Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

La séance est retransmise en direct sur France 3, Public Sénat, le site Internet du Sénat et sur Facebook. (Sourires) J'appelle chacun à respecter son temps de parole.

Rapport de la Cour des comptes

M. Michel Bouvard .  - La Cour des comptes donne acte au Gouvernement du respect de l'objectif - modeste - de réduction des déficits. Mais nous faisons partie des quatre pays en déficit excessif avec l'Espagne, le Portugal et la Grèce. L'optimisme du Gouvernement pour la loi de finances 2017 est difficilement tenable dès lors que 40 % de la réduction du déficit s'expliquent par les faibles taux d'intérêt et l'effort des collectivités locales.

Comment ferez-vous face à la hausse attendue des taux d'intérêt et quels efforts regrettez-vous de ne pas avoir faits ? Le décalage entre la France et l'Allemagne est préoccupant : on est passé de 27 à 54 points de base entre septembre et décembre.

M. Charles Revet.  - C'est grave.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget et des comptes publics .  - Chacun est dans son rôle. Dans un exercice convenu, certains finissent par surjouer ; ce n'est pas votre cas et j'apprécie la modération de votre propos.

Nous avons fait, chaque année, des prévisions de taux d'intérêt. Pour 2017, les taux d'intérêt estimés à dix ans sont de 1,25 %, alors qu'ils sont aujourd'hui à 1 % et tournaient autour de 0,5 % il y a quelques semaines. Leur récente hausse s'explique par le contexte international mais aussi national : les perspectives électorales nuisent à la lisibilité de l'avenir. Les propos de certains candidats annonçant un déficit à 4,7 % en 2017 ont sans doute alerté certains acteurs financiers.

Nos objectifs ont été tenus. Rendez-vous le 15 mars pour la loi d'exécution. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Michel Bouvard.  - Je ne puis partager votre optimisme. Les taux de fin d'année sont déjà supérieurs aux prévisions de la loi de finances. L'inquiétude de la Cour vient de ce que la baisse de la dette est due au coupon de 0,5 % du PIB encaissé par l'État. En outre, vous faites dès maintenant les encaissements pour 2017. Relisez la page 34 de son rapport !

Vaccins obligatoires

M. Jean-Claude Requier .  - Hier, le Conseil d'État nous a enjoints de prendre sous six mois des mesures contre la pénurie des trois vaccins obligatoires contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite (DTP). Les laboratoires associent ces trois vaccins à d'autres, si bien que pour se mettre en conformité avec la loi il faut recourir à des vaccins hexavalents qui vaccinent aussi contre la coqueluche, l'haemophilus influenzae et l'hépatite B, et permettent aux laboratoires d'augmenter leurs marges.

Pensez-vous possible, dans le délai imparti, de remettre sur le marché le vaccin DTP ou bien de rendre obligatoires les trois autres vaccins, piste envisagée par le Conseil d'État lui-même ?

Ce dernier a réaffirmé l'importance de la vaccination et de tordre le cou aux préjugés qui sévissent çà et là. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE, ainsi que sur certains bancs écologistes, centristes et du groupe socialiste et républicain)

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie .  - Je vous prie d'excuser Mme Touraine, à l'étranger. La vaccination est un des grands succès de notre politique de santé, car elle a éradiqué des fléaux. Ne l'oublions pas ! Dès janvier 2016, Mme Touraine a lancé un plan d'amélioration et de sécurisation de la vaccination. Un comité d'orientation indépendant présidé par le professeur Fischer, a organisé une grande concertation citoyenne, qui a produit des recommandations présentées le 30 novembre 2016. Le Gouvernement a pris acte de la décision du Conseil d'État et a immédiatement saisi les services pour qu'elle soit appliquée. Ce sera fait, en tenant compte de la concertation citoyenne. Ce travail pourrait déboucher sur une évolution du cadre législatif.

