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Table des matières
Prévention de la récidive (Conclusions de la CMP)
M. Jean-Pierre Michel, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux
Discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire
M. Manuel Valls, Premier ministre
M. Manuel Valls, Premier ministre
Répartition de sièges dans les intercommunalités
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice
Mme Sylvia Pinel, ministre du logement et de l'égalité des territoires
Conflit au Proche-Orient (III)
Économie sociale et solidaire (Conclusions de la CMP)
M. Marc Daunis, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire
Mme Carole Delga, secrétaire d'État
Question prioritaire de constitutionnalité
Prêts structurés (Procédure accélérée - Deuxième lecture)
M. Jean Germain, rapporteur de la commission des finances
M. Christian Eckert, secrétaire d'État
ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 3
Hommage aux victimes de la catastrophe aérienne en Ukraine
Mise au point au sujet d'un vote
Agriculture, alimentation et forêt (Deuxième lecture)
M. Didier Guillaume, corapporteur de la commission des affaires économiques
M. Philippe Leroy, corapporteur de la commission des affaires économiques
Mme Carole Delga, secrétaire d'État
Ordre du jour du vendredi 18 juillet 2014
SÉANCE
du jeudi 17 juillet 2014
11e séance de la session extraordinaire 2013-2014
présidence de M. Charles Guené, vice-président
Secrétaires : Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, M. Alain Dufaut.
La séance est ouverte à 10 h 20.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Prévention de la récidive (Conclusions de la CMP)
M. le président. - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l'individualisation des peines et à la prévention de la récidive.
Discussion générale
M. Jean-Pierre Michel, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire . - La CMP a réussi, l'engagement a été tenu, nous nous en réjouissons. Il faut en remercier les présidents Urvoas et Sueur, ainsi que le rapporteur à l'Assemblée nationale Dominique Raimbourg.
Malgré les invectives - que je prends pour des compliments - d'un certain organe de presse, qui n'a cessé de désinformer, dans ses éditoriaux et dans les tribunes de hauts magistrats qui trouvent, à la retraite, le courage de parler, tels MM. Magendie et Bilger, je remercie le Sénat d'avoir suivi les recommandations de son rapporteur présenté comme idéologue, laxiste, autant de compliments pour moi, comme d'avoir fondé le Syndicat de la magistrature. (Exclamations sur les bancs socialistes)
Ce texte prolonge la loi pénitentiaire. Désormais, la prison sera l'exception : l'article 3 oblige le juge à motiver la peine de prison ferme non aménagée. La contrainte pénale sera une peine autonome pour certains délits, notamment routiers.
Enfin, nous avions supprimé la rétention de sûreté et les tribunaux correctionnels pour mineurs (TCM), naguère dénoncés ici avec force, par M. Badinter, mais aussi par MM. Mézard, Anziani.
Quelques points restaient sur la table de la CMP. S'agissant du champ de la contrainte pénale, on a dit que mes propositions avaient de la cohérence. Il y aurait eu, en matière délictuelle, trois peines : prison, contrainte pénale, peines patrimoniales. Mais cette contrainte pénale, devenue peine autonome et applicable immédiatement, aurait pris de court les services pénitentiaires d'insertion et de probation (Spip). L'argument est quelque peu fallacieux, puisqu'un amendement du Gouvernement, à l'article 20, prévoit cette application immédiate.
Quant à l'aménagement des peines, nous nous sommes battus pour maintenir le seuil adopté en 2009, je me félicite que la CMP nous ait suivis.
L'Assemblée nationale avait accru de façon importante les prérogatives de la police et de la gendarmerie. Le Sénat était revenu sur ces modifications. En CMP, à l'article 15, nous avons rétabli la géolocalisation en l'encadrant mieux. L'article 15 ter soumet désormais la procédure au juge. À l'article 15 quater, la rédaction finalement retenue nous paraît plus convenable.
Sur les tribunaux correctionnels pour mineurs, le Gouvernement et le Parlement étaient en désaccord profond - même si l'Assemblée nationale a été plus faible que le Sénat. Je me suis finalement rallié à l'idée qu'il ne fallait pas introduire de réforme dans la réforme. Lorsque le Premier ministre et la ministre de la justice m'avaient confié l'an dernier une mission sur la protection judiciaire de la jeunesse, j'avais découvert qu'un texte était prêt, mais sous embargo.
Or, à la veille de la CMP, le Gouvernement a pris l'engagement, dans un communiqué de déposer ce projet de suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs au premier semestre 2015. (Mme Catherine Tasca s'en félicite) Nous le lui rappellerons. Je compte sur votre vigilance !
Enfin, la commission des lois du Sénat avait aboli la rétention de sûreté, avant qu'elle soit rétablie en séance. J'ai cependant retenu les déclarations de la ministre : le texte ne concerne que les délinquants et pas les criminels, la rétention de sûreté - à laquelle le Gouvernement est hostile - devra être abrogée à un autre moment. Il est vrai que les députés se sont montrés plus dociles que les sénateurs...
M. Jacques Mézard. - C'est habituel !
M. Jean-Pierre Michel, rapporteur. - L'accord trouvé en CMP est un bon accord. Personne n'a « mangé son chapeau », comme on l'a lu. C'est une grande loi que nous allons adopter, une nouvelle méthode pour prévenir la récidive et assurer la sécurité des Français. Il faudra que le Gouvernement y mette les moyens nécessaires.
Je rends hommage à Mme Taubira qui n'a pas ménagé sa peine pour que cette réforme aboutisse. (Applaudissements sur les bancs socialistes et du RDSE)
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice . - Je suis heureuse de conclure avec vous le parcours législatif. Les débats ont été riches, à l'Assemblée nationale comme au Sénat - de tonalité différente, comme toujours, ce qui donne tout son sens à la navette parlementaire.
Je salue l'état d'esprit des parlementaires qui ont participé à la CMP, grâce aux deux rapporteurs qui travaillent ensemble depuis des mois. Malgré la procédure accélérée, nous travaillons à cette réforme depuis la conférence de consensus de septembre 2012 - sans compter les travaux accomplis ici même depuis le rapport Hyest-Cabanel de 2000 et la loi pénitentiaire. Chercheurs, professionnels, militants associatifs ont participé au débat, contribuant au succès de la conférence de consensus. Vos auditions nous ont permis d'entendre tous les points de vue.
Le texte, après la CMP, a conservé ses lignes de force : liberté d'appréciation des juges, création de la contrainte pénale, lutte contre les sorties sèches. Vous avez pris, sur proposition de M. Lecerf, des initiatives responsables sur la prise en compte de l'altération du discernement, et la prise en charge adaptée des personnes concernées.
L'Assemblée nationale, à l'initiative de M. Tourret, a amélioré les conditions d'aménagement des peines des femmes enceintes. À l'initiative d'un député UMP, l'incitation à la lecture sera renforcée.
Les bureaux d'exécution des peines et les bureaux d'aide aux victimes seront inscrits dans le code de l'organisation judiciaire.
La justice restaurative sera désormais inscrite dans la loi - elle est déjà expérimentée dans les TGI pour anticiper l'application de la directive « Victimes ».
Le Gouvernement, année après année, a augmenté le budget de l'aide aux victimes, qui sera désormais abondé par le produit de la sur-amende.
Les peines exécutées plus de trois ans après leur prononcé seront réexaminées pour éviter toute désocialisation.
Bref, vous avez consolidé l'armature de la réforme. En CMP, vous avez accepté de revenir sur des mesures auxquelles vous étiez attachés, je vous en sais gré - gratitude personnelle, institutionnelle, démocratique, civique, si j'ose dire, car nous sommes impatients de voir la loi s'appliquer. Dans le texte du Sénat, certains délits devenaient passibles de la contrainte pénale, sans peine de prison possible ; mais la hiérarchie des peines, devenue incohérente, doit être réformée pour correspondre à notre hiérarchie des valeurs. On ne peut accepter, dans une société attentive à la dignité des personnes, que les atteintes aux biens soient punies parfois plus sévèrement que les atteintes à la personne.
Mme Catherine Tasca et Mme Éliane Assassi. - Bravo !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. - J'ai confié ce travail à Bruno Cotte, qui doit rendre son rapport d'ici fin 2015. D'autres travaux sont en cours au Parlement. Vous avez accepté que le juge correctionnel décide de la durée maximum d'incarcération en cas de non-respect des obligations de la contrainte pénale. Il fallait éviter que l'engagement de nouvelles poursuites ne suspende la contrainte pénale.
Vous avez aussi accepté que les Services de probation soient reconnus dans leur mission régalienne et pilotent la mise en oeuvre de la contrainte pénale, ce qui ne réduit en rien le rôle des associations.
Vous avez tenu à revenir à la loi pénitentiaire, ce que l'on peut comprendre : l'Assemblée nationale, cette fois, a fait le pas en votre direction. Vous avez modifié le régime d'octroi de l'aménagement des peines. Un désaccord a persisté sur la géolocalisation et les écoutes. J'ai présenté hier soir des amendements, rejetés par l'Assemblée nationale, pour alerter les députés sur les risques de censure du Conseil constitutionnel.
M. Jean-Jacques Hyest. - Très bien !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. - Un député UMP m'a cherché querelle à ce sujet. Même si le texte n'est pas déféré au Conseil constitutionnel, une question prioritaire de constitutionnalité pourrait intervenir...
M. Jean-Jacques Hyest. - C'est qu'il n'y a pas eu de navette !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. - Enfin, le Gouvernement dans son ensemble et non pas la seule garde des sceaux s'est bien engagé à réformer l'ordonnance de 1945 sur les mineurs en 2015 : merci d'avoir supprimé l'article qui abolissait dès maintenant les tribunaux correctionnels pour mineurs.
Votre mobilisation permanente sert le travail de tous ceux qui font vivre le service public de la justice, je vous remercie en leur nom à tous, et au nom du Gouvernement. (Applaudissements à gauche)
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois . - Il nous a fallu beaucoup de ténacité, de volonté pour arriver jusqu'au vote en ce 17 juillet, de cette réforme pénale, que vous avez menée, madame la garde des sceaux, malgré les caricatures et les insultes,...
M. Bruno Sido. - Oh !
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - ... avec une force et un sens du dialogue qui méritent d'être soulignés. Il est rare qu'un tel texte soit précédé d'une concertation de dix-huit mois, d'un groupe de travail, puis d'une conférence de consensus au cours de laquelle tout le monde s'est exprimé, y compris les détenus et les victimes. Il y eut ensuite la conférence de l'Unesco sur le sens de la justice et les attentes des citoyens. C'est remarquable.
Je rends hommage à Jean-Pierre Michel. Je lisais récemment un extrait de cette vieille littérature aussi ancienne que le Sénat, qui répète sans relâche : « À quoi sert le Sénat ? ». Celui-ci fait la preuve de son utilité lorsque la navette assure, mot après mot, phrase après phrase, l'écriture de la loi, mais aussi lorsque l'on entend en son sein des paroles fortes. Jean-Pierre Michel a dit pourquoi cette réforme était nécessaire. Les caricatures nous honorent en ce sens... « Vivre, c'est lutter », disait Victor Hugo ! Nous sommes honorés que notre rapporteur ait défendu l'esprit de cette loi.
La CMP a réussi, grâce à un dialogue sans concession, parfois difficile. La contrainte pénale est une vraie peine, notre rapporteur avait proposé que ce soit la seule possible pour certains délits, ce ne sera pas le cas, mais la question reviendra après quelques années.
Nous étions extrêmement attachés à ce que l'on ne revînt pas sur la loi pénitentiaire, en ce qui concerne l'aménagement des peines, malgré les « arbitrages » rendus. C'est au Parlement d'écrire la loi. Le texte a pour objet d'en finir avec les sorties sèches, pour qu'après dix ans de prison, on ne se retrouve pas à la rue, sans liens sociaux, ni logement, ni travail. La prison est une institution nécessaire dans la République et je me réjouis, madame la garde des sceaux, que vous veniez prochainement dans le Loiret pour en inaugurer une, qui a trois missions : protéger la société, punir, et préparer la réinsertion. Nous serons vigilants sur les moyens qui y seront consacrés.
M. André Reichardt. - Et sceptiques !
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - Enfin, il a fallu convaincre pour obtenir ce fameux communiqué sur la justice des mineurs, le lundi à 17 heures, alors que la CMP se réunissait le mardi à 10 h 30.
Envers et contre tout, nous restons fidèles à l'ordonnance de 1945, même si elle a été modifiée 37 fois, car elle peut toujours être améliorée. Les mineurs sont des êtres en devenir. Le Gouvernement a pris l'engagement très fort de déposer un projet de loi à ce sujet au premier semestre 2015. Aussi avons-nous pu trouver un accord en CMP.
Le 17 juillet 2014 pourrait être une date importante dans l'histoire de notre justice. La philosophie de cette loi, c'est de rompre avec le tout carcéral. Parce que l'impunité est inacceptable, les peines doivent être diversifiées, parce que nous voulons lutter contre l'impunité, parce que nous voulons de la rigueur dans l'application des peines et la préparation de la réinsertion.
M. Jacques Mézard . - Nous aussi, nous voulons lutter contre l'impunité ! (« Très bien ! » à droite) Notre groupe a toujours fait preuve de cohérence...
Mme Esther Benbassa. - Ca dépend ! (Sourires)
M. Jacques Mézard. - ... face à un problème fondamental : nos prisons sont surpeuplées, dans des conditions intolérables. (M. Bruno Sido renchérit) En construire de nouvelles ne résoudra rien. Le tout carcéral fut longtemps présenté comme une panacée ; ce projet de loi retisse un fil d'Ariane dans le labyrinthe de notre droit pénal.
Monsieur le rapporteur, vous avez fait l'objet d'attaques injustes que vous prenez pour des compliments - je ferais peut-être exception pour la création du Syndicat de la magistrature.... À défaut d'avoir avalé votre chapeau, vous avez quand même avalé par mal de couleuvres... Certes, les peines plancher ont été supprimées, ainsi que la révocation automatique des sursis. Mais le texte a perdu de sa cohérence en CMP. Pour une liste limitative de délits, le Sénat avait fait de la contrainte pénale la seule peine applicable. Les députés nous traitent de ringards, nous n'avons pas de leçons à recevoir d'eux... Finalement, la contrainte pénale devient une peine de plus, plus dure que le sursis avec mise à l'épreuve.
Elle sera appliquée si le manque de moyens financiers et humains est comblé. L'inexécution des peines est un autre gros problème actuel.
Confier aux officiers de police judiciaire, sur le modèle anglo-saxon, le pouvoir de transiger pour la répression de certaines infractions constitue un mauvais mélange des genres. Il était essentiel que les prérogatives des Spip ne soient pas partagées avec des acteurs non régaliens, à la légitimité plus que floue.
Nous regrettons que ce texte n'inclue pas la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs, pourtant un engagement du président de la République...
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - Absolument !
M. Jacques Mézard. - Des engagements sont tenus, qui posent problème, et pas d'autres qui n'en posent pas ...Ce texte, qui devait exprimer le refus du populisme pénal, ne doit pas devenir un texte d'opportunité, mais être effectivement et fortement appliqué.
Nous avons entendu les déclarations de M. Montebourg sur les professions réglementées. Il serait important, madame la garde des sceaux, de rassurer les petits et moyens barreaux, où les avocats assurent la défense pénale.
Dans ces conditions, mon groupe votera les conclusions de la CMP. (Applaudissements sur les bancs socialistes, écologistes et du RDSE)
Mme Esther Benbassa . - Je serai moins critique que M. Mézard sur ce texte qui apporte une vraie alternative à l'incarcération. La contrainte pénale est une peine à part entière, destinée à réinsérer le condamné. Nous formons le voeu qu'elle soit véritablement appliquée et ne soit pas considérée par les magistrats comme une alternative au sursis avec mise à l'épreuve.
C'est un texte de gauche, qui montre que le Sénat est capable de consensus, d'ambition et de liberté. Le succès de la CMP a maintenu les avancées du Sénat. Le texte que nous examinons est équilibré. Je salue votre engagement, madame la garde des sceaux, au service de cette réforme ambitieuse. Nous regrettons que la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs n'ait pas été maintenue et nous serons vigilants sur la tenue de vos engagements. Nous nous félicitons du dépôt d'un projet de loi de réforme de l'ordonnance de 1945 au premier semestre 2015.
Il était temps de mettre fin à cette aberration que sont les peines plancher...
M. Bruno Sido. - Oh là là.
Mme Esther Benbassa. - Au groupe écologiste, nous ne sommes ni dans l'idéologie... (Rires à droite et sur les bancs du RDSE)
M. Jacques Mézard. - C'est de l'humour !
Mme Esther Benbassa. - ... ni dans l'angélisme. (L'oratrice, prise de quintes de toux, ne parvient plus à s'exprimer)
M. Jacques Mézard. - Les écologistes s'étouffent.
M. le président. - Madame Benbassa, je vais appeler M. Hyest à la tribune et vous finirez votre intervention ensuite.
Mme Esther Benbassa. - Merci.
M. Jean-Jacques Hyest. - Il vous faut, madame Benbassa, du miel du Gâtinais. (Sourires) Provenant de la région Centre isolée.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission. - Dès lors qu'elle ne s'appellera plus « Centre », elle sera très forte.
M. Jean-Jacques Hyest . - Nous avons suivi avec grand intérêt la CMP. Je redis : pour des questions comme la géolocalisation, il aurait été préférable de s'en tenir à ce que le Sénat avait décidé. Et il y a quand même un problème, même après la CMP, sur le suivi de la contrainte pénale, l'encadrement du dispositif n'est pas suffisant. À mon sens, il suffisait d'appliquer, en y mettant tous les moyens nécessaires, la loi pénitentiaire de 2009. Elle prévoyait déjà que la question de la réinsertion devait être posée dès le premier jour de l'incarcération. Les moyens ont manqué sous la précédente majorité, c'est vrai, mais les choses ne se sont pas améliorées depuis deux ans.
La prison continue à être la cour des miracles, on mélange grands délinquants et prévenus. Si l'on n'a pas les moyens, on ratera cette réforme aussi, elle n'y changera rien.
