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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.
Table des matières
Organismes extraparlementaires (Candidatures)
Discrimination bancaire des Ultramarins
Accompagnement des fusions de collectivités
Couverture numérique du territoire
Lutte contre l'orpaillage illégal en Guyane
M. Jacques Cornano, en remplacement de M. Antoine Karam
Transfert de l'instruction des autorisations d'urbanisme
Modalités d'application de la loi NOTRe
Difficultés rencontrées par les petits producteurs en matière d'agrément CEE
Prise en charge par l'assurance maladie du matériel médical technique d'aide à la personne.
Difficultés rencontrées par les étudiants en orthophonie pour accomplir leurs stages de formation
Dispositif de téléprotection grave danger
Mme Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l'habitat durable
Réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté
Mme Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l'habitat durable
Mme Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l'habitat durable
Mme Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l'habitat durable
Chiffres du chômage en Haute-Saône
Accueil des migrants venus de Calais
Rétrocession aux communes du produit des amendes
Nuisances sonores dans le Luberon
Naturoptère de Sérignan-du-Comtat
Organismes extraparlementaires (Nominations)
Engagement de la procédure accélérée
Hommage aux victimes de l'attentat de Nice
Travail, modernisation du dialogue social (Nouvelle lecture - Procédure accélérée)
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur de la commission des affaires sociales
M. Jean-Marc Gabouty, rapporteur de la commission des affaires sociales
M. Michel Forissier, rapporteur de la commission des affaires sociales
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur
Mme Myriam El Khomri, ministre
Mme Myriam El Khomri, ministre
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales
Listes électorales (Conclusions des CMP)
M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur pour le Sénat des commissions mixtes paritaires
Modalités d'inscription sur les listes électorales
Listes électorales des ressortissants de l'Union européenne
Français établis hors de France
Ordre du jour du mercredi 20 juillet 2016
SÉANCE
du mardi 19 juillet 2016
9e séance de la session extraordinaire 2015-2016
présidence de Mme Isabelle Debré, vice-présidente
Secrétaires : M. Philippe Adnot, Mme Catherine Tasca.
La séance est ouverte à 9 h 35.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu intégral publié sur le site internet du Sénat, est adopté.
Organismes extraparlementaires (Candidatures)
Mme la présidente. - M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation d'un sénateur pour siéger au conseil d'administration du fonds national des aides à la pierre et de deux sénateurs appelés à siéger au sein du conseil d'administration de l'agence nationale de l'habitat.
La commission des affaires économiques a proposé des candidatures. Elles ont été affichées et seront ratifiées, conformément à l'article 9 du Règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.
Questions orales
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle vingt-trois questions orales.
Discrimination bancaire des Ultramarins
M. Maurice Antiste . - Dans le jargon bancaire, les « chèques hors place » sont ceux émis à l'extérieur de la ville où le compte est domicilié. Avec l'avènement des systèmes d'échange entièrement informatisés, la notion a évolué : il existe dorénavant un périmètre bancaire géographique métropolitain et un périmètre géographique hors métropole.
L'espace bancaire ultramarin, notamment de la Caraïbe, est considéré par le système bancaire métropolitain comme étranger. Cette atteinte illégitime au principe de la continuité territoriale pose des problèmes quotidiens au Ultramarins.
De nombreux jeunes et moins jeunes, avec ou sans emploi, étudiants partis faire leurs études dans l'Hexagone voient les bailleurs et propriétaires refuser leurs garants à cause de la domiciliation de leur compte bancaire. Ils ne peuvent pas non plus bénéficier du paiement en trois ou dix fois sans frais.
Les Ultramarins, qui sont Français, travaillent dans les administrations et paient leurs impôts, n'acceptent pas cette discrimination bancaire omniprésente. Quelles mesures concrètes le Gouvernement entend-il prendre pour atteindre, comme le Président de la République s'y est engagé, l'égalité réelle ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget . - M. Sapin, qui assiste ce matin au conseil des ministres, vous prie d'excuser son absence.
L'espace bancaire ultramarin n'est pas un espace étranger. la réglementation bancaire qui s'y applique est identique à celle de la métropole, sous la réserve de quelques spécificités pour les collectivités de Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Martin et Saint-Barthélemy. La plupart des établissements de crédit des DOM appartiennent à des groupes dont le siège se situe en métropole. Les places bancaires ultra-marines appartiennent à la place bancaire nationale.
Les difficultés que vous avez décrites dans la pratique sont connues, le Gouvernement ne s'y résigne évidemment pas. Le Défenseur des droits, saisi de cas de discriminations, a rappelé que le refus de location d'un logement en raison de la résidence outre-mer de la personne se portant caution était interdit par l'article L. 22-1 de la loi du 6 juillet 1989.
Une personne s'estimant lésée peut saisir le Défenseur des droits, voire recourir à la voie contentieuse.
Je ne doute pas que vous vous saisirez du projet de loi en faveur de l'égalité réelle outre-mer, en cours de préparation, pour proposer les adaptations législatives nécessaires. Le Gouvernement considérera vos amendements avec bienveillance.
Accompagnement des fusions de collectivités
Mme Nathalie Goulet . - Le charivari territorial de ces dernières années, aggravé par la baisse des dotations, a rendu l'action des communes et intercommunalités très difficile.
La mise en place, dès le 1er janvier 2017, de nouvelles intercommunalités très vastes, là où la densité de population est très faible, engendre des difficultés considérables.
Le Gouvernement serait inspiré de prendre des mesures transitoires de bon sens. D'abord, d'autoriser les anciennes et nouvelles intercommunalités à tenir une comptabilité analytique afin de retracer leurs comptes respectifs et mieux préparer leurs modalités d'intégration. Ensuite, ouvrir au maximum la liberté conventionnelle entre intercommunalités et communes pour résoudre les problèmes que posent leurs fusions - la loi et le règlement ne peuvent pas tout, faisons confiance à l'intelligence territoriale. Reconnaissons en outre les associations départementales de maires comme l'interlocuteur naturel des préfectures et des directions départementales des finances publiques pour traiter des ajustements administratifs et financiers. Une autre proposition, qui est hérétique mais que j'ose en cette fin de session, autoriser, sous le contrôle du préfet, communes et intercommunalités à partager librement leurs ressources et leurs charges pour faciliter la fusion. Enfin, le préfet pourrait dispenser un peu de DETR pour financer le recrutement d'experts-comptables qui accompagneraient les petites collectivités dans ces fusions au pas de charge.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget . - La loi Maptam et la loi NOTRe poursuivent l'objectif - partagé - de donner aux régions françaises une dimension européenne, d'affirmer la place des métropoles et de bâtir des intercommunalités plus fortes. Et ce, pour renforcer les collectivités. Cela suscite des inquiétudes légitimes, que le Gouvernement ne sous-estime pas.
Nous ne sommes pas favorables au décalage du calendrier de la nouvelle carte intercommunale. Pas d'objection de principe, en revanche, sur le recours à la comptabilité analytique par les communes - l'instruction comptable M14 les y autorise déjà.
La mutualisation, un bon principe, ne peut se soustraire à quelques règles de bonne gestion et de sécurité juridique. La loi prévoit que les communes et intercommunalités peuvent recourir à des conventions de service en cas de compétences transférées, y compris en cas de transfert partiel, et constituer des services communs.
Nos services sont à la disposition des collectivités. J'ai donné instruction à mon administration, dont les agents sont aussi capables que les experts-comptables, de fournir toutes les simulations et les avis dont les collectivités auront besoin.
Mme Nathalie Goulet. - Loin de moi l'idée de mettre en doute la qualité de votre administration, la difficulté tient à la quantité de la ressource.
Le problème financier persiste dans les petites communes et les petits départements.
Merci pour cette réponse que je ferai connaître dans l'Orne.
Couverture numérique du territoire
Mme Agnès Canayer . - La couverture des territoires ruraux en téléphonie mobile et en réseau internet est un enjeu pour la qualité de vie, l'emploi mais aussi pour l'attractivité du territoire.
Fin 2015 puis début février 2016, le Gouvernement a publié par arrêté la liste des communes situées en zones blanches qui seront prioritaires en matière d'équipement pour l'année 2016. Y figurent 21 communes de mon département de Seine-Maritime.
Le rapport de notre collègue Maurey soulignait le retard pris et l'absence de soutien financiers et techniques. Les maires, très démunis, déplorent le manque d'information et de concertation, tel celui d'Haudricourt dans le pays de Bray. Ils constatent que les financements de l'Etat ne couvrent que très partiellement les frais. Face à cette situation, le département a créé un syndicat pour soutenir les communes volontaires.
Le Sénat avait souhaité rendre opposables les engagements des opérateurs dans la loi Macron puis dans la loi sur l'économie numérique, cela n'a pas été retenu. Dès lors, comment inciter les opérateurs à s'installer en zone blanche ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget . - M. Macron doit être au conseil des ministres, il vous prie d'excuser son absence.
Le Gouvernement s'est engagé lors de trois comités interministériels aux ruralités et la loi du 6 août 2015 à améliorer la couverture numérique du territoire, c'est un enjeu essentiel pour l'égalité entre les territoires.
Notre priorité a été de couvrir les dernières communes totalement dépourvues d'accès au réseau. Nous avons initié, sous l'égide des préfectures de région, deux campagnes de vérifications afin de les identifier. Le protocole utilisé pour ces mesures tient désormais compte de l'arrivée du quatrième opérateur et intègre davantage les centres-bourgs de petite taille.
Une liste de 268 communes a été arrêtée. Elles bénéficieront d'une couverture en internet mobile d'ici fin 2016 ou six mois après la mise à disposition d'un pylône par la collectivité territoriale. L'Etat prendra à sa charge l'investissement initial.
En outre, les quatre opérateurs auront, d'ici la mi-2017, l'obligation d'équiper en haut débit mobile 2 200 communes où l'accès au service est minimal. L'Arcep pourra sanctionner tout manquement.
En Seine-Maritime, 23 communes seront couvertes à la fin 2016.
Nous entendons également répondre aux besoins des territoires où la couverture est jugée insuffisante. Dans le prolongement du comité interministériel du 20 mai 2016, nous proposons d'engager un recensement régional de l'ensemble des défaillances de couverture constatées. Nous mettrons ensuite les opérateurs en situation de répondre à ces demandes par tous les moyens technologiques à leur disposition. Là où ils n'auront pas été en mesure de le faire, nous mobiliserons le guichet de couverture « à la demande » des collectivités, créé par la loi du 6 août 2015. Nous entendons, par un dialogue à la fois local et national, satisfaire les besoins des territoires les plus ruraux.
Mme Agnès Canayer. - Merci. L'accès au réseau est une attente forte des habitants, des gens de passage comme des créateurs d'activité et d'emploi. Si les pouvoirs publics n'exercent pas de pressions sur les opérateurs, les zones moins denses resteront à l'écart de la connexion.
Pension des veuves de guerre
Mme Christiane Kammermann . - Le droit à réparation prévu, depuis le 31 mars 1919, par l'article premier du code des pensions militaires d'invalidité, indemnise les préjudices spécifiques subis par les grands invalides de guerre, les conjoints survivants des morts au combat ou des blessés de guerre et, enfin, les anciens combattants.
Si l'échelle des pensions militaires d'invalidité des grands invalides de guerre a évolué depuis 1954, la pension versée aux veuves n'a pas été réévaluée depuis 1928.
En mars 2014, le contrôleur général des armées a remis en cause les chiffres avancés par le Gouvernement dans son rapport de juin 2013. La mesure d'élargissement d'attribution de l'allocation inscrite dans la loi de finances pour 2015 n'a bénéficié qu'à trois veuves alors que le Gouvernement en avait prévu une centaine... Une fois de plus, les veuves des grands invalides de guerre font les frais d'une carence d'évaluation et des conditions restrictives imposées par les cabinets ministériels. Depuis des décennies, elles subissent une double peine : la perte de leur époux et la privation d'une revalorisation légitime de leur pension.
Il est de notre devoir que l'argent public engagé pour ces veuves - respectivement 1,9 million d'euros pour 2016 et 3,8 millions d'euros pour 2017 - soit effectivement employé à adapter leurs pensions aux préjudices qu'elles ont subi. La pension des veuves de guerre est un droit à réparation à part entière, qui couvre également les conjoints des victimes du terrorisme.
Le Gouvernement est-il prêt à réviser les articles 19 et 50 du code des pensions militaires ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget . - Veuillez excuser Jean-Marc Todeschini, retenu par une commémoration à Fromelles.
Votre préoccupation est légitime, la Nation doit reconnaissance à nos soldats comme à leurs proches. C'est pourquoi le Gouvernement a décidé, dans la loi de finances pour 2015, d'élargir l'allocation prévue par l'article L. 52-2 du code des pensions aux conjoints survivants qui avaient renoncé à une activité professionnelle pour prodiguer des soins à un grand invalide.
Vos chiffres datent de la mi-2015. À ce jour, une trentaine de demandes a été déposée, et non trois. Certes, ce chiffre est faible mais il s'explique par la difficulté de l'administration à connaître la durée du mariage des conjoints dont l'un était grand invalide - ce qui justifie l'impossibilité d'un versement automatique. De plus, la démarche des conjoints survivants, volontaire, doit être accompagnée. Les services départementaux de l'office national des anciens combattants et victimes de guerre s'y emploient, soutenus par les associations d'anciens combattants. On ne saurait donc parler de carence d'évaluation.
Evoquer des conditions restrictives est tout aussi excessif. La loi de finances pour 2016 a élargi le champ du bénéfice de la majoration spéciale prévue à l'article L. 52-2, en autorisant son attribution progressive à partir de cinq ans de mariage et de soins tout en améliorant son montant. Il est trop tôt pour dresser le bilan de cette mesure entrée en vigueur le 1er juillet 2016 qui, conformément aux préconisations du contrôleur général des armées, cible les plus fragiles.
Le cas échéant, des améliorations seront apportées en loi de finances pour 2017.
Mme Christiane Kammermann. - J'espère d'autres améliorations pour 2017, ce serait la sagesse. Je tiens à votre disposition les propositions des associations d'anciens combattants. J'ai rencontré une veuve de 93 ans qui ne touche que 500 euros par mois. Elle est seule. Comment voulez-vous qu'elle vive dans ces conditions ? Son cas n'est pas isolé.
Lutte contre l'orpaillage illégal en Guyane
M. Jacques Cornano, en remplacement de M. Antoine Karam . - En Guyane, plus de 10 000 garimpeiros venant du Brésil ou du Surinam, extraient chaque année environ neuf tonnes d'or.
Déforestation, destruction des biotopes, pollution des cours d'eau, accumulation du mercure mais aussi violences et trafics en tout genre : les conséquences sur l'environnement et la population sont désastreuses.
C'est pourquoi, les forces de gendarmerie et les forces armées mènent depuis 2008, avec la mission Harpie, une lutte acharnée contre l'orpaillage illégal. Le bilan est encourageant : 60 % de baisse des sites d'orpaillages illégaux sur l'ensemble de la Guyane entre l'été 2014 et la fin 2016. Malgré ces efforts, l'orpaillage clandestin n'a pas été significativement limité : les sites sont réinvestis après destruction ; les modes opératoires des orpailleurs, souvent mineurs, se font plus mobiles.
