Questions d'actualité
M. le président. - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.
Relations transatlantiques (I)
M. Martial Bourquin . - (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain) Depuis son accession à la Maison-Blanche, M. Donald Trump montre sa volonté de mettre en place rapidement ses promesses de campagne : retrait du traité transpacifique, protectionnisme fiscal et douanier, mise en cause de la défense européenne et de l'OTAN.
L'équilibre mondial qui repose depuis 1945 sur le libre-échange et la sécurité collective devra être réorganisé ; nos relations commerciales devront être refondées sur le principe de la réciprocité absolue. M. Trump doit comprendre que l'Union européenne n'est pas un supermarché à ciel ouvert. L'Union européenne et sa défense devront être reconfigurées.
La France, elle, devra réfléchir à son avenir économique tout en respectant ses engagements internationaux ; la COP 21 est une grande opportunité et non un obstacle pour réindustrialiser notre pays et décarboner notre société.
Les défis sont importants, mais nous avons les moyens de les relever. Quelle est la position du Gouvernement sur les orientations géostratégiques à prendre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre . - Le président Trump multiplie les déclarations surprenantes, inquiétantes pour ceux qui, comme nous, sont attachés à un ordre du monde fondé sur la liberté, la tolérance et le respect. La France continuera de porter haut ces valeurs. Les Européens doivent prendre en main leur destin, et d'abord se protéger contre le terrorisme : Frontex monte en puissance - j'ai demandé, avec Thomas de Maizière, des exercices grandeur nature - et la réforme du code Schengen, notamment de son article 7-2, est engagée. Nous devons contrôler toutes les entrées, y compris de ressortissants européens revenant de théâtres d'opérations djihadistes. Interconnexion des fichiers, PNR, directive sur les armes à feux... : nous devons agir vite.
L'Europe doit aussi défendre son modèle de société et ses intérêts économiques. Si les États-Unis se replient sur eux-mêmes - mais je ne doute pas que les industriels américains sauront faire entendre au nouveau président tous les méfaits du protectionnisme - nous devons, pour notre part, nous garder de toute naïveté. Le plan Juncker de 300 millions d'euros va dans le bon sens.
Sur le climat et la COP 21, le président Trump a tenu des propos que l'on ne peut accepter, et qu'il faut combattre. Nous continuerons à agir pour que l'accord soit intégralement appliqué.
La défense européenne, elle, doit passer du concept à la réalité. Une poignée de pays ne peuvent continuer à assumer seuls la défense du continent. Des investissements, des unions entre nos industries de défense sont nécessaires. Le président de la République, avec la chancelière, est déterminé à agir, comme il le fait depuis quatre ans et demi. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et RDSE, ainsi que sur quelques bancs du groupe UDI-UC)
Substances toxiques dans les couches pour bébés
Mme Élisabeth Doineau . - Ma question s'adresse à Mme Ségolène Royal.
M. François Grosdidier. - Bienvenue au Sénat, madame la ministre !
Mme Élisabeth Doineau. - Une enquête du magazine 60 millions de consommateurs portant sur les couches pour bébés a révélé que celles de deux marques sur douze seulement ne contiennent pas de substances indésirables : pesticides dont des glyphosates, dioxines, composés organiques volatiles, hydrocarbures, polluants industriels... Cela vaut même pour des couches dites « écologiques ». Il y a de quoi avoir peur. Certes, les doses sont infimes, mais y a-t-il là de quoi se rassurer ?
Vous avez sollicité mercredi une contre-expertise de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), dont nous attendons des précisions. Nous devons aller plus loin sur la traçabilité des produits par l'étiquetage, les Français ont droit à la transparence. Une règlementation doit aussi être élaborée, avec des seuils tenant compte de la durée d'exposition, et un cahier des charges propre à protéger non seulement l'environnement, mais aussi la santé. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI-UC et écologiste, et sur plusieurs bancs du groupe socialiste et républicain)
Mme Ségolène Royal, ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat . - Vous avez raison d'être en colère, je le suis aussi. Il y a quelque temps j'ai interdit le bisphénol A dans les biberons et les jouets. Jamais je n'aurais imaginé la présence de produits toxiques dans des couches. J'ai bien sûr saisi l'Anses et la Commission européenne. Mais il serait bon que les fabricants aient un minimum d'éthique, que l'on ne soit pas toujours obligé de tout contrôler et sanctionner, que la santé des consommateurs, les plus fragiles en l'occurrence, soit respectée !
