SÉANCE

du mardi 20 janvier 2015

51e séance de la session ordinaire 2014-2015

présidence de M. Jean-Claude Gaudin, vice-président

Secrétaire : M. Jackie Pierre.

La séance est ouverte à 10 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle dix-neuf questions orales.

Mobilité internationale des étudiants

M. Yves Pozzo di Borgo .  - Ma question s'adresse à la ministre déléguée à l'enseignement supérieur et à la recherche. À Paris comme à Bruxelles vient d'être célébré avec faste le nouveau programme européen de mobilité des jeunes « Erasmus Plus ». Il est davantage un bilan qu'un projet car il rassemble plusieurs programmes de mobilité existants - scolaires, étudiants, enseignants, formation professionnelle... Avec trois millions de jeunes Européens en mobilité depuis 1987, « Erasmus » est une réussite incontestable. Je regrette cependant qu'il ne touche pas davantage d'étudiants. La France, avec plus de 30 000 étudiants en mobilité entrante et 35 000 en mobilité sortante chaque année, fait figure depuis l'origine de très « bon élève » du programme. Mais 35 000 étudiants chaque année, cela ne fait pas beaucoup, rapporté à près de deux millions d'étudiants. L'aspect financier reste, sans doute, le frein le plus fort. Avec une moyenne d'aide de 272 euros par mois, les dépenses sont toujours bien supérieures aux bourses. Le problème n'est pourtant pas uniquement financier. D'autres facteurs de blocage interviennent : linguistiques, culturels et académiques, et la communication est insuffisante au sein des universités. À l'époque de la mondialisation des savoirs et des emplois, l'inégalité devant la mobilité étudiante s'aggrave en France : presque 100 % des étudiants des grandes écoles de commerce ou d'ingénieurs effectueront une mobilité, pour moins de 5 % des étudiants d'universités, ces 5 % recouvrant le plus souvent des jeunes issus de familles aisées.

Une fracture de mobilité est en train de se créer parmi les jeunes. Dans le passé, il y avait ceux qui avaient fait des études supérieures et les autres ; aujourd'hui, il y a ceux qui ont étudié à l'étranger et les autres. La mobilité des jeunes est, aujourd'hui, pourtant vitale pour leur avenir. Que compte faire le gouvernement ? Les bourses sont utiles mais ce n'est pas suffisant. Les trois quarts des étudiants sont intéressés par une mobilité.

Mme Annick Girardin, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée du développement et de la francophonie .  - La mobilité internationale est une chance pour les jeunes. Erasmus Plus n'est pas le seul programme de ce type. Le gouvernement a augmenté de 25 % l'aide au volontariat international en entreprise (VIE), renforcé le soutien aux jeunes des DOM qui s'engagent dans des mouvements associatifs ainsi qu'au programme franco-québécois, augmenté les crédits de l'Office franco-allemand pour la jeunesse ; et 458 millions d'euros ont été dévolus aux bourses sur critères sociaux depuis 2012.

Le volontariat international sera renforcé, qu'il s'agisse du service civique ou du volontariat de solidarité internationale ; je songe en particulier au programme Ville-vie-vacances-solidarité internationale, qui s'adresse aux jeunes issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville.

Le programme de mobilité européen a été abondé de plus de 40 % pour 2014-2020, par rapport à la précédente période de programmation. Le dispositif est démocratisé, il s'ouvre davantage aux filières technologiques et professionnelles, ainsi qu'aux pays extérieurs à l'Union européenne.

France université numérique dispense des cours en ligne et contribue à démocratiser les savoirs, y compris à l'étranger. Je vous signale que les étudiants étrangers qui étudient chez nous rapportent 1,6 milliard d'euros de recettes et contribuent au rayonnement de notre pays. Les accords sur les droits d'inscription sont un facteur incitatif pour les attirer.

Vous le voyez, la France se mobilise et favorise la mobilité internationale des jeunes, de tous les jeunes.

M. Yves Pozzo di Borgo.  - La mobilité internationale, « une chance » ? C'est une obligation ! Vous ne parvenez pas à répondre, je le comprends, à la brutalité des chiffres que j'ai cités. Une partie de la solution est d'ordre financier. Nous ne parvenons pas à aider les plus modestes à faire leurs études à l'étranger, car celles-ci sont onéreuses, mais nous assurons la gratuité aux jeunes étrangers qui veulent venir chez nous. Je propose d'augmenter les droits d'inscription des jeunes étrangers en France, pour alimenter un fonds spécifique au profit de nos jeunes voulant partir étudier à l'étranger.

Pour un tourisme durable

M. François Commeinhes .  - Le tourisme est confronté à de fortes difficultés : concentration dans l'espace et dans le temps, capacités de charge des territoires, transport, gouvernance, enjeux écologiques, etc. Nous avons débattu ici des compétences territoriales. Je crois qu'il faut maintenir les projets de développement touristique durable, pour mieux répartir les flux dans l'espace géographique, améliorer la qualité de l'offre, l'accompagnement numérique, etc.

La France est la première destination touristique mondiale, la troisième en recettes. Le secteur pèse 7 % de PIB, emploie plus d'un million de salariés dans 270 000 entreprises.

Le dernier rapport du Conseil économique, social et environnemental (Cese) attire notre attention sur la nécessité de développer un tourisme plus respectueux de l'environnement, s'adressant à une diversité de clientèles, se fondant à la fois sur des compétences locales et sur l'excellence nationale, ainsi que sur les bonnes pratiques déjà repérées.

La taxe de séjour n'est plus suffisante pour permettre aux collectivités territoriales de faire face aux enjeux. Quelles sont les pistes qu'envisage le gouvernement ? Car nous devons trouver d'autres sources de financement. Lors de la 8e Semaine économique de la Méditerranée qui s'est tenue en novembre dernier à Marseille, une piste a été proposée par l'Association méditerranéenne des agences nationales de maîtrise de l'énergie : des formations pour l'installation des énergies renouvelables, des projets communs, des partages d'expériences entre les pays, qui pourraient constituer une source de financement non négligeable.