M. Jean-Claude Requier.  - Merci. En ces temps de campagne électorale, j'émets le voeu de rendre obligatoire un quatrième vaccin, celui contre la langue de bois. (Rires et applaudissements sur la plupart des bancs)

Affaire Théo (I)

Mme Esther Benbassa .  - Jeudi dernier, Théo, 22 ans, jeune homme sans histoire d'une famille honorablement connue, a été gravement blessé lors d'une opération de contrôle. Il affirme avoir subi des injures racistes et un viol. Hospitalisé, il a été déclaré en incapacité totale de travail pendant soixante jours.

Quatre policiers ont été mis en cause, l'un pour viol et les trois autres pour violences volontaires en réunion. Cela rejaillit sur toute la profession, déjà en butte à des attaques violentes. Le Défenseur des droits demande que les contrôles soient accomplis pour des raisons objectives et vérifiables. La Ligue des droits de l'homme ne dit pas autre chose.

Ne faudrait-il pas sans tarder rappeler à chacun ses devoirs, rétablir l'État de droit et restaurer une police de proximité convenablement formée pour protéger les citoyens dont elle a la charge ? (Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et communiste républicain et citoyen)

M. Bruno Le Roux, ministre de l'intérieur .  - Les blessures du jeune Théo sont graves. Je tiens à lui exprimer toute ma compassion ainsi qu'à ses proches et à sa famille, l'assurer de mon souci de la vérité. L'Inspection générale de la police a été saisie. J'appelle à la sérénité par rapport à l'engagement de justice et de vérité, identique à celui qui est le mien pour l'agression de Viry-Châtillon.

Chaque matin, je m'enquiers des enquêtes d'Aulnay, comme chaque matin, je m'enquiers sur les attaques de Viry-Châtillon.

Il n'y a pas de place pour ceux qui agressent les représentants de la République, ni pour ceux qui ne respectent pas ses valeurs dans leur travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

C'est par des politiques publiques, le renforcement des crédits du ministère de l'Intérieur, la mise en opération des caméras mobiles que l'on améliorera la situation. (Applaudissements sur les bancs écologistes, du RDSE et du groupe socialiste et républicain)

Mme Esther Benbassa.  - La tâche est lourde. Le chemin sera long. Espérons que le Gouvernement saura prendre les mesures qui s'imposent pour former la police de proximité.

Affaire Théo (II)

Mme Éliane Assassi .  - L'acte abominable commis à Aulnay-sous-Bois, véritable barbarie, suscite la compassion vis-à-vis de la victime et ses proches. Quatre agents sont mis en cause. Le Défenseur des droits est intervenu. Les policiers auraient lancé des crachats et proféré des injures racistes. Cette pratique révoltante s'inscrit dans des pratiques policières douteuses dans les quartiers. Sans remettre en cause la déontologie des policiers, il faut bien constater une tension permanente et des conditions de travail qui se dégradent. Les associations évoquent des contrôles d'identité discriminatoires voire des atteintes à la dignité humaine. Bien sûr, il faut être serein. Cependant, pourquoi certains échappent-ils à la justice expéditive de la comparution immédiate ? Remettons à plat les pratiques du maintien de l'ordre en créant une véritable police de proximité, mettons en place le récépissé pour en finir avec le contrôle au faciès. Rétablissons la confiance pour qu'il n'y ait plus d'Alexandre, de Théo ou d'Adama Traoré. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

M. Bruno Le Roux, ministre de l'intérieur .  - J'appelle chacun à la prudence. Ne qualifions pas ce qui s'est passé, c'est le travail de la justice. Les faits sont graves ; mais n'exacerbons pas les tensions. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste et républicain, au centre et à droite)

J'appelle au calme et à la sérénité. Le texte sur la sécurité publique adopté par l'Assemblée nationale prévoit des caméras mobiles à déclenchement automatique, sécurisant les contrôles d'identité. 2 000 seront déployées dans la police, 600 dans la gendarmerie. C'est préférable au récépissé, dont l'accumulation aurait pour effet de constituer un fichier des personnes contrôlées ; ce que je ne puis accepter. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Avenir de l'Union européenne

M. Richard Yung .  - Avec le Brexit, l'Union est confrontée à sa crise la plus grande. Un divorce après quarante ans de vie commune, c'est douloureux. Mais nous devons être fermes. S'il y a un accord, ceux qui restent devront avoir une situation plus favorable que celui qui part.

