitraire. Or celui que vous proposez est inédit en matière électorale.
Malgré nos désaccords, je me réjouis de ce débat démocratique. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
Question préalable
Mme la présidente. - Motion n°25, présentée par M. Masson.
En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur la proposition de loi organique (n° 24, 2021-2022) favorisant l'implantation locale des parlementaires.
M. Jean Louis Masson . - En général, je ne soutiens pas le Gouvernement, mais en l'espèce, oui. (Exclamations ironiques à droite et au centre) À chaque fois qu'on parle de cumul, les cumulards s'agitent !
Le cumul des mandats et son corollaire, l'absentéisme parlementaire, sont deux particularités bien françaises, qui nuisent au bon fonctionnement de la démocratie.
Le Premier ministre Édouard Balladur résumait parfaitement la situation dans Le Figaro du 7 mai 2010 : « Il n'y a pas d'enthousiasme dans la classe politique, ni à droite ni à gauche, pour prohiber le cumul. Si on veut progresser, il ne faut pas se référer à la bonne volonté, il faut que la loi intervienne ». Non sans mal, le Président Hollande est parvenu à faire voter la loi organique du 14 février 2014. C'est un point positif à mettre à son actif, il faut d'autant plus le souligner qu'il n'y en a pas beaucoup.
Malheureusement, ceux qui ont conduit hier un combat d'arrière-garde contre la loi anti-cumul tentent aujourd'hui d'ouvrir une brèche au profit des cumulards. Je le regrette profondément.
Je pense au contraire qu'il faudrait aller beaucoup plus loin dans la limitation et prendre en compte le mandat de conseiller communautaire, d'autant que la montée en puissance des intercommunalités confère aux élus communautaires des responsabilités bien plus importantes que celles des élus municipaux.
Le cumul horizontal est aussi un vrai problème. À mon avis, la solution est de réduire les possibilités de cumul pour les élus locaux. (Marques d'impatience au centre et à droite) Il est honteux qu'on puisse être président d'une intercommunalité et maire d'une grande ville.
M. Laurent Lafon. - C'est fini !
M. Stéphane Le Rudulier, rapporteur. - Avis défavorable.
Mme Nadia Hai, ministre déléguée. - Si je ne suis pas favorable à cette proposition de loi, nous voulons poursuivre les échanges : avis défavorable à cette question préalable.
La motion n°25 est mise aux voix par scrutin public de droit.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°4 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 245 |
Pour l'adoption | 1 |
Contre | 244 |
Le Sénat n'a pas adopté.
(On s'amuse et on applaudit sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains)
Renvoi en commission
Mme la présidente. - Motion n°26, présentée par M. Masson.
En application de l'article 44, alinéa 5, du Règlement, le Sénat décide qu'il y a lieu de renvoyer à la commission la proposition de loi organique (n° 24, 2021-2022) favorisant l'implantation locale des parlementaires.
M. Pierre Louault. - Il cumule ! (Sourires)
À droite. - Encore !
M. Jean Louis Masson . - La fonction de maire d'une commune est un travail à temps plein, d'autant qu'il faut également participer à l'intercommunalité. À droite comme à gauche, beaucoup d'élus veulent profiter du système, raison du combat mené ici.
Le 9 juillet 2012, dans Le Figaro, un cumulard accusait ceux qui ne le sont pas d'être des élus hors-sol. Merci pour moi, qui refusais de cumuler. Élu sénateur en 2001, j'avais démissionné de mon mandat de vice-président du conseil régional.
Un autre sénateur cumulard disait que ces parlementaires deviendraient des apparatchiks, dépendants des appareils politiques. Je suis depuis réélu sans le soutien d'un parti politique, devançant en 2011 les listes de droite conduites par des super-cumulards. Je suis même arrivé en tête de toutes les listes en 2017 : pas mal pour un élu hors-sol !
Pas besoin d'être un cumulard, profiteur du système, pour comprendre les problèmes des communes. Un simple conseiller peut aussi bien connaître les dossiers, s'il travaille. (Marques d'impatience à droite)
Mme la présidente. - Votre temps de parole est terminé.
M. Jean Louis Masson. - Je reviendrai !
Mme la présidente. - Je n'en doute pas !
M. Stéphane Le Rudulier, rapporteur. - Le débat peut être passionnant et passionné, mais faisons preuve de retenue. En caricaturant, on se caricature soi-même. (Mme Françoise Gatel renchérit.) Avis défavorable. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et du RDSE)
Mme Nadia Hai, ministre déléguée. - Je partage les propos du rapporteur. Mon ministère est rattaché à celui de la cohésion des territoires : les élus ne sont pas des profiteurs mais ils sont au travail pour leurs administrés et pour l'intérêt général.
On peut ne pas être d'accord, mais soyons à la hauteur des débats. Je veux rendre ici hommage aux élus. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et du RDSE)
Mme Françoise Gatel. - Très bien !
La motion n°26 n'est pas adoptée.
Discussion générale (Suite)
Mme Françoise Gatel . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; Mme Marie-Pierre Richer applaudit également.) L'exercice est difficile : je salue le rapporteur et le président Marseille pour son initiative pertinente et sage.
La loi de 2014 était censée être moderne et mettre un terme à une soi-disant extravagance française.
Le terme de cumul s'est diffusé comme un poison démagogique : il aurait été la cause de la défiance entre citoyens et élus. Sept ans plus tard, la loi guérisseuse n'a rien guéri.
On se compare avec l'Allemagne, mais c'est un pays fédéral, contrairement à la France centralisée où les collectivités territoriales ont bien du mal à freiner les injonctions de l'administration.
Les auteurs de la loi de 2014 expliquaient qu'il était humainement impossible d'assumer en même temps des charges locales et nationales, considérant les 35 heures comme la norme du temps de travail parlementaire... Mais ils ont autorisé le cumul avec une activité professionnelle à plein temps, ainsi qu'entre plusieurs fonctions exécutives locales. On peut ainsi être maire d'une grande ville et président de nombreux syndicats intercommunaux...
Cette règle partiale oublie qu'un président d'exécutif local est un chef d'orchestre, qui travaille en équipe.
On prétendait aussi que l'interdiction du double mandat renouvellerait la classe politique ; mais elle a renforcé le pouvoir des partis politiques, qui ont implanté localement des hommes et des femmes du sérail.
On disait que la loi de 2014 renforcerait la démocratie, mais l'électeur est toujours libre de son vote, et beaucoup de maires sont reconduits.
On a fait valoir que la possibilité de garder un mandat délibératif maintenait le lien avec le terrain. Mais qui peut faire croire que la fréquentation assidue des inaugurations, certes louable, peut donner une connaissance fine des affaires locales ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; marques d'agacement sur les travées des groupes SER et CRCE)
L'efficacité de la loi et de l'action publique s'en trouve-t-elle renforcée ? Non. Les lois restent trop souvent hors sol. Le Sénat, lui, se caractérise par l'expérience exécutive de nombreux sénateurs, grâce à laquelle il affûte, enrichit, perfectionne la loi.
Le groupe UC soutiendra avec une forte conviction cette proposition de loi organique de son président, contre une mesure qui n'a pas tenu ses promesses de renforcer la confiance dans la politique. Elle est justement calibrée. Je ne suis pas une fanatique des seuils, parfois castrateurs, mais celui que retient ce texte est nécessaire et satisfaisant. Il tire les leçons des critiques adressées aux élus, parfois justifiées mais amplifiées par les apôtres du populisme.
Faisons le pari d'une démocratie où tout citoyen peut être élu. Refusons le poison de la démagogie qui, bien plus que nos petites personnes, menace la démocratie.