L'opération Harpie n'a pas pu être renforcée à cause du déclenchement de l'opération Sentinelle. Travaillons à d'autres solutions : mesures judiciaires, traçabilité de l'or et, surtout, coopération avec les forces brésiliennes et surinamiennes sont des pistes à creuser.
N'est-il pas temps d'accélérer le processus ? Quelles sont les perspectives de coopération, en particulier avec le Surinam ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget . - Je vous prie d'excuser l'absence de M. Le Drian, retenu par d'autres obligations.
L'opération Harpie, placée sous la double autorité du procureur de la République et du préfet, est inédite par son organisation, son ampleur et son caractère interministériel. Cette opération, tout à la fois militaire, de police administrative et judiciaire, fédère l'intervention conjointe et quotidienne de plus d'une centaine de gendarmes, d'environ 350 militaires, de près d'une dizaine d'hélicoptères et de toutes nos administrations présentes en Guyane. L'ensemble, en étroite collaboration avec le parc amazonien de Guyane.
Son bilan est très positif. La baisse de 60 % des sites illégaux est liée au nombre de patrouilles, qui a augmenté de moitié entre 2014 et 2015. Ajoutons-y la hausse des saisies : passé de 11 à 16 millions d'euros en deux ans. Pour être complet, grâce à une opération de cinq mois achevée fin mai 2016, nous avons saisi plus d'une tonne d'or et une importante logistique associée aux puits illégaux. L'affaiblissement des réseaux d'orpaillage illégal est réel.
Nous devons aller plus loin, en consolidant la judiciarisation de l'opération, en réoccupant les sites conquis sur les garimpeiros par des activités légale, en poursuivant la réflexion sur les modalités de l'opération Harpie et en améliorant la coopération internationale. Sur ce dernier point, la coopération militaire et judiciaire prend un tournant toujours plus opérationnel avec le Brésil. Des patrouilles sont régulièrement conduites sur les fleuves frontaliers entre nos forces armées, leur fréquence va s'intensifier.
Après huit ans, l'opération Harpie affiche un bilan incontestable. Grâce à elle, nous asseyons la souveraineté de l'Etat dans une collectivité dont les enjeux pour notre pays ne sont plus à démontrer. Je l'ai constaté sur place il y a un an.
M. Jacques Cornano. - M. Karam sera sensible à votre réponse. La coopération avec le Surinam est essentielle.
Éditions locales de France 3
Mme Hermeline Malherbe . - Les éditions locales répondent à une demande d'information de proximité et de grande proximité. D'après une étude de 2014, les Français les plébiscitent. Dans mon département des Pyrénées-Orientales, l'édition locale de France 3 Pays Catalan représente 20 à 30% de parts d'audience. Et ce, sur seulement 60% du potentiel d'audience.
La technique doit favoriser la diffusion de ces chaînes locales, qui font vivre les langues régionales. Or 40 % de parts d'audience potentielles sont retirées à France 3 Pays Catalan du fait de l'accroissement de la diffusion par box internet et satellite qui, à la différence de la TNT, ne diffusent pas les programmes locaux. Que la technologie en 2016 soit à l'origine d'un recul, c'est un comble... Les salariés des stations locales de France 3 sont inquiets. Si l'on ne fait rien, la technologie les condamnera à disparaître.
Les chaînes locales sont précieuses pour lutter contre l'uniformisation et lutter contre la défiance à l'égard des langues locales. Que comptez-vous faire pour elles ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget . - Veuillez excuser l'absence de Mme Azoulay, retenue par une audition à l'Assemblée nationale.
Le Gouvernement est, comme vous, très attaché à l'offre de service public d'information locale. Elle joue un rôle indispensable dans le débat démocratique et la cohésion sociale sur nos territoires.
La loi impose la diffusion des 24 programmes régionaux sur au moins une des offres satellitaires gratuites. En revanche, il n'existe pas d'obligation de reprise des programmes locaux sur les box et satellite si bien que les téléspectateurs non couverts par la TNT n'ont pas toujours accès aux éditions locales. Cette reprise relève d'une négociation entre France Télévisions et ces opérateurs.
Que les salariés de ces services se rassurent : le maintien d'un réseau de proximité sera réaffirmé dans le prochain contrat d'objectifs et de moyens que signera le Gouvernement avec France Télévisions.
Mme Hermeline Malherbe. - Merci pour cette réponse qui rassurera les salariés. Il importe de maintenir la pression sur les opérateurs pour conserver mais aussi développer une information de grande proximité.
Transfert de l'instruction des autorisations d'urbanisme
Mme Françoise Gatel . - Depuis la loi ALUR, l'instruction des autorisations d'urbanisme a été transférée au bloc communal.
Ce désengagement financier et technique de l'État a provoqué des difficultés pour les maires et les présidents d'intercommunalités, déjà confrontés à des restrictions budgétaires. Il représente une nouvelle dépense obligatoire imposé à un bloc communal qui a déjà consenti des efforts budgétaires substantiels, soulignés par la Cour des comptes.
A l'heure où l'on évoque un nouveau transfert, celui de l'élaboration des cartes d'identité, n'est-il pas envisageable de créer une contribution des pétitionnaires de la même manière que l'on s'acquitte d'un timbre fiscal pour l'obtention d'une pièce d'identité ?
Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État auprès du ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, chargée des collectivités territoriales . - Ce transfert correspond à une réorientation d'une mission de l'État vers le « nouveau conseil aux territoires », qui cible l'appui à l'émergence de projets, l'aide à la gestion de situations difficiles ou imprévues et le portage de politiques prioritaires.
Effective depuis le 1er janvier 2014, la généralisation de l'intercommunalité par l'achèvement de la carte intercommunale et la création du centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement ont facilité cette évolution.
La compétence en matière d'actes d'urbanisme est décentralisée. Si les services de l'Etat les aident à instruire les actes, maire et représentants de l'intercommunalité en ont toujours été les signataires.
La mutualisation au niveau intercommunal est la réponse la plus adaptée au problème dont vous parlez. Une répercussion des coûts de l'instruction de ces procédures ne peut s'envisager que dans le cadre d'une adaptation législative et le respect du principe d'égalité devant la charge publique.
Aux termes de l'article R. 423-15 du code de l'urbanisme, elle ne peut être confiée à un prestataire privé. Il apparaît souhaitable et juste que les pétitionnaires n'aient pas à y contribuer financièrement.
Mme Françoise Gatel. - Soit mais les intercommunalités ont dû créer des emplois pour exercer cette compétence qu'on leur a transférée. Comment les financer ? Si ce n'est pas le pétitionnaire qui paie, ce sera le contribuable...
Modalités d'application de la loi NOTRe
M. Maurice Vincent . - Après de longs et riches débats, la loi NOTRe a marqué une nouvelle étape dans le renforcement de la carte de l'intercommunalité en France. Son article 33 a prévu le relèvement de 5 000 à 15 000 habitants du seuil minimal de population d'un EPCI, assorti d'un seuil dérogatoire de 5 000 habitants pour les zones de montagne et insulaires.
Dans mon département de la Loire, le nombre d'EPCI est passé de 17 à 7. Le nombre de communes insatisfaites demeurent limité. Cela étant, restent deux difficultés. D'une part le rejet, dans le nord du département, d'un projet extrêmement lourd de fusion entre plus de 80 communes. Il serait bon que le préfet ne passe pas outre l'avis négatif des collectivités et trouve une organisation plus adaptée.
D'autre part, une fusion envisagée entre six communes à cheval sur les départements de la Loire et du Rhône qui ont l'habitude de travailler ensemble pose problème à cause de la divergence des schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI). Les EPCI de départ et d'accueil ont donné leur accord, la commission départementale de coopération intercommunale (CDCI) du Rhône également. Dans cette situation, ne peut-on pas faciliter au maximum le rapprochement en allégeant les procédures ?
Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État auprès du ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, chargée des collectivités territoriales . - Les SDCI sont le résultat d'une large concertation avec les élus, qui a débuté dès le mois de septembre 2015 pour se poursuivre jusqu'à la fin du mois de mars 2016. Durant cette période, les CDCI pouvaient les amender. En tout et pour tout, nous avons dénombré 8 cas de SDCI contradictoires.
Le Gouvernement a demandé aux préfets d'oeuvrer à la délimitation de périmètres cohérents par la concertation avec les élus. A défaut de consensus, il les a invités à respecter les frontières départementales.
Sur huit cas, un seul arrêté de projet de périmètre a été pris. Dans votre département et celui du Rhône, c'est le projet de périmètre figurant dans le schéma de la Loire, respectant les frontières départementales, qui a été mis en oeuvre.
Le recours à la procédure du passer outre par le préfet doit être exceptionnel. Le Gouvernement privilégie toujours le consensus local. Le préfet peut toutefois y recourir lorsque le statu quo n'est pas légalement admissible.
Dans tous les cas, la convocation d'une nouvelle CDCI, requise par la loi, est l'occasion de faire émerger une solution plus consensuelle. La préparation des schémas remonte maintenant à un an, les points de vue ont souvent évolué depuis.
M. Maurice Vincent. - Merci pour cette réponse. Souplesse et pragmatisme doivent guider l'action des pouvoirs publics dans le département de la Loire qui a déjà fourni de nombreux efforts.
Difficultés rencontrées par les petits producteurs en matière d'agrément CEE
M. Yannick Botrel . - L'obtention de l'agrément CEE pour les petits producteurs des Côtes-d'Armor est parfois difficile. Or sans lui, il leur est impossible d'approvisionner une restauration collective locale qui passe par une cuisine centrale ou de répondre aux marchés ouverts par les collectivités territoriales. C'est, de plus, un frein à la mise en oeuvre effective de circuits courts pour la restauration collective.
Les critères de contrôle tiennent vraisemblablement plus de la surtransposition que de l'application des normes européennes. Ne peut-on pas les adapter afin d'éviter de décourager les initiatives locales ?
Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État auprès du ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, chargée des collectivités territoriales . - Je vous prie d'excuser l'absence de M. Le Foll, qui assiste au conseil des ministres.
La réglementation sanitaire européenne dite du « paquet hygiène » impose l'attribution d'un agrément sanitaire à tout établissement souhaitant livrer à un intermédiaire les produits d'origine animale qu'il transforme. Toutefois, une possibilité de dérogation à cet agrément est prévue pour les commerces de détail, si cette activité est réalisée de manière « marginale, localisée et restreinte ». Cette adaptation réglementaire existe également pour l'approvisionnement de petits établissements de restauration collective bénéficiant eux-mêmes d'une dérogation à l'agrément sanitaire. En revanche, une structure artisanale ou fermière souhaitant approvisionner une cuisine centrale agréée doit nécessairement disposer d'un agrément sanitaire.
Toutefois, l'obtention d'un agrément n'implique pas nécessairement des investissements importants et des procédures complexes. L'instruction d'un dossier de demande d'agrément sanitaire dans les petites structures fermières et artisanales prend en compte les moyens matériels et humains dont disposent ces structures pour appliquer les prescriptions de la réglementation. Les exigences en termes de formalisation des procédures sont adaptées à la taille de la structure et à son activité, sous réserve bien évidemment que ces adaptations ne soient pas effectuées au détriment de la maîtrise de la sécurité sanitaire.
Le Gouvernement considère que l'équilibre entre sécurité des consommateurs et nécessaire adaptation des règles aux petites structures est atteint.
M. Yannick Botrel. - Merci pour votre réponse. La sécurité sanitaire est évidemment primordiale. Mais, dans cette affaire comme dans d'autres, la question de fond est celle de la surtransposition du droit européen... Votre réponse, très technique, sera expertisée par les petits producteurs et les collectivités concernés.
Pénurie de vaccins
M. Dominique Bailly . - Depuis plus d'un an, la France connaît des difficultés de production et d'approvisionnement des vaccins contre la tuberculose et des vaccins combinés contenant la valence coqueluche, vaccins pentavalents et tétravalents.
La distribution du vaccin BCG en pharmacie de ville a cessé le 29 mars. Avec l'accord de l'ANSM, le laboratoire Sanofi-Pasteur délivre désormais un vaccin polonais, solution qui ne peut être pérenne.
Les parents de nourrissons sont orientés vers les services de protection maternelle et infantile, livrés en priorité, mais ces services, parce qu'ils rencontrent eux aussi des tensions d'approvisionnement, sont contraints de créer des listes d'attente.
Priorité est donnée aux enfants de mères porteuses de l'hépatite B pour l'accès aux vaccins pentavalents et tétravalents alors que la tuberculose progresse en Ile-de-France et que tous les enfants devraient être vaccinés dès la naissance selon les recommandations pour 2015. Quelles sont les raisons de cette pénurie ?
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion . - Nous connaissons en effet des tensions sur l'approvisionnement, comme toute l'Europe, en raison de la défaillance du producteur danois. Depuis avril, l'Agence nationale du médicament a donc autorisé la délivrance d'un vaccin polonais dont la qualité a été vérifiée.
Les quantités restent limitées, c'est pourquoi les populations les plus à risque ont été privilégiées. Depuis 2007, la vaccination par le BCG n'est plus obligatoire en France, elle est fortement recommandée pour les populations à risque.
Les plans de gestion de pénurie des médicaments d'intérêt thérapeutique majeur - que sont les vaccins - créés par la loi de modernisation du système de santé, sont en cours de finalisation et seront opérationnels d'ici la fin de l'année.
Mme Touraine a aussi demandé un plan d'action au laboratoire, présenté le 28 juin. Enfin, le ministère se fait communiquer chaque semaine l'état des stocks des vaccins tetravalents - pour les pentavalents, la situation est revenue à la normale.
M. Dominique Bailly. - Merci pour cette réponse, et l'action du Gouvernement. Espérons que la situation ne se reproduise pas.
présidence de Mme Jacqueline Gourault, vice-présidente
Prise en charge par l'assurance maladie du matériel médical technique d'aide à la personne.
Mme Nicole Bonnefoy . - En France, un nombre non négligeable de personnes en perte d'autonomie n'ont pas la capacité de s'équiper correctement en matériel médical du fait de leurs faibles revenus. L'acquisition de matériel d'occasion présente un intérêt financier non négligeable. Pourtant, le matériel d'occasion n'est pas pris en charge financièrement par les maisons départementales des personnes handicapées.
La liste des produits et prestations remboursables conditionne la prise en charge du matériel technique par l'assurance maladie à l'existence d'une garantie pour une durée déterminée et répondant aux normes de sécurité en vigueur. Ces conditions, absolument légitimes et non contestables, ne devraient pas pour autant devenir rédhibitoires. L'élaboration de modalités d'évaluation et d'une certification du respect de telles normes et conditions pour le matériel déjà usagé paraît être un objectif atteignable, nullement insurmontable.
Le recours systématique au matériel neuf est plus coûteux pour la collectivité, pour les personnes concernées, et pour l'environnement. En revanche, des entreprises de l'économie sociale et solidaire disposent d'un savoir-faire dans le domaine des circuits courts, qui pourrait être encouragé.
Comment le Gouvernement pourrait-il établir un cadre réglementaire plus propice à l'accès au matériel médical d'occasion pour les personnes en situation de handicap ?
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion . - Vous avez raison : votre question, est importante. Il est en effet choquant que du matériel encore en très bon état soit détruit.