Il y a du glyphosate dans les couches Pampers et même Carrefour Baby Eco Planet ! C'est la substance active du désherbant Roundup. Que fait-il dans des couches ? Il y a aussi des composés organiques volatils dans la plupart des couches, très dangereux lorsqu'ils s'évaporent.
Ce matin, j'ai mis en place la Commission nationale de déontologie et des alertes présidée par Marie-Christine Blandin, avec notamment Irène Frachon et Sylvie Metzelard, et lui ai demandé d'établir la règlementation que vous avez évoquée. (Applaudissements à gauche ; M. Jean-Marc Gabouty applaudit aussi)
Relations transatlantiques (II)
M. Jean-Pierre Raffarin . - (Applaudissements à droite) Monsieur le Premier ministre, la dégradation de la situation internationale nous préoccupe. Les crises se multiplient, le terrorisme frappe partout, les États puissances sont de retour. Le monde s'arme, la paix recule et partout la force prévaut. Dans ce contexte, le nouveau président des États-Unis s'attaque brutalement aux valeurs de la diplomatie française. Le retour des Américains au protectionnisme et à l'isolationnisme, les tensions qui se profilent avec la Russie et la Chine n'annoncent rien de bon. La remise en cause du multilatéralisme, des accords de Paris, de l'accord nucléaire iranien est inacceptable, de même que la stratégie de déconstruction de l'Union européenne, de fragilisation de l'OTAN et la campagne contre l'euro. Quelles initiatives le Gouvernement entend-il prendre, et avec quel calendrier ? (Applaudissements au centre, à droite et sur quelques bancs du groupe socialiste et républicain)
M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre . - Merci pour cette question précise et complète. Malgré les propos excessifs que l'on a entendus - sans doute regrettables de la part du plus haut responsable politique d'une grande puissance - on ne peut rien contre le temps long de l'histoire, pour reprendre une notion chère à Fernand Braudel. Le temps long de l'histoire nous dit que nous sommes unis aux États-Unis par des liens que rien ne peut détruire. En tant qu'élu de Normandie, je n'oublie pas le jour où les Américains ont foulé le sol de notre pays pour aider à sa libération. Nos deux pays étaient liés par la même aspiration à la liberté et à la tolérance, par la même conception du respect que les grandes nations se doivent.
Cela dit, la France et l'Union européenne doivent agir vite et apporter aux propos du président Trump une réponse ferme et claire. S'agissant de l'environnement, la France et l'Europe ont réussi à emporter la conviction d'autres grandes nations pour parvenir à la signature de l'accord de Paris sur le climat. Nous mettrons la même énergie à le faire appliquer.
Face au terrorisme, qui déstabilise le monde, l'Union européenne doit faire la preuve de sa puissance : cela passe, je l'ai dit par la réforme du code Schengen, la montée en puissance de Frontex, la mise en place rapide du PNR, de l'interconnexion des fichiers...
La réponse à la crise migratoire passe, elle, par un dialogue renforcé avec l'Afrique et notamment les pays du Sahel, par la coopération et le développement.
La France s'est très fortement mobilisée pour parvenir à un accord sur le nucléaire iranien, et nous ferons en sorte de le préserver.
Sur tous ces sujets, nous devons agir en coopération étroite avec l'Allemagne. C'est également indispensable pour renforcer la défense européenne par des investissements et des unions entre nos industriels. L'Europe doit aussi défendre sans naïveté ses intérêts économiques et commerciaux, défendre ses filières d'excellence.
Nous souhaitons enfin que le multilatéralisme l'emporte sur les excès et les outrances, pour que l'ordre mondial repose sur la paix, la tolérance, le respect et la liberté. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et RDSE ; MM. Jean-Marie Bockel et Gérard Roche applaudissent aussi)
M. Jean-Pierre Raffarin. - Merci de votre réponse, mais notre diagnostic est plus grave que le vôtre. Nous devons rendre à notre politique étrangère sa puissance, renouer avec l'indépendance nationale, ce qui suppose de renforcer notre outil militaire et notre dissuasion. Il faut aussi de l'ambition pour l'Europe, et dialoguer avec tous. Enfin, n'oublions pas que si les armes sont nécessaires, c'est par le développement plutôt que par la guerre que nous soulagerons les malheurs du monde. (Applaudissements à droite)
M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. - Un mot...