Madame la ministre, je vous invite à faire part au Président de la République de cette proposition du Sénat. En la matière, nous devons aller au-delà du simple débat. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)
M. Jean-Yves Roux . - Depuis les lois de 1985, 2000 et 2014, les possibilités de cumul des mandats ont été très réduites, dans l'objectif de rendre plus transparente la vie politique.
Les auteurs de cette proposition de loi organique considèrent que ces mesures n'ont pas atteint leur but, puisqu'elle revient en partie sur la loi organique du 14 février 2014. L'article premier modifie ainsi le code électoral pour rendre compatible le mandat parlementaire avec les fonctions de maire d'une commune de moins de 10 000 habitants. En revanche, il ne revient pas sur la possibilité de cumuler des mandats exécutifs locaux.
Le RDSE a la proximité chevillée au corps : les parlementaires doivent s'appuyer sur leur expérience au sein des exécutifs locaux, communes, EPCI, syndicats mixtes. Mais la loi de 2014 est bien acceptée par nos concitoyens. Un retour en arrière, dans un contexte d'abstention importante, serait contre-productif.
Je souscris à la suppression de l'article 2, qui prévoyait, en cas de cumul, l'absence de rémunération du mandat local, par la commission des lois. Ce n'était pas un bon message pour les élus dépositaires de ces mandats.
Je crois nécessaire de rappeler que la loi NOTRe a modifié le paysage de la décentralisation, pour favoriser un cumul horizontal et silencieux, puisqu'il se joue au sein des conseils municipaux, départementaux ou régionaux. Cela appelle une régularisation.
Est-il du ressort de la loi de dire ce qu'est un élu « hors sol » ? N'est-ce pas aux électeurs de décider ?
Mme Françoise Gatel. - Justement !
M. Jean-Yves Roux. - Le RDSE votera majoritairement contre cette proposition de loi organique. (Applaudissements sur les travées du RDSE et du RDPI, et sur quelques travées du groupe SER)
M. Jean Louis Masson . - Je ne remets pas en cause le travail des maires, mais ceux qui veulent cumuler ces fonctions et celles de parlementaires.
Je ne retire strictement rien de ce que j'ai dit. Pourquoi certains pourraient-ils qualifier d'autres parlementaires de « hors-sol », sans que ceux qui refusent le cumul ne puissent dire ce qu'ils pensent des cumulards ?
Chacun a dénoncé le cumul horizontal, qui est effectivement un scandale. Des maires de très grandes villes sont aussi présidents de métropoles ou vice-présidents de grandes régions. Mais dans ce cas, il aurait fallu une proposition de loi pour l'empêcher et limiter le pouvoir de ces petits féodaux ! Au lieu de cela, nous avons une proposition de loi qui sert les députés et sénateurs... Il est vrai qu'on n'est jamais mieux servi que par soi-même !
M. Éric Kerrouche . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Jules Simon, alors sénateur, déclarait en 1892 que le cumul des mandats avait pour conséquence qu'un citoyen en démocratie assume plus de pouvoirs qu'aucune aristocratie aurait jamais pu lui accorder.
Ce cumul nuit à l'efficacité de leur travail et au contrôle démocratique. Depuis 1985, des lois ont tenté de l'encadrer, à l'initiative de gouvernements de gauche. Par un sens du calendrier étonnant, le groupe UC veut, avec cette proposition de loi organique, revenir sur ces avancées démocratiques. On est en plein retour vers le futur !
Principal argument en faveur du cumul : les élus seraient déconnectés. Mais les lois en vigueur ne prévoient pas de mandat unique, et les parlementaires peuvent toujours cumuler.
M. Joël Bigot. - Très bien !
M. Éric Kerrouche. - Pour rendre acceptable ce texte, les auteurs ont prévu un seuil de 10 000 habitants, « réaliste », disent-ils. Il exclut ainsi du non-cumul 97 % des communes françaises... Les maires des communes de 1 000 à 3 500 habitants déclarent consacrer 35 heures hebdomadaires à leur charge d'élu ; ceux des communes de 3 500 à 10 000 habitants, 45 heures. Ils apprécieront de voir combien ce seuil valorise leur travail...
Le député Jean-Pierre Worms déclarait en 1985 que le cumulard doit assumer le double reproche permanent d'être insuffisamment présent dans sa collectivité et trop absent du Parlement. Nul ne peut maîtriser totalement ces deux engagements. Les sociologues Laurent Bach, Abel François, Martial Foucault et bien d'autres s'accordent sur les effets délétères du cumul.
Cette proposition de loi consacre une différenciation. Il y aurait donc deux types de collectivités, certaines méritant plus d'implication que d'autres ? Si la fonction parlementaire est indispensable à l'avancement des dossiers locaux, faut-il donner un siège à tous les maires et chefs d'exécutifs ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Le cumul n'est pas la normalité, mais une caractéristique du système français au centralisme exacerbé par la Ve République. En 2012, 75 % des parlementaires exerçaient des fonctions d'exécutifs locales, deux fois plus que sous la IIIe République.
Jean-Éric Gicquel l'a dit : les parlementaires privés de Parlement ont trouvé un exutoire dans le pouvoir local. Le cumul est d'autant plus fort que le Parlement est faible. Michel Debré en 1955, Olivier Guichard dans son rapport de 1976 pointaient le cumul comme un agent de la centralisation. C'est une maladie auto-immune de notre démocratie. Alain Peyrefitte disait que le système ne peut s'accomplir que par la minceur des fonctions électives et la pérennise. Le cumul affaiblit le pouvoir représentatif.
Pour renforcer la confiance des citoyens dans la politique, conservons le droit en vigueur. De quoi a besoin la République ? D'un Parlement qui exerce ses missions, de collectivités locales reconnues et respectées, d'une vie démocratique qui se renouvelle. Je reprendrai le titre d'un rapport présenté en 2013 par François-Noël Buffet et Georges Labazée : « Valoriser les mandats par le non-cumul ».
Pour cela, il faut davantage de moyens pour les missions de contrôle et d'évaluation du Parlement. Plus l'on décentralise, plus il faut de temps et de reconnaissance pour les fonctions locales.
Le cumul, c'est la stratégie du baobab décrite par Yves Mény : par l'ombre qu'il fait, il empêche les autres de croître. Le cumul produit un assèchement électoral au détriment des femmes, des jeunes, des classes populaires, de la diversité.
Le groupe SER votera contre cette proposition de loi, qui donnera du Sénat l'image d'une institution conservatrice et déconnectée. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; M. Bernard Fialaire, Mme Véronique Guillotin et Mme Éliane Assassi applaudissent également. Protestations sur les travées des groupes UC et Les Républicains)
M. Alain Richard . - On peut débattre avec calme et respect. Les élus, parlementaires comme locaux, qui ont reçu leur mandat des électeurs, l'exercent généralement avec dévouement.
Il faut rappeler que les mandats électifs sont bien cumulables, dans la limite d'un mandat local non exécutif. Il est quelque peu hâtif de dire que l'impossibilité pour les parlementaires d'exercer des fonctions locales exécutives les empêcherait de connaître les réalités locales. Beaucoup d'entre nous ont été candidats aux élections municipales, départementales et régionales. La capacité des parlementaires d'exprimer les besoins locaux est maintenue, à condition de tourner l'exercice de nos fonctions vers l'écoute et le contact local.
L'exigence de disponibilité nous empêche de vouloir un retour du cumul avec un mandat exécutif, même dans les communes de moins de 10 000 habitants - où la charge de travail n'est pas plus faible, compte tenu de l'absence de services administratifs conséquents. Tout cela n'est pas de nature à rapprocher les citoyens des parlementaires.
