Questions d'actualité
M. le président. - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au gouvernement. Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur France 3 et Public Sénat.
Spéculation sur la faim
M. Jean Desessard . - Dans le monde, dans notre monde, une personne sur neuf souffre de la faim. Des apprentis-sorciers parient sur les OGM, alors que le manque de nourriture est lié, avant tout, aux conflits armés, au changement climatique, à la concurrence déloyale des pays développés et au prix de la nourriture. Celui des matières premières, de plus en plus volatil, est dévastateur pour les populations les plus fragiles. Cette volatilité est le résultat de la financiarisation des marchés alimentaires et agricoles. Comme l'a montré la Banque mondiale, les banques françaises - BNP Paribas, Société générale, Natixis - en sont tout particulièrement responsables, en proposant aux investisseurs des fonds indiciels de matières premières, fonds qui ont causé la flambée des prix alimentaires de 2008. Où en sommes-nous de l'application des mesures d'encadrement de la spéculation agricole prévues par la loi bancaire ? Comment agit l'Autorité des marchés financiers (AMF) ?
Au-delà, la spéculation sur la faim est-elle politiquement acceptable, quand on voit avec quelle facilité BNP a pu absorber son amende américaine de 9 milliards - preuve que le monde de la spéculation ne connaît pas la famine ! - et que le gouvernement vient d'obtenir un rabais considérable pour les banques françaises dans leur contribution au Fonds de résolution européen ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget . - La loi bancaire française de juillet 2013 a anticipé les règles européennes. Votre groupe nous y a aidés. Le pouvoir de supervision de l'AMF a été renforcé sur les marchés de matières premières agricoles et des limites de position introduites sur les instruments financiers qui ont pour sous-jacents lesdites matières. Un reporting quotidien doit être fait à l'AMF. Les banques ne peuvent détenir des stocks physiques pour influer sur les marchés.
Par prudence, l'AMF a préféré attendre la publication des standards techniques européens, après quoi elle a lancé ses consultations le 22 décembre. L'interdiction pure et simple de ces fonds spéculatifs n'aurait d'impact qu'au niveau européen.
Autre preuve du volontarisme du gouvernement : l'adoption par l'Assemblée nationale de la proposition de loi Potier qui responsabilise les sociétés mères et donneurs d'ordre sur l'emploi de main-d'oeuvre, notamment dans les pays asiatiques. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Projet de loi Macron
M. Dominique Watrin . - Je salue la mobilisation des retraités, salariés et chômeurs qui défilent actuellement contre l'austérité et le projet de loi Macron (Exclamations à droite)
Mme Éliane Assassi. - Ça bouge !
M. Dominique Watrin. - Ces dizaines de milliers de manifestants exigent le retrait du pacte de responsabilité et dénoncent les 40 milliards d'euros de cadeaux aux entreprises sans considération d'efficacité économique ni contreparties.
M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. - Le gouvernement ne fait pas de politique d'austérité.
M. Dominique Watrin. - Comme le ministre de l'économie, nous considérons que l'économie française est en état d'urgence. Et que faites-vous ? Au lieu de relancer l'activité, vous la marchandisez pour ensuite prétendre la réguler... Vous servez les intérêts de la finance sous couvert de l'intérêt général, vous abdiquez devant les sociétés concessionnaires d'autoroutes et les laissez s'asseoir sur leur rente de 20 à 24 %, privatisez les industries d'armement et les aéroports. Avec les annonces d'hier, Vous vous rendez compte bien tard des effets de la baisse des dotations aux collectivités territoriales sur l'investissement. En revanche, votre silence est assourdissant sur la répartition des richesses créées par les salariés. M. Macron s'allie avec la droite qui ne lui reproche qu'une chose : ne pas aller assez loin. Quand entendrez-vous enfin le message de la rue et celui des urnes ? Quand mettrez-vous les richesses produites au service de l'économie réelle ? (Applaudissements sur les bancs CRC)
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique . - Il n'y a pas d'austérité en France (On confirme le propos sur les bancs socialistes ; exclamations sur les bancs du groupe CRC). J'ai longtemps vécu en Grande-Bretagne, croyez-moi, c'est autre chose. Regardez les coupes faites dans la santé publique, l'éducation, la justice, la police, la défense. Laissez croire que la France pratique l'austérité est dangereux en Europe au moment où elle défend une politique de croissance et d'emploi ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Le projet de loi Macron a pour objet de stimuler la croissance et l'emploi. Il ouvre les lignes d'autocar, pour le pouvoir d'achat des Français (marques d'ironie à droite ; nouvelles exclamations sur les bancs du groupe CRC), pour les personnes isolées ou les jeunes qui n'ont pas accès...