Pour le nouveau locataire de la Maison Blanche, le Brexit va être une chose merveilleuse ; selon lui, d'autres pays quitteront l'Union européenne, qui est un instrument au service de l'Allemagne. On voit que le président américain ne maîtrise pas bien les questions européennes ; mais surtout, ces propos choquants manifestent l'intention de construire un ordre international sur les relations bilatérales et de sortir du multilatéralisme en vigueur depuis 1945. Les États membres doivent faire bloc autour du nouveau partenariat à 27.

Quelles orientations la France mettra-t-elle en avant lors des prochains sommets ?

M. Harlem Désir, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes .  - Dans ce contexte, la première détermination de l'Union européenne doit être l'unité. Quand l'Allemagne est mise en cause, quand le futur ambassadeur des États-Unis auprès de l'Union européenne souhaite à celle-ci le même sort que l'URSS où il a été en poste, il faut que le soixantième anniversaire du traité de Rome, le 25 mars, soit l'occasion de réaffirmer notre unité.

Nous avons fait de grandes choses. Personne ne réglera nos défis à notre place. Nous avons des valeurs et des intérêts économiques à défendre. Le déplacement d'une ambassade au Proche-Orient, qui risque d'enflammer la région, l'annexion de la Crimée... tout cela doit nous inciter à réaffirmer notre attachement au multilatéralisme et au droit international. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Jungle de Calais

M. le président.  - La parole est maintenant à M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales

M. Jean-Marie Vanlerenberghe .  - Le 2 novembre dernier, je me suis réjoui du démantèlement de la jungle de Calais. J'ai félicité Mme la préfète du Pas-de-Calais pour la qualité de l'intervention des services de sécurité qui ont agi avec dignité et sécurité.

Si la situation s'est améliorée à Calais, les migrants sont de retour, surtout des mineurs, attirés par le passage vers le Royaume-Uni. À la Grande-Synthe, les passeurs font la loi sur 1 500 migrants. Les effectifs sont-ils assez nombreux pour enrayer l'installation d'une nouvelle jungle ? Les installations sont-elles suffisantes pour accueillir les migrants ? Le Brexit, qui mettra la frontière à Douvres plus qu'à Calais, n'incite-t-il pas à dénoncer les accords du Touquet ?

M. Bruno Le Roux, ministre de l'intérieur .  - Merci de me donner l'occasion de dresser un bilan précis. Pas moins de 7 424 personnes ont été mises à l'abri ; 1 952 mineurs ont été orientés vers des centres d'accueil et d'orientation, 485 transférés vers le Royaume-Uni après le démantèlement. Plus de 400 dossiers restent pendants, il est vrai.

Comme je le dis chaque semaine à mon homologue britannique, les dossiers doivent être examinés de manière précise, suivant les critères que nos amis britanniques se sont eux-mêmes fixés, à savoir le lien de parenté et la vulnérabilité, et non suivant un objectif quantitatif. Si l'on veut éviter la reconstitution des filières de passeurs, il faut que les mineurs, qui sont refusés et dont l'avenir est ici, aient le sentiment que leur cas a été traité justement.

Les effectifs de sécurité sont redimensionnés pour empêcher qu'un campement ne se reconstitue, 350 places de plus ont été ouvertes en centre d'accueil de demandeurs d'asile et 50 autres, dans les Hauts-de-France, en centre d'hébergement provisoire. Chaque cas fait l'objet d'un traitement individuel. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - Rappelons à nos amis anglais que le mot « solidarité » existe aussi dans leur langue. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-UC)

Avenir du site Alstom de Belfort

M. Cédric Perrin .  - Le 7 septembre, la direction d'Alstom annonçait la fermeture du site de Belfort. À la suite d'une forte mobilisation, le Gouvernement a annoncé le 4 octobre un plan de sauvetage soutenu par les élus. Mais nous attendons des garanties sur les commandes. Une note de Bercy qui a fuité dans la presse, soulignant les fragilités juridiques du plan, a réveillé de mauvais souvenirs chez les salariés d'Alstom... Certaines officines sont à la manoeuvre pour discréditer l'accord. Après les paroles, les collectivités locales attendent des actes et que l'État s'engage lors du comité de suivi du 17 février.