M. Jean-Pierre Michel, rapporteur. - Ne soyez pas si pessimiste !
M. Jean-Jacques Hyest. - Pourquoi l'appliquerait-on plus que les autres ?
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. - Vous verrez.
M. Jean-Jacques Hyest. - J'ai une certaine expérience de la justice.
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. - Vous êtes assez sage pour ne pas insulter l'avenir.
M. Jean-Jacques Hyest. - La contrainte pénale, dans le texte de la CMP, n'est plus qu'une alternative à la prison...
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. - Non.
M. Jean-Jacques Hyest. - ... une sorte de sursis avec mise à l'épreuve renforcée. Je salue la logique du rapporteur, qui en avait fait une peine autonome.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - Très bien !
M. Bruno Sido. - N'en faites pas trop !
M. Jean-Jacques Hyest. - Je n'ai pas dit que je l'approuvais.
M. Jean-Pierre Michel, rapporteur. - In cauda venenum.
M. Jean-Jacques Hyest. - Il y a une limite, madame la garde des sceaux, à la différence entre atteintes aux biens et aux personnes, quand une personne âgée se fait cambrioler même en son absence, c'est un grand traumatisme, un viol de l'intimité.
M. Bruno Sido. - Oui.
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. - Vous avez raison. Reste que l'agression physique est plus grave encore.
M. Jean-Jacques Hyest. - Un tel cambriolage doit être sanctionné plus sévèrement.
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. - C'est le cas.
M. Jean-Jacques Hyest. - La justice pourra-t-elle être rendue avec ces nouvelles mesures ? On va très vite et très fort. Quelles mesures prendra-t-on, à partir de 2017, pour les infractions pénales actuellement passibles de dix ans de prison ? Je suis inquiet.
Les tribunaux correctionnels pour enfants ? La ministre s'est engagée à réformer en profondeur l'ordonnance de 1945. Il n'en reste certes plus grand chose. M. Sueur a rappelé qu'elle avait été modifiée 37 fois...
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. - Il en reste au moins l'exposé des motifs, qui est magnifique.
M. Jean-Jacques Hyest. - Sur la transaction pénale, je partage les préoccupations de M. Mézard. Comment des parlementaires peuvent-ils à ce point oublier la séparation des pouvoirs ? Et les écoutes et la géolocalisation ! La frontière se brouille entre les écoutes administratives, encadrées, et les écoutes judiciaires, sur la responsabilité du juge et du parquet.
Nous n'approuvons pas la suppression des peines plancher. Les juges devront motiver les peines de prison. C'est un changement profond de philosophie pénale, que le Gouvernement nous propose, qui se heurtera sans doute, comme toujours, à un manque de moyens. C'est pourquoi l'UMP ne pourra voter ce projet de loi. (Applaudissements au centre et à droite)
Mme Esther Benbassa. - Je reviens ! (Marques d'encouragement sur divers bancs)
Les auteurs d'infractions doivent être sanctionnés, les victimes obtenir réparation, mais il faut avant tout vivre ensemble dans une société pacifiée et ce texte y contribue. Pour lutter contre les sorties sèches, priorité sera donnée à la réinsertion des détenus.
La CMP, en retenant certaines propositions du Sénat, n'a pas fait l'économie des mesures concernant les plus fragiles de nos concitoyens, notamment celle qui reprend les termes d'une proposition de loi écologiste que le Sénat avait adoptée à l'unanimité en février, pour mettre un terme à l'inégalité de traitement entre prévenus et détenus dont l'état de santé est incompatible avec la détention.
Nous avançons avec ce texte vers une société plus juste et plus inclusive. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Yves Détraigne . - Tel qu'il a été présenté, ce projet de loi s'inscrit dans la lignée de la loi pénitentiaire de 2009, qui doit beaucoup à Jean-René Lecerf et mettait déjà l'accent sur la prévention de la récidive. Les actuels conseillers d'insertion et de probation s'occupent chacun de 150 à 200 dossiers quand ils devraient en avoir quatre fois moins. Même avec le millier de postes supplémentaires, il faudra aussi réaménager notre parc pénitentiaire, où l'encellulement individuel, qui devrait être la règle, n'est toujours pas de mise. Il faut appliquer la loi pénitentiaire. Vous, parlez de la construction de 6 500 places ; c'est indispensable. Hélas, la réalité budgétaire rend impossible la poursuite de plusieurs lièvres à la fois.
On a évité certains excès que l'on pouvait craindre, comme de détricoter toutes les dispositions pénales prises avant 2012. Nous avons évité que la contrainte pénale devienne la peine principale pour certains délits, ce qui eût donné un message de laxisme regrettable. Oui, il faut néanmoins sortir du tout carcéral, mais, de toute évidence, les moyens vont manquer. J'espère me tromper !
On prévoit 1 000 postes de conseillers d'insertion et de probation mais qu'en sera-t-il sur le terrain ? Nous ne pourrons voter ce texte, tout en formant le voeu qu'un jour, notre justice dispose de moyens suffisants.
M. Jean-Pierre Michel, rapporteur. - J'espérais l'abstention. Il n'en a pas eu le courage.
Mme Éliane Assassi . - Nous regrettons la procédure accélérée. Toutefois, ce texte est issu d'une longue concertation, loin des réactions émotives auxquelles nous avait habitués l'ancienne majorité en matière pénale.
Nous approuvons l'ensemble des objectifs de ce texte, même si nous regrettons que la CMP ne soit pas allée plus loin. La contrainte pénale est une sanction, moins sévère que l'emprisonnement, mais plus efficace pour la plupart des délits. Une peine en milieu ouvert comporte une obligation de résultat. La contrainte pénale sera plus efficace qu'une peine passive de prison pour lutter contre la récidive.
La suppression des mécanismes automatiques limitant l'individualisation des peines répond à nos exigences ; nous avons déposé de nombreuses propositions de loi à ce sujet, avec Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
M. Jean-Pierre Michel, rapporteur. - Tout à fait.
Mme Éliane Assassi. - Mon groupe salue et soutient la plus grande majorité des mesures de ce texte, même si la rétention de sûreté est maintenue, ce que nous regrettons. Ce projet de loi était le véhicule adapté pour la supprimer.
Nous regrettons aussi que la justice de mineurs soit oubliée. Nous prenons acte, madame la garde des sceaux, de votre volonté de supprimer les tribunaux correctionnels pour mineurs. Nous sommes disponibles pour la concertation, afin de redonner à l'ordonnance de 1945 son ambition initiale : concilier protection de la jeunesse et répression de la délinquance des mineurs.
Malgré quelques reculs, nous approuvons donc ce texte progressiste. Nous réaffirmons notre position sur la loi pénitentiaire : la peine est un temps de préparation à la réinsertion, qu'elle ait lieu en milieu ouvert ou en milieu fermé.
En soutenant ce texte, je veux dire ma colère contre le ministre soi-disant chargé des relations avec le Parlement. Qu'il ravale son anticommunisme...
M. Bruno Sido. - ... primaire !
Mme Éliane Assassi. - Oui. Quand un texte porte des valeurs de gauche - c'est le cas ce matin - nous le votons. Sinon, nous ne le votons pas. Ce ne devrait être une surprise pour personne.
Quand il était député, il a voté avec la droite le traité Merkel-Sarkozy qui aggrave la crise. Devenu ministre, il pourrait ravaler son anticommunisme légendaire et déployer son énergie pour donner du contenu à une politique de gauche. Je ne suis toutefois pas sûre que cela ait encore du sens pour lui. Je regrette que le président du groupe socialiste s'inscrive dans les pas de M. Le Guen. (MM. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois, et Jean-Pierre Michel, rapporteur, applaudissent)
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - Nous applaudissons les trois premiers quarts du discours et entendons le dernier.
Mme Virginie Klès . - Je partage les regrets de l'oratrice précédente quant à l'usage de la procédure accélérée. Il faut néanmoins que des textes passent et ceux qui sont votés sans procédure accélérée contiennent aussi parfois des erreurs ou des dispositions inappropriées. En l'occurrence, la commission a beaucoup travaillé. Il me paraît important de souligner que l'évaluation de cette loi est déjà prévue. Ne valait-il donc pas mieux gagner quelques mois, afin que cette loi entre en vigueur rapidement ?
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. - Mais oui !
Mme Virginie Klès. - Je n'ai rencontré ici aucun « dangereux laxiste », sinon peut-être le rapporteur, Mme Assassi et moi-même ! (Sourires). Globalement, tout le monde est d'accord pour punir les délinquants et prévenir la récidive. Fallait-il, pour autant, construire des prisons comme on l'a fait, sans recruter le personnel nécessaire pour suivre les détenus avant, pendant, après la détention ?
Le législateur doit concevoir une peine efficace, adaptée à la personnalité de l'auteur, aux circonstances de l'acte. C'est cela qui compte plutôt que de savoir si elle est « dure », notion au reste toute subjective. Telle est la contrainte pénale. M. Hyest nous a parlé d'un cambriolage. C'est, il est vrai, une atteinte à l'intimité. Je prendrai un autre exemple. Je connais une personne qui a suivi, à titre de réparation pénale, une bande de mineurs de 13 à 16 ans qui entraient dans des villas pour tout piller et casser. Ils trouvaient cela drôle. Ils ont été pris en charge par la réparation pénale qui leur a fait prendre conscience de la gravité de leurs actes. On n'a plus eu de problèmes avec eux. C'est cela qui compte, l'efficacité. La contrainte pénale est un changement de regard : la prison ne doit plus être la seule référence.
Ce texte semble au groupe socialiste un texte équilibré, novateur. L'acte de délinquance est commis par une personne issue d'un contexte familial, social. Visons l'inclusion et non l'exclusion. La prison redevient le dernier recours qu'elle n'aurait jamais dû cesser d'être. La communauté est protégée, l'ordre public conforté.
Je regrette moi aussi que les tribunaux correctionnels pour mineurs ne soient pas supprimés dès maintenant, mais je continuerai, ici et ailleurs, à suivre ce sujet et l'engagement du Gouvernement. Le pas est franchi, il est prudent et il est sûr. Hommage soit rendu à Jean-Pierre Michel, à Mme la ministre. Le groupe votera ce texte des deux mains. (Applaudissements à gauche)
M. Jean-René Lecerf . - Je ne m'exprime pas au nom du groupe UMP, mais en mon nom personnel.
M. Roger Karoutchi. - C'est très bien.
M. Jean-Pierre Michel, rapporteur. - C'est beaucoup mieux !
M. Jean-René Lecerf. - Je remercie mon groupe de m'avoir laissé un temps de parole significatif, comme en première et seule lecture.
M. Bruno Sido. - C'est la démocratie.
M. Jean-René Lecerf. - Pour lutter contre la récidive et pour la réinsertion, nous recherchons tous la meilleure méthode, qui ne réside pas dans la multiplication des peines de prison. Il faut aussi retisser la confiance de nos concitoyens, tant dans nos magistrats que dans les politiques.
La CMP a rendu au bicamérisme ses lettres de noblesse en écartant les dispositions sur la rétention de sûreté, une loi non appliquée du fait de sa non-rétroactivité. Le Parlement aura à connaître au début de l'an prochain de l'ordonnance de 1945 dans sa globalité. La contrainte pénale redevient, au moins pour le moment, une simple alternative à la prison. Portalis écrivait justement « qu'il faut être sobre en nouveauté en législation, car s'il est possible de calculer les avantages que la théorie nous offre, il est plus difficile de calculer les inconvénients que la pratique seule peut nous faire connaître ».
Je suis satisfait que les dispositions de la loi pénitentiaire aient résisté à des récidives gouvernementales successives. C'est un vote unanime du Sénat datant de trois ans et demi qui est consacré. On ne peut écarter un vrai questionnement sur les peines alternatives. La réponse est directement liée aux moyens, pour renforcer l'indispensable accompagnement, essentiel à la prévention de la récidive.
N'est-il pas prématuré d'envisager, à cet égard, comme l'a déploré Yves Détraigne, la généralisation et l'extension de la contrainte pénale ? Pourquoi ne pas laisser les associations décharger les Spip d'une partie de leurs tâches ? Le précédent de l'application de la loi pénitentiaire n'incline guère à l'optimisme.
Il ne s'agit pas, avec la contrainte pénale, de « cadeaux » dont « bénéficieraient » les délinquants, mais d'autres modalités de purger sa peine que certains trouveront plus dures. C'est d'autant plus nécessaire que le taux de détention atteint 105 détenus pour 100 000 habitants et que les conditions de détention de bien des maisons d'arrêt sont détestables.
Sans illusions excessives, je crois que la contrainte pénale, comme le refus des sorties sèches, apportent une pierre supplémentaire à l'édifice de la loi pénitentiaire, dans un domaine qui requiert continuité et sérénité. Ce projet de loi développe même certaines virtualités de la loi pénitentiaire. Je lui apporte mon suffrage, comme j'aurais souhaité que le fissent en d'autres époques nos collègues de la majorité d'aujourd'hui. (Applaudissements sur la plupart des bancs)
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux . - Je tiens à apporter quelques réponses et remercier toutes les oratrices et tous les orateurs pour la qualité de leurs interventions, qui contribuent à l'intelligibilité de ce texte. Les magistrats pourront savoir ce que souhaite le législateur. Dans une démocratie, c'est lui qui a la responsabilité de dire les règles et il est bon que ceux qui les appliquent en discernent les raisons.
La loi ne perdra pas en qualité, malgré la procédure accélérée. Car la maturation de ce texte fut longue. Vous l'avez suivie de près. Je suis toujours étonnée d'entendre « Vous envoyez un message aux délinquants ». La responsabilité législative consiste à élaborer des règles et à s'interroger, pour leur durabilité, sur la culture, l'histoire de notre pays. Le dialogue, nous l'avons non pas avec les délinquants, mais avec l'ensemble de la société, et avec nous-mêmes aussi. Les délinquants ne s'interrogent pas sur l'intention du législateur. Si l'on devait entrer dans ce registre de la mauvaise foi, je pourrais dire que la centaine de réformes pénales dues à la décennie précédente ont envoyé aux délinquants un message d'incohérence et d'irrésolution. Si nous dialoguions avec eux, il serait peut-être plus simple de combattre la délinquance. La question n'est pas là.
J'ai fait un tour de France pour expliquer ce projet de loi à des publics parfois très hostiles, parce qu'endoctrinés. J'ai reçu des élus et suis allée au-devant d'eux. Je ne décrie pas notre droit pénal, fondement de notre vie commune, mais constate l'inefficacité de certains bouleversements récents. Nous nous inscrivons dans l'histoire républicaine française ; les dix ans de surenchère pénale, voilà la parenthèse dans le projet pénal républicain, auquel les sénateurs de droite, du centre et de gauche, comme les gardes des sceaux républicains qui se sont succédé ont participé. Une peine moderne et républicaine, c'est une peine qui a du sens, pour la société comme pour le délinquant et sa victime. Pendant dix ans, il y eut des injonctions contradictoires : enfermer de plus en plus longtemps, mais aménager de plus en plus vite, pour gérer les flux carcéraux. Nous supprimons les automatismes en amont comme en aval.
Votre souci des moyens est légitime, j'y ai répondu : 400 recrutements ont déjà eu lieu en 2014. Assez de pessimisme ! Nous allons y arriver et vous avez du mérite, tant le Sénat s'est investi à ce sujet depuis son origine même. Nous augmentons de 25 % les effectifs des Spip en trois ans ; nous recrutons des juges d'application des peines et des greffiers. Pour disposer de statistiques incontestables et relever le défi de l'évaluation d'ici trois ans, nous avons réformé l'Observatoire de la délinquance et de la réponse pénale car nous voulons des chiffres incontestables.
Des conventions ont été conclues avec les ministres de la santé, de l'Éducation nationale, de l'emploi pour combattre l'illettrisme des détenus, favoriser l'insertion par l'économie. Si nous échouons, il sera temps de nous le reprocher ! (Applaudissements à gauche)
La discussion générale est close.
Discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire
M. le président. - Je rappelle qu'en application de l'article 42, alinéa 12, du Règlement, le Sénat examinant après l'Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, il se prononce par un seul vote sur l'ensemble du texte en ne retenant que les amendements présentés ou acceptés par le Gouvernement.
Nous passons à la présentation des amendements du Gouvernement.
ARTICLE 7 TER A
M. le président. - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.
Compléter cet article par les mots :
ou en participant à des activités culturelles, et notamment de lecture,
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. - Le Gouvernement a détecté quelques risques constitutionnels, nous ne représentons toutefois pas les amendements rejetés hier à l'Assemblée nationale.
Celui-ci rétablit l'incitation à participer à des activités culturelles, et notamment de lecture, afin d'élargir le champ des personnes concernées. Il n'y a là aucune tautologie, car il ne s'agit pas seulement des illettrés, mais aussi des détenus qui ne sont pas habitués à accéder à la culture.
M. Jean-Pierre Michel, rapporteur. - Avis favorable à l'amendement n°1 qui rétablit le texte du Sénat, ainsi qu'aux trois autres amendements, de coordination.
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. - Le rapporteur me coupe le sifflet ! (Sourires)
M. André Reichardt. - À nous aussi ! Nous en avons l'habitude, il est vrai.
ARTICLE 20
M. le président. - Amendement n°2, présenté par le Gouvernement.
Rédiger ainsi cet article :
I. - Hormis les cas prévus par le II du présent article, les dispositions de la présente loi entrent en vigueur le 1er octobre 2014.
II. - Les articles 6, 7 bis, 7 ter, 16, 17, 17 ter, 18 et 18 quater de la présente loi entrent en vigueur le 1er janvier 2015.
III. - Les dispositions de l'article 721 du code de procédure pénale, dans sa rédaction résultant de l'article 7 bis de la présente loi, ne s'appliquent, s'agissant des condamnations en cours d'exécution à la date de leur entrée en vigueur, qu'aux fractions annuelles et mensuelles de la peine restant à exécuter.
IV. - Les dispositions des articles 720 et 730-3 du même code, dans leur rédaction résultant des articles 16 et 17 de la présente loi, sont mises en oeuvre, dans un délai d'un an, pour les condamnés ayant, au moment de leur entrée en vigueur, déjà accompli au moins le double de la durée de la peine restant à subir.
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. - Cet amendement diffère l'application de certaines dispositions pour des raisons pratiques.