M. le président. - Exceptionnellement !
M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. - Les déclarations de fermeté sont importantes, mais les actes comptent davantage, et c'est pourquoi nous avons mis fin à la baisse des effectifs militaires, mis en oeuvre scrupuleusement la loi de programmation militaire, fait en sorte de conserver toute son efficacité à notre dissuasion. (Murmures à droite) Lorsque le président de la République intervient pour que la France fasse entendre sa voix, il ne le fait pas pour vous faire plaisir, monsieur le Premier ministre Raffarin, mais pour que la France soit à la hauteur. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; M. Joseph Castelli applaudit aussi)
M. Jean-Louis Carrère. - Nombreux sont ceux, à droite, qui ont voté contre la loi de programmation militaire !
État actionnaire
M. Yvon Collin . - Hier, la Cour des comptes a rendu un rapport très critique sur l'État actionnaire, identifiant des carences persistantes. Quelque 1 800 entreprises sont actuellement détenues par l'État, via l'Agence des participations de l'État, la Caisse des dépôts et consignations ou BPI France. Fin 2015, 62 de ces participations étaient cotées, pour une valeur totale de 77,4 milliards d'euros.
Selon la Cour, l'État est à la fois trop présent dans la gestion et trop peu vigilant comme actionnaire. Outre des conflits d'objectifs et d'intérêts, l'État confond souvent tutelle et actionnariat, et n'hésite pas à sacrifier l'autonomie de gestion des entreprises pour garantir la paix sociale.
Le rapport esquisse plusieurs pistes, parmi lesquelles des cessions massives, autrement dit, des privatisations. Le Premier ministre a rejeté cette option, redoutant une déstabilisation. Ne peut-on néanmoins envisager une cure d'amincissement de l'État actionnaire pour éliminer, si j'ose dire, les mauvaises graisses ? Quelle lecture le Gouvernement fait-il de ce rapport ? Certaines pistes retiennent-elles son attention ?
M. Christophe Sirugue, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'industrie . - Il est important que les politiques publiques soient évaluées. Ce rapport est donc bienvenu, de même que celui de M. Vincent sur la politique de dividendes de l'État et celui de M. Bachelay à l'Assemblée nationale.
Ces rapports identifient des points positifs. L'État a élaboré une doctrine, présentée le 15 janvier 2014 en Conseil des ministres, autour de quelques axes stratégiques : souveraineté, infrastructures vitales, transition énergétique, évitement des risques systémiques. La création de BPI-France est également saluée, de même que l'ordonnance du 20 août 2014, qui clarifie la position de l'État dans les instances de gouvernance des entreprises.
La Cour des comptes recommande de fixer un objectif de détention de capital, mais nous craignons qu'il soit alors difficile de réagir rapidement, dans un monde en constante mutation. Un désengagement massif risquerait, lui, de fragiliser des entreprises stratégiques.
Nous nous attachons à respecter des règles de bonne gestion, respectueuses du patrimoine de l'État et de nos priorités stratégiques. Le rôle de l'État n'est évidemment pas de boursicoter. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain et sur quelques bancs du groupe RDSE)
Fermeture de la centrale de Fessenheim
M. Jean Desessard . - Ma question s'adresse à Mme Ségolène Royal. (Exclamations à droite)
Mardi 24 janvier, le conseil d'administration d'EDF a adopté le mécanisme de compensation en contrepartie de la fermeture de la centrale de Fessenheim. Nous saluons ce premier pas vers la fermeture de la plus vieille centrale de France, qui est aussi la plus dangereuse...
Mme Catherine Procaccia. - C'est faux !
M. Jean Desessard. - Elle est construite sur une faille sismique, à proximité immédiate du Rhin, en zone inondable. Les réacteurs reposent sur une dalle en béton d'une épaisseur d'un mètre, moins que pour toutes les autres centrales. La centrale surplombe la plus grosse nappe phréatique d'Europe qui alimente six millions d'Européens.