Je suis d'autant plus inquiet que, si le conseil d'administration de SNCF Mobilités a validé l'achat de trente TET en 2016, Alstom attend toujours... La commande de quinze rames TGV Bordeaux-Marseille, six rames Paris-Milan et vingt locomotives de secours sera-t-elle validée par le comité de suivi le 17 février et approuvée par SNCF Mobilités le 23 ? (Applaudissements au centre et à droite)

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget et des comptes publics .  - Veuillez excuser Christophe Sirugue, en déplacement en Allemagne. Je pourrais vous répondre en un mot : oui. Oui, je confirme le scénario que vous décrivez. La note que vous évoquez envisageait un autre scénario, qui a été écarté d'emblée par le Gouvernement. Je vous confirme, au nom du Gouvernement, que celui-ci a demandé à la SNCF de commander quinze rames à Alstom dans le contexte du contrat-cadre actuel, ce qui sera rappelé lors de la prochaine réunion du comité de suivi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Mixité sociale au collège

Mme Françoise Cartron .  - En 2011, je remettais un rapport sur les conséquences de l'assouplissement de la carte scolaire, où je proposais entre autres de faire de la mixité sociale une priorité de la politique éducative, de réexaminer la sectorisation en introduisant la notion de secteur « multi-collèges » et de moduler les dotations en fonction de la composition sociale des établissements - privés y compris. Lors de l'examen en 2013 de la loi de refondation de l'école, le Sénat a tenu à faire de la mixité sociale l'une des missions de l'Éducation nationale. Dès novembre 2015, la ministre Najat Vallaud-Belkacem s'y est attelée de la meilleure façon qui soit : résolument mais prudemment, par voie d'expérimentation.

La dernière étude PISA le rappelle, la France est le pays de l'OCDE où l'origine sociale pèse le plus sur la réussite des élèves, et la ségrégation scolaire y est pour beaucoup.

La mixité est positive pour tous les élèves, sur le plan des résultats comme de la cohésion sociale. Mais cette politique ambitieuse, si elle n'est pas bien préparée, expliquée et accompagnée, suscite des crispations. Aujourd'hui, 46 départements ont défini 82 territoires pilotes. Le Gouvernement peut-il nous en dire plus sur la rentrée prochaine ?

Mme Hélène Geoffroy, secrétaire d'État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargée de la ville .  - Veuillez excuser Mme Vallaud-Belkacem. On sait que 10 % des collèges reçoivent 63 % des élèves dont l'origine sociale est défavorisée. Il y a des générations d'élèves qui ne se rencontrent jamais. Comment, dans ces conditions, garantir l'appartenance à la République ? Certains voudraient rigidifier la carte scolaire, d'autres l'assouplir. Mais les solutions doivent venir des territoires. Ce n'est pas la carte qui fera changer le territoire, mais l'inverse.

Des solutions concrètes ont émergé dans les 25 territoires pilotes mis en place l'an dernier : resectorisation, secteurs multi-collèges, évolution de la carte de formation. Et cela marche ! Aussi la ministre a-t-elle souhaité étendre le dispositif dans 82 territoires et 248 collèges. Les collectivités locales font preuve en la matière d'un engagement transpartisan. Quatre nouveaux projets sont prévus en Gironde pour la rentrée 2018, et la rentrée 2017 permettra d'approfondir la réflexion. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; Mmes Hermeline Malherbe et Évelyne Rivollier applaudissent aussi)

Consultation des Domaines par les collectivités territoriales

M. Jean-François Longeot .  - L'arrêté du 5 décembre 2016 a relevé les seuils de consultation obligatoire des Domaines en cas d'acquisition ou de prise de bail en les portant à 180 000 euros dans le premier cas, à 24 000 euros de loyer annuel dans le second, et cela pour tenir compte de l'évolution du marché. Le seuil de consultation au premier euro en cas de cession demeure pour les seules communes de plus de 2 000 habitants.