Le recyclage du matériel d'occasion doit être entouré de conditions précises, afin de garantir aux usagers la sécurité et l'efficacité. Les circuits de cette économie circulaire doivent être étudiés car ils concernent plusieurs opérateurs et financeurs.
Le 6 juillet 2015, un appel à projets a été lancé par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) sur l'économie circulaire, sur les modes de distribution et de recyclage. Trente et un projets ont été déposés, dix ont été retenus. Une subvention d'un million d'euros au total leur a été attribuée. La CNSA soutient ces projets en favorisant l'échange d'informations et la mutualisation. D'éventuelles adaptations législatives et réglementaires pourront suivre.
L'ensemble des aides à domicile et les équipements techniques d'un logement ou d'un véhicule mis en place au titre de la prestation de compensation du handicap (PCH), sont directement réglées par les conseils départementaux en tiers payant sur présentation de la facture, depuis fin janvier 2016, en vertu de la loi sur la modernisation de notre système de santé.
Mme Nicole Bonnefoy. - Merci. Les besoins sont immenses. Le gaspillage est choquant.
Difficultés rencontrées par les étudiants en orthophonie pour accomplir leurs stages de formation
Mme Isabelle Debré . - Un grand nombre d'étudiants en orthophonie m'ont alertée sur les conditions dans lesquelles se déroulent les stages, indispensables pour lier apprentissages théoriques et exercice professionnel, qui sont très hétérogènes, selon les centres de formation.
Certains étudiants ont la chance de pouvoir intégrer des structures à proximité de leur domicile, d'autres ne peuvent être accueillis que dans des établissements très éloignés de chez eux, en raison de la surcharge de certains lieux de stages et la répartition inégale des modes d'exercice de l'orthophonie sur le territoire. J'ajoute que les hôpitaux, traditionnels pourvoyeurs de stages, emploient rarement des orthophonistes malgré l'importance des besoins.
Ces déplacements induisent des dépenses non négligeables. Les étudiants sont souvent obligés de prendre un logement d'appoint. Pour le financer, beaucoup d'étudiants sont contraints d'exercer une autre activité, parallèlement à leurs études. Serait-il envisageable, madame la ministre, d'organiser une prise en charge nationale des indemnités de stage afin de réduire les inégalités entre les étudiants en orthophonie et de leur assurer un accès équitable à la formation ?
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion . - En effet, certains étudiants en orthophonie sont contraints de choisir leurs stages pour des raisons financières et non pédagogiques : une enquête réalisée par la fédération des associations générales étudiantes et la fédération nationale des étudiants en orthophonie, présentée fin juin au ministère de la santé, l'a montré.
La spécificité des formations médicales et paramédicales associent formations théoriques et pratiques. Mais la réglementation actuelle ne prévoit aucune indemnisation pour les formations délivrées à l'université, comme c'est le cas de l'orthophonie. Aussi Mme Touraine a demandé à ses services de travailler avec le ministère de l'enseignement supérieur pour étudier les conditions d'amélioration des modalités d'accès aux stages des étudiants orthophonistes.
Attentive à la situation des étudiants et à l'égalité de traitement entre les formations paramédicales, la ministre des affaires sociales et de la santé souhaite que ces travaux puissent aboutir favorablement.
Mme Isabelle Debré. - Merci pour votre réponse, que je considère comme positive. À la commission des affaires sociales, nous continuerons à suivre cette question avec attention.
Dispositif de téléprotection grave danger
Mme Chantal Deseyne . - Une femme battue décède en France tous les trois jours, sous les coups de son compagnon, un enfant tous les dix jours, d'un homicide ou d'une tentative de son père ou de sa mère. L'Insee estime que 143 000 enfants sont les victimes collatérales de ces violences.
Le dispositif de téléprotection grave danger (TGD), prévu à l'article 41-3-1 du code de procédure pénale, permet à la victime d'alerter les autorités et, avec son accord, de la géolocaliser au moment où elle déclenche l'alerte. L'attribution du TGD est décidée par le procureur de la République, pour une durée de six mois renouvelable.
Or la délégation aux droits des femmes a constaté, dans son rapport « 2006-2016, un combat inachevé contre les violences conjugales », que ce dispositif est actuellement inégalement réparti sur le territoire : ainsi, Paris dispose de vingt TGD et Bayonne de deux.
Le Gouvernement envisage-t-il d'augmenter rapidement l'attribution des boîtiers de téléprotection grave danger sur l'ensemble du territoire ?
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion . - La généralisation du TGD a été décidée en 2013, après une expérimentation en Seine-Saint-Denis et dans cinq cours d'appel. Son déploiement progressif sur l'ensemble du territoire est l'un des axes du quatrième plan interministériel de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes pour 2014-2016 et du cinquième plan pour la période 2017-2019, la priorité étant donnée à l'outre-mer.
Ce dispositif est cofinancé par le ministère de la famille, de l'enfance et des droits des femmes, au titre du programme 137, pour l'aspect technique du dispositif, et par celui de la justice, au titre du programme 101, pour le subventionnement des associations référentes assurant le suivi des bénéficiaires. Le premier consacre 900 000 euros à l'acquisition de 500 appareils, répartis en fonction des besoins des juridictions.
Le service de l'accès au droit et à la justice et de l'aide aux victimes du secrétariat général du ministère de la Justice, maître d'ouvrage de ce projet, a consulté en fin d'année 2014, l'ensemble des cours d'appel pour connaître ces besoins.
Les sites expérimentaux ont été dotés du même nombre de téléphones dont ils bénéficiaient avant la généralisation du dispositif, ce qui a permis d'éviter une rupture dans le suivi et l'accompagnement des victimes.
Un fonds de concours a aussi été créé pour aider les juridictions qui en ont besoin à acquérir des appareils ; toute personne physique ou morale, distincte de l'État, peut y contribuer : ce fut le cas des conseils départementaux de Meurthe-et-Moselle et des Pyrénées-Orientales, ainsi que la ville de Saint-Nazaire.
Le programme 137 ayant été intégralement engagé, seul un financement complémentaire, par ce fonds de concours, permettra d'acquérir de nouveaux téléphones.
Mme Chantal Deseyne. - Je comprends qu'il s'agit d'une question de moyens. Il est important que les victimes puissent donner l'alerte en cas de danger. Le déploiement de ce dispositif sur l'ensemble du territoire doit être prioritaire.
La séance suspendue à 10 h 55 reprend à 11 h 15.
SCOT
M. Bernard Delcros . - Sans remettre en cause la nécessité pour les collectivités de se doter d'instruments prospectifs, la généralisation au 1er janvier 2017 de la règle de constructibilité à l'ensemble des communes non dotées d'un SCOT opposable me paraît inadaptée aux spécificités des territoires ruraux. Deux évolutions sont intervenues : les projets de fusion d'intercommunalités issus de la loi NOTRe, la suppression et la dilution dans un appel à projets national de l'aide d'un euro par hectare, heureusement prévue en 2010 pour tenir compte des besoins des territoires montagneux.
Le Gouvernement entend-il apporter un soutien adapté aux territoires de montagne, actuellement en pleine réorganisation territoriale ? Compte tenu du retard pris dans le financement des SCOT ruraux, accepterait-il de reporter au 1er janvier 2018 la généralisation de la règle de constructibilité limitée ?
Mme Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l'habitat durable . - Les SCOT ont été introduits voici seize ans par la loi SRU pour favoriser un aménagement durable et cohérent du territoire. Le principe retenu a été celui de l'urbanisation limitée en l'absence de SCOT. Alors que leur application était limitée aux communes du littoral ou appartenant à des agglomérations de plus de 15 000 habitants, la loi de 2010 portant engagement national en faveur de l'environnement a prévu leur généralisation, avec comme date butoir le 1er janvier 2017, ce qui laisse le temps nécessaire à leur élaboration.
En l'absence de SCOT, pas de sanction financière mais un contrôle accru du préfet sur les nouvelles constructions.
Élaborer un SCOT est un investissement pour l'avenir du territoire car il permet de construire une vision partagée de son développement et de mettre en cohérence les différentes actions des collectivités.
Depuis 2010, des appels à projet ont été lancés pour aider les collectivités territoriales. Le montant de l'aide financière, de 3 millions d'euros, n'a pas diminué. Déjà, 73 % des communes ont lancé une procédure d'élaboration d'un SCOT et l'État les aidera. C'est pourquoi nous ne souhaitons pas repousser la date butoir.
M. Bernard Delcros. - Les communes rurales, avec de grands espaces et une population faible, ont des coûts d'élaboration très élevés. Une politique différenciée en fonction du territoire serait de bon sens.
Réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté
Mme Mireille Jouve . - Depuis 1990, les réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté (Rased) associent différents types de professionnels : psychologue scolaire, maître d'adaptation et rééducateur intervenant pour répondre aux difficultés des élèves dans l'acquisition et la maîtrise des apprentissages fondamentaux. Ils jouent un rôle déterminant dans la réduction des inégalités scolaires, très fortement corrélées aux inégalités sociales comme le révèle le rapport de 2015 du programme international pour le suivi des acquis des élèves (Pisa).
Cependant, les Rased ont subi des réductions drastiques de postes, passant, selon un rapport de l'Inspection générale de l'éducation nationale, de 15 028 en 2007 à 10 152 à la rentrée 2012, soit une baisse de 32,4 % en cinq ans. Dans les Bouches-du-Rhône, le nombre de postes est passé de 435 à 235 entre 1995 et 2015 et tous les postes de rééducateur ont été supprimés. En 2015, la Cour des comptes estimait que les Rased avaient été « annulés au moment où ils commençaient à être bien intégrés dans les pratiques ». En juillet 2013, un rapport d'information de la commission des finances du Sénat préconisait également de « donner aux Rased les moyens de leurs missions ».
Que compte faire le Gouvernement pour combler ce manque préoccupant de professionnels spécialisés dans les écoles des Bouches-du-Rhône ?
Mme Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l'habitat durable . - Je vous prie d'excuser l'absence de la ministre de l'éducation nationale, qui m'a chargée de vous répondre. Le Gouvernement est très attentif à la réussite scolaire de tous. Dans le cadre de la priorité réaffirmée au premier degré, et à contresens des suppressions de postes décidées par la précédente majorité, des emplois ont été créés dans les Rased.
Dans les Bouches-du-Rhône, le recrutement de 215 professeurs des écoles a plus que compensé la hausse de la démographie scolaire. Ainsi, 70 classes seront ouvertes à la rentrée à Marseille, c'est sans précédent pour ce territoire. Six postes supplémentaires en Rased seront créés dans ce département à la rentrée et six psychologues contractuels ont été recrutés. Il faut compenser les baisses de postes décidées entre 2009 et 2012. Le recteur et le directeur académique des services de l'éducation nationale s'attacheront, à la demande de la ministre, à consolider les réseaux des 35 circonscriptions.
Mme Mireille Jouve. - Merci. Il s'agit surtout de ne pas baisser les bras. Il faut être toujours plus attentif aux élèves en difficulté.
Mineurs isolés étrangers
M. Yannick Vaugrenard . - Notre pays, à l'instar de nos voisins européens, est confronté à un flux d'immigration élevé de mineurs étrangers isolés, qui vivent dans des conditions précaires, souvent des squats en centres villes, voire dans la rue, faute d'alternative, et ne sont pour beaucoup pas scolarisés, en dépit de l'obligation scolaire, qui est aussi un droit pour tous les enfants, sans distinction aucune.
La commission nationale consultative des droits de l'homme recommande de mettre fin à ces discriminations.
Faut-il rappeler ici cette citation d'Emmanuel Kant : « On ne doit pas seulement éduquer des enfants d'après l'état présent de l'espèce humaine, mais d'après son état futur, possible et meilleur, c'est-à-dire conforme à l'idée de l'humanité et à sa destination » ?
Et Nelson Mandela d'ajouter : « l'éducation est l'arme la plus puissante que l'on puisse utiliser pour changer le monde ».
Que compte faire le Gouvernement, afin de lutter efficacement contre cette injustice et permettre à ces enfants de jouir du droit à la scolarité, à l'apprentissage, et au développement de leur personnalité ?
Mme Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l'habitat durable . - Le Gouvernement est décidé à assurer le droit à l'éducation pour tous, quelles que soient leurs difficultés et d'autant plus pour les mineurs isolés étrangers dont vous rappelez à juste titre qu'ils sont exposés à de grands dangers.
La ministre de l'éducation nationale a demandé à ses services d'examiner avec attention les demandes de scolarisation des jeunes mineurs étrangers, y compris lorsqu'ils ont dépassé la limite d'âge de scolarisation obligatoire.
Un plan a été lancé pour déterminer les besoins et les moyens. Ce plan a été efficace. Un nouveau plan sera lancé, afin de renforcer la coordination des services à l'échelle locale et nationale.
Des enfants sont déjà scolarisés dans le cadre de ce plan, à Calais, avec l'aide des associations, à Grande-Synthe, avec le soutien du maire.
M. Yannick Vaugrenard. - Merci de votre réponse humaniste. Encore faudrait-il appliquer les règles que nous nous sommes données. Le ministère doit saisir le recteur de Loire-Atlantique et je me mettrai moi-même en rapport avec lui, comme avec le préfet.
Fermetures de classes
Mme Élisabeth Lamure . - Comme le rappelle le site de l'Éducation nationale, « l'ouverture et la fermeture d'une classe, dès lors qu'elles n'entraînent pas la création ni la suppression d'une école, ne nécessitent pas de décision du conseil municipal ». Dans les faits, les communes sont les premières à assumer les conséquences de ces fermetures, décidées parfois un an ou deux après une décision d'ouverture, laquelle les conduit généralement à engager des investissements lourds pour l'aménagement ou la construction de locaux.
Alors que les collectivités territoriales sont fragilisées par la réduction drastique des dotations de l'État, le Gouvernement répondra-t-il à la demande des élus locaux, qu'aucune fermeture de classe n'intervienne moins de trois ans après son ouverture ?
Mme Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l'habitat durable . - La présentation des projets d'ouverture et de fermeture de classes comme conditionnés exclusivement par les inscriptions enregistrées dans chaque établissement est réductrice. En pratique, la carte scolaire donne lieu à une concertation étroite avec les élus et à un avis du Conseil départemental de l'Éducation nationale. Les ouvertures et fermetures relèvent du recteur après avis du comité technique paritaire départemental. En vertu de la circulaire du 3 juillet 2003, des concertations plus informelles sont organisées, où l'on peut faire valoir les variables socio-économiques de nature à faire varier les prévisions. Le Gouvernement donnera instruction aux services déconcentrés de mettre au point des schémas territoriaux pluriannuels qui tiennent compte de ces variables socio-économiques, au plus près du terrain.
Mme Élisabeth Lamure. - Les maires ont très peu de pouvoir en la matière et l'Éducation nationale a un fonctionnement trop bureaucratique. Évitons le gaspillage des deniers publics !
Chiffres du chômage en Haute-Saône
M. Michel Raison . - Ma question se veut pédagogique et non polémique.
En Haute-Saône, les chiffres officiels font apparaître depuis un an un faible recul du chômage et certains de s'exclamer : « Ça va mieux ». J'en doute : le solde ne serait que de trente chômeurs en moins...
