Vote électronique dans les établissements publics scientifiques
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, tendant à permettre le recours au vote électronique lors des élections des membres de conseils des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel.
Discussion générale
Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche. - L'Université doit être moderne, transparente et responsable, en l'occurrence pour l'élection des représentants des étudiants. Le CNRS et le Conseil national des universités utilisent déjà ce mode moderne de scrutin. Comme 92 % des étudiants disposent à domicile d'un ordinateur connecté à internet, le vote électronique ne rencontre aucun obstacle matériel.
Qui pourrait se satisfaire d'une participation proche de 15 % ? Les causes de l'abstention sont multiples, à commencer par l'éloignement du bureau de vote. La transparence du système y gagnera aussi, alors que le système actuel s'accompagne de nombreuses fraudes. A la vérité, l'enjeu est la participation des étudiants à la vie de leur université. De surcroît, le vote électronique pourrait économiser 15 % des dépenses électorales actuelles.
Je me réjouis donc d'une proposition de loi apportant un souffle nouveau à la démocratie étudiante. (Applaudissements à droite)
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur de la commission de la culture. - Cette proposition de loi tend à faire sauter un verrou législatif interdisant le vote à distance par voie électronique, assimilé à un vote par correspondance.
Les membres de l'Assemblée des Français de l'étranger sont élus par voie électronique, comme les conseillers prud'hommes de Paris et les délégués du personnel et aux comités d'entreprise. Ainsi 22 000 salariés de la SNCF ont pu élire leurs délégués, à la satisfaction de 75 % d'entre eux.
Il est donc paradoxal d'interdire le scrutin électronique à distance aux 2,2 millions d'étudiants, dont 6 à 22 % seulement participent aux élections étudiantes, d'autant que la nouvelle gouvernance des universités a renforcé l'enjeu des élections qui désignent les trois conseils de chaque établissement.
Cette proposition de loi donne aux universités le choix entre le support papier et le scrutin électronique.
Je vous propose un vote conforme, car les réticences sont principalement culturelles : le vote électronique paraît manquer de transparence, donc de visibilité.
Comme le commerce en ligne, le vote électronique fera bientôt tâche d'huile. Le taux d'équipement est déjà suffisant parmi les intéressés. En outre, 75 % des étudiants utilisent internet de façon quasiment quotidienne.
Certes, le vote électronique n'est pas l'alpha et l'oméga de la démocratie universitaire...
M. Ivan Renar. - Ah bon !
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur. - ...mais il peut y contribuer, à condition bien sûr d'éliminer tout risque pesant sur la sincérité du vote à cette échelle.
Parmi nos interlocuteurs, l'Unef seule a formulé des réserves. Nous devrons bien sûr concilier l'identification des votants et le secret de leur vote, comme l'a recommandé la Cnil.
Je mentionnerai aussi une meilleure information sur les enjeux du scrutin : à défaut, l'abstention ne régressera pas.
Enfin, le comité électoral consultatif devra intervenir dans la mise en oeuvre de ce texte. Madame le ministre, sensibilisez les équipes dirigeantes des universités à la nécessité d'accompagner cette novation ! (Applaudissements à droite)
M. Ivan Renar. - Le vote électronique est présenté comme un moyen de réduire l'abstention massive des étudiants. Or, la participation a reculé de 12 points au CNRS lorsque le vote y a été organisé sur le mode électronique.
Ce vote électronique suscite la défiance en raison ds fraudes possibles. Pour élire leurs représentants, nos compatriotes résidant à l'étranger ont préféré le papier, dans une proportion croissante.
L'expérience de Nantes ne sera pas renouvelée faute d'avoir donné satisfaction.
Sur le plan des principes, le vote électronique interdit aux simples citoyens de vérifier la sincérité du résultat, d'éventuelles manipulations ne soulevant guère de difficultés techniques. Les experts qui se sont penchés sur la question reconnaissent que le vote par internet n'est pas fiable. En outre, les audits à la charge des universités ou grandes écoles absorberont les économies.