Il est temps de promouvoir l'excellence de nos capacités en ingénierie et en développement durable appliqués au tourisme.

Mme Annick Girardin, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée du développement et de la francophonie .  - Veuillez excuser l'absence de M. Fekl, aujourd'hui en Savoie.

Le tourisme doit développer les moyens de résister aux difficultés qui proviendront du changement climatique, en réduisant son empreinte carbone et en s'adaptant aux nouvelles conditions. Le gouvernement s'est saisi de la question, en participant aux travaux de l'OMT et à la coopération renforcée avec les partenaires de la zone Euro-Méditerranée, dans le cadre de la « stratégie de l'environnement pour la Méditerranée » ; en lançant les pôles d'excellence dont un consacré à l'écotourisme, avec M. Huwart ; en soutenant les voyagistes responsables. La France accueillera la prochaine conférence mondiale sur le climat, qui devra aboutir à un accord universel et contraignant, limiter à moins de deux degrés le réchauffement. Cet objectif qui s'appliquera à tous les pays en 2020 et sera une opportunité pour le secteur du tourisme, et le transport aérien ; les carburants du futur, par exemple, seront un nouveau moteur de développement innovant. Nous comptons beaucoup sur ce rendez-vous.

Le processus de Davos pour le tourisme et le changement climatique, lancé en 2007, contribuera à renforcer ces orientations.

M. François Commeinhes.  - Merci pour ces bonnes intentions.

Problèmes de l'hôtellerie

M. Gilbert Bouchet .  - Le tourisme est un secteur clé : 135 milliards d'euros de chiffre d'affaires, 7 % du PIB. Ses activités sont diverses, comme le sont les entreprises du secteur, grands groupes, commerces familiaux. Or les normes les asphyxient. La nouvelle interdiction de panneaux de signalisation à 5 kilomètres inquiète beaucoup les petits hôteliers, car elle aggravera les inégalités entre grosses et petites entreprises. Seules les premières conserveront une visibilité.

Tous croulent sous les normes et l'empilement de taxes. Ils demandent une pause réglementaire.

Le numérique est une chance mais pénalise les acteurs traditionnels. La réservation en ligne représente la moitié du marché désormais et elle se traduit par des pratiques agressives - une meilleure régulation des commissions est indispensable - et par un nouveau rapport avec le client.

Les structures informelles, comme l'échange de logements entre particuliers, distordent la concurrence, font pression sur les tarifs en s'affranchissant de toute obligation légale et fiscale. Que compte faire le gouvernement ?

Mme Annick Girardin, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée du développement et de la francophonie .  - Le numérique est une opportunité formidable pour atteindre l'objectif de 100 millions de visiteurs étrangers par an en 2020.

Le Conseil de promotion du tourisme a ouvert une réflexion sur ce thème. Récupérer l'URL France.com, redonner un pouvoir de négociation aux hôteliers dans leurs relations avec l'Open Travel Alliance (OTA), saisir l'Autorité de la concurrence sur l'idée d'un contrat de mandat, améliorer la transparence entre acteurs du secteur et clients. Nous poursuivons une action en justice contre Booking et Expedia pour clauses excessives. L'Autorité de la concurrence a été saisie pour réfléchir à un contrat de mandat. M. Macron s'est aussi saisi du sujet. Les députés Fasquelle et Got ont été chargés d'une mission, ils rendront leurs conclusions dans les prochains mois.

La simplification est une priorité du gouvernement. Le dossier est porté par Thierry Mandon. La loi d'habilitation à légiférer par ordonnance ouvre la possibilité de prendre rapidement les mesures attendues par les professionnels pour adapter le secteur aux nouveaux enjeux. Il y a urgence, nous y travaillons.

M. Gilbert Bouchet.  - Merci.

Contribution de la France à la stratégie européenne d'intégration des Roms

Mme Marie-Christine Blandin .  - Ma question porte sur la nouvelle contribution de la France à la stratégie européenne d'intégration des Roms, prévue dans la communication de la Commission européenne du 5 avril 2011 et des conclusions du Conseil de l'Union européenne du 19 mai 2011.

Le gouvernement précédent avait élaboré une stratégie nationale, publiée le 9 février 2012, dont la Commission européenne avait souligné les lacunes en termes de calendrier, d'objectifs et d'indicateurs chiffrés, ainsi que sur le plan budgétaire. La mise en oeuvre de la stratégie, dans ses différents domaines, était ainsi incertaine. Une nouvelle contribution à la stratégie européenne a été mise en chantier, sous la coordination du délégué interministériel à l'hébergement et à l'accès au logement (Dihal), dans la ligne de la circulaire interministérielle du 26 août 2012.

Cette nouvelle stratégie a fait l'objet d'une concertation au printemps de 2013, et sa transmission à la Commission européenne était annoncée pour l'été 2013. Mais, à ce jour, la seule contribution française que la Commission européenne ait reçue reste celle de février 2012.

Quand le gouvernement compte-t-il valider et transmettre à la Commission européenne la nouvelle contribution de la France ?

Mme Annick Girardin, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée du développement et de la francophonie .  - La France estime que le terme de « Rom », renvoyant à une notion ethnique, est inopérant en droit national. En réponse au cadre commun adopté par la Commission, la France a pris une stratégie concernant les populations migrantes. La France a eu recours au Feder et au FSE, en cofinancement d'actions d'inclusion sociale au profit de toutes les communautés marginalisées.

La stratégie nationale à la Commission européenne en janvier 2012, puis la circulaire du Premier ministre du 26 août 2012 relative à l'anticipation et l'accompagnement des opérations d'évacuation des campements illicites, ont donné une impulsion nouvelle à l'action conduite en direction des populations migrantes vivant dans des campements illicites.