En revanche, il y aurait des questions connexes à traiter. Ainsi de l'absence de limitation du cumul de responsabilités électives par des élus purement locaux. Il faudra légiférer sur ce point. Autre question, la mise en place, après la fin de la réserve parlementaire en 2017, de « cassettes » pour chaque élu, libres d'emploi.
Si nous assumons notre mandat avec plénitude, dévouement, volonté de contact, avec l'écoute et avec l'intégralité de nos possibilités, la République n'a pas besoin de nous confier des fonctions qui sont assumées couramment par d'autres.
M. Alain Marc . - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) La fin du cumul votée en 2014 est issue d'une petite musique qui fait des cumulards des profiteurs, sur l'air du « tous pourris ».
On trouve insupportable qu'un parlementaire assume un mandat exécutif, fût-ce dans une commune de 100 habitants, alors que le cumul de responsabilités locales est accepté.
Dans une étude commandée par les auteurs de la proposition de loi, 54 % des sondés se disent favorables au cumul des mandats tel qu'envisagé par le texte. Toutefois, peut-être n'était-il pas clair pour les sondés que les communes de moins de 10 000 habitants représentent 97 % des communes françaises...
Concernant l'article 2, si le non-cumul des indemnités est impossible constitutionnellement, il est politiquement indispensable.
Beaucoup d'élus locaux regrettent la fin du cumul. L'interdiction, en 2014, aurait été décidée sur la foi de sondages. Or souvent sondage varie, bien fol qui s'y fie !
Un mandat non exécutif local donne accès à la réalité du terrain, même si ce n'est sans doute pas suffisant. La question posée est celle de la place de l'élu.
Il existe des arguments pour et contre le cumul des mandats, c'est pourquoi chaque membre de notre groupe votera selon sa conviction. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP)
M. Rémy Pointereau . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Cette proposition de loi corrige une erreur de la loi du 14 février 2014, qui a mis fin au cumul entre mandat exécutif local et mandat parlementaire, avec des arguments agréables aux populistes. On a pointé du doigt l'addition des indemnités, sans dire qu'elle était plafonnée ; on a pris pour exemple ceux qui allaient trop loin pour imposer cette fausse bonne idée à tous.
Nous sommes passés d'un extrême à l'autre. Paradoxalement, on peut aujourd'hui être maire d'une très grande ville, président de métropole et vice-président d'une grande région.
M. Guy Benarroche. - C'est scandaleux !
M. Rémy Pointereau. - Pourtant un parlementaire ne peut pas être maire d'une commune de 500 habitants ou vice-président d'un conseil départemental. Cherchez l'erreur !
Nous voilà avec des parlementaires déconnectés, hors sol. Le Sénat avait pourtant proposé des aménagements mais, une fois encore, nous avons eu tort d'avoir eu raison trop tôt.
La fin de la réserve parlementaire est venue achever le dépouillement du parlementaire et la baisse d'attractivité de la fonction. (Marques d'approbation sur plusieurs travées du groupe Les Républicains) Il a fallu attendre les gilets jaunes et le grand débat national qui a suivi pour que le sujet revienne sur la table. (M. Jean-Marie Boyer approuve.)
Les élus locaux ont eux-mêmes demandé au Président de la République le retour du cumul. Celui-ci leur a répondu : « Je suis assez partisan de redonner du temps au législateur pour aller sur le terrain », en ajoutant : « C'est à vous d'avoir ce débat ».
Saisissant l'occasion, j'ai déposé le 14 juin 2019, avec 85 sénateurs, une proposition de loi organique permettant la complémentarité - mot que je préfère à celui de cumul - entre les mandats de parlementaire et de maire d'une commune de moins de 9 000 habitants ou de président d'intercommunalité de moins de 15 000 habitants. Elle n'a pas été inscrite à l'ordre du jour ; mais je me félicite que celle de mon collègue Hervé Marseille l'ait été.
Laissons l'électeur choisir en qui il place sa confiance.
Le groupe Les Républicains votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
présidence de Mme Pascale Gruny, vice-président
M. Guy Benarroche . - (Applaudissements sur les travées du GEST) Le Sénat représente les collectivités territoriales de la République : c'est l'article 24 de la Constitution. L'interdiction du cumul des mandats n'a pas pour objectif d'effacer la démocratie locale, mais d'éviter la concentration du pouvoir dans les mains de quelques-uns.
Je ne suis plus maire mais conseiller municipal et je ne crois pas avoir perdu le contact avec le terrain.
M. Jérôme Durain. - Très bien !
M. Guy Benarroche. - Avez-vous entendu les griefs des gilets jaunes et des abstentionnistes ? Comment pouvez-vous croire qu'ils veulent un retour au cumul des mandats ? Et comment pouvez-vous refuser toutes les propositions en faveur de la démocratie citoyenne ? Pour ma part, j'ai surtout retenu une défiance vis-à-vis de la professionnalisation des carrières politiques.
Vous dites que les électeurs choisissent, mais le cumul dans le temps est aussi un problème.
C'est par le non-cumul, la contrainte légale et la parité que de nouvelles personnes ont pu entrer en politique. J'ai été remplacé comme adjoint au maire dans ma commune de 6 500 habitants par quelqu'un qui a apporté ses idées, ses innovations.
La charge de travail est trop lourde si l'on est à la fois maire et parlementaire - et que l'on fait correctement son travail. Prendre une charge et ne pas l'assumer, voilà ce qui désole les électeurs.
Si vous déplorez le cumul horizontal à la Martine Vassal, interdisez-le ! (M. Jérôme Durain applaudit.) C'est d'ailleurs ce que les élus d'EELV s'imposent déjà pour règle.
Le GEST s'opposera à ce texte. (Applaudissements sur les travées du GEST et des groupes SER et RDPI)
Mme Éliane Assassi . - Le constat du rapporteur est juste mais ses solutions ne le sont pas.
La déconnexion supposée entre élus et électeurs viendrait du non-cumul, dont je rappelle qu'il ne concerne que les mandats exécutifs. Cette analyse est un peu courte ! L'abstention particulièrement forte aux élections locales, selon cette logique, serait liée au non-cumul des mandats ?
En filigrane se pose la question du rôle et de l'efficacité du Parlement, de ses prérogatives et de la pertinence de son action. L'affaiblissement des assemblées est un fait. Leur représentativité est à revoir. Les catégories socioprofessionnelles supérieures y sont surreprésentées. À l'Assemblée nationale, la part des chefs d'entreprise est passée de 8 à 14 % et les ouvriers et employés en sont quasiment absents. Les jeunes, les personnes issues de l'immigration et les femmes sont sous-représentées.
Mme Françoise Gatel. - Pour les femmes, il y a la loi !
Mme Éliane Assassi. - Ne faut-il pas plutôt pointer l'hyper-présidentialisation, l'inversion du calendrier entre l'élection présidentielle et les législatives, qui expose ces dernières à l'effet de souffle de la première ? La verticalité folle du pouvoir : voilà le problème auquel il faut s'attaquer. Pas moins de 64 % des sénateurs et 56 % des députés sont des élus locaux - 78 %, si l'on en retire les députés de La République en marche... (Rires et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et SER)
Cela procède d'un choix politique d'affaiblissement du Parlement. La qualité du travail parlementaire a baissé : c'est surtout frappant à l'Assemblée nationale, à cause de la sélection des candidats de La République en marche sur CV, aux dernières législatives.
C'est au Sénat, élu partiellement à la proportionnelle, que le travail parlementaire est le plus efficace. Il faut chercher un nouvel ancrage démocratique par une autre voie que le cumul des mandats.