ARTICLE 21
M. le président. - Amendement n°3, présenté par le Gouvernement.
I. - Alinéa 1
Après la deuxième occurrence du mot :
articles
insérer la référence :
12 bis,
II. - Alinéa 2
Remplacer les mots :
Les articles 12 et 12 bis
par les mots :
L'article 12
III. - Alinéa 3
Supprimer la référence :
, 12 bis
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. - Cet amendement précise l'application outre-mer de la réforme.
M. le président. - Amendement n°4, présenté par le Gouvernement.
Après l'alinéa 16
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
4° À la fin du premier alinéa du VII, les mots : « de l'article 30 est ainsi rédigé » sont remplacés par les mots : « et le cinquième alinéa de l'article 30 sont ainsi rédigés » ;
5° Au deuxième alinéa du VII, après le mot : « pas », sont insérés les mots : « d'un domicile de secours ou » ;
6° Le VII est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour faciliter leurs démarches de préparation à la sortie, les personnes détenues peuvent également procéder à l'élection de domicile nécessaire à leur accès aux prestations d'aide sociale et à l'exercice de leurs droits prévus par la réglementation applicable localement, soit auprès du centre communal ou intercommunal d'action sociale, soit auprès de l'organisme agréé à cet effet, le plus proche du lieu où elles recherchent une activité en vue de leur insertion ou réinsertion ou le plus proche du lieu d'implantation d'un établissement de santé ou médico-social susceptible de les accueillir ; ».
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. - Idem.
Intervention sur l'ensemble
M. le président. - Conformément à l'article 42, alinéa 12, du Règlement, je vais mettre aux voix l'ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire modifié par les amendements du Gouvernement.
M. André Reichardt . - Le texte adresse aux délinquants le signal d'un certain laxisme. Je souhaite, moi aussi, combattre la récidive, éviter les sorties sèches. Mais la contrainte pénale reste un concept flou, sauf à n'être qu'un super sursis avec mise à l'épreuve. Si la loi pénitentiaire n'a pas produit tous les résultats escomptés, c'est faute de moyens - et celle-ci en demandera davantage encore. Dans la situation budgétaire de notre pays, je doute que les engagements du Gouvernement soient tenus.
Avant de faire de la contrainte pénale une peine autonome, attendons les conclusions de la mission Cotte. Je me félicite de la suppression de l'article 8 ter, ce qui ne m'empêchera pas de voter contre l'ensemble.
Les conclusions de la CMP, modifiées, sont adoptées. En conséquence, le projet de loi est définitivement adopté.
Avis sur une nomination
M. le président. - M. le Premier ministre, par lettre en date du 16 juillet 2014, a demandé à M. le président du Sénat de lui faire connaître l'avis de la commission du Sénat compétente en matière de transports sur le projet de nomination de M. Philippe Duron pour exercer les fonctions de président du conseil d'administration de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France.
Cette demande d'avis a été transmise à la commission du développement durable.
Dépôt d'un rapport
M. le président. - M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre, en application de l'article 85 de la loi du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012, le rapport sur la mise en oeuvre de la garantie accordée à la société Banque PSA Finance.
Acte est donné du dépôt de ce rapport, qui a été transmis à la commission des finances.
La séance est suspendue à midi quarante.
présidence de M. Jean-Pierre Bel
La séance reprend à 15 h 5.
Questions d'actualité
M. le président. - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement. Je rappelle que le temps de parole est limité à deux minutes trente par orateur.
Conflit au Proche-Orient (I)
M. Didier Guillaume . - Le Proche-Orient est à nouveau embrasé. Conflit en Syrie, percée islamiste en Irak, nouvelle crise dans la bande de Gaza. La période est à la radicalisation. Une trêve de cinq heures a été annoncée, mais c'est un cessez-le-feu total qui s'impose ; les annonces faites ces dernières heures par les deux parties vont dans le bon sens.
La situation appelle des réponses diplomatiques, mais aussi des réponses internes, car certains tirent prétexte de la crise pour embrigader des jeunes qui doutent, dévoyer l'islam en islamisme et attiser la haine antisémite. Rien ne justifie que l'on s'en prenne à des synagogues. À l'autre bout de la chaîne de l'extrême, le racisme antimusulman sévit. Remettons à l'honneur la République et ses valeurs, le pacte républicain au coeur de nos orientations politiques. Toutes les religions doivent pouvoir être pratiquées dans la sérénité et le respect du vivre ensemble, toutes sont estimables, aucune ne justifie que l'on tue ou que l'on meurt.
M. René Garrec. - Ce n'est pas une question...
M. Didier Guillaume. - La communauté juive de France craint pour sa sécurité, la communauté musulmane craint les amalgames stigmatisants, qui sont insupportables. Il faut trouver les mots et les gestes pour rassembler le peuple de France. Monsieur le Premier ministre, nous connaissons votre attachement aux valeurs de la République ; comment comptez-vous remédier à cette situation et faire triompher ces valeurs ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Manuel Valls, Premier ministre . - Monsieur Bel, permettez-moi de vous saluer pour cette dernière séance de questions au Gouvernement sous votre présidence. (Applaudissements)
Depuis trois semaines, nous assistons à un enchaînement fatal de violences entre Israël et les territoires palestiniens. L'urgence est d'y mettre fin immédiatement, une trêve à Gaza est un impératif. À défaut, nous risquons une escalade incontrôlée. Des initiatives sont en cours ; à la demande des Nations unies, une brève trêve humanitaire a été acceptée de part et d'autre pour soulager les populations ; l'Égypte a proposé un cessez-le-feu durable auquel il faut donner toutes ses chances.
Nous avons pris bonne note de la position du Gouvernement israélien ; et il faut que le Hamas accepte la trêve sans condition, dans l'intérêt de toutes les populations. La position de la France n'a pas varié et ne variera pas : la paix, toujours la paix. François Hollande et Laurent Fabius ont multiplié les contacts ces derniers jours. Cette nouvelle escalade confirme ce que nous disons depuis des années, la nécessité d'un accord durable fondé sur la coexistence pacifique de deux États vivant en sécurité, la garantie pour Israël de vivre en sécurité dans des frontières sûres et reconnues, pour les Palestiniens la possibilité de vivre dans un État viable.
Les violences de dimanche aux abords de deux synagogues parisiennes sont des faits qu'il ne s'agit pas nier ou de dissimuler. Elles sont inacceptables. Nous les avons fermement condamnées. À chaque fois qu'un lieu de culte est attaqué, c'est la République qui est en danger. À chaque fois que quelqu'un est attaqué en raison de son origine ou de ses croyances, c'est le pacte républicain qui est en cause.
Nous devons comprendre le sentiment éprouvé par nos compatriotes juifs. Je condamne fermement le passage insupportable de la condamnation de la politique d'Israël à l'antisionisme, porte ouverte à l'antisémitisme. Aucun des slogans que nous avons entendus ces derniers jours ne peut être accepté. Nous devons aussi veiller à ce que nos compatriotes musulmans ne soient pas stigmatisés.
La réponse des autorités sera toujours extrêmement ferme. S'il le faut, nous interdirons les manifestations pour trouble à l'ordre public. J'ai donné des consignes claires aux préfets ce matin.
Le président de la République a été très clair le 14 juillet, la France ne tolérera jamais qu'on essaye d'importer sur son sol le conflit israélo-palestinien. La République est notre bien le plus cher, j'appelle chacune et chacun, au-delà de ses opinions et sensibilités, à se rassembler autour de nos valeurs, contre toutes les formes d'intégrisme et de violence. Quand une synagogue est attaquée, c'est la communauté nationale tout entière - et non une seule communauté - qui est menacée. (Applaudissements)
Migrants de Calais
Mme Marie-Christine Blandin . - Monsieur le ministre de l'intérieur, quelles sont vos intentions humanitaires, sécuritaires, médiatiques, nationales et européennes pour les étrangers qui transitent par Calais ? En décembre 2002, sous le ministère Sarkozy, mais à la demande convergente du député socialiste de Boulogne et du maire communiste de Calais, le camp de Sangatte a été démantelé. Les migrants se sont éparpillés dans ce qu'on a appelé la « jungle », où les accidents se sont multipliés comme les tentatives désespérées sous les boogies et les caténaires ou dans les camions frigorifiques. En 2009, la « jungle » a été rasée; puis la zone portuaire a été évacuée au prétexte d'une épidémie de gale dont les sédentaires nantis ne peuvent se débarrasser en une seule douche... Bien pauvre alibi...
Début 2012, 600 migrants ont été expulsés malgré les demandes de la Cour européenne des droits de l'homme. Les migrants ne résument pas la misère du monde car les plus miséreux sont restés dans les zones de famine et de conflits. Il y a dans leurs yeux la même lassitude inquiète que dans les yeux de nos grands-parents pendant l'évacuation ; il y a dans leurs corps la même énergie que dans les corps de ceux qui franchissaient les Alpes pour mettre leur famille à l'abri de la terreur mussolinienne ; dans leur tête, le même espoir que celui de Bertolt Brecht, de Max Ernst ou de Thomas Mann lorsqu'ils se sont tournés vers le monde libre.
Le Gouvernement a-t-il une autre stratégie que le harcèlement ? Que compte-t-il faire pour accueillir dignement ces migrants et tirer vers le haut l'opinion, de sorte que nous soyons tous fiers de notre République ? (Applaudissements à gauche)
M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement . - La présence continue de migrants à Calais n'est pas nouvelle. Les démantèlements de filières d'immigrants clandestins et les mesures d'éloignement se poursuivent. Un soutien humanitaire existe, avec douches et distribution de repas.
La situation s'est récemment aggravée, à la suite de l'arrivée de migrants venus de la Corne de l'Afrique. Avec l'accord des autorités locales, les campements ont été évacués en exécution des décisions de justice. Des solutions d'hébergement ont été proposées à tous ; les mineurs et les personnes fragiles ont été systématiquement hébergés.
La question est difficile, car beaucoup de migrants refusent les solutions proposées par les autorités françaises. Le pire serait de ne rien faire, au risque d'un appel d'air pour les filières d'immigration clandestine. Nous continuerons à lutter sans relâche contre les filières, à répondre à l'urgence sanitaire et humanitaire, à sécuriser Calais et son port pour éviter des drames, à respecter les décisions de justice tout en recherchant des solutions d'hébergement et d'asile pour les migrants. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
(Dans les tribunes, quatre jeunes femmes du mouvement des Femen manifestent selon leur mode d'action habituel, scandant : « Êtes-vous macs ou sénateurs ? ». Elles sont évacuées par les huissiers)
Conflit au Proche-Orient (II)
Mme Annie David . - Ma question s'adresse au ministre des affaires étrangères. Depuis dix jours, la population de Gaza est soumise à des bombardements de l'armée israélienne en représailles à des tirs de roquettes du Hamas et d'autres groupes armés. Cette nouvelle exacerbation du conflit a déjà fait plus de 230 morts côté palestinien, dont un quart sont des enfants, et 1 700 blessés.
Je me fais ici l'écho d'un appel de cinéastes israéliens au gouvernement de leur pays, pour qui les enfants de Gaza sont les partenaires de la paix de demain. Un cessez-le-feu est urgent, préalable à toute reprise des négociations de paix. Il faut sortir de cette impasse suicidaire.
En attendant, la courte trêve humanitaire de cinq heures et la proposition de M. Fabius d'une mission européenne aux points de passage ne sont pas à la hauteur des souffrances subies par la population de Gaza, territoire de seulement 362 km2 où vivent 1,8 million de personnes. Il faut rendre possible une solution à deux États selon les frontières de 1967, reconnus par la communauté internationale, ce qui implique de mettre fin à la colonisation des territoires occupés. Le Hamas et le gouvernement israélien sont malheureusement d'accord pour la repousser. Cette solution doit rester la position constante de la France.
Quelles actions concrètes sont menées aujourd'hui par notre diplomatie ? (Applaudissements sur les bancs CRC et quelques bancs socialistes)
M. Harlem Désir, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes . - L'urgence, c'est de mettre fin à l'escalade, que la trêve soit respectée et durable pour reprendre le chemin de la paix. La trêve qui vient d'être décidée est encourageante, mais fragile.
La position de la France est constante : appeler à lever les restrictions d'accès, poursuivre l'aide humanitaire dans les meilleures conditions tout en tenant compte des préoccupations sécuritaires légitimes d'Israël, rappeler à ce pays que les conditions de détention des palestiniens doivent être conformes au droit international. Elle appelle toutes les parties à faire converger sans délai tous les efforts pour une paix durable, conciliant la sécurité d'Israël avec les droits humanitaires et au développement économique des Palestiniens. Elle appelle à la fin de la colonisation qui mine les efforts de paix et à la mise en oeuvre d'une solution à deux États. C'est le discours qu'a tenu le président de la République devant la Knesset. C'est le sens de tous les efforts de la France et de l'Union européenne. (Applaudissements sur les bancs socialistes et CRC)
Ruralité
M. Jacques Mézard . - Les territoires ruraux sont de plus en plus déshabillés... (Rires et applaudissements à droite) Le 13 décembre 2012, le Sénat a adopté une résolution pour le développement par l'État d'une politique d'égalité des territoires visant à lutter contre la fracture territoriale. Les membres du groupe du RDSE, majoritairement issus de départements ruraux, fiers d'exercer encore des fonctions exécutives locales (sourires) et proches du terrain, sont très attachés à cette France de la ruralité. Une France dont la substance est aspirée par les métropoles, où le sentiment d'abandon est de plus en plus présent, où les services publics ont disparu. Elle ne craint pas le changement, elle y aspire même si ce changement s'appelle désenclavement, accès facilité à la santé, à l'éducation, à l'emploi. Après les États généraux de la démocratie territoriale, les Assises de la ruralité ? Ce dont nous avons besoin, c'est de résultats concrets, de décisions. Le Gouvernement a engagé une réforme territoriale ; quelles sont ses véritables intentions ? Entend-il en corriger les effets négatifs et soutenir l'amendement du groupe RDSE adopté par le Sénat à la quasi-unanimité, qui prévoit de garantir cinq représentants à chaque département ? Accepter un droit d'option pour les départements ? Garantir l'existence d'un échelon de proximité, qu'on l'appelle conseil général ou non ? (Applaudissements sur les bancs du RDSE, au centre et à droite)
M. Manuel Valls, Premier ministre . - Je vous redis ma conviction : la réforme territoriale ne se fera pas contre les territoires ruraux. Oui, l'échelon départemental est très important. Nous devons imaginer ensemble ce que sera le département de demain. La réforme territoriale, examinée à l'Assemblée nationale et qui doit revenir au Sénat en deuxième lecture, repose sur des régions plus fortes, de grandes agglomérations et les intercommunalités. Pour accepter votre amendement, monsieur Mézard, encore faut-il que le Sénat adopte un texte... (Exclamations au centre et à droite) Je l'ai dit aux préfets que j'ai réunis place Beauvau : le département est essentiel pour le renforcement de la présence de l'État...
M. Philippe Marini. - Et de la démocratie ?
M. Manuel Valls, Premier ministre. - Vous êtes déjà en campagne, monsieur Marini ! (Rires à gauche)
La réforme territoriale est une ambition nouvelle pour la ruralité ; les contrats de plan seront au service de cette ambition, pour mettre fin aussi à l'opposition stérile entre France des métropoles et France rurale... La ruralité, voire l'hyper-ruralité dans leur diversité, voilà ce que sera l'objet des Assises de la ruralité. Nous y élaborerons, ensemble, une nouvelle feuille de route, qui répondra aux attentes des élus et de nos concitoyens. L'État y prendra sa part, parce qu'il doit affirmer sa présence dans tous les territoires - ici l'échelon départemental est le plus pertinent.
Je souhaite que le Parlement soit très étroitement associé à ce moment important pour les territoires ruraux et, tout simplement, pour notre pays. Nous tiendrons compte de toutes les spécificités, y compris pour l'évolution des conseils généraux. Vous pouvez compter sur ma détermination, nos territoires ruraux sont l'identité de la France. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Répartition de sièges dans les intercommunalités
M. Patrice Gélard . - Le Conseil constitutionnel a validé la réforme territoriale de 2010, mais vient de supprimer une disposition de l'article L. 5211-6-1 du code général des collectivités territoriales. Certaines communes doivent procéder à un nouveau scrutin et modifier le fléchage de leurs conseillers communautaires. Comment accepter qu'anciens et nouveaux élus coexistent, alors que les règles ne sont plus les mêmes pour tous ? Des délais stricts s'imposent, en outre, pour les élections partielles.
Pour la première fois, le Conseil constitutionnel est revenu par une question prioritaire de constitutionnalité sur un texte initialement validé, ce qui a des conséquences juridiques imprévues. (Applaudissements à droite ; M. Jean-Pierre Sueur et Mme Bariza Khiari applaudissent également)
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale . - Le Gouvernement a adressé aux préfets des instructions sur la procédure à suivre selon les différents cas de figure.
Les nouveaux tableaux avaient créé des déséquilibres entre communes. Le Gouvernement n'est pas opposé à ce que le Parlement réfléchisse à cette question (« Ah ! » à droite) dans le cadre de la réforme territoriale, sachant qu'il faut éviter tout risque juridique. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Jean-Pierre Sueur. - Oui, il faut une loi.
Écoutes judiciaires
Mme Nathalie Goulet . - La plateforme nationale des interceptions judiciaires fait craindre un naufrage pour la qualité des enquêtes, les finances publiques et la sécurité des données personnelles. J'avais proposé une commission d'enquête, sans succès ; n'étant pas une femme de renoncement, je reviens sur le sujet pour redire mon incompréhension et mon inquiétude.
Le processus de mise en place de cette plateforme est bien mal engagé : appel d'offres restreint et contesté, explosion des coûts... Qui, du ministère de la justice ou de celui de l'intérieur, en prendra en charge le fonctionnement ?
Évitons de répéter les erreurs d'Ecomouv ou de Louvois. Où en est, madame la garde des sceaux, la mise en place de cette plateforme ? Quels sont les surcoûts exacts ? Comment sera assurée la sécurité et le stockage des données personnelles ? (Applaudissements sur quelques bancs écologistes et au centre)
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice . - La mise en activité de la plateforme était prévue à l'automne 2013 ; elle entrera en activité en janvier 2015. Nous avons dû revoir la procédure de passation de marché, des charges ayant été négligées. Le coût est passé de 42 millions prévus en 2010 à 48 millions en 2012. Le retard est également dû aux décrets nécessaires et à la Cnil qui a eu besoin d'un délai supplémentaire.