La Commission a mis en exergue en 2013 la politique menée en France par le groupe de suivi de la Délégation interministérielle à l'hébergement et à l'accès au logement.

Le gouvernement n'envisage pas pour l'heure d'élaborer une nouvelle stratégie nationale, mais de mettre en oeuvre les règles de droit commun en vigueur, de manière juste et efficace.

Mme Marie-Christine Blandin.  - La France s'était engagée auprès du Conseil. Qu'elle revienne en arrière dans un simple questionnaire est décevant.

Une vraie stratégie doit mettre en mouvement toutes les politiques publiques pour l'inclusion des Roms et de leurs enfants, dont seulement 42 % finissent leur scolarité obligatoire. Les drames se multiplient, en particulier des décès de jeunes enfants, qui devraient, et peuvent, être évités.

Ouverture des bibliothèques publiques et accès du plus grand nombre à la culture

Mme Sylvie Robert .  - Les services de bibliothèque doivent être accessibles à tous. Depuis le rapport Perrin de 2008, le sujet est de plus en plus d'actualité. Au Danemark, aux Pays-Bas, les bibliothèques sont ouvertes cent heures par semaine contre trente heures chez nous. Seules 10 % sont ouvertes le dimanche, alors que la population accueille très favorablement cette idée. Lui donner satisfaction est possible, l'exemple de la bibliothèque Champs Libres, à Rennes, le prouve.

La question est, plus largement, celle des rythmes et usages de la vie moderne. Il faut adapter les horaires des services publics à la vie des populations. Envisager l'ouverture des bibliothèques sur des temps atypiques pose bien sûr des problèmes d'organisation et de financement. Une réflexion large doit être menée, au moment même où le Parlement examine la loi Macron. Comment l'État peut-il accompagner les collectivités territoriales, y compris dans le cadre d'expérimentations ?

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l'État et de la simplification .  - Veuillez excuser l'absence de Mme Pellerin.

Vous avez raison, l'amplitude horaire d'ouverture des bibliothèques est faible en France. Les réponses à apporter doivent prendre en compte les rythmes de vie des populations. Les collectivités, compétentes en la matière, se sont saisies de la question. Champs Libres est une pionnière !

En décembre, le ministère de la culture a publié un rapport complet sur la question, afin de donner des clés et une méthodologie complète aux décideurs publics. L'organisation du temps de travail, les compensations aux agents en cas d'horaires décalés, les modalités de mise en oeuvre d'une réforme, faisaient partie des points abordés.

Un concours particulier aux bibliothèques parmi la DGD pourrait être attribué, et son montant modulé selon les engagements pris. L'accompagnement de l'État sera un appui précieux pour les collectivités territoriales.

Réseaux d'éducation prioritaire dans les Hauts-de-Seine

Mme Brigitte Gonthier-Maurin .  - Il y a un an, j'ai interpellé le gouvernement sur la perte de moyens des établissements des Hauts-de-Seine à la rentrée de 2014, liée à une dotation globale horaire insuffisante. Ces difficultés sont aujourd'hui confirmées, avec des effectifs constatés bien supérieurs à ceux prévus. À cette situation s'ajoute la réforme de la carte de l'éducation prioritaire qui vient d'être dévoilée.

Dans les Hauts-de-Seine, cette réforme suscite de vives inquiétudes et une forte incompréhension parmi le personnel, les parents d'élèves et les élus. Le collège Pasteur de Gennevilliers et son réseau d'éducation prioritaire, constitué de dix écoles, est un bon exemple : le collège sort de la carte de l'éducation prioritaire ; c'est le cas de l'école élémentaire Langevin A, quand sa jumelle, l'école élémentaire Langevin B, y demeure, alors qu'elles accueillent des élèves du même bassin de vie.

Quel sort sera réservé aux lycées d'éducation prioritaire et quels critères seront retenus dans cette réforme ? Dans le département, douze lycées, relevant principalement de l'enseignement professionnel, figuraient, jusqu'à présent, dans l'éducation prioritaire. Pour la réussite de tous les élèves, ne les affaiblissons pas.

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l'État et de la simplification .  - Mme Najat Vallaud-Belkacem est retenue au Conseil national de la vie lycéenne.

Les inégalités scolaires se sont accrues ces dernières années. La réforme de la carte de l'enseignement prioritaire entend y remédier. Les nouveaux critères sont précis : taux des catégories socio-professionnelles défavorisées, taux de boursiers, taux d'élèves en retard en sixième et taux d'élèves résidant en ZUS.

La concertation a été large, les décisions ont été explicitées. Les écoles faisant partie du réseau recevront les moyens de relever les défis qui se posent à elle, dans la justice sociale et la transparence.

Les écoles Langevin A et B de votre département seront intégrées au REP. Le collège Pasteur fait l'objet d'un dialogue soutenu pour mesurer l'impact de la sortie. Deux postes de conseiller principal d'éducation et une dotation horaire globale permettront de maintenir les moyens de soutien aux élèves.

Une convention de priorité académique sera conclue. Les moyens sont répartis justement, au profit des territoires qui en ont le plus besoin. La dotation globale des Hauts-de-Seine a augmenté de 431 heures en 2013.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Cette réforme suscite une vaste incompréhension. Elle va fragiliser des équipes éducatives fermement mobilisées contre l'échec, le décrochage, les inégalités.

Qu'en sera-t-il des autres moyens ? Dans les Hauts-de-Seine, les effectifs d'élèves sont systématiquement sous-estimés. Les budgets seront encore insuffisants à la rentrée 2015, d'après les estimations.

Réseaux d'éducation prioritaire en Nord-Pas-de-Calais

M. Dominique Watrin .  - Ma question porte aussi sur la réforme des ZEP. Les décisions définitives ont été prises sans concertation. J'ai demandé en vain un rendez-vous au recteur de l'académie de Lille.

Les parents et les enseignants ont parfois dû se mobiliser pour que leur établissement soit pris en compte, comme dans le REP de Rouvroy.