Pourtant, nous partageons l'intention des auteurs du texte, qui veulent combattre une panne civique nuisible à la vie démocratique. Habituer les étudiants à se rendre aux urnes est souhaitable ; il faut donc favoriser l'organisation de véritables campagnes électorales. Il convient aussi d'étaler la consultation sur plusieurs jours.
Enfin, il convient de renforcer la représentation des étudiants et du personnel IATOS aux conseils d'administration des universités.
Ces mesures de bons sens auraient une autre portée qu'une simple modification technique, contre laquelle nous voterons. (Applaudissements à gauche)
M. David Assouline. - M. Longuet a protesté ces jours-ci contre les ordres du jour surchargés de textes sur l'utilité desquels on s'interroge. Nous devons donc nous demander à quoi sert le texte qui nous est présenté. But avoué : cette proposition de loi va réduire l'abstention aux élections universitaires, alors que les enseignants et les IATOS votent respectivement à 65 et 60 %. Les causes de l'abstention des étudiants sont sociologiques : les étudiants ne passent pas tout leur temps à l'université, qu'ils quitteront bientôt -pour moitié avant la fin du premier cycle. Il n'y a pas de véritable vie étudiante dans notre pays, faute de campus analogue à ce qui existe ailleurs. Une seule organisation étudiante est défavorable ? Elle est majoritaire ! Et c'est elle qui se démène pour que les étudiants soient informés sur la vie de leur établissement. Le changement technique est donc hors sujet.
M. Renar a montré que loin d'améliorer la participation, l'instauration du vote électronique s'était accompagnée d'une diminution de celle-ci.
La modernité ? Je ne suis pas le plus réticent face à la révolution numérique, (on en convient sur le banc de la commission) mais il faut conserver du sens aux relations humaines et à la démocratie. Mon rapport, adopté à l'unanimité de la commission, préconise une éducation aux technologies numériques car la liberté n'est pas l'abandon.
Ici, l'inégalité d'accès atteindrait un niveau inédit. Vous proposez de voter sans aucune forme d'isoloir.
Comment éviter toutes les sortes de fraude que l'outil informatique rend possibles, à commencer par l'usurpation d'identité ?
M. Nicolas About. - Vous ne faites pas cela au PS, tout de même ? (Sourires à droite)
M. David Assouline. - Non, il faut l'empêcher ! Jamais le vote depuis le domicile n'a été envisagé dans le champ politique.
Puisque la lutte contre l'abstentionnisme n'y est pour rien, pas plus que la transparence, le but inavoué est-il de gêner le syndicat étudiant majoritaire ? Ce que vous proposez aiderait les multiples petites listes dérisoires qui ne peuvent attirer les électeurs dans les isoloirs et ne sauraient les représenter véritablement dans les conseils. La démocratie étudiante est vivifiée par les organisations responsables.
Si attachés que nous soyons à la modernité technique, nous nous opposerons à cette réforme. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Françoise Laborde. - Nous devons examiner aujourd'hui un texte anecdotique par rapport aux enjeux de l'enseignement supérieur et de la recherche. Où sont les priorités politiques ?
Le vote électronique ne fait pas encore l'objet d'un consensus : ses défenseurs invoquent la modernité, ses détracteurs critiquent le manque de sincérité, de sécurité et de transparence, outre l'inégalité entre établissements.
La participation des étudiants est structurellement faible, puisqu'elle tourne autour de 15 %. Ce manque d'engagement civique est général, il a été constaté dans les élections politiques, et dernièrement aux régionales. C'est pourquoi notre groupe a déposé une proposition de loi instituant un service civique pour renforcer l'implication des jeunes dans la vie de la nation.
Le texte d'aujourd'hui ne redressera pas la participation aux élections universitaires, bien que le vote électronique fasse partie de la modernité. Considérant qu'une avancée infinitésimale n'est pas un recul, les membres du RDSE voteront ce texte.