Mme Éliane Assassi. - À l'emploi !
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. - ... à la mobilité. De même, les professions réglementées ne doivent pas être des professions privilégiées : il faut les ouvrir aux jeunes. Quant au permis de conduire, est-il normal qu'il faille attendre des mois pour le passer ? Les jeunes, là encore, en ont besoin pour se déplacer pour trouver un emploi. (Mme Éliane Assassi s'exclame)
Le projet de loi Macron est un texte de progrès ! J'espère que vous vous y rallierez ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. - Bravo !
Mesures pour l'investissement et l'économie
Mme Nelly Tocqueville . - Ma question s'adresse au Premier ministre. La reprise est en route, il faut la consolider, l'accélérer. Cela passe par la poursuite des réformes. Le CICE, le pacte de responsabilité et de solidarité apportent des résultats encourageants : les entreprises envisagent d'augmenter leurs investissements de 3 % en 2015, les ménages de consommer davantage. Le projet de loi Macron s'inscrit dans cette voie (marques d'ironie à droite), je m'en réjouis. Hier, le Premier ministre a annoncé un plan pour l'investissement afin de soutenir la croissance.
M. Didier Guillaume. - Excellente annonce !
Mme Nelly Tocqueville. - Les annonces visent l'investissement privé comme public. Pour le premier, l'avantage fiscal exceptionnel pour l'investissement industriel sur les douze prochains mois sera déterminant pour moderniser notre outil de production et créer de l'emploi. La capacité de prêts de la BPI sera portée de 6 à 8 milliards d'euros sur quatre ans, cela devra réveiller l'appétit des PME et ETI pour l'investissement.
Mais il faut aussi soutenir l'investissement des collectivités territoriales... (Mme Nicole Bricq approuve)
M. Joël Guerriau. - Avec la baisse des dotations, difficile...
Mme Nelly Tocqueville. - ... qui a un effet bénéfique sur le secteur des travaux publics. Les crédits de l'Anah seront renforcés.
Monsieur le ministre, pouvez-vous détailler ces mesures et leurs conditions de mise en oeuvre ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget . - Oui, un certain nombre d'indicateurs s'améliorent, mais pas celui de l'investissement. (Exclamations à droite) C'est pourquoi le gouvernement, en responsabilité, prend des mesures pour favoriser celui-ci.
La principale mesure est le suramortissement de certaines catégories d'investissements privés. Contrairement à ce que j'entends parfois, ce n'est pas une mesure de trésorerie, mais bien un avantage supplémentaire de 13 % sur l'ensemble des investissements éligibles. Le coût pour le budget 2015 est estimé à 380 millions, 2,5 milliards sur cinq ans.
La prolongation du crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE) sur la transition énergétique au-delà de 2015 était très attendue, notamment par la CGPME.
Enfin, les mesures sur le préfinancement du FCTVA ne sont pas non plus sans incidences budgétaires : 50 millions environ.
M. Francis Delattre. - Une goutte d'eau !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Il y a une vraie prise de conscience, pour une accélération de l'investissement. Elle répond aux attentes des acteurs économiques. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Rachat de Numéro 23 par NextRadioTV
Mme Catherine Morin-Desailly . - Je veux d'abord dire notre soutien à TV5 Monde, qui vient de faire l'objet d'une cyberattaque sans précédent. (Applaudissements)
Deux ans et demi après sa création, la chaîne Numéro 23 change de propriétaire. L'investisseur fait une belle affaire, on serait tenté de dire « chapeau, l'artiste ! »... Comment expliquer aux Français, à la fois téléspectateurs et contribuables, que cette chaîne, cédée gratuitement, soit vendue si vite ?
Alors que le gouvernement s'apprête à céder la bande des 700, que Radio France entame son vingt-deuxième jour de grève, entend-il rendre notre droit plus protecteur de l'intérêt général, prévenir la poursuite d'actions spéculatives sur les chaînes de la TNT ?
Le projet de loi Macron n'est-il pas l'occasion de porter la durée minimale de détention de deux ans et demi à cinq ans, pour moraliser ces pratiques ? (Applaudissements au centre et à droite)
Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication . - Merci de votre message de solidarité avec TV5 Monde. Avec MM. Fabius et Cazeneuve, je me suis rendue ce matin auprès des équipes pour leur dire notre soutien. Nous recevrons les dirigeants de grands médias pour évoquer les suites à donner.
