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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Engagement de procédure accélérée

Retrait de questions orales

Questions prioritaires de constitutionnalité

Questions orales

Formation des policiers municipaux

M. Yvon Collin

M. Thierry Repentin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes

Résidences mobiles de loisirs

M. Bernard Piras

M. Thierry Repentin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes

Dotation d'équipement des territoires ruraux

M. Alain Fouché

M. Thierry Repentin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes

Redécoupage des cantons et des intercommunalités

M. Jean Louis Masson

M. Thierry Repentin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes

Référence démographique dans les scrutins

M. Jean Boyer

M. Thierry Repentin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes

Retrait de la France de l'Onudi

M. Richard Yung

M. Thierry Repentin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes

Réglementation européenne sur les cosmétiques

M. Jean-Luc Fichet

M. Thierry Repentin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes

Ligne Paris-Limoges-Toulouse

M. Jean-Pierre Demerliat

M. Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation

DGCCRF dans le Pas-de-Calais

M. Dominique Watrin

M. Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation

Ligne à grande vitesse (I)

M. Raymond Couderc

M. Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation

Logement en milieu rural

Mme Michelle Demessine

Mme Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement

Écoles de reconversion professionnelle

Mme Françoise Cartron

Mme Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement

Fisac

M. Jean-Claude Lenoir

Mme Sylvia Pinel, ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme

Frais de transport des stagiaires du CNFPT

M. Antoine Lefèvre

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique

Inao à Narbonne

M. Roland Courteau

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique

Allocation de solidarité pour les personnes âgées

M. Michel Vergoz

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille

Directeurs de soins

Mme Françoise Boog, en remplacement de Mme Marie-Thérèse Bruguière

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille

Praticiens de santé diplômés à l'étranger

M. Yves Krattinger

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille

Restauration scolaire

M. Bernard Fournier

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille

Ligne à grande vitesse (II)

M. Jean-François Humbert

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille

Lutte contre le dopage (Débat)

M. Jean-François Humbert, président de la commission d'enquête

M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur de la commission d'enquête

M. Michel Le Scouarnec

M. Stéphane Mazars

M. Jean-Vincent Placé

Mme Chantal Jouanno

Mme Danielle Michel

M. Alain Dufaut

Mme Valérie Fourneyron, ministre des sports, de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative

Accord en CMP

Industrie du tourisme (Débat)

M. David Assouline, président de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois

M. Luc Carvounas, co-rapporteur pour la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois

M. Louis Nègre, co-rapporteur pour la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois

M. Jean-Jacques Lasserre, co-rapporteur pour la commission des affaires économiques

M. Jean-Michel Baylet

Mme Corinne Bouchoux

Mme Évelyne Didier

M. Jean-Jacques Mirassou

M. Michel Bécot

Mme Colette Giudicelli

Mme Hélène Masson-Maret

Mme Sylvia Pinel, ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme




SÉANCE

du mardi 15 octobre 2013

9e séance de la session ordinaire 2013-2014

présidence de M. Jean-Patrick Courtois,vice-président

Secrétaires : M. Hubert Falco, M. François Fortassin.

La séance est ouverte à 9 h 35.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Engagement de procédure accélérée

M. le président.  - En application de l'article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l'examen du projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République italienne pour la réalisation et l'exploitation d'une nouvelle ligne ferroviaire Lyon-Turin, déposé sur le Bureau de l'Assemblée nationale le 28 novembre 2012 et du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine de la santé, déposé sur le Bureau de l'Assemblée nationale le 2 août 2013.

Retrait de questions orales

M. le président.  - J'informe le Sénat que les questions orales n°505 de M. Ambroise Dupont et n°532 de M. Jean-Pierre Leleux sont retirées du rôle des questions orales et, par conséquent, de l'ordre du jour de la séance du 29 octobre 2013, à la demande de leur auteur.

Questions prioritaires de constitutionnalité

M. le président.  - M. le président du Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courriers en date du vendredi 11 octobre 2013, trois décisions du Conseil sur des questions prioritaires de constitutionnalité portant sur les articles premier et 3 de la loi du 13 juillet 2011 visant à interdire l'exploration et l'exploitation des mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique et à abroger les permis exclusifs de recherches comportant des projets ayant recours à cette technique ; le troisième alinéa de l'article L. 264-2 du code de l'action sociale et des familles ; l'article L. 43 du code des pensions civiles et militaires de retraite dans sa rédaction issue de la loi du 28 décembre 2011 de finances pour 2012.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions orales.

Formation des policiers municipaux

M. Yvon Collin .  - Ma question s'adresse au ministre de l'intérieur et porte sur les rigidités réglementaires qui corsètent la formation de la police municipale. L'affectation, par une commune du Tarn-et-Garonne, d'un gendarme totalisant une vingtaine d'années de service à une mission de police municipale est subordonnée à une formation dont l'utilité est incertaine. Il se retrouve, curieusement, en stage d'observation alors qu'il dispose déjà d'une solide expérience. Il devrait être dispensé de formation initiale et simplement contraint à une formation continue normale en cours de carrière. Le problème est plus général : le dispositif de formation ne pourrait-il être assorti de dérogations en fonction des profils recrutés ?

M. Thierry Repentin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes .  - Le ministre de l'intérieur étant en déplacement avec le Premier ministre, j'ai la charge de vous répondre. Le décret du 17 novembre 2006 portant statut particulier du cadre d'emploi précise que les agents de la police municipale doivent suivre, préalablement à leur prise de fonctions, une formation obligatoire de six mois, qui comprend un stage d'observation au sein d'autres services liés à la sécurité, judiciaires ou sociaux. Lors du débat au Sénat, le 24 janvier 2013, sur la police municipale, le ministre de l'intérieur avait annoncé une mission de réflexion confiée au préfet Blanchou. Cette mission a conclu que l'origine professionnelle des policiers municipaux ne saurait les dispenser de tout ou partie de la formation ; il importe en effet qu'ils puissent s'approprier leur nouveau métier et leur nouvel environnement professionnel. Il n'est donc pas envisagé de modifier la réglementation.

Toutefois, les parcours de formation doivent être individualisés et adaptés à l'expérience acquise -un stage d'observation ne doit pas avoir lieu, pour un gendarme par exemple, dans son arme d'origine.

M. Yvon Collin.  - Je n'ai pas senti une grande ouverture dans votre réponse... Les élus ruraux connaissent bien l'expérience des gendarmes, qui ont toutes compétences pour faire de bons policiers municipaux. Envoyer un gendarme en stage en gendarmerie me paraît effectivement farfelu. La formation doit être adaptée au parcours professionnel antérieur de l'agent.

Résidences mobiles de loisirs

M. Bernard Piras .  - Je souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la réglementation applicable aux résidences mobiles de loisir en matière de stationnement dans un camping accueillant moins de vingt personnes et comprenant trois résidences mobiles de loisirs.

Le fait de raccorder une résidence mobile de loisir à un assainissement non collectif conduit-il à ne plus l'assimiler à une caravane ? En matière de stationnement, doit-elle être considérée comme une caravane ou une habitation légère de loisir ?

M. Thierry Repentin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes .  - Au titre de l'article R. 111-33 du code de l'urbanisme, une résidence mobile de loisir est un véhicule terrestre habitable destinée à une occupation temporaire ou saisonnière, pouvant être facilement déplacée mais interdite de circulation. Ce n'est donc ni une caravane ni une habitation légère de loisirs. C'est une installation à part entière.

Son raccordement à un assainissement non collectif est possible sous réserve qu'elle puisse en être désolidarisée rapidement et à tout moment. Une résidence mobile de loisirs ne peut être installée que dans un parc résidentiel de loisirs, un terrain de camping ou un village de vacances classé en hébergement léger.

M. Bernard Piras.  - Merci pour la précision de votre réponse. Mme le maire d'une petite commune de la Drôme en sera ravie.

M. Thierry Repentin, ministre délégué.  - Elle le mérite...

Dotation d'équipement des territoires ruraux

M. Alain Fouché .  - Le président de la République s'est engagé, en 2012, à mettre en place un fonds pour venir en aide aux départements qui ne pouvaient faire face à l'explosion de leurs dépenses sociales. Comment sera-t-il réparti ? 80 % du fonds auraient été octroyés à des départements socialistes ou divers gauche. La Corrèze est le département le plus aidé, avec 13 millions d'euros... Alors que le fonds servait à compenser des dépenses à caractère social, celles-ci ne représentent que 46 % de son budget, alors que des départements y consacrant plus de 50 %de leur budget, comme le mien, ne bénéficient pas du fonds... Trois départements ont bénéficié de 30% de l'enveloppe, la Corrèze, le Tarn et la Guyane. Le soutien de l'État doit être égal à situation identique.

Vous connaissez l'inquiétude des élus locaux quant à la dégradation des finances locales, qui s'aggrave encore avec la réforme des rythmes scolaires. Ce nouveau transfert de charges aux collectivités doit être compensé par l'État.

M. Thierry Repentin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes .  - La réponse m'a été communiquée par Mmes Lebranchu et Escoffier. L'engagement du président de la République a été tenu. La loi de finances rectificative du 30 décembre 2012 a créé un fonds exceptionnel de soutien aux départements en difficulté ; les 85 millions d'euros de sa première section sont répartis au profit de la moitié des départements les plus mal placés au regard d'un indice synthétique tenant compte du pourcentage de bénéficiaires de l'APA, du RSA et de la PCH, pondéré par la population du département. Au titre de la seconde section, dotée également de 85 millions d'euros, des subventions exceptionnelles peuvent être versées à des départements dont la situation financière s'est dégradée du fait du poids de leurs dépenses sociales.

Chaque département peut déposer un dossier de candidature pour bénéficier de cette seconde section ; 57 d'entre eux l'ont fait. L'Inspection générale de l'administration a été missionnée par le ministère en charge de la fonction publique et de la décentralisation pour examiner leur éligibilité. Elle proposé une liste de départements éligibles au regard de six critères, dont trois concernent les dépenses sociales qu'ils prennent en charge et trois leur situation financière. Elle a préconisé de rendre éligibles les départements dont la situation est jugée critique pour quatre critères sur six. La Vienne, votre département, remplit trois critères. La Guyane en remplit six, la Corrèze et le Tarn, cinq. Au total, 23 départements ont bénéficié de cette aide exceptionnelle ; ils devront signer une convention avec l'État. Il n'y a donc aucun arbitraire. J'ajoute que le précédent gouvernement, au travers du fonds d'urgence de 2011, avait davantage aidé la Corrèze et le Tarn que celui-ci...

M. Alain Fouché.  - Je ne suis pas d'accord avec ces critères. Ils défavorisent les départements qui ont su gérer leurs dépenses sociales. Faut-il y voir une prime à la mauvaise gestion ? De nombreux départements ne sont pas satisfaits. La prochaine fois, il faudra faire autrement.

Redécoupage des cantons et des intercommunalités

M. Jean Louis Masson .  - Chaque fois qu'un gouvernement redécoupe des circonscriptions électorales, il est l'objet, à tort ou à raison, de multiples accusations de charcutage ou de dévoiement du suffrage universel. Ce qui est fait actuellement pour la carte cantonale n'est pas parfait mais n'est pas pire que ce qui a été fait en 2009 avec les circonscriptions législatives.

M. Thierry Repentin, ministre délégué.  - C'est vrai.

M. Jean Louis Masson.  - Dans la Moselle, on avait assisté à un tripatouillage épouvantable ; la commission des lois de l'Assemblée nationale avait dû voter un amendement pour rectifier les choses. Le Conseil constitutionnel avait lui-même considéré ce charcutage douteux ; mon département avait fait l'objet d'un avis négatif du Conseil d'État et de la commission de contrôle. Je ne comprends pas que ceux qui ont avalisé une telle opération viennent à présent se plaindre. Un élu malfaisant peut à lui seul provoquer des turpitudes inacceptables...

Il est nécessaire de poser des règles et principes ; le Gouvernement doit les préciser. On ne peut se contenter de vagues indications sur les limites des intercommunalités ou la règle des 20 %. Comment, monsieur le ministre, le Gouvernement procède-t-il à ses arbitrages ?

M. Thierry Repentin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes .  - Les règles sont écrites. La jurisprudence constitutionnelle guide le travail du ministère de l'intérieur. Le 16 mai 2013, le Conseil a rappelé que l'organe délibérant du département doit être élu selon des bases essentiellement démographiques, de manière à préserver l'égalité devant le suffrage. Il a relevé que si le législateur peut tenir compte de considérations géographiques, comme l'insularité ou le relief, ou d'autres impératifs d'intérêt général, il ne saurait le faire que dans une mesure limitée. La règle selon laquelle les limites d'arrondissements doivent être respectées est caduque ; le redécoupage peut s'en affranchir.

Le premier principe est donc le respect des critères démographiques. Il n'y est fait exception que pour tenir compte de réalités géographiques spécifiques. La carte cantonale existante et la carte des bassins de vie établie par l'Insee en 2012 sont des références pour l'établissement de la carte intercommunale. Le préfet peut se fonder sur des caractéristiques géographiques particulières ou l'existence de zones de montagne pour y déroger. Les discontinuités territoriales doivent être supprimées, sans dérogation possible. La nouvelle configuration géographique des intercommunalités n'est pas retardée. Le Gouvernement veille à ce qu'elle aboutisse dans les plus brefs délais et soit acceptée localement. Pour le redécoupage cantonal, la validation par le Conseil d'État précédera le recueil de l'avis des départements.

M. Jean Louis Masson.  - Précision intéressante que la hiérarchie des critères qui découle de votre réponse. Nous étions auparavant dans le flou. Si le Gouvernement s'y tient...

M. Thierry Repentin, ministre délégué.  - N'en doutez pas !

M. Jean Louis Masson.  - ...c'est important. Je prends note du rôle prépondérant des 20 %. On n'y déroge que pour des raisons fondamentales. Le critère des limites de canton et d'intercommunalité devient accessoire, c'est important pour mon département. S'agissant du découpage des intercommunalités, jusqu'à quelle date limite peuvent subsister des dérogations ? Question importante pour la Moselle. J'y reviendrai donc.