En contrepartie, EDF recevra 490 millions d'euros, le droit de poursuivre la construction contestée de l'EPR de Flamanville ainsi qu'une dérogation à la loi de transition énergétique pour redémarrer le réacteur n°2 de la centrale de Paluel, en Seine-Maritime, à l'arrêt depuis l'effondrement d'un générateur de vapeur de 465 tonnes. (Mme Catherine Troendlé s'exclame) Enfin, on attend l'aval de Bruxelles pour entériner une recapitalisation d'EDF par l'État à hauteur de 3 milliards d'euros.
Les concessions ne sont pas minces et les mesures nécessitent un temps d'application long. Comment le Gouvernement compte-t-il s'assurer que le processus engagé mardi ira à son terme, quels que soient les résultats des élections présidentielles ? (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste ; Mme Patricia Schillinger applaudit également)
Mme Ségolène Royal, ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat . - La décision annoncée mardi par le conseil d'administration d'EDF présente trois avantages. D'abord, elle entérine la fermeture de Fessenheim, qui fonctionne grâce à une dérogation et dont l'autorisation arrive à échéance en décembre 2022. Il faut donc qu'EDF rationalise ses investissements.
Ensuite, elle débloquera les stratégies d'investissements franco-allemandes. Avec le ministre de l'industrie allemand, nous avons posé les bases de la construction d'une usine de voitures électriques Tesla sur ce même secteur ; une commission mixte est à l'oeuvre. Nous avons également un projet autour de batteries électriques de troisième génération avec des industriels allemands.
Enfin, le démantèlement devra être exemplaire et conduire à créer une filière industrielle de premier plan : il y 1 500 centrales à démanteler dans le monde, c'est un marché rentable. (Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et socialiste et républicain)
Situation du groupe Vivarte
Mme Cécile Cukierman . - Vivarte, premier groupe français d'habillement, va supprimer deux mille emplois sur tout le territoire et liquider des enseignes centenaires, après avoir déjà supprimé quatre mille emplois en deux ans. Vivarte est victime de fonds d'investissement qui poursuivent des intérêts de court terme, sous le regard indifférent de l'État. Le groupe a perçu 44 millions d'euros d'argent public, dont 14 millions au titre du CICE en 2016, mais a toujours fait passer les intérêts des actionnaires avant ceux des salariés.
Comment pouvez-vous dire aux salariés que rien ne sera fait, madame la ministre ? Il vous reste quatre semaines de temps parlementaire pour faire voter un texte sanctionnant les plans sociaux d'optimisation financière. C'est une question de volonté ! Si vous ne faites rien, vous serez encore une fois complice de ces prédateurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)
Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social . - À la demande de l'intersyndicale et de Laurent Berger, nous avons reçu hier, avec Christophe Sirugue, l'ensemble des organisations syndicales de Vivarte, qui ont dénoncé le comportement de la direction et la faiblesse du dialogue social et relayé les inquiétudes des salariés, qui sont à 80 % des femmes, souvent à temps partiel, souvent des mères seules. La stratégie de Vivarte consiste à protéger les intérêts financiers des actionnaires au lieu de suivre un projet industriel qui s'inscrit dans l'avenir.
Ce plan de restructuration est la conséquence d'un LBO (Leveraged buy-out) raté ; malheureusement, ce n'est pas le premier. (Exclamations sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)
L'usage du CICE est encadré et doit figurer sur les comptes du groupe : il est légitime de lui demander de justifier son utilisation.
M. Jean-Pierre Bosino. - Allez-vous demander le remboursement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. - Nous avons assuré les organisations syndicales que l'État userait de tous les leviers pour contraindre l'entreprise à assumer ses responsabilités économiques et sociales.
M. Jean-Pierre Bosino. - Comme d'habitude !
Mme Myriam El Khomri, ministre. - Il sera le garant du dialogue social et de la transparence de l'activité. Nous avons rendez-vous avec la direction le 31 janvier. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
Mme Cécile Cukierman. - J'aurais préféré vous entendre dire que ce plan social serait le dernier ! Les conséquences sociales et territoriales sont catastrophiques. Que n'avez-vous proposé une loi contre les licenciements boursiers, plutôt que de casser le code du travail ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)
Pollution atmosphérique
Mme Éliane Giraud . - Pour la deuxième fois en deux mois, nous subissons un pic de pollution exceptionnel, qui touche l'Île-de-France et Rhône-Alpes mais aussi la façade ouest et une grande partie de l'Europe, avec des conséquences pour la santé.