La vente de la chaîne Numéro 23 est soumise au contrôle de l'Autorité de la concurrence et du CSA, ce dernier devant prendre en compte le respect du pluralisme et de la concurrence. Le gouvernement a renforcé les procédures. La loi du 15 novembre 2013 prévoit que le CSA doit mieux considérer l'incidence économique d'un projet avant de l'agréer. Une taxation de 5 % a également été créée sur la redevance des chaînes de la TNT en cas de changement d'utilisateur. Nous aurions aimé avoir le soutien de la droite à l'époque... Les fréquences cédées gratuitement ne peuvent donc faire l'objet de spéculation. Un changement substantiel du format ou de la programmation ouvrirait en outre la voie à un retrait de l'autorisation.
Quant à votre proposition d'allongement du délai, pourquoi pas. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Redécoupage cantonal
M. Christian Cambon . - Il y a dix jours, la majorité gouvernementale a subi un revers électoral sans précédent : elle a perdu la présidence de 26 conseils généraux. L'échec aurait été plus cuisant encore si M. Valls n'avait pas fait voter un redécoupage des cantons effectué avec des ciseaux de dentellière (Applaudissements à droite ; protestations à gauche) qui a suscité l'indignation des élus et 2 500 recours - tous vains.
Le cas du Val-de-Marne est édifiant, tout a été fait pour le conserver au parti communiste qui le détient depuis trente-huit ans - monnaie d'échange d'une union de la gauche rafistolée pour assurer aux socialistes, ailleurs, de bons reports communistes... (Mouvements divers à gauche) À Vitry-sur-Seine, bastion communiste, 45 000 habitants, deux cantons, quatre conseillers départementaux ; à Nogent-sur-Marne, commune de droite, 45 000 habitants, un seul canton, deux conseillers.
Mme Éliane Assassi. - Vous êtes mauvais perdant !
M. Didier Guillaume. - Nous avons fait élire 50 % de femmes !
M. Christian Cambon. - En matière d'égalité des chances, on fait mieux ! La droite a perdu avec 52 % des voix, la gauche l'a emporté avec 41 %. (Mêmes mouvements)
Mme Éliane Assassi. - Et M. Pasqua, qu'avait-il fait ?
M. Christian Cambon. - Dans quel pays vivons-nous ? Le Premier ministre n'est pas avare de leçons de morale politique ; est-ce ainsi qu'on réconciliera les Français avec les urnes ? Plutôt que rester sourd et aveugle au désaveu des électeurs, quand le gouvernement, au lieu de procéder à de telles manipulations indignes, prendra-t-il des mesures courageuses pour rendre aux Français l'envie d'aller voter !
M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur . - La preuve est faite que certains résultats électoraux font perdre tout sens de la mesure. (Applaudissements sur les bancs socialistes et CRC). Nous avons dû recréer les cantons que vous aviez supprimés en créant les conseillers territoriaux. Je me suis penché très attentivement sur le cas du Val-de-Marne : dans le précédent découpage, l'écart allait par exemple de 1 à 3 entre les cantons de Villiers et de Bonneuil. Il n'est plus nulle part supérieur à 20 %. (Applaudissements à gauche)
Enfin, il n'y avait que 13,5 % de femmes dans les conseils départementaux, il y en a aujourd'hui 50 %. (Applaudissements à gauche)
M. Christian Cambon. - Ce n'est pas ma question !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. - C'est ma réponse. (On apprécie, à gauche) Je pensais que cela suffirait à vous mettre de meilleure humeur. (Sourires et applaudissements à gauche)
Kenya et Centrafrique
M. Guillaume Arnell . - Il y a une semaine, le monde apprenait avec horreur le massacre de l'université de Garissa, perpétré par les shebabs venus de Somalie. La lutte contre le terrorisme est mondiale, l'Afrique n'est pas épargnée. La France collabore-t-elle avec le Kenya pour ne pas laisser ce crime impuni ?
Le Kenya toujours, d'où est venue hier une note d'espoir, puisqu'un accord de cessez-le-feu en Centrafrique a été annoncé par la présidence kényane chargée depuis des mois d'une médiation délicate entre la Séléka et la milice anti-bakala. Est-ce véritablement un nouvel accord, excluant cette fois l'amnistie générale et le remplacement des autorités de transition en place, deux points inacceptables par celles-ci, qui ont toujours refusé de reconnaître la légitimité de ces négociations ? Pensez-vous que cet accord puisse se traduire sur le terrain par un véritable cessez-le-feu, alors que la Centrafrique prépare des élections ? La présidente de transition attend beaucoup du forum qui se tiendra à Bangui fin avril sans que l'on sache si les anciens présidents Bozizé et Djotodia pourront y participer.