Mme Marie-Thérèse Bruguière. - (Applaudissements à droite) Cette proposition de loi fait progresser la démocratie universitaire puisque la participation des étudiants avoisine 15 %, avec de grandes variations. Pourtant, l'enjeu des élections est considérable depuis la réforme des universités qui a accru leur autonomie.
Outre une désaffection pour les élections, l'abstention des étudiants s'explique aussi par l'interdiction du vote par correspondance.
Grâce au présent texte, les étudiants pourront utiliser le vote électronique, après d'autres scrutins électroniques au bilan très positif. Ainsi, 75 % des salariés de la SNCF se sont déclarés satisfaits par l'instauration du vote électronique pour leurs élections professionnelles.
Notre rapporteur a insisté sur le respect des préconisations de la Cnil. Dans ces conditions, nous ne connaîtrons plus les fraudes d'un autre temps.
Écologiquement satisfaisant, le nouveau système apportera un gain de temps et d'argent aux universités qui le retiendront.
Nous faisons toute confiance au Gouvernement...
M. David Assouline. - Vous ne devriez pas !
Mme Marie-Thérèse Bruguière. - ...pour les mesures réglementaires permettant de conforter la démocratie étudiante. (Applaudissements à droite)
Mme Claudine Lepage. - Nous avons déjà relevé la profonde ambiguïté de nos relations à internet. Quoi de plus naturel que d'autoriser à élire par voie électronique à distance les membres des instances universitaires ? Méfions-nous des évidences trompeuses. (Marques de déception à droite)
Les étudiants doivent-ils essuyer les plâtres d'un vote dont la sincérité est sujette à caution ? De prime abord, je suis séduite par le vote électronique à distance car j'y vois le meilleur moyen d'associer à la vie démocratique deux millions de nos concitoyens résidant à l'étranger.
Les expériences menées lors des élections au Conseil supérieur des Français de l'étranger ne sont pas concluantes. En juin 2009, à peine 20 % de ces électeurs ont voté : le vote électronique n'a pas endigué l'abstention -c'est même le contraire pour les circonscriptions d'Amérique et d'Afrique.
Cette expérience est certes particulière, mais elle est corroborée par d'autres, comme les élections au conseil d'administration du CNRS où l'abstention s'est accrue. La cause en est sans doute la complexité des procédures mises en place à la demande de la Cnil pour améliorer sécurité et sincérité du vote. Il est illusoire de penser que l'abstention étudiante serait influencée par les modalités du vote. Le phénomène se manifeste lors de tous les scrutins. Le vote électronique ne peut être considéré comme la panacée high tech. La conscience politique, le sentiment d'appartenir à une collectivité doivent se forger précisément à cet âge. Cela mérite une réflexion de fond. (Applaudissements à gauche)
La discussion générale est close.
Discussion des articles
Articles additionnels avant l'article premier
M. le président. - Amendement n°1, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l'article L. 712-3 du code de l'éducation, les mots : « vingt à trente » sont remplacés par les mots : « vingt-cinq à trente-cinq ».
M. David Assouline. - Nos interlocuteurs de 2007 nous ont fait part de leur souhaite de voir relever le nombre de membres du conseil d'administration, sans pourtant aller jusqu'à l'armée mexicaine de 60 membres. Davantage d'élus, davantage de représentants étudiants, ce serait une incitation à voter.
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur. - L'amendement n'a qu'un lien très distendu avec cette proposition de loi. Il n'est pas question de détricoter la loi LRU à l'occasion de cette proposition de loi. Néanmoins, la commission a donné un avis favorable ce matin parce que certains collègues de la majorité n'ont pu la rejoindre à temps. J'avais suggéré, en harmonie avec le président de la commission, un avis défavorable.
Mme Valérie Pécresse, ministre. - Même avis négatif.
M. David Assouline. - J'espère que le rapporteur ne va pas nous proposer le vote électronique en commission ! Dans une démocratie, le vote est celui des présents. Lorsque la majorité n'est pas majoritaire, elle manque à son devoir.