En cause, trafic routier et industrie, chauffage plus important à cause du froid, mais aussi conditions météorologiques défavorables avec un anticyclone qui stagne, engendrant des vents trop faibles.
Les collectivités et les services décentralisés ont mis en place des mesures spéciales comme la circulation alternée ou différenciée à Paris, Lyon ou Grenoble. Mais certains partenaires se retirent des discussions ; les climatosceptiques ne sont pas tous aux États-Unis...
Madame la ministre, vous avez fait beaucoup : loi de transition énergétique, COP21. Pouvez-vous récapituler le plan d'action mis en oeuvre par le Gouvernement pour lutter durablement contre la pollution de l'air ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
Mme Ségolène Royal, ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat . - Vous avez raison d'évoquer ce grave problème de santé publique. Les nanoparticules, pas plus grosses que le dixième de l'épaisseur d'un cheveu, pénètrent dans le cerveau, dans le sang, dans le foetus.
M. Jean Desessard. - Absolument.
Mme Ségolène Royal, ministre. - Circulation différenciée, certification de la qualité de l'air : la révolution du transport et du chauffage propre doit être accélérée. (M. Jean Desessard et Mme Frédérique Espagnac applaudissent)
Citons la prime de 10 000 euros pour une voiture électrique et de 1 000 euros pour un scooter électrique, le crédit d'impôt pour l'installation de borne de rechargement ou pour le remplacement d'un chauffage polluant, l'action pour limiter l'utilisation des phytosanitaires dans l'agriculture et le renforcement des contrôles sur les industriels.
C'est par la volonté de tous - citoyens, entreprises, collectivités, à l'image de la ville de Grenoble et de l'Isère - que nous ferons changer les comportements et que nous agirons sur la qualité de l'air. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; Mme Corinne Bouchoux applaudit également)
Financement des groupements de défense sanitaire
M. Jean-Claude Luche . - Depuis la loi NOTRe, les départements, les régions et les groupements de défense sanitaire (GDS) sont dans le flou. Privés de leur clause de compétence générale, les départements ne peuvent en effet plus intervenir pour financer les GDS, et les régions ne sont pas compétentes en matière de santé publique et de santé animale.
Les mesures transitoires permettant le maintien des aides des régions et des départements en 2016, dans un contexte de crise de l'élevage, prennent fin en 2017. Le manque de clarification juridique met en péril l'action des (GDS) qui jouent un rôle de premier plan dans la qualité et l'image de la production française.
Que compte faire le Gouvernement pour aider les GDS, prolonger les mesures transitoires et mettre en place un cadre pérenne ?
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement . - C'est un sujet que les sénateurs connaissent bien. Les GDS sont organisés avec les associations d'éleveurs par département. Ils ont montré leur utilité dans la gestion des crises sanitaires, aux côtés des vétérinaires et des services de l'État.
Avec la loi NOTRe, les départements ne pourront plus les financer. Nous sommes en discussion avec les fédérations régionales de groupements de défense sanitaire pour se coordonner à l'échelle nationale et assurer le financement par les régions à compter de 2017.
Nous tenons à conserver ce réseau des GDS, précieux pour la maîtrise des épisodes de crise et garants d'une bonne conduite de l'élevage en France. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
Communes nouvelles
M. Daniel Gremillet . - J'ai été alerté par une entreprise qui a été avertie par un courrier de la mairie, en date du 15 novembre 2016, du changement de son adresse postale - numéro et nom de rue - au 1er janvier 2017, conséquence de la fusion de sa commune avec une autre. A-t-on mesuré les conséquences de la création des communes nouvelles sur les acteurs économiques, mis devant le fait accompli ? Il leur faudra assumer des coûts importants, gérer des stocks périmés, sans parler des coûts indirects sur la crédibilité de l'entreprise : comment expliquer à un client que la société reste la même ? C'est aberrant, on est loin de l'objectif de simplification... Mon propos n'est pas de critiquer les communes nouvelles, mais la date butoir, irréaliste. Comment comptez-vous accompagner les communes nouvelles dans leurs relations avec les services publics, les entreprises et les habitants ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales . - La France a, à elle seule, plus de communes que toute l'Europe réunie. (On s'en félicite sur de nombreux bancs)