Alors que la force Sangaris a vocation à diminuer ses effectifs sur le terrain, qu'elle est votre vision de la situation, monsieur le ministre ? (Applaudissements sur les bancs du RDSE)
M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international . - Le Kenya a été frappé de façon abominable avec l'assassinat de jeunes gens qui ne demandaient qu'à étudier - pourchassés comme des animaux, parce qu'ils étaient chrétiens. La France soutient la population et le gouvernement du Kenya d'une manière active qu'il n'est pas nécessaire de détailler ici.
Pour ce qui est de la Centrafrique, ni la présidence centrafricaine ni les autres capitales régionales ne reconnaissent l'accord que vous évoquez. La France a été obligée d'intervenir pour éviter un génocide. Il y a encore des problèmes sur le terrain, mais globalement, la sécurité s'est nettement améliorée. Dans la capitale, la vie a repris son cours. Cette stabilisation doit nous permettre de réduire à 800 les effectifs de Sangaris, d'ici la fin de l'année.
Tous les efforts doivent converger - malgré des conditions matérielles difficiles - pour que les élections se tiennent à l'été 2015 et que le forum de réconciliation de Bangui à la fin du mois soit un succès.
L'ONU qui a renforcé la Misca, l'Union européenne, dont la mission Eufor a été prolongée, le FMI, la Banque mondiale, toute la communauté internationale est mobilisée pour sortir, enfin, le pays de la triste situation qu'il traverse depuis des années. (Applaudissements sur les bancs socialistes et du RDSE)
Accord sur le nucléaire iranien
M. Jean-Yves Leconte . - Le groupe 5+1 vient d'annoncer un accord de principe sur le nucléaire iranien, surmontant la défiance persistante entre les parties. Les exigences de la France en matière de lutte contre la prolifération donnent à ce plan d'action une grande crédibilité.
Comment la France aborde-t-elle la finalisation du plan d'action globale ? La déclaration finale prévoit la fin des sanctions économiques et financières de l'Union européenne et des États-Unis, sous réserve que l'Iran respecte ses engagements. Quelles conséquences pour nos relations bilatérales avec l'Iran, historiquement très fortes ? Comment éviter que nos banques ne soient pénalisées par les sanctions américaines durant la période transitoire ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international . - D'ici la date butoir du 30 juin, la France maintiendra son attitude constructive mais extrêmement exigeante, car il s'agit de prolifération nucléaire.
Il y a en effet un projet d'accord. Nous avons avancé sur le nombre de centrifugeuses, le stock d'uranium, le pourcentage d'enrichissement... Restent cependant des points de désaccord, notamment sur les sanctions économiques. Les récentes déclarations du « Guide suprême » montrent qu'il y a encore beaucoup de travail à faire. Si accord il y a, la levée des sanctions se fera en proportion du respect par l'Iran de ses engagements. En cas de non-respect, mettra-t-on en oeuvre le mécanisme de swap back ? Si l'accord est complet, les conséquences, notamment économiques, seront importantes pour la France.
Quoi qu'il en soit, nous conserverons notre position indépendante, fondée sur la défense de la non-prolifération et de la paix. (Applaudissements)
Sociétés d'État
M. Philippe Dominati . - Ce gouvernement semble être depuis longtemps entré dans la spirale de l'échec, et semble s'y être accoutumé.
En quelques jours, nous avons appris qu'Areva avait perdu en un an la moitié de sa capitalisation boursière et était au bord de la banqueroute ; que la SNCM était promise à la liquidation ; que le président de la République avait dû intervenir en plein week-end pour corriger une campagne de publicité à la RATP ; que la grève se poursuit à Radio France qui reçoit plus de dotations que toutes les radios privées émettant sur le territoire ne font de bénéfices ; que les aiguilleurs du ciel - des agents d'État au statut protégé, cas unique ! - empêchent les avions de décoller (Mme Éliane Assassi proteste)
S'agit-il d'une tactique ? Des effets de votre méthodologie du dialogue social ? Ou avez-vous baissé les bras ? Nous sommes inquiets. Si vous avez besoin d'aide, dites-le ! (Applaudissements à droite. Exclamations ironiques à gauche)
M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget . - Quel tableau ! Avez-vous perdu la mémoire ? N'avez-vous jamais eu à gérer de tels dossiers ? La RATP, qui a sans doute manqué de discernement dans l'affaire que vous mentionnez, est une entreprise publique qui fonctionne bien, où le taux de conflictualité, puisque vous en parlez, est particulièrement bas. Une intersyndicale est prévue lundi prochain pour les aiguilleurs du ciel. Quant à Radio France, le contrat négocié en 2010 (exclamations à droite) était fondé sur une trajectoire non financée. La ministre de la culture a pris le sujet à bras-le-corps et s'occupe à résoudre ce conflit. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Gaz de schiste
M. Jean-Claude Lenoir . - (Applaudissements sur les bancs UMP) Le Parlement, à une large majorité, a voté la loi du 13 juillet 2011 interdisant l'exploitation des gaz de schiste. Elle prévoyait aussi la mise en place d'un comité de suivi composé d'experts, et un rapport annuel sur le suivi de ce dossier. Les quatre ministres en charge du dossier depuis 2012 s'y sont refusés.