Le recours à ces interceptions monte en charge, ainsi que leur coût. Elles sont nécessaires pour les enquêtes, mais doivent être encadrées par un cadre juridique stable.
Le Gouvernement est soucieux des libertés ; la Cnil, le Conseil d'État ont été saisis. J'ai voulu un comité de contrôle composé de magistrats honoraires de la Cour de cassation, de parlementaires et de personnalités qualifiées. Il devra présenter un rapport annuel au garde des sceaux et à la Cnil et aura un accès permanent à tous les lieux de la plateforme. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Apprentissage
Mme Patricia Bordas . - Dans Les Misérables, Victor Hugo écrit « La jeunesse est le sourire de l'avenir [...] Il lui est naturel d'être heureuse. Il semble que sa respiration soit faite d'espérance ».
M. Jean-Pierre Sueur. - Très beau !
Mme Patricia Bordas. - L'espérance, c'est justement ce que le Gouvernement tente de rendre à la jeunesse par une politique volontariste. (Exclamations amusées à droite) Il n'y a plus une jeunesse, mais des jeunesses. Loin de tout fatalisme stérile, le président de la République en a fait sa priorité. (Marques d'ironie à droite)
Pour les 200 000 jeunes en décrochage, exposés à la précarité, l'apprentissage par l'alternance représente une voie d'excellence. Malheureusement, le nombre de contrats a chuté. Que fait le Gouvernement pour favoriser l'embauche d'apprentis ?
M. Christian Cambon. - Et que font les présidents socialistes des régions ?
MM. Pierre Charon et Philippe Dallier. - Parlons-en, de l'apprentissage !
Mme Patricia Bordas. - L'État consacre 265 millions en faveur de l'apprentissage. Vice-présidente de la région Limousin, j'ai été confrontée à la difficulté du financement.
M. Roger Karoutchi. - Ah bon ?
Mme Patricia Bordas. - Que compte faire le Gouvernement pour aider à l'implantation de l'apprentissage dans les TPE et PME ? Comptez-vous étendre la taxe d'apprentissage à l'ensemble du secteur public et l'affecter en majeure partie aux régions ?
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, de la ville, de la jeunesse et des sports . - M. Rebsamen, retenu par un conseil des ministres européens du travail à Milan, est très attaché à l'apprentissage.
M. Roger Karoutchi. - Il a fort à faire !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. - L'objectif est d'atteindre 500 000 contrats d'ici 2017.
M. Éric Doligé. - 2020 !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. - Le président de la République s'est saisi du dossier.
M. Christian Cambon. - Enfin !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. - Il réunira tous les acteurs concernés autour de lui à la rentrée. Chacun doit prendre ses responsabilités : les entreprises, mais aussi la fonction publique qui doit compter 10 000 contrats à terme au lieu de 700 aujourd'hui. (Murmures ironiques à droite) Dans mon ministère, je doublerai les contrats. Enfin, le nerf de la guerre : le financement. Une enveloppe de 100 millions d'euros sur deux ans provenant des fonds européens ira à l'apprentissage dans les régions où le chômage des jeunes est supérieur à 25 % ; 80 millions du programme des investissements d'avenir financeront les nouvelles formations en alternance ; enfin, 200 millions d'euros supplémentaires ont été votés en loi de finances rectificative pour l'apprentissage.
M. le président. - Merci.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. - Le Gouvernement est mobilisé. (Applaudissements sur les bancs socialistes ; protestations à droite)
Colonies de vacances
Mme Sophie Primas . - Après le drame survenu la semaine dernière dans une colonie de vacances de l'Ariège, mes pensées vont à la famille du jeune enfant tragiquement décédé. Une classe de ma commune a été rapatriée. Sans préjuger des responsabilités, la procédure d'agrément des lieux d'accueil doit être revue : comment des enfants ont-ils pu être accueillis dans une structure dépourvue, même provisoirement, d'eau potable ? Les parents attendent des réponses, comme les élus qui s'engagent moralement sans avoir des moyens de contrôles.
Les craintes des parents, majoritairement injustifiées, sont une des causes de la désaffection pour les colonies de vacances, qui n'accueillent plus que 7,5 % des jeunes Français contre 15 % il y a une dizaine d'années. Un agrément d'État n'irait pas dans le sens de la simplification, d'autant que la majorité des colonies sont irréprochables. Vous avez annoncé un label qualité assorti d'une charte : quels seront les éléments permettant de sélectionner les colonies de vacances ?(Applaudissements sur les bancs UMP)
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, de la ville, de la jeunesse et des sports . - Nous partageons tous la peine des proches du jeune Abdelrazak. L'enquête ouverte pour faire toute la lumière sur ce drame se poursuit. Je salue la mobilisation des services de l'État dans le département ; sous la conduite de la préfète, elle a été totale.
Il faut marteler que les colonies de vacances sont encadrées et rigoureusement contrôlées. Elles accueillent chaque année 1,8 million de mineurs. Une autorisation préalable est requise pour l'accueil des enfants de moins de 6 ans, et nos services vérifient que les établissements sont aux normes et qu'un projet éducatif existe. Près de 10 000 contrôles sont conduits chaque année ; ils conduisent parfois à des fermetures, mais de tels faits sont extrêmement rares, il faut le souligner. Nous voulons relancer les colonies de vacances, occasion de s'ouvrir aux autres et d'apprendre. Nous ferons signer à la rentrée la Charte « Colonies nouvelle génération ». (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Logement
Mme Delphine Bataille . - Lors de sa déclaration de politique générale, le Premier ministre a rappelé que le logement pour tous constitue une priorité de l'action gouvernementale.
M. Philippe Dallier. - C'est bien parti !
Mme Delphine Bataille. - Il faut construire davantage, à des prix adaptés au budget des Français.
M. Christian Cambon. - Parlez-en à Mme Duflot !
Mme Delphine Bataille. - Le Gouvernement a pris les choses en main, (marques d'ironie à droite) en mobilisant le foncier public, en fluidifiant le marché locatif, en baissant le taux de TVA pour accélérer les chantiers de construction et de rénovation. L'encadrement des loyers et d'autres mesures prises par le Gouvernement, qui auront un impact immédiat sur le pouvoir d'achat, attendent leurs décrets d'application.
D'autres mesures ont été annoncées pour faciliter l'accession sociale à la propriété et mobiliser le foncier public et les acteurs socio-économiques. Madame la ministre, comment ces mesures vont-elles s'articuler ? Pouvez-vous nous éclairer sur leur calendrier ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Sylvia Pinel, ministre du logement et de l'égalité des territoires . - Vous avez rappelé justement que l'accès au logement est une priorité de ce gouvernement. Nous avons annoncé des mesures concrètes, rapides, destinées à relancer la construction, qui seront mises en oeuvre d'ici à la fin de l'année, pour répondre aux besoins de nos concitoyens : faciliter l'accession sociale à la propriété, en ciblant mieux le PTZ, dispositif ouvert à l'ancien dans les zones rurales ; mesures de simplification technique pour faire baisser les coûts de construction sans nuire à la qualité de la production de logements ; aménagement et libération du foncier public - M. Repentin présidera la commission ad hoc. Nous devons prêter une attention particulière aux programmes de logements sociaux retardés dans les territoires : l'État sera vigilant pour développer l'offre adaptée aux besoins des classes moyennes. Enfin, nous voulons stimuler l'investissement locatif pour répondre aux besoins du marché, notamment à Lille, Lyon et Marseille.
Réforme territoriale
M. Jackie Pierre . - (Applaudissements à droite) Ma question s'adressait au Premier ministre.
M. Roger Karoutchi. - Trop tard !
M. Christian Cambon. - Il est parti !
M. Jackie Pierre. - Quatre cartes territoriales en six semaines et ce n'est pas fini ! Le big bang territorial, les élus n'en veulent pas, d'autant qu'ils n'ont pas été consultés. Si la réforme est nécessaire, ce texte est mal préparé ; pour beaucoup d'entre nous, les tergiversations auxquelles nous assistons reflètent un certain mépris à l'égard de la ruralité. L'intérêt électoral semble primer sur les intérêts économiques et sociaux des territoires. Vous avez promis une nouvelle carte intercommunale d'ici à quatre ans. La clause de compétence générale, à peine rétablie, serait finalement supprimée. Cette avalanche de réformes et de contre-réformes prive les collectivités de toute visibilité ; quant au gel des dotations, il achève de paralyser les investissements publics, qui reposent aux trois quart sur les collectivités territoriales. Les premières victimes en sont les entreprises du BTP.
Ainsi empêchés d'agir, elles ne peuvent plus investir, sans parler de l'impact de la loi Alur sur la construction.
Après ces improvisations, ces atermoiements et ces retournements aux graves conséquences, quand comptez-vous nous présenter une réforme lisible et efficace ? (Applaudissements au centre et à droite)
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale . - L'investissement public ? Le Gouvernement est conscient que les collectivités territoriales représentent 70 % de l'investissement public ; il n'est donc pas question de réduire les dotations à l'investissement local. Et la nouvelle banque des collectivités territoriales facilite l'accès à l'emprunt.
La réforme territoriale ? Depuis vingt ans, les structures se superposent et les compétences s'enchevêtrent ; leur clarification est une exigence démocratique. Dans la compétition économique mondialisée, la France a besoin de régions plus grandes et plus attractives ; nos concitoyens veulent des services proches et efficaces : il convient de renforcer le bon niveau d'intervention, l'intercommunalité.
Le Gouvernement a conscience des difficultés des collectivités locales, c'est pourquoi le Premier ministre a décidé d'accompagner la réforme territoriale par un renforcement de la présence de l'État dans les territoires. Nous en reparlerons lors des Assises de la ruralité à l'automne.
Conflit au Proche-Orient (III)
M. Pierre Bernard-Reymond . - Le Moyen-Orient est à feu et à sang. Après l'assassinat de trois jeunes Israéliens, puis d'un jeune Palestinien, les armes parlent de nouveau dans ce conflit vieux de 70 ans. La diplomatie internationale semble hésitante, voire résignée, tandis que les victimes se multiplient. Chaque conflit est spécifique, chaque conflit porte en lui le poids de son histoire. Pourquoi les nations intervenues en Afghanistan, en Iran, en Irak, au Mali, en Centrafrique ou en Libye considèrent-elles comme inimaginable l'envoi, sous l'égide de l'ONU, d'une force d'interposition, préalable à une solution définitive, offrant la paix et la sécurité à ces deux peuples ? (Applaudissements)
M. Harlem Désir, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes . - La situation est en effet désastreuse au Moyen-Orient. Le meurtre odieux de trois Israéliens puis d'un Palestinien a provoqué une escalade de la violence qu'il faut stopper. La trêve humanitaire décidée aujourd'hui doit être étendue : il faut que le massacre cesse !
La priorité absolue est le cessez-le-feu. Nous soutenons la proposition égyptienne, endossée par la Ligue arabe, d'un cessez-le-feu immédiat, suivi de discussions pour une trêve durable. C'est ce qu'ont demandé le Conseil européen et le président de la République. Le cabinet israélien a donné son accord, et le Hamas doit mettre fin aux tirs de roquette.
La France, avec l'Europe, peut contribuer à la mise en place d'une trêve durable. Mais au-delà de cette nouvelle tragédie, il est urgent de trouver une solution définitive au conflit.
Très souvent, dans les conflits internationaux, la difficulté est de trouver la bonne solution. Ici, elle est connue : deux États vivant côte à côte en paix et en sécurité, avec Jérusalem comme capitale. Le problème, c'est l'application de cette solution. L'absence d'horizon politique fait le jeu des extrémismes. Nous ne pouvons pas être résignés et nous ne le sommes pas !
L'urgence, c'est le cessez-le-feu, la trêve durable, l'arrêt des violences et des bombardements : c'est le sens de tous les efforts de la diplomatie française et européenne.
Je saisis l'occasion de votre dernière séance de questions au gouvernement pour vous redire, monsieur le président Bel, nos remerciements pour votre rôle, votre travail et votre engagement au service du Sénat et de la République. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
La séance, suspendue à 16 h 15, est reprise à 16 h 30.
présidence de M. Charles Guené,vice-président
Échec en CMP
M. le président. - J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2013 n'est pas parvenue à l'adoption d'un texte commun.
CMP (Constitution)
M. le président. - M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte commun sur le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014.
En conséquence, les nominations intervenues lors de notre séance du mercredi 16 juillet prennent effet.
Économie sociale et solidaire (Conclusions de la CMP)
M. le président. - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l'économie sociale et solidaire.
M. Marc Daunis, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire . - La commission mixte paritaire s'est réunie hier après-midi à l'Assemblée nationale pour aboutir à un accord sur ce projet de loi qui nous occupe depuis presque un an. Il concerne pour la première fois et en tant que tel, un secteur qui est pourtant apparu au cours des XIXe et XXe siècles sous la forme de coopératives, de fondations et de mutuelles. Ses enjeux sont au coeur de notre économie et de notre société. Il est actif dans la protection sociale, la production agricole, le secteur sanitaire et social. Outre sa résilience face aux crises, il offre des principes d'organisation tout aussi pertinents pour les nouveaux secteurs que sont la croissance verte, l'économie circulaire et même les nouvelles technologies.
De 2001 à 2009, le taux de croissance de l'emploi dans le secteur a été de 2,6 % l'an, à comparer avec celui de 1,1 % ailleurs. L'économie sociale et solidaire poursuit un but entrepreneurial au moyen d'une gouvernance démocratique ; les bénéfices sont utilisés prioritairement, non pour verser des dividendes et rémunérations de plus en plus élevés mais pour développer l'acte d'entreprendre.
L'économie sociale et solidaire est complémentaire avec les autres secteurs de l'économie. Elle ne peut pas, elle ne doit pas être cantonnée dans une économie de la réparation, une alter-économie utopique, marginale, opposée au monde capitalistique. L'économie sociale et solidaire répond à une ambition plus élevée, à l'aspiration naturelle de l'être humain à travailler avec ses semblables autour de valeurs partagées. Le souci du gain ne résume pas l'humain, non plus que la recherche du profit ne résume l'acte d'entreprendre.
La CMP a confirmé les acquis du texte : la définition même de l'économie sociale et solidaire, sur laquelle notre Assemblée a travaillé avec précision en l'ouvrant de façon mesurée aux nouveaux acteurs du secteur. L'agrément sera délivré sur des critères stricts afin que l'économie sociale et solidaire ne se dilue pas mais pollinise l'économie classique, selon la métaphore favorite de M. Hamon.
Ce texte riche résulte d'une importante concertation en amont, d'une co-construction pratique, pragmatique. La CMP a examiné 22 articles dont l'un supprimé par l'Assemblée nationale en deuxième lecture. Elle a supprimé un article et en a adopté vingt autres.
C'est un travail approfondi qui a été ainsi mené, dans un climat très constructif sous la présidence de François Brottes et la vice-présidence de notre remarquable président Raoul. Je me réjouis que les positions claires de notre Haute Assemblée aient été entendues. Le dialogue a été constant avec le rapporteur de l'Assemblée nationale, Yves Blain, au long des lectures successives.
À l'article 5 B, la CMP a retiré, après un long débat, la mention des agences de développement, qui existent déjà et relèvent de la liberté d'organisation des régions.
Quand deux éléphants se battent, celui qui souffre le plus, c'est le terrain, dit le proverbe africain.
Nous sommes tombés d'accord pour améliorer la rédaction de l'article 10 sexies, adopté unanimement. Nous avons longuement débattu de la portée de l'article 31, qui étend les recours des intercommunalités aux Coopératives d'utilisation de matériel agricole (Cuma)
La dérogation introduite par cet article est très limitée. De plus, les principes des marchés publics continuent à s'appliquer. Il s'agit donc d'une pratique ciblée, ponctuelle. Il fallait faire confiance aux élus locaux.
À l'article 40 AA, nous avons obtenu une rédaction de compromis. La CMP a supprimé l'article 44 quater. Nous avons constaté que le débat sur l'accès de mineurs aux responsabilités associatives n'est pas mûr. Le droit actuel prévoit qu'un mineur de 16 ans et plus peut accomplir des actes d'administration d'une association avec l'accord de son représentant légal. Après une discussion approfondie, la CMP a préféré en rester là.
Les autres amendements examinés par la CMP étaient de modification rédactionnelle ou de coordination juridique.
La CMP a adopté les articles 33 bis, 34, 36, 40 ABA, 40, 42 bis, 44 ter dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Après deux lectures et la CMP, le projet de loi comporte 98 articles, soit 20 articles adoptés par la CMP et 78 articles adoptés conformes au cours de ses deux premières lectures, dont celui - important - relatif au commerce équitable.
Parmi les apports du Sénat, citons l'encadrement des sociétés commerciales se réclamant de l'économie sociale et solidaire, l'introduction d'une définition légale de l'innovation sociale, le renforcement des dispositifs locaux d'accompagnement, la sécurisation de l'information préalable des salariés à la cession d'un fonds de commerce et une nouvelle définition du commerce équitable. Toutes les améliorations sont dues aux différents groupes politiques et au travail conjoint de la commission des affaires économiques, de la commission des lois et de la commission des finances.
Je remercie particulièrement les groupes de la majorité sénatoriale.
Je vous invite à adopter les conclusions de la CMP. (Applaudissements à gauche)
Mme Carole Delga, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, du redressement productif et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire . - « Les idées ne sont pas faites pour être pensées, mais pour être vécues » disait André Malraux. Ce précepte s'applique à ce texte, grâce auquel l'économie sociale et solidaire changera d'échelle, sera davantage partagée.
Nous avons la chance de faire de la France un des pays les plus avancés dans ce domaine. C'est une page qui se tourne. Celle de la concertation est écrite. Vient celle de la CMP. Le livre se poursuit, grand ouvert : une nouvelle page à remplir, qui n'est pas blanche pour autant.