Cette légère amélioration est-elle due à une réelle reprise ou à des départs en retraite, voire vers d'autres horizons ? Les Français attendent de la transparence, notamment sur les cessations d'inscription, et des analyses précises, pour de vraies solutions. Le plan de formation lancé récemment produit-il des résultats ?
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès de la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargée de la formation professionnelle et de l'apprentissage . - Dans votre département, la baisse du chômage atteint 5,2 % s'agissant des inscrits en catégorie A, contre 1 % au niveau national. Avec les demandeurs d'emploi en activité réduite, la baisse est de 3,4 %, au lieu de 0,4 % au niveau national.
Le plan 500 000 formations est décliné territorialement en fonction des offres des entreprises. Les premiers résultats s'en font sentir. Il y a bien des créations d'emploi en Haute-Saône. La baisse de 4 % du nombre de chômeurs de longue durée est un signe qui ne trompe pas.
Enfin, sans connaître les chiffres territoire par territoire, au niveau national, je puis vous dire que 45 % des cessations d'inscription pour défaut d'actualisation sont liées à une reprise d'activité qui n'a pas été signalée à Pôle emploi.
Sur ce point également, la Haute-Saône va donc mieux que l'ensemble du territoire.
M. Michel Raison. - Je ne suis pas convaincu. La baisse de 5,2 % que vous mentionnez dissimule la réalité. Si 45 % des cessations d'inscription pour défaut d'actualisation sont liées à une reprise d'activité qui n'a pas été signalée, cela signifie qu'il reste 55 % de personnes qui n'ont pas retrouvé d'emploi !
Merci tout de même...
Réfugiés
M. Jean-Pierre Vial . - La situation des réfugiés en provenance de la Méditerranée n'a cessé de se dégrader, en raison du conflit irakien, du conflit syrien ou l'aggravation des conditions de vie et de sécurité des réfugiés dans les pays d'accueil, Jordanie, Liban et Turquie. Les réseaux de passeurs se nourrissent du chaos, du laisser-faire de beaucoup d'États et de l'inertie des instances internationales. Les récents accords de l'Union européenne avec la Turquie devraient améliorer les choses.
En revanche, le cas des réfugiés syriens est délicat : la procédure d'asile leur est largement ouverte, mais de plus en plus difficile à mettre en oeuvre. Le nombre des dossiers et la lourdeur des procédures compliquées encore par la fermeture de l'ambassade en Syrie accroissent les difficultés et la dangerosité pour les demandeurs à la procédure d'asile.
Le ministre de l'intérieur, lors de son audition au Sénat, en octobre 2015, s'était engagé à améliorer le traitement des demandes. Les mesures réglementaires promises n'ont toujours pas été prises ; quinze agents supplémentaires étaient en outre jugés nécessaires pour accélérer le traitement des démarches.
Quand le Gouvernement concrétisera-t-il ses engagements ?
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès de la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargée de la formation professionnelle et de l'apprentissage . - On compte 4 millions de personnes déplacées en raison du conflit syrien. La France apporte son soutien aux agences des Nations unies et aux pays voisins.
Tout en contrôlant rigoureusement nos frontières, nous nous sommes engagés à accueillir 500 Syriens en 2014, autant en 2015. L'effort sera porté à 10 000 Syriens fin 2017, en application des conclusions du Conseil européen de juillet 2015, qui portaient sur 2 375 Syriens, et des accords avec la Turquie et le Liban, qui portaient respectivement sur 6 000 et 2 000 Syriens.
Tous les réfugiés accueillis bénéficient de la protection internationale, d'un titre de séjour et d'un accompagnement social personnalisé ; le visa au titre de l'asile, spécificité française, est maintenu : plus de 2 900 visas ont déjà été délivrés à des Syriens en 2015, 1 500 devraient l'être en 2016. Près de 3 800 Irakiens ont aussi été accueillis dans ces conditions.
Je veux vous rassurer : les effectifs des consulats en Irak, en Jordanie, au Liban et en Turquie ont été renforcés pour faire face aux besoins et répondre à l'exigence de protection des personnes fuyant les violences et persécutions.
M. Jean-Pierre Vial. - Ces efforts doivent être salués, même si, s'agissant de l'accord avec la Turquie, nous sommes dans l'expectative. Mais j'évoquais la procédure : 2 900 régularisations, c'est peu, vu la situation ! La procédure de réinstallation est, elle, beaucoup plus sécurisée.
Accueil des migrants venus de Calais
Mme Christine Prunaud . - En novembre 2015, la commune de Langueux dans les Côtes-d'Armor a accueilli, à la demande du préfet, des migrants d'origine afghane. Ils ont été très bien accueillis dans un centre de formation dépendant de l'association pour la formation professionnelle des adultes.
Mais assurer la gestion administrative, le gîte et le couvert semblait être le seul objectif des services de l'État. La municipalité et un collectif de bénévoles et d'associations ont dû trouver seuls un médecin prêt à intervenir à titre gracieux et deux infirmières. Ils ont proposé des cours de français, la participation à des initiatives sportives et culturelles, qui furent autant d'occasions d'échanges fructueux profitables tant aux migrants qu'à la population qui y participait.
Mme la maire de Langueux attend un soutien de l'État pour que ce projet se poursuive, fût-ce à titre expérimental, et pour faire vivre ainsi nos valeurs républicaines.
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès de la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargée de la formation professionnelle et de l'apprentissage . - Il faut saluer l'action des élus et des bénévoles. Le centre d'accueil de Langueux est, pour eux, un motif légitime de fierté. Entre novembre 2015 et mars 2016, il a déjà accueilli dix personnes et offert aux migrants un temps de répit. Sept ont demandé l'asile, un a bénéficié de l'aide au retour. L'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii) est associé à son fonctionnement. L'accueil y est temporaire. Le demandeur est aidé à obtenir ses droits sociaux, à scolariser ses enfants et se voit proposer un contrat d'intégration. L'État y prend toute sa part, mais l'aide des collectivités et associations est très bienvenue.
Le ministère de l'intérieur souhaite son maintien, éventuellement réorienté vers l'accompagnement des réfugiés ayant vocation à s'installer durablement en France.
Mme Christine Prunaud. - Cette réponse me satisfait presque entièrement, j'en rendrai compte.
Rétrocession aux communes du produit des amendes
M. Patrick Chaize . - Le produit des amendes de police relatives à la circulation routière est rétrocédé aux communes et à leurs groupements pour l'amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routière.
Or l'exigence de réduction des dépenses, la solidarité territoriale, la recherche d'efficacité amènent de plus en plus de communes à mettre en place une police intercommunale voire pluri-communale. L'abaissement de 10 000 à 5 000 habitants du seuil au-delà duquel ces sommes sont directement versées aux communes et à leurs groupements, et non aux départements, leur permettrait de les affecter aux besoins et actions associés, sur leur propre territoire.
M. Jean-Vincent Placé, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l'État et de la simplification . - Le mécanisme actuel assure une répartition équitable des fonds dont les plus petites communes bénéficient ; pour celles-ci, le passage par le département est donc satisfaisant. Le produit des amendes de police ne peut d'ailleurs servir à financer la police municipale, mais seulement à des investissements destinés à la sécurité routière. Le Gouvernement n'est donc pas favorable à la modification du seuil.
M. Patrick Chaize. - C'est regrettable. Il faudrait soutenir cette solution efficace qu'est la police pluri-communale, et mettre fin à une inégalité entre communes.
Nuisances sonores dans le Luberon
M. Jean-Yves Roux . - Élu de la région Paca, je veux d'abord adresser toutes mes pensées aux proches des victimes de l'attentat de Nice.
Le parc naturel régional du Luberon, le plus peuplé de nos parcs, constitue la deuxième réserve de biosphère la plus grande de France, reconnue par l'Unesco. Depuis la fin 2015, il bénéficie du label « géoparc mondial ». Les habitants sont très attachés à la défense de ce patrimoine.
Or l'espace aérien de ce parc, notamment le sud Luberon, est régulièrement troublé par des survols particulièrement bruyants. Il s'agit pour l'essentiel d'exercices militaires à partir de la base de Salon-de-Provence. Les élèves pilotes doivent certes s'exercer, mais ces exercices sont devenus systématiques : le Guide du Routard en avertit même les touristes !
Alors que le projet de loi Biodiversité vient d'être voté en nouvelle lecture, où en sont les négociations avec les militaires ?
M. Jean-Vincent Placé, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l'État et de la simplification . - Je connais bien et apprécie beaucoup le parc du Luberon.
Les aéronefs civils et militaires sont autorisés à pénétrer sans conditions dans l'espace aérien du Parc naturel régional. La voltige civile y est interdite. Le parc n'est pas compétent pour interdire ou restreindre les activités de survol sur son territoire mais la charte de 2009 n'en favorise pas moins la concertation. Plusieurs réunions ont été organisées, et la base de Salon-de-Provence s'est engagée à cesser toute activité entre mi-juillet et mi-août. Tout est fait pour réduire les nuisances, en jouant par exemple sur la hauteur du vol, ou en aidant à l'acquisition de réducteurs de bruit. Le survol est interdit de midi à 14 h 30, les samedis, dimanches et jours fériés.
M. Jean-Yves Roux. - Voilà dix ans que les élus sonnent l'alarme, j'espère que les négociations aboutiront bientôt et que nous éviterons toute contradiction avec les objectifs du projet de loi Biodiversité.
Naturoptère de Sérignan-du-Comtat
M. Alain Dufaut . - Le 11 octobre 2015, Mme Royal était invitée à Sérignan-du-Comtat, dans le Vaucluse, pour célébrer le centenaire de la mort de Jean-Henri Fabre. Nous avons regretté qu'au dernier moment elle annule sa visite. Les souvenirs entomologiques de ce savant, livres et aquarelles, se trouvent actuellement à l'Harmas, classé au titre des monuments historiques et propriété du Muséum national d'histoire naturelle.
En 2010, le Naturoptère, centre culturel et pédagogique moderne, a été construit à proximité, avec l'aide du conseil général de Vaucluse, pour compléter l'Harmas et établir un « pont » de connaissances entomologiques entre le XIXe et le XXIe siècle. Ce centre, qui connaît un vif succès, est entièrement à la charge de la petite commune de Sérignan.
Ses relations avec l'Harmas sont délicates, compliquées par le fait que le Muséum national d'histoire naturelle est en profonde réorganisation, avec une situation budgétaire fragile. Les élus de Sérignan-du-Comtat envisagent la création d'un établissement public de coopération culturelle « Naturoptère » auquel l'Harmas pourrait être lié via une convention.
L'État doit soutenir ce projet, il y va de la survie du Naturoptère.
M. Jean-Vincent Placé, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l'État et de la simplification . - Darwin considérait Jean-Henri Fabre comme le père de l'éthologie entomologique. L'Harmas, qui bénéficie de sa renommée mondiale, est le domaine qu'il a occupé entre 1879 et 1915 ; le Muséum national d'histoire naturelle l'a reçu en legs en 1922. Rénové entre 2000 et 2005 pour un coût de 1,5 million d'euros, l'Harmas a rouvert au public en mai 2006. II est depuis lors ouvert sept mois par an et reçoit en moyenne 8 300 visiteurs par an, soit une recette moyenne de 38 000 euros.
Le Naturoptère a été conçu comme un établissement complémentaire de l'Harmas mais adapté aux exigences actuelles d'accueil du public, en particulier scolaire. Il a été réalisé grâce à la région, pour 1,5 million d'euros, du département, pour la même somme, et de la commune de Sérignan-du-Comtat pour un million.
La commune gère seule l'établissement, ouvert toute l'année depuis 2010, et dont la fréquentation devait être de 30 000 visiteurs par an. On en est à 18 000, si bien que le déficit annuel est de 300 000 euros, ce qui produit un déficit cumulé d'1,5 million d'euros. Faire reposer le coût d'un tel établissement sur une commune de 2 500 habitants est pour le moins surprenant.
La présentation semble peu attractive pour les scolaires. Le préfet a réuni les acteurs en 2014 et proposé un EPCC, mais personne n'a souhaité s'engager sur son financement. Le Naturoptère fermera le 31 décembre si aucune solution n'est trouvée. Il est choquant de voir ainsi perdus d'importants investissements publics, mais ce projet ayant été conçu au niveau local, il appartient aux collectivités territoriales de s'en préoccuper.
M. Alain Dufaut. - Cette réponse me déçoit. L'ouverture de cet établissement exceptionnel, qui connaît un succès réel et apprend la protection de la nature à nos enfants, ne peut pas se terminer ainsi ! Venez donc y consacrer une heure si, comme tant de ministres, vous passez au festival d'Avignon.
Organismes extraparlementaires (Nominations)
Mme la présidente. - La commission des affaires économiques a proposé des candidatures pour deux organismes extraparlementaires. La Présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du Règlement.
En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame M. Daniel Dubois membre du conseil d'administration du Fonds national des aides à la pierre ; Mme Valérie Létard membre titulaire et M. Franck Montaugé membre suppléant du conseil d'administration de l'Agence nationale de l'habitat.
Engagement de la procédure accélérée
Mme la présidente. - En application de l'article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l'examen du projet de loi prorogeant l'application de la loi du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence, déposé sur la Bureau de l'Assemblée nationale le 19 juillet 2016.
La séance est suspendue à midi vingt.
présidence de M. Gérard Larcher
La séance reprend à 14 h 30.
Hommage aux victimes de l'attentat de Nice
M. le président. - (Mmes les sénatrices et MM. les sénateurs se lèvent.)
Le 8 mars 1918, Georges Clemenceau disait devant le Parlement : « Toute ma politique tend à un seul but, maintenir le moral du peuple français à travers une crise qui est la pire de toute son histoire. Parmi nos actes, quels qu'ils soient, je vous défie d'en trouver un qui ne soit inspiré de cette unique pensée : sauvegarder l'intégrité de l'héroïque moral du peuple français ». Des mots à méditer et à partager...
Après la tragédie de Nice, nous avons été nombreux hier, salle des conférences, à rendre hommage avec émotion aux victimes de ce qui aurait dû être uniquement un temps d'unité et de valeurs partagées, le 14 juillet.
Depuis janvier 2015, notre peuple face au terrorisme islamiste a su rester debout en se rassemblant autour de la République.
Aujourd'hui plus encore qu'hier, il attend du pouvoir exécutif comme du pouvoir législatif une détermination dans les combats qu'il nous revient de mener à l'intérieur comme à l'extérieur de nos frontières.
Notre seule volonté doit être l'efficacité dans la lutte contre ce terrorisme et l'efficacité dans la protection de nos concitoyens.
Face à cette guerre, face à la volonté de diviser notre Nation par cette violence, ne cédons jamais.
La prolongation et le renforcement de l'état d'urgence ne sont qu'un moyen, il faut plus encore affronter, plus encore agir dans le respect de notre État de droit.
Soyons déterminés, c'est notre responsabilité ! (Mmes les sénatrices et MM. les sénateurs observent une minute de silence.)
Travail, modernisation du dialogue social (Nouvelle lecture - Procédure accélérée)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture du projet de loi, considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, en nouvelle lecture, relatif au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.
Discussion générale
Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social . - Je viens, une nouvelle fois, devant vous avec une ambition intacte : porter un texte de progrès utile à notre économie et à nos concitoyens ; nourrir un débat franc, exigeant et affranchi de postures aussi convenues que stériles.