Or de nombreuses communes rurales craignent ainsi d'être privées des services des Domaines, à qui elles s'adressaient pour obtenir des conseils et des évaluations incontestables. Pouvez-vous les rassurer ? (Applaudissements au centre)

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget et des comptes publics .  - Vous connaissez le principe de libre administration des collectivités territoriales, égratigné par la validation obligatoire de certaines transactions afin d'éviter des dérives observées dans le passé. Face à l'inflation des demandes, et les seuils de consultation obligatoire n'ayant pas été réévalués depuis des lustres, l'arrêté du 5 décembre les a relevés pour les acquisitions et prises à bail.

En-deçà des seuils, la consultation est facultative ; afin d'éviter l'inflation, nous demandons aux collectivités qui formulent une demande de justifier d'un projet solide. Pour les plus petites opérations, il est toujours possible d'utiliser le portail « Demande de valeurs foncières », et les communes de moins de 2 000 habitants peuvent demander une évaluation deux fois par an.

Ce projet a été travaillé avec l'Association des maires de France dans un dialogue constructif, une fois n'est pas coutume. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Jean-François Longeot.  - Je ne conteste pas le relèvement des seuils ni la nécessité de garantir la bonne utilisation des deniers publics. Attention cependant aux petites communes qui se sentent flouées et montrées du doigt. (Applaudissements au centre ; M. René Danesi applaudit aussi)

Olympisme et langue française

M. Jacques Legendre .  - Paris est candidat aux jeux Olympiques de 2024. Est-ce une raison pour que la signature officielle, affichée sur la Tour Eiffel, soit « Made for sharing » - fait pour partager, semble-t-il ? N'aurions-nous pu trouver autre chose que ce slogan publicitaire recyclé, qui a servi à vanter les produits de Quality Street en 1979, de Cadbury ou encore à lancer une pizza burger à découper ! D'autant qu'il est en anglais alors que le français, suivant la volonté de Pierre de Coubertin, est langue olympique. Dites « Paris est une fête » : tous les Américains vous comprendront.

Avec ce slogan, vous proclamez que la France renonce à défendre sa langue, vous désespérez Québécois et Africains qui l'ont en partage avec nous et qui, eux, en sont fiers.  Corrigerez-vous cette erreur, et même cette faute ? (Vifs applaudissements et bravos sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Thierry Braillard, secrétaire d'État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargé des sports .  - Que ne vous êtes-vous adressé à moi plus tôt pour obtenir des informations fiables ? Le 3 février, nous avons déposé le troisième et dernier dossier, sur les aspects techniques. Le même jour s'engageait la campagne de promotion de notre candidature à l'étranger. Nous avons adopté un slogan français, « Venez partager », et un autre en anglais destiné à la promotion internationale. Il y a bien deux slogans.

M. Charles Revet.  - Il n'y a qu'une Tour Eiffel !

M. Thierry Braillard, secrétaire d'État.  - Le slogan en anglais a été affiché sur la Tour Eiffel le jour du lancement de la campagne internationale, alors qu'une conférence de presse avait lieu devant 600 journalistes du monde entier. Mais nos ambassades disposent de tous les documents de la candidature en français. Pour en savoir plus, je vous invite à vous rendre à la prochaine réunion du groupe d'études sénatorial sur les pratiques sportives, mardi prochain. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; Mme Hermeline Malherbe applaudit aussi)

Aide à domicile

M. Christian Manable .  - En décembre 2016, le Défenseur des droits s'inquiétait de la situation de l'aide à domicile dans la Somme. En privilégiant le mode mandataire et en réduisant le nombre d'heures prises en charge, le département de la Somme, d'après M. Toubon, menace les intérêts des personnes âgées. Le tribunal d'Amiens vient de lui ordonner de respecter la loi en rendant à ces dernières leur libre choix.