Le Nord-Pas-de-Calais est la région qui décroche le plus en matière éducative. Or les programmes de réussite éducative ont mobilisé des énergies considérables. Les résultats sont encore fragiles. Votre réforme brise l'élan.

Je refuse d'entrer dans une logique de mise en concurrence. Je ne demande donc pas un marchandage mais une vraie concertation sur l'avenir des neuf réseaux d'éducation prioritaire de ma région.

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l'État et de la simplification .  - Le système actuel de répartition des moyens présente de forts effets de seuil. Dans un souci de cohérence, la nouvelle carte repose sur la mise en réseau d'un collège et des écoles de son secteur.

Le critère « indice social » de la réforme a été défini en toute transparence ; il est calculé grâce aux quatre indicateurs que j'ai cités. Dans le Nord-Pas-de-Calais, la situation sociale des élèves a été prise en compte ; 42 réseaux d'éducation prioritaire existent dans votre région, dont six supplémentaires par rapport à 2014. Là où le profil social s'est amélioré, des sorties de réseau d'éducation prioritaire ont été décidées.

Dans ceux-là, comme pour le collège Paul Langevin de Rouvroy, des moyens égaux à ceux dont ils bénéficiaient leur seront alloués pendant trois ans afin d'encourager la poursuite des efforts engagés par les équipes éducatives. Cette réforme va de pair avec celle de la politique de la ville. Toutes deux promeuvent l'égalité des chances et la réussite de tous.

M. Dominique Watrin.  - Vous n'avez pas répondu à ma demande de concertation véritable. Comment le gouvernement peut-il faire sortir le réseau d'éducation prioritaire de Noyelles-sous-Lens, territoire qui se caractérise par 8 791 euros de revenu annuel par habitant et 66 % de logements sociaux ? Où celui de Leforest et Évin, où la misère s'accroît en valeur absolue ?

Projet de campus régional d'apprentissage Nice-Côte d'Azur

Mme Dominique Estrosi Sassone .  - Ma question porte sur les conséquences du projet de loi de finances 2015 pour le projet de campus régional d'apprentissage Nice-Côte d'Azur.

Le gouvernement a fait de l'apprentissage une priorité nationale. Or ce campus régional, qui prévoit d'accueillir 1 800 alternants en formation dans des filières d'avenir pour le territoire répond à cette priorité. Sont également prévus une résidence sociale pour jeunes alternants de cent places, ainsi que cinquante logements pour actifs, dont certains seront affectés en priorité aux jeunes entrant dans la vie active. Enfin, un pôle de services aux entreprises rapprochera les centres de formation et les entreprises.

Le Premier ministre a décidé, en décembre 2012, de contribuer au financement dans le cadre du programme d'investissements d'avenir. Le montant total de ce projet est de 84 millions d'euros, financé à hauteur de 14 millions par le programme d'investissements d'avenir, 24 millions par la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. Mais la loi de finances pour 2015 empêchera sa réalisation : elle ponctionne de 13,87 millions le fonds de roulement de la chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Nice-Côte d'Azur, maître d'ouvrage du projet, qui a constitué peu à peu ses provisions en vue de cet investissement. Le ministère a précisé que dans un tel cas, le prélèvement pouvait être remis en question. Or la CCI de Nice-Côte d'Azur avait déjà délibéré pour investir jusqu'à 27 millions d'euros sur ce projet, compensant partiellement la baisse de financement des collectivités locales.

Le gouvernement est-il favorable à la réalisation de ces projets d'avenir pour les jeunes, pour l'emploi, le logement et la relance de l'activité dans le secteur du bâtiment et des travaux publics ? Quelle est son intention sur le maintien total de la capacité d'investissement des CCI ?

Mme Carole Delga, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire .  - Comme vous le gouvernement considère que l'entreprise est au coeur du redressement de l'économie. Il a demandé des efforts importants mais proportionnés aux CCI, comme à toutes les administrations publiques. La baisse du plafond de la taxe pour frais de chambre, laquelle a augmenté de 41 % entre 2002 et 2012, alors que les dépenses de l'État baissaient, allègera de 313 millions les charges qui pèsent sur les entreprises. Ensuite, le prélèvement exceptionnel de 500 millions d'euros sur les fonds de roulement des CCI ne concerne que celles qui disposent de plus de 120 jours de fonds de roulement, contre 60 à 90 jours en moyenne. Nous avons réduit de 6,6 millions d'euros le montant du prélèvement, pour tenir compte du projet soutenu par la CCI Nice-Côte d'Azur. Son fonds de roulement restera supérieur à 20 millions d'euros et sa situation financière est saine. De plus, les CCI auront la faculté d'ajuster entre elles le montant du prélèvement. Pour mémoire le fonds de roulement des CCI de Paca est supérieur à 123 millions d'euros, soit 258 jours de fonctionnement... J'ajoute que le Conseil constitutionnel a estimé que cette mesure fondée sur des critères objectifs et rationnels, ne méconnaissait pas le principe d'égalité devant les charges publiques.

Mme Dominique Estrosi Sassone.  - Merci pour cette réponse précise.

La CCI Nice-Côte d'Azur a mis de côté un fonds de roulement important dans la perspective du projet de campus. J'espère qu'il ira jusqu'au bout. La mutualisation comme des modifications dans la répartition du prélèvement entre CCI me semblent délicates. On peut espérer des aides exceptionnelles, voire une modification du programme des investissements d'avenir, comme M. Rebsamen l'avait laissé entendre.

Conséquences des travaux de désamiantage

M. Philippe Madrelle .  - Ma question porte sur les conséquences des opérations de désamiantage.

L'amiante est responsable de 3 000 décès par an ; 200 000 tonnes de cette poudre blanche toxique sont réparties sur notre territoire. Le rapport du comité de suivi amiante est alarmant. Sur le site de Bassens du port autonome de Bordeaux, vient de s'ouvrir un chantier de démantèlement des navires : la Jeanne d'Arc et le Colbert. Plus de dix tonnes d'amiante devraient être transportées vers un site d'enfouissement. La méthode d'enfouissement a été privilégiée, au détriment de la vitrification, alors que le port de Bassens ne se trouve qu'à une centaine de kilomètres de la torche à plasma de Morcenx - la vitrification est la seule qui assure l'élimination définitive de ce poison très toxique. Que compte faire le gouvernement ?

Mme Carole Delga, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire .  - Deux filières d'élimination de l'amiante existent. La mise en décharge comme la vitrification font l'objet d'une régulation stricte, pour protéger les citoyens et éviter la dissémination dans l'air. Les installations font l'objet de contrôles des services de l'État.

M. Philippe Madrelle.  - Le chantier de Bassens devrait toutefois être exemplaire. Il y a là un problème récurrent...

Recherche d'hydrocarbures non conventionnels dans l'Essonne

M. Jean-Vincent Placé .  - Ma question concerne les demandes de permis de recherche d'hydrocarbures dans le département de l'Essonne, qui accroissent les risques d'exploitation et d'exploration des gaz et pétroles de schiste. Outre les rachats de concessions pétrolières classiques par la société Vermilion, le territoire essonnien a reçu de nombreuses demandes de permis de recherche d'hydrocarbures, conventionnels ou non conventionnels, comme les demandes de permis appelés Auvernaux, Point du Sautillon et Coudray qui ont été déposées. De nombreux indices conduisent à penser que ces différentes demandes visent à rechercher des gaz et pétroles de schiste. Les habitants et les associations sont inquiets. Je leur ai rappelé la position constante du gouvernement mais pouvez-vous les rassurer ?

Mme Carole Delga, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire .  - Veuillez excuser l'absence de Mme Ségolène Royal. Le gouvernement s'est engagé à ce qu'il n'y ait pas d'exploration ni d'exploitation de gaz de schiste, conformément à la loi du 13 juillet 2013. Toutefois, la recherche relative aux hydrocarbures conventionnels est légale depuis soixante ans. Les sociétés demandeuses des permis que vous évoquez se sont engagées à ne pas recourir à la fracturation hydraulique. Les services de l'État seront vigilants : les permis sont appréciés en fonction de la pertinence technique des méthodes utilisées, de leur impact environnemental et leur instruction suppose la consultation du public. C'est au vu de tous ces éléments que le gouvernement prendra ses décisions.

M. Jean-Vincent Placé.  - Cette réponse est de nature à rassurer les habitants et les associations. Cela va mieux en le disant, à plus forte raison à l'approche de la conférence de Paris sur le climat.

Ligne ferroviaire Montréjeau-Luchon

M. Claude Raynal .  - J'ai une pensée amicale pour M. Vidalies. Ma question concerne la suspension de la ligne ferroviaire reliant Montréjeau à Bagnères-de-Luchon. Cette ligne s'était dégradée à un point tel qu'un cycliste allait plus vite que le train ! Le temps de trajet avait doublé, passant de trente-cinq minutes à une heure, entraînant une baisse de la fréquentation, puis une suspension de la ligne. Mais cette ligne rénovée peut redevenir attractive pour les habitants et les touristes, parce que les routes sont dangereuses dans la vallée de Luchon et le Comminges avec des conditions hivernales rigoureuses.

Dans quels délais aurons-nous connaissance de l'étude diligentée par les élus ? Quelle sont les intentions du gouvernement ?

M. le président.  - Nous avons effectivement une pensée pour M. Vidalies, retenu aux obsèques de son père.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes .  - La ligne Montréjeau-Bagnères-de-Luchon a été fermée le 18 novembre dernier, à cause de l'obsolescence des infrastructures. La circulation des voyageurs en toute sécurité n'était plus possible. La fréquentation avait diminué un aller-retour TER par jour, un aller-retour TET deux nuits par semaine. Une alternative grâce au transport routier avec cinq aller et retour a été mise en place. Il revient à la région Midi-Pyrénées, autorité organisatrice, de répondre au problème. Si la réouverture de la ligne apparaît comme une bonne solution, il y en aura pour 50 millions de travaux. L'inscription de leur étude au contrat de plan État-région associerait à leur pilotage RFF, la SNCF, les conseils généraux et régionaux, les maires et associations intéressées.

M. Claude Raynal.  - Merci. Il faut songer à l'avenir de la vallée de Luchon.

Menaces de fermeture de postes fixes de l'Établissement français du sang

M. Marc Laménie .  - Sous couvert de réadaptation de l'offre de don, l'Établissement français du sang envisage de procéder à la fermeture de trois des quatre postes fixes de collecte dans les Ardennes, pour ne garder que celui de la ville chef-lieu, Charleville-Mézières. Le département des Ardennes - qui est, proportionnellement à sa population, un donneur de premier rang avec un taux de don de 8 % contre 4 % au niveau national -, risque d'être lourdement pénalisé.

Alors que l'Établissement français du sang appelle régulièrement aux dons, il est à craindre que ces restrictions n'entraînent, mécaniquement, une diminution de la collecte due à l'impossibilité matérielle, pour les donneurs, de se rendre sur le seul lieu de collecte restant. Quelles mesures le gouvernement entend prendre pour maintenir un réseau de collecte suffisant et proche des donneurs ?

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes .  - L'Établissement français du sang doit améliorer l'efficience de ses activités, conformément à son plan d'objectifs et de gestion qui sera signé en 2015.

L'Établissement français du sang a ouvert de nouveaux centres en milieu urbain pour se rapprocher des donneurs. Il doit aussi tenir compte de la baisse du potentiel de dons dans certains sites, qui dépend de la population et de sa générosité. Dans ce cas, il privilégie désormais la collecte mobile. C'est le principe qui a été appliqué dans les Ardennes.

M. Marc Laménie.  - Je comprends les contraintes de l'Établissement français du sang mais il ne faut pas oublier sa mission, qui est de contribuer à sauver des vies. Il importe que le niveau de la collecte reste constant.

Versement des retraites dans le Nord-Picardie

Mme Delphine Bataille .  - De très nombreux retraités des territoires du Nord et de la Picardie souffrent d'importants retards dans le versement de leurs pensions de retraite.

Pour résorber ces retards, la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail (Carsat) avait fermé les accueils de ses agences, du 1er au 17 octobre 2014, pour ne faire que de la mise en paiement.

De ce fait, les retards accumulés dans le traitement de certains dossiers se sont quelque peu résorbés mais ils se sont, dans le même temps, reportés sur l'instruction des dossiers les plus récents et des nouveaux dossiers. 5 600 dossiers restent en attente.

La Carsat n'est pas en mesure de traiter dans des délais raisonnables toutes les demandes liées à l'arrivée de la génération du « baby-boom » à l'âge de la retraite, et à un certain nombre d'évolutions législatives.

La possibilité d'un départ à la retraite dès 60 ans est un facteur d'engorgement important pour la Carsat « Nord-Picardie », dans des territoires marqués par leur passé industriel et dans lesquels de nombreuses personnes ont commencé à travailler jeunes.

Ces retraités, souvent modestes ou en situation déjà fragile, se retrouvent, après plusieurs mois d'attente, dans de graves difficultés financières qui perdurent, même après régularisation de leurs dossiers.

La ministre de la santé a assuré en décembre le versement d'une aide exceptionnelle de 800 euros et la mise en oeuvre d'un plan d'action qui a contribué à traiter 2 300 dossiers. Mais plus de 3 000 restent en attente. Entendez-vous mettre en oeuvre un plan sur le long terme ?

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes .  - Ces retards de versement des pensions ne sont pas acceptables. La ministre de la santé a demandé en décembre à la Cnav d'y mettre un terme. Elle est très vigilante et la situation s'améliore progressivement grâce à la mobilisation d'équipes d'autres caisses.

Le 3 janvier, 1 300 retraités ont touché une aide exceptionnelle d'attente de 800 euros.

Nous devons tirer les leçons de cette crise.

Les caisses doivent pouvoir mettre en place plus facilement des mécanismes d'entraide. C'est l'objet de la convention, signée récemment par la ministre, liant l'État à la Cnav. Il faut également simplifier notre système de retraite. La dernière loi va dans le bon sens. L'Union retraite a pour mission de développer le compte individuel en ligne et la déclaration de retraite préremplie.

Mme Delphine Bataille.  - Merci pour ces précisions. Les dossiers sont en hausse constante, en dépit des régularisations. La Carsat Nord-Picardie devra bénéficier de moyens humains supplémentaires. Certains retraités ont dû avoir recours à des bons alimentaires et restent en situation précaire, confrontés au cortège funeste des factures qui s'accumulent ou des agios de découvert.

Il est aussi anormal que les cadres chargés du contrôle soient plus nombreux que les agents chargés de traiter les dossiers.

Accueil des mineurs isolés étrangers

Mme Corinne Imbert .  - Ma question concerne les conditions d'accueil des mineurs étrangers isolés.

Les services de la protection de l'enfance des départements connaissent de grandes difficultés dans la gestion de ce public, tant en termes d'accueil que de détermination de l'âge de ces jeunes. L'accueil de ces jeunes aujourd'hui relève davantage de la politique migratoire.

Ainsi, il reviendrait plus naturellement à l'État d'assumer cette politique, notamment à travers les centres d'accueil des demandeurs d'asile, tout en tenant compte, bien sûr, de l'âge de ces jeunes. Il est regrettable que la proposition de loi, portée au Sénat en mai 2014 par M. Jean Arthuis, n'ait pas été adoptée ; elle prévoyait d'organiser au niveau régional ou interrégional l'accueil et l'évaluation de tous les mineurs isolés étrangers.

Lorsque le nombre de ces jeunes était relativement modeste, il était encore envisageable de construire, pour eux, des parcours, en coordination avec l'éducation nationale. Mais ce phénomène, identifié depuis les années 1980, s'est amplifié et s'est organisé en véritables filières depuis le début des années 2000. À ce jour, il n'est plus possible d'accompagner ces jeunes de la même façon : l'éducation nationale ne peut plus leur offrir une scolarité de qualité.

La circulaire du 31 mai 2013, relative aux modalités de prise en charge des mineurs isolés étrangers avait instauré une contribution financière forfaitaire de l'État. Mais cela ne suffit pas. Pour le seul département de la Charente-Maritime, 15 mineurs étrangers isolés étaient accueillis en 2001 ; ils ont été près de 90 en 2014, soit six fois plus, engendrant un coût avoisinant les 4 millions d'euros. Que compte faire le gouvernement en la matière ?

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes .  - Les 7 500 mineurs isolés étrangers accueillis en France ont bénéficié du dispositif de mise à l'abri en dix-neuf mois. Le gouvernement a pérennisé son financement pour l'évaluation par les départements, de 9,5 millions d'euros. Les recommandations du protocole du 31 mai 2013 après le comité national de suivi du 18 septembre dernier ont été travaillées par les ministères et l'ADF.

Des actions de formation des évaluateurs ont été lancées. La lutte contre la fraude documentaire a été renforcée. L'éducation nationale va désigner un chargé de mission qui travaillera avec celui de la Protection judiciaire de la jeunesse.

La loi du 5 mars 2013 modifiant l'article L. 112-3 du CASF prévoit que la protection de l'enfance ne crée pas de distinction entre les enfants français et étrangers en difficulté, conformément à nos valeurs et à la convention des droits de l'enfant.

Il appartient aux services d'aide sociale à l'enfance de construire avec le mineur un projet de vie en France ou de retour aménagé au pays.

La scolarité des jeunes ou leur formation professionnelle s'effectue dans le cadre du droit commun. Beaucoup de départements font état d'expériences réussies. En Charente-Maritime, avec une clé de répartition de 0,88 %, l'effectif cible était de 35 mineurs accueillis en 2015, ramené à 30, vu que 59 mineurs ont été accueillis entre juin 2013 et fin 2014.

Le Sénat a rejeté la loi Arthuis en 2004 pour refuser l'exclusion et la stigmatisation des mineurs isolés étrangers, en garantissant un socle commun de droits et de devoirs pour tous les mineurs en difficulté. Le gouvernement, conscient des difficultés que rencontrent les départements, travaille à l'amélioration du dispositif.

Mme Corinne Imbert.  - Je n'ai pas les mêmes chiffres que vous pour la Charente-Maritime. Il ne s'agit pas de stigmatisation mais de se donner les moyens de construire des parcours pertinents pour les jeunes.

Délais d'instruction des dossiers

M. Gilbert Roger .  - Le principe du « silence vaut accord » est entré en application le 12 novembre 2014, première mesure de simplification administrative et fiscale. Toutefois, je m'inquiète d'un possible allongement du délai d'instruction auquel s'engage l'administration, notamment locale, par exemple dans le cas d'une instruction de permis de construire, par l'envoi d'une lettre de relance avec demande d'une pièce supplémentaire ou d'informations complémentaires à fournir par le pétitionnaire, qui permettrait de faire courir de facto de nouveau le délai de cinq mois à partir de l'envoi dudit courrier administratif. Comment éviter ce type de dérive ?

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes .  - Avec le principe du silence vaut accord, les règles de traitement par l'autorité administrative, et notamment le délai, ne changent pas. Le délai commence à la réception d'un dossier complet. Selon l'article R. 433-22 du CGCT qui règle l'instruction des permis de construire, le dossier est réputé complet si dans un délai d'un mois, l'autorité n'a pas réclamé de pièces supplémentaires. La demande de production d'une pièce manquante ne modifie pas les délais. La règle selon laquelle le silence vaut acceptation n'entrera en vigueur que le 12 novembre 2015 dans les communes ayant la compétence de délivrer les permis de construire.

M. Gilbert Roger.  - Espérons que ces mesures de simplification accélèreront l'instruction des dossiers.

Desserte ferroviaire du Valenciennois

Mme Valérie Létard .  - La construction d'un réseau ferroviaire cadencé de TGV a asséché les liaisons directes intrarégionales. Les voyageurs du Valenciennois doivent aller à Lille effectuer un changement pour bénéficier d'une offre d'horaires plus large. Un seul train à 6 h 15 permet d'attraper un TGV pour être à Paris à 9 heures. Cette politique atteint ses limites : la concentration sur Lille de la desserte TGV embolise la métropole.

Il importe de conserver les lignes existantes et de réfléchir à une amélioration du réseau ferroviaire du Valenciennois, au moment où un pôle métropolitain se constitue pour accueillir un centre de congrès et l'Agence ferroviaire européenne.

La qualité de la desserte ferroviaire d'un territoire contribue à son attractivité. Les congrès apportent à eux seuls jusqu'à 10 millions d'euros de retombées économiques. L'État devrait appuyer le maintien du cadencement des TGV, l'amélioration de celui des TER et le développement des correspondances entre TER et TGV Lille-Bruxelles.

Enfin, quid de la réouverture de la ligne entre Valencienne et Mons au fret ? Le financement de ce projet sera-t-il inscrit dans le contrat de plan ?

Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité .  - Pour se rendre à Paris, les habitants de Valenciennes ont le choix entre sept solutions, dont trois trajets directs en TGV et quatre par le TER jusqu'à Lille pour une correspondance TGV, dont deux plus rapides que le TGV direct.

Sur le TGV direct Valenciennes-Paris, trois liaisons permettent d'arriver dans la capitale entre 7 h 30 et 9 heures. Des travaux de régénération sont programmés entre janvier et juillet, qui entraîneront des retards de quelques minutes, mais aucun train ne sera supprimé.

Les TER entre Valenciennes et Lille relèvent de la région. Selon la SNCF, seul le TER de 7 heures du matin semble présenter un taux d'occupation particulièrement élevé.

La réforme ferroviaire votée cet été renforce les compétences des régions pour un meilleur service aux usagers.

Nous devons concentrer nos investissements sur le réseau structurant. La ligne de fret entre Valenciennes-Mons ne fait pas partie des quatre parcours retenus en commun par la Belgique et la France pour le corridor européen de fret ferroviaire Sa réouverture, qui coûterait 10 millions d'euros, doit être appréhendée à cette aune.

Mme Valérie Létard.  - Je remercie le secrétaire d'État en charge des transports de sa réponse. Nous savons les efforts réalisés à ce stade. Des travaux importants vont être lancés : c'est le moment de réfléchir à la desserte d'un pôle stratégique ferroviaire régional, où se trouvent de nombreuses entreprises, l'Agence ferroviaire européenne, etc. pour en faire un territoire d'excellence.

Nous étions prêts à financer le report modal sur la ligne Mons-Valenciennes. Il faut maintenir la ligne.

Pour le reste il n'y a pas assez de liaisons directes. Comme le trajet entre Douai et Valenciennes, pourtant proches, dure quarante minutes, les gens ne prennent pas le TGV...

Excès des exigences environnementales applicables aux communes rurales

M. Daniel Chasseing .  - Les exigences environnementales applicables aux plans locaux d'urbanisme (PLU) semblent, trop souvent, excessives aux élus locaux et portent préjudice à l'intérêt des communes et, plus généralement, à l'avenir de la ruralité.

De nombreuses communes rurales ont de plus en plus de difficultés à finaliser leur PLU. Les propriétaires qui souhaitent vendre leur terrain ou agrandir leur maison ne le peuvent donc pas. Habitants installés, nouveaux résidents, tout le monde est pénalisé ! Les communes devraient au moins conserver les critères de constructibilité.

Les services de l'État doivent faire preuve d'une approche constructive et souple, faute de quoi, rien ne pouvant être construit, le déclin du monde rural s'accélèrera. L'espace rural français n'est pas un musée de la nature mais un espace où naissent, vivent, travaillent et meurent de nombreux Français détenteurs des mêmes droits que les autres.

Que répondez-vous aux élus de la ruralité et de l'hyper-ruralité ?

Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité .  - Le gouvernement prête une grande attention au développement des territoires ruraux. Les exigences environnementales ne doivent pas donner le sentiment de leur porter préjudice ; c'est un levier de développement et de réalisation des objectifs sociaux du gouvernement. Les POS sont des documents anciens, issus de la loi de 1967 ; les PLU visent à limiter l'étalement urbain et la consommation de l'espace agricole. 6 500 POS existaient encore en 2014, alors que la loi sur le renouvellement urbain de 2000 en a programmé la disparition.

La transformation d'un POS en PLU prend en compte les spécificités des bourgs et leurs enjeux contemporains. De nombreuses communes ont intérêt à élaborer un PLU intercommunal afin de concilier protection de l'environnement, amélioration de la qualité de vie des habitants et développement équilibré. C'est le sens de la refonte des documents d'urbanisme que j'ai engagée.

M. Daniel Chasseing.  - Au nom des maires ruraux, je plaide pour plus de pragmatisme en matière de permis de construire. J'ai visité les 286 communes de mon département : les maires sont découragés par les règles incompréhensibles du droit de l'urbanisme. Nombre d'entre eux veulent conserver un PLU communal. Ils réclament un assouplissement.

Logements sociaux

M. Daniel Laurent .  - Ma question porte sur les difficultés des communes, notamment dans les zones littorales, pour atteindre les objectifs de construction de logements sociaux locatifs, tels que prévus dans le cadre de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains et dite SRU.

Un bilan annuel et un bilan triennal de l'application de la loi SRU sont prévus. La loi du 18 janvier 2013 a renforcé le dispositif. Les communes s'interrogent sur leur capacité à engager des projets dans un contexte contraint, surtout sur le littoral.

L'article 55 de la loi SRU les menace, de plus, de pénalités. À titre d'exemple, dans une commune de Charente-Maritime de moins de 5 000 habitants, le poste de recettes liées à ces réglementations représente plus d'un an d'investissement. De même, une commune littorale de 5 000 habitants, qui compte deux tiers de résidences secondaires, devrait construire 884 logements sociaux, pour un coût de 60 millions d'euros, pour respecter ses obligations... C'est impossible !

Les communes ne voient pas comment elles pourraient davantage construire vu les contraintes liées à leur situation en zone littorale, et parce qu'elles n'en ont pas les moyens. Le gouvernement entend-il alléger leurs obligations ? Quelle réponse apporte-t-il aux maires désemparés ?

Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité .  - Nos concitoyens les plus modestes peinent à accéder à un logement. La loi du 18 janvier 2013 renforce les obligations de production de logements sociaux et les pénalités associées. Des exceptions à la règle des 25 % de logements sociaux existent ; les communes peuvent conventionner des logements existants, ou construire des logements neufs.

Le gouvernement restera ferme sur l'application de ces dispositions. Le bilan triennal est en cours. Sur les 1 022 communes déficitaires, 600 n'ont pas respecté leur objectif triennal. Les préfets apprécient les difficultés réelles des communes ; 200 sont considérées comme carencées, une estimation encore à affiner. La majoration du prélèvement est versée à un fonds national de financement des logements très sociaux. J'ai annoncé au Congrès des maires que 15 000 logements de ce type pourront être construits d'ici 2018.

Indiquez-moi le nom des communes de votre département que vous avez mentionnées, nous trouverons des solutions.

M. Daniel Laurent.  - Merci, votre réponse ne me satisfait toutefois qu'à moitié. Les communes littorales n'ont pas toutes les moyens de respecter leurs obligations. Je vous communiquerai le nom des deux communes.

Constructibilité de parcelles en zone AOP

M. Aymeri de Montesquiou .  - Les maires de 13 communes viticoles du Gers, dans la zone d'appellation protégée Saint-Mont sont abasourdis par le revirement opéré par l'Inao dans la cartographie des parcelles protégées. Certaines sont désormais déclarées inconstructibles par l'administration alors que leurs cartes communales ont été validées il y a plusieurs années. Les tribunaux administratifs seront massivement saisis si l'administration refuse la délivrance de permis de construire.

L'article R. 111-14 du code de l'urbanisme ne s'applique qu'à des parties non urbanisées des communes. La situation est tendue. Faites en sorte que le mécontentement ne se transforme pas en exaspération !

Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité .  - Votre question évoque la superposition de la carte des AOP et celle des parcelles constructives. La protection du patrimoine viticole français est au coeur des priorités du gouvernement. Protéger la typicité de nos produits et nos modes de production est indispensable.

La protection des territoires ne doit toutefois pas faire obstacle à leur développement. La constructibilité de certaines parcelles est en effet remise en cause. L'article R. 111-14 du code de l'urbanisme est clair. Des permis de construire peuvent être refusés hors zones urbanisées sur des parcelles susceptibles d'entraver le développement viticole. En pratique les demandes de construction sur les parcelles classées AOP sont examinées au cas par cas par l'Inao, la DDT et les communes. J'ai saisi le préfet du Gers et la DDT de revoir avec l'Inao ce nouveau zonage, dans le souci d'une solution plus consensuelle. Je reste à votre écoute.

M. Aymeri de Montesquiou.  - Les choses seraient plus simples si vous reconnaissiez l'erreur, l'incohérence absolue de l'administration ! Les viticulteurs eux-mêmes reconnaissent que ces parcelles sont impropres à la culture de la vigne. Vous n'imaginez pas les tensions créées par cette situation. Il faut les désamorcer.

La séance est suspendue à 13 heures.

présidence de Mme Jacqueline Gourault, vice-présidente

La séance reprend à 15 heures.