Avec Christian Bataille, j'ai cosigné un rapport de l'Opecst sur le sujet. Voté à l'unanimité à l'exception des deux voix écologistes, il préconise que l'on poursuive la recherche, pour ne pas rester à la traîne.
Le gouvernement n'a rien voulu entendre. Et voilà que l'on apprend, dans la presse, que le gouvernement avait bien commandé un rapport qu'il a promptement caché, enfermé dans un coffre. Il refusait que ce problème fût posé. Turgot, sous lequel nous siégeons, disait : « La curiosité fait toujours agir jusqu'à ce qu'elle ait épuisé l'objet de ses recherches, mais aucune question ne peut être épuisée sauf à connaître la vérité ».
Pourquoi le gouvernement a-t-il donc caché ce rapport, ainsi que celui de l'Ademe sur le même sujet ? (Applaudissements sur les bancs UMP)
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche . - Le gouvernement a toujours été très clair sur le principe de l'interdiction de l'exploitation du gaz de schiste.
M. Francis Delattre. - On parle de recherche !
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. - La fracturation hydraulique n'est pas une méthode acceptable.
M. Francis Delattre. - Ce n'est pas la question.
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. - On libérerait une molécule dont le potentiel de réchauffement climatique est 3 000 fois supérieur à celui du CO2. Le risque de pollution du sous-sol est très important.
Le gaz de schiste ne relève pas de la logique de la transition énergétique. Le développer pourrait même déséquilibrer le mouvement en cours et déstabiliser les entreprises. (Exclamations sur les bancs UMP)
M. Francis Delattre. - Réponse de Polichinelle !
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. - En outre, une exploitation du gaz de schiste n'aurait pas d'effet avant des dizaines d'années...
Quant au rapport de l'Ademe sur les perspectives à l'horizon 2050 - horizon auquel vous envisagez sans doute votre retour au pouvoir - (Exclamations sur les bancs UMP), il doit être complété. Il sera publié, bien sûr, une fois achevé. Je le réaffirme : ce gouvernement refuse l'exploitation du gaz de schiste. (Exclamations sur les bancs UMP ; applaudissements sur les bancs socialistes)
Cyberterrorisme
M. Gilbert Roger . - Le groupe TV5 Monde vient d'être victime d'une attaque informatique du groupe CyberCalifat, qui avait déjà attaqué un centre de contrôle de l'armée américaine et Newsweek. Il s'est cette fois attaqué à un symbole, une chaîne francophone diffusée partout dans le monde. Le président de la République a annoncé 200 postes supplémentaires pour nos services de renseignement, afin de renforcer notre cyberdéfense. Le projet de loi sur le renseignement donnera à nos services plus de moyens d'actions, dans le respect de la liberté des Français.
Quelles mesures prendra le gouvernement pour identifier les auteurs de cette cyberattaque et éviter que de telles attaques ne se reproduisent ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur . - Avec Fleur Pellerin et Laurent Fabius, nous avons rencontré les équipes de la chaîne ce matin. Elles sont choquées. Cette chaîne véhicule dans le monde entier les valeurs de liberté que porte notre pays. Le parquet de Paris a saisi la DGPJ et la DGSI ; il y a de fortes présomptions que des groupes aux intentions terroristes sont à l'origine de l'attaque.
Pour combattre ce phénomène, nous avons créé 432 emplois au sein de la DGSI depuis 2012, et augmenté son budget de 10 millions d'euros par an. Le président de la République a décidé de lui allouer de nouveaux moyens humains : 500 postes à la DGSI, notamment des analystes et informaticiens, au sein de la DGPJ, et notamment de la plateforme Pharos.
Après la loi du 13 novembre 2014, qui a autorisé le blocage administratif des sites et les perquisitions à distance, le projet de loi sur le renseignement donnera à nos services les moyens dont ils ont besoin pour protéger les Français face à des risques qui portent atteinte à la liberté, sous le contrôle d'une haute autorité administrative et du Conseil d'État. (Applaudissements)
La séance est suspendue à 16 heures.
présidence de Mme Isabelle Debré, vice-présidente
La séance reprend à 16 h 15.