Rappelons-nous que 90 % des professionnels de l'aide à domicile sont des femmes. En affaiblissant le mode prestataire, qui permet de les salarier dans des associations ou des services, on précarise des gens qui doivent déjà souvent composer avec une multiplicité d'employeurs, de contrats, avec le morcellement de leur temps de travail, sans parler des indemnités de transport et du droit à la formation. Le soutien à nos aînés est pourtant un enjeu social et économique de taille.

Quelles perspectives pour ces professionnels ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; Mme Hermeline Malherbe applaudit aussi)

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie .  - Je salue l'action qui fut la vôtre à la tête du département de la Somme jusqu'en 2014, marquée du sceau de la solidarité. La situation a bien changé depuis... (Vives protestations à droite) Ce n'est pas moi qui le dis, c'est le tribunal !

M. Jean-Claude Lenoir.  - Ce n'est pas à la hauteur d'un ministre !

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État.  - Le préfet a dû intervenir pour faire respecter la loi, les personnes âgées et ceux qui travaillent à leur service ! Heureusement, le droit a été dit.

L'enjeu est considérable. Dans dix ans, un tiers de la population aura plus de 65 ans. Cela nécessitera le recrutement de 300 000 personnes, mais pas n'importe qui, des personnes qualifiées et de confiance. Nous allons lancer une grande campagne pour inciter les jeunes et les candidats à la reconversion à s'y diriger, avec des moyens financiers. Ce sont des métiers non délocalisables avec des évolutions de carrière intéressantes, si du moins les départements jouent le jeu. Soyons à la hauteur. Cela commence maintenant. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; Mme Hermeline Malherbe applaudit aussi)

Écomouv'

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Ma question s'adressait à Mme Royal... qui est absente, une fois de plus ! (Exclamations à droite) Nous étions nombreux ce matin pour écouter le Premier président de la Cour des comptes présenter son rapport annuel. Pas moins de trente-deux pages sont consacrées à l'abandon calamiteux du contrat Écomouv', qui a coûté un milliard d'euros et occasionné une perte de recettes de dix milliards d'euros.

La décision de Ségolène Royal d'annuler l'écotaxe a été prise dans la précipitation, sans analyse de sa portée et sans fondement juridique, dit la Cour, qui parle de « gâchis », d'« échec industriel et social ». Mme Royal reconnaît-elle sa responsabilité dans cette affaire ? Quelles suites compte-t-elle donner au rapport de la Cour des comptes ? (Applaudissements à droite et au centre)

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget et des comptes publics .  - Je suis surpris que la lecture du rapport annuel vous ait appris grand-chose, puisque vous avez présidé une commission d'enquête sur la question. Vous n'ignorez donc pas à quelle date le contrat a été signé : le 4 mai 2012 ! (Mme Brigitte Gonthier-Maurin invite ses collègues à retrouver la mémoire)

M. François Grosdidier.  - Et alors ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - Il fallait payer 38 euros de frais de gestion à une société privée pour 100 euros de recettes, du jamais vu ! Et le contrat revenait à déléguer à une société privée le recouvrement d'une taxe... Vous parlez de calamité, encore faudrait-il en dire l'origine ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Dans le rapport de la Cour, un tableau indique à la page 214 que la hausse de la taxation du gazole a rapporté plus d'un milliard d'euros, soit quatre à cinq fois plus que ce qui était attendu de l'écotaxe.

M. François Grosdidier.  - Qui a payé ? Les automobilistes français !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - On peut faire tous les effets de manche que l'on veut, on ne peut nier que les responsabilités, dans cette affaire, sont très largement partagées. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; protestations sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Quand je le disais, vous ne me croyiez pas. Là, c'est la Cour des comptes qui le dit. Elle ne critique pas l'écotaxe, mais son abandon ! (« Bravo » sur les bancs du groupe Les Républicains) Avec vos mesures de substitution, ce sont les automobilistes et les camions français qui paient. Vous serez responsables de ce gâchis devant les Français. (Vifs applaudissements à droite)

La séance est suspendue à 16 heures.

présidence de Mme Isabelle Debré, vice-présidente

La séance reprend à 16 h 15.