M. Thierry Repentin, ministre délégué.  - Soit.

Référence démographique dans les scrutins

M. Jean Boyer .  - Monsieur le ministre, j'ai gardé de vous un excellent souvenir, quand nous travaillions sur les parcs. Vous êtes un homme bien. (Applaudissements sur les bancs socialistes ; M. le ministre remercie)

Dans la perspective des élections municipales, de nombreux maires nous interrogent sur les règles démographiques applicables. Le recensement pris en compte serait celui de 2011... Quid des recensements complémentaires ?

M. Yvon Collin.  - Bonne question.

M. Jean Boyer.  - Ceux-ci vont modifier les classifications. Cette question concerne particulièrement les communes dont le recensement de 2011 frôle le millier d'habitants. Il est indispensable qu'elles connaissent la bonne référence pour les élections de 2014. Quelle est-elle ?

M. Thierry Repentin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes .  - Merci pour vos propos aimables. Les qualités que vous me prêtez, je les ai acquises ici, dans une institution qui mérite d'être soutenue et valorisée.

Il y a plusieurs types de population légale. La population municipale regroupe les personnes ayant leur résidence habituelle sur le territoire de la commune, incluant les sans-abris et les détenus. La population comptée à part comprend les personnes qui ont leur résidence habituelle dans une autre commune mais ont gardé une résidence dans la commune, par exemple les élèves qui logent pour leurs études dans une autre commune mais dont la famille habite la commune. La population totale est la somme des deux. La population peut être majorée du nombre d'un habitant par résidence secondaire et d'un habitant par place dans une aire d'accueil de gens du voyage. Vous avez donc intérêt à en aménager ! Pour 2014, la population à prendre en compte sera le dernier chiffre authentifié au 1er janvier 2014. Un document est téléchargeable sur le site internet du ministère de l'intérieur. Le gouvernement actuel ne mettra pas en cause ce principe acquis.

M. Jean Boyer.  - Merci pour la clarté de votre réponse. Quand on appelle l'Insee ou le préfet, ce n'est pas toujours aussi clair...

Retrait de la France de l'Onudi

M. Richard Yung .  - Place à l'international. Le retrait de la France de l'Onudi, annoncé le 18 avril 2013, prendra effet au 31 décembre 2014. Cette agence spécialisée des Nations unies accompagne les pays en développement et les pays les moins avancés sur la voie du développement durable. La cause est noble.

Le porte-parole du Quai d'Orsay argue d'un motif budgétaire, mais la contribution obligatoire de la France en 2013 est modeste : 6,3 millions d'euros sur les 4,7 milliards d'euros du budget du ministère des affaires étrangères...

C'est la première fois que la France se retire d'un organisme de l'ONU. Ce désengagement peut nuire au fonctionnement de l'Onudi mais aussi à l'image de la France auprès des organisations internationales comme des pays en voie de développement.

Je regrette le manque de transparence qui a entouré ce retrait, selon une habitude malheureuse du Quai d'Orsay. Quelle sera l'évolution de l'engagement de la France dans l'aide au développement et dans les organisations internationales ?

M. Thierry Repentin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes .  - Laurent Fabius accompagne le président de la République en Afrique du Sud. Ce retrait s'appuie sur une évaluation globale de la performance du système international ; l'Onudi ne répond plus aux objectifs stratégiques de la France dans l'aide au développement. Nous ne sommes pas les seuls à agir ainsi. Les États-Unis, le Canada, l'Australie, le Royaume-Uni ont fait de même et les Pays-Bas s'interrogent à leur tour.

Mais le retrait de l'Onudi n'est pas la première étape d'un désengagement plus large. La France demeure un pilier du système multilatéral. Ce retrait n'a pas remis en cause l'image de la France comme soutien fiable de l'ONU et du multilatéralisme.

La France souhaite la redéfinition de la méthodologie et du barème des quotes-parts et promeut de nouvelles règles de gestion plus économes et plus responsables des organisations internationales. Il s'agit d'être plus performant, moins redondant et plus soutenable. Je regrette néanmoins qu'il n'y ait pas eu de concertation préalable entre l'exécutif et la représentation nationale.

M. Richard Yung.  - Tout le monde sait à quel point le système multilatéral manque d'efficacité, c'est vrai pour l'Onudi comme pour d'autres organisations. Mais nous sommes nombreux à avoir confiance dans le multilatéral. Les États-Unis se retirent parce qu'ils préfèrent le bilatéral, où ils sont plus forts... Votre réponse me convient.

Réglementation européenne sur les cosmétiques

M. Jean-Luc Fichet .  - Dans mon département, les salariés de l'agroalimentaire subissent un nouveau désastre industriel. Je sais que le Gouvernement travaille à un plan et entend ne laisser personne au bord de la route. Mais l'avenir se joue aussi au niveau européen. Les abattoirs allemands mènent une concurrence inique aux abattoirs français, en proposant à leurs salariés des salaires inférieurs à 400 euros par mois.

J'en viens à la question que j'ai déposée sur les suites du rapport White sur les fragrances allergènes dans les produits cosmétiques ; ce rapport ajoute le chloroatranol et l'atranol, présents dans les lichens, à la liste des substances concernées. Or le programme Reach prévoit que chaque substance allergène chimique doit être enregistrée au niveau européen.

Il semble que la Commission européenne s'achemine vers un renforcement de la réglementation en faveur des consommateurs. Mais il faut rassurer les producteurs de substances végétales et d'huiles essentielles qui sont employées depuis des siècles. La filière est source de nombreux emplois et valorise des savoir-faire ancestraux.

M. Thierry Repentin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes .  - Le Gouvernement suit ce dossier avec la plus grande attention. L'innocuité des produits cosmétiques doit être garantie par le fabricant ou l'importateur. Le Règlement « Cosmétiques » comporte déjà des substances prohibées ou soumises à restriction. Le comité permanent pour les produits cosmétiques comprend des représentants français. La réflexion en cours implique les ministres de l'agriculture, de l'écologie et de la santé ; je fais la synthèse de leurs réflexions...

Il s'agit là d'une question de santé publique. Le Gouvernement prend aussi en compte la discussion économique. Je ne manquerai pas de vous faire part par écrit des conclusions du Gouvernement, ainsi qu'au sénateur Claude Haut, élu d'un département producteur de lavande.

Je ferai part de vos inquiétudes à Guillaume Garot et Stéphane Le Foll sur la situation de la filière agroalimentaire dans votre département. Au niveau européen, nous entendons lutter contre le dumping social, le travail low-cost, avec la directive sur le détachement des travailleurs, dont les conditions doivent être mieux contrôlées. Dans un papier soumis en mai dernier à leurs partenaires, le président de la République et la Chancelière Merkel ont posé la question de l'instauration, à terme, d'un salaire minimum européen. Le Gouvernement est mobilisé.

M. Jean-Luc Fichet.  - Merci de votre attention à la question des huiles essentielles. Beaucoup de jeunes s'installent en agriculture pour produire des plantes qui en sont la source.

Le dumping social fait des victimes directes en Bretagne. Pourquoi ne pas mettre en place ce Smic européen ? Nous espérons que vous aboutirez vite, l'agroalimentaire français ne doit plus subir cette concurrence catastrophique.

Ligne Paris-Limoges-Toulouse

M. Jean-Pierre Demerliat .  - Le déraillement tragique de Brétigny-sur Orge a mis le transport ferroviaire sous le feu des projecteurs. Le rapport Mobilité 21, dans le même temps, met en débat les choix opérés. En Limousin, nous avons besoin et des lignes à grande vitesse et des lignes de proximité, qui sont complémentaires. Notre région ne peut demeurer la laissée-pour-compte de la modernité. Or, à tort sacrifiés pour les lignes à grande vitesse, nos trains intercités, dont le Limoges-Paris, sont inconfortables et vétustes -je ne parle même pas de la restauration à bord... Le réseau ordinaire a été délaissé et ce que la SNCF appelle modernisation n'est guère qu'une remise à niveau indispensable.

Il est temps d'améliorer la ligne Toulouse-Limoges-Paris et de mettre en oeuvre la recommandation du rapport Duron, en concertation étroite avec les élus. Quelle utilisation pour l'enveloppe financière annoncée par la SNCF ? Quid de la modernisation de la ligne Paris-Limoges-Toulouse ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation .  - Le ministre des transports accompagne le président de la République en Afrique du Sud. Je répondrai en son nom. La ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse bénéficie de 500 millions d'euros d'investissements pour la période 2014-2016, dont 110 millions en 2013. Les travaux de rénovation ne suffisent cependant pas, et l'effort devra être soutenu dans la durée. Le Gouvernement a effectué un changement de cap, conformément aux recommandations de la commission Mobilité 21. Les deux tiers des moyens financiers iront à la modernisation du réseau existant -RFF y consacrera 2,5 milliards d'euros par an- et au changement du matériel roulant. C'est dans le cadre du volet mobilité du prochain contrat de plan État-Régions que sera défini le programme de travaux sur la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse. Cette ligne est équipée de rames Corail tractées par des locomotives électriques ; sans être obsolètes, elles sont âgées de près de 35 ans. Le matériel roulant sera intégralement renouvelé d'ici 2025, comme l'a promis le Premier ministre en juillet dernier. Celui de la ligne Polt fera l'objet de la deuxième commande pour une mise en service en 2020. En attendant, 90 millions d'euros seront investis pour sa rénovation entre 2012 à 2015. Soyez assuré de la détermination du Gouvernement.

M. Jean-Pierre Demerliat.  - Ces orientations sont encourageantes et doivent s'appliquer dans les meilleurs délais. La région Limousin ne doit pas être délaissée, y compris pour la grande vitesse. La réalisation du barreau Limoges-Poitiers est essentielle pour développer notre économie en ouvrant la région sur l'Atlantique comme sur l'Europe.

De la position du président de la République, je retiens que le projet n'est pas enterré, mais on peut craindre que le financement repose sur les collectivités territoriales et les fonds européens via les contrats de plan. Il ne faudrait pas que d'autres équipements comme les RN 145 et 147, obsolètes, souffrent de la réalisation du barreau Limoges-Poitiers.

Les contribuables limousins ont participé au financement des TGV ailleurs en France ; il ne serait pas juste qu'ils soient les seuls à payer le leur.

DGCCRF dans le Pas-de-Calais

M. Dominique Watrin .  - Le projet de loi sur la consommation renforce les missions de la DGCCRF mais quid des moyens ? Dans le Pas-de-Calais, les sites d'Arras et de Boulogne ont perdu vingt emplois en six ans, 38 % de l'effectif. Comment, dans ces conditions, exerceront-ils leurs missions, qui visent à protéger la population ? La RGPP a fait des ravages et ne permet plus de répondre aux alertes ; s'y ajoute la réforme de l'administration territoriale de l'État. Une privatisation est même engagée : le classement des hôtels a été délégué à un organisme privé -à quand le contrôle de la restauration ? Les agents s'émeuvent. Comment rendre à ce service public les moyens d'accomplir ses missions ?

Dans le photovoltaïque, certaines entreprises proposent des contrats comportant de fausses informations. Des associations ont demandé à EDF-GDF de contrôler celles qui se présentent comme leurs partenaires. Partagez-vous cette analyse ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation .  - Les effectifs de la DGCCRF ? La RGPP et la Réforme de l'administration territoriale de l'État (REATE) ont conduit la direction à transférer des effectifs vers la direction régionale, si bien que la perte nette d'effectifs n'est pas de vingt mais de deux. Reste que la RGPP et la REATE ont remis en cause la chaîne métier. Le projet de loi sur la consommation donne des missions nouvelles aux agents de la DGCCRF et la commission des finances le confirmera par des moyens augmentés en 2014.

Le conseil interministériel de modernisation de l'action publique a reconnu la spécificité des missions de la DGCCRF et il s'agira donc de rétablir une chaîne de commandement plus claire. J'ai diligenté un rapport qui donnera lieu à propositions d'ici à la fin de l'année.

Depuis 2010, le classement des hôtels est prononcé non plus par arrêté préfectoral mais par Atout France après visite d'un organisme accrédité auprès du Cofrat. Le rôle de la DGCCRF s'en est trouvé reconcentré sur les enquêtes de contrôle : il n'est pas question de déléguer au privé.

Pour les contrats photovoltaïques, un arrêté de mars 2011 a défini les conditions. J'ai demandé à la DGCCRF de veiller. Une enquête a été lancée sur les installations de petite taille. Je vous tiendrai informé.

M. Dominique Watrin.  - L'essentiel est que l'hémorragie soit stoppée. Je me réjouis de vos annonces pour 2014 mais aurais souhaité des engagements chiffrés plus précis. Vous allez garantir la spécificité de la DGCCRF. Je m'en réjouis.

Sur le photovoltaïque, la presse et la télévision ont livré bien des informations alarmantes : il ne faut pas minimiser l'enjeu, au risque de faire perdre confiance aux Français dans les énergies renouvelables.

Ligne à grande vitesse (I)

M. Raymond Couderc .  - Suite aux préconisations de la commission Mobilité 21, le Gouvernement a annoncé le report après 2030 du tronçon à grande vitesse Montpellier-Perpignan, qui constitue le corridor n°6 de l'axe Amsterdam-Madrid-Séville. Il le fait au nom de l'intérêt des citoyens et des territoires. Nos partenaires espagnols ont fait de nombreux investissements et payé 250 millions d'euros d'indemnités compensatoires, comme les collectivités territoriales du Languedoc-Roussillon, qui ont financé les études préalables. Le Gouvernement a néanmoins assuré que les procédures allaient se poursuivre. Mais cela est coûteux et inutile car il faudra entièrement reprendre ces études dans dix ans.

J'ai donc réuni les élus et partenaires français et espagnols concernés dans une conférence de presse pour appeler le Gouvernement à modifier sa décision. Les élus et responsables économiques de la région sont ulcérés. L'Union européenne est prête à financer à 40 % ce petit tronçon de 130 kilomètres. La procédure de DUP et les travaux doivent être lancés.

M. Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation .  - Le projet de ligne nouvelle Montpellier-Perpignan a été retenu en seconde priorité, pour 2030, par la commission Mobilité 21, sachant qu'il fallait revoir le schéma national de transport, infinançable.

Ces priorités ne figent pas définitivement la planification des infrastructures, qui sera revue tous les cinq ans. C'est qu'il faut poursuivre les études de tracé, en partenariat avec les collectivités territoriales, pour pouvoir lancer, le cas échéant, le projet. Sur les 30 milliards d'euros de grands projets qui seront engagés d'ici 2030, 2 milliards sont prévus pour anticiper de premiers travaux en lien avec certains projets classés en seconde priorité par la commission, et notamment le projet de ligne nouvelle Montpellier-Perpignan.

M. Raymond Couderc.  - Les collectivités territoriales vont déjà dépenser 20 millions pour les études. Si l'on poursuit et que les travaux ne sont pas entrepris dans la foulée, ces études seront caduques en 2030. Ne jetons pas l'argent par les fenêtres !

La séance, suspendue à 10 h 55, reprend à 11 heures.

Logement en milieu rural

Mme Michelle Demessine .  - Les projets sur le logement, que vous portez, visent à lutter contre la pénurie de logements et la hausse des loyers. Si nous divergeons parfois sur les moyens, nous partageons vos objectifs. Le monde rural, cependant, qui souffre de pénurie, est oublié. Le dispositif Duflot limitant les abus des dispositifs précédents, exclut les secteurs ruraux, de même que le zonage du logement locatif social. Ainsi, dans le Nord, 26 % des habitants, soit 660 000 personnes, sont exclus des aides publiques. La construction dans les zones les plus rurales a été divisée par deux en quatre ans. Il faut inverser cette logique qui conduit les populations à l'exode vers les zones tendues.

Mme Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement .  - Le Gouvernement entend construire 150 000 nouveaux logements par an, en tenant compte des situations spécifiques des territoires, y compris les territoires ruraux. La répartition de l'offre donne la priorité aux zones tendues. Cette répartition, élaborée en concertation, n'a pas suscité d'observations. La demande des acteurs ruraux est prise en compte. Les zones les plus dynamiques en matière démographique sont les zones rurales. L'offre sociale perdurera, grâce à une large mobilisation de parc existant. J'ajoute que la Palulos permet aux communes de transformer des bâtiments communaux en logements sociaux : 420 logements ont ainsi été créés à partir d'anciens presbytères ou logements d'instituteurs. Nous réfléchissons à un programme de type Anru pour les centres-bourgs afin d'adapter les logements et dynamiser l'offre de services de proximité.

Mme Michelle Demessine.  - Merce de cette réponse. Le plan de requalification des centres ruraux est bienvenu. Nous en vérifierons l'application sur le terrain, avec les acteurs concernés. Il faut se mobiliser.

Écoles de reconversion professionnelle

Mme Françoise Cartron .  - Depuis un siècle, les écoles des mutilés, devenues écoles de reconversion professionnelle, ont oeuvré pour la reconversion des anciens combattants. Mais aujourd'hui, ces neuf établissements ne s'adressent plus qu'à des handicapés de droit commun, leur offrant des formations diplômantes de l'Éducation nationale pour assurer leur reconversion sur des postes qualifiés en milieu ordinaire. Ainsi de l'établissement Robert Lateulade de Bordeaux.

En France, 800 personnes bénéficient chaque année de ces formations, mais ces établissements sont dans l'incertitude : l'Onac semble vouloir s'en séparer, au motif que leurs missions sont désormais sans rapport avec les siennes. Nous craignons un désengagement de l'État. Que deviendront les bâtiments, le personnel et, surtout, la formation des personnes handicapées ? Les représentants des écoles de reconversion professionnelle demandent que ces établissements restent publics et continuent d'assurer leur mission de secteur public de lutte contre l'exclusion. Quelle réponse le Gouvernement entend-il leur apporter ?

Mme Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement .  - Dans le cadre de la modernisation des administrations publiques, le ministre de la défense est chargé d'une évaluation. Une mission conjointe du contrôle général des armées, de l'inspection générale des finances et de l'inspection générale des affaires sociale a remis un rapport. Celui-ci met en évidence les atouts de ces écoles, qui proposent 20 % de l'offre pour la reconversion des personnes handicapées. Il préconise de chercher un repreneur. La mission interministérielle a proposé une expertise pour envisager les modalités d'un tel transfert. Un groupe de travail a été mis en place. Le transfert au secteur marchand est, en toute hypothèse, exclu. Ces établissements seront accompagnés, dans le respect des valeurs du monde combattant.

Mme Françoise Cartron.  - Il faudra revenir vers le personnel pour le rassurer. Qu'un transfert vers le privé ne soit pas envisagé est déjà une bonne nouvelle.

Fisac

M. Jean-Claude Lenoir .  - Le Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (Fisac) est un outil précieux pour le maintien du commerce dans les petites villes et en milieu rural. La taxe sur les grandes surfaces, sanctionnée par Bruxelles, a été remplacée par une dotation de l'État. Mais, par les temps qui courent, les dotations fondent comme neige au soleil. Aujourd'hui, nombre de dossiers demeurent sans réponse.

Des petits artisans, des collectivités territoriales qui veulent aménager leur centre sont bloqués. Le ministre en charge du budget nous a annoncé, l'an dernier, qu'un texte allait intervenir. Or les préconisations du rapport Queyranne ne nous conviennent pas. Il suggère que les opérations locales soient supportées par les collectivités territoriales pour réserver les aides du Fisac aux cas de catastrophe naturelle. Ce serait un transfert de charges inadmissible. Quelles sont les intentions du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme .  - Je partage, monsieur le sénateur, votre analyse. L'effet levier du Fisac est significatif et favorise le maintien de l'activité artisanale. Les dossiers, il est vrai, s'accumulent : 1 800 aujourd'hui, soit quatre années d'exercice budgétaire pour assurer leur financement. Vous m'avez signalé quatre dossiers dans votre département. J'ai diligenté une mission d'évaluation. Dans le cadre du projet de loi à venir au printemps, je proposerai une réforme du Fisac, qui sera préservé. Il s'agit de sortir d'une logique de guichet pour passer à une logique d'appel à projet afin de répondre aux priorités : modernisation collective et aussi maintien de commerces en milieu rural, sécurisation des commerces les plus sensibles, bijoutiers ou buralistes. Pour le stock de demandes, nous travaillons avec le ministre du budget afin de trouver des solutions. Les choix que nous opérerons donneront priorité aux entreprises du commerce et de l'artisanat. Les élus seront associés et les parlementaires qui le souhaitent également, dans l'intérêt de nos territoires.

M. Jean-Claude Lenoir.  - Merci de ces précisions. Puissent les actes suivre les intentions ! J'adhère à cette orientation et confirme mon intérêt à participer à la réflexion. J'appelle votre attention sur l'aide au maintien des pompes à essence en milieu rural...

M. Jean-Michel Baylet.  - C'est un vrai problème !

M. Roland Courteau.  - Exact !

M. Jean-Claude Lenoir.  - Les exigences de mises aux normes vont faire disparaître un grand nombre de stations. On se reportera sur les grandes surfaces. Merci d'avoir étudié les dossiers que j'avais soumis à votre attention car le temps presse.

Frais de transport des stagiaires du CNFPT

M. Antoine Lefèvre .  - En octobre, j'ai présenté au Sénat un rapport sur les enjeux de la formation. Celle des fonctionnaires territoriaux est essentielle alors que l'État se désengage de bien de ses missions dans les territoires. Le centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) est chargé de ces formations. La participation des collectivités territoriales est revenue à 1 % mais elles doivent toujours financer une part des frais de transport, en raison des barèmes retenus qui prennent mieux en charge les déplacements en train que le covoiturage ou la mise à disposition par la collectivité territoriale d'une voiture de service. Les petites collectivités territoriales et leurs agents sont pénalisés, d'autant que les départements ruraux sont moins bien desservis par les transports en commun. C'est le cas de l'Aisne. Les frais de déplacement devraient à nouveau être pris en charge par le CNFPT. Comment entendez-vous rétablir l'égalité de traitement entre collectivités territoriales ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique .  - Le CNFPT est un établissement public à caractère administratif assurant la formation d'agents grâce à une cotisation des collectivités territoriales. En novembre 2012, à mon arrivée, nous étions convenus, avec le président du CNFPT et M. Pélissard, qu'une attention particulière devait être portée aux petites communes. Nous avons rétabli le 1 % pour assurer la solidarité.

Je n'ai pas les mêmes chiffres que vous. En décembre 2012, le CNFPT autorisait à déplafonner un prélèvement sur les collectivités territoriales. Le conseil d'administration a pensé que 0,18 euro du kilomètre ne correspondait pas à la réalité et qu'il fallait passer à 0,15 euro, le covoiturage permettant un remboursement à 0,20 euro. En revanche, pour les transports en commun, le remboursement est total. Le covoiturage de la mairie à la gare pourrait aussi donner lieu à remboursement, il faudra y réfléchir. Si la collectivité territoriale prête un véhicule de service, il n'y a pas de remboursement. Il faudrait soumettre à nouveau cette question au conseil d'administration du CNFPT qui entérinera, après l'adoption du projet de loi de finances, notre attachement au maintien du 1 % ; d'autant que nous sommes déterminés à favoriser la fluidité entre la fonction publique territoriale et la fonction publique d'État. Au bout d'un an, une évaluation est nécessaire. Le président du CNFPT en est conscient.

M. Antoine Lefèvre.  - Merci pour cette réponse. Je suis preneur des chiffres que vous avez évoqués. Une révision est en effet nécessaire pour prendre en compte la spécificité des communes rurales. Elles ne disposent pas d'un parc de véhicules important. Il faut continuer d'améliorer l'accès à la formation de leur personnel.

Inao à Narbonne

M. Roland Courteau .  - Il y a quelques mois, nous interpellions le ministre de l'agriculture sur les incertitudes pesant sur l'institut national de l'origine et de la qualité (Inao) en raison de la décision de son conseil permanent de fermer dix sites, dont celui de Narbonne. Nous souhaitions obtenir des garanties pour son maintien, en raison des atouts de ce site. Nos arguments ont porté puisque les responsables de ce dossier ont réexaminé la situation. Narbonne a été retenue dans le cadre de la réorganisation.

De nouveaux locaux ont été mis à sa disposition mais aucune annonce n'est venue confirmer ces éléments, datant de juillet. Le site de Narbonne est-il bien maintenu ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique .  - Je vous répondrai pour M. Le Foll, qui accompagne le président de la République en Afrique du Sud. L'Inao joue un rôle important. J'ai le plaisir de vous confirmer qu'une expertise a été conduite par le directeur de l'Inao ; au terme d'une concertation approfondie, il est prévu qu'une antenne soit maintenue à Perpignan tandis que seraient conservés les centres de Narbonne et de Montpellier.

La profession viticole et la communauté d'agglomération du grand Narbonne ont fait des propositions intéressantes. Le ministre de l'agriculture a demandé au directeur de l'Inao de vous tenir régulièrement informé de l'état d'avancement du dossier. Vous pouvez confirmer aux élus que la décision est prise : Narbonne ne sera pas oubliée. Et je compte bien répondre bientôt à votre invitation pour constater la beauté de cette cité.

M. Roland Courteau.  - Je suis heureux que nous ayons été compris. Il importe que le site de Narbonne soit maintenu. Merci à vous, au ministre de l'agriculture et au directeur de l'Inao.

Allocation de solidarité pour les personnes âgées

M. Michel Vergoz .  - L'allocation de solidarité pour les personnes âgées (Aspa) a remplacé, en 2004, le fonds national de solidarité. Les personnes de plus de 65 ans qui ont cotisé mais ne perçoivent qu'une faible pension ont droit à cette allocation, qui concernait 576 000 retraités en 2010, dont 65 000 originaires des DOM. Les sommes versées sont récupérables sur succession si l'actif net dépasse un plafond fixé par décret à 39 000 euros, niveau dérisoire, déconnecté de la réalité et de nature à aggraver la précarité. On ne peut s'en satisfaire. Faudra-t-il donc que les personnes âgées les plus fragiles qui se trouvent être propriétaires de leur logement gagent le fruit de toute une vie d'effort ?

Le premier président de la Cour des comptes a souligné devant notre commission des affaires sociales le caractère dissuasif de cette récupération sur succession. Il faut en réévaluer le seuil pour fixer un montant proche du patrimoine médian. Le Gouvernement envisage-t-il de réformer l'Aspa afin qu'elle ne soit plus une indécente avance sur succession et devienne une véritable allocation de solidarité ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille .  - Les allocations de solidarité sont le garant de la solidarité dans notre République et amortissent les effets de la crise. L'Aspa, ex minimum vieillesse, en fait partie. Ell e est versée à toute personne dont les ressources annuelles sont inférieures à 9 325 euros. Puisque c'est une aide sociale, elle doit demeurer sous condition de ressources. Si le montant de la succession est supérieur à 39 000 euros, la puissance publique récupère un montant maximum de 6 093 euros, seuil très bas en effet car l'Aspa s'adresse aux plus démunis. L'Aspa permet à ses allocataires d'éviter de vendre leur habitation principale de leur vivant. Les descendants ont une obligation alimentaire : cette récupération n'est pas anormale.

M. Michel Vergoz.  - Votre réponse rassurante éclaire d'un jour nouveau le problème de l'Aspa. Le formulaire de demande d'Aspa comporte une erreur manifeste au regard de votre réponse, puisqu'il donne à croire que la récupération serait totale. Il est urgent de le revoir pour qu'il soit bien clair que ce ne peut être plus de 6 093 euros.

Directeurs de soins

Mme Françoise Boog, en remplacement de Mme Marie-Thérèse Bruguière .  - Les associations de directeurs de soins s'inquiètent du devenir de leur fonction et de leur statut, qui ont fait l'objet, le 27 mars dernier, d'un mouvement social exceptionnel. La grille salariale qui leur est proposée ne reflète pas l'importance de leurs responsabilités, après un parcours de soignant, puis de cadre.

Cela a pour effet une baisse préoccupante du nombre de candidats au concours annuel. Les directeurs de soins souhaitent une grille identique à celle des directeurs d'hôpitaux. L'État doit tenir sa parole, conformément au protocole du 29 juillet 2011. La situation démographique du cadre est inquiétante. Les directeurs de soins ne sont plus que 800 en activité. Des postes deviennent vacants. Quelles sont les intentions du Gouvernement ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille .  - Les 860 directeurs de soins, dont les statuts et la grille datent de 2002, ont vu leurs missions et leur position se renforcer dans la cadre de la stratégie nationale de santé mise en oeuvre par le Gouvernement. La revalorisation de leur statut et de leur rémunération est justifiée. L'ensemble des agents atteindront un échelon terminal fixé à l'indice brut 1 015, au lieu de 920 précédemment ; ce relèvement indiciaire interviendra en juillet 2015. Le statut d'emploi fonctionnel bénéficiera à 100 directeurs de soins, à l'AP-HP, aux hospices civils de Lyon et à l'APH de Marseille qui atteignent la hors-échelle lettre B. Mme la ministre des affaires sociales et de la santé veillera personnellement à ce que les textes d'application soient publiés vers la fin de l'année.

Mme Françoise Boog.  - Je m'en réjouis.

Praticiens de santé diplômés à l'étranger

M. Yves Krattinger .  - Ma question porte sur les praticiens exerçant en France et diplômés hors Union européenne. En décembre 2012, le Gouvernement a présenté un plan d'action pour résorber les déserts médicaux. La Haute-Saône est concernée. Il faut aller plus loin. La loi du 1er février 2012, votée à l'unanimité, ouvre un examen probatoire aux médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes et pharmaciens, sous certaines conditions d'exercice préalable en établissements de santé. C'est pour le moins problématique s'agissant des chirurgiens-dentistes, profession essentiellement libérale, ou des sages-femmes, pas toujours reconnues dans les établissements de soins. Cette question concerne aussi des Français diplômés à l'étranger. Introduire un peu de flexibilité contribuerait à la lutte contre les déserts médicaux.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille .  - Les praticiens titulaires d'un diplôme hors Union européenne exerçant dans les établissements de santé rendent de grands services depuis des années. La loi de février 2012 a assoupli les conditions d'exercice pour un grand nombre de praticiens, ce qui s'est traduit par une augmentation significative des résultats à l'examen de 2012. Des difficultés demeurent pour les chirurgiens-dentistes. Une mesure législative est envisagée. Une réflexion est conduite par le ministère de la santé afin d'assouplir à leur profit, voire au-delà, à certaines spécialités, les conditions de l'examen. Il faudra veiller à ce que le contenu des diplômes garantisse la qualité des soins et aussi à ce que le traitement soit équitable pour les médecins soumis au numerus clausus.

M. Yves Krattinger.  - Je suis satisfait que nous partagions le constat. Je note qu'une mesure législative est envisagée et qu'une réflexion est conduite. Je suis préoccupé de la garantie de qualité des soins et de l'équité. Continuons dans cette voie.

Restauration scolaire

M. Bernard Fournier .  - Une commune de mon département, Chuyer, rencontre des problèmes de restauration scolaire. Le maire a été contraint de chercher un nouveau fournisseur pour la rentrée 2013 après que le restaurateur a dû cesser très rapidement de livrer des repas à la cantine à la suite d'un contrôle.

L'arrêté du 8 juin 2006 relatif à l'agrément sanitaire est trop restrictif. Il limite la livraison aux établissements de restauration collective à seulement 150 repas hebdomadaires. La réglementation européenne ajoute des contraintes supplémentaires : seuls 30 % des repas peuvent être servis à l'intérieur. Avec de telles normes, on va contraindre la municipalité à recourir à des cuisines centrales, industrielles, éloignées du terrain. C'est, à tout point de vue, contraire au bon sens.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille .  - Les difficultés de Chuyer sont liées à l'application de l'arrêté du 8 juin 2006 relatif à l'agrément sanitaire. En application du Règlement européen de 2004, les établissements doivent se conformer à la réglementation européenne, sauf dérogation, s'ils respectent les limites fixées par cet arrêté. Les possibilités offertes au commerce de détail limitent les exigences tout en maintenant un niveau sanitaire élevé, afin de favoriser les circuits courts. Il n'est pas possible de les assouplir davantage si l'on veut maintenir une concurrence équitable. Le plan de maîtrise sanitaire recense les bonnes pratiques d'hygiène.

Le Gouvernement simplifie les démarches administratives. Le ministère de l'agriculture met en ligne des dossiers types d'agrément actualisés. Tout établissement peut s'aider de ces documents.

M. Bernard Fournier.  - Votre réponse me laisse, si j'ose dire, sur ma faim. Ne faisons pas disparaître les derniers commerces qui demeurent dans une commune rurale au profit d'entreprises industrielles éloignées. Je suis quelque peu déçu par votre réponse. L'établissement de Chuyer demandera l'agrément.

Ligne à grande vitesse (II)

M. Jean-François Humbert .  - Le rapport Duron me préoccupe en ce qu'il considère que la deuxième tranche de la ligne à grande vitesse Rhin-Rhône n'est « plus prioritaire » : les 50 kilomètres à réaliser sont reportés après 2030. Ils devaient entrer en service en 2016 ! Le projet est donc quasiment abandonné. Or il s'inscrit dans un schéma européen de liaisons entre l'Allemagne et l'Espagne. Le premier tronçon, de 140 kilomètres, est entré en service commercial le 11 décembre 2011, pour un budget de 2,6 milliards d'euros. Il reste à réaliser la deuxième tranche vers Dijon, à l'ouest, et Mulhouse, à l'est.

Même si l'État réexamine les grandes infrastructures décidées à la suite du Grenelle, le Gouvernement entend-il poursuivre ce projet ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille .  - Les différentes composantes de la ligne à grande vitesse Rhin-Rhône ne sont pas au même état d'avancement. Les études sont nettement moins engagées et le tracé pas encore défini pour les branches ouest et sud. Le besoin de financement est estimé à 8 milliards d'euros.

Le projet de ligne à grande vitesse Rhin-Rhône est classé en deuxième priorité. La commission Duron a proposé de ne poursuivre sa réalisation qu'après 2030. Le Gouvernement a décidé de suivre ses recommandations, tout en précisant que la priorisation des projets devrait être revue dans cinq ans et que l'horizon 2030 pourrait être raccourci, en fonction du coût et du financement.

Les investissements porteront sur les lignes existantes afin d'améliorer la sécurité, la qualité du service, le confort du matériel roulant existant. Le grand plan de modernisation du réseau, demandé par Frédéric Cuvillier à RFF, sera décliné dans les territoires.

M. Jean-François Humbert.  - Réponse peu satisfaisante. Je demanderai prochainement au ministre des transports des précisions sur la manière dont il conçoit, avant 2030, les 50 kilomètres restants sur la tranche Dijon-Mulhouse.

M. le président.  - Je rappelle que M. Jean Pisani-Ferry, commissaire général à la stratégie et à la perspective, sera entendu à 15 heures, en salle Clemenceau, dans le cadre du groupe de travail Quelle France dans dix ans ?, ouvert à tous les parlementaires et à la presse.

La séance est suspendue à 12 h 25.

présidence de M. Jean-Patrick Courtois,vice-président

La séance reprend à 17 heures.

Lutte contre le dopage (Débat)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle un débat sur les conclusions de la commission d'enquête sur l'efficacité de la lutte contre le dopage.

M. Jean-François Humbert, président de la commission d'enquête .  - (Applaudissements) En février dernier, j'ai eu la chance d'être nommé président de la commission d'enquête sur l'efficacité de la lutte contre le dopage. Avec M. Lozach, notre rapporteur, nous nous sommes rapidement attelés à la tâche : en moins de six mois, nous devions établir un bilan objectif et faire des propositions.

Nous avons rempli notre mission puisque nous avons adopté, le 24 juillet dernier, cinq mois après le début de nos travaux, nos conclusions. Notre rapport de 700 pages retrace une enquête approfondie : 63 auditions, 86 personnes entendues, 69 heures et 47 minutes de réunion. Les huis clos, lorsqu'ils ont été demandés, ont été acceptés. Nous avons organisé cinq déplacements, dont trois à l'étranger -en Suisse, en Espagne et aux États-Unis. Ces exemples nous ont éclairés.

Nos travaux, nous avons été heureux de le constater, ont trouvé un écho international. Le directeur de l'agence américaine contre le dopage, que nous avons interrogé au Sénat, a suivi nos auditions.

L'objectif était d'élargir le panorama au-delà du cyclisme. Il fallait, comme je l'ai dit en conférence de presse, lever le nez du guidon. (Sourires) Et ce, par souci d'équité. Nous ne voulions pas discriminer tel ou tel sport. Par respect pour les sportifs, nous avons ainsi reporté la publication du rapport après l'arrivée du Tour de France.

Le succès a été au rendez-vous puisque le tome I de notre rapport a été consulté 9 000 fois, les annexes 3 500 fois.

Durant les trois jours qui ont encadré la conférence de presse, le site à elle dédié a reçu la visite de 2 000 internautes, ce qui reflète fidèlement l'affluence des journalistes lors de cet événement public.

C'est que le sujet rassemble au-delà des sensibilités politiques. Dans un climat apaisé et coopératif, nous avons cherché à améliorer les lois de 2006 et de 2010 contre le dopage en formulant 60 propositions applicables -j'y insiste- à budget constant.

La tentation est grande de déposer une proposition de loi afin de traduire concrètement nos propositions. Pour autant, on annonce une loi cadre sur le sport pour 2014. Madame la ministre, pouvez-vous préciser le calendrier ? Pouvez-vous aussi vous engager à la faire examiner en premier lieu par le Sénat ?

MM. René Garrec et Jean-Claude Carle et Mme Danielle Michel.  - Très bien !

M. Jean-François Humbert, président de la commission d'enquête.  - Si vous répondez par l'affirmative, nous pourrions renoncer à pousser notre proposition de loi.

Surtout, madame la ministre, êtes-vous prête à faire vôtres nos propositions ? Je pense au renforcement du rôle de l'Agence française de lutte contre le dopage, ou à l'instauration du passeport biologique, ou encore au contrôle des salles de musculation, où commence souvent le trafic des produits dopants. Je pense aussi à la possibilité de prendre des sanctions sur des preuves non analytiques, comme on le fait aux États-Unis -voyez le cas Lance Armstrong- ou encore à l'instauration d'un système pour les repentis. Vous le savez, si notre commission ne préconise pas une pénalisation des sanctions, elle se prononce pour l'élargissement du dispositif aux salles de sport. Enfin, la coopération, fondamentale dans la lutte contre le dopage, doit se traduire dans notre code du sport. Quelles sont vos préconisations en la matière ?

L'Europe doit jouer un rôle moteur, c'est ma conviction. Les institutions européennes comme les acteurs privés organisateurs de compétitions, voyez l'UEFA, jouent un rôle majeur. Ne faut-il pas une directive d'harmonisation pour la lutte contre le trafic de produits dopants? Quand pourrait-elle aboutir ?

Enfin, les jeux en ligne sont certes contrôlés par l'Autorité de régulation des jeux en ligne mais n'a pas compétence sur les matches truqués. Nous n'avons pas proposé sa fusion avec l'Agence française de lutte contre le dopage mais si l'Agence mondiale antidopage recevait des compétences en la matière, quelles seraient les conséquences dans notre pays ?

J'aurais encore bien d'autres choses à dire mais je vais laisser la parole à notre excellent rapporteur, en remerciant d'avance la ministre pour les réponses qu'elle apportera à mes questions. (Applaudissements)

M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur de la commission d'enquête .  - Ce débat fait suite à cinq mois de travaux au Sénat, représentant des collectivités territoriales, qui sont le premier financeur du sport. Il a permis d'éveiller les consciences, de faire parler sans tabou d'un sujet souvent frappé d'omerta. Nos révélations sur le Tour de France 1998 et 1999 ou le tennis ont porté des fruits : l'Union cycliste internationale a, enfin, annoncé la création d'une commission Réconciliation et Vérité.

Nous nous étions donné pour objectif de faire un état des lieux du dopage, de dresser un bilan de la lutte antidopage, de donner un éclairage international et de faire des propositions. Le bilan est consensuel. La prévalence du dopage est bien plus élevée que les 1 à 2 % de sportifs contrôlés positifs ; le dopage traverse toutes les disciplines, les sports professionnels comme amateurs. En parler contribuera à rehausser l'image du sport, un sport dont nous avons une vision humaniste, pour l'égalité des chances.

Notre politique de prévention, cela fait également consensus, est mal ciblée. Le passeport biologique, qui devrait déjà être mis en place, ferait progresser les contrôles. Quant aux sanctions, elles devraient être mieux utilisées. Une seule sanction sur des preuves non analytiques a été prise par l'Agence française de lutte contre le dopage depuis sa création, contre 20 % par son homologue américaine. De même, une seule sanction pécuniaire a été prononcée. La possibilité de moduler la sanction selon le comportement du sportif n'a jamais été utilisée. Notre dispositif de lutte contre les trafics serait plus efficace si nous renforcions la coopération entre ses acteurs : les douanes, la gendarmerie et le monde sportif.

Nous avons formulé 60 propositions valant pour tous les sports, autour de sept piliers -des propositions concrètes, réalistes, à moyens constants, rassembleuses. La connaissance, d'abord, car on ne combat bien que ce que l'on connaît. L'Agence française de lutte contre le dopage et le ministère des sports doivent financer des études sur la réalité du dopage. La prévention, ensuite, qui fait l'objet de dix-sept propositions. J'insiste sur les actions en direction du sport amateur et, surtout, dans les salles de musculation qui sont, d'après nos informations, de véritables plaques tournantes du trafic de produits dopants. Pour le sport professionnel, le ministère devrait pouvoir s'opposer aux calendriers abusifs des fédérations, soit ceux prévoyant des compétitions sportives manifestement trop proches.

Troisième pilier, la politique des contrôles. Toutes les manifestations doivent être réputées nationales, à moins d'une déclaration contraire par la fédération internationale concernée. Ainsi l'Agence française de lutte contre le dopage aurait-elle la mainmise sur l'organisation des contrôles ? Nous préconisons la nomination de huit délégués interrégionaux aux contrôles au sein de l'Agence française de lutte contre le dopage, qui travailleraient à temps plein.

Pour les analyses, l'EPO et l'hormone de croissance devraient être systématiquement recherchées, ce qui aurait un effet dissuasif et mettrait fin au sentiment d'impunité. Rattachons le laboratoire de Châtenay-Malabry à une université pour encourager la recherche.

Les sanctions disciplinaires doivent être transférées des fédérations nationales à l'Agence française de lutte contre le dopage. Il sera ainsi mis fin aux conflits d'intérêt. Ce point, qui appelle une modification législative, est, pour nous, la base d'une réforme globale de la politique de sanctions, avec un système de repentis, pour combattre l'omerta.

Pour ce qui est de la politique pénale en matière de dopage, nous avons décidé de ne pas pénaliser l'usage, sachant qu'il existe déjà une incrimination pour détention de produits dopants mais cette incrimination ne visant que les seuls sportifs au sens du code du sport devra être étendue aux pratiquants des salles de sport et de musculation.

Enfin, dernier pilier, et non des moindres, la coopération entre les acteurs de la lutte contre le dopage, à commencer par l'Agence française de lutte contre le dopage et l'Oclaesp. Avez-vous pris l'attache du ministère de la Justice ?

Nous proposons enfin d'élargir la taxe Buffet pour en affecter une partie à l'Agence française contre le dopage : est-ce envisageable dans la loi de finances pour 2014 ?

Voilà ce que nous proposons, madame la ministre, pour que la lutte antidopage garde une longueur d'avance ! (Applaudissements)

M. Michel Le Scouarnec .  - L'argent a terni l'image du sport, alors que Pierre de Coubertin disait que « le sportif va chercher la peur pour la dominer, la fatigue pour en triompher, la difficulté pour la vaincre ». De fait, le dopage sévit. La France peut s'enorgueillir d'avoir été pionnière en adoptant la grande loi Buffet de 1998, qui a débouché sur la création de l'Agence mondiale antidopage en février 1999.

Nous ne pouvons pas nous contenter de ce passé glorieux. Pour rester à la pointe de la politique de lutte contre le dopage, la France doit y consacrer des moyens à la hauteur de son ambition. C'est là l'essentiel de ce qui nous distingue du rapporteur. Oui, renforçons l'Agence française de lutte contre le dopage, les contrôles inopinés, des contrôles qui doivent porter sur toutes les substances. S'il faut plus de sanctions, celles-ci ne doivent pas concerner le seul sportif. Et la coopération entre tous les services concernés par la lutte contre le dopage doit être renforcée.

Pour conclure, je veux saluer la très grande qualité des travaux de notre commission, l'engagement du président Humbert et du rapporteur Lozach. Nos préconisations ne devront pas rester lettre morte pour que la morale triomphe et que le sport reste synonyme de réussite pour tous ! (Applaudissements)

M. Stéphane Mazars .  - Je tiens d'abord à féliciter le groupe socialiste pour la création de cette commission d'enquête, le rapporteur Lozach, dont le travail témoigne d'une réelle connaissance du sport, et le président Humbert, qui a su rassurer nos interlocuteurs sur nos intentions afin d'établir avec eux un dialogue de confiance et de vérité.

Alors que le sport rime avec éthique et dépassement de soi, il devient trop souvent un pur spectacle, recherche effrénée de l'exploit.

En juillet 2013, Lance Armstrong déclarait qu'il était impossible de gagner le Tour de France sans se doper. Tricheur ou victime ? La question est posée.

Il faudrait, en premier lieu, mieux connaître le phénomène du dopage pour le prévenir. Cela ne suffira pas : même informés des risques pour leur santé, les sportifs continuent de se doper. Non pour l'argent, comme nous l'a expliqué le professeur Mondenard, mais pour leur ego, par esprit de compétition. Voyez Lance Armstrong, déclarant dans un célèbre documentaire que perdre équivaut, pour lui, à mourir.

Avant de participer aux travaux de la commission, j'étais partisan de pénaliser l'usage mais les sanctions pénales sont parfois difficiles à articuler avec les sanctions disciplinaires pour les sportifs, de même que l'intention est difficile à prouver, si elles sont indispensables pour frapper les trafiquants. D'une manière générale, nous sommes favorables au renforcement des sanctions, qu'elles soient disciplinaires -avec quatre ans de suspension, et non deux pour des produits lourds- ou pécuniaires. Cela suppose de meilleurs contrôles qui seront rendus possibles par le passeport biologique. Madame la ministre, connaissant votre engagement absolu pour le sport, nous ne doutons pas que vous aurez à coeur d'inscrire nos propositions dans votre future loi cadre et de porter la voix de la France au sein de l'Agence mondiale antidopage (AMA). La lutte contre le dopage est difficile mais elle est question d'équité, d'égalité, pour ne pas dire plus. Écoutez Roland Barthes, il disait que « doper le coureur est aussi criminel, aussi sacrilège que de vouloir imiter Dieu ; c'est voler à Dieu le privilège de l'étincelle » (Applaudissements)

M. Jean-Vincent Placé .  - Nous aimons tous le sport, vecteur de dynamisme collectif, de santé, de diffusion de valeurs positives. Mais il faut aussi lui reconnaître un côté sombre, il a même pu être utilisé par les dictateurs. La puissance publique doit être intransigeante sur le dopage, lié au caractère inhumain des compétitions. Sortons d'une logique de sport business, mis en lumière par l'exemple de Lance Armstrong.

L'excellent rapport Humbert-Lozach montre que le dopage touche les professionnels, mais aussi les sportifs amateurs. Le trafic de produits dopants, vrais stupéfiants, prend une ampleur sans précédent. Les conséquences peuvent en être dramatiques pour la santé.

Les trafiquants ont souvent une longueur d'avance sur le contrôle. Les agences nationales rencontrent des difficultés dans la lutte tandis que les fédérations peinent à organiser les contrôles. La réforme de l'Agence française de lutte contre le dopage, préconisée par le rapport, est donc hautement souhaitable. Mais il faut aussi plaider au niveau international, pour harmoniser les sanctions, alléger les calendriers dans une optique moins mercantile, encadrer les financements et la gestion des fédérations nationales. La haute compétition n'est pas contradictoire avec une vision humaniste et coopérative du sport -c'est un amoureux du PSG qui le dit. (On s'amuse sur divers bancs)

Nous nous inscrivons dans les recommandations formulées dans le rapport. La pratique du dopage doit être combattue transversalement, dans toutes les disciplines, au niveau national comme international. La France est un des premiers pays à avoir adopté une réglementation dès 1965. Elle ne doit pas relâcher le combat afin que le sport reste un moteur pour la jeunesse. Je fais confiance à la ministre pour porter cette préoccupation forte et l'inscrire dans la continuité du travail remarquable qu'avait accompli Mme Buffet en son temps. (Applaudissements)

Mme Chantal Jouanno .  - J'interviens au nom du groupe UDI-UC mais aussi comme membre de la commission d'enquête et ancienne ministre des sports. Je me souviens, madame la ministre, lorsque j'étais à votre place, d'un certain sentiment d'impuissance après le scandale Festina. La France a souvent été à la pointe de la lutte contre le dopage mais, hélas, nous échouons souvent...

Le monde du sport est de plus en plus traversé par des enjeux financiers et médiatiques, mais est aussi confronté à une demande croissante de transparence et d'éthique de la part de la société. Tel est le paradoxe, souligné par notre utile commission d'enquête. Ne laissons pas le sport devenir pur sport spectacle. C'est une question de société.

A en croire les représentants des fédérations entendus par notre commission d'enquête, leur sport serait épargné -l'escrime ou le judo parce que trop techniques, le tennis ou le football à cause de l'intelligence du jeu... Le dopage ne concernerait que le cyclisme. C'est l'omerta. Que l'on peut comprendre, car les fédérations craignent de faire fuir de potentiels licenciés. Mais la question est politique et éthique. Les travaux de la commission l'ont montré, tous les sports sont concernés. Si les outils sont insuffisants pour mesurer l'ampleur du phénomène, on sait que tous les sportifs sont concernés, y compris les non-professionnels et les jeunes. Le représentant de l'Agence française de lutte contre le dopage, Jean-Pierre Verdy, a décrit une situation épouvantable : les amateurs utilisent les mêmes produits que les professionnels, mais de façon anarchique. On a vu un père injecter à son fils deux à trois fois la dose d'EPO injectée aux professionnels. Le trafic est intense, qui passe aisément par internet et les salles de sport.

Cette situation mine la société car les sportifs sont des exemples pour les jeunes. Ribéry, Anelka, Armstrong le sont. Le danger est donc lourd, le dopage est un fléau à la fois social et sanitaire. Amphétamines, anabolisants, les risques sont connus. Et l'avenir est sombre, avec l'arrivée du dopage génétique ou des biotechnologies, beaucoup plus difficiles à contrôler. Preuve que l'intelligence peut, hélas, être vénale.

Le groupe UDI-UC soutient l'ensemble des préconisations de la commission d'enquête qui sont, de surcroît, à budget constant.

La création des comités Vérité et Réconciliation relève de la régulation. S'il faut tendre la main aux sportifs repentis pour lever l'omerta, il faut s'intéresser aux fédérations qui n'ont pas toujours de politique de prévention, aussi au système et à l'entourage du sportif qui l'obligent à se doper.

La généralisation du passeport biologique permettra de passer de la preuve au faisceau d'indices. Oui à la coopération entre l'Oclaest et l'Agence française de lutte contre le dopage mais il faudrait surtout un organisme indépendant des fédérations, seul moyen de lever la suspicion permanente et de lutter efficacement contre le dopage -qui est une affaire régalienne au sens propre.

Une seule réserve : nous aurions aimé que ce débat ait lieu autour d'un texte. S'il doit y en avoir un, puisse-t-il être déposé en premier lieu sur le Bureau du Sénat. Je prends date. (Applaudissements)

Mme Danielle Michel .  - Je veux saluer d'abord le travail de la commission d'enquête, l'investissement et l'engagement du président et du rapporteur, dont on connaît l'expertise sur ces questions. De nombreuses auditions ont été organisées, ainsi que cinq déplacements, dont un au laboratoire de Châtenay-Malabry. Notre démarche : ne pas stigmatiser, ne pas pointer du doigt.

Quand on enferme la vérité sous terre, elle s'y amasse jusqu'au jour où elle éclate et fait tout sauter avec elle, disait Zola, que cite notre rapporteur. On ne parle jamais assez du dopage, et peut-être jamais assez bien...

Le dopage est un phénomène complexe. Le culte de la performance et la médicalisation de notre société et du sport rendent le dopage mouvant, difficile à cerner. Il n'épargne pourtant aucun pays, aucune discipline, aucun âge. Rompre le silence est nécessaire car l'omerta nuit au sport comme au travail de prévention et de pédagogie : neuf Français sur dix pratiquent une activité sportive, seize millions de Français étaient licenciés dans une fédération en 2012, et nos sportifs sont des modèles pour des milliers d'enfants. L'impact du sport sur les loisirs, sur l'économie exige que nous agissions sans fatalisme.

Le rapporteur de la commission d'enquête se veut volontariste. Je me pencherai sur la question de la prévention, dont il fait un axe majeur. Il s'agit d'anticiper, pour des résultats à moyen et long termes. La prévention tout au long de la vie doit s'adresser à tous et débuter précocement. Elle suppose de s'adresser à tous, professionnels, licenciés et amateurs, de renforcer et de mieux coordonner les structures compétentes. M. Rieux a fait une étude sur le sport scolaire selon laquelle 10 % des jeunes ont été confrontés au dopage. Une action de prévention à l'école s'impose. Elle pourrait se situer dans le second degré, pour s'adresser aux jeunes les plus intéressés par le sport. Il faut, au-delà, s'adresser à tous les publics, en particulier les amateurs, dont l'usage des produits dopants est anarchique.

Les amateurs étant les plus exposés, le rapporteur préconise un programme de contrôle à visée éducative dans les salles de sport qui rassemble cinq à six millions de pratiquants et sont les lieux privilégiés de vente et de consommation. La mise en place d'une charte antidopage serait bienvenue, de même qu'un dispositif d'alerte sur les ventes de produits dopants sur internet.

Fédérations, services déconcentrés, éducateurs, médecins, enseignants doivent être mobilisés. Marie-George Buffet plaidait en son temps pour que l'on agisse sur les personnels encadrants. Depuis les lois de 1999 et 2006, des actions sont ainsi menées et je salue le travail remarquable de la fédération d'athlétisme ; je souhaite qu'elle fasse école.

Les médecins ont également un rôle central à jouer. Ils doivent être sensibilisés lors de leur formation, initiale ou continue. Il serait utile d'interdire aux sportifs de collaborer avec les médecins qui ont participé à des pratiques dopantes.

Les structures existantes doivent être mieux coordonnées afin de redynamiser la prévention. Ainsi de l'Agence française de lutte contre le dopage, pour favoriser plus de cohérence dans les contrôles, donner plus de visibilité à l'action et développer les partenariats avec les fédérations. Le rapport propose de lui confier la compétence en matière de prévention et de coordination des politiques régionales. Les antennes médicales de prévention méritent d'être réactivées et dotées des moyens adéquats. Les campagnes du ministère y trouveront des relais territoriaux précieux. L'animation de ces antennes pourrait être confiée à l'Agence française de lutte contre le dopage et leur carte d'implantation rationalisée. Pourquoi, dès lors, ne pas renommer l'Agence française de lutte contre le dopage Agence française de prévention et de lutte contre le dopage ? Le ministère conserverait l'action internationale et la prévention en direction des fédérations.

A cause du modèle économique du sport spectacle, les calendriers sont devenus démentiels. Le ministère pourrait avoir son mot à dire en la matière. Les fédérations sont les premiers auxiliaires de l'État en matière de prévention, mais l'omerta règne car elles craignent pour l'attractivité de leur sport.

Le dopage met à mal l'intégrité du sport et des sportifs : la prévention a tout son rôle à jouer. Il serait judicieux de promouvoir des messages positifs plutôt que punitifs sur la santé par le sport, via les réseaux sociaux pour qu'ils soient audibles par les jeunes.

Nous croyons à l'éducation et au slogan « Le sport, c'est la santé ». Il y faut aussi des contrôles et des sanctions. C'est ce que préconise le rapport. Madame la ministre, je vous fais confiance. Sportez-vous bien ! (Applaudissements)

M. Alain Dufaut .  - A mon tour de féliciter MM. Humbert et Lozach pour la qualité de leur travail. Je crois que nous avons bien travaillé.

La lutte contre le dopage est une priorité, c'est une question de responsabilité vis-à-vis des sportifs qui mettent en danger leur santé, et parfois leur vie. La triche bafoue les principes du sport et de l'olympisme. Grâce à l'action de Marie-George Buffet et celle de ses successeurs, la France s'est dotée d'un arsenal juridique pour mieux contrôler les pratiques et combattre le dopage. J'ai été rapporteur de plusieurs textes sur le sport, dont la loi de 2005 présentée par Jean-François Lamour qui a créé une agence de lutte contre le dopage indépendante, la loi de ratification de 2007 et la loi de 2008 relative à la lutte contre les trafics de produits dopants.

Ces textes, couplés à l'autorité reconnue à l'Agence et à l'efficacité de notre laboratoire de Châtenay-Malabry, ont permis de renforcer la lutte contre certaines pratiques qui gangrènent le sport. Hommage soit rendu à l'ancien président de l'Agence française de lutte contre le dopage, Jean-Pierre Bordry, pour son inlassable action. Le dopage touche y compris le monde amateur : le sport de masse doit faire l'objet de contrôles approfondis davantage médiatisés.

Le rapporteur de notre commission d'enquête propose de confier un rôle accru à l'Agence française de lutte contre le dopage, y compris pour la prévention, clé du succès, qui devrait figurer dans son intitulé. Le contrôle n'est pas seulement un moyen de sanctionner la triche mais de lutter contre des risques graves pour la santé. La prévention dès le plus jeune âge est nécessaire parce que jeune, on se croit invulnérable et on cherche à briller...

Donner la faculté à l'Agence française de lutte contre le dopage de sanctionner les sportifs mais aussi d'interdire de collaborer avec certains médecins mettra fin à certains marchés de niches -je pense au docteur Ferrari et à d'autres. Autoriser le ministère à contester des calendriers de plus en plus chargés, qui mettent en danger les sportifs, sera utile. L'intérêt d'un « droit au repos » mérite d'être étudié.

Je salue la proposition du rapport de favoriser le contrôle par l'Agence, et non plus par les fédérations, des manifestations sportives ayant lieu en France. Mais les fédérations doivent prendre leur part de responsabilité. Je pense à la prochaine coupe d'Europe de football en 2016 et des coupes du monde à venir -souvenons-nous de ce qui s'est passé autour des échantillons de 1998. Nous devrons être vigilants. Il serait bon aussi que la compétence des fédérations internationales soit limitée aux seules manifestations dans lesquelles elles sont réellement impliquées, de sorte que les contrôles soient réalisés au plus proche du terrain.

Le sport doit rester le moyen de valoriser l'effort et la santé. Tout ce qui nuit à cet objectif doit être combattu. Nous attendons donc, madame la ministre, votre texte avec impatience. (Applaudissements)

Mme Valérie Fourneyron, ministre des sports, de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative .  - Merci pour le travail approfondi que vous avez effectué. Ce rapport facilitera la tâche de la ministre que je suis.

Quand on parle d'intransigeance en matière de lutte contre le dopage, on voit, avec ce rapport, que c'est une priorité partagée.

M. René Garrec.  - Tout à fait !

Mme Valérie Fourneyron, ministre.  - L'agence américaine de lutte contre le dopage, l'Usada, a montré que celui qui se prétendait le plus grand des champions était le plus grand des tricheurs ; l'affaire Lance Armstrong ne pouvait être une affaire de plus, il devait y avoir un avant et un après.

Le Sénat s'est saisi du problème. J'ai, par mon parcours, quelque expérience de la question. J'ai étudié vos propositions avec soin. La première partie de votre rapport, qui fait du dopage un enjeu éthique et sanitaire, mérite tout mon intérêt. Pour arrêter la liste des substances dopantes, il a fallu batailler afin que le critère de la santé soit pris en compte. De fait, nous entendons préserver non seulement l'éthique du sport mais aussi la santé des sportifs, de tous les sportifs, y compris les amateurs. Alors qu'on a tendance, dans notre société, à croire que le médicament peut tout, le dopage devient un risque majeur pour la santé. C'est aussi une question éthique. Comment peut-on faire des sportifs des cobayes, en les laissant absorber des doses supérieures à la posologie prévue par l'autorisation de mise sur le marché, ou des produits qu'on n'a pas pu tester avant celle-ci ?

Votre commission d'enquête nous livre quelques solutions. Au ministère de faire respecter l'arsenal législatif et de l'améliorer sans cesse. Depuis la loi Herzog de 1965 jusqu'à l'ordonnance du 14 avril 2010, en passant par les lois Buffet et Lamour, la lutte contre le dopage s'est dotée d'outils qui répondent aussi à nos engagements internationaux devant le Conseil de l'Europe en 1989 ou l'Unesco en 2005 avec l'adoption d'un code mondial du sport.

Comme vous, je suis opposée à la pénalisation de l'usage des produits dopants : l'enjeu est de santé publique avant d'être pénal, parce que le sportif se met en danger. Une condamnation pénale serait se mettre en position de défiance vis-à-vis du mouvement sportif. Or nous voulons protéger le sport et les sportifs. Cela n'enlève rien à la force de ma détermination à lutter contre le dopage. M. Mazars a dit combien la question de l'intentionnalité de la faute était difficile à prouver. Grâce à la loi du 12 mars 2012, qui doit beaucoup au Sénat, le profil biologique et la géolocalisation des sportifs de haut niveau sont devenus des outils efficaces de lutte et placent la France à la pointe du combat contre le dopage. Les décrets seront publiés dans quelques semaines.

Les propositions de votre commission d'enquête pourront prendre place dans la loi de modernisation du sport, que je prépare pour 2014. La Direction du sport doit aussi s'engager massivement dans la prévention. Elle travaillera, c'est une première, avec le CSA. Seront parallèlement engagés un travail de sensibilisation auprès des clubs de remise en forme et de leurs usagers et un autre en partenariat avec le Mildt. Le numéro vert recueille 1 000 appels par mois.

La prévention doit aussi être un maître mot dans les fédérations, dans le cadre des conventions d'objectifs et des appels à projets. Les crédits ont été préservés en 2013, ils le seront aussi en 2014. Les clubs qui agissent pour la prévention au plus près du terrain seront soutenus et, depuis 2012, une norme Afnor relative aux compléments alimentaires -qui peuvent contenir des anabolisants- est en vigueur. L'effort de prévention doit être sans cesse approfondi, par un rapprochement entre ministère, Agence française de lutte contre le dopage -qui accomplit un travail considérable que je veux saluer- et le CNOSF.

M. Le Scouarnec a posé la question des moyens : ils ne sont pas diminués. Affecter une part de la taxe Buffet à l'Agence française de lutte contre le dopage ? Ou une partie des amendes versées par les tricheurs, comme le propose le rapporteur ? Toutes les pistes méritent d'être étudiées, mais sachez que le rendement de la taxe Buffet, du fait de la baisse des droits audiovisuels, est en diminution et que le Centre national de développement du sport a dû faire l'objet d'un plan de redressement qui court jusqu'en 2016 ; lui retirer des moyens, c'est affaiblir les actions de développement du sport.

J'insiste sur l'importance de l'international. Le Conseil de l'Europe a été précurseur en 1989. La Convention de l'Unesco de 2005 a été adoptée par 170 pays. L'Agence mondiale antidopage joue un rôle essentiel dans la rédaction du code mondial antidopage. J'ai la chance et l'honneur de représenter l'Europe en son sein depuis le 1er janvier 2013. L'AMA est le moteur de l'action contre le dopage parce qu'elle édicte le code mondial et anime la recherche. La dernière étude qu'elle a publiée concerne le profil stéroïdien que nous attendions pour créer le passeport biologique. Cette agence est une institution centrale parce qu'elle met les moyens là où ils manquent -il reste un seul laboratoire en Afrique- et accrédite d'ailleurs les laboratoires.

Une partie de vos préconisations trouvera concrétisation dans la révision du code mondial qui fera l'objet d'une conférence internationale en novembre prochain à Johannesburg. Porter la sanction en cas de dopage avec une substance lourde de deux à quatre ans, comme le propose le rapport, est une bonne idée. Les agences nationales ont désormais la possibilité de procéder à des contrôles additionnels lors des compétitions qui ont lieu sur leur territoire. En novembre 2012, l'AMA, en collaboration avec l'Unesco, le Conseil de l'Europe et, bien sûr, la France, avait organisé un symposium avec l'industrie pharmaceutique pour étudier les coopérations possibles. Alors qu'à l'occasion de son changement de président, certains veulent en faire un prestataire de services, nous devons réaffirmer haut et fort notre ambition : l'AMA doit devenir un véritable outil de régulation.

Le premier pilier de votre rapport porte sur la connaissance du dopage. Je regrette que les médias se soient focalisés sur vos révélations. On ne combattra le dopage que si l'on en parle. Réunissons les commissions Vérité et Réconciliation car l'omerta est d'abord un poids pour les sportifs. Visiblement, les instances internationales ne s'opposeraient pas à la création de ces commissions et c'est tant mieux car nous serons solidaires.

Oui, il faut financer des études épidémiologiques. Depuis 2001, l'AMA a consacré 56 millions de dollars à la recherche et lance chaque année des appels à projets. La France devrait davantage y répondre.

Deuxième pilier, la prévention. Nous avons arrêté un plan pour 2013-2016 dans lequel le ministère jouera son rôle pivot aux côtés de l'Oclaeps.

J'ai diligenté une enquête de la direction générale de la jeunesse et des sports sur nos antennes régionales et notre numéro vert en vue d'améliorer leur fonctionnement.

Un droit de regard du ministère sur les calendriers des fédérations ? Ce serait instaurer une tutelle de l'État. Je préfère la responsabilisation du mouvement sportif, son autorégulation, mais le sport ne peut pas rester le seul secteur d'où est absent le dialogue social : il faut que les syndicats de joueurs se fassent entendre.

Concernant le volet du contrôle, nous reprendrons l'article L. 230-2 du code du sport afin de mieux définir les manifestations internationales. Nous avons publié un décret le 26 juin dernier pour élargir la coopération entre douanes, gendarmes et ministère. C'est une vraie réponse que nous apportons là au Sénat.

Huit correspondants interrégionaux au lieu de vingt-quatre ? N'oublions pas que ces correspondants ont non seulement pour tâche de combattre la triche mais aussi de protéger la santé publique.

Concernant le volet analyse, la France a été précurseur en matière de recherche des produits dopants, comme l'EPO. Je soutiens votre proposition : nous devons parvenir à une seule liste de produits dopants. Car comment accepter des produits pour l'entraînement qui sont interdits pour la compétition ? La deuxième liste est une aberration.

Le volet sanctions appelle quelques observations. Peut-être les fédérations doivent-elles rester des institutions de première instance en laissant l'appel à l'Agence française de lutte contre le dopage. N'excluons pas le monde du sport de la politique de lutte contre le dopage.

S'agissant du volet « pénaliser », mon ministère travaille activement à l'élargissement des sanctions au trafic dans les salles de sport.

Sur le volet « coopérer », nous devons effectivement mieux utiliser les preuves non analytiques.

Le décret du 26 juin 2013 associe pour la première fois le directeur des sports et le directeur des affaires criminelles et des grâces.

Pour conclure, toutes vos propositions ne relèvent pas de mon ministère ; toutes ne sont pas de nature législative ; certaines relèvent du décret, d'autres d'une simple réorganisation des institutions. En revanche, votre proposition n°9 sur la révision du code du sport pour pénaliser les trafics dans les salles de sport, la question des correspondants interrégionaux ou encore le renforcement du rôle de l'Agence française de lutte contre le dopage relèvent bien de mon ministère. De même que la future loi cadre devra reprendre le code mondial révisé.

Je reviens sur un point qui me tient à coeur : il ne fait pas de doute que les sanctions, qui sont l'apanage des fédérations depuis la loi Buffet, doivent être partagées avec l'Agence française de lutte contre le dopage. Pour ce faire, celle-ci devra créer une commission disciplinaire bien distincte. Toute la question est de savoir, je l'ai dit, si l'agence doit intervenir en première instance ou en appel.

Comme vous l'aurez compris, l'avenir de la lutte contre le dopage se joue à la fois lors de la conférence de l'AMA à Johannesburg et au Sénat, que j'aurai plaisir à saisir en premier lieu de mon projet de loi, qui vise à rééquilibrer la place des collectivités dans la gouvernance du sport. (Applaudissements)

La séance est suspendue à 19 h 25.

présidence de M. Jean-Léonce Dupont,vice-président

La séance reprend à 21 heures 30.

Accord en CMP

M. le président.  - J'informe le Sénat que les commissions mixtes paritaires saisies des dispositions restant en discussion du projet de loi et du projet de loi organique relatifs à l'indépendance de l'audiovisuel public sont parvenues à un accord.

Industrie du tourisme (Débat)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle le débat sur la pertinence du dispositif légal encadrant l'industrie du tourisme en France.

M. David Assouline, président de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois .  - Le tourisme revêt pour la France une importance capitale, dans un environnement collectif où il représente un grand enjeu : deux millions d'emplois non délocalisables qui irriguent notre territoire et font la réputation de la France dans le monde.

C'est pourquoi notre commission pour le contrôle de l'application des lois a voulu se saisir du sujet en liaison étroite avec la commission des affaires économiques. Le rapport de MM. Bécot et Ferrand au Sénat et celui de MM. Léonard et Brot à l'Assemblée nationale s'accordaient pour constater que, si les décrets de la loi de 2009 avaient été bien publiés, le secteur du tourisme avait du mal à s'adapter à une concurrence internationale de plus en plus vive. Je pense aux opérateurs dématérialisés, dont les pratiques ne sont pas toujours transparentes.

Certes, la France reste le pays le plus visité au monde, mais cette quantité masque la part importante prise par le tourisme de transit, qui ne bénéficie guère à la France. Les positions françaises, au vrai, s'effritent. L'heure n'est plus à l'optimisme, il est à la lucidité.

Cela nous appelle à réagir pour retrouver une place de leader, comme nous y invite notre rapport.

Mais à quoi bon légiférer si les moyens ne suivent pas ? Des incertitudes pèsent sur les crédits du tourisme. L'encadrement juridique devrait, aussi, être assoupli. La mise aux normes des équipements hôteliers pour les personnes handicapées est aussi un sujet. Ne vaudrait-il pas mieux cibler l'exigence ? Peut-on l'imposer à tous les hôtels ? On pourrait faire en sorte que cette norme ne s'applique que sur un certain espace territorial. (M. Jean-Claude Requier approuve)

Nos trois rapporteurs, toutes tendances politiques confondues, se sont retrouvés sur les conclusions de ce rapport. J'espère que nous aurons fait oeuvre utile en contrôlant l'application des lois encadrant le tourisme.

M. Luc Carvounas, co-rapporteur pour la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois .  - C'est à l'initiative conjointe de la commission d'application des lois et de celle des affaires économiques qu'un groupe de travail sur l'application de la loi de 2009 a été mis en place. Avec MM. Nègre et Lasserre, nous avons travaillé dans un excellent esprit.

La France est le pays par excellence du tourisme mais risque de ne plus l'être si l'on ne se mobilise pas. Notre pays reste la première destination touristique, pour des retombées estimées à 7,1 % du PIB, et le tourisme emploie près de deux millions de personnes, sur des emplois non mécanisables et non délocalisables.

Les raisons ? Cela tient à la richesse de notre patrimoine, au savoir-vivre à la française, que le monde entier nous envie. Mais le tableau n'est pas aussi idyllique qu'il y paraît à première vue. Les touristes sont à 80 % européens, alors que les touristes de pays émergents feront le gros de la demande de demain. Le Comité pour l'avenir du tourisme français n'est guère optimiste, alors que le ministère déclarait vouloir faire du tourisme une grande cause nationale. Il faut donc agir pour adapter cette industrie à la mondialisation.

Premier défi, les stratégies, imprécises et parcellaires ; d'où notre proposition de créer un observatoire. Deuxième défi, la concurrence. Nous n'attirerons pas les touristes sur la seule base de notre réputation. Nous comptons sur un budget de fonctionnement stable, madame la ministre. Troisième défi, la réglementation, qui appelle un véritable choc de simplification. Quatrième défi, la décentralisation : chaque niveau de collectivité territoriale est habilité à intervenir et le récent projet de loi sur la modernisation de l'action publique n'y remédie pas. Cinquième défi, un parc vieillissant : un quart du parc hôtelier obsolète, un tiers à bout de souffle. Sixième défi, le marché mondial du tourisme, concurrencé par un marché parallèle, les plates-formes de réservation en ligne. A quoi s'ajoute le poids croissant des sites de notation, alimentés selon des critères flous. Sans parler des services non déclarés. L'industrie du tourisme demeure un atout formidable. Je sais, madame la ministre, que nous pouvons compter sur votre détermination. Mobilisons les énergies pour relever le défi.

M. Jean-Michel Baylet.  - Très bien !

M. Louis Nègre, co-rapporteur pour la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois .  - Le tourisme est un atout majeur pour la France, tout le monde en convient. Avec 81 millions de visiteurs en 2011, la France est la première destination mondiale. Les retombées, y compris indirectes, représentent 9 % du PIB. Mais ce moteur est en baisse de régime, du fait de la concurrence mondiale. La position du tourisme français s'érode : troisième rang mondial seulement, derrière les États-Unis et l'Espagne, en recettes globales et seulement le septième rang européen pour le montant des recettes moyennes par touriste ; la part de marché de la France dans le tourisme mondial est passée de 6,4 % en 2000 à 5,7 % en 2009. La France est devenue un pays de transit où les visiteurs ne séjournent pas longtemps. En termes de revenus, nous sommes le troisième pays du monde, avec 39,2 milliards, peu après l'Espagne à 43 milliards mais loin derrière les 83 milliards des États-Unis.

Atout France, opérateur unique, est chargé de la promotion du tourisme mais son budget est cinq fois moindre que celui de son homologue espagnol. Quelque 74 millions, ce n'est pas assez et c'est inférieur de 4,5 % cette année. Comment, à ce compte, mener les actions nécessaires ? Les offices du tourisme représentent 12 000 salariés, dans des structures essentiellement associatives. La récente réforme a cependant été bénéfique.

L'activité de véhicule de tourisme avec chauffeur, différente de celle des taxis en ce qu'elle consiste en des prestations au forfait, a été revue par la loi : les professionnels du secteur souhaitent un aménagement de la réglementation. Il semble que l'on s'y achemine. Les agences de voyage ont perdu l'exclusivité mais vu la gamme de leurs activités élargie. La concurrence d'internet oblige à tenir compte des évolutions des pratiques.

Au total, la loi de 2009 est applicable à 100 %. Ne manquent que quatre rapports sur des sujets non négligeables. Notre système souffre surtout d'un manque de coordination des acteurs. Il faut agir sur la réforme du classement des offices du tourisme, dont 150 seulement sur 2 800 ont été reclassés. Il faut assouplir le ratio du passage de catégorie 1 à 2. Si les professionnels sont incités à monter en gamme, il faut néanmoins aller plus loin. L'évolution de la TVA, qui passe à 10 %, ne représente pas un bon signal pour la restauration. Le dispositif des chèques vacances connaît un vif succès, mais sur 500 000 bénéficiaires supplémentaires attendus, on n'en a pas enregistré plus de la moitié. Le tourisme est un atout pour notre pays mais il est confronté à une concurrence croissante. Il mérite d'être soutenu car il contribue au dynamisme de notre économie.

M. Jean-Jacques Lasserre, co-rapporteur pour la commission des affaires économiques .  - La loi de 2009 devait simplifier l'administration des acteurs et renforcer l'offre. La modernisation de la procédure de classement des équipements hôteliers était l'un de ses apports essentiels. L'hébergement est, de fait, capital. Le classement en étoiles, très administratif, était archaïque et guère incitatif. Le nouveau système intègre les standards internationaux. Tout ce qui concourt à la qualité du service est désormais pris en compte.

Le bilan, à quatre ans, reste en demi-teinte. Si 70 % des chambres sont reclassées, sont surtout concernés les grands hôtels et l'hôtellerie de plein air, tandis que la petite hôtellerie rencontre des difficultés. On ne peut exiger qu'elle rende toutes ses chambres accessibles aux personnes handicapées. Ce serait mettre en péril son équilibre financier. Quelles mesures entendez-vous prendre, madame la ministre, pour la soutenir ?

Les meublés souffrent de difficultés spécifiques. Le coût de la procédure de classement est prohibitif pour les particuliers. Et les deux systèmes -celui des épis pour les gîtes et des étoiles- ne sont pas harmonisés. J'ai déposé un amendement pour faciliter la mise en location des résidences secondaires par les particuliers tout en prévoyant un encadrement.

Deuxième grand sujet, la restauration. La baisse de la TVA accordée par le précédent gouvernement et aménagée en 2005, a été consentie en échange d'engagements : réduction des prix d'au moins 11,8 %, création de 40 000 emplois, investissements. La loi de 2009 encadre le dispositif. Mais la TVA, qui était à 5 %, va passer à 10 %.

M. Jean-Michel Baylet.  - Entre temps, le taux avait été relevé à 7 % !

M. Jean-Jacques Lasserre, co-rapporteur.  - En effet. Donc on va passer de 5 à 10 %. La création d'emplois a été au rendez-vous. (Marques de scepticisme sur plusieurs bancs de gauche) Le dialogue a été renforcé avec les salariés. L'évolution des prix est, en revanche, délicate à mesurer, eu égard à l'importance du poids des intrants dans les repas.

La création du titre de maître restaurateur devait susciter une amélioration de l'offre. Le nombre de titres octroyés étant peu en ligne avec les prévisions, le Gouvernement entend renforcer ce titre. Pouvez-vous nous indiquer de quelle manière ?

Telles sont nos observations sur ce beau sujet. Le groupe d'étude continuera de travailler afin que les acteurs du tourisme puissent valoriser notre merveilleux potentiel. (Applaudissements)

M. Jean-Michel Baylet .  - Quelques chiffres disent l'importance du tourisme : 83 millions de touristes en 2012 ; 7,2 % du PIB ; un million d'emplois directs, autant d'emplois indirects. Mais un secteur en pleine mutation : 578 millions de touristes dans le monde en 2006, plus d'un million en 2012, le double sans doute en 2030. C'est dire combien est important le potentiel de croissance.

Cependant, la compétition s'en trouve accrue. La loi Tourisme de juillet 2009, applicable à 100 %, a fait d'Atout France un levier. L'idée de créer l'observatoire que préconise le rapport mérite d'être suivie : un tel observatoire, qui existait lorsque j'étais ministre du tourisme et que l'on a abandonné depuis lors, donnerait un outil incomparable.

La récente loi Métropole est restée au statu quo : la compétence demeure partagée, et je m'en félicite, mais en complémentarité. Les collaborations entre tous les acteurs sont encouragées. Voir les contrats de destination : en Tarn-et-Garonne, ils sont un succès. Le tourisme d'itinérance a été mis en avant. Le dispositif, simple, permet de diversifier l'offre.

L'aménagement du territoire est aussi concerné. C'est un complément d'activité, via les gîtes ruraux, par exemple.

Le tourisme est un gisement d'emplois. Or, 50 000 ne sont pas pourvus. Vous avez confié une mission au directeur de Pôle emploi ; nous en attendons les préconisations.

Il faut garantir aux touristes une meilleure sécurité, car ils sont une proie facile. Les vols subis par des touristes chinois ont beaucoup ému dans leur pays. Vous avez mis en place des dispositifs protecteurs, et c'est une bonne chose.

La loi de 2009 a modernisé les indicateurs mais les petits établissements peinent à faire face aux investissements requis par les mesures d'accessibilité et de sécurité. Internet et les réseaux sociaux ont bouleversé le secteur. Le rapport préconise de mettre en oeuvre une vraie stratégie digitale. Atout France est l'interlocuteur idoine. Les chambres d'hôtes méritent d'être accompagnées. La question de l'accès aux vacances pour tous, enfin, mérite d'être posée. Quelles pistes, madame la ministre ?

L'enjeu est de conforter notre rang de première destination touristique mondiale. L'État doit être, en la matière, stratège. Le budget du tourisme est de bon augure pour préserver la place de la France, que beaucoup de pays nous envient. L'attraction pour la destination France doit s'amplifier. Comptez sur l'appui des sénateurs du RDSE. (Applaudissements sur les bancs RDSE)

Mme Corinne Bouchoux .  - La France est un pays d'accueil touristique important, un sujet qui méritait le rapport de la commission sénatoriale d'application des lois. Nous partageons son diagnostic, avec quelques nuances. Le modèle français souffrirait d'un essoufflement dû aux normes. Certes, mais les normes sont aussi protectrices, tant la concurrence « grise » est préoccupante. Le secteur exerce une pression sur les milieux naturels, il faut y être attentif. Certaines collectivités territoriales se sont endettées pour une course à l'équipement, et se pose également le problème des postes non pourvus, comme du travail précaire. La course à la publicité entre les territoires n'est pas non plus la solution optimale.

Les vacanciers veulent un tourisme plus doux, plus écologique : il faut combler cette attente.

Les centrales de réservation sont un problème. Le rapport pointe les améliorations possibles.

Le tourisme en milieu rural mérite d'être encouragé, pour améliorer l'équilibre du secteur.

Se pose également la question du mode d'accès. Réfléchissons à la place, sacro-sainte, de l'automobile.

Il convient aussi d'améliorer la qualité des emplois dans l'écotourisme, pour en faire une branche à part entière.

N'oublions pas les lois Mer et Littoral, au risque de mettre en danger les zones les plus attractives. Le développement des chèques vacances écotourisme pourraient favoriser un tourisme durable.

Se pose, enfin, la question éducation. L'éducation à l'environnement pourrait dessiner les traits d'un tourisme plus durable.

Atout France apparaît comme une instance entièrement masculine alors que le tourisme est mixité à tout point de vue.

Oui au citoyen touriste, pour un tourisme de demain plus respectueux de l'environnement.

Mme Évelyne Didier .  - Promouvoir et consolider l'industrie du tourisme, c'est un objectif que nous partageons. Avec 2 millions d'emplois, 230 000 entreprises, plus de 6 milliards d'euros, le tourisme a son poids dans notre économie et dans l'aménagement du territoire.

Mais se pose la question du personnel et de l'accès aux vacances. Trop de jeunes et d'enfants qui ne partent pas en vacances, trop d'emplois saisonniers. Cela suppose un projet national ambitieux ; aussi la loi de 2009 est-elle insuffisante : désengagement de l'État, transfert des missions de la DGCCRF, absorption de la direction du tourisme. Bref, le ministère a été déshabillé.

Dès 2008, nous dénoncions le manque de moyens. Le rapport d'information ne fait pas autre chose, qui déplore le manque de moyens d'Atout France. Or, les communes ont besoin d'aide ; à l'heure où l'on chercher à développer l'économie circulaire, les départements ont un rôle à jouer.

Nous regrettons que la loi de 2009 n'aborde pas la question des conditions de travail et soumette les travailleurs du tourisme à la loi du moins-disant. Il convient donc de réactiver les négociations collectives et de développer les partenariats. Quelles sont les conclusions de la mission confiée au président du conseil d'administration de pôle emploi ?

Chacun a droit aux vacances, vecteur d'émancipation. Or un Français sur deux ne part pas en vacances. Sont en particulier touchés les agriculteurs, les employés, les ouvriers. Face à ce constat, les collectivités territoriales ont de moins en moins de moyens pour porter une politique de tourisme social. La fracture est bien là. Le 12 novembre dernier, vous avez annoncé, madame la ministre, vouloir la réduire. Comment concrétisez-vous cet engagement dans la loi de finances ? (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Jacques Mirassou .  - Je suis heureux, quitte à m'éloigner du ton du rapport, d'évoquer les enjeux sociaux et économiques du tourisme. Nous pouvons être fiers de notre industrie du tourisme. La France reste la première destination touristique mondiale, faut-il le rappeler ? D'autres motivations doivent animer pourtant notre politique du tourisme. Dernièrement, un Français sur deux a dû renoncer à des vacances. Cette approche sociale est indissociable de l'ambition du président de la République de faire du tourisme une priorité nationale. Ne dit-on pas que les voyages forment la jeunesse ? Je salue votre engagement, madame la ministre, à réduire cette fracture qui est ressentie, à juste titre, comme une injustice. Une meilleure prise en compte des Français, avec le label « Destination pour tous », relancera le secteur. De même que la mise aux normes des équipements pour les personnes handicapées, quand bien même elle sera longue.

Renouvelons notre approche du tourisme : la demande est de plus en plus diversifiée, avec des publics variés et des temporalités éclatées, malgré la standardisation opérée par internet.

Pour conclure, à partir d'un diagnostic lucide et sans concession, la France doit reconquérir sa place de leader. La réforme est bien engagée avec la refonte de la gouvernance. Privilégions une approche innovante avec les contrats de destination. Nous sommes pleinement disponibles, madame la ministre, pour mener ce travail à bien !

M. Michel Bécot .  - Je veux dire ma satisfaction de voir le tourisme prendre la place qui lui revient dans le débat parlementaire. La mondialisation, qu'elle soit bonne ou mauvaise, appelle à une modernisation. Félicitons-nous que la loi de 2009 ait attiré notre attention sur ce dossier essentiel. Je salue le travail décisif de M. Hervé Novelli, ainsi que celui de l'opposition d'alors : Mme Khiari, rapporteur, ne s'était pas opposée à l'adoption du texte. Les trente décrets prévus ont été pris, dont vingt-deux dans les six mois. Le sujet n'est donc pas tant l'application de la loi que de réussir le défi de 2020, avec l'augmentation prévue du nombre de visiteurs venant des pays émergents. La loi de 2009 nous a donné Atout France, un opérateur unique dont le travail est unanimement salué. Reste qu'un budget de 74 millions demeure nettement insuffisant pour assurer la promotion de la marque France.

La promotion de notre industrie touristique passe aussi par un classement rénové des équipements hôteliers, selon des critères transparents. Avec l'actualisation des normes tous les cinq ans, nous pourrons accélérer la mise aux standards internationaux de nos hôtels. Les grands noms nomme Le Crillon à Paris ne doivent pas nous faire oublier la petite hôtellerie, financièrement fragile car notre pays souffre d'un déficit chronique de chambres.

J'en viens à la mesure la plus symbolique de la loi de 2009 : la baisse de la TVA dans la restauration. Elle n'était pas un chèque en blanc puisqu'elle était assortie de contreparties en termes de prix, de création d'emplois et d'amélioration de la situation des personnels.

M. Jean-Michel Baylet.  - Promesses non tenues !

M. Michel Bécot.  - Tout de même : la petite restauration en milieu rural les a tenues ; et la baisse de prix a bien eu lieu, mais plutôt de 2,2 % à 2,5% que de 3 %.

J'insisterai, pour ma part, sur la clarification des compétences des collectivités territoriales en matière de tourisme. La dernière loi sur les métropoles n'y aidera guère, même si la prise de leadership par une collectivité n'encourt pas de risque constitutionnel.

Le groupe UMP gardera en mémoire les apports de la loi de 2009 mais aussi et surtout les précieuses préconisations de ce rapport d'application. (Applaudissements à droite)

Mme Colette Giudicelli .  - Je serai brève puisque les précédents intervenants ont déjà dit beaucoup de choses. Le président de la République a érigé, devant les ambassadeurs réunis à l'Élysée, le tourisme en grande cause nationale. Et c'est tant mieux car les bénéfices du secteur ont été trop longtemps considérés comme une rente.

Les touristes sont de plus en plus nombreux -le cap du milliard a été franchi en 2012- mais la clientèle est de plus en plus volatile. Tous les voyants sont au rouge, notre pays perd des parts de marché. Il a perdu trois places en deux ans, c'est là où je diverge avec M. Baylet sur le constat. La Suisse, l'Allemagne, le Royaume-Uni sont désormais devant nous. Charge à nous de reconquérir notre place.

Notre pays souffre d'un handicap en matière de tourisme haut de gamme. Le nouveau classement y remédie. Mon département, Monaco compris, totalise 66 millions de nuitées et 12 millions de visiteurs. Il représente à lui seul 1 % des touristes internationaux dans le monde...

M. Jean-Michel Baylet.  - Nous ne pouvons pas rivaliser !

Mme Colette Giudicelli.  - On a observé une montée en gamme qui répond aux attentes des clients venant des pays émergents. Pour preuve, une hausse de 13 % de la fréquentation des hôtels quatre et cinq étoiles.

La petite hôtellerie, cependant, peine à suivre ; le plan de modernisation lancé en 2008 doit être poursuivi. Pouvez-vous, madame la ministre, nous en donner l'assurance ?

Parce que le tourisme représente un important levier de croissance, nous comptons sur vous, madame la ministre, pour poursuivre les efforts de vos prédécesseurs et redonner de la compétitivité à un secteur qui emploie deux millions de personnes. (Applaudissements à droite)

Mme Hélène Masson-Maret .  - Un constat s'impose : quatre ans après la loi de 2009 subsistent bien des questions : l'efficacité des politiques publiques, l'organisation, la baisse de 4,5 % du budget d'Atout France, le relèvement de la TVA et une réforme du classement en panne.

Mais je veux insister sur la nécessité d'accélérer le classement des offices du tourisme en trois catégories. La démarche reste volontaire. La dénomination de commune touristique classée représente un avantage certain. Pour être classée, une commune doit déposer un dossier, préparé par l'office de tourisme, qui est validé en dernière instance par le préfet. Au 31 mars dernier, 451 offices seulement étaient reclassés sur les 2 800 existants. N'est-il pas du devoir de l'État de mieux informer les collectivités territoriales ? Il existe un risque certain que certains offices soient privés de ce classement, ce qui aurait des conséquences très négatives, en particulier pour la première catégorie. Les différents classements doivent être opérés rapidement. Comment comptez-vous, madame la ministre, combler ce retard très important ?

Puisque je parle des territoires, les contrats de destination, que vous avez signés avant l'été, ne sont guère nouveaux. Certains, dont ceux pour les Antilles, étaient le fait du précédent gouvernement.

Booster un tourisme qui s'essouffle, notamment en jouant la carte de la culture, développer l'attractivité de nos territoires, c'est certainement donner de nouvelles ressources à notre économie. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Sylvia Pinel, ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme .  - Merci pour vos interventions et ce rapport qui me donne l'occasion de rappeler nos priorités et l'ambition de ce gouvernement.

La France, comme vous le savez, est la première destination touristique au monde. Avec deux millions d'emplois, le tourisme représente un secteur fondamental pour notre économie, devant l'industrie automobile. Le secteur contribue directement au rayonnement et à l'image de la France ; en cela il sert nos entreprises, nos exportations et l'emploi. Ce n'est pas anodin dans ces temps de lutte acharnée pour l'emploi et la croissance.

Parce que nous ne pouvons plus vivre sur nos acquis, nous devons structurer la filière et apprendre à jouer collectif autour de stratégies partagées. Je ne reviendrai pas sur le débat autour du chef de filat ; je plaide pour des partenariats solides et souples avec tous les acteurs du tourisme. La démarche innovante que j'ai initiée avec les contrats de destination valorisera davantage nos territoires et renouvellera notre offre. J'en ai déjà signé deux qui préfigurent les bonnes pratiques et les méthodes que d'autres pourront s'approprier. Pas moins de trente candidats ont déposé des demandes. La nouveauté de ces contrats, madame Masson-Maret, est qu'ils associent partenaires publics et privés, du transport à l'artisanat, en passant par la gastronomie et la culture, sans oublier l'écotourisme et les préoccupations environnementales chères à madame Bouchoux. Je veux saluer les projets de cyclotourisme autour du canal du Midi ou de la Loire. C'est dire que tout ce qui peut concourir à l'attractivité d'un territoire peut figurer dans ces contrats de destination nouvelle formule.

J'ai également voulu renforcer la gouvernance du secteur. Tout le monde nous envie, à l'étranger, l'expertise d'Atout France : c'est le bras armé de notre politique du tourisme.

M. Louis Nègre.  - Avec une baisse de sa dotation ?

Mme Sylvia Pinel, ministre.  - J'ai veillé à préserver son budget dans les différentes lois de finances.

Mme Bouchoux m'a interpellée sur un sujet qui me tient à coeur : oui, il faut plus de parité au sein du conseil d'administration d'Atout France ; j'ai veillé à y nommer deux femmes depuis ma nomination. La situation actuelle tient au fait que peu de femmes exercent des responsabilités dans l'artisanat ou le tourisme. La direction de l'établissement, en revanche, est parfaitement paritaire...

Nous devons rechercher une plus grande efficacité de la promotion de la marque France. Cette promotion doit passer par internet et, dans les salons, sous une bannière unique là où nous arrivions autrefois en ordre dispersé. J'ai également réactivé le Conseil national du tourisme.

L'amélioration de notre offre, autre priorité, passe par une adaptation des formations de l'hôtellerie, tout le monde en conviendra. D'où l'accent mis sur la formation professionnelle, sur la nécessité de pourvoir les postes vacants et de sécuriser les emplois saisonniers. Le rapport Noguet sera rendu prochainement ; nous débattrons de ses conclusions avec les partenaires sociaux.

Un mot sur les emplois d'avenir puisque, vous le savez, le président de la République a voulu les étendre au tourisme. J'ai mobilisé les préfets, je serai particulièrement attentive à leur montée en puissance.

Améliorer l'accueil, c'est aussi faciliter la délivrance des visas de circulation pour les hommes d'affaires et les artistes mais aussi assurer la sécurité des touristes. Les efforts entrepris avec M. Valls ont porté leurs fruits : un guide de prévention en six langues est désormais disponible et les vols à la tire ont baissé de 22 % en juillet et août à Paris.

Améliorer la qualité de l'offre passe aussi par le classement rénové des équipements hôteliers ; si 75% des hôtels -et 85 % des chambres- ont été reclassés, nous devons, il est vrai, accompagner la petite hôtellerie indépendante. Concernant l'accessibilité aux personnes handicapées, je ne cesse de dire que nous devons trouver l'équilibre. L'objectif de la loi de 2005 ne sera pas atteint en 2015, nous en avons pris acte en prévoyant un déploiement réaliste des normes. La banque publique d'investissement travaillera à financer la modernisation et l'accessibilité de la petite hôtellerie indépendante.

Il importe aussi d'adapter notre offre aux exigences des nouvelles clientèles. L'investissement touristique est encore trop peu orienté vers l'offre d'hébergement, notamment dans les zones littorales ou de montagne ; aussi ai-je installé un groupe de travail sur ce dossier pour examiner les voies et moyens de rénover le parc et de développer le tourisme en montagne hors de la période hivernale. Je suivrai la même démarche pour le tourisme sur le littoral. Tout cela en tenant compte des spécificités locales ; une boîte à outils sera mise ainsi à la disposition des élus.

Le classement des offices de tourisme, s'il a contribué à notre montée en gamme, reste trop peu lisible et trop complexe à mettre en oeuvre. J'amenderai le dispositif pour tenir compte des difficultés signalées par les élus locaux.

La modernisation de notre offre repose aussi sur le numérique. Nombre de professionnels se plaignent des sites de réservation en ligne ; si des comportements sont illégaux, il faut les sanctionner mais, surtout, il nous faut sortir par le haut de ce débat. Le numérique représente incontestablement un levier pour notre industrie touristique ; prenons résolument ce virage avec Atout France. Pour améliorer la qualité de l'offre, j'ai mis en place un comité de filière pour la restauration ; les contrats d'avenir n'ayant pas produit les résultats escomptés, ils céderont la place à une démarche partenariale.

La TVA est passée de 5,5 % à 7 %. Nous la maintenons, après un bilan contrasté, au taux intermédiaire. Avec le comité de filière, nous travaillons à définir de nouvelles priorités. La filière, je le rappelle, bénéficie du CICE et des contrats de génération. Nous avons défini dix axes autour de l'information aux consommateurs, de la valorisation des métiers et des savoir-faire et des conditions de travail. J'ai voulu pousser le label « Fait maison », dont vous avez largement débattu, et faire évoluer le titre de maître restaurateur pour le simplifier afin de séduire davantage de professionnels.

Troisième volet de mon action, et je sais que vous partagez cette préoccupation : l'accès aux vacances pour tous, alors qu'un Français sur deux ne part pas en vacances. J'ai confié une mission au contrôle général économique et financier pour identifier les freins et proposer des dispositifs concrets. Les freins peuvent être financiers, mais aussi psychologiques : certaines familles pensent que les vacances ne sont pas pour elles... Des opérations pilotes ont eu lieu en Midi-Pyrénées et en Rhône-Alpes, qui visaient les jeunes apprentis et les familles. Un bilan sera en outre dressé de l'expérimentation de la diffusion des chèques vacances dans les PME-TPE, l'objectif fixé étant loin d'être atteint. Il faut agir sur la demande, mais aussi sur l'offre, animer le marché et capitaliser sur la mobilisation des acteurs.

Pour les Français achetant des résidences en temps partagé, le régime de la loi de 2009 n'est pas assez protecteur face à des sociétés de gestion peu scrupuleuses, ce qui entraîne des contentieux ubuesques. Le texte sur le logement, que vous examinerez la semaine prochaine, doit y remédier.

Les conditions sont réunies pour le succès de notre politique touristique avec des orientations stratégiques claires. Mais il reste beaucoup à faire. Le secteur est en bonne santé au niveau mondial : nous avons passé la barre du milliard de touristes dans le monde en 2012 et le potentiel de croissance est de 3 à 4 % pour un doublement à l'horizon 2020. Dans le même temps, la concurrence s'intensifie. La France a des atouts, elle doit relever le défi du nombre comme celui des mutations dans les comportements des consommateurs. Je veux que la France reste le pays le plus attractif de tous pour tirer la croissance et l'emploi. Les classes moyennes des pays émergents doivent être notre cible. M. Carvounas l'a dit, la fréquentation de certaines destinations, comme la Chine, croît. Le numérique permet d'individualiser les séjours ? Devenons le pays du e-tourisme ! Fidéliser la clientèle existante, faire évoluer l'offre, capter de nouvelles clientèles, augmenter les retombées économiques du tourisme, tels sont mes objectifs. Nous devons, pour cela, enrichir notre offre autour de pôles de renommée mondiale facilement accessibles -ce qui engage tant les transports que les visas- et ne plus la concentrer sur Paris et la Côte-d'Azur, porter notre attention sur le tourisme d'affaires, le tourisme sportif, le tourisme durable. Il faut attirer plus de visiteurs et leur donner envie de France.

Je compte sur votre soutien dans la conduite de cette politique, essentielle pour l'attractivité de la France et son redressement. (Applaudissements)

Prochaine séance demain, mercredi 16 octobre 2013, à 14 h 30.

La séance est levée à 23 h 40.

Jean-Luc Dealberto

Directeur des comptes rendus analytiques

ORDRE DU JOUR

du mercredi 16 octobre 2013

Séance publique

A 14 heures 30 et le soir

1. Désignation des trente-trois membres de la mission commune d'information sur la réforme des rythmes scolaires afin d'évaluer sa mise en place, les difficultés rencontrées et le coût induit pour l'ensemble des communes

2. Proposition de résolution européenne sur les normes européennes en matière de détachement des travailleurs (n°528, 2012-2013)

3. Débat préalable à la réunion du Conseil européen des 24 et 25 octobre 2013

À 21 heures 30

4. Débat sur la place des femmes dans l'art et la culture