Simplification du droit (Deuxième lecture - Suite)
Discussion des articles
Article premier A
Mme Alima Boumediene-Thiery. - La commission des lois a adopté un amendement sur le Pacs. J'en avais moi-même déposé deux autres, l'un pour étendre aux salariés du privé le congé pour événement familial dont bénéficient déjà les agents du service public, l'autre pour répondre aux difficultés que rencontre les pacsés lorsque leur partenaire décède. Certains ont pu, par exemple, être interdits par la famille de présence aux obsèques. Je souhaitais qu'ils ne puissent subir une telle exclusion.
Ces deux amendements ont été retoqués par la commission sur un fondement pernicieux. Un amendement sur le Pacs avait été adopté en première lecture, on ne peut donc dire que les miens étaient sans rapport avec le texte.
M. Michel Mercier, garde des sceaux. - Cet amendement supprime l'extension aux partenaires liés par un pacte civil de solidarité des dispositions de l'article 79 du code civil, qui imposent l'énonciation, dans l'acte de décès d'un époux, des prénoms et nom de l'autre époux.
Toute mention portée sur un acte d'état civil doit être justifiée par des raisons juridiques précises. En l'absence de vocation successorale légalement déterminée du partenaire lié par un Pacs, cette mention n'a aucun effet juridique et apparaît sans objet.
Ce qui importe, c'est que la mention du Pacs figure sur l'acte de naissance, avec le nom de la personne pacsée, parce que cet acte produira des effets durant toute la vie.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - Quand il n'y a pas de lien direct, la règle de l'entonnoir s'applique ; sur le fond, je suis d'accord avec Mme Boumediene-Thiery, mais pas sur la forme.
Je ne suis d'accord avec le ministre. Les partenaires d'un Pacs sont titulaires de droits successoraux spécifiques, comme celui d'habiter pendant un an le domicile commun.
M. Michel Mercier, garde des sceaux. - Ce qui compte dans la vie, c'est la naissance, pas le décès.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - Il y a les deux !
M. Michel Mercier, garde des sceaux, rapporteur. - L'acte de naissance de la personne concernée lui permettra d'obtenir le droit que vous mentionnez, ce qui sera plus commode que d'exiger l'acte de décès du partenaire.
Vous qui allez à la rencontre des maires, monsieur le rapporteur, pourquoi imposer aux mairies un travail supplémentaire et inutile ?
M. Bernard Saugey, rapporteur. - Dois-je vous relire l'article 763 du code civil ? Je maintiens un avis défavorable.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Le Gouvernement veut envoyer beaucoup de gens au contentieux. (M. le garde des sceaux se récrie) Ce qui serait d'autant plus hasardeux que la chancellerie manque cruellement de personnel.
Il n'est pas rare que la famille du défunt veuille ignorer qu'il était homosexuel et pacsé, le reconnaître sur l'acte de décès est donc très important.
La position du Gouvernement me paraît un très mauvais signe ; il ne veut pas la reconnaissance pleine et entière du Pacs.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Je comprends mal l'acharnement du Gouvernement contre cet article, issu d'un amendement que j'avais fait adopter en première lecture, avec un avis favorable du rapporteur et l'unanimité du Sénat. Il a pour effet d'assurer une symétrie et un parallélisme avec les dispositions légales applicables aux mariés. Il faut sécuriser les droits du partenaire survivant, dont la rupture de la convention n'efface pas l'existence.
M. Laurent Béteille. - Pour une fois, je ne serai pas d'accord avec le rapporteur : les arguments du ministre sont pertinents. Le fait est que les communes n'ont pas toujours la possibilité de vérifier l'existence d'un Pacs, si bien que l'article premier A apporte une fausse sécurité qui risque de compliquer la vie des services d'état civil et d'avoir des effets contreproductif pour les pacsés eux-mêmes.
M. Pierre-Yves Collombat. - L'argument de la complexification des petites communes est hilarant ! Il ne s'agit ici que de réaffirmer le parallélisme des formes avec le mariage. S'il y a des déclarations frauduleuses, elles seront sanctionnées par la loi.
M. Jean-Pierre Sueur. - Je souscris aux arguments de M. le rapporteur. Il ne faut pas avoir une conception uniquement utilitariste. La symbolique est importante.
M. le garde des sceaux m'a quelque peu déçu, qui nous a rappelé que nous allions bientôt arpenter le territoire des petites communes, faisant ainsi allusion aux prochaines sénatoriales. Nous n'avons jamais évoqué à votre propos les cantonales et, d'ailleurs, cela n'aurait eu aucun effet.
Je n'ai pas été convaincu par M. le rapporteur quand il a dit à Mme Boumediene-Thiery que les amendements nos30 et 31 n'étaient pas recevables. L'amendement n°31 a trait aux funérailles : aujourd'hui, le pacsé ne peut les organiser. Comment M. le rapporteur peut-il prétendre que cet amendement n'a pas de rapport avec l'article premier A ?
M. Bernard Saugey, rapporteur. - Je ne peux pas changer les choses : la commission des lois a voté ce matin.
Sur l'irrecevabilité, vous ne pouvez vous plaindre d'un texte fourre-tout et accroître sans cesse le nombre de ses dispositions. En deuxième lecture, on doit se limiter aux dispositions encore en discussion. Ce n'est pas parce qu'un article fait référence au Pacs qu'il faut essayer de modifier toute la législation qui le concerne.
A la demande du groupe socialiste, l'amendement n°57 est mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 338 |
Nombre de suffrages exprimés | 333 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 167 |
Pour l'adoption | 1 |
Contre | 332 |
Le Sénat n'a pas adopté.
(Applaudissements à gauche)
L'article premier A est adopté.
Article premier (Supprimé)
M. Paul Raoult. - J'espère que la CMP ne réintroduira pas à l'article premier une disposition inutile qui complexifierait le droit aux fins de protéger les consommateurs contre les variations excessives de leur facture d'eau. Les rapports entre les distributeurs et les usagers seraient judiciarisés encore un peu plus, étant donné la mauvaise foi de certains de ces derniers ; des compteurs sont bricolés, d'autres, dans les résidences secondaires, mal protégés et il n'y a même plus de concierges dans les bâtiments publics qui pourraient surveiller la consommation.
J'espère que nos collègues tiendront bon en CMP. Pourquoi ne pas prévoir une médiation publique en cas de conflit entre distributeurs d'eau et usagers, comme cela existe dans d'autres secteurs ?
L'article premier demeure supprimé.
La séance est suspendue à 16 h 45.
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La séance reprend à 17 heures.