Tous, élus, comme professionnels, peuvent être les ambassadeurs de l'économie sociale et solidaire. Je salue l'esprit de conciliation et de convergence qui a animé les deux chambres. Grâce à quoi le projet qui concilie ambition et réalisme, lucidité et audace, a été soutenu par toutes les composantes de la gauche, a obtenu l'abstention bienveillante de l'UDI et des députés UMP et NI.
L'exposition universelle de 1900 accueillait un palais de l'économie sociale ; aujourd'hui nous ne sommes plus dans la symbolique, au Palais du Luxembourg, avec une reconnaissance par la loi. Nos concitoyens veulent une économie qui a du sens, non plus une économie de la prédation.
Le ministère de l'économie, et particulièrement mon secrétariat d'État, entend favoriser ces nouveaux entrepreneurs. Ce texte va concrètement changer leur vie quotidienne et celle de millions de Français, et donner des perspectives nouvelles à l'économie française. Je salue votre travail et vous assure de notre détermination pour faire de cette loi une loi efficace, pratique, au service de l'économie et de l'humain. (Applaudissements)
M. Jean-Claude Requier . - Après la ministre vous allez continuer à entendre le même accent ensoleillé du sud de la France
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. - Vous êtes du nord de Midi-Pyrénées !
M. Jean-Claude Requier. - C'est un texte fondateur qui nous rassemble, créateurs d'emplois.
Les vacances arrivent, tout s'accélère. Les conditions d'examen des conclusions de cette CMP sont rapides, voire précipitées, mais je salue la qualité d'écoute constante des ministres qui ont suivi le dossier.
Les articles 11 et 12 constituent une grande avancée pour les salariés mis devant le fait accompli de la reprise de leur entreprise.
M. Marc Daunis, rapporteur. - Oh oui !
M. Jean-Claude Requier. - Il faudra aller plus loin.
Nous nous réjouissons qu'à l'article 9 la CMP ait rétabli la mention introduite par le Sénat des maisons de l'emploi. Je me félicite que les membres de la CMP soient revenus sur des dispositions incantatoires, dont les députés sont coutumiers... (Sourires) Il fallait rétablir la portée législative de ce texte. En revanche, je m'interroge toujours sur la portée de l'article 40 AB. Nous aurions préféré un texte spécifique sur la base du rapport du président de l'Agence du service civique à la ministre de de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Raymond Vall est à l'origine de l'article 50 bis qui précise la définition du commerce équitable.
M. Marc Daunis, rapporteur. - Très important !
M. Jean-Claude Requier. - ... qui n'est pas seulement nord-sud mais aussi nord-nord.
Conscient des avancées que représente ce texte, le groupe RDSE confirme son soutien unanime à ce projet de loi. (Bravos et applaudissements à gauche)
M. Joël Labbé . - Désolé de rompre avec l'accent du sud, je ne suis que du sud de la Bretagne... C'est toujours une joie de voir le travail accompli par le Parlement aboutir, même s'il nous faut veiller ensuite à son application. Je suis un peu déçu d'ailleurs par celle du « fait maison ».
L'économie sociale et solidaire ne nuit pas à la rentabilité, au contraire, elle associe chaque membre à la rentabilité d'un projet. Le Parlement donne un véritable statut à ce secteur créateur d'emplois non délocalisables, qui fait preuve d'une créativité considérable. Ce projet de loi améliore la compétitivité de notre économie en favorisant la reprise des entreprises par leurs salariés. Cette loi démontre qu'il existe un capitalisme responsable, tourné vers le bien-être social et environnemental, résilient face à la crise, porteur de croissance.
Ces notions de missions locales complémentaires, de commerce équitable sont entrées dans la loi ; nous pouvons réorienter notre économie, en recréant du lien social et une richesse partagée. Oui, comme l'a dit Benoît Hamon, elle pollinisera le reste de l'économie ; nous devons prendre soin des pollinisateurs en tous genres...
Certes, nous aurions pu aller plus loin, mais cette loi est un beau point de départ. Au nom du groupe écologiste, j'approuve les conclusions de la CMP. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Marc Daunis, rapporteur. - Très bien !
M. Jackie Pierre . - Nous venons au bout de ce marathon législatif, un an après l'adoption du projet de loi en conseil des ministres et neuf mois après sa première lecture au Sénat ; drôle de hasard, la procédure accélérée n'a pas été engagée par le Gouvernement. Pourtant, il eût été, de tous les projets de loi, celui pour lequel elle aurait été la plus pertinente.
L'économie sociale et solidaire représente 10 % du PIB et 2,5 millions de salariés. Or le Gouvernement prend des mesures qui vont à l'encontre de la simplification attendue par les entrepreneurs. Bien des observateurs ont salué le virage économique de la gauche oubliant que derrière ce tournant social-libéral le Gouvernement ne cesse de présenter des projets de loi d'une autre teneur. Il cherche à marquer l'opinion, à montrer la bonne volonté du Gouvernement. Mais les bonnes intentions ne font pas de bonnes lois. Ainsi des articles 11 et 12, qui posent une chape de plomb législative, d'une complexité inouïe, qui pèsera en fait sur les cessions d'entreprises.
Avec le dispositif d'information préalable des salariés, quand le propriétaire a la volonté - et non plus l'intention ! - de vendre son entreprise, le remède est pire que le mal.
Le groupe UMP s'est fermement opposé à ces articles : ils exposent les entreprises françaises à des tentatives de déstabilisation et risquent de les rendre moins attractives pour des repreneurs étrangers.
Je m'interroge sur la constitutionnalité de ces dispositions. Le Conseil constitutionnel s'est prononcé en 2014 en posant des réserves d'interprétation très claires, au regard desquelles ces dispositions sont bien imprécises. L'annulation d'une vente à la demande d'un salarié pour non-respect de l'obligation d'information fragilisera les entreprises concernées. Il s'agit de surcroît d'une limitation disproportionnée de la liberté d'entreprendre.
Nous souscrivons certes aux articles 24, 25, 26 mais d'autres dispositions freineront le développement les entreprises, à rebours des belles promesses que représente ce secteur, bien qu'il n'ait pas été épargné par la crise économique. Nous attendions beaucoup de ce projet de loi, peut-être un peu trop.
L'article 7 chevauche l'article premier. La valeur ajoutée de l'article 2 confine au mystère. Ce projet de loi exclura des entreprises de l'agrément qui scelle leur appartenance à l'économie sociale et solidaire. (M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques, proteste) Votre définition de l'économie sociale et solidaire est restrictive et bien différente de celle de la Commission européenne, comme de celle du Commissariat à la stratégie. Les articles premier et 7 ne laissent que de minces espoirs aux véritables entrepreneurs d'intégrer l'économie sociale et solidaire. Des sociétés de services à la personne seront privées des avantages fiscaux auxquels peuvent prétendre des organismes associatifs.
M. Marc Daunis, rapporteur. - Le CICE, tout de même !
M. Jackie Pierre. - Comme lors des lectures précédentes, le groupe UMP votera contre le projet de loi.
M. Jean-Jacques Mirassou. - Tout ça pour ça !
Mme Françoise Férat . - Le Gouvernement n'a pas, pour une fois, fait appel à la procédure accélérée. C'est une bonne chose. Cela permet de meilleurs échanges avec le Gouvernement. Je ne puis que vous encourager, madame la ministre, à diffuser cette bonne pratique. Henri Tandonnet et Valérie Létard ont suivi plus particulièrement ce projet de loi au sein de notre groupe UDI-UC.
M. Marc Daunis, rapporteur. - Remarquablement.
Mme Françoise Férat. - Nous partageons totalement l'état des lieux dressé par le rapport qui avait été remis en 2010 au président de la République : l'économie sociale et solidaire est une formidable source d'emplois et d'activités, que nous ne devons pas négliger, nous qui représentons les territoires.
Nous avons proposé des modifications qui allaient dans le bon sens. Vous avez accepté celle sur la Cuma. La CMP a supprimé l'article 44 quater, nous nous en réjouissons. Madame la ministre, je compte sur votre vigilance, après la suppression de l'article 40 AFA sur l'exonération de la taxe versement de transport.
Nos propositions en première lecture étaient été mesurées. Je regrette que nous n'ayons pas été entendus. Vous ne pouvez pas faire comme si les responsables de PME et TPE n'avaient pas exprimé leurs craintes sur le climat anxiogène que provoquera l'obligation d'information préalable. Nous restons toujours favorables à un Social Business Act, auquel devrait s'adjoindre un Small Business Act. (M. Marc Daunis, rapporteur, approuve) Le groupe UDI-UC s'abstiendra.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. - Encore un petit effort !
M. Gérard Le Cam . - Ce texte a suscité beaucoup d'espoir lors de sa présentation au Sénat cet automne. Alors que nos concitoyens sont de plus en plus exposés à la précarité, au chômage, au recul des services publics, l'économie sociale et solidaire représente une voie. Le Gouvernement a fait le choix d'une approche inclusive, le groupe CRC s'est efforcé d'apporter des garde-fous. Nous avions émis des réserves sur l'agrément de plein droit, nous n'avons pas été entendus, non plus que sur le renforcement des contre-pouvoirs des salariés. Les articles 11 et 12 n'instaurent absolument pas un droit prioritaire de rachat par les salariés, contrairement à la promesse de François Hollande, mais seulement un droit d'information dans un délai trop court.
Face aux attaques de la droite contre la proposition de loi Florange, le groupe CRC a toutefois choisi de soutenir ce texte. Il n'en faut pas moins radicalement charger de cap : une cour d'appel a fait jurisprudence en donnant préférence à un groupe américain sur l'offre des salariés pour conserver les savoir-faire. La frilosité des banques freine les projets : l'argent qui y est déposé devrait servir l'économie locale. Nous demandons également une remise à plat du code des marchés publics pour y inclure des exigences sociales et environnementales.
Madame la ministre, soyons vigilants à ce que l'économie sociale et solidaire ne soit pas noyée dans un système qu'elle récuse et contre lequel elle est née. (Applaudissements à gauche)
Mme Marie-Noëlle Lienemann . - Je salue la manière dont le Gouvernement a préparé ce projet de loi, menant de larges consultations, ainsi que le rôle du Conseil économique, social et environnemental. Certains passent leur temps à imaginer la disparition de cette institution, on voit son apport dans la construction de bons outils législatifs. Je veux également saluer notre rapporteur, Marc Daunis, et notre président Raoul.
Le texte fera date. Il pose des principes sans fermer, sans faire non plus de social bashing. Il fera passer l'économie sociale et solidaire dans le XXIe siècle. Jean Jaurès, grand utopiste, dont nous allons fêter le 100e anniversaire, était un visionnaire.
M. Jean-Jacques Mirassou. - Albi !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. - Les temps étaient durs alors. Utopisme, mais aussi capacité à transformer les choses au quotidien, dans l'ici et le maintenant, voilà bien l'économie sociale et solidaire.
Poids économique, bien sûr, de ce secteur, on l'a rappelé, mais aussi poids social avec la modernité de la mutualisation plutôt que l'assurance individuelle ; poids citoyen et investigation de champs nouveaux avec l'économie circulaire, le commerce équitable et la pratique de nouvelles monnaies.
Ce texte reconnaît les acteurs - fondations, coopératives, mutuelles et associations - à travers la Chambre française de l'économie sociale et solidaire et surtout le maillage des Cress.
Point important, le suivi du financement. On peut comprendre la position du Gouvernement sur le versement transport - c'est un cavalier - reste qu'il faudra trouver une solution. La BPI devra jouer tout son rôle, on ne peut pas comprendre que des crédits ne soient pas utilisés. Le Haut Conseil de la vie associative est aussi une forme de reconnaissance des acteurs.
Parmi les grands apports de ce texte, la Scop d'amorçage...
M. Marc Daunis, rapporteur. - C'est fondamental :
Mme Marie-Noëlle Lienemann. - ... et l'information préalable des salariés en cas de cession. Cela fait intégralement partie de l'économie sociale et solidaire, cela encouragera la pollinisation.
Bravo au rapporteur pour l'équilibre trouvé sur les Cuma. Enfin, la sécurisation des subventions aux associations, menacées par les règles européennes. Nous avons beaucoup débattu de la place des jeunes dans la vie associative ; il fallait une réponse sûre sur la responsabilité.
Notre République est particulière, elle concilie la liberté, l'égalité et la fraternité. L'économie sociale et solidaire fait vivre les principes républicains, j'espère que les acteurs s'empareront de ce texte et que le Gouvernement lui consacrera les crédits nécessaires. (Applaudissements à gauche)
Mme Carole Delga, secrétaire d'État . - Je rends hommage à M. Benoît Hamon, à Valérie Fourneyron qui ont beaucoup fait pour ce texte.
Jean Jaurès disait : « Le courage, c'est de comprendre sa vie ; le courage, c'est d'aimer la vie et de regarder la mort avec un regard candide. Le courage c'est d'aller à l'idéal et de comprendre le réel. Le courage, c'est d'agir et de se donner aux grandes causes sans savoir quelle récompense réserve à notre effort l'univers profond, ni s'il lui réserve de récompense ». Ayons donc le courage nécessaire pour redresser notre pays grâce à l'économie sociale et solidaire ! (Applaudissements à gauche)
La discussion générale est close.
Les conclusions de la CMP sont adoptées.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. - Bravo à Mme Lienemann et à M. Daunis pour leur travail sur ce texte ; j'espère, cher Marc, qu'il vous vaudra de vous retrouver à l'automne au Sénat. Madame la ministre, vous avez brillamment réussi votre examen de passage au Sénat avec ce texte, le jour même de votre prise de fonction. Votre compétence nous a impressionnés.
M. Marc Daunis, rapporteur. - Je remercie la direction de la séance, la commission des affaires économiques, mes collègues, à commencer par Mme Lienemann, avec lesquels nous avons coconstruit ce texte. Merci à Mme Létard et au groupe UDI-UC, dont je regrette l'abstention : peut-être les chaînes idéologiques vous retiennent-elles encore, mais n'insultons pas l'avenir.
M. Jackie Pierre attendait beaucoup de ce texte, il est vrai que rien n'avait été fait jusqu'ici. Si le groupe UMP conserve la même attitude, il risque d'attendre encore longtemps...
Un merci très chaleureux à Mme la ministre ; ensemble, nous avons donné une belle image de la politique. Le Parlement a construit l'outil. Aux acteurs de l'économie sociale et solidaire de s'en saisir, de lui donner sa profondeur, sa force et son âme.
La séance, suspendue à 17 h 55, reprend à 18 heures.
Question prioritaire de constitutionnalité
M. le président. - M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le 17 juillet 2014, qu'en application de l'article 61-1 de la Constitution, la Cour de cassation a adressé au Conseil constitutionnel deux décisions de renvoi d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l'article 706-73 8° du code de procédure pénale et sur l'article 706-88 dans sa version applicable au moment des faits (possibilité d'une garde à vue de 96 heures pour les cas d'escroquerie commis en bande organisée). Le texte de ces décisions est disponible à la direction de la séance.
Prêts structurés (Procédure accélérée - Deuxième lecture)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la sécurisation des contrats de prêts structurés souscrits pas les personnes morales de droit public.
Discussion générale
M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget . - Le Sénat avait adopté ce texte en première lecture le 13 mai dernier. Inutile de rappeler les raisons qui ont amené le Gouvernement à présenter un nouveau dispositif de sécurisation des contrats de prêts structurés après la censure du Conseil constitutionnel. L'Assemblée nationale a adopté conformes les articles 2, 3 et 4 du texte - le dernier, important, prévoit un rapport sur la réforme du taux effectif global auquel le Gouvernement travaille déjà. Toutefois, et c'est ce qui motive cette deuxième lecture, elle a dû modifier l'article premier qui comportait une erreur de référence : il fallait renvoyer à l'article L.313-2 du code de la consommation et non à l'article L.131-1. Le Gouvernement a donc levé l'urgence plutôt que de convoquer une CMP pour examiner ce seul point.
Bravo au rapporteur Germain pour sa nomination au comité d'orientation et de contrôle du fonds de soutien aux CIS en cours de constitution.
J'invite le Sénat à confirmer son vote positif.
M. Jean Germain, rapporteur de la commission des finances . - Le texte, que nous avons adopté le 13 mai dernier, l'a été par l'Assemblée nationale le 10 juillet. Seul l'article premier a été modifié.
En première lecture, j'avais souligné le caractère indispensable et urgent de ce texte après deux jugements relatifs à des CES rendus par le TGI de Nanterre. Le TGI avait fondé son jugement sur un motif formel : l'absence ou l'erreur de TEG sur les documents suffisait à faire appliquer le taux d'intérêt légal. Cela mettrait en péril Dexia, mais aussi le Sfil. Les deux établissements, majoritairement détenus par l'État, devront provisionner 10 milliards. Le risque potentiel pour les finances publiques est de l'ordre de 17 milliards.
J'invite le Sénat à adopter ce texte.
M. Francis Delattre . - Ce texte concerne les prêts toxiques. Toutes les banques ne sont pas concernées ; Dexia l'est, dans lequel l'État détient toujours 44 % des parts. La Sfil, détenue à 75 % par l'État, à 20 % par la Caisse des dépôts et à 5 % par la Banque postale, a repris 90 milliards de crédits de Dexia et se trouverait menacée si le taux des emprunts était modifié par les tribunaux. Le risque, qui se monte à 17 milliards d'euros, dont 9 milliards dès 2014, pèse sur le financement de nos collectivités locales et de notre économie. Voilà le discours du Gouvernement.
En réalité, si l'État ne règle pas la note, les collectivités territoriales devront payer des conditions bancaires franchement indécentes. Au final, les contribuables locaux ou nationaux paieront des égarements dont les responsabilités sont partagées depuis huit ans. Contrôleurs et Cour des comptes ne se sont jamais inquiétés de la capacité des collectivités territoriales à rembourser ces prêts. Les élus devraient être tenus responsables de leurs actes ; les mandats ont passé, le fardeau reste ; en particulier dans les petites communes.
Mme Nathalie Goulet. - Eh oui !
M. Francis Delattre. - Les documents de Dexia d'alors ne mentionnaient pas le risque.
Au fond, le renoncement à des procédures contentieuses pour les collectivités territoriales n'est pas dans leur intérêt. Le fonds de 1,5 milliard sur dix ans créé par la loi de finances rectificative pour 2013 ne suffira pas. La commission d'enquête de l'Assemblée nationale avait estimé en 2011 l'encours de la dette liée à ces produits à 22 milliards... Comme la décision d'accorder l'aide ne sera prise qu'une fois l'accord conclu avec l'établissement de crédit, la méthode s'apparente à celle, bien connue, de la carotte et du bâton.
Nous avons le choix entre valider ce texte peu sûr ou laisser les collectivités négocier individuellement avec les banques, au risque qu'elles soient contraintes d'augmenter leur fiscalité ou de réduire leurs investissements, alors que leurs dotations diminuent.
Devant la complexité de cette situation, le groupe UMP s'abstiendra, ce qui revient à accepter un vote conforme. Il s'interroge toutefois sur la constitutionnalité de ce projet de loi de validation rétroactive.
Les enjeux sont importants pour les finances publiques - plus de 10 milliards d'euros - mais aussi pour les hôpitaux publics qui avaient plutôt intérêt à la négociation individuelle. Où est l'intérêt général ? Est-ce celui de l'État ou des collectivités locales ? Ce sera au Conseil constitutionnel de le dire... (Applaudissements à droite)
Mme Nathalie Goulet . - Tout a été dit sur l'affaire Dexia ; le Sénat, gardien des collectivités territoriales, doit rester attentif. J'ai moi-même interrogé le Gouvernement en mai 2011 et en décembre de la même année. Pour dire la vérité, les chiffres d'aujourd'hui sont bien loin de ceux avancés hier.
La motivation de ce projet de loi est tout autre que celle qui a présidé au sauvetage de Dexia : pour ne pas être ministre des finances, je suis une parlementaire attentive... Ce texte protège les banques qui ont laissé proliférer les produits toxiques en privant les collectivités territoriales de voies de droit, et l'indemnisation est subordonnée à l'existence d'une transaction. Ce sont les contribuables qui paieront en définitive.
Jean Arthuis disait à cette tribune : les collectivités locales ont joué, elles ont perdu, qu'elles paient. Soit, mais certaines petites communes n'avaient pas d'autre choix pour se financer que ces emprunts toxiques et sont pénalisées... Nous ne referons pas l'histoire...
En 2011, lors de l'examen de la loi de finances initiale, j'avais demandé un rapport sur les contentieux en cours à l'époque, pour avoir une vision globale du risque. La rapporteure générale de l'époque, Mme Bricq, avait trouvé mon amendement mal rédigé...
M. Philippe Marini. - Elle est sévère...
Mme Nathalie Goulet. - Elle l'est demeurée ; mais elle est tellement compétente...
Ce texte est déséquilibré et injuste, alors que n'importe quel emprunteur peut saisir les tribunaux pour manquement d'une banque à ses obligations... Ce qui me met aussi en colère - décidément tout le monde est en colère au Sénat aujourd'hui - ce sont les rémunérations des responsables de Dexia, qui ont augmenté de 30 % en décembre 2013 ; 420 000 euros pour le directeur financier, 390 000 euros pour le responsable des risques, ces montants me choquent - même s'il y a eu le décret de juillet et si ces personnes ont un peu revu leurs prétentions à la baisse.
Et puis il y a l'effet d'aubaine potentiel, la validation concernant aussi des contrats qu'on fait souscrire des banques privées, y compris étrangères.
Je comprends que nous sommes dans la seringue, mais je ne suis pas convaincue par ce texte. Certains membres du groupe UDI-UC le voteront, d'autres dont je suis ne le voteront pas. (Applaudissements au centre et à droite)
Mme Marie-France Beaufils . - Dès la première lecture, le groupe CRC avait dit son refus de ce texte, qui revient sur des décisions de justice. C'est faire peu de cas de la séparation des pouvoirs.
Ce projet de loi a peu à voir avec l'intérêt général même s'il présente un intérêt pour le budget de l'État - et pour Dexia, dont la déconfiture, produit de prises de risques inconsidérés, illustre la folie financière de la période. Et ces risques ont été généreusement répartis entre les collectivités territoriales.
C'est un gouvernement de droite qui a fait de la Caecl une société anonyme et privatisé le Crédit local de France en 1996.
Entre 10 et 17 milliards de créances douteuses figureraient à l'actif des banques. L'intérêt général consiste-t-il à imputer cette charge aux collectivités territoriales ? À Trégastel, le maire sortant a renoncé à son mandat après avoir vu celui-ci pollué par les emprunts toxiques ...
Mme Nathalie Goulet. - Je pourrais citer des communes de l'Orne !
Mme Marie-France Beaufils. - La jurisprudence est de plus en plus favorable aux collectivités ; après la Seine-Saint-Denis, Saint-Maur, Lille métropole, Angoulême vient d'avoir gain de cause. Or ce texte frapperait de caducité les procédures engagées alors que le fonds de soutien ne suffira pas. Le problème est en quelque sorte déontologique. Les renégociations sont toujours délicates. Pourquoi la Sfil ne se refinancerait-elle pas auprès de la BCE ? C'est la solution à privilégier. Le bon vieux principe libéral de socialisation des pertes et de privatisation des profits ne doit pas encore prévaloir.
Nous demeurons hostiles à ce texte qui empiète sur le pouvoir judiciaire et menace les finances locales. Les services publics locaux sont en danger : alors que 28 milliards d'euros vont être confisqués aux collectivités territoriales pour financer des cadeaux aux entreprises, plusieurs milliards d'euros d'intérêts indus alourdiront encore la facture.
M. Jean-Claude Requier . - Ce projet de loi n'enthousiasme personne, car nous sommes face à une impasse. La validation législative des contrats priverait les collectivités territoriales d'une voie de recours ; à défaut, le risque pour les finances publiques s'élèverait à 17 milliards d'euros - et devrait être répercuté sur les contribuables. Mais le paiement d'indemnités de paiement anticipé par les collectivités territoriales a aussi un coût pour le contribuable...
Le problème est complexe, les responsabilités partagées. Certaines banques n'ont eu aucun scrupule à faire souscrire à des personnes publiques des contrats farfelus, dont le taux est passé 3 % à 33 % ! Aucune sanction n'a été prise, certains dirigeants ont même quitté leurs fonctions avec de très belles primes... (Mme Nathalie Goulet renchérit) On demande aux banques de contribuer au fonds de soutien, mais le relèvement de la taxe systémique pèsera sur toutes, même celles qui n'ont pas proposé de produits structurés.
Il n'est pas non plus impossible que les élus des grandes collectivités aient cru bon de souscrire ce genre de contrats sans en mesurer les risques, manquant ainsi à leurs responsabilités. Mais les communes qui ne disposaient pas des moyens d'expertise nécessaires ont pu se laisser berner...
Mme Escoffier a souligné en première lecture le risque d'inconstitutionnalité de ce texte ; le Conseil constitutionnel ayant censuré des dispositions de portée trop large, le Gouvernement en a restreint le champ, mais ses arguments ne sont pas totalement convaincants.
Nous nous abstiendrons très majoritairement. (Applaudissements sur les bancs du RDSE)
M. Michel Berson . - Par ce projet de loi, nous poursuivons une tâche ingrate mais nécessaire, consistant à solder quinze ans d'erreurs et de dérives. J'entends dissiper quelques malentendus.
Non, ce texte n'a rien à voir avec la baisse des dotations. Ne mélangeons pas tout ! Mesurons nos propos et faisons preuve de discernement.
Ensuite, nous avons pointé en première lecture l'origine du mal. Le rapport Bartolone de 2011 avait fait l'unanimité et conclu à une responsabilité partagée entre banques, collectivités et État. Cibler un seul acteur du dossier est intellectuellement malhonnête.
Le risque financier se monte à 17 milliards d'euros. Il est inacceptable de dire que ce texte constituerait une loi d'amnistie pour les banques. Depuis que l'État a apporté sa garantie à Dexia, le problème est d'intérêt général. En l'état de nos finances publiques, un risque atteignant 1 % du PIB constitue un motif impérieux d'intérêt général. Contrairement au texte censuré, seules les personnes morales de droit public et seuls les contrats structurés seront désormais concernés.
Il est trop tard pour prendre un autre chemin. À ce projet de loi s'ajoute le fonds de soutien aux collectivités territoriales créé par la loi de finances pour 2013, pourvu d'1,5 milliard d'euros sur quinze ans. Les premières aides doivent être débloquées fin 2014, le calendrier doit être tenu. J'ajoute que l'adoption du texte n'empêchera pas l'engagement de procédures pour un motif autre que le TEG, par exemple le défaut d'information ou de conseil. Les banques financeront désormais le fonds de soutien à hauteur des deux tiers. Pour les hôpitaux, une aide spécifique de 100 millions d'euros sera mise en place.
La responsabilité, c'est aussi préparer l'avenir. Depuis plus d'un an, le Gouvernement veille à la sécurisation et à l'équité des transactions. Le comité d'orientation jouera un rôle essentiel. Les formules d'emprunt ouvertes aux collectivités territoriales seront désormais limitées, pour exclure les produits spéculatifs. Le provisionnement des contrats complexes sera obligatoire, l'information des assemblées améliorée. Enfin, le Gouvernement remettra chaque année un rapport au Parlement.
L'accès au financement des collectivités territoriales est en cours de mutation ; il est plus enthousiasmant que ce que le texte laisse penser. Nous le voterons.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État . - Je constate une fois de plus que le Sénat connaît parfaitement ce sujet. Ce qui me frappe, c'est que les acteurs ont changé mais la continuité des structures s'impose. Ainsi des collectivités territoriales, où les majorités ont pu changer depuis la souscription des emprunts.
Ainsi des banques : Dexia a été transformée en structure publique ; et les emprunts toxiques ont été logés dans une structure où l'État est majoritaire et où les autres actionnaires ont demandé la garantie de l'État. Cadeaux aux banques qui se sont engraissées grâce aux emprunts toxiques, madame Beaufils ? Non, c'est une structure publique qui est en cause ! L'État et la Caisse des dépôts et consignations y ont brûlé 3 milliards.
Ainsi des gouvernements...
Les dirigeants fautifs sont partis avec des parachutes dorés conséquents - les contrats avaient été très bien rédigés... De nouveaux dirigeants sont aujourd'hui en place. L'État constatant l'augmentation de leur salaire de 30 %, a obtenu du conseil d'administration qu'elle soit ramenée à 13 %. Souvent, quand des hauts fonctionnaires accèdent à des postes, on veille à ce qu'ils n'y perdent pas...
La loi fixe des principes, le comité d'orientation veillera à leur respect pour définir les modalités d'accès au fonds. Le cas des petites structures ou des hôpitaux devra être traité le plus rapidement possible.
Nous sommes dans la seringue, ce texte nous permettra à peu près d'en sortir. Nous aurons des discussions avec la Sfil pour que cela se fasse le moins mal possible et au moment opportun.
La discussion générale est close.
Discussion des articles
L'article premier est adopté.
ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 3
Mme la présidente. - Amendement n°1, présenté par MM. de Legge et Delattre.
Après l'article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Sont exclus du champ de la présente loi les contrats de prêts et avenants à ceux-ci conclus entre un établissement de crédit et une personne morale de droit public faisant au 23 avril 2014 l'objet d'une procédure judiciaire fondée sur le non-respect des articles L. 313-1 et suivants du code de la consommation.
M. Francis Delattre. - M. de Legge m'a demandé de défendre cet amendement. Il s'interroge sur la notion de motif d'intérêt général suffisant et propose pour cela d'exclure du champ d'application de la loi les contrats de prêts conclus entre les banques et les collectivités faisant l'objet d'une procédure judiciaire engagée avant le 23 avril 2014.
M. Jean Germain, rapporteur. - La commission est défavorable à cet amendement. Le motif impérieux d'intérêt général est constitué. Et l'amendement créerait une rupture d'égalité entre les collectivités territoriales.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Même avis : il y aurait en effet rupture d'égalité entre les collectivités qui auraient engagé une procédure sur le fondement du TEG et les autres. Il serait dangereux d'introduire dans le texte un motif avéré d'inconstitutionnalité...
M. Francis Delattre. - Le débat n'était pas inutile mais l'argument de l'égalité entre collectivités est juste. Le Conseil constitutionnel verra que sa jurisprudence imprègne nos décisions.
L'amendement n°1 est retiré.
Intervention sur l'ensemble
M. André Reichardt . - Je voterai contre ce projet de loi, comme en première lecture, par orthodoxie juridique d'abord - le docteur en droit que je suis n'accepte pas la validation législative - et parce qu'il prive les collectivités territoriales du principal moyen de renégocier leur emprunt.
L'ensemble du projet de loi est définitivement adopté.
Échec en CMP
Mme la présidente. - J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte commun sur le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 n'est pas parvenue à l'adoption d'un texte commun.
La séance est suspendue à 19 h 10 pour reprendre à 21 h 30.
présidence de Mme Bariza Khiari,vice-présidente
La séance reprend à 21 h 35.
Hommage aux victimes de la catastrophe aérienne en Ukraine
M. Jean-Claude Lenoir. - C'est avec beaucoup d'émotion que nous avons appris qu'un avion de ligne transportant 300 personnes dont plusieurs Français a été abattu en Ukraine. Nous nous inclinons devant la mémoire des disparus.
Mme la présidente. - Nous nous associons tous à cet hommage.
Mise au point au sujet d'un vote
M. Daniel Raoul. - Lors du scrutin n°210 du 4 juillet, M. Navarro ne souhaitait pas prendre part au vote.
Mme la présidente. - Acte vous est donné de cette mise au point.
Agriculture, alimentation et forêt (Deuxième lecture)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle l'examen, en deuxième lecture, du projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale, d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt.
Discussion générale
Mme Carole Delga, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, du redressement productif et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire . - (Applaudissements sur les bancs socialistes) Stéphane Le Foll a eu un petit malaise ce matin à cause de la forte chaleur lors d'un déplacement dans l'Aude pour rencontrer les viticulteurs victimes de la grêle. Vous le connaissez, c'est un ministre engagé qui ne se ménage pas assez ; après une nuit de repos, il sera parmi nous demain. Il vous adresse ses salutations les plus cordiales, les plus agricoles. Acceptez ce changement d'accent : de celui de la Sarthe à celui de la Comminges. Vous retrouverez bientôt un ministre qui défend avec passion l'agriculture, l'alimentation et la forêt. (Applaudissements sur tous les bancs)
Après une riche discussion et un vote à une large majorité, en première lecture, dans chaque chambre, ce projet de loi fixe des objectifs clairs à notre agriculture : la triple performance économique, sociale et environnementale. Les groupements d'intérêt économique et environnemental (GIEE) ont été confortés pour aller vers l'agro-agriculture chère à Stéphane Le Foll.
Sur le bail environnemental, les choix du Sénat ont été confirmés par l'Assemblée nationale, afin de préserver les bonnes pratiques, respectueuses de l'environnement.
Les autorisations de mise sur le marché (AMM) de produits phytosanitaires seront transférées à l'Anses, avec une claire répartition des rôles entre le directeur général, qui délivre les autorisations, et le comité de suivi qui l'assiste.
Concernant la forêt, l'équilibre entre chasseurs et forestiers trouvé au Sénat a été renforcé par les députés par une procédure de concertation.
S'agissant de l'enseignement supérieur agricole, nous actons la création de de l'Institut agronomique, vétérinaire et forestier de France (IAVFF).
Les députés ont également approfondi le sujet des Safer, Stéphane Le Foll s'y était engagé devant vous : le foncier pourra être dissocié du bâti agricole. Le fonctionnement du registre agricole a également été complété.
Pour le dispositif de compensations agricoles, le Gouvernement a proposé un nouveau mécanisme à l'Assemblée nationale.
Quelques questions restent pendantes. Pour les attaques du loup contre les troupeaux, nous devons trouver une solution respectueuse des exigences communautaires. Il nous faut également mieux protéger les personnes vulnérables contre les effets des produits phytosanitaires - dont il n'est pas question d'interdire l'utilisation. Enfin, le problème du défrichement.
Voilà les sujets qui nous occuperont ces prochaines heures. Oui, l'agriculture a un avenir. Le Gouvernement, attaché à la ruralité, le démontre avec ce texte.
Les Français sont attachés à leurs terres et à leurs territoires. (Applaudissements à gauche)
M. Didier Guillaume, corapporteur de la commission des affaires économiques . - Merci de ces bonnes nouvelles de Stéphane Le Foll ; je ne doute pas que Mme Delga, qui connaît bien la ruralité et les questions agricoles, le remplacera avec brio.
Ce projet de loi, contrairement aux lois de 2006 et de 2010, fait l'objet de deux lectures. C'est un choix judicieux pour aller vers une agriculture équilibrée, moderne, tournée vers l'agro-écologie.
Vraiment, je veux remercier Daniel Raoul d'avoir donné aux orateurs de tous les groupes politiques la possibilité de s'exprimer. Cette loi a été coconstruite, coproduite dès la première lecture, 408 amendements additionnels en commission et 218 en séance à l'Assemblée nationale, 245 en commission et 219 en séance au Sénat. Une loi pragmatique donc.
Oui, il fallait une nouvelle loi pour que les femmes et les hommes qui ont choisi l'agriculture puissent en vivre. Le Sénat a imprimé sa marque au texte en l'orientant vers l'agro-écologie, une agriculture durable et économiquement performante. Foin des faux débats, c'est sur ces deux piliers que l'agriculture doit reposer.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. - Trois !
M. Didier Guillaume, corapporteur. - Soit : les trois piliers de la compétitivité, de l'efficacité et de la modernité. Compétitive, l'agriculture doit l'être en interne et à l'export. Efficace aussi, et moderne : ne faisons pas comme il y a 50 ans, tournons-nous vers l'avenir.
Le Sénat a insisté sur l'importance de la triple performance économique, sociale et environnementale à l'article premier.
Nous avons étendu le bail environnemental à l'article 4 sans imposer de nouvelles contraintes aux agriculteurs. Nous avons simplifié la procédure d'agrément des Gaec à l'article 5. À l'article 6, parce nous beaucoup d'entre nous sont d'anciens coopérateurs, nous avons aménagé la clause miroir pour les coopératives. À l'article 8, nous avons assoupli le cadre applicable aux accords interprofessionnels pour prévenir tout blocage. À l'article 12, nous avons dit oui aux commissions départementales de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) tout en préservant le rôle et la place des élus. À l'article 13, nous avons conforté les Safer.
À l'article 18, monsieur Mirassou, nous avons précisé le champ de responsabilité des chasseurs en matière de surveillance et de prévention des maladies du gibier.
Au titre IV, nous avons voulu attirer de nouveaux élèves vers l'enseignement agricole. Nous avons renforcé les moyens de l'IAVFF.
À l'article 10 bis A, je souhaite que nous revenions à la rédaction de l'Assemblée nationale, car quelle que soit la place éminente du vin dans le patrimoine national, un retour en arrière excluant certaines productions ne serait pas compris.
M. Jean Bizet.et M. Jean-Claude Lenoir. - Très bien !
M. Didier Guillaume, corapporteur. - Après la deuxième lecture à l'Assemblée nationale, il reste 60 articles en navette. Sur certains points, notre rédaction me paraît meilleure. Ailleurs, les députés ont eu raison : ainsi sur l'accompagnement des GIEE et le rôle de coordination des chambres d'agriculture. Nous aurons de nombreux amendements de M. Labbé sur la méthanisation. Je salue le statut de coopérateur stagiaire introduit par les députés. Je salue le travail de M. Lasserre sur la compensation agricole ; notre commission avait mis le pied dans la porte, il fallait aller plus loin. La compensation ne sera pas seulement en nature. La nouvelle définition des PNPP à l'article 21 mettra fin à un débat vieux de plusieurs années. Sur les pesticides, la bande des 200 mètres n'a jamais existé dans la loi ; alors pas de faux débat. En même temps, prenons des précautions pour les personnes vulnérables, à commencer par les enfants.
M. Jean-Jacques Mirassou. - Très bien !
M. Yvon Collin. - C'est le bon sens.
M. Didier Guillaume, corapporteur. - Les députés ont bien fait de vouloir améliorer le dialogue social dans les chambres d'agriculture. Notre commission est revenue sur plusieurs des modifications de l'Assemblée nationale : rétablissement de la triple performance à l'article premier ; contre mon avis, retour sur l'extension des produits relevant du patrimoine national aux spiritueux, à la bière, aux cidres et poirés traditionnels ; suppression de l'avis conforme des CDPENAF. Pour favoriser l'installation, autorisons les constructions dans la continuité du bâti existant.
M. Jean-Claude Lenoir. - C'est le bon sens !
M. Didier Guillaume, corapporteur. - Nous ne sommes pas en phase avec le Gouvernement sur le loup. Pour autant, c'est la première fois qu'une ministre de l'écologie va aussi loin. Entre l'éleveur et le loup, je choisirai toujours l'éleveur. Faire de la politique, c'est avoir du courage. Le premier homme qui a gravi l'Everest ne savait pas s'il irait au bout... J'espère que Stéphane Le Foll sera le premier ministre à mener le combat contre la technocratie européenne et à demander la révision de la Convention de Berne.
Il reste peu de désaccords ; nous parviendrons à un compromis j'en suis certain. Cette loi ne balaie pas ce qui a été accompli pendant vingt ans. Nous devons être les meilleurs dans la recherche agricole, effectuer la transition vers l'agro-écologie, regarder ce qui ne fonctionne pas dans notre agriculture et y remédier.
Un mot de la PAC pour finir. Il y a six mois personne ne croyait possible de gagner. L'engagement du président de la République et du ministre de l'agriculture a sauvé la « ferme France » dans une Union européenne qui n'est pas social-démocrate mais conservatrice. Alors, monsieur Bizet, utilisons les budgets européens.
Votons ce texte pour nous tourner vers la modernité et l'agro-écologie, c'est indispensable. (Applaudissements à gauche)
M. Philippe Leroy, corapporteur de la commission des affaires économiques . - Tous mes voeux de bonne santé au ministre. Cet épisode nous rappelle à tous la nécessité de se ménager.
Merci à M. Daniel Raoul qui a présidé nos débats sans être un homme de la terre au début mais qui le devient. Merci à M. Guillaume pour sa fougue et son talent.
Je me bornerai à vous parler d'un tiers du territoire français : la forêt.
Les sylviculteurs ont été, en matière de pluri-fonctionnalité, des précurseurs ; et ce, depuis la Renaissance.
Le texte, c'est très important, entérine la création du fonds stratégique pour la forêt. Cette ligne budgétaire, nous voulions la transformer en compte d'affectation spéciale. Ce ne pourra être fait qu'en loi de finances, je compte sur le Gouvernement. La forêt française a absolument besoin de ce fonds pour se renouveler, s'adapter au changement climatique et répondre à la demande. Nous pouvons, en partie, régler les conflits d'usage par une relance des investissements forestiers.
Autre point fondamental, le regroupement de la propriété forestière. La France compte 3,8 millions de propriétaires, dont 200 000 seulement possèdent plus de 10 hectares. C'est un effet de la déprise agricole. Ce sujet complexe, il faut l'aborder avec beaucoup d'humilité. Toutes les forêts publiques - du moins, on peut le supposer - sont bien gérées ; l'ONF fait son travail. Les forêts de plus de 10 hectares le sont également. Aucune profession forestière ne peut prétendre régler le problème, tout ce petit monde de la forêt se dispute souvent le monopole...
Laissons de la diversité pour que les petits propriétaires aient envie de se regrouper. Dans dix ans, lors de la prochaine loi forestière, nous verrons le résultat. C'est la paix entre tous qu'il nous faut : 3 millions de propriétaires, 3 millions de solutions.
Troisième sujet, trouver un gentlemen's agreement entre chasseurs et forestiers. Pour être les deux, je suis parfois déchiré. J'aimerais pouvoir déjeuner avec tous : l'Assemblée nationale, dans une forme de sagesse sénatoriale, assez rare...
M. Jean-Jacques Mirassou. - C'est rien de le dire !
M. Philippe Leroy, corapporteur. - ... n'a pas modifié l'équilibre - trouvé au Sénat. Laissons les couteaux au vestiaire et ne nous prenons pas, en deuxième lecture, pour des députés... (On approuve sur les bancs de la commission)
Comme j'aimerais que le Gouvernement pense enfin aux zones de montagne surboisées... Parfois, il y a tant d'arbres que le paysage se ferme. On me le faisait remarquer, on ne voyait même plus les coureurs du tour de France dans les Vosges ; ils étaient absorbés par un tunnel vert. Comment ces territoires peuvent-ils développer le tourisme et l'agriculture ? L'Assemblée nationale a supprimé nos dispositions, rétablissons-les. Je rappelle qu'elles concernent les seules zones de montagne où le taux est supérieur à 70 %.
De la même façon, faut-il un plan de desserte forestière tous les ans ? Je ne le crois pas, revenons à la version du Sénat.
Bref, nous tenons le bon bout. Une chose m'inquiète cependant. Depuis la disparition du fonds national, les forestiers se sont regroupés ; ils ont créé une contribution volontaire obligatoire, une taxe sur les produits industriels. Après n'avoir pas vu plus loin que le bout de leur nez lors de la suppression du fonds national, ils se sont repris et ont créé une interprofession, en amont comme en aval.
L'écrasante majorité des professionnels sont attachés à l'unité pour mener des actions collectives utiles à toutes les essences et régions. Une infime minorité de Gaulois veulent des interprofessions par région ou par essence, porte ouverte à la balkanisation. Ce serait criminel, au moment où l'État recrée un fonds stratégique.
Je n'ai pas réussi, sinon à être meilleur que Didier Guillaume ce qui est impossible, du moins à parler deux fois moins longtemps. (Sourires et applaudissements sur tous les bancs)
M. Joël Labbé . - Douze minutes pour les écologistes, c'est inhabituel, j'essaierai d'être moins long...
Le lien entre agriculture, alimentation, territoire et citoyens est enfin fait : cette loi exprime la volonté d'une transition, souple mais réelle, dans l'intérêt de la nation et au-delà. Stéphane Le Foll a dit vouloir faire de la France le leader européen de l'agro-écologie : c'est fort, c'est noble.
Nombre de nos amendements ont été adoptés, au Sénat comme à l'Assemblée nationale. Cette fois, je me suis limité à une trentaine, auxquels je suis attaché.
La compétitivité à tout crin me dérange, bien que ce mot soit dans l'air du temps. L'échange de semences entre exploitations ne doit pas être limité aux GIEE.
La méthanisation n'est pas la panacée, et ne doit pas conduire à l'industrialisation à outrance, comme à la ferme des mille vaches. La puissance des méthaniseurs doit être limitée. À la méthode d'élevage sur caillebotis, doit être substituée l'ancienne méthode, noble, d'élevage sur paille. Vous pouvez sourire, monsieur Bizet !
Nous voulons renouer les liens entre agriculteurs, élus et consommateurs. Quant aux CDPENAF, l'adoption de notre amendement sur les fermes biologiques serait un signe fort. Un avis simple doit au moins être rendu pour tous les PLU ; on a trop consommé d'espaces agricoles et forestiers.
Je ne suis pas un marchand de tapis : nous voterons cette loi. Mais au nom de la confiance réciproque, il faut avancer sur ces questions.
L'agro-écologie doit se défaire de la dépendance aux pesticides et à l'agrochimie. Comment mieux cibler la recherche vers l'agro-écologie ? Nous nous sommes battus pour les solutions naturelles peu préoccupantes. Une grande avancée a été faite à l'Assemblée nationale.
L'aide bénévole des citadins doit être encadrée par un contrat.
Oui, le pastoralisme doit vivre, le loup aussi.
M. Didier Guillaume, corapporteur. - Bien sûr !
M. Joël Labbé. - Le déséquilibre vient de l'absence des hommes dans les nouveaux élevages. Le loup n'attaque pas l'homme. Tout est une question d'équilibre.
Il y a eu une grande avancée sur les Safer. Priorité sera donnée à l'installation sur l'agrandissement. Mais s'agissant des parts de société, l'intérêt général n'arrive pas à s'imposer. Les fermes de mille vaches savent déjà comment contourner la loi.
Le code des bonnes pratiques sylvicoles ne nous convient pas, j'y reviendrai. (Applaudissements à gauche)
M. Jean-Jacques Lasserre . - L'agriculture française est dans un état préoccupant. La recherche de la triple performance économique, écologique et sociale est un bel objectif.
Nous aurions souhaité plus d'ambition, pour redonner de la confiance. Cependant, le Parlement a bien travaillé, et je salue le travail de la commission.
Il faut donner un nouveau souffle à l'agriculture française. La concurrence avec nos voisins européens est de plus en plus tendue. Ce texte n'est qu'un toilettage intéressant, non une loi d'avenir. La place faite à l'environnement occulte l'impératif de compétitivité.
M. Jean Bizet. - Très juste.
M. Didier Guillaume, corapporteur. - Qu'aurait-il fallu mettre dans cette loi ?
M. Jean-Jacques Lasserre. - Le Gouvernement n'a pas pris la mesure des efforts faits par les agriculteurs pour préserver l'environnement. Trouvons un juste équilibre entre économie et écologie.
La protection contre les risques naturels est absente de ce texte, l'actualité le rappelle. De même, rien sur la PAC : les aides directes, « verdies », seront désormais soumises à des conditions catastrophiques, comme le maintien des parcelles d'intérêt écologique, ce qui est problématique dans les régions de monoculture, notamment maïsicole.
Le travail en commission a cependant été remarquable. Sur l'épandage des pesticides, un équilibre a été trouvé. Ce sujet délicat ne peut être réglé au détriment des exploitants agricoles. De même, la question foncière, complexe, a été abordée prudemment. Autre compromis, sur la clause miroir et le bail environnemental.
La création d'un registre agricole est une excellente chose. Je salue les efforts faits pour la pluriactivité.
Nous espérons que les avancées réalisées au Sénat seront entérinées. Quant aux OGM...
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. - PGM !
M. Jean-Jacques Lasserre. - ... il faudra une réflexion d'ensemble. Un grand chantier doit s'ouvrir sur les aléas climatiques, comme sur la relation entre les producteurs et la distribution - le médiateur ne suffira pas.
Les chambres d'agriculture nous alertent sur leurs finances : pertes de ressources fiscales, prélèvements sur fonds de roulement... Souhaitons qu'une RGPP bis ne les détruise pas.
M. Didier Guillaume, corapporteur. - La première a été terrible !
M. Jean-Jacques Lasserre. - Errare humanum est, perseverare diabolicum.
Le triste et récent exemple du « fait main » nous inquiète (M. Joël Labbé approuve) : les décrets d'application doivent respecter l'esprit des lois. Nous souhaitons être rassurés sur les AOC. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Didier Guillaume, corapporteur. Très bien !
M. Gérard Le Cam . - En Bretagne, on a coutume de dire « solide comme un Breton, dur comme le granit ». Stéphane Le Foll ne démentira pas l'adage.
Ce projet de loi est une véritable loi d'orientation. Depuis vingt ans, le nombre de fermes a été réduit de moitié, quand les grandes exploitations augmentaient de 40 hectares en moyenne. Elles concentrent désormais 80 % du potentiel économique. D'où les difficultés des jeunes à trouver des terres, à les financer et à s'installer.
Nous saluons les équilibres trouvés. Les GIEE seront utiles pour diffuser les bonnes pratiques. De même, nous approuvons le renforcement des Gaec.
Le projet de loi permet aux Safer de faire jouer leur droit de préemption pour acquérir l'usufruit de terres agricoles ou la totalité de parts de sociétés à objet agricole. L'Assemblée nationale a bien fait d'adopter un amendement les autorisant à préempter également la nue-propriété agricole. C'était une de nos propositions. Nous aurions aimé étendre ce droit à la cession de la majorité et, pas seulement de la totalité, des parts de sociétés agricoles mais l'article 40 nous a été opposé.
Les articles qui encouragent l'installation ont été votés conformes. Nous proposerons de faciliter la pluriactivité et de diversifier les aides à destination de ceux qui s'installent après 40 ans et n'ont pas de diplômes.
Les banques doivent être mises au service de l'économie réelle et en particulier de l'agriculture. Nous demandons la renationalisation du Crédit agricole et le renforcement du mutualisme.
Les préconisations de la mission sénatoriale sur les pesticides n'ont pas toutes été suivies, c'est dommage. Le transfert des AMM à l'Anses pose problème : l'État doit rester maître. La politique d'austérité du Gouvernement et la baisse du budget des services de contrôle nuisent aux objectifs poursuivis. À cela s'ajoutent les menaces liées au traité de libre-échange avec les États-Unis et le Canada.
La forêt aurait mérité un projet de loi dédié. L'ONF mène des actions commerciales qui la détournent de ses missions de service public. Toutefois, le projet de loi contient des mesures positives : fonds stratégique, GIEE... Saluons aussi la lutte contre la vente illégale de bois.
Les DOM-TOM sont soumis à des contraintes propres. En raison de la dérégulation conduite à l'initiative de l'Union européenne, suite à une plainte de l'OMC et du Brésil, une catastrophe économique et sociale se prépare à la Réunion, où les exportations de canne à sucre sont menacées. La fin des quotas et des prix garantis est pour 2017. Sachant que l'exploitation d'un pied de canne dure de cinq à huit ans, il faudrait y voir clair dès maintenant pour prévoir les plantations
La libéralisation se fait au détriment des hommes et de l'environnement. Nous avons besoin d'un nouveau modèle. Les pistes intéressantes proposées ici trouveront vite leurs limites, si l'on ne s'attaque pas au fond du problème.
Nombreuses sont les lois qui ont combattu sans succès les pratiques commerciales déloyales des grands distributeurs. Là aussi, il faut changer de paradigme. Une autre filière de commercialisation doit être mise en place.
Nous, communistes, sommes matérialistes et réalistes, même si notre politique reste marquée d'utopie : un peuple sans rêve, sans espoir et sans utopie est un peuple perdu. Ne décevons pas le peuple français, il nous attend. (Applaudissements à gauche)
M. Yvon Collin . - À mon tour, j'adresse mes voeux de prompt rétablissement à M. Le Foll.
En première lecture, nous sommes parvenus à un équilibre qu'il nous revient de conforter. Plusieurs amendements du RDSE ont été adoptés : protection des éleveurs contre les loups, comptabilité analytique des Safer, biens de section. Nous proposerons de rétablir cet article d'une haute technicité, dont les subtilités ont peut-être échappé aux députés. Voilà qui témoigne d'un esprit d'ouverture.
Ce projet de loi apporte des réponses opportunes, même si le souci environnemental l'emporte parfois sur le bon sens paysan... Vous voulez concilier performance économique et développement durable ; nous n'avons pas d'autre choix. Les agriculteurs en ont depuis longtemps pris conscience, notamment dans le Tarn-et-Garonne. Les chambres d'agriculture diffusent les bonnes pratiques ; je m'inquiète de la réduction de leurs moyens : on parle d'une ponction de 136 millions d'euros...
Les agriculteurs doivent vivre de leur métier. Ils travaillent beaucoup, pour des revenus souvent médiocres. Aucun autre secteur n'est soumis à tant d'aléas : ceux du marché, ceux du climat, ceux des crises sanitaires...
J'approuve les GIEE, outils de synergie. L'avenir passe par la mutualisation des moyens et des objectifs. Protection des terres et renouvellement des générations comptent également au nombre de nos préoccupations. Le projet de loi initial comportait des mesures satisfaisantes.
Le fonds stratégique permettra de mieux valoriser le bois français. Un effort doit encore être fait pour le bois énergie.
Je veux enfin rappeler mon attachement à une agriculture raisonnée, à visage humain. Nos ambitions nationales doivent être conciliées avec nos engagements européens, ce qui n'est pas toujours facile.
Le RDSE réaffirme son soutien à ce texte. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Gérard Bailly . - Ce projet de loi est examiné dans la précipitation : voté le 10 juillet à l'Assemblée nationale, nous avons eu un samedi, un dimanche, un 14 Juillet puis seulement deux jours ouvrables pour l'examiner. Madame la ministre, soyez notre interprète auprès du Gouvernement : si cette loi est importante, le Sénat devrait disposer de plus de temps pour y travailler !
L'agriculture devra nourrir des milliards d'habitants de plus dans les années à venir. Selon la FAO, plus de 800 millions de personnes sont sous-alimentées. Pourquoi ne pas assigner à notre agriculture le bel objectif de nourrir le monde ? Malheureusement, les espaces agricoles reculent, la productivité aussi à cause des méthodes biologiques et de la baisse des intrants. Nos productions animales sont en chute.
Ce projet de loi contient-il la fameuse boîte à outils pour inverser la tendance ? Non, et je ne le dis pas par idéologie ni par plaisir de m'opposer. Le texte impose aux agriculteurs des contraintes supplémentaires, alors qu'ils sont déjà confrontés à tant d'aléas : événements climatiques, épizooties, volatilité des marchés, pratiques de la grande distribution qui s'approvisionne là où les prix sont les plus bas au mépris de la qualité sanitaire.
Comment se satisfaire des dispositions prévues ici sur la recherche ? Le volet sur l'enseignement agricole est bien mince... De même, la question de la transparence des Gaec mérite une clarification. Le bénéfice des GIEE, seule véritable innovation, reste incertain. Le médiateur ne pourra toujours pas trancher les litiges.
Le projet de loi ne projettera pas l'agriculture française dans l'avenir. Le vrai problème est le partage de la valeur ajoutée. N'accrochons pas d'autres boulets aux pieds de nos agriculteurs, à commencer par les exigences environnementales. Sur le bail environnemental, je salue l'amendement de M. Guillaume, même s'il ne règle pas la question des nouveaux exploitants.
La préférence des Safer pour les pratiques biologiques en cas de vente ne doit pas priver de terres les jeunes agriculteurs.
L'article 23 a suscité des craintes. L'Assemblée nationale est parvenue à une rédaction plus équilibrée. À l'article 6, nous avons dit notre opposition à la « clause miroir » qui n'apporte aucune garantie. À l'article 7, de quels pouvoirs réels disposera le médiateur ?
Nous sommes en revanche favorables à l'interdiction de la publicité pour les produits phytosanitaires, qui ne doit pas priver les agriculteurs de l'information nécessaire sur leur usage.
M. Didier Guillaume, corapporteur. - Bien sûr.
M. Gérard Bailly. - Nous nous réjouissons de la protection du nom des collectivités, comme de l'inscription du vin et des spiritueux dans le patrimoine culturel.
Mme la présidente. - Veuillez conclure !
M. Gérard Bailly. - Je regrette d'autant plus le rejet d'un de mes amendements en première lecture qu'un sondage vient de montrer que beaucoup d'agriculteurs quittent la profession pour des raisons financières.
En première lecture, Gérard César a qualifié ce texte de « loi d'accompagnement » plutôt que « d'avenir ». Je ne saurais mieux dire, malgré tout le travail de la commission. Bref, le texte nous déçoit.
Hier, le Tour de France traversait le Jura...
Mme la présidente. - Veuillez conclure !
M. Gérard Bailly. - Le groupe UMP ne pourra pas voter ce texte.
Mme Renée Nicoux . - Mes voeux de prompt rétablissement à Stéphane Le Foll. Nous avons le sentiment du devoir accompli. Un grand nombre d'amendements ont été adoptés au Sénat comme à l'Assemblée nationale, ils confortent les grandes lignes du projet de loi initial tourné vers l'agro-écologie - le terme entre ainsi dans notre droit. L'agro-écologie met en oeuvre de nouvelles pratiques culturales, une nouvelle performance sociale et une moindre utilisation des ressources. La triple performance que le Sénat a introduite à l'article premier l'incarne, il faut la rétablir.
Les GIEE faciliteront les coopérations, ils doivent s'ouvrir aux collectivités territoriales comme aux chambres d'agriculture. L'échange direct de semences au sein de ces groupements sera désormais autorisé, mais il ne concerne que celles qui ne sont pas protégées par un COV ; la possibilité de vente directe doit être autorisée - nous aurons un amendement pour ce faire. Autre avancée, l'amélioration de la transparence des formes sociétaires. La garantie de transparence économique pour les Gaec totaux est un apport du texte. Je note aussi que la transformation de Gaec en EARL sera facilitée.
Une meilleure identification de la population agricole sera rendue possible par la mise en place du registre ; le Sénat a contribué à façonner le dispositif en clarifiant la définition de l'actif agricole.
Le Sénat a bien travaillé, rassurant sur le bail environnemental. Parmi les mesures positives, citons le renforcement des Safer, la prise en compte des spécificités des zones de montagne ou le fonds stratégique pour la forêt. À ce dernier égard, il faut rétablir le droit de déboisement dans les zones de montagne. Qui veut vivre derrière les barreaux d'une prison verte ? En Limousin, nous disons : enfermés dehors.
Ce texte, je le souhaite, devrait être voté à une large majorité dans cet hémicycle. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Jean-Claude Lenoir . - J'ai rencontré ce matin le ministre de l'agriculture à l'aéroport ; nous avons parlé du rendez-vous de ce soir. Je lui adresse à mon tour des voeux de rétablissement.
Je me réjouis du travail constructif et pragmatique fait en commission. De nombreuses avancées doivent être notées. Je suis de ceux qui préfèrent voir le verre de cidre à moitié plein...
M. Jean-Jacques Mirassou. - ... ou le verre d'Armagnac !
M. Jean-Claude Lenoir. - Je n'entrerai cependant pas dans le détail et me ferai le porte-parole des agriculteurs de mon département, que je rencontre ces temps-ci dans les comices.
Ils ont le sentiment d'être encerclés par les règlements et une administration tatillonne, d'être injustement mis au ban. De là la folle rumeur sur la bande des 200 mètres... Encerclés aussi parce que l'avenir se rétrécit, parce que les jeunes se détournent de la profession de leurs parents, de leurs grands-parents et de leurs aïeux. La Basse-Normandie - j'aillais dire la Normandie mais n'anticipons pas (sourires) - est connue pour son élevage. Les éleveurs travaillent dur dans le Perche comme ailleurs, leurs marges diminuent tandis que leurs charges augmentent rapidement. Quand les troupeaux régressent, les paysages changent, les prairies sont retournées pour être mises en culture ; dans les comices, où les bêtes se font rares, on voit apparaître d'énormes machines agricoles.... Les éleveurs ont d'autant plus de ressentiment qu'ils savent qu'en Europe les règles ne sont pas respectées ; les Allemands, par exemple, recrutent leur main-d'oeuvre en Europe de l'Est. Résultat - on n'aurait jamais cru cela possible -, le lait allemand est moins cher que le nôtre.
Madame la ministre, croyez-vous toujours aux propos que vous teniez quand, députée, vous saluiez les efforts du Gouvernement pour la PAC comme une chance pour les petits élevages de 70 à 80 têtes ?
M. Didier Guillaume, corapporteur. - Encore plus !
M. Jean-Claude Lenoir. - Enfin, la relation avec la grande distribution est toujours la lutte entre le pot de terre et le pot de fer.
À chaque loi agricole on entend des discours lyriques ; si une loi permettait de redonner espoir, nous pourrions en voter une par an... Mais le Gouvernement seul a les moyens d'agir. Sachez que l'inquiétude des agriculteurs est forte. Leur silence d'aujourd'hui est un silence de découragement, entendons-le. Enrichissons le texte, chaque petit pas comptera. (Applaudissements à droite)
Mme Françoise Férat . - Ce texte, je le crains, ne rassurera pas nos agriculteurs et les jeunes qui s'engagent dans cette voie de l'enseignement agricole que je connais bien. Nous sommes loin des travaux d'Edgard Pisani...
Secteur traditionnel et secteur d'avenir, notre agriculture, qui représente 19 % de la production européenne, est d'abord un enjeu économique. La compétitivité... La main-d'oeuvre est moins chère de 20 % en Allemagne, voire de 50 % dans les fruits et légumes, non à cause du niveau de revenu, mais du coût du travail et de la multiplication des normes. M. Daniel Dubois en première lecture a proposé la création d'un observatoire de la compétitivité. M. Daniel Raoul s'était engagé à former un groupe de travail sur les distorsions de concurrence du fait de l'écart entre normes nationales et européennes. Et n'oublions pas la compétitivité de nos industries agroalimentaires.
L'enseignement agricole... Le texte affiche de belles ambitions pour faire de la France le leader de l'agro-écologie. Cela suppose de former les jeunes. Malheureusement, aucune avancée sur ce sujet. Pourquoi ne pas avoir repris les sept recommandations du rapport très fourni de l'Observatoire national de l'enseignement agricole ? Nouvelle organisation ancrée sur les territoires, mais d'excellence, démarche partenariale... autant de points sur lesquels ce projet de loi constitue un rendez-vous manqué. Le ministre s'est engagé à remettre sur pied l'Observatoire, en panne depuis un an ; nous l'attendons.
J'ai redéposé quelques amendements espérant plus de succès qu'en première lecture.
Je félicite les rapporteurs pour leur sens politique et leur connaissance du sujet. Grâce à leur travail, nous avons amélioré le texte initial. (Applaudissements au centre et à droite)
Mme Bernadette Bourzai . - Ce texte, co-construit malgré un calendrier contraint, vise à donner à notre agriculture les outils de l'avenir : améliorer l'autonomie alimentaire du pays et de l'Europe, exporter nos productions, contribuer à l'approvisionnement des pays déficitaires - sans chercher, monsieur Bailly, à nourrir la planète... Tout cela en conformité avec le verdissement de la PAC, un choix fait par le Conseil en codécision avec le Parlement européen.
Je concentrerai mon propos sur la forêt. Enfin, on reconnaît sa multifonctionnalité, ses fonctions d'intérêt général ; des outils de gestion collective sont mis en place. Je salue le maintien du droit de préférence des communes en cas de vente de parcelles de moins de 4 hectares. Je souscris aux propos de M. Leroy sur les zones sur-boisées ; nous aurons un débat sur les sous-sections spécialisées forestières. Ce texte renforce également la lutte contre la vente illégale de bois.
Le Sénat a consolidé le dialogue entre chasseurs et forestiers ; merci à MM. Mirassou et Leroy. La création d'une instance de concertation paritaire autorisera un meilleur équilibre sylvo-cynégétique dans les régions affectées par les dégâts de gros gibier. Tout cela va dans le sens d'une gestion durable et pacifiée de la forêt, de même que l'amélioration de la représentation des chasseurs dans divers organismes.
L'enjeu économique est majeur : la France possède la troisième forêt d'Europe et, malgré cela, sa balance commerciale bois est déficitaire. De là l'importance du fonds stratégique qui doit être convenablement abondé.
La sécurité sanitaire est un autre volet de ce projet de loi. La limitation de l'usage des produits phytosanitaires et des antibiotiques vétérinaires est un objectif salutaire. Avec Nicole Bonnefoy, je défendrai des amendements pour réduire encore leur utilisation. Je me félicite de la promotion des méthodes alternatives, notamment du bio-contrôle. Nous sommes sortis par le haut du dossier des préparations naturelles peu préoccupantes, qui était bloqué.
Que nos débats soient riches comme en première lecture pour redonner à l'agriculture et à nos agriculteurs confiance en l'avenir. Moi aussi, monsieur Lenoir, je réponds aux questions dans les comices agricoles et je fais des réponses positives, entre autres en évoquant cette loi. Le Gouvernement peut compter sur le soutien du groupe socialiste. (Applaudissements à gauche)
M. Jean Bizet . - Je m'associe aux voeux de prompt rétablissement à M. Le Foll. Mme Delga est tout à fait à sa place au banc de par ses fonctions, nous lui adresserons quelques messages...
Ce texte, avec ses volets sociaux et environnementaux, répond-il aux changements qui interviendront avec le pacte transatlantique ? Non. Les États-Unis, eux, se sont dotés avec le Farm Bill d'une vraie force de frappe économique. Répond-il à la baisse tendancielle des fonds communautaires ? Non. Aux fluctuations du revenu des agriculteurs ? Pas davantage. Un revenu affecté par les aléas climatiques mais aussi par le rapport de force avec la grande distribution. En Allemagne, la concertation a abouti à une hausse de 9 % du prix du lait...
Cette loi d'avenir, je le regrette, n'a d'avenir que le nom. Je l'avais déjà dénoncé quand il avait été décidé de verdir la PAC. L'Europe nage à contre-courant, et la France est distancée par l'Allemagne et les Pays-Bas. Quant à nos filières agroalimentaires, elles pâtissent du défaut de restructuration, notamment celle des viandes blanches. Cela ne date pas d'hier, je le concède. Les agriculteurs font face à une administration tatillonne, à des exigences environnementales toujours plus fortes, à un partage de la valeur ajoutée toujours aussi inéquitable. Le ministre de l'agriculture s'était engagé, le 27 mai dernier, à viser le produire plus et mieux. Mais la volonté politique manque... Et nos PME de transformation n'ont pas les marges qui leur permettraient de se moderniser.
Quelques remarques pour finir. Le GIEE qui n'est pas à la hauteur des enjeux et compliquera sans doute les choses. Le transfert des AMM à l'Anses est irrationnel, les fonctions d'expertise et de décision doivent être séparées.
Le statut de l'animal a un poids, une signification et des conséquences, a dit Mme la garde des sceaux. Il sera en effet dévastateur et emportera des dérives catastrophiques pour les éleveurs. Je m'étonne qu'un ancien ministre de l'agriculture se soit prêté à cet exercice.
M. Jean-Jacques Mirassou. - C'était au troisième degré !
M. Jean Bizet. - Un étiquetage nutritionnel serait discriminant ; il se profile pourtant dans le projet de loi de santé publique de Mme Touraine : attention !
Je déplore comme le président Raoul la condamnation de tout projet de recherche et d'innovation. Le Syndicat de la magistrature a publié un communiqué choquant le 11 juillet, appelant en substance à condamner ceux qui entreprennent et saluant ceux qui détruisent le bien d'autrui au nom de l'intérêt général pour créer les conditions du débat public...
S'il n'y a pas de politique sans risque, il y a des politiques sans chances : nous ne donnons pas, madame la ministre, toutes ses chances à l'agriculture de France.
Pour finir sur une touche finale plus heureuse, je regarderai le verre de cidre ou de calvados à moitié plein...
M. Jean-Claude Lenoir. - C'est un peu trop !
M. Jean Bizet. - ... et saluerai l'engagement de nos rapporteurs, ainsi que du président Raoul. Je serai attentif au sort qu'ils réserveront à nos amendements.
Mme Carole Delga, secrétaire d'État . - Les relations avec la grande distribution sont un sujet de préoccupation du Gouvernement. Le médiateur est au travail et des contrôles sont diligentés ; si des manquements sont constatés par la DGCCRF, il y aura des sanctions. Nous avons tenu cet après-midi à Bercy une réunion avec tous les acteurs ; un soutien particulier aux PME a été évoqué. M. Le Foll a confirmé le plan en faveur des producteurs de fruits. Des modifications sont à apporter à la LME - il est bon de reconnaître que les dispositifs votés ne sont pas toujours opérationnels.
M. Jean Bizet. - Exact !
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. - Dans la situation budgétaire préoccupante du pays, les chambres d'agriculture, comme l'État, les collectivités territoriales ou les Français, doivent contribuer à l'effort ; il sera mesuré.
Le président de la République et Stéphane Le Foll ont obtenu un accord historique sur la PAC, très favorable pour la France. L'élevage souffre, nous le savons, d'où des dispositifs de soutien à ce secteur qui impose un travail 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 - mes origines me le rappellent.
Les installations classées porcines ont bénéficié d'un allègement des normes. Une partie des entreprises agricoles bénéficient du CICE ; les coopératives, elles, tireront profit de la disparition progressive de la C3S.
L'étiquetage doit être clarifié, il faut qu'il soit plus lisible sans être simpliste, avoir une vertu pédagogique. Nous y travaillons avec Mme Touraine.
M. Jean Bizet. - C'est une fausse bonne idée !
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. - Laissez-nous travailler, vous serez surpris.
M. Jean Bizet. - Une grande confiance n'exclut pas une petite méfiance...
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. - Ni une grande vigilance ! (Marques d'appréciation)
Le « fait maison » est une affaire complexe en raison de la complexité de la cuisine française.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. - C'est pour ça qu'on l'aime !
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. - La deuxième étape sera le titre de maître-restaurateur.
Monsieur Le Cam, l'agriculture participative, qui se rapproche du modèle de l'économie sociale et solidaire, n'est pas oubliée ; nous pourrons mobiliser des financements.
Le texte porte une attention particulière à l'installation des jeunes et la transmission avec le contrat de génération. Oui, l'adoption de nouvelles pratiques agro-écologiques passe par la formation.
La forêt doit être fortement soutenue. L'organisation des multiples acteurs doit peut-être être dirigée par l'État... En montagne, la forêt descend et menace l'agro-pastoralisme ; M. Leroy a raison, une politique de limitation est utile.
Précipité, ce projet de loi ? Les travaux ont commencé en janvier. Le ministère s'est montré très à l'écoute et très attentif pour défendre les avancées trouvées au Parlement. Stéphane Le Foll complètera ces réponses demain. Oui, il faut toujours voir le verre à moitié plein...
M. Jean-Claude Lenoir. - Le verre de cidre !
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. - Stéphane Le Foll appréciera... Faisons de cette loi d'avenir une loi riche de promesses et effective, pour notre agriculture et pour la France. (Applaudissements à gauche)
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. - La commission se réunira demain à 9 h 30 pour examiner les amendements. La discussion en séance s'arrêtera à 18 heures pour reprendre lundi.
Mme la présidente. - Je souhaite à mon tour un prompt rétablissement à M. le ministre Le Foll.
Prochaine séance aujourd'hui, vendredi 18 juillet 2014, à 10 h 30.
La séance est levée à minuit trente-cinq.
Jean-Luc Dealberto
Directeur des comptes rendus analytiques
Ordre du jour du vendredi 18 juillet 2014
Séance publique
À 10 heures 30 et à 14 heures 30
Présidence : Mme Christiane Demontès, vice-présidente
Secrétaires :
Mme Michelle Demessine - Mme Marie-Noëlle Lienemann
Suite de la deuxième lecture du projet de loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt (n° 718, 2013-2014)
Rapport de MM. Didier Guillaume et Philippe Leroy, fait au nom de la commission des affaires économiques (n° 743, 2013-2014)
Texte de la commission (n° 744, 2013-2014)