La période dont nous sortons n'a pas été un long fleuve tranquille ; elle a été marquée par de fortes crispations et même des violences inacceptables, face auxquelles tous les républicains doivent se montrer fermes et soudés.
Mais la fermeté ne doit pas confiner à l'intransigeance. C'est pourquoi, j'ai oeuvré, tout au long de ces dernières semaines, pour aboutir à un compromis le plus abouti en consultant les organisations syndicales, patronales et de jeunesse.
Le mois dernier, j'ai pris l'initiative de lancer une nouvelle discussion avec les syndicats. Elle a été marquée par un fait nouveau, le souhait de la CGT de renouer le dialogue. Avec tous les autres syndicats, y compris FO, le contact a toujours été maintenu. J'en profite pour saluer le courage des syndicats dits réformistes, ils se sont fortement impliqués pour consolider le compromis trouvé ensemble et défendre les avancées de ce texte.
Ces échanges ont conduit le Gouvernement à proposer des évolutions. Mais dialoguer, négocier, ne signifie pas forcément s'accorder en tout point. L'examen du texte au sein de votre assemblée a mis en lumière deux conceptions du monde du travail et du dialogue social. Je le dis l'esprit d'autant plus serein que j'ai tenu, dans mes échanges avec vous, à me départir de toute approche partisane et à prendre pour seul guide l'intérêt général. L'approche gouvernementale et celle de la majorité sénatoriale apparaissent à bien des égards irréconciliables. Ceux qui nient l'existence d'un clivage entre la gauche et droite en sont pour leurs frais.
Le Sénat s'est empressé de mettre fin aux 35 heures, qui garantissent pourtant le droit de passer du temps avec sa famille ou de s'engager dans des associations, autant de droits qui sont le socle du vivre ensemble. Nous, au contraire, affirmons le droit à la déconnexion, créons un compte d'engagement citoyen, améliorons les congés pour mariage, naissance et décès et sanctuarisons le compte pénibilité ambitieux.
La majorité sénatoriale a une vision singulière du dialogue social : avec elle, le référendum d'entreprise est à la main de l'employeur, comme si le meilleur dialogue social était celui qui se passerait des partenaires sociaux. A l'inverse, nous augmentons de 20 % les moyens des syndicats et maintenons les seuils sociaux pour garantir une représentation des salariés dans les entreprises de plus de 11 salariés.
La majorité sénatoriale a également supprimé la garantie Jeunes qui s'adresse aux moins de 26 ans sans formation, sans emploi et en situation de précarité. Alors que les premiers retours d'expérience sont très encourageants, solidarité ne peut que rimer avec assistanat selon certains d'entre vous. Nous voulons, pour notre part, sa généralisation, le droit universel à la formation et de nouveaux droits pour les collaborateurs des plateformes numériques.
L'expression de nos divergences ne doit pas nous faire basculer dans le sectarisme. Merci à vos trois rapporteurs pour leur travail, il mérite considération et j'ai voulu argumenter sur chacun des amendements durant les 80 heures de séance publique que nous avons passées ensemble.
Pour justifier la question préalable, vous affirmez que l'apport du Sénat a disparu. C'est faux !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur de la commission des affaires sociales. - Il a fondu !
Mme Myriam El Khomri, ministre. - Question du handicap, groupement d'employeurs, encadrement du travail détaché, culture du dialogue social, sur tous ces thèmes, le Sénat a enrichi le texte.
Je veux saluer l'engagement de tous les groupes politiques, singulièrement celui du CRC, des écologistes et du RDSE. Un vif remerciement doit être adressé au groupe socialiste et, particulièrement, à Nicole Bricq, inlassable défenseure de ce texte (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain) et au président Guillaume, dont je n'oublierai jamais le soutien en pleine tempête. (Même mouvement)
Entre le statu quo et les surenchères libérales, il existe une voie : celle du progrès négocié. Le triptyque sur lequel repose ce texte ne sera pas remis en cause : renforcement de la démocratie dans l'entreprise ; plus de souplesse et de visibilité pour nos entreprises et, surtout, les plus petites ; inventer la protection sociale du XXIe siècle.
Au coeur de nos débats, la place que nous souhaitons accorder à la négociation d'entreprise. Le président de la République l'a rappelé avec force et conviction dans son entretien du 14 juillet dernier : ce débat rythme notre histoire depuis 1982 alors que la gauche engageait la décentralisation. Pour Jean Auroux, les travailleurs, « citoyens dans la cité », devaient l'être aussi dans leur entreprise. Pour discréditer le dialogue social dans l'entreprise, certains ont agité l'épouvantail de l'inversion de la hiérarchie des normes. Ce procès est sans fondement : cette loi s'inscrit dans la continuité des lois votées depuis 1982, depuis 1998, depuis 2012 qui donnent la priorité à la proximité, à la démocratie dans l'entreprise, aux salariés et à leurs représentants.
Le président de la République, le 14 juillet, a rappelé que les débats rythment nos engagements depuis les origines de la République. L'inversion de la hiérarchie des normes est un épouvantail sans fondement. Cette loi s'inscrit dans la continuité des lois Auroux de 1982, des lois de 1998 et 2012. Les acteurs de terrain sont les mieux placés pour négocier des accords qui tiennent compte à la fois des besoins des entreprises et des aspirations des salariés. N'est-ce pas ainsi que nous avons procédé pour mettre en oeuvre les 35 heures ?
La loi doit protéger, évidemment, mais la loi venue d'en haut ne sait pas s'adapter à chaque situation particulière. Nous, réformistes, n'avons pas renoncé à notre ambition de changer la société. Et, pour changer la société, il faut agir par le haut et par le bas. Nous avons su décentraliser la République, décentralisons le dialogue social.
Mme Nicole Bricq. - Très bien !
Mme Myriam El Khomri, ministre. - J'entends toutefois les craintes du dumping social. Si elles étaient fondées, jamais le Gouvernement n'aurait défendu ce texte. Cette menace a été brandie à chaque fois que le législateur a élargi le champ des accords d'entreprise sans jamais se concrétiser.
N'idéalisons pas le fonctionnement des branches : 42 d'entre elles fixent des montants de rémunération inférieurs au Smic. Cette loi les renforcera en réaffirmant leur rôle de régulation et en les rationnalisant - leur nombre passera de 700 à 300 en quatre ans. N'opposons pas les différents niveaux de négociation : accords d'entreprises, conventions collectives et code du travail doivent demeurer les piliers de la démocratie sociale.
Après le dernier tour de table avec les syndicats organisé sous l'égide du Premier ministre le mois dernier, nous nous sommes déclarés prêts à pousser plus loin le point d'équilibre. Trois nouvelles dispositions figurent dans la dernière version de ce projet de loi, à commencer par la définition d'un ordre conventionnel de branche. Aujourd'hui, il existe des domaines où les accords de branche priment, d'autres où les accords d'entreprise l'emportent, d'autres encore où aucun principe n'est fixé. Pour ceux-là, les partenaires sociaux devront se prononcer et définir les thèmes pour lesquels il ne sera pas possible de déroger aux accords de branches. Ensuite, nous confortons le principe de faveur au niveau de la branche sur toutes les questions de pénibilité et d'égalité professionnelle. Enfin, les partenaires sociaux seront étroitement associés à la suite du processus législatif : je confierai au Haut conseil du dialogue social, qui regroupe l'ensemble des partenaires sociaux, y compris ceux qui ont refusé de discuter du rapport Combrexelle, la tâche de formuler des propositions à la commission de refondation du Code du travail. Puisque chacun admet la nécessité de faire évoluer notre législation, que chacun y contribue de façon responsable et constructive pour aboutir en 2019.
Ce texte a été l'otage de considérations fort éloignées de son objet. Qui peut prétendre qu'une loi qui renforce nos entreprises et la protection des salariés ne sert pas le progrès social ? Après des semaines de discussion, nous pensons avoir atteint le point d'équilibre le plus juste : celui qui respecte le compromis passé avec les syndicats réformistes tout en tenant compte du point de vue de ceux qui ont souhaité voir réaffirmer le poids des branches.
Lorsque les débats se seront apaisés, lorsque ce texte sera appliqué au quotidien dans les entreprises, nul doute que notre démocratie sociale aura gagné en sérénité et en efficacité. Nous ne légiférons pas pour nous-mêmes mais pour l'intérêt général, l'amélioration de la vie de nos concitoyens et le redressement de notre pays et, à l'esprit, le temps long - que votre Assemblée perd rarement de vue - plutôt que le vacarme du temps présent. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et RDSE)
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur de la commission des affaires sociales . - (Applaudissements à droite et au centre.) Tout ça pour ça ! En cinq mois, le Gouvernement a réussi l'exploit de bâtir un texte qui ne satisfait personne : ni les syndicats ni les entreprises, ni le groupe socialiste, ni la droite et le centre qui avaient dit leur disponibilité à vous accompagner sur ce chemin dès le 15 février dernier ni la gauche dont une partie a ferraillé longuement contre ce projet de loi. Ne nous faites pas croire que vous avez trouvé le juste point d'équilibre parce que personne n'est content !
Les Français sont las de ces blocages et de ces troubles à répétition autour des manifestations qui ont un impact sur notre économie. Les images d'un véhicule de policiers attaqué ou de l'hôpital Necker sont toujours présentes dans les esprits. Aussi, la commission a-t-elle décidé de déposer une question préalable.
Le débat a été approfondi en première lecture, conformément au souhait du président Larcher. Madame la ministre, vous étiez commise d'office pour mener cette réforme et vos efforts méritent notre respect.
Mme Nicole Bricq. - C'est un peu fort : Mme El Khomri est ministre de la République !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. - C'était mission impossible, pour reprendre le titre d'un film célèbre.
Je veux remercier ceux de nos collègues qui ont contribué à la richesse de nos débats mais regrette que nos apports n'aient pas été repris dans le texte sur lequel le Gouvernement a engagé pour la deuxième fois sa responsabilité à l'Assemblée nationale.
Aucune de nos modifications à l'article premier n'a trouvé grâce aux yeux des députés alors que nous avions insisté sur l'objectif de simplification.
À l'article 2, dont nous partageons la philosophie fondée sur la subsidiarité et la primauté de l'accord d'entreprise puisque nous en sommes à l'origine avec les lois de 2004 et 2008, les députés ont opposé une fin de non-recevoir à une modification de la durée légale hebdomadaire de travail. Pourtant, ce n'était ni plus ni moins que la logique de l'article 2 poussé au bout de sa cohérence.
De plus, à l'article 10, qui est en quelque sorte le miroir de l'article 2, vous avez maintenu des règles de validité des accords si bien que peu d'accords risquent de voir le jour. Atteindre 50 % d'un coup d'un seul ? Impossible, disent les directeurs des ressources humaines et les partenaires sociaux. Encore une fois, tout ça pour ça... Les quelques avancées de ce texte resteront virtuelles, enfermées dans le papier du Journal officiel. Nous avions aussi aménagé les règles relatives aux accords de préservation et de développement de l'emploi, le résultat a été analogue.
La déception prévaut, nous en tirons en revanche un précieux retour d'expérience ; pas besoin d'un manuel de l'anti-réforme, il s'est écrit tout seul au fil des semaines. (Marques de protestations sur les bancs socialistes) Nous sommes prêts à proposer un nouveau contrat social au pays qui libère les énergies et table sur l'association du capital et du travail (M. Jacques Chiron s'exclame.) Un autre monde du travail est possible ! (Mme Eliane Assassi ironise.)
M. Didier Guillaume. - Par ordonnance !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. - Et c'est nous qui vous le disons ! (Applaudissements à droite et au centre)
M. Jean-Marc Gabouty, rapporteur de la commission des affaires sociales . - (Applaudissements au centre) L'analyse des modifications apportées par l'Assemblée nationale suscite la déception. Je comprends que le Gouvernement n'ait pas repris tous nos apports mais regrette qu'il n'ait pas cherché un compromis pour améliorer le texte dans le sens de la simplification et de l'efficacité.
Les députés ont encombré ce texte de dispositions à faible valeur normative, parfois confuses souvent inutiles ou inapplicables, sur la responsabilité sociale des plateformes, le droit à la déconnexion, les règles relatives à la reconduction des contrats saisonniers ou encore la création d'une instance de dialogue social dans les réseaux de franchise en méconnaissance des relations entre franchiseurs, franchisés et salariés.
Le Sénat avait sécurisé les règles du licenciement économique avec la notion de faisceaux d'indices et encadré le recours devant le juge ; rejet en bloc de la part des députés. Même chose sur l'ensemble des propositions de la délégation sénatoriale aux entreprises : ce n'est pas une différence politique, c'est une différence de culture qui témoigne d'une déconnexion entre le monde de l'entreprise et la gauche gouvernementale.
Les avancées concédées sur le travail de nuit et médecine du travail ne doivent pas masquer la suppression de la visite d'aptitude obligatoire, l'abandon de la création d'une procédure d'appel des avis d'aptitude devant une commission régionale de médecins et le rejet de la modification des règles sur la responsabilité pénale et civile de l'employeur. Ce texte qui ne donne satisfaction à personne apparaît davantage comme un réaménagement de façade qu'un traitement de fond de ce sujet sensible.
Bref, l'attitude de l'Assemblée nationale et du Gouvernement nous ôte l'espoir que nos travaux seront considérés. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Michel Forissier, rapporteur de la commission des affaires sociales . - Conscient des enjeux d'une meilleure sécurisation des parcours professionnels, le Sénat avait retenu une approche pragmatique.
Échaudé par le compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P), toujours inapplicable, nous avions allégé le compte personnel d'activité (CPA) ; les députés ont préféré l'affichage politique en maintenant le compte d'engagement citoyen (CEC) qui regroupera des formations qui ont bien peu à voir entre elles. Quoi de commun entre la participation à la réserve sanitaire et la formation d'apprentis ? L'évaluation de son coût et du nombre de bénéficiaires potentiels est bien lacunaire. De même, il nous semblait logique que ce compte personnel d'activité soit clos lorsque son titulaire cesse son activité professionnelle, c'est-à-dire lorsqu'il liquide l'ensemble de ses droits à la retraite. Enfin, nous proposions de simplifier le compte pénibilité afin de répondre aux nombreuses inquiétudes des employeurs. Il y a craindre pour l'entrée en vigueur du CPA...
On peut néanmoins noter que l'Assemblée nationale a adopté conformes plusieurs articles introduits au Sénat, notamment celui relatif au CPF des travailleurs des ESAT, et a approuvé nos indispensables aménagements sur la collecte de la contribution à la formation professionnelle des non-salariés.
Les députés ne partagent manifestement pas notre volonté de faire de l'apprentissage une voie de réussite. Ils ont repoussé les vingt articles votés ici pour améliorer le statut des apprentis et la formation des maîtres d'apprentissage, fruits d'une longue concertation. Je ne peux que regretter que le Gouvernement n'ait pas saisi cette occasion, la dernière du quinquennat sans doute...