M. Éric Doligé. - Merci de nous l'apprendre !
M. Charles Revet. - C'est ce qui fait la beauté de notre pays.
M. Alain Gournac. - Sa richesse !
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Comment peuvent-elles se développer et être pérennisées ? À cette question, nous avons répondu par l'intercommunalité. Désormais, sur décision des conseils municipaux et des maires, elles pourront se réunir pour créer une commune nouvelle : 1 760 communes ont ainsi fusionné pour créer 517 communes nouvelles, toujours sur la base du volontariat. (M. Alain Vasselle s'exclame)
Nous avons recensé, avec l'Association des maires de France, les difficultés qui peuvent s'ensuivre et apporté des réponses. Le rapport de vos collègues Mme Gatel et M. Manable, Les communes nouvelles, histoire d'une révolution silencieuse, s'en est fait l'écho.
Les anciens noms des communes pourront être conservés. L'Insee a surmonté les difficultés d'attribution de code...
Les communes pourront être mises en places tranquillement - les préfets ont instruction de ne pas bousculer les choses - avec l'accompagnement de l'État.
M. Alain Gournac. - Facilitateur ! (M. François Bonhomme ironise)
M. Daniel Gremillet. - Le temps économique n'est pas le temps administratif et politique. Pour les entreprises, la date butoir est un vrai problème ; il faut leur donner du temps. Quel gaspillage économique et humain ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
Trains d'équilibre du territoire
M. Jean-Jacques Filleul . - En novembre 2014, l'opération Trains d'équilibre du territoire (TET) a été lancée. La commission présidée par M. Philippe Duron a dressé un diagnostic et émis des préconisations. En effet, les TET sont les parents pauvres des liaisons ferroviaires, et largement déficitaires ; l'offre actuelle ne correspond pas aux besoins de mobilité. Les recommandations de la commission clarifient le rôle des TET, décèlent des perspectives de long terme, appellent à renforcer le rôle de l'État stratège et à rénover le matériel roulant à échéance 2020-2025.
Quel est le bilan de la feuille de route « Un nouvel avenir pour les TET », objet d'une communication le 12 janvier 2017 ?
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche . - Les TET recouvrent des réalités très diverses : trains de nuit, locaux, nationaux... Seul point commun, la tutelle de l'État, et leur caractère déficitaire : 400 millions de déficit en 2011, baisse de la fréquentation de 20 %, parc d'un âge moyen de 35 ans, services aux usagers contestés...
La commission Duron a fait un travail remarquable. Nous avons profité de la réforme des régions pour leur transférer dix-huit lignes qui étaient jusqu'ici à cheval sur deux régions. L'État consent un effort d'accompagnement considérable : 3,5 milliards d'euros de matériel neuf sera transféré aux régions.
Nous démontrons ainsi notre engagement pour l'avenir du ferroviaire.
Retour des djihadistes en France
Mme Sophie Primas . - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) En décembre, un rapport alarmant du contre-terrorisme européen alertait sur risque d'arrivée massive de djihadistes de retour d'Irak et de Syrie : on en attendrait 1 750 sur les 5 000 Européens partis faire le djihad. Radicalisés, devenus experts en armement, ils rapportent avec eux les modes opératoires terroristes, souvent aveugles, toujours barbares. Les pays européens traitent le danger en ordre dispersé. Nous redoutons que les décisions urgentes et nécessaires ne mettent autant de temps à être prises que pour le PNR.
Comment comptez-vous procéder pour mettre ces combattants hors d'état de nuire ? Comment repérer ces criminels ? Quel sort réserver à ceux qui seraient capturés en Syrie ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement . - Veuillez excuser Bruno Le Roux, retenu à l'Assemblée nationale.
La question des personnes de retour de ces théâtres est une priorité du Gouvernement et des autorités administratives et judiciaires. Ces individus sont placés en garde à vue dès leur arrivée sur le territoire et font l'objet d'un traitement judiciaire. Pour faire face à la charge que représente ce contentieux, qui risque de s'accroître avec l'afflux prévisible de djihadistes en provenance de Mossoul et de Raqqa, le parquet antiterroriste de Paris a été renforcé, passant à treize magistrats, avec une capacité de soutien de soixante magistrats mobilisables.