M. Jacques Legendre, président de la commission de la culture. - Il est exact que ce matin nos collègues venant du sud ont eu un problème d'avion, ce qui a changé la majorité pendant la réunion. Nous dirons simplement que la commission a donné un avis favorable, puisque c'était le cas, mais que le rapporteur et le président de la commission étaient contre. (Applaudissements à droite)
L'amendement n°1 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°2, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les deuxième à cinquième alinéas du I de l'article L. 712-3 du code de l'éducation sont ainsi rédigés :
1° De 40 % à 45 % des représentants des enseignants chercheurs et des personnels assimilés, des enseignants et des chercheurs nommés dans l'établissement, dont la moitié de professeurs des universités et personnels assimilés ;
2° De 20 % à 30 % de personnalités extérieures à l'établissement ;
3° De 20 % à 25 % de représentants des étudiants ;
4° De 10 % à 15 % de représentants des personnels ingénieurs, administratifs, techniques, ouvriers et de service nommés dans l'établissement.
M. David Assouline. - Il faut convaincre les étudiants qu'il vaut la peine de voter ! Contrairement à une représentation déterminée en valeur absolue, l'expression en pourcentage des représentants élus des différents collèges permet d'éviter de trop grandes disparités d'une université à l'autre et assurerait une meilleure représentation des différents collèges au sein du conseil d'administration.
M. le président. - Amendement n°13, présenté par M. Renar et les membres du groupe CRC-SPG.
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les troisième à cinquième alinéas de l'article L. 712-3 du code de l'éducation sont ainsi rédigés :
« 2° De trois à cinq personnalités extérieures à l'établissement ;
« 3° De six à sept représentants des étudiants et des personnes bénéficiant de la formation continue inscrits dans l'établissement ;
« 4° De trois ou quatre représentants des personnels ingénieurs, administratifs, techniques et des bibliothèques, en exercice dans l'établissement.
M. Ivan Renar. - La relation entre vote électronique et participation est loin d'être établie. Nous nous étonnons de voir subitement l'UMP et le Gouvernement se soucier de la démocratie étudiante. Si tel est vraiment son objectif, il faut accepter que le conseil d'administration soit plus représentatif.
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur. - L'amendement n°2 revient sur la loi LRU de 2007 ; la commission lui a donné un avis favorable, contrairement à mon avis, dans les conditions que nous avons dites toutes à l'heure.
Même avis défavorable à l'amendement n°13.
Mme Valérie Pécresse, ministre. - Mêmes avis à ces remises en cause de la loi LRU.
L'amendement n°2 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°13.
Article premier
M. le président. - Amendement n°18, présenté par M. Renar et les membres du groupe CRC-SPG.
Supprimer cet article.
Mme Marie-Agnès Labarre. - Le vote électronique, peu fiable, est le moins à même de garantir les conditions d'exercice d'un vote démocratique. Il ne permet pas de faire progresser la participation au vote, quelle que soit l'élection, et ne résoudra en rien la panne civique qui affecte ici le vote étudiant. La fracture numérique est, en outre, un facteur d'inégalité entre étudiants et entre universités. Le bureau de vote, avec l'urne, doit être dans un lieu, celui-là même qui est l'enjeu du vote : l'université. Ne prenons pas le risque de limiter l'expression démocratique au seul espace numérique.
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur. - La commission ne peut se faire hara-kiri en acceptant des amendements de suppression.
Mme Valérie Pécresse, ministre. - Même avis défavorable.
M. David Assouline. - Nous souhaitons améliorer le dispositif mais puisque nous voterons contre ce texte, nous nous rallions à cet amendement.
L'amendement n°18 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°3, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Alinéa 2, après la deuxième phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Le conseil d'administration de l'établissement est consulté sur le choix du vote par voie électronique et sur ses modalités de mise en oeuvre.
M. David Assouline. - La Cnil, dans sa délibération de juillet 2003, a préconisé un certain nombre de dispositions pour garantir le secret, la sincérité et l'intégrité du scrutin. Le décret du 3 décembre 2004 est si complexe que seules les universités Lyon II et de Nantes l'appliquent.