M. Charles Revet. - En effet !
M. Michel Forissier, rapporteur de la commission des affaires sociales. - ...pour valoriser l'apprentissage. (Applaudissements à droite)
Exception d'irrecevabilité
Mme la présidente. - Motion n°19, présentée par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
En application de l'article 44, alinéa 2, du Règlement, le Sénat déclare irrecevable le projet de loi, considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution en nouvelle lecture relatif au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.
Mme Annie David . - Ce texte, passé en force contre une majorité de la gauche, mécontente la plupart de nos concitoyens. Pétitions, manifestations, grèves, tout un peuple vous demande son retrait. Vous ne l'écoutez pas. (Mme Nicole Bricq proteste.)
J'ai à cet instant une pensée pour les salariés Ecopla, une entreprise située à Saint Vincent-de-Mercuze dans mon département de l'Isère. Que le jugement en cours soit en leur faveur, que la SCOP Ecoplascop voie le jour afin de préserver l'emploi et le savoir-faire. Leur combat est exemplaire ; l'employeur, lui, est parti en emportant la caisse. Leur slogan est « Notre ami, c'est l'emploi, Ecoplascop vivra ! »
Droit d'amendement bafoué, refus de débattre en séance seront les marques de fabrique de ce texte. M. Capo-Canellas, en première lecture ici-même, dénonçait déjà l'absence de concertation préalable. Mme Bricq affirmait que ne pas débattre de ce projet de loi serait un déni de nos responsabilités parlementaires. Maintenez-vous ces propos après deux recours au 49-3, chère collègue ?
Mme Nicole Bricq. - Oui !
Mme Annie David. - L'article L. 1 du code du travail, que le président Larcher connaît bien, dispose pourtant que tout projet de loi relatif au droit du travail doit faire l'objet d'une concertation préalable avec les partenaires sociaux. Nous savons tous ici que cela n'a pas été le cas : les partenaires sociaux ont été invités à négocier seulement sur le rapport Combrexelle et le CPA, et non sur l'ensemble du texte.
Irrecevable sur la forme, ce texte est contraire à notre Constitution qui fonde, en son article 34, le droit du travail et le droit syndical sur la loi. Le Conseil constitutionnel n'accepte que, par exception, les transferts de compétences de la loi vers les accords d'entreprise. De même, sa jurisprudence établie en 2004 et 2008 censure tout renvoi de dispositions relevant de la Constitution, comme le droit au repos, à l'accord d'entreprise.
Au-delà des aspects purement juridiques, vous bafouez les valeurs de notre République laïque, démocratique et sociale, oubliant que la République est sociale grâce aux luttes syndicales et populaires qui ont émaillé notre histoire.
L'inversion de la hiérarchie des normes n'est pas le seul point juridique à poser problème. Les accords dits en faveur de l'emploi portent atteinte à la liberté contractuelle puisque l'employeur peut imposer une modification du contrat sans avoir à se justifier. Je citerai également les dispositions relatives aux licenciements économiques, qui varient selon la taille de l'entreprise. En plus d'être contraire au principe d'égalité devant la loi, cette modulation ne s'appuie en rien sur la réalité des entreprises : leur taille n'est pas nécessairement liée à leur situation économique.
Ce texte est, en outre, contraire à nos engagements internationaux. En 2012, le comité de la liberté syndicale de l'OIT jugeait une affaire très similaire au sujet d'une réforme menée en Grèce, elle aussi sans doute pensée dans un bureau de la Commission européenne. Selon ce comité, la généralisation de la décentralisation des négociations collectives sapera les fondements de la négociation collective, méconnaissant les conventions nos87 et 98 de l'OIT !
Ce comité n'est pas le porte-parole du parti communiste français ou d'organisations syndicales que vous jugez réfractaires à toute réforme. Composé de neuf membres titulaires provenant des groupes « gouvernement », « employeur » et « travailleur », il est présidé par une personnalité indépendante.
Nous enfreignons même le pacte onusien relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Le rapport des experts du comité des droits économiques, sociaux et culturels est sans appel.
M. Charles Revet. - Eh bien !
Mme Annie David. - Inquiets des dérogations aux protections acquises, les experts exhortent le Gouvernement à s'assurer « que toute mesure rétrograde concernant les conditions de travail est inévitable et pleinement justifiée, nécessaire et proportionnée à la situation et non discriminatoire ». Pouvez-vous nous assurer, madame la ministre, que vous avez fait le nécessaire ? Je ne le pense pas. Le simple fait que vous n'ayez pas pris le temps de la concertation avec les organisations syndicales le prouve.
Vous n'avez pas envisagé toutes les solutions possibles pour créer de l'emploi et adapter le droit du travail aux évolutions économiques et sociales, comme la réduction du temps de travail explorée dans un rapport de l'IGAS qui, il est vrai, ne vous a pas été transmis. Vous avez accepté les propositions du Medef tandis que vous refusiez d'écouter les organisations syndicales et les représentants des TPE.
Nous refusons, en tant que parlementaires, de participer à cette destruction d'acquis sociaux reconnus au niveau international en invitant nos collègues à contester avec nous la constitutionnalité de ce texte. Il y va du respect de nos engagements internationaux et des valeurs qui fondent notre République. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur . - Nous poursuivons le même objectif mais n'utilisons pas le même moyen : vous, l'exception d'irrecevabilité ; nous, la question préalable. Le groupe communiste républicain et citoyen fait preuve d'autant de constance et de cohérence que les groupes UDI-UC et Les Républicains.
Si l'article L. 1 du code du travail n'a pas été complètement respecté, il n'a pas de valeur constitutionnelle. Peut-être faudrait-il d'ailleurs la lui donner ?
Le Conseil d'État a écarté le risque d'incompétence négative et estimé que l'article 11 du texte respectait les règles de l'OIT : sur ces points, nous pouvons le suivre. À titre personnel, avis défavorable.
Mme Myriam El Khomri, ministre . - Avis également défavorable. Je répondrai au comité onusien et vous adresserai le courrier que je lui destine.
Le Gouvernement n'a eu de cesse d'écouter et de modifier son texte. C'est précisément ce qu'on lui reproche !
À aucun moment, vous n'avez souligné les avancées incontestables de ce texte : sur la garantie Jeunes, le compte personnel d'activité, les contrats saisonniers et le renforcement des branches... Tout cela, est-ce revenir au XIXe siècle ? Non ! La loi doit demeurer protectrice mais elle ne peut pas s'adapter à chaque cas particulier. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain.)
La motion n°19 n'est pas adoptée.
Discussion générale (Suite)
Mme Nicole Bricq . - Nous achevons le périple parlementaire d'une loi à laquelle votre nom, madame la ministre, restera attaché. Cela semble dérisoire à la lumière du drame national que nous vivons mais nous ferons notre travail de parlementaire jusqu'au bout. Ce sera notre manière de rendre un hommage démocratique aux victimes des attentats en France, en Europe et dans le monde.
La majorité sénatoriale souhaite interrompre le processus d'examen parlementaire.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. - On enlève une épine du pied du Gouvernement !
Mme Nicole Bricq. - À quoi bon, dit-elle, puisqu'il y a eu le 49-3 ? C'est un point de vue, pas le nôtre. Il y a beaucoup à dire sur ce texte repris par le Gouvernement. Associer le Haut conseil du dialogue social aux travaux de la commission d'experts sur la refondation du code du travail garantira une réflexion collective ; ce n'est pas rien.
Ce n'est pas rien non plus de définir les objectifs de la négociation de branche, de prévoir l'adaptation des stipulations nationales des accords de branche au niveau local par des négociations territorialisées, d'engager avant le 31 décembre 2017 une négociation sur la définition de l'ordre public conventionnel applicable dans la branche. Les partenaires sont ainsi mis devant leurs responsabilités ; ceux qui ne les prendront pas, j'ose le dire, seront balayés par l'histoire.
M. Jacques Chiron. - Très bien !
Mme Nicole Bricq. - Peut-être la majorité sénatoriale n'a-t-elle pas compris le sens de l'article 10... Le principe majoritaire nous protège des accords au rabais, l'UIMM le dit elle-même dans son dernier bulletin.
Inutile de discuter quand les points de vue sont irréconciliables, entend-on. Pourtant, je note des accords sur des points qui sont loin d'être mineurs : le parcours d'accompagnement personnalisé pour les salariés refusant un accord défensif ou offensif ou encore sur les groupements d'employeur. Nous aurions pu travailler ensemble sur la médecine du travail et les voies de recours car nous sommes très dubitatifs sur le passage devant les prud'hommes. Dommage aussi que nous n'ayons pu aller plus loin sur le travail détaché.
Vos propos, monsieur Lemoyne, sur Mme El Khomri, étaient quelque peu condescendants, alors qu'elle a fait preuve de pédagogie et d'écoute.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. - J'ai salué la courtoisie et la dignité !
Mme Nicole Bricq. - Elle n'était pas « commise d'office » ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain) Elle n'a pas compté ses heures et vous avez évoqué en commission ma présence au meeting de M. Macron, autant le nommer. Merci de vous soucier de mon agenda... (Sourires)
Emmanuel Macron expliquait que le monde du travail changeait. Dommage que la droite refuse de voir que le vieil ordre fordiste, pyramidal, est déjà bouleversé par l'économie numérique. La loi doit accompagner le développement de nouvelles formes de travail, pour instaurer un modèle inclusif.
Parallèlement à cette loi, les partenaires sociaux ont négocié, en vain, la réforme de l'assurance-chômage, mais aussi, et cela est significatif, l'accord sur les intermittents : le nombre de CDD ne sera pas limité, en contrepartie d'une protection adaptée. C'est une voie plus prometteuse qu'un chimérique revenu universel.
Les socialistes français proposent au niveau européen un élargissement de la couverture chômage à l'égard des jeunes.
Toute réforme doit être conforme au principe de la démocratie sociale, de la démocratie d'opinion et de la démocratie politique. L'usage de l'article 49-3 est conforme à nos règles constitutionnelles, madame David. (Murmures sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen) Le rapport Laurent sur le droit du travail sera remis à la fin de l'année. Ce sera un test.
Ce texte prévoit 127 décrets d'application. Il faudra veiller à ce qu'ils ne dévient pas, comme cela arrive parfois, de l'esprit de la loi... Espérons que le Gouvernement associera les partenaires à leur rédaction. Cette loi jette les bases d'un nouveau dialogue social. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur les bancs du groupe RDSE)
M. Jean Desessard . - Ce projet de loi entend accroître le dialogue social et développer la culture du compromis et de la négociation.
Pourtant, et quelque peu contradictoirement, ce texte est combattu par les syndicats. Quant au 49-3, est-ce la démonstration du compromis ? (Exclamations à droite)
Pourquoi donc bouleverser le droit du travail à un an d'une échéance électorale majeure ? La droite s'est engouffrée dans la brèche. En cas d'alternance, nous craignons fort que vos garde-fous soient balayés...
Certes, nous examinons le texte voté par l'Assemblée nationale : les 35 heures auront été rétablies, le plafonnement des indemnités prud'homales a été supprimé, le périmètre des licenciements a été repoussé, la garantie Jeunes et le CPA ont également été restaurés.
Ce texte est donc « moins pire » que le texte initial. Maigre consolation !
Si nous comprenons le souci de développer le dialogue social de proximité, il faut tenir compte des réalités, de l'inégalité des rapports de forces entre salariés et patrons.
Attention au « moins-disant » social : où est le progrès social, si la flexibilité ne s'accompagne d'aucune garantie sur le travail ? Qui plus est, vous ne nous avez nullement démontré qu'une flexibilité accrue favoriserait les créations d'emplois. Au contraire, M. Supiot, éminent spécialiste de droit du travail et des relations sociales, a montré que des standards élevés en la matière allaient de pair avec une main d'oeuvre qualifiée.
La cause du «moins-disant » social avec les pays en voie de développement est sans fin et perdue d'avance. Privilégions nos atouts : la formation, les infrastructures, etc... Nous aurions souhaité des assises du travail préalables, dans un esprit ambitieux et protecteur, qui auraient évité le passage en force syndical et politique d'une loi sur le dialogue social. (Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et communiste républicain et citoyen)
M. Guillaume Arnell . - Selon toutes probabilités, ce texte sera rejeté puisque la commission des affaires sociales a voté le dépôt d'une question préalable.
Certes les textes de l'Assemblée nationale et du Sénat sont très différents. Le Sénat avait supprimé les 35 heures, la garantie Jeunes, le droit à la déconnexion, le plafonnement des indemnités aux prud'hommes. Les désaccords sont considérables.
Pour autant, je regrette que nous ne puissions débattre à nouveau : une seule lecture au Sénat, c'est bien peu !
D'autant plus qu'avec l'usage du 49-3 à l'Assemblée nationale, le Sénat est confirmé, comme l'avait déclaré Michel Amiel en première lecture, « comme la garantie de la tenue d'un débat démocratique et transparent où les positions pluralistes pourront s'exprimer et se confronter dans le respect des règles propres au Parlement... ».
Le Sénat a apporté des améliorations au texte, notamment à l'article premier bis A, avec le principe de neutralité, en portant à trois jours le congé en cas de décès d'un proche, ou encore en réduisant à un an l'ancienneté pour bénéficier du congé de proche aidant.
Nous avons amélioré aussi le contrat saisonnier, et élargi la place de la médecine du travail. Ces avancées sont le fruit de nos 80 heures de débat. Nous voterons contre la question préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE, ainsi que sur quelques bancs du groupe socialiste et républicain)
M. Dominique Watrin . - L'usage en nouvelle lecture du 49-3 à l'Assemblée nationale est le signe d'un passage en force contre les Français et les syndicats, et d'une fuite en avant ultralibérale à l'instigation de Bruxelles et du patronat. (Exclamations à droite)
En supprimant le principe de faveur, ce texte ouvre un boulevard dans lequel la droite s'est engouffré, pour détruire le droit du travail, réduire la représentation syndicale en entreprise et faire travailler les salariés 36, 37 ou 38 heures, payées 35.
Avec l'inversion de la hiérarchie des normes, la durée et l'organisation du temps de travail seront exclues du principe de faveur. Demain, tout le droit du travail sera ainsi mis de côté, revu dans le cadre d'accords d'entreprise !
Le travail de nuit ou du dimanche fera l'objet de négociations en entreprise. Le bouchon a été poussé si loin que les artisans s'alarment du risque de dumping social. Il était possible de faire autrement.
Nos 400 amendements modernisaient le code du travail avec les 32 heures, les sanctions contre les licenciements par les entreprises qui font des bénéfices, de nouveaux pouvoirs d'intervention des salariés dans la gestion des entreprises, comme cela se fait en Allemagne, avec de nouvelles possibilités pour les salariés de recourir à l'expertise. Autant de réformes que vous nous refusez !
Faciliter le licenciement de délégués syndicaux ne va pas non plus dans le bons sens.
Le groupe communiste républicain et citoyen a fait des propositions sur le temps partiel, l'amiante, la lutte contre le travail détaché. En vain ! En refusant la casse du code du travail pour dessiner une alternative, notre groupe n'a été ni immobiliste ni passéiste mais au contraire moderne, combatif et fidèle aux valeurs de la gauche.