Au 1er janvier, ont été nommés un onzième juge d'instruction antiterroriste, un juge pour enfants, quatre magistrats pour renforcer la cour d'assises spéciale, un parquetier, dix greffiers supplémentaires. En outre, depuis 2012, nous avons créé quatre mille places de prison et quatre mille nouveaux emplois dans l'administration pénitentiaire.
Il faut notamment anticiper le retour des 460 mineurs français qui se trouvent en Irak ou en Syrie, dont la moitié a moins de 5 ans.
M. le président. - Veuillez conclure.
M. André Vallini, secrétaire d'État. - C'est l'objet du plan Sécurité pénitentiaire et action contre la radicalisation violente porté par Jean-Jacques Urvoas. Vous voyez que nous prenons toutes les mesures nécessaires. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste et républicain)
Mme Sophie Primas. - Les moyens ont été renforcés, c'est bien, mais comment ces djihadistes seront-ils traités ? Quelles peines seront prononcées ? Comment les repérer ? Comment travailler avec nos partenaires européens ? Sans polémiquer, nous avons besoin d'être rassurés. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
Politique familiale
Mme Anne Chain-Larché . - Aider et défendre la famille, c'est dans l'ADN de la France. L'État a toujours soutenu la natalité par des politiques intelligentes et bienveillantes. À la clé, un taux de fécondité supérieur à celui de nos voisins, notamment allemands.
Un quinquennat plus tard, rien n'est plus comme avant. Vous avez détruit la politique familiale avec méthode...
Mme Nicole Bricq. - Plus c'est gros, plus ça passe ! (Protestations à droite)
Mme Anne Chain-Larché. - Baisse de la PAJE, baisse du quotient familial, par deux fois...
M. Jean Desessard. - Tant mieux !
Mme Anne Chain-Larché. - ...allocations familiales sous condition de ressources. Conséquence, selon l'UNAF, 160 000 familles vivant sous le seuil de pauvreté ont perdu du pouvoir d'achat. Les Français sont 55 % à considérer que la politique familiale conduit les couples à renoncer à une nouvelle naissance ou à la différer. La baisse du pouvoir d'achat depuis 2012 - moins 500 euros par an et par Français - n'améliore pas la situation.
Quand reconnaîtrez-vous que vous avez trahi la société solidaire et conduit à une paupérisation du pays et des familles ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
M. Marc Daunis. - Quelle paupérisation de la pensée...
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement . - Mme Rossignol m'a chargé de vous répondre. Notre politique familiale est audacieuse et juste. Elle favorise les plus fragiles, les familles monoparentales et les familles nombreuses. Dès 2012, l'allocation de rentrée scolaire a été revalorisée de 25 % et l'allocation de soutien familial d'autant. Le complément familial a augmenté de 50 % en cinq ans. Nous avons créé une garantie contre les impayés de pensions alimentaires et une agence chargée de leur recouvrement. Nous avons rétabli l'équilibre financier de la branche famille de la sécurité sociale, dont le déficit s'élevait à 2,5 milliards d'euros en 2012.
La baisse des allocations familiales a touché moins de 10 % des familles, celle du quotient familial, 5 % des foyers fiscaux, les plus favorisés. La prime de naissance n'a pas diminué.
La baisse des naissances est infime - de 1,96 à 1,93 enfant par femme. Elle tient à la baisse du nombre de femmes en âge de procréer et au recul de l'âge auquel elles ont leur premier enfant, propre aux sociétés dites développées.
Nous nous attachons à promouvoir l'égalité des tâches et des responsabilités familiales, l'égalité professionnelle et salariale, à faciliter la conciliation entre vie professionnelle et familiale : bien des pays nous envient nos modes d'accueil des jeunes enfants. Bref, notre politique familiale est efficace et juste ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
Mme Anne Chain-Larché. - Les statistiques ont une vertu, elles révèlent l'effet d'une politique : 34 000 naissances en moins. Qu'avez-vous à répondre à cela ?
M. Jean-Louis Carrère. - C'est terminé ! Fini !
Mme Anne Chain-Larché. - Quel message envoyez-vous à la jeunesse ?
M. le président. - Ce n'est terminé que maintenant, Monsieur Carrère !
M. Jean-Louis Carrère. - Le traitement à géométrie variable !
La séance est suspendue à 16 h 5.
présidence de M. Jean-Pierre Caffet, vice-président
La séance reprend à 16 h 20.