Notre amendement de bon sens donne au conseil d'administration de l'établissement un droit de regard sur le choix du système et les modalités de mise en oeuvre du vote électronique ; il reprend l'article 4 du décret de 2004. Il n'y a pas là lieu à clivage politique. Sinon, à quoi sert le Sénat ?
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur. - Cette disposition est redondante avec celles sur la consultation du comité électoral consultatif. Rien n'interdit au président du conseil d'administration de ledit conseil.
Mme Valérie Pécresse, ministre. - De fait, l'amendement est satisfait par le décret : retrait, sinon rejet.
M. David Assouline. - Vos deux argumentations ne sont pas identiques ! Dites clairement que les conseils d'administration seront consultés ! Le rapporteur nous dit que le texte n'interdit pas la démocratie : moi, je veux la rendre obligatoire. En ce domaine, il ne faut pas craindre faire preuve d'autorité.
Mme Valérie Pécresse, ministre. - Je n'imagine pas les présidents ne pas consulter leur conseil d'administration. Vous souhaitez que je le précise ; je dis que cela va de soi. Et n'oubliez pas que les universités sont désormais autonomes.
M. David Assouline. - Ce n'est pas très clair. Je maintiens l'amendement.
L'amendement n°3 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°4, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Alinéa 2, après la deuxième phrase
Insérer deux phrases ainsi rédigées :
Un cahier des charges est établi pour la prestation de services de conception et de mise en oeuvre du vote électronique. Il est soumis au conseil d'administration.
M. David Assouline. - Nous insérons dans la loi les préconisations de la Cnil. Je vous fais grâce de ses développements sur ces exigences indispensables à la sincérité du scrutin. Il peut aller de soi que ses recommandations seront respectées mais mieux vaut le dire expressément, sauf à accepter des scrutins sujets à caution.
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur. - Le conseil d'administration a d'autres tâches, plus stratégiques. Et cet amendement ne relève pas du niveau législatif. La commission est favorable dans les conditions que j'ai dites tout à l'heure : contre l'avis de son rapporteur et de son président.
Mme Valérie Pécresse, ministre. - Même avis défavorable.
M. David Assouline. - Toutes les parties doivent pouvoir valider l'organisation d'un vote électronique, y compris le choix du prestataire. L'UMP a fait récemment une expérience sur laquelle certains des protagonistes ont émis des doutes.
L'amendement n°4 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°6, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Alinéa 2, après la deuxième phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Le système de vote par voie électronique garantit la séparation des données à caractère personnel des électeurs et des votes.
M. David Assouline. - La Cnil souhaite qu'il soit impossible de faire le lien entre le nom de l'électeur et de l'expression de son vote. Ne me dites pas que c'est du domaine réglementaire : la protection de la liberté d'opinion et d'expression est de valeur constitutionnelle, entre la Déclaration de 1789 et le Préambule de 1946.
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur. - Le législateur a confié à la Cnil le soin de fixer les règles qui n'ont pas vocation à figurer dans les textes législatifs. Les présidents d'université devront évidemment les respecter. Avis défavorable.
Mme Valérie Pécresse, ministre. - L'article premier précise que le vote électronique doit se faire conformément aux recommandations de la Cnil. Les universités agiront en conséquence. Le caractère secret du vote est évidement un principe à valeur constitutionnelle. Défavorable.
L'amendement n°6 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°7, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Alinéa 2, après la deuxième phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Le système de vote par voie électronique permet le chiffrement du bulletin de vote de manière ininterrompue du poste de l'électeur jusqu'au dépouillement de l'urne.
M. Claude Domeizel. - Changeons d'accent ! (Sourires) Conformément aux prescriptions de la Cnil, cet amendement préserve la sincérité du scrutin et le secret du vote.
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur. - Défavorable pour les mêmes raisons que précédemment.
Mme Valérie Pécresse, ministre. - Même avis.
L'amendement n°7 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°8, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
A l'ouverture du scrutin, il est procédé publiquement aux scellements de l'urne et du dispositif de vote par voie électronique.