Sachez que nous restons mobilisés aux côtés des salariés et nous vous donnons rendez-vous ici même à la rentrée pour continuer à porter les exigences et les aspirations du monde du travail. (Bravos et applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)
M. Bruno Retailleau . - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ainsi qu'au banc de la commission) Merci au président de la commission des affaires sociales, aux trois rapporteurs qui n'ont pas ménagé leur temps ni leur peine pour élaborer un texte réformateur. Qu'ils sachent que leur travail ne sera pas perdu...
Madame la ministre, vous voici au terme d'un véritable parcours du combattant et je reconnais volontiers que sur ce texte où il y a non seulement tant à dire, selon Mme Bricq, mais aussi, ajouterai-je, à redire, vous avez fait montre d'un engagement réel : je salue vos convictions, votre pédagogie. Malheureusement, l'élégance de votre démarche, que je tiens à souligner, les caricatures, vous le savez, n'étant pas venues du Sénat, ne rend pas ce texte aimable pour autant...
Ce projet de loi restera comme une occasion manquée, alors que la France a besoin de réformes profondes. Seul le président de la République peut se satisfaire de la situation actuelle. Quand on se compare, on se console, dit-on parfois...Hélas, en l'occurrence, on se désole ! La comparaison avec nos voisins est en effet sans appel : croissance deux fois moindre, taux de chômage très élevé, et en hausse, alors même que la conjoncture était très favorable : nous sommes passés du 14e rang sur 28 en 2012 au 21e rang aujourd'hui !
Pourtant, de l'aveu même du président de la République, quel « alignement de planètes » et il ne s'agit pas d'astrologie, mais bien de la situation économique ! Le Gouvernement n'a pas su mettre à profit la baisse du prix du pétrole, ni celle du niveau de l'euro, ni les taux d'intérêt bas. Mario Draghi avait pourtant jeté, grâce au quantitative easing, des bases favorables, précisément destinées à redonner des marges de réforme aux gouvernements nationaux.
Le Gouvernement a retiré le plafonnement des indemnités prud'homales et multiplie les renoncements. L'article 2 demeure mais corseté par l'article 13 et les accords de branche.
Quelle complexité bien française ! Nous étions prêts à voter la première mouture du texte. Finalement, ce texte, loin de simplifier introduit de nouvelles lourdeurs. L'on a mentionné les 127 décrets d'application... Il y a bien d'autres exemples, en tête desquels le CPP, inapplicable, ou le mandatement syndical.
Ce résultat est la conséquence d'une erreur de méthode et d'une approche idéologique. Le parcours chaotique de ce texte illustre la méthode à ne pas suivre. Sans mandat clair, on ne peut réformer. On ne peut faire le discours du Bourget et changer de cap ensuite ! Les réformes doivent être lancées en début de mandat, pas en fin de quinquennat. Le candidat François Hollande ne disait pas autre chose pourtant et ne voyez, madame la ministre, nulle mise en cause personnelle dans mes propos.
Il faut aussi fixer un cap clair, faire briller la lueur qui point à l'horizon, dire aux Français où vous allez et comment. Cela n'a pas été le cas et votre majorité, instable, s'est fractionnée. La majorité sénatoriale, elle, a été unie pour proposer un autre texte.
Vous vous êtes mis la France à dos. D'abord celle de gauche, qui regarde le code du travail comme un totem auquel on ne doit toucher à aucun prix.
Mme Éliane Assassi. - Vous n'avez pas écouté monsieur Laurent !
M. Bruno Retailleau. - Vous avez également déçu l'autre partie de l'opinion, qui croyait à votre volonté réformatrice. Alors, vous avez voulu faire du Sénat un bouc-émissaire idéal : nous avons l'habitude...
M. Roger Karoutchi. - Eh oui !
M. Bruno Retailleau. - Le Sénat, ultralibéral ? Sur les 35 heures, nous avons fait ce que Manuel Valls avait proposé en 2011 et votre texte, dans le fond, s'accommodait avec la réforme des 35 heures : nous l'assumons, nous ! (Applaudissements à droite)
Outre ce problème de méthode, je déplore le retour des vieilles lunes de gauche : votre conception des rapports sociaux dans l'entreprise, fondée sur une idéologie surannée, postulant une tension dialectique entre capital et travail est datée : elle appartient au XXe siècle, pas au XXIe ! Pour nous, l'entreprise est d'abord une communauté d'intérêts. Pour nous, il était indispensable de valoriser et de développer l'apprentissage et, là aussi, ce texte est une occasion manquée. (Applaudissements à droite et sur la plupart des bancs au centre)
Vous avez illustré cette phrase d'Edgar Faure : « la France est toujours en avance d'une révolution car elle est toujours en retard d'une réforme ». (Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe Les Républicains, ainsi que sur plusieurs bancs au centre)
M. François Zocchetto . - Nous espérons tous la fin de l'examen de ce texte, non parce que nous souhaitons une promulgation rapide, mais pour mettre fin à des tensions sociales et politiques qui durent depuis longtemps.
Le Gouvernement n'a pas suffisamment consulté en amont, ni tenu compte des réserves, nombreuses, qui ont été exprimées. Ce texte n'a jamais eu de majorité. La gauche est divisée, car elle n'a pas su revoir sa vision de l'entreprise. Entre les idées de Mme Bricq et celles de Mme Lienemann, il y a un monde !
Le texte initial comportait pourtant des mesures utiles, mais le Gouvernement n'a pas su convaincre, ni expliquer. Une meilleure préparation aurait facilité la réforme. En dépit des amendements adoptés à l'Assemblée nationale, il n'y a pas eu de débat au Palais-Bourbon, seulement un dialogue de sourds, l'expression de postures irréconciliables.
Au Sénat, en revanche, le débat a eu lieu, et nos rapporteurs, auxquels je tiens à rendre hommage, ont su élaborer un autre texte, reprenant aussi des avancées de la minorité. Il associait souplesse et efficacité grâce à l'encouragement de l'intéressement, au soutien à l'apprentissage, à la redéfinition du licenciement économique, à la modernisation de la médecine du travail, à la place laissée aux accords d'entreprises. Il ne faut pas avoir peur de la négociation avec les entreprises.
Malheureusement, le texte a été revu à l'Assemblée nationale. Il est temps de revoir notre manière de légiférer, de sortir du tempo médiatique, de prendre à nouveau le temps d'expliquer, de mettre en oeuvre ce que l'on annonce, alors que vous avez fait tout le contraire !
Nous regrettons que l'objectif initial de votre projet, qui était de permettre aux cinq millions de Français au chômage de retrouver le chemin de l'emploi, se soit rapidement effacé au profit de querelles idéologiques et de calculs politiques.
Nous voterons la question préalable. (Applaudissements au centre et à droite)
Mme Myriam El Khomri, ministre . - Pourquoi une réforme la dernière année du quinquennat ? Un président de la République est élu pour cinq ans et doit réformer pendant tout son mandat, de 2012 à 2017. Plusieurs lois de réforme ont été votées : sécurisation de l'emploi en 2013, l'ANI et la modernisation du dialogue social. Pour préserver notre modèle, nous devons nous adapter. Je n'ai aucune vision manichéenne de l'entreprise.
Le Gouvernement a suivi les recommandations du rapport Combrexelle. Que m'auriez-vous dit si nous ne l'avions fait ? Le dialogue social, au plus près des entreprises, avec les garde-fous du principe majoritaire, permettra d'avancer et d'évoluer.
La formation professionnelle ne bénéficie pas à ceux qui en ont besoin. Jamais le Gouvernement n'a opposé la garantie Jeunes à l'apprentissage. Celui-ci est un facteur de réussite. Mais la garantie Jeunes est tout sauf une allocation, c'est avant tout un levier d'insertion.
Les syndicats ont des approches différentes. Leurs divergences ne sont pas nouvelles : certains boycottent déjà les accords sur les retraites et ne signent pas les ANI. Il n'y a jamais eu d'entente parfaite. Ne feignons pas de croire le contraire !
Je ne peux que déplorer les caricatures. Comment gagner la bataille de l'opinion quand certains affirment qu'à cause de ce texte les apprentis travaillent 60 heures par semaine ? Ce texte est tout sauf un retour au XIXe siècle. Il crée de nouveaux droits, bien réels et modernes.
Quand le CPP entrera en vigueur, quand les artisans bénéficieront du droit à la formation professionnelle, quand les jeunes en situation de précarité en sortiront grâce à la garantie Jeunes, alors vous serez convaincus que cette réforme n'aura pas été vaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
Question préalable
Mme la présidente. - Motion n°1, présentée par M. Lemoyne, au nom de la commission.
En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi relatif au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels (n°771, 2015-2016).
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales . - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ainsi qu'au banc de la commission) Le contenu comme l'intitulé de ce texte ont évolué. Le 13 juillet, notre commission des affaires sociales a approuvé cette motion. Or dans un contexte social tendu, le Sénat avait examiné ce texte en détail, alors que nos collègues députés avaient été privés de débat par l'usage de l'article 49-3.
La commission des affaires sociales a consacré le 1er juin dernier près de 13 heures à l'examen du projet et à l'élaboration de son texte. Sur 411 amendements déposés, 201 avaient été adoptés, dont 155 émanant des rapporteurs.
Cet examen est intervenu au terme d'une phase d'auditions courte, mais intense : plus d'une soixantaine d'organismes, d'experts et de représentants des partenaires sociaux avaient été entendus en moins d'un mois. Notre commission avait également reçu successivement les organisations syndicales et patronales représentatives.
Nous avons cherché à renouer avec l'ambition initiale de ce texte, telle qu'elle ressortait de l'avant-projet transmis au Conseil d'État, alors salué par tous ceux qui cherchent à donner un nouveau souffle à l'économie française.
Nous étions parvenus à un texte cohérent, renouant avec l'ambition initiale : lever les freins à l'emploi, améliorer le mandatement ou encore la formation professionnelle. Las, l'Assemblée nationale et le Gouvernement n'ont pas pris en compte nos propositions, faisant montre, même, d'une certaine désinvolture. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
Sur la formation professionnelle, après le rapport de Mme Lamure, nous avions des propositions concrètes, partagées, de bon sens - et fortes de la comparaison avec la situation allemande. Le Gouvernement a balayé nos propositions d'un revers de la main. Un pacte pour la formation sur le modèle allemand, une meilleure formation aux métiers en alternance, une médiation consulaire sur le modèle alsacien avant toute rupture du contrat d'apprentissage - rien n'a trouvé grâce aux yeux du Gouvernement et de l'Assemblée nationale.
Pourquoi, dans ces conditions, nous livrerions-nous à une nouvelle lecture ? Le temps est venu de dire « Non » au Gouvernement sur ce texte dont il ne reste rien, ni sur la forme, ni sur le fond : ce texte n'aura été voté ni par l'Assemblée nationale, ni par le Sénat, malgré notre pragmatisme. Voilà le paradoxe : après avoir tant critiqué Nicolas Sarkozy et François Fillon pour leur prétendu autoritarisme, eux qui n'ont jamais utilisé le 49-3, ni eu à faire face à des manifestations de l'ampleur actuelle, vous allez mettre en place une loi dont personne ne veut. C'est dire que le Gouvernement ne tient pas compte de la demande des Français. Ceux qui disent que « Ça va mieux » croient sans doute que nous serions devant un événement sportif.
Certains parlent d'une VIe République ; si elle doit être conforme à ce qui se passe à propos de ce texte, mieux vaut en rester à la Ve. Le « coup d'État permanent », c'est ce gouvernement qui le pratique.
Malgré toute mon estime personnelle, je dois vous dire, madame la ministre, que j'invite le Sénat à voter cette question préalable. (Applaudissements au centre et à droite)
Mme Myriam El Khomri, ministre. - Avis défavorable.
M. Pierre Laurent . - Nous ne la voterons pas, car nous sommes opposés à l'esprit de surenchère dont elle est la traduction. Vous ne combattez l'article 2 que pour aller plus loin encore dans cette voie que nous réprouvons.
Le recours à la question préalable est une petite habileté pour ne pas montrer trop évidemment votre soutien à ce texte. Vous en souhaitez les dispositions mais sans laisser vos empreintes sur la scène de crime (Exclamations à droite)
C'est un déni de démocratie supplémentaire ; ce texte n'aura pas été discuté à l'Assemblée nationale et il ne l'aura été qu'une fois au Sénat. Le défaut de compromis avec la droite serait la raison du 49-3 ? Pourquoi n'avoir pas cherché d'accord avec votre majorité ? Voilà le problème ! Nous resterons mobilisés, au côté des forces syndicales, dont nous nous ferons les porte-voix ici. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)
À la demande de la commission des affaires sociales, la motion n°1 est mise aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°439 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l'adoption | 187 |
Contre | 154 |
Le Sénat a adopté la question préalable.
En conséquence, le projet de loi n'est pas adopté.
Dépôt de rapports
Mme la présidente. - M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport sur les recompositions de l'offre hospitalière 2014 et celui sur les créances fiscales et les procédures de surendettement. Ils ont été transmis à la commission des affaires sociales pour le premier et à la commission des finances pour le second.
Listes électorales (Conclusions des CMP)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions des commissions mixtes paritaires sur la proposition de loi rénovant les modalités d'inscription sur les listes électorales, la proposition de loi organique rénovant les modalités d'inscription sur les listes électorales des ressortissants d'un État membre de l'Union européenne autre que la France pour les élections municipales et la proposition de loi organique rénovant les modalités d'inscription sur les listes électorales des Français établis hors de France.
Discussion générale commune
M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur pour le Sénat des commissions mixtes paritaires . - La CMP réunie pour harmoniser les positions de l'Assemblée nationale et du Sénat sur les propositions de loi de nos collègues Élisabeth Pochon et Jean-Luc Warsmann, qui révisent profondément les modalités d'inscription sur les listes électorales, s'est conclue sur un bon accord. Celui-ci confirme la philosophie générale de cette réforme, que nous avions faite nôtre dès la première lecture, et il retient les modalités que nous avions voulues.
Un répertoire électoral unique sera créé, géré par l'Insee, dont les listes communales seront des extractions. L'inscription ou la radiation des listes rendue possible toute l'année en continu, jusqu'à trente jours avant l'élection la plus proche ; la possibilité de double inscription des Français établis hors de France supprimée.
Le Sénat souhaitait le report d'un an de la « mise en oeuvre possible » de la réforme, cette formule marquant le fait que le 31 décembre 2019 n'est qu'une date limite qu'un décret en conseil d'État pourra avancer si l'harmonisation de la liste de l'Insee et des listes communales a bien progressé - ce dont je doute fort.
Les commissions communales seront modifiées comme nous le voulions. Elles statuent sur les recours, obligatoirement avant la saisine du juge, leur composition reflètera la majorité municipale. C'est le bon sens, contre toute manipulation politique et pour garantir le recours aux citoyens. Qui plus est, le maire sera à l'abri d'erreurs possibles d'interprétation des textes sur l'inscription. Enfin, la date limite fixée initialement à un mois est portée au sixième vendredi précédant le scrutin : cela garantira contre un afflux excessif de demandeurs au dernier moment tout en étant proche de l'échéance électorale.
Je vous invite donc à voter l'ultime mouture de ce texte. (Applaudissements)
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès de la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargée de la formation professionnelle et de l'apprentissage . - L'engagement du président de la République à améliorer l'accès au scrutin, avec une inscription sur les listes jusqu'à un mois avant le scrutin, puis le rapport Pochon-Warsmann, ont précédé ces mesures destinées à résoudre le problème posé par les 3 millions de non-inscrits et les 6,5 millions de mal inscrits sur les listes électorales.