Le chemin est encore long pour renouer le lien entre citoyens et politiques.
Le groupe CRCE, dans sa majorité, ne votera pas cette proposition de loi organique. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER et du GEST)
M. Jean-Marc Boyer . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) L'ancrage local est un impératif du bon exercice parlementaire. Comment bien légiférer sans mandat municipal, celui de l'enracinement local qui permet la remontée d'expérience du terrain ?
La crise des gilets jaunes a mis en exergue cette problématique. Nos parlementaires ont besoin d'un lien particulier sauf à être hors-sol. Il y a un trop-plein de vues générales dictées par la centralité jacobine. La verticalité du pouvoir imposée par un Macron-Jupiter a échoué.
Nos élus locaux ont la connaissance du terrain, contrairement à des parlementaires sans assise personnelle et soumis aux appareils partisans.
Comment parlementer si nos concitoyens ne peuvent plus nous faire confiance car ils n'ont plus de lien avec nous ? La ruralité, en particulier, a le sentiment d'être abandonnée. Nos concitoyens reprendront le chemin des urnes quand ils auront le sentiment que les élus leur apportent des réponses.
Je salue la proposition de loi organique de M. Pointereau et celle de M. Duplomb, qui étend les possibilités d'exercice du mandat de conseiller municipal par un parlementaire.
Quid du cumul des fonctions ministérielles avec un mandat exécutif local et du maintien de la réserve ministérielle ? Que de démagogie, que d'hypocrisie.
Je regrette que la voix des parlementaires dans les commissions d'attribution de la dotation d'équipement aux territoires ruraux (DETR) ne soit que consultative. Il faudrait une enveloppe qui leur soit spécialement allouée, dans la limite de 100 000 euros, au sein de la DETR.
Enfin, je me félicite que la commission ait rétabli la possibilité de cumuler certaines indemnités. Remettons du lien entre citoyens et élus. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Cédric Vial . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Pourquoi une nouvelle loi ? Parce que nous sommes nombreux à considérer que la situation actuelle est insatisfaisante.
Cette proposition de loi organique a vocation à corriger les effets néfastes de celle de 2014. On nous a dit que les Français étaient contre, que ce n'était pas le moment. Mais agir en responsabilité, n'est-ce pas faire ce dont nos concitoyens ont besoin et non ce dont l'opinion publique a envie ?
J'estime, pour ma part, que le cumul doit être encadré et non interdit.
Ce débat, ancien, rejoint celui de la professionnalisation de la vie politique. Les élus savent qu'il est bien plus difficile de concilier vie professionnelle et mandat local que deux mandats locaux.
Il est vrai qu'il y a eu des abus et que l'opinion publique a vu dans le cumul une volonté d'additionner les indemnités, malgré l'existence d'un plafond. Mais comme souvent en France, avec un effet de balancier, nous sommes passés d'un extrême à l'autre. La qualité du travail législatif a été affectée par l'impossibilité pour les parlementaires de participer aux exécutifs locaux.
Nous devons trouver un juste équilibre. Nos concitoyens veulent des élus qui les comprennent vraiment. Quand on vit la même chose qu'eux, on ne les représente que mieux ! C'est en faisant que l'on apprend le mieux.
Mme le président. - Veuillez conclure.
M. Cédric Vial. - Ce texte n'est pas parfait mais c'est une manche gagnée par le bon sens contre l'air du temps. Il nous amène à un meilleur équilibre en nous préservant des excès du passé. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
Mme Nadia Hai, ministre déléguée. - J'ai écouté les arguments de toutes et tous. Je suis d'accord que les deux jambes, locale et nationale, sont partie du rôle de parlementaire. Je récuse la notion de cumulard, mais aussi que le parlementaire sans mandat local serait « hors-sol », déconnecté du terrain. Le parlementaire entretient un lien permanent avec les acteurs de son territoire, il fait la loi, contrôle l'action du Gouvernement et évalue les politiques publiques : il travaille bien plus que 35 heures, comme l'a dit Mme Gatel ! Revenir au cumul ne me semble donc pas opportun.
Quant à votre condescendance, madame Assassi, vis-à-vis des députés LREM, elle n'est pas à la hauteur du débat. (Mme Éliane Assassi proteste.)
M. Alain Richard. - Très bien.
La discussion générale est close.
Discussion des articles
ARTICLES ADDITIONNELS avant l'article premier
Mme le président. - Amendement n°15, présenté par M. Masson.
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après les mots : « conseiller municipal », la fin du premier alinéa de l'article L.O. 141 du code électoral est ainsi rédigée : « , conseiller municipal, conseiller communautaire ou métropolitain. »
M. Jean Louis Masson. - En toute logique, il s'agit de prendre en compte le mandat de conseiller communautaire, plus important que celui de conseiller d'une petite commune.
Mme le président. - Amendement n°16, présenté par M. Masson.
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l'article L.O. 141 du code électoral, les mots : « d'une commune soumise au mode de scrutin prévu au chapitre III du titre IV du présent livre » sont supprimés.
M. Jean Louis Masson. - Celui-ci soulève un problème similaire. (Railleries sur les travées du groupe Les Républicains)
Mme le président. - Amendement n°18, présenté par M. Masson.
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L.O. 141 du code électoral est complété par les mots : « , conseiller d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre représentant une commune de 1 000 habitants ou plus, conseiller métropolitain ».
M. Jean Louis Masson. - Pour faire plaisir à mes collègues, je vais lire intégralement le dispositif de l'amendement, ainsi que son objet. (L'orateur s'exécute.)
Cet amendement étend la limitation du cumul au mandat de conseiller communautaire représentant une commune de 1 000 habitants ou plus et de conseiller métropolitain.
Mme le président. - Amendement n°17, présenté par M. Masson.
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L.O. 141 du code électoral est complété par les mots : « , conseiller communautaire ou métropolitain ».
M. Jean Louis Masson. - (L'orateur donne lecture du dispositif et de l'objet de son amendement.) Celui-ci vise le mandat de conseiller communautaire.
M. Stéphane Le Rudulier, rapporteur. - Avis défavorable aux quatre amendements.
Vous durcissez les règles d'incompatibilité, ce qui est contraire à l'esprit de la proposition de loi.
Par ailleurs, vous supprimez l'incompatibilité avec le mandat de conseiller communautaire, mais pour le devenir, il faut déjà être élu municipal ! (M. Mathieu Darnaud et Mme Françoise Gatel le confirment.)
Les métropoles sont récentes, il est utile que les parlementaires puissent y siéger.
M. Vincent Segouin. - Bravo !
Mme Nadia Hai, ministre déléguée. - Avis défavorable pour les mêmes raisons.
L'amendement n°16 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos15, 18 et 17.
Mme le président. - Amendement n°19, présenté par M. Masson.
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au 1° de l'article L.O. 141-1 du code électoral, les mots : « et d'adjoint au maire » sont remplacés par les mots : « d'adjoint au maire et de conseiller municipal délégué ».
M. Jean Louis Masson. - En réponse à ma question écrite, le ministre a ainsi répondu : « En matière d'interdiction de cumul d'un mandat parlementaire avec des fonctions exécutives locales, la loi organique du 14 février 2014 a introduit la possibilité pour un parlementaire, membre d'un conseil municipal, de recevoir ou de conserver une délégation "si celle-ci porte sur les attributions exercées au nom de l'État mentionnées à la sous-section 3 de la présente section", conformément à l'alinéa 3 de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités générales.
Il n'est ni raisonnable, ni logique de permettre à un député, sénateur ou député européen d'être conseiller municipal délégué.
M. Mathieu Darnaud. - N'importe quoi !
M. Stéphane Le Rudulier, rapporteur. - Avis défavorable.
Soit, vous durcissez les règles, mais une délégation permet de garder les pieds sur terre.
De plus, quelle date prendre en compte ? L'élection, la décision ou l'acceptation de la délégation ?
Mme Nadia Hai, ministre déléguée. - L'article L. 2222-18 de la loi organique du 14 février 2014 a modifié le code général des collectivités territoriales par cohérence avec l'interdiction de fonctions exécutives locales. Toutefois, des délégations pour des compétences exercées au nom de l'État ont été maintenues, au vu du caractère national du mandat parlementaire.
Votre amendement n'est pas opérant car il modifie un article du code électoral. Avis défavorable.
L'amendement n°19 n'est pas adopté.
ARTICLE PREMIER
Mme le président. - Amendement n°1, présenté par M. Kerrouche et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Supprimer cet article.
M. Éric Kerrouche. - Il y a une opposition philosophique entre ceux qui souhaitent le retour du cumul, même tempéré, et nous, qui considérons qu'il faut éviter cette pathologie.
Dans l'ensemble des démocraties occidentales, qu'elles soient unitaires ou fédérales, le cumul est une exception ou inexistant. Il faut séparer le monde local et le monde parlementaire : inutile de faire partie des deux pour que cela fonctionne.
Mme le président. - Amendement identique n°4, présenté par M. Masson.
M. Jean Louis Masson. - En réponse à Mme la ministre, c'est bien une loi organique qui a été votée mais le Conseil constitutionnel l'avait dégradée en loi ordinaire. Il aurait pu faire de même avec mon amendement. Attention à ce que vous affirmez !
Cela étant, vous avez compris mon opposition au texte - d'où cet amendement de suppression.
Mme le président. - Amendement identique n°22, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.
M. Guy Benarroche. - La pratique ancienne du cumul témoigne d'une conception du politique dont l'objectif est de concentrer le maximum de pouvoir entre un nombre restreint de décideurs.
Le non-cumul permet d'accroître le nombre de personnes en responsabilités, renforce la vitalité de la démocratie, la diversité de la représentation politique et la confiance des citoyens.
Les parlementaires n'ont pas besoin de cumuler des responsabilités pour s'engager pleinement dans la vie politique locale et conserver un lien avec le terrain. Nous en sommes l'exemple. Cela fait d'ailleurs partie intégrante de leurs missions.
M. Stéphane Le Rudulier, rapporteur. - Avis défavorable à ces amendements qui vident la proposition de loi de son contenu.
La crise de défiance envers le politique n'est pas liée au seul cumul : on pourra reparler de l'affaiblissement du Parlement (M. Jean-François Husson le confirme), de la prolifération des ordonnances, du quinquennat...
Mais souvenez-vous de cet amendement au projet de loi Climat et résilience, dû à un député n'ayant jamais exercé de mandat local, qui imposait aux flottes de véhicules des communes d'être à 100 % propres avant 2025. Nous nous y étions tous opposés, car nous avons, nous, une expérience locale ! Il convient d'éviter ce type d'écueil.
Mme Nadia Hai, ministre déléguée. - Avis favorable, en cohérence avec notre position sur le texte.
M. Éric Kerrouche. - Faites attention, monsieur le rapporteur : avoir été élu local n'est pas un prérequis pour être parlementaire. Les élus LaRem ne sont pas illégitimes parce qu'ils n'ont pas été élus locaux ! (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains) Il y a d'autres expériences enrichissantes, professionnelles par exemple, que celle d'élu local.
Je le redis, le cumul des mandats est une anomalie dans les démocraties occidentales. Revenir sur le non-cumul, c'est ouvrir une première porte, puis une autre...
Mme Françoise Gatel. - Je suis en désaccord. On a déplacé le débat sur la question existentielle de ce qu'est devenu le Parlement.
Mon opposition à cet amendement est fondée non pas sur le désir de voir des parlementaires détenir un mandat local, mais sur celui de voir le maire d'une commune de 500 habitants devenir parlementaire s'il le souhaite. La démocratie est tellement forte, tellement vraie, que l'on peut laisser les électeurs juges !
Nous ne faisons aucun procès en illégitimité.
Cher Éric Kerrouche, la loi de 2014 n'a rien guéri : parlementaires et élus sont insatisfaits, l'abstention n'a pas reculé. Je suis plus favorable à la limitation des mandats dans le temps. L'enfermement dans la doctrine de 2014 n'a rien de moderne !
M. Jean-François Longeot. - Je suis surpris : être parlementaire et conseiller d'une région de trois millions d'habitants ne serait pas une anomalie, mais être maire d'une commune de cinquante habitant, si ?
J'ai du mal à entendre qu'un seul mandat suffirait à garantir la proximité. (M. Éric Kerrouche s'étonne.) Nous ne devons pas rencontrer les mêmes élus ! (Mme Éliane Assassi proteste.) Combien d'entre eux me disent que les textes votés ne correspondent pas aux attentes des citoyens ! Vous pouvez comprendre les maires, mais vous ne vivez pas leurs difficultés au quotidien. (Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE) Voilà l'anomalie !
On est passé de 360° à 0°.
M. Laurent Duplomb. - Exactement !
M. Jean-François Longeot. - Réfléchissons-y, c'est le bon sens paysan ! (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains)
M. Mathieu Darnaud. - Cher Éric Kerrouche, quelle philosophie a prévalu dans la loi anti-cumul ? La quantité de travail ? Mais vous avez fait d'immenses régions, et autorisé un parlementaire à être conseiller régional, et même président de commission... mais il ne pourrait être maire d'une commune de 50 habitants ?
Mme Françoise Gatel. - Très bien !
M. Mathieu Darnaud. - Vous parlez d'anomalie, de pathologie. Mais pourquoi alors tolérer un mandat non exécutif ? Vous avez fait de l'eau tiède, sûrement par clientélisme. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC ; M. Éric Kerrouche proteste vivement.)
Vous n'avez absolument pas traité la question du cumul horizontal ! Oui, si on peut présider une commission dans un grand conseil régional, on peut être maire d'une commune de cinquante habitants ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)
M. Jean-Claude Tissot. - On peut être sénateur et conseiller municipal, départemental et régional. Je ne doute pas de votre envie sincère de participer à la vie locale, chers collègues. Rien ne vous l'interdit ! Un simple conseiller municipal peut très bien siéger à un syndicat d'énergie ou en charge du SCoT. Le seul interdit, c'est d'être membre de l'exécutif.
Est-ce le pouvoir que vous ne voulez pas partager ?
Mme Françoise Gatel. - Oh ! Caricatural !
M. Jean-Claude Tissot. - Vous avez une vision rétrograde de la gestion de la collectivité. Acceptez de laisser l'exécutif à d'autres.
M. Bernard Fialaire. - Permettez qu'un parlementaire hors-sol témoigne. Je ne cumule plus aucun mandat après avoir été vingt-cinq ans maire, vingt ans président d'intercommunalité, et je ne pense pas être déconnecté.
M. Rémy Pointereau. - Bien sûr !
M. Bernard Fialaire. - Un député m'a dit être déconnecté du terrain depuis qu'il n'est plus maire... alors qu'il a été remplacé par sa femme ! (On s'amuse à gauche.)
Quel manque de respect, dans vos propos, pour les conseillers « de base », qui sont pourtant très impliqués dans leur collectivité ! Je continue d'assister aux conseils de mon ancienne commune, ainsi qu'à d'autres, au conseil communautaire...
À croire que certains ici souhaitent être maire pour mieux faire du lobbying pour leur territoire !
M. Vincent Segouin. - Oh là là !
M. Bernard Fialaire. - Notre combat devrait plutôt être de revaloriser l'ensemble des élus municipaux, et le travail des parlementaires. (M. Éric Kerrouche applaudit.)
À la demande du groupe SER, les amendements identiques nos1, 4 et 22 sont mis aux voix par scrutin public.
Mme le président. - Voici le résultat du scrutin n°5 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 321 |
Pour l'adoption | 120 |
Contre | 201 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Mme le président. - Amendement n°20, présenté par M. Paccaud, Mmes Lavarde, Berthet et Joseph, MM. Genet et Sautarel, Mme Gruny, MM. Cambon et J.P. Vogel, Mme Muller-Bronn, MM. Bouchet, Favreau et Savary, Mme Belrhiti, M. Saury, Mme Estrosi Sassone et MM. Pointereau, Calvet, Rietmann, Chauvet, D. Laurent et Belin.
Rédiger ainsi cet article :
L'article L.O. 141-1 du code électoral est ainsi rédigé :
« Art. L.O. 141-1. - Le mandat de député est incompatible avec :
« 1° Les fonctions de maire d'une commune de plus de 10 000 habitants ;
« 2° Les fonctions de président d'un établissement public de coopération intercommunale ;
« 3° Les fonctions de président de conseil départemental ;
« 4° Les fonctions de président de conseil régional ;
« 5° Les fonctions de président d'un syndicat mixte ;
« 6° Les fonctions de président du conseil exécutif de Corse et de président de l'assemblée de Corse ;
« 7° Les fonctions de président de l'assemblée de Guyane ou de l'assemblée de Martinique ; de président du conseil exécutif de Martinique ;
« 8° Les fonctions de président du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ; de président du congrès de la Nouvelle-Calédonie ; de président d'une assemblée de province de la Nouvelle-Calédonie ;
« 9° Les fonctions de président et de membre du Gouvernement de la Polynésie française ; de président de l'assemblée de la Polynésie française ;
« 10° Les fonctions de président de l'assemblée territoriale des îles Wallis et Futuna ;
« 11° Les fonctions de président du conseil territorial de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon ;
« 12° Les fonctions de président de l'organe délibérant de toute autre collectivité territoriale créée par la loi ;
« 13° Les fonctions de président de l'Assemblée des Français de l'étranger.
Tant qu'il n'est pas mis fin, dans les conditions prévues au II de l'article L.O. 151, à une incompatibilité mentionnée au présent article, l'élu concerné ne perçoit que l'indemnité attachée à son mandat parlementaire. »
M. Olivier Paccaud. - Cet amendement complète la proposition pertinente de M. Marseille, qui assouplit les règles en autorisant le cumul avec un exécutif municipal. Je vous propose d'aller un peu plus loin en étendant le cumul à la vice-présidence d'un département ou d'une région.
La loi nous a permis de sortir des abus d'hier. Je pense à un sénateur de mon département, de gauche, qui cumulait jusqu'à dix-sept fonctions, ce qui lui a valu les honneurs du Canard enchaîné ! C'était évidemment inacceptable.
Les collectivités ont-elles intérêt à se passer de l'expérience d'un parlementaire ? Je ne le pense pas.
Pierre Mauroy, député-maire, sénateur-maire, premier ministre-maire de Lille, parlait joliment de « courroie d'enracinement ». Donnons à nos collectivités la force du Parlement !
M. Rémy Pointereau. - Très bien !
Mme le président. - Sous-amendement n°27 à l'amendement n° 20 rectifié de M. Paccaud, présenté par Mme Gatel.
Amendement n° 20, alinéa 5
Compléter cet alinéa par les mots :
dont la population totale excède 10 000 habitants
Mme Françoise Gatel. - La proposition raisonnable et raisonnée de M. Marseille a recueilli une majorité d'avis favorables lors d'un sondage.
Si l'amendement de M. Paccaud était accepté, il faudrait le compléter par l'autorisation de faire partie de l'exécutif d'un EPCI de moins de dix mille habitants. Malgré le seuil théorique de quinze mille fixé par la loi NOTRe, il en existe environ trois-cents.
Mme le président. - Amendement n°6, présenté par M. Masson.
Rédiger ainsi cet article :
Après les mots : « conseiller municipal », la fin du premier alinéa de l'article L.O. 141 du code électoral est ainsi rédigée : « , conseiller d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre. »
M. Jean Louis Masson. - Les deux amendements précédents confortent ce que je pense : la proposition de loi est l'arbre qui cache la forêt, derrière lequel chacun est prêt à s'engouffrer pour amputer plus encore la loi contre les cumuls !
Le Sénat serait-il plus efficace, répondrait-il mieux aux aspirations, si nous revenions au système antérieur ? Il a pourtant voté la loi NOTRe, et ce avant l'interdiction du cumul ! Parmi ceux qui, comme moi, ont voté contre jusqu'au bout, il y avait des opposants au cumul... Preuve que c'est un faux argument !
Mme le président. - Amendement n°5, présenté par M. Masson.
Rédiger ainsi cet article :
Au premier alinéa de l'article L.O. 141 du code électoral, les mots : « d'une commune soumise au mode de scrutin prévu au chapitre III du titre IV du présent livre » sont supprimés.
M. Jean Louis Masson. - Défendu.
Mme le président. - Amendement n°14, présenté par M. Masson.
Rédiger ainsi cet article :
Le premier alinéa de l'article L.O. 141 du code électoral est complété par les mots : «, conseiller d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre représentant une commune de 1 000 habitants ou plus, conseiller métropolitain ».
M. Jean Louis Masson. - Défendu.
Mme le président. - Amendement n°8, présenté par M. Masson.
Rédiger ainsi cet article :
Le premier alinéa de l'article L.O. 141 du code électoral est complété par les mots : « et conseiller d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ».
M. Jean Louis Masson. - Défendu.
M. Stéphane Le Rudulier, rapporteur. - L'amendement n°20 étend l'autorisation du cumul avec un certain nombre de fonctions. Sagesse : cela perturbe l'équilibre du texte proposé par le président Marseille, même si la demande est légitime.
Même avis sur le sous-amendement n°27, pour lequel mon engouement est plus marqué.
Monsieur Paccaud, je vous demande tout de même de retirer, à l'alinéa 9, la mention « membre du Gouvernement ».
M. Olivier Paccaud. - Bien sûr ! C'est une coquille.
Mme le président. - Il devient l'amendement n°20 rectifié.
Amendement n°20 rectifié, présenté par M. Paccaud, Mmes Lavarde, Berthet et Joseph, MM. Genet et Sautarel, Mme Gruny, MM. Cambon et J.P. Vogel, Mme Muller-Bronn, MM. Bouchet, Favreau et Savary, Mme Belrhiti, M. Saury, Mme Estrosi Sassone et MM. Pointereau, Calvet, Rietmann, Chauvet, D. Laurent et Belin.
Rédiger ainsi cet article :
L'article L.O. 141-1 du code électoral est ainsi rédigé :
« Art. L.O. 141-1. - Le mandat de député est incompatible avec :
« 1° Les fonctions de maire d'une commune de plus de 10 000 habitants ;
« 2° Les fonctions de président d'un établissement public de coopération intercommunale ;
« 3° Les fonctions de président de conseil départemental ;
« 4° Les fonctions de président de conseil régional ;
« 5° Les fonctions de président d'un syndicat mixte ;
« 6° Les fonctions de président du conseil exécutif de Corse et de président de l'assemblée de Corse ;
« 7° Les fonctions de président de l'assemblée de Guyane ou de l'assemblée de Martinique ; de président du conseil exécutif de Martinique ;
« 8° Les fonctions de président du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ; de président du congrès de la Nouvelle-Calédonie ; de président d'une assemblée de province de la Nouvelle-Calédonie ;
« 9° Les fonctions de président de la Polynésie française ; de président de l'assemblée de la Polynésie française ;
« 10° Les fonctions de président de l'assemblée territoriale des îles Wallis et Futuna ;
« 11° Les fonctions de président du conseil territorial de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon ;
« 12° Les fonctions de président de l'organe délibérant de toute autre collectivité territoriale créée par la loi ;
« 13° Les fonctions de président de l'Assemblée des Français de l'étranger.
Tant qu'il n'est pas mis fin, dans les conditions prévues au II de l'article L.O. 151, à une incompatibilité mentionnée au présent article, l'élu concerné ne perçoit que l'indemnité attachée à son mandat parlementaire. »
M. Stéphane Le Rudulier, rapporteur. - Avis défavorable aux amendements de M. Masson.
Mme Nadia Hai, ministre déléguée. - Avis défavorable à tous les amendements. Le régime de 2014 vise l'ensemble des fonctions exécutives, dont celles de vice-président. Le code électoral n'empêche pas un parlementaire d'exercer un mandat au sein des assemblées délibérantes locales.
Vous citez le regretté Pierre Mauroy. Il disait aussi : « Face au chômage, la sagesse est que les travailleurs travaillent moins ». (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Olivier Paccaud. - Dites cela à M. Lecornu !
M. Éric Kerrouche. - Non, madame Gatel, les Français ne sont pas pour le cumul, au contraire. Le sondage que vous évoquez était formulé de façon très particulière... Et un sondage n'est pas un vote !
Toutes les lois sur les intercommunalités ont prévu des procédures dérogatoires.
Monsieur Darnaud, en 1985, c'est la gauche qui interdit les super-cumuls. En 2000, elle a dû interdire aussi les pratiques de contournement, les élus « locomotives » qui se démettaient une fois élus. Il faut aller plus loin, dites-vous ? J'attends vos initiatives !
Il y a toujours des gens à qui les seuils ne conviennent pas. Mais multiplier les dérogations, c'est ouvrir la boîte de Pandore. Au fond de celle-ci, il y avait l'espoir. L'espoir d'une démocratie marquée par le non-cumul !
Mme Françoise Gatel. - Monsieur Masson, je n'ai pas voté la loi NOTRe par conviction mais pour éviter le pire à l'Assemblée nationale. J'assume mon rôle de digue ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)
Monsieur Kerrouche, vous nous faites un aveu de culpabilité ! (M. Éric Kerrouche proteste.) Si la loi de 2014 avait fonctionné, cela se saurait : il y aurait des femmes et des ouvriers au Parlement, et des maires de village de 50 habitants seraient parlementaires si les électeurs le voulaient.
M. Éric Kerrouche. - Vous fixez le seuil à 10 000 !
M. Mathieu Darnaud. - En votant la loi NOTRe, nous avons renforcé les minorités de blocage et évité la disparition des départements !
Monsieur Kerrouche, vous avez toujours balayé d'un revers de manche toutes nos propositions visant à enraciner les parlementaires dans la vie locale, comme la DETR par exemple.
À entendre M. Tissot, on croirait que les maires de petits villages de 50 habitants sont assoiffés de pouvoir... Soyons raisonnables !
M. Jean-Claude Tissot. - Ce n'est absolument pas ce que j'ai dit.
M. Mathieu Darnaud. - Ma commune compte 12 000 habitants - je ne prêche pas pour moi, mais pour le maintien d'un lien de proximité entre les parlementaires et les territoires. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)
M. Guillaume Gontard. - Ce débat est surréaliste... mais je me réjouis d'apprendre que le Gouvernement est pour le partage du travail !
Vous parlez des communes de 50 habitants - mais vous fixez le seuil à 10 000 ! J'entends un certain dénigrement des petites communes. J'ai été maire d'une commune de 150 habitants : quand on n'a ni employé communal, ni secrétaire de mairie, difficile d'être au Sénat du mardi au jeudi ! (Mme Françoise Gatel le conteste.)
Je n'ai jamais rencontré sur le terrain quelqu'un pour réclamer le retour au cumul des mandats. (M. Laurent Duplomb proteste.)
En démissionnant de mon rôle de maire, je suis resté conseiller municipal de ma petite commune. J'ai conservé le contact avec la proximité - et le bon sens paysan !
Le sous-amendement n°27 est adopté.
L'amendement n°20 rectifié, sous-amendé, est adopté et l'article premier est ainsi rédigé.
Les amendements nos6, 5, 14, 8, 2 rectifié, 13, 12, 11, 10, 9 et 21 rectifié n'ont plus d'objet.
ARTICLE ADDITIONNEL après l'article premier
Mme le président. - Amendement n°23 rectifié, présenté par MM. Pellevat et Genet, Mmes Puissat, Berthet et Noël, MM. Perrin, Panunzi et Cadec, Mme Muller-Bronn, MM. Meurant, Laménie et Sautarel, Mme Lassarade, MM. Charon et Savary, Mmes Belrhiti et Canayer, MM. Longuet, Houpert, B. Fournier, Calvet, Anglars, Lefèvre et Rietmann, Mme Dumont, MM. Bouchet et D. Laurent, Mmes Deroche, Bourrat et Thomas, M. Segouin, Mmes Procaccia et M. Mercier et MM. Grand, Belin et C. Vial.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L.O. 151 du code électoral est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« .... - Pour le remplaçant d'un député en application de l'article L.O. 176, le délai pour faire cesser une incompatibilité mentionnée au I ou II court à compter de la date du remplacement prévu par cet article. »
M. Vincent Segouin. - Actuellement, le suppléant devient automatiquement député au lendemain de la démission ou du décès du titulaire. S'il ne souhaite pas devenir député, il doit démissionner de sa suppléance avant la survenance de l'événement l'appelant à remplacer le titulaire. Faute de quoi, il doit démissionner de ses mandats antérieurs incompatibles avec celui de parlementaire dans un délai de trente jours, même s'il compte démissionner du mandat de député - pour ensuite se faire réélire.
Cette formalité est inutilement complexe.
On m'a opposé, en commission, un risque de vacance au Parlement nécessitant des scrutins partiels. Lors des dernières élections, seuls trois départements ont été concernés. Il est injuste de devoir quitter ses mandats locaux quand on ne souhaite pas conserver le mandat national.
M. Stéphane Le Rudulier, rapporteur. - Retrait ou avis défavorable. Sur la forme, l'amendement n'aboutit pas à l'objectif affiché. Sur le fond, cela incite à préférer un mandat local à un mandat national. Le problème de la vacance se poserait notamment à l'approche des élections législatives...
Mme Nadia Hai, ministre déléguée. - Avis défavorable pour les mêmes raisons.
L'amendement n°23 rectifié est retiré.
ARTICLE 2 (Supprimé)
M. le président. - Amendement n°3, présenté par M. Masson.
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le troisième alinéa de l'article 4 de l'ordonnance n°58-1210 du 13 décembre 1958 portant loi organique relative à l'indemnité des membres du Parlement est complété par une phrase ainsi rédigée : « Un parlementaire ne peut toutefois percevoir aucune indemnité pour l'exercice des fonctions de maire ou d'adjoint au maire. »
M. Jean Louis Masson. - Les parlementaires qui veulent se dévouer pour leur commune doivent pouvoir le faire de manière désintéressée. Mais compte tenu des intérêts en présence, je doute que cet amendement prospère...
M. Stéphane Le Rudulier, rapporteur. - L'article 2 a été supprimé au vu du risque constitutionnel d'inégalité devant la loi. Pour être en cohérence, il faudrait que M. Masson renonce à son indemnité de conseiller régional... Pour la préserver, avis défavorable. (Rires)
Mme Nadia Hai, ministre déléguée. - Avis défavorable à cet amendement, même si le Gouvernement est opposé au texte.
M. Daniel Chasseing. - Être maire ou adjoint au maire est important pour un jeune parlementaire.
Un mot sur la réserve parlementaire, qui était contrôlée, et servait à financer de petits projets locaux. C'était un lien très important entre la population, les associations et les communes.
L'article 2 me paraissait intéressant, même si notre rapporteur nous dit qu'il était inconstitutionnel. Il aurait été préférable de ne pas cumuler les indemnités, pour montrer le désintéressement des parlementaires. Il ne faut pas que l'on puisse nous soupçonner de cumuler les mandats pour cumuler les indemnités.
Je m'abstiendrai.
Mme Françoise Gatel. - Je remercie le rapporteur et le président de la commission des lois. J'invite M. Kerrouche à relire les débats de 2013 : ils étaient très nuancés. Cette proposition de loi organique heurte peut-être la bien-pensance ou la sincérité de certains. Si la loi de 2014 était parfaite, cela se saurait et se verrait dans les urnes.
Non, nous ne dénigrons pas les élus locaux ! Cela me choque qu'on le dise, ou qu'on parle de conseiller « local », ou « lambda ».
Quant à dire que nous serions assoiffés de pouvoir, c'est faux ! L'envie est de servir. Nous sommes mortels, et nos fonctions aussi.
Madame la ministre, enrichissez la réflexion du Président de la République de nos idées.
M. Stéphane Le Rudulier, rapporteur. - La règle de l'écrêtement date de 1992.
On peut essayer de laver plus blanc que blanc mais in fine on court le risque du suffrage censitaire : seuls ceux qui en ont les moyens se présenteraient aux élections. Retrait ou avis défavorable.
M. Jean Louis Masson. - Je m'y attendais. Pourquoi le non-cumul serait censitaire ?
Nous avons fait un grand pas ce soir : du maire de communes de moins de 10 000 habitants, nous sommes passés aux vice-présidents de conseils départementaux et régionaux !
Au rythme actuel, on arriverait dans deux heures à la suppression du non-cumul. J'assume ce que je dis et il est hors de question que je retire mon amendement.
L'amendement n°3 n'est pas adopté.
INTITULÉ DE LA PROPOSITION DE LOI
Mme le président. - Amendement n°7, présenté par M. Masson.
Rédiger ainsi cet intitulé :
Proposition de loi organique tendant à abroger en partie l'interdiction du cumul d'un mandat parlementaire avec une fonction de maire ou d'adjoint au maire
M. Jean Louis Masson. - Il faut appeler un chat un chat. C'est pourquoi je propose ce titre qui a le mérite d'expliquer l'objectif de cette proposition de loi organique, à savoir le rétablissement du cumul des mandats.
M. Stéphane Le Rudulier, rapporteur. - Avis défavorable. J'aime la simplicité : l'implantation locale des parlementaires, c'est du concret.
Mme Nadia Hai, ministre déléguée. - Avis défavorable.
L'amendement n°7 n'est pas adopté.
Explications de vote
M. Éric Kerrouche . - Deux positions très tranchées se font face ce soir. Est-ce qu'avant la loi de 2014, les choses allaient mieux ? (Plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains : « oui ! »)
Le cumul a eu un effet négatif sur le long terme car les territoires ayant des parlementaires cumulant les mandats étaient favorisés par rapport aux autres. Le cumul a asséché la démocratie locale, car les éventuels candidats hésitaient à affronter un cumulard.
Il n'est pas sérieux de dire que la crise de la démocratie est liée au non-cumul.
Mme Françoise Gatel. - On n'a pas dit ça !
M. Éric Kerrouche. - Si ! Dit et répété ! Ce sont des considérations d'élus pour les élus. La démocratie se fait avant tout pour les citoyens et le peuple !
M. Bruno Retailleau . - Nous voterons cette proposition de loi organique pour mettre fin à deux formes d'hypocrisie.
Le Gouvernement s'oppose à notre demande avec une régularité métronomique, mais certains ministres cumulent !
En outre, les élus locaux ont le droit de cumuler plusieurs mandats.
La démocratie française a-t-elle été réparée par la loi sur le non-cumul ? Ou par la loi Notre ? Ces deux lois ont favorisé l'éloignement entre le lieu de décision et le terrain.
Lorsqu'on coupe les racines et qu'on désarticule local et national, on brise la confiance.
Nous voulons que nos concitoyens soient libres de choisir leurs élus, pas des solutions de facilité démagogiques. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)
M. Jean Louis Masson. - C'est vrai que la loi NOTRe a été très mauvaise mais n'ayons pas la mémoire courte ! Concernant les redécoupages d'intercommunalité, elle ressemble très fort à ce que Sarkozy voulait faire. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)
Pareil pour le seuil de 15 000 habitants ! Qui a baissé de 10 000 le nombre de policiers ? C'est Sarkozy !
M. Bruno Retailleau. - Sarkozy, sors de ce corps ! (Sourires)
M. Daniel Salmon. - Le périmètre du débat est plus modeste ! Lorsque l'on a été élu local, on a une tout autre vision de ce qui fait société. Avec le cumul, on empêche nos concitoyens de participer à la vie politique locale. La lutte contre le cumul est donc une évidence. Ce ne sont pas les positions réactionnaires qui vont arranger le débat démocratique dans ce pays. Chacun doit pouvoir s'investir dans la vie locale.
M. Alain Richard. - Espérons que ce débat se conclut là. Il y a sans doute beaucoup de questions à se poser sur le lien entre nos concitoyens et les élus.
Nous ne sommes pas convaincus par les dispositions proposées, alors que des outils institutionnels existent déjà. Le rétablissement d'un cumul partiel est une illusion.
Cet arrangement institutionnel bancal, offert par la proposition de loi organique, ne sera pas concluant et vite oublié.
M. Jean-Marc Boyer. - M. Sarkozy avait proposé la création de conseillers territoriaux. Avec les grandes régions, c'est désormais impossible. Tout le monde parle du millefeuille territorial mais personne ne cherche à le réduire.
La proposition de loi organique est mise aux voix par scrutin public de droit.
Mme le président. - Voici le résultat du scrutin n°6 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 316 |
Pour l'adoption | 197 |
Contre | 119 |
Le Sénat a adopté.
Prochaine séance demain, mercredi 13 octobre 2021, à 15 heures.
La séance est levée à 21 h 20.
Pour la Directrice des Comptes rendus du Sénat,
Rosalie Delpech
Chef de publication
Ordre du jour du mercredi 13 octobre 2021
Séance publique
À 15 heures
Présidence : M. Gérard Larcher, président
Secrétaires : M. Joël Guerriau - Mme Françoise Férat
1. Questions d'actualité
De 16 h 30 à 20 h 30
Présidence : Mme Laurence Rossignol, vice-présidente
2. Proposition de loi instaurant la vaccination obligatoire contre le SARS-CoV-2, présentée par MM. Patrick Kanner, Bernard Jomier, Mmes Marie-Pierre de La Gontrie, Monique Lubin et plusieurs de leurs collègues (n°811, 2020-2021)
Le soir
Présidence : M. Vincent Delahaye, vice-président
3. Débat préalable à la réunion du Conseil européen des 21 et 22 octobre 2021