M. Claude Domeizel - Cet amendement est lui aussi conforme aux recommandations de la Cnil. Le décret du 18 juin 1985 prévoit que des scellés doivent être apposés sur les urnes dès que le vote s'étend sur plus d'une journée ; au regard de la spécificité du vote électronique, il n'y a pas lieu d'établir une durée minimale. L'amendement couvre les deux modes de votation.
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur. - L'avis reste défavorable.
Mme Valérie Pécresse, ministre - Même avis.
L'amendement n°8 n'est pas adopté.
M. David Assouline - Vous ne verrez pas un de nos amendements auquel la commission des finances a opposé l'article 40. Il est anormal que la procédure d'irrecevabilité puisse être appliquée de manière discrétionnaire, sans même que l'on connaisse les critères utilisés. Tous les amendements que nous venons de présenter auraient coûté un peu d'argent et ne sont pas tombés sous le coup de l'article 40 ; un autre est tombé, qui ne coûtait pas plus cher. En toute incohérence !
La commission des finances nous a dit que le coût de l'application des recommandations de la Cnil n'était pas inscrit au budget : voilà qui contredit l'argumentation du Gouvernement !
La coupe est pleine ! Je trouve insupportable que la commission des finances puisse trancher ainsi. M. Legendre en est si conscient qu'il a demandé à son collègue des finances de venir nous expliquer une logique que personne ne comprend.
M. Jacques Legendre, président de la commission. - Nous partageons ce souhait de bien comprendre les règles du jeu. Plus tôt le président Arthuis nous aura expliqué les critères qu'il applique, mieux cela vaudra.
M. Claude Domeizel. - La question n'est pas de savoir qui est moderne et qui est ringard ; notre ami Assouline n'est pas tout à fait un retardataire en matière technologique !
Le vote est un acte citoyen, qui impose le déplacement de l'électeur et la rencontre. C'est pourquoi j'espère bien que le vote électronique à distance ne sera pas généralisé aux scrutins politiques.
Quelle sera l'attitude des étudiants pour les votes politiques ? Ne seront-ils pas incités à l'abstention, eux qui auront pris l'habitude du vote électronique ? C'est pour cette raison pédagogique que je voterai contre cet article premier. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Ivan Renar. - Très bien.
M. Jean-Pierre Fourcade. - Je rassure M. Assouline : la machine à voter fonctionne très bien dans ma commune depuis cinq ans.
M. Claude Domeizel. - Mais on se déplace !
M. Jean-Pierre Fourcade. - Oui, et l'on peut organiser un isoloir autour de la machine à voter.
Le Conseil constitutionnel a imposé une nouvelle procédure d'application de l'article 40 ; la décision de la commission des finances ne donne pas lieu à débat. Il ne peut y avoir mise en cause de son président, ni discussion sur ses décisions. (Applaudissements sur les bancs UMP)
M. Ivan Renar. - J'ai été crucifié par la suppression de deux amendements par la commission des finances. (Exclamations à droite) Je refuse ce que je considère comme une censure. Je donne acte de ses propos au président de la commission de la culture, au sein de laquelle nous avons l'habitude de nous écouter mutuellement.
Mon premier amendement menacé visait à informer complètement les étudiants de la date et des enjeux de l'élection ; le second mettait en place une vraie campagne électorale au sein de l'université. L'amputation que j'ai subie est une distorsion inacceptable dans l'application du Règlement. En bonne logique, c'est toute la proposition de loi qui devrait être frappée par l'article 40. On marche sur la tête !
M. Jacques Legendre, président de la commission. - Je ne mets pas en cause le président de la commission des finances ni ne réclame un débat. Ce que je souhaite, c'est une information de tous sur critères mis en oeuvre.
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur. - Je réponds à M. Domeizel sur le déplacement. Les jeunes ne lisent guère ; je suis persuadé que les nouveaux outils technologiques les amèneront à la lecture et qu'ils reviendront plus tard aux supports traditionnels. J'ose penser qu'ayant pris goût, étudiants, au vote par voie électronique, ils voteront davantage.
L'article premier est adopté.
Articles additionnels
M. le président. - Amendement n°9, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au début du cinquième alinéa de l'article L. 719-1 du code de l'éducation, il est ajouté une phrase ainsi rédigée : « Les étudiants inscrits dans un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel sont inscrits d'office sur les listes électorales de cet établissement. »
M. Claude Bérit-Débat. - Cet amendement donne une base légale à l'automaticité d'inscription des étudiants sur les listes électorales, qui figure dans le décret du 18 janvier 1985, celui-ci n'étant semble-t-il pas applicable en l'état au vote électronique.
En outre, aucune loi ne serait nécessaire pour supprimer l'inscription automatique sur les listes électorales. Cet amendement ne coûte rien et fera même réaliser des économies.
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur. - Le collège comprend les étudiants régulièrement inscrits. Bien que l'amendement soit satisfait, la commission l'a accepté dans les conditions que l'on sait... Le Gouvernement peut-il nous assurer que le décret s'applique vraiment ?
Mme Valérie Pécresse, ministre. - L'inscription est automatique et la rectification de droit jusqu'au jour du scrutin de droit. Retrait ou rejet.
M. Claude Bérit-Débat. - Le vote électronique n'est pas pris en compte par le droit existant : l'inscription obligatoire le resterait-elle avec le recours à internet ? J'ai un doute.
Mme Valérie Pécresse, ministre. - Il n'y a aucun doute. Même si le vote électronique n'est pas mentionné, les conditions d'exercice du droit de suffrage s'appliquent de fait.
M. Claude Bérit-Débat. - J'espère que vous avez raison.
L'amendement n°9 est retiré.
M. le président. - Amendement n°11, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le cinquième alinéa de l'article L. 719-1 du code de l'éducation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les listes électorales sont affichées, dans les locaux de l'établissement, au moins vingt jours avant la date du scrutin. »
M. Claude Domeizel. - M. le rapporteur a mentionné le fait de « prendre goût » à la lecture. Il en ira peut-être de même pour le vote par voie électronique.
Notre amendement est indispensable à une campagne électorale digne de ce nom, d'autant que le Gouvernement refuse de financer l'envoi des professions de foi au domicile de chaque électeur : notre amendement n°10 a été jugé irrecevable par la commission des finances.
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur. - Le décret de 1985 régit l'affichage des listes électorales. Avis défavorable à cet amendement de nature réglementaire.
Mme Valérie Pécresse, ministre. - Même avis.
M. David Assouline. - On trouve normal d'envoyer des professions de foi aux citoyens ; pas quand il s'agit des étudiants. Et nous ne pouvons même pas discuter d'un amendement en la matière à cause de l'article 40.
Je reçois à l'instant un pli : ce sont les avis du président de la commission des finances ! Après le début de notre débat ! Heureusement que je maîtrise la communication électronique ! Loin de moi l'idée de mettre en cause M. Arthuis, ou même le Conseil constitutionnel, je demande simplement un peu plus de cohérence sur l'application de l'article 40.
L'amendement n°11 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°14 rectifié, présenté par M. Renar et les membres du groupe CRC-SPG.
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le cinquième alinéa de l'article L. 719-1 du code de l'éducation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Une commission électorale est mise en place avant chaque élection des conseils. Elle est composée de neuf membres, dont trois représentants des étudiants, trois représentants des enseignants-chercheurs, et trois représentants des personnels ingénieurs, administratifs, techniques et ouvriers parmi les membres du conseil d'administration, du conseil des études et de la vie universitaire et du conseil scientifique de l'université. Elle est chargée de déterminer et de communiquer les dates, horaires et lieu de tenue des élections en prenant en compte des critères d'accessibilité et de visibilité maximale. »
Mme Marie-Agnès Labarre. - Il faut inscrire dans la loi le rôle d'une commission électorale interne à chaque établissement : elle détermine les modalités du vote. Pour faciliter les opérations de vote, elle devra élargir les horaires du scrutin, organisé de préférence dans les grands amphithéâtres.
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur. - Un comité électoral existe déjà dans chaque établissement. Créer un autre organe relèverait des attributions du président de l'université.
L'amendement n°14 rectifié, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°17 rectifié, présenté par M. Renar et les membres du groupe CRC-SPG.
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le cinquième alinéa de l'article L. 719-1 du code de l'éducation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Avant chaque élection et pendant la durée du scrutin, la propagande est autorisée dans tous les bâtiments de l'université, à l'exception des salles où sont installés les bureaux de vote. »
M. Ivan Renar. - La propagande électorale doit se dérouler dans tous les locaux de l'université, à l'exception du bureau de vote, même les jours de scrutin, ceux où les étudiants sont le plus présents dans les établissements.
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur. - La commission ne souhaite pas alourdir la loi.
Mme Valérie Pécresse, ministre. - Même avis.
L'amendement n°17 rectifié n'est pas adopté.
Article 2
M. le président. - Amendement n°19, présenté par M. Renar et les membres du groupe CRC-SPG.
Supprimer cet article.
M. Ivan Renar. - Amendement de cohérence.
L'amendement n°19, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°12, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Rédiger ainsi cet article :
La première phrase du sixième alinéa de l'article L. 719-1 du code de l'éducation est supprimée.
M. David Assouline. - Cet article semble introduire une confusion avec le vote par correspondance, qui serait désormais autorisé.
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur. - L'article premier n'autorise pas le vote par correspondance. Que la ministre le confirme et rassure ainsi M. Assouline...
Mme Valérie Pécresse, ministre. - Je lui confirme et le rassure.
M. David Assouline. - Le courrier électronique ne pourrait donc pas être considéré comme vote par correspondance. Or le vote électronique à distance est un courrier... Il faudra régler la question dans sa globalité.
L'amendement n°12 est retiré.
L'article 2 est adopté.
Article 2 bis
M. le président. - Amendement n°20, présenté par M. Renar et les membres du groupe CRC-SPG.
Supprimer cet article.
M. Ivan Renar. - Amendement de cohérence.
L'amendement n°20, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 2 bis est adopté.
Article 3
M. le président. - Amendement n°21, présenté par M. Renar et les membres du groupe CRC-SPG.
Supprimer cet article.
M. Ivan Renar. - Même motif, même punition.
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur. - Même motif, même cohérence.
Mme Valérie Pécresse, ministre. - Idem.
L'amendement n°21 n'est pas adopté.
L'article 3 est adopté.
Vote sur l'ensemble
M. David Assouline. - Nous avons donc satisfait votre souhait de poursuivre le chemin vers l'Élysée. (Exclamations à droite)
M. le président. - Combien de fois l'avons-nous fait du temps de M. Mitterrand.
M. David Assouline. - Ne faites pas peser le passé sur les nouvelles générations ! (Rires) Ce texte prétend réduire l'abstention des étudiants, mais de façon incohérente. Vous négligez les leçons de l'expérience et refusez tous les moyens que nous proposons pour accroître la participation au vote.
Sans mettre en cause le scrutin électronique tel qu'il existe dans certaines municipalités, je conteste que la sécurité du vote soit assurée lorsqu'on reste à distance, chez soi ou dans un foyer. On peut donc s'attendre à une hausse du contentieux électoral.
Votre but réel est de réduire l'audience du syndicat étudiant majoritaire, mais la victime effective sera la démocratie étudiante. Ce n'est pas entre zappeurs et clics que l'on formera les jeunes citoyens.
Pour améliorer le taux de participation, on pouvait étendre le nombre de jours de scrutin en réservant le vote à distance aux étudiants handicapés, en stage ou qui travaillent. Au demeurant, comme nous le proposons avec la création d'une allocation d'autonomie, il faudra bien éviter le travail des étudiants, cause majeure d'échec.
La proposition de loi est adoptée définitivement.
La séance est suspendue à 17 heures.
présidence de Mme Monique Papon,vice-présidente
La séance reprend à 21 h 30.