Nous avons tenu compte des contraintes pesant sur les maires pour mettre à jour les listes. Merci aux rapporteurs en CMP d'être parvenus à un accord, à partir de positions initialement éloignées.
Nos concitoyens pourront s'inscrire jusqu'à 30 jours ouvrés avant le scrutin, soit le sixième vendredi ; c'est bien plus large qu'aujourd'hui. Ceux qui accèdent à la nationalité et à la majorité bénéficieront d'un accès plus large à la citoyenneté : trop de nos concitoyens sont empêchés de voter pour des raisons administratives.
Les nouvelles technologies rendent possibles ces progrès grâce à la dématérialisation des échanges entre l'Insee et les communes, aussi bien que pour cibler les doubles inscriptions. Les délais de modification de la liste, comme des recours, sont modifiés. La commission se prononcera dans les deux jours sur le recours administratif préalable dont elle serait saisie et elle pourra s'autosaisir. L'électeur, la liste publiée, aura sept jours pour saisir le tribunal d'instance qui se prononcera dans les huit jours.
Le doublon est supprimé entre liste communale et liste consulaire pour les Français établis hors de France ; cependant cette réforme n'entrera en vigueur qu'après les prochaines échéances et nos concitoyens établis hors de France pourront toujours changer la liste où ils décident de s'inscrire.
Je veux rassurer M. Collombat sur sa mise en oeuvre : l'Insee a mis en place l'équipe dédiée, le ministère de l'intérieur aussi bien que l'AMF ont avancé sur le système d'information.
Je vous remercie de votre soutien, au service de notre démocratie. (Applaudissements)
Mme Esther Benbassa . - Le Sénat a rendu hommage aux victimes de l'attentat de Nice, j'associe mon groupe à cet hommage - aux victimes de Nice comme à celles de Bagdad et d'ailleurs.
L'enjeu de ces textes n'est rien de moins que la participation aux élections : le groupe écologiste se réjouit de l'accord de la CMP. En 2014, le rapport « Mieux établir les listes électorales pour revitaliser notre démocratie » estimait que 9,5 millions d'électeurs étaient « mal » ou « non-inscrits », soit 20 % d'un corps électoral comptant 45 millions d'électeurs ; c'est considérable.
Il fallait rénover, moderniser notre système : les mesures que nous voterons aujourd'hui y participeront assurément. Cependant, il faudra une refondation profonde de nos institutions, pour aller plus loin, avec, permettez-moi cette digression, l'ouverture du droit de vote aux étrangers. Beaucoup a été dit sur ce sujet, tout a même été promis mais trop peu a été fait dans ce sens, alors que ce serait « revitaliser notre démocratie ». L'exécutif y a renoncé, il lui préfère la déchéance de nationalité... J'y insiste : le droit de vote des étrangers est un outil d'intégration dont nous ne pourrons nous passer bien longtemps ! (Applaudissements)
M. Christophe-André Frassa . - « Le Sénat à l'écoute des élus et des électeurs », ainsi pourrait-on résumer la contribution de la Haute Assemblée à ce texte. Nous avions quelques divergences rédactionnelles avec l'Assemblée nationale, le groupe Les Républicains se félicite de l'accord obtenu en CMP - sur les délais d'inscription, sur la composition de la commission locale de contrôle, sur le recours administratif devant cette commission, sur les sanctions contre le maire et sur le délai au 31 décembre 2019 : les élus en seront rassurés même si l'on ne peut jamais être certain qu'une année ne sera pas électorale.
Cependant, la CMP a transposé ce principe aux Français établis hors de France, avec la suppression de la double inscription. Je vous appelle à y réfléchir. Les Français de l'étranger n'ont pas de collectivité territoriale de rattachement. Ainsi, s'ils votent à l'étranger pour les scrutins nationaux et les élections, consulaires, ils votent en France, pour les scrutins locaux. Faudra-t-il qu'ils changent d'inscription à chaque élection ? Quid, ensuite, des 443 élus consulaires qui se livreraient à ce tourisme électoral ?
Quoi qu'il en soit, le groupe Les Républicains votera ce texte. (Applaudissements)
M. Michel Canevet . - Je me réjouis de voir bientôt adoptés ces trois textes d'initiative parlementaire. L'enjeu en est crucial, puisqu'il s'agit de lutter contre la désaffection électorale, en tenant compte des conditions réelles de la vie sociale.
Les règles doivent être claires pour l'ensemble des scrutins, c'est le cas ici. Le recul de la mise en oeuvre au 31 décembre 2019, cependant, risque d'être mal compris par nos concitoyens, l'administration pourrait s'organiser plus rapidement. Nous apprécions que deux amendements de notre groupe, respectivement de M. Delahaye et Mme Tetuanui, aient été pris en compte. Le groupe UDI-UC votera pour, en espérant que nos concitoyens retrouveront le chemin des urnes : notre démocratie en a besoin ! (Applaudissements à droite et au centre)
M. Christian Favier . - Le constat est accablant : lors des trois derniers scrutins, près d'un Français sur deux ne s'est pas déplacé - les plus jeunes, en particulier, ne se reconnaissent pas dans les institutions. Les promesses non tenues n'y sont pas pour rien ; et pour commencer, vous auriez pu faire davantage pour le vote des étrangers, promis par le candidat Hollande et que nous avions adopté au Sénat. (Mme Eliane Assassi renchérit)
Nous soutenons la réduction du délai d'inscription, la révision des listes en continu : ce sont des avancées. Cependant, pourquoi ne pas les mettre en place dès l'an prochain ? Nous avons su nous adapter pour les régionales, il aurait été possible de faire mieux que de renvoyer à 2020.
Sur les listes, ensuite, le problème ne tient pas qu'aux doubles inscriptions ; n'allons pas priver de droit de vote certains de nos concitoyens ! Les nouvelles missions de contrôle vont dans le bon sens.
Ces mesures ne régleront pas les problèmes d'une Ve République à bout de souffle, mais elles amélioreront le traitement des mal et pas inscrits : nous les voterons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)
M. Jean-Yves Leconte . - Nous travaillons depuis plusieurs années à une modernisation de nos listes électorales, en particulier pour une révision plus fréquente, ce que les nouvelles technologies rendent possibles. De même, nous avons été très attentifs au passage de la commission administrative à la commission de contrôle : il fallait se garder d'une inflation des recours judiciaires.
Affirmer le principe d'un recours administratif préalable obligatoire imposait de modifier les délais ; nous sommes heureusement arrivés à un compromis avec l'Assemblée nationale, sur le sixième vendredi avant l'élection - dans la mesure où celle-ci est prévisible. L'article 9 sera ainsi effectif pour toutes les élections.
La CMP est revenue sur l'auto-saisine de la commission de contrôle prévue par l'Assemblée nationale. Un bon compromis a été trouvé sur le rôle du maire, il pourra formuler des observations à la commission de contrôle.
La CMP a retenu comme date ultime d'entrée en vigueur de la loi le 31 décembre 2019. Compte tenu des élections européennes, espérons que nous aboutirons auparavant.
Ce texte marque la fin de la double inscription pour les Français établis hors de France. Ce sera douloureux pour ceux qui en avaient pris l'habitude. L'ouverture du droit à sépulture là où l'on a droit à s'inscrire sur les listes électorales adoucira les choses.
Nous devons tendre au vote électronique pour toutes les élections.
Bref, tout le monde en est d'accord, ce texte ne révolutionnera pas notre démocratie mais il démontre notre capacité à moderniser et à simplifier dans le consensus. Merci encore au rapporteur Collombat. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain, M. Yves Détraigne applaudit également.)
M. Jean-Claude Requier . - Le compromis trouvé en commission mixte paritaire satisfait tous les membres du groupe RDSE, qui le voteront.
Deux points ont concentré les débats : à savoir les délais de clôture des listes électorales et la composition et le rôle des commissions de contrôle électoral.
La simplification de la procédure d'inscription sur les listes électorales n'a de sens que si elle est mise en oeuvre uniformément sur l'ensemble du territoire. Nous nous félicitons donc du report de l'entrée en vigueur de cette loi au 31 décembre 2019. Ce délai, qui est maximal, n'empêchera pas la création anticipée du répertoire électoral unique et permanent.
Sur la date de clôture des listes, la commission mixte paritaire a considéré que le délai de 30 jours symbolique, laissait peu de temps aux administrations et aux citoyens. La formule du « sixième vendredi avant le scrutin », qui paraît obscure à certains, lèvera des incertitudes, notamment sur le décompte des jours ouvrés.
Le répertoire électoral est une avancée indéniable, à condition que les communes et, surtout, les petites bénéficient des moyens nécessaires.
Nous soutenons la rédaction de la CMP sur la composition et le rôle de la commission de contrôle. Outre le pouvoir de radiation reconnu à la commission, elle pourra recevoir les observations du maire, qui sera associé à ces travaux.
Ce texte contribuera à lutter contre les problèmes d'abstention liés à la non ou à la mal inscription. Sachons-en gré au rapporteur, qui a tiré parti de sa longue expérience d'élu local. (Applaudissements)
La discussion générale commune est close.
Modalités d'inscription sur les listes électorales
Mme la présidente. - En vertu de l'article 42, alinéa 12, de notre Règlement, le Sénat examinant les conclusions de la CMP après l'Assemblée nationale, il se prononcera par un vote unique sur l'ensemble de la proposition de loi en ne retenant que les amendements présentés ou acceptés par le Gouvernement.
ARTICLE 2
Mme la présidente. - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.
Alinéa 26
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Si, lors de la réunion prévue au II de l'article L. 19, la commission de contrôle n'a pas statué sur les recours administratifs préalables formés devant elle, elle est réputée les avoir rejetés.
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. - Si la commission de contrôle ne statue pas sur les recours formés à la date de ses réunions prévues, elle est réputée les avoir rejetés.
M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur. - Cette précision est utile, on n'est jamais assez prudent.
Mme la présidente. - Je vais mettre aux voix la proposition de loi modifiée par l'amendement n°1.
M. Alain Richard. - Le groupe socialiste votera unanimement ce texte comme le groupe RDSE, ce qui est plus rare et, semble-t-il, plus facile lorsque le rapporteur est issu de ses rangs...
Un rappel : cette proposition de loi est assortie d'un gage. Nous serons donc attentifs au mécanisme de soutien aux communes.
Une réserve : espérons que le texte sera mis en oeuvre avant la fin 2019, un afflux de demandes d'inscriptions est à craindre à l'approche des élections municipales de mars 2020.
La proposition de loi, modifiée par l'amendement n°1, est définitivement adoptée.
Listes électorales des ressortissants de l'Union européenne
La proposition de loi organique est mise aux voix par scrutin public de droit.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°440 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 342 |
Pour l'adoption | 342 |
Contre | 0 |
Le Sénat a définitivement adopté la proposition de loi organique.
Français établis hors de France
Mme la présidente. - En vertu de l'article 42, alinéa 12, de notre Règlement, le Sénat examinant les conclusions de la CMP après l'Assemblée nationale, il se prononcera par un vote unique sur l'ensemble de la proposition de loi organique en ne retenant que les amendements présentés ou acceptés par le Gouvernement.
ARTICLE PREMIER
Mme la présidente. - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.
Alinéa 23
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Si, lors de la réunion prévue au II de l'article 8, la commission de contrôle n'a pas statué sur les recours administratifs préalables formés devant elle, elle est réputée les avoir rejetés.
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. - Amendement de coordination.
M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur. - Avis favorable.
La proposition de loi organique est mise aux voix par scrutin public de droit.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°441 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 342 |
Pour l'adoption | 342 |
Contre | 0 |
Le Sénat a définitivement adopté la proposition de loi organique, modifiée par l'amendement n°1 du Gouvernement.
Prochaine séance, demain, mercredi 20 juillet à 17 heures.
La séance est levée à 17 h 55.
Jacques Fradkine
Direction des comptes rendus
Ordre du jour du mercredi 20 juillet 2016
Séance publique
À 17 heures
Présidence : M. Gérard Larcher, président
Secrétaires : Mme Valérie Létard M. Jackie Pierre
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, prorogeant l'application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence (n° 803, 2015-2016)
Analyse des scrutins publics
Scrutin n° 439 sur la motion n°1, présentée par M. Jean-Baptiste Lemoyne au nom de la commission des affaires sociales, tendant à opposer la question préalable au projet de loi, considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, en nouvelle lecture, relatif au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.
Résultat du scrutin
Nombre de votants :342
Suffrages exprimés :341
Pour :187
Contre :154
Le Sénat a adopté
Analyse par groupes politiques
Groupe Les Républicains (144)
Pour : 142
N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, M. Michel Bouvard
Groupe socialiste et républicain (109)
Contre : 109
Groupe UDI-UC (42)
Pour : 41
N'a pas pris part au vote : 1 - Mme Jacqueline Gourault, présidente de séance
Groupe communiste républicain et citoyen (20)
Contre : 20
Groupe du RDSE (17)
Pour : 1 - M. Gilbert Barbier
Contre : 16
Groupe écologiste (10)
Contre : 9
Abstention : 1 - Mme Leila Aïchi
Sénateurs non inscrits (6)
Pour : 3
N'ont pas pris part au vote : 3 - MM. Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier
Scrutin n° 440 sur l'ensemble de la proposition de loi organique rénovant les modalités d'inscription sur les listes électorales des ressortissants d'un État membre de l'Union européenne autre que la France pour les élections municipales, dans la rédaction du texte proposé par la commission mixte paritaire.
Résultat du scrutin
Nombre de votants :342
Suffrages exprimés :342
Pour :342
Contre :0
Le Sénat a adopté
Analyse par groupes politiques
Groupe Les Républicains (144)
Pour : 142
N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, M. Michel Bouvard
Groupe socialiste et républicain (109)
Contre : 109
Groupe UDI-UC (42)
Pour : 41
N'a pas pris part au vote : 1 - Mme Jacqueline Gourault, présidente de séance
Groupe communiste républicain et citoyen (20)
Contre : 20
Groupe du RDSE (17)
Pour : 17
Groupe écologiste (10)
Pour : 10
Sénateurs non inscrits (6)
Pour : 3
N'ont pas pris part au vote : 3 - MM. Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier
Scrutin n° 441 sur l'ensemble de la proposition de loi organique, rénovant les modalités d'inscription sur les listes électorales des Français établis hors de France, dans la rédaction du texte proposé par la commission mixte paritaire.
Résultat du scrutin
Nombre de votants :342
Suffrages exprimés :342
Pour :342
Contre :0
Le Sénat a adopté
Analyse par groupes politiques
Groupe Les Républicains (144)
Pour : 142
N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, M. Michel Bouvard
Groupe socialiste et républicain (109)
Contre : 109
Groupe UDI-UC (42)
Pour : 41
N'a pas pris part au vote : 1 - Mme Jacqueline Gourault, présidente de séance
Groupe communiste républicain et citoyen (20)
Contre : 20
Groupe du RDSE (17)
Pour : 17
Groupe écologiste (10)
Pour : 10
Sénateurs non inscrits (6)
Pour : 3
N'ont pas pris part au vote : 3 - MM. Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier