Maisons de naissance
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle l'examen de la proposition de loi autorisant l'expérimentation des maisons de naissance, à la demande du groupe UDI-UC.
Discussion générale
Mme Muguette Dini, auteure de la proposition de loi et rapporteure de la commission des affaires sociales . - Les maisons de naissance sont des structures où une sage-femme ou un binôme de sages-femmes réalisent le suivi de grossesse, l'accouchement et le suivi post-partum des femmes. Éloignées de la tradition française, elles sont fréquentes à l'étranger sans que le taux de mortalité infantile y soit plus élevé.
Le collège des gynécologues-obstétriciens approuve désormais cette expérimentation des maisons de naissance, que je défends depuis 2010 au nom du respect des femmes qui veulent accoucher autrement.
Les maisons de naissance devront être attenantes à une maternité ; un décret en Conseil d'État précisera les modalités de mise en oeuvre de l'expérimentation et les conditions de sécurité de prise en charge des parturientes. L'expérimentation, pour une durée maximale de cinq ans, pourra être interrompue à tout moment par la Haute autorité de santé (HAS).
Ce texte ne modifie en rien les règles de la profession des sages-femmes. Comme le prévoit le code de la santé publique, elles feront appel à un médecin en cas de difficulté. Il ne modifie pas non plus le remboursement à 100 % de l'accouchement. Savez-vous que les sages-femmes réalisent déjà 80 % des accouchements par voie basse, non opératoires, 92 % dans le secteur public ?
L'Allemagne et la Belgique comptent respectivement 150 et 12 maisons de naissance. Le taux de mortalité infantile y est de 3,5 ? et de 3,3 ?, contre 3,4 ? en France. Preuve est faite que ces maisons de naissance offrent des conditions de sécurité très satisfaisantes.
Je l'ai vérifié sur place et sur pièces à l'hôpital de Pontoise et au Calm (Association « comme à la maison ») à la maternité des Bluets à Paris. Depuis 2010, la maison de naissance de Pontoise refuse 150 femmes par an, bien que ce projet n'ait donné lieu à aucune publicité. Le succès de ces deux projets repose sur un triptyque entre parents, sages-femmes et maternité, mais aussi sur la bonne volonté des acteurs locaux. Reste qu'il faut sécuriser juridiquement leur statut et l'intervention des sages-femmes.
Certains s'inquiètent que ces maisons de naissance ne remplacent des petites maternités que l'on fermerait.
M. Gérard Longuet. - Eh oui !
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Cela ne sera pas le cas puisque chaque maison de naissance sera attenante à une maternité. Dans ces conditions, pas de maternité, pas de maison de naissance.
La maternité n'est pas une maladie, certaines femmes veulent se réapproprier le caractère naturel de l'accouchement. Nous n'avons pas à les juger, mieux vaut les accompagner ! (Applaudissements au centre, à droite et sur les bancs écologistes)
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé . - La naissance d'un enfant est un moment important dans la vie d'une femme, et d'ailleurs aussi d'un homme. C'est une aventure individuelle et familiale. La responsabilité des pouvoirs publics est de tout faire pour la sécuriser dans le respect du choix de chacun. Quand la France occupe une place singulière en Europe avec son fort taux de fécondité, supérieur à deux enfants par femme, je dois proposer une politique globale ambitieuse de la périnatalité.
En quinze ans, le paysage des maternités a changé : on est passé de 800 établissements au milieu des années 1990 à 550 en 2009, avec une baisse de 11 % des maternités de niveau II et III. Le nombre de maternités pratiquant plus de 1 500 accouchements par an a triplé.
Cependant, certains indicateurs de santé périnatale ne sont guère satisfaisants : 7,7 % d'enfants prématurés, entre 8 et 12 décès de femmes sur 100 000 accouchements, sans parler des terribles inégalités sociales et territoriales. Le taux de césariennes avait baissé mais il s'est stabilisé depuis cinq ans autour de 20 %.
De là la stratégie nationale de santé mise en place par le Premier ministre. Nous nous efforcerons de mieux détecter les grossesses à risques, en lien avec les services de protection maternelle et infantile. L'élue locale que je suis ne méconnaît pas le problème des petites maternités, nous sommes sans doute allés trop loin dans les fermetures. J'ai pris la décision de maintenir la maternité de Die parce que c'était un territoire fragilisé et après avoir obtenu des garanties suffisantes de sécurité.
Sans doute sommes-nous aussi allés trop loin dans la technicisation des naissances. L'intention était bonne. Comme femme, comme mère, je crois qu'on ne peut pas balayer d'un revers de main la question de la douleur.
M. Gérard Longuet. - Très juste.
Mme Marisol Touraine, ministre. - Il fut un temps où l'on considérait que les femmes devaient souffrir. La question est aujourd'hui de préserver leur liberté de choix, y compris dans ses implications financières.
Comment faire en sorte que toutes les femmes qui le souhaitent puissent mettre au monde dans un univers moins médicalisé ? En développant les filières d'accouchement physiologique dans toutes les maternités. Cela ne relève pas de la loi, je saisirai les agences régionales de santé. Il y a quelques jours, à Quimper, j'ai visité une salle d'accouchement physiologique au sein même d'une maternité classique.
Vous avez raison de dire qu'une femme enceinte n'est pas une malade. Certaines veulent des techniques moins invasives, des équipements moins agressivement lumineux. C'est possible en maternité. Une offre complémentaire avec les maisons de naissance ? Je n'y suis pas opposée et je crois aux vertus de l'expérimentation, d'autant que les gynécologues-obstétriciens n'y sont plus opposés. Cette proposition de loi offre toutes les garanties de sécurité : maison de naissance obligatoirement attenante à une maternité, cahier des charges rédigé par la HAS, décret en Conseil d'État et établissement de la liste des maisons de naissance autorisés par le ministre.
Si les maisons de naissance ne sont pas notre priorité, nous aurons une position de sagesse sur ce texte. (Quelques applaudissements sur certains bancs socialistes et UMP)
M. Gilbert Barbier . - Voici que ce serpent de mer refait surface. Les maisons de naissance, un projet discuté depuis 1998, ont été autorisées à titre expérimental par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, puis censurées par le Conseil constitutionnel pour des raisons de forme et, peut-être, de fond car le consensus n'était pas réuni. Mme Touraine, alors députée, s'était ralliée à cette proposition en commission mixte paritaire. Le collège des gynécologues-obstétriciens serait revenu sur son refus de 2010.
La mortalité infantile a été divisée par dix en quarante ans grâce au suivi renforcé des grossesses. Certes, la maison de naissance sera attenante à une maternité avec laquelle elle passera une convention ; néanmoins, une question essentielle se pose : qui paiera ? L'État, les collectivités territoriales ou, pourquoi pas, des investisseurs privés ? Les maisons de naissance concerneront seulement quelques milliers de femmes sur 800 000 accouchements par an. Je préfère, vu l'état de nos finances publiques, consacrer nos maigres crédits à renforcer le personnel dans les maternités existantes.
Si la maison de naissance est une structure autonome, les sages-femmes devront souscrire une assurance. Et en cas de problème, après un transfert dans un service d'obstétrique, qui sera responsable ? Le gynécologue de la maternité ou la sage-femme qui aurait, par exemple, décidé trop tardivement du transfert ?
Les maisons de naissance subtiliseront un certain nombre d'actes entrant dans le cadre de la T2A des services auxquels elles seront adossées. La proposition de loi prévoit que leur activité sera comptabilisée avec celle des maternités. Quid des effets de seuil ? Quelle incidence sur la tarification ? Ces questions sont encore sans réponse.
Prenons garde de ne pas mettre le doigt dans un engrenage idéologique. (M. André Gattolin s'exclame) On sait que certaines communautés réclament des médecins uniquement féminins... (Mme Catherine Procaccia approuve)
Hier, j'ai soutenu, et je l'assume, la fermeture des petites maternités. Aujourd'hui, je m'abstiendrai sur ce texte. Pourquoi, cependant, ne pas encourager des « salles nature » au sein des maternités, avec des sages-femmes dédiées ? (M. René-Paul Savary applaudit)
Mme Aline Archimbaud . - La médicalisation des accouchements s'est renforcée avec les avancées de la recherche. La sécurité doit être élevée et constante, pour la mère comme pour l'enfant. Cependant, des femmes considèrent que certains protocoles, y compris dans les maternités de type 1, sont encore trop médicalisés et souhaitent accoucher de manière plus naturelle, en évitant un arsenal technologique hospitalier qui peut être stressant.
L'idée est d'entendre la forte demande des femmes d'exercer une liberté de choix, de la manière la plus éclairée possible, en fonction du degré de risque de la grossesse. Il doit être très encadré sur le plan de la sécurité. L'exigence d'avoir un temps de passage de la maison de naissance au service hospitalier égal à celui du passage d'une chambre d'hôpital à la salle de naissance est non négociable.
Le problème de l'égalité d'accès aux maisons de naissance reste posé ; je plaide en tout cas pour qu'on évite les dépassements d'honoraires. Actuellement, à l'hôpital de Pontoise, les sages-femmes sont salariées à l'hôpital, le problème ne se posera pas ; mais la tarification en libéral étant inadaptée, des dépassements sont à craindre. L'assurance maladie devrait pouvoir reconfigurer la tarification des accouchements en maison de naissance, qui permettent des économies substantielles.
Nous sommes favorables à cette expérimentation. Dans cinq ans, le dispositif sera évalué précisément. Ses économies et ses bienfaits seront mesurés avant d'envisager toute généralisation. (Applaudissements sur les bancs écologistes, au centre et à droite)
M. René-Paul Savary . - « Vivre la naissance d'un enfant est notre chance la plus accessible de saisir le sens du mot miracle », selon l'écrivain Paul Carvel. Ce miracle, de très nombreuses femmes le connaissent chaque année, mais la mortalité infantile comme la mortalité maternelle sont, en France, malheureusement supérieures à la moyenne européenne. Notre pays est passé du septième rang européen en 1999 au vingtième en 2009. Les écarts entre les départements vont de un à trois, pour un nombre équivalent de naissances, sans que les causes de ces écarts soient analysées. Il faudrait procéder à une analyse, comme le recommande la Cour des comptes -qui relève par ailleurs que 46 % des décès maternels entre 2000 et 2006 peuvent être considérés comme évitables.
Cette proposition de loi ne doit pas pour autant être écartée. Le gouvernement précédent avait souhaité expérimenter les maisons de naissance. La grossesse est un état physiologique, non pathologique, même s'il peut le devenir. La proposition de loi de Mme Dini reprend l'essentiel du texte proposé lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011. L'expérimentation durera au maximum cinq ans. Les maisons de naissance seront attenantes à une structure comportant un service de gynécologie et liées avec elle par une convention. L'exigence de sécurité est respectée. C'est fondamental.
A l'échelle départementale, si une maternité ferme, il sera difficile d'expliquer à la population l'ouverture d'une maison de naissance. Expérimentation et proximité sont prévues par ce texte, un strict cahier des charges sera établi par la HAS. L'ARS pourra suspendre l'expérimentation en cas de manquement grave et immédiat à la sécurité.
Madame la ministre, mon groupe peut accepter ce texte parce qu'il remplit deux conditions : l'activité de la maison de naissance sera comptabilisée au titre de la maternité et la nouvelle structure sera adossée à celle-ci. La proposition de loi précise que les sages-femmes assureront l'accouchement des femmes dont elles ont suivi la grossesse. En France, neuf enfants sur dix naissent sous assistance médicale ; en Allemagne, les sages-femmes des maisons de naissance assurent la prévention et le suivi et n'utilisent des appareils médicaux que si cela se révèle nécessaire. L'obstétrique française mise sur la technicité et la sécurité ; les femmes n'ont guère le choix. Dans un reportage diffusé sur Arte, le 19 février 2013, Grossesse high tech ou accouchement naturel : quel choix ?, le professeur Cabrol attire l'attention sur la nécessité de faire attention à la prise en charge humaine et psychologique des parturientes, de ne pas médicaliser outre mesure. Il n'empêche qu'il faut assurer la sécurité. Pour accoucher dans une maison de naissance, la maman doit connaître une grossesse sans risques, non primipare ; le bébé doit être en bonne santé.
L'accouchement n'est pas une mince affaire, de moins en moins de femmes osent affronter la performance physique sans assistance médicale. Aujourd'hui, 20 % des accouchements sont déclenchés artificiellement, ce qui est stressant pour l'enfant. Le processus naturel trouve-t-il sa place dans notre monde moderne ? Il est difficile de convaincre certaines femmes que l'accouchement naturel peut être plus favorable à sa santé et à celle de son enfant que la césarienne.
L'accouchement naturel provoque la libération d'une grande quantité d'ocytocine, une hormone qui favorise l'attachement de la maman au bébé ; c'est une barrière contre la dépression post-partum, un atout pour commencer la vie dans de bonnes conditions. Lors d'une césarienne, ce processus n'est pas systématique.
Cette expérimentation est donc dans l'air du temps. L'accouchement est avant tout un acte naturel. S'il devient pathologique, il doit être rapidement médicalisé. C'est ce que propose ce texte, notre groupe le soutiendra. (Applaudissements du groupe écologiste et à droite)
Mme Catherine Génisson . - Je salue la force de conviction et la qualité du rapport, très argumenté, de Mme Dini.
Cette proposition de loi arrive dans un contexte où le réseau de maternités a été profondément restructuré depuis 1998. Rien n'est plus naturel que de pouvoir bénéficier d'un suivi personnalisé et de vivre, quand c'est possible, son accouchement dans un environnement chaleureux, détendu et apaisé. Non, la grossesse, l'accouchement ne sont pas des maladies.
Reconnaissons que les progrès médicaux ont été déterminants pour le suivi de grossesses pathologiques. Quel est le bon niveau de la technique dans la prise en charge médicale ? Soyons conscients d'une possible surmédicalisation, mais fiers de ces progrès médicaux.
L'égalité d'accueil des femmes dans les maisons de naissance, dans le secteur public comme dans le secteur privé, doit être totalement respectée. Merci, madame la ministre, d'avoir tenu un langage clair car nos concitoyens s'inquiètent de voir se réduire l'offre de proximité. Madame la rapporteure, vous avez justement souligné qu'en aucun cas, une maison de naissance ne saurait se substituer à une maternité qui ferme. La fermeture de certaines maternités ne vise qu'à satisfaire l'exigence de sécurité, vous avez eu raison de le rappeler, madame la ministre. Pour autant, l'aménagement équilibré du territoire reste d'actualité.
Ce sujet est très sensible. Il serait maladroit d'expérimenter des maisons de naissance là où ferment des maternités.
Les autorisations d'expérimentation relèveront de la décision du Gouvernement. La HAS veillera au cahier des charges. Cette exigence qualitative est fondamentale. Nous en avons longuement débattu en commission. Ne pénalisons pas non plus le budget des hôpitaux. La prise en charge à 100 % de la grossesse, de l'accouchement, des soins de suite de couches doit être sanctuarisée. Pour le groupe socialiste, les Migac peuvent être sollicitées mais seulement au bénéfice du service public. Les modalités de financement doivent en outre permettre l'intervention libérale des sages-femmes en maisons de naissance lorsqu'elles revendiquent une autonomie de fonctionnement.
Notre groupe votera cette expérimentation, sachant que vous avez indiqué, madame la ministre, vouloir encourager la création de salles de naissance physiologique dans les maternités. (Applaudissements à gauche)
Mme Laurence Cohen . - Cette proposition de loi pose de nombreuses questions et n'apporte guère de réponses concrètes, pour lesquelles elle renvoie trop largement au pouvoir réglementaire ; le dessaisissement du Parlement est important, c'est notre première critique.
N'aurait-il pas mieux valu légiférer pour permettre à toutes les femmes de choisir leur mode d'accouchement ? On en est loin, d'autant que la loi HPST a conduit à fermer des maternités de proximité. Je suis heureuse de vous avoir entendu affirmer, madame la ministre, vouloir stopper l'hémorragie des fermetures des maternités. Encore faudra-t-il leur donner des moyens financiers et humains pour fonctionner en toute sécurité.
Les sages-femmes pourraient exercer leur expertise de manière autonome si d'autres questions ne se posaient pas. Il n'est pas pertinent de s'appuyer, pour justifier des maisons de naissance, sur le recours à l'allaitement maternel, qui relève d'un choix personnel des femmes. Votre rapport ne précise à aucun moment le statut juridique des maisons de naissances. Dans les établissements privés, ce pourrait être une société d'exercice libéral de la profession de sage-femme. Nous avons vu les dégâts de la financiarisation du secteur de la biologie médicale... Comment accepter de financer sur des fonds publics des structures juridiques non définies qui pourront pratiquer des dépassements d'honoraires ? A l'inverse, les sages-femmes pourraient exercer en libéral au sein de l'hôpital public. Nous n'accepterons pas un nouveau cheval de Troie de la privatisation hospitalière. Nous refusons que les dotations MIG bénéficient à des structures qui ne sont pas publiques ou d'intérêt collectif.
Cette proposition de loi ne répond à aucune urgence, surtout lorsqu'on ferme des maternités au prétexte qu'elles ne pratiqueraient pas assez d'accouchements. Nous proposons de renforcer le secteur public hospitalier ; d'où nos six amendements. De leur adoption dépendra notre vote. En l'état, nous ne sommes pas favorables à cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs CRC ; Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales, applaudit aussi)
M. Jean-Marie Vanlerenberghe . - Notre groupe soutient cette proposition de loi et salue l'engagement de Mme Dini et son excellent travail. Il s'agit d'une simple expérimentation, par nature temporaire, d'une durée maximale de cinq ans, qui sera évaluée. Son champ sera très limité : au maximum une dizaine seulement de nouvelles structures. Elle sera néanmoins utile car elle répondra à une demande réelle de parturientes souhaitant un accouchement physiologique. Leur demande est d'autant plus légitime qu'elle va dans le sens des intérêts de la collectivité : le coût d'un accouchement par voie basse sans complication est estimé à 600-700 euros, contre 2 200 euros en maternité. Il n'y a aucun lien entre ce texte et la fermeture des petites maternités, puisque les maisons de naissance seront toutes attenantes à une maternité. Là où il y a risque de fermeture, il n'y aura pas création de maison de naissance. Le texte prévoit, en outre, que l'activité de la maison de naissance sera comptabilisée avec celle de la maternité.
L'exigence centrale de sécurité est garantie : la maison de naissance sera contigüe à la maternité et devra conclure avec elle une convention organisant les conditions de transfert des parturientes. Il lui reviendra d'assurer une sécurité parfaite.
La liste des maisons de naissance autorisées sera arrêtée par le Gouvernement en fonction d'un cahier des charges établi par la HAS ; l'ARS pourra, en cas de manquement, ordonner la fermeture d'une maison de naissance.
La sécurité repose surtout sur la personnalisation du suivi, la technique ne pourra jamais se substituer à l'humain. Les maisons de naissance ne sont pas un saut dans l'inconnu, elles sont parfois la norme dans certains pays occidentaux. L'accouchement n'est pas une situation pathologique, c'est le début naturel de la vie. Notre groupe souhaite encourager cette expérimentation. (Applaudissements au centre et à droite, Mme Muguette Dini, rapporteure, applaudit aussi)
Mme Dominique Gillot . - La sécurité périnatale est une préoccupation partagée. Vous avez rappelé, madame la ministre, qu'elle est l'objectif de santé publique fondamental, au coeur du plan périnatalité. La confiance des usagers explique l'incompréhension et le désarroi des familles et des équipes médicales devant les rares accidents de naissance.
Même les maternités de type 1 paraissent à certaines femmes trop médicalisées. Le concept des maisons de naissance est soumis à une expérimentation qui donnera lieu à une évaluation normée. Cette autorisation reconnaît la capacité et la responsabilité des sages-femmes dans l'accompagnement des femmes enceintes. Le collège national des obstétriciens ne s'oppose plus au texte. Les sages-femmes jouent un rôle clé dans les prises en charge périnatales ; elles revendiquent à juste titre une reconnaissance dont les maisons de naissance sont aussi l'expression.
Au centre hospitalier René Dubos à Cergy-Pontoise, depuis sept ans, l'accueil des femmes souhaitant une naissance plus naturelle est possible grâce à la seule volonté du directeur et à l'engagement de deux sages-femmes volontaires. Le service a dû refuser 160 femmes en 2012. La mixité sociale, la diversité des motivations sont à l'image de celles des parcours de nos concitoyennes : l'une a accouché de son premier enfant aux Pays-Bas ; l'autre veut vivre son second accouchement en conscience après avoir demandé la péridurale pour le premier, la dernière invoque la tradition.
Toutes se retrouvent dans la confiance et le partage, au cours d'un suivi qui apporte toutes les garanties de sécurité. Aucun accident, aucune césarienne non programmée en six ans. Trois femmes par an ont été orientées vers le plateau technique de l'hôpital attenant. Les diagnostics de grossesse à risques sont efficaces et l'intégration dans le service de maternité est opérationnelle.
Cette proposition de loi donne plus d'ampleur à cette démarche et confortera les équipes. C'est pourquoi je m'engage avec confiance pour cette reconnaissance institutionnelle. (Applaudissements)
Mme la présidente. - Comme vous le savez, notre temps est contraint. Je lèverai la séance à l'issue de la réponse de la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre . - Je suis la première à le regretter ; je ne doute pas, néanmoins, que nous y reviendrons dans quelques semaines.
Monsieur Barbier, la question de l'assurance et de la responsabilité ne se pose pas de manière différente dans ce nouveau cadre.
Madame Archimbaud, je vous assure que l'expérimentation sera évaluée, y compris sur le plan financier, préalablement à toute décision de généralisation ou autre.
Madame Génisson, vous avez raison de constater l'importance de la demande de suivi personnalisé. Souvent, les accidents surviennent lorsque les femmes se présentent à la porte de la maternité sans avoir été suivies.
Plusieurs intervenants ont évoqué les progrès médicaux, sur lesquels il n'est pas question de revenir. Au contraire, ils relèvent le niveau de sécurité des maisons de naissance. Soyons prudents quand nous comparons les différents pays. La France a des progrès à faire pour mettre en place des procédures de prévention ou de détection précoces renforcées.
Madame Cohen, je vous confirme qu'il n'est en aucun cas envisageable d'ouvrir des maisons de naissance là où fermeraient des petites maternités. Je rappelle la procédure, qui est très encadré : un décret et un agrément nominatif sur la base d'un cahier des charges.
J'entends vos préoccupations. Il est vrai que d'autres chemins peuvent être parcourus ; mais en quoi l'expérimentation proposée handicaperait-elle les autres démarches ? Les femmes qui souhaitent accoucher au sein d'une maternité pourront toujours le faire.
Monsieur Vanlerenberghe, vous avez justement indiqué que l'enjeu de la sécurité est bien identifié. J'y avais insisté lorsque je siégeais à l'Assemblée nationale. Le contrôle des ARS apporte toutes garanties. Oui, madame Gillot, nous sommes face à une évolution de la demande sociale des femmes. Certaines demandes sont très traditionnelles, d'autres le sont beaucoup moins ; entendons cette diversité sans oublier les progrès de la médicalisation ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Merci, madame la ministre de votre compréhension, de votre soutien et de vos explications.
Mme la présidente. - Madame Dini, vous connaissez la procédure : votre groupe devra demander, lors d'une prochaine conférence des présidents, la réinscription de ce texte à l'ordre du jour.