Relations avec les collectivités territoriales et compte spécial Avance aux collectivités territoriales
M. le président. - Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », les articles rattachés 55, 56, 56 bis, 57, 58 et 58 bis, ainsi que le compte spécial « Avances aux collectivités territoriales ».
Interventions des rapporteurs
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial de la commission des finances. - La mission « Relations avec les collectivités territoriales » et le compte de concours financier « Avances aux collectivités territoriales » traduisent budgétairement certaines grandes orientations débattues en première partie.
Le premier des axes majeurs est évidemment la suppression de la taxe professionnelle, qui va nous occuper une partie du week-end. Le rapporteur général et la commission des finances ont beaucoup travaillé pour rassurer les élus. Je pense que le dispositif adopté hier en commission y contribuera, mais je n'en dirai pas plus maintenant.
Le débat suscité par cette réforme a fait passer au second plan un autre axe majeur du projet de budget : l'évolution des concours de l'État aux collectivités pour 2010, dont le rythme de progression sera indexé sur l'inflation prévisionnelle, soit une hausse de 1,2 % pour atteindre 97,5 milliards d'euros à périmètre constant.
Au sein de cette enveloppe, la dotation globale de fonctionnement progresse deux fois moins vite, en tenant compte des nouveaux effets du recensement et des nouvelles intercommunalités. Par suite, la dotation de garantie des communes baissera de 2 % et les variables d'ajustement de 6,8 % après les modifications apportées par l'Assemblée nationale. La DGF stagnera ou baissera pour de nombreuses collectivités.
Le fonds de compensation de la TVA (FCTVA) progressera de 375 millions d'euros, soit 6,4 %, pour atteindre 6,3 milliards. Le dispositif ayant inquiété les élus, nous avons adopté deux amendements, dont le premier fait bénéficier les collectivités du versement anticipé dès l'engagement des dépenses, le second reconduisant le dispositif pour 2010.
La mission « Relations avec les collectivités territoriales » ne représente que 2,5 milliards d'euros, une part très limitée de l'effort financier de l'État en faveur des collectivités territoriales. Pour l'analyser, je m'en tiendrai aux dotations créés dans la loi de finances pour 2009 : la dotation forfaitaire « titres sécurisés » ; la dotation de développement urbain ; l'aide exceptionnelle aux communes concernées par les restructurations de la défense.
Les crédits des « titres sécurisés » atteignent 18,9 millions d'euros. En progression de 197,5 %, ils correspondent à l'indemnisation de 3 750 stations, dont chacune percevra 5 030 euros, un montant insuffisant par rapport aux dépenses réelles des collectivités. Le rapport de la mission de contrôle diligenté par Mme André est instructif sur ce point.
La dotation de développement urbain est reconduite en euros courants, soit 50 millions d'euros. Nous en prenons acte, mais il faudra perfectionner les procédures pour éviter les retards constatés en 2009.
Enfin, le fonds de soutien aux communes touchées par le redéploiement territorial des armées, doté de 5 millions la première année, voit son montant doubler en 2010.
Je voudrais ajouter un mot sur l'évaluation de la performance, les deux programmes de la mission étant dépourvus de toute mesure de celle-ci. On peut apprécier le plus justement la qualité des services rendus par la direction générale des collectivités locales en examinant les délais réels de parution des textes réglementaires relevant ses responsabilités ou le respect des dates de communication des dotations. Pour ces deux critères, je tiens à rendre hommage au travail de la direction générale.
Les crédits inscrits au titre de la mission « Avances aux collectivités territoriales » appellent deux observations.
La première, pour s'étonner que le Gouvernement n'ait rien envisagé pour solder la situation de la Nouvelle-Calédonie, qui doit 289,7 millions au titre d'une avance consentie depuis 1990.
La seconde observation tient aux avances sur les recettes fiscales des collectivités territoriales, en baisse de 26 milliards d'euros parce que la compensation liée à la réforme de la taxe professionnelle sera financée par prélèvement sur recettes du budget général.
J'en viens aux articles rattachés.
L'article 55 propose de diminuer le complément de garantie des communes, ramené de 3,5 % à 2 % par l'Assemblée nationale. La commission des finances approuve le compromis trouvé par les députés, qui ont dégagé des marges de manoeuvre pour la péréquation grâce à un panier d'autres recettes. Ainsi, les variables d'ajustement régressent de 6,8 % contre 3,6 % dans la version initiale du texte. En outre, les dotations d'équipement sont gelées, le fonds de solidarité en faveur des collectivités territoriales touchées par des catastrophes naturelles ne bénéficiant que d'une augmentation réduite.
L'article 56 organise la répartition de la dotation de solidarité urbaine (DSU). Votre commission approuve le texte adopté par l'Assemblée nationale, qui étoffe cette dotation de 70 millions d'euros. Comme en 2009, l'augmentation sera concentrée sur les collectivités dont les besoins sont les plus nets, sans pénaliser les autres. J'ajoute que l'ouverture de la liste des prioritaires aux 250 premières communes évitera tout effet de seuil pour les plus fragiles. Cette augmentation de la DSU devrait conduire à augmenter aussi de 6 % la dotation de solidarité rurale, si le comité des finances locales reste fidèle à sa doctrine liant l'évolution de ces deux dotations de solidarité. C'est un point positif pour les communes rurales.
L'Assemblée nationale a introduit l'article 56 bis, qui intègre les logements sociaux appartenant une société d'économie mixte nationale dans le périmètre pris en compte pour l'attribution de la DSU. La commission des finances a supprimé cet article en attendant que des informations complémentaires lui permettent de vous proposer une rédaction plus précise.
Enfin, la commission approuve en l'état l'article 58 bis, qui attribue la dotation « coeur de parc naturel national » aux surfaces maritimes classées en coeur de parc national.
Sous réserve de ces observations, votre commission des finances propose d'adopter les crédits de la mission et du compte de concours financier. (M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, applaudit)
Mme Catherine Troendle, en remplacement de M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis de la commission des lois. - La mission « Relations avec les collectivités territoriales » et le compte de concours financiers « Avances aux collectivités » ne retracent que très imparfaitement les relations entre l'État et les collectivités territoriales. En effet, les 2,5 milliards d'euros inscrits dans la mission représentent moins de 3 % de l'effort financier de l'État en faveur des collectivités, alors que le compte d'avance aux collectivités ne fait pas stricto sensu partie des concours financiers de l'État, puisque les 65 milliards d'euros dont il est doté matérialisent la fonction de fermier général assurée par l'État auprès des collectivités. Ces deux lignes budgétaires sont donc peu significatives des choix de gestion opérée par État. Plutôt que d'analyser exhaustivement ces crédits, je profiterai donc de l'occasion pour exprimer les préoccupations et souhaits de la commission des lois.
Votre commission s'inquiète du ralentissement des dépenses d'investissement, qui ont reculé de 3,2 % en 2008 et devraient diminuer encore cette année sous l'effet cumulé de la crise économique et du cycle électoral. Cette tendance baissière doit être combattue, car les collectivités réalisent les deux tiers de l'investissement public civil et jouent un rôle crucial pour le développement du pays.
Le projet de loi de finances pour 2010 ne soutient pas assez l'investissement local. Les ambitieuses conventions FCTVA lancées début 2009, ont rencontré un indéniable succès, puisque plus de 20 000 collectivités se sont engagées à investir davantage en 2009 qu'elles ne l'avaient fait de 2004 à 2007, pour 55 milliards d'euros environ. Notre assemblée a amélioré le dispositif en intégrant les restes à réaliser dans les dépenses réelles d'équipement des collectivités signataires. Elle a en outre reconduit le versement anticipé du FCTVA en 2010, offrant ainsi une seconde chance aux collectivités n'ayant pas encore souscrit de convention.
Malgré cette avancée considérable, votre commission des lois s'inquiète de certaines dispositions susceptibles de freiner l'investissement des collectivités territoriales.
Et d'abord l'inclusion du FCTVA dans l'enveloppe normée, alors qu'il s'agit là d'un remboursement, non d'une dotation. On ne peut donc l'encadrer. D'ailleurs, le projet de loi de finances ne limite pas la croissance du FCTVA, dont l'augmentation pèse néanmoins sur les autres concours sous enveloppe : la progression de l'investissement contracte mécaniquement les crédits des dotations de fonctionnement.
La commission des lois a émis des doutes sur l'efficacité de ce mécanisme dans le contexte actuel : comment demander aux collectivités territoriales de réduire leurs dépenses et, dans le même temps, d'investir pour pallier l'absence de l'initiative privée ? Ces mêmes collectivités s'inquiètent du montant et des caractéristiques de leurs ressources futures ; elles risquent d'être plus prudentes et de repousser leurs programmes d'investissement. C'est dire que l'attitude de l'État a un impact direct sur leurs décisions.
M. Saugey rappelle qu'une grande partie de leurs dépenses résulte des normes obligatoires qui leur sont imposées ; le surcoût pour 2009 sera de 500 millions d'euros. La commission consultative d'évaluation des normes, créée en 2008 et présidée par notre collègue Alain Lambert, a parfaitement fait son travail ; elle a réussi à diffuser la culture de l'évaluation financière et a eu un effet régulateur sur l'activité des administrations centrales. La commission appelle le Gouvernement à développer ce type d'initiatives pour fluidifier les relations entre l'État et les collectivités territoriales. La décentralisation est parvenue à maturité, les élus doivent être partie prenante à l'élaboration des normes. Ils doivent être consultés, écoutés et entendus : c'est à cette seule condition que leurs responsabilités prendront leur pleine légitimité. (Applaudissements à droite)
Orateurs inscrits
M. Pierre-Yves Collombat. - Il est des choses proprement irréalisables pour l'homme s'il ne les fait pas dans les règles, disait Bertold Brecht : ce sont les choses absurdes. Nous sommes au coeur du sujet avec l'examen nocturne d'une mission absurdement dénommée « Relations avec les collectivités locales ». Rituellement, notre rapporteur comme les intervenants rappellent qu'elle ne donne qu'une idée très partielle des sommes en jeu. Rituellement, ils relèvent l'absence totale de lisibilité des relations financières entre l'État et les collectivités locales. Et c'est de pire en pire. « On assiste ainsi à une marginalisation des crédits budgétaires, et donc de la mission, au profit des prélèvements sur recettes, des avances et des transferts de fiscalité. » Ainsi s'exprime M. Saugey. Il a raison : 2,541 milliards d'euros sur 88,864, soit moins de 3 % des soi-disant concours de l'État aux collectivités territoriales, contre 4,3 % en 2009.
Dans ce brouillard, les contreparties d'impôts payés par les collectivités locales, les compensations de captations d'impôts locaux -comme l'essentiel de la DGF-, les compensations de suppressions d'impôts -comme la taxe professionnelle- et la compensation de charges transférées prennent des allures de concours, autrement dit d'aides de l'État aux collectivités territoriales. Ce mode de présentation est si commode qu'on ne voit pas le Gouvernement renoncer à une technique de camouflage aussi efficace... Et cette année, avec la suppression de la taxe professionnelle et l'invention d'une -ça ne s'invente pas- « compensation-relais de la réforme de la taxe professionnelle », tous les records sont battus : les concours de l'État augmentent de 31,558 milliards d'euros, soit de près de 58 % ; 44,1 % de ce qui restait aux collectivités de ressources fiscales remplacés par une perfusion ! Vive l'autonomie locale !
Le rapporteur général note que 2010 sera pour les collectivités une année blanche ; pour les recettes, évidemment, car pour les dépenses, particulièrement celles à caractère social, il en ira autrement. Sauf que pour être équitable, la compensation devrait être calculée sur les bases et les taux 2010, ou au minimum sur les bases 2010 et les taux 2009. Après l'effort du Sénat, on en est aux bases 2010 et aux taux 2008 majorés au plus de 0,6 %, avec l'assurance d'une recette plancher au moins égale au produit 2009. C'est dire qu'en 2010, les collectivités sont privées même du pouvoir de modifier le taux de ce qui leur reste d'impôt économique local, la cotisation locale d'activité (CLA).
Et ce n'est pas qu'un mauvais moment à passer... La compensation-relais disparaîtra en 2011... pour être remplacée par des dotations qui disent leur nom et des dotations déguisées en impôts. Comment appeler autrement des contributions dont l'État définit l'assiette et le taux ? Selon l'étude d'impact annexée au projet de loi de finances, l'autonomie financière des communes passera en 2011 de 62,5 % à 61,7 %, celle des départements de 66,4 % à 62,9 % et celle des régions de 54,3 % à 49,7 %. Tandis qu'avec l'augmentation des faux impôts s'effondre l'autonomie fiscale. La seule marge de manoeuvre précaire pour les régions, c'est un bricolage de la Tipp ; pour les départements, le foncier bâti. Et tout ça pour financer une promesse faite au patronat par le candidat Sarkozy, qui sera sans effet notable sur la compétitivité de nos entreprises.
M. Paul Blanc. - A voir !
M. Pierre-Yves Collombat. - Je ne me lasserai jamais de le répéter : l'impôt économique territorial n'a qu'une influence marginale sur celle-ci. Comme le dit un rapport du Conseil des prélèvements obligatoires, « les analyses économiques tendent à montrer que la localisation d'un investissement dépend principalement de critères économiques, géographiques et humains ». En 2008, seules 95 500 entreprises ont été exportatrices, soit 3,2 % des entreprises payant la taxe professionnelle, pour un montant de 410 milliards d'euros -presque 100 fois plus que la baisse dont bénéficiera la totalité des entreprises ! Réduire la contribution de toutes les entreprises pour, au mieux, améliorer à la marge la compétitivité de 3,2 % d'entre elles, voila l'exploit !
Le comble, c'est que, selon l'étude d'impact elle-même, les secteurs qui bénéficieront le plus de la baisse de l'impôt seront non l'industrie mais la construction, l'agriculture, et les services aux particuliers -qui ne sont pas particulièrement exposés à la concurrence internationale ! Étrangler les collectivités qui réalisent les trois quarts de l'investissement public et remplacer un système complexe par une usine à gaz pour un cadeau à 4,5 milliards sans effet sur la compétitivité de nos entreprises, c'est absurde ; aussi absurde que de prétendre redresser les finances publiques -un impératif, paraît-il- en multipliant les cadeaux fiscaux...
Ce qui est absurde, disait Brecht, doit impérativement être fait dans les règles. D'où le luxe de chiffres, de normes et de taux dans la présentation de la mission, cette chambre de bonne d'un immeuble « finances locales » en état de péril imminent. Pour donner un air de cohérence à ce qui n'en a pas, on alterne faux motifs de satisfaction et vrais motifs d'inquiétude.
Face : le FCTVA n'est pas plafonné et augmentera de 6,4 % ; pile : c'est au prix d'une limitation à 0,6 % de la progression de la DGF, qui devient la variable d'ajustement du dispositif. Le pacte de stabilité n'est plus tout à fait stable. Face : la péréquation progresse, 70 millions d'euros de plus pour la DSU, 50 pour la DSR ; pile : on rogne le complément de garantie de la dotation forfaitaire des communes, qui ne garantit plus rien. Face : les dotations d'investissement, FCTVA inclus, augmentent de 5,4 % ; pile : hors FCTVA, qui n'est pas une aide mais le remboursement partiel d'une taxe payée par les collectivités...
M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales. - Ce n'est pas ce que disait M. Jospin...
M. Pierre-Yves Collombat. - Et alors ? L'argument est bien pauvre... Hors FCTVA donc, l'augmentation n'est plus que de 12 millions d'euros.
C'est à se demander si le Gouvernement mesure bien le rôle économique des collectivités locales. Que se passera-t-il lorsqu'elles ne pourront plus investir ? Là est l'enjeu du remplacement de la taxe professionnelle par un ensemble d'impôts économiques rapportant 4,5 milliards de moins et, CLA mise à part, transformés en quasi-dotations. Échanger un impôt stupide contre un système fiscal catastrophe, il paraît que c'est ce qu'on appelle une réforme... (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Paul Blanc. - Alors on ne fait rien !
M. Pierre-Yves Collombat. - Si c'est pour faire pire...
Mme Anne-Marie Escoffier. - L'examen de cette mission intervenant quelques semaines avant la suppression de la taxe professionnelle, il me paraît difficile de ne pas aborder le sujet. La progression des concours de l'État aux collectivités locales est fixée en 2010 à 1,2 % et celui de la DGF à 0,6 % ; et les quatre programmes respectent globalement les engagements pris par l'État.
Même si je reconnais qu'il est légitime d'aller vers la réduction des dépenses publiques, c'est un service minimum qu'on nous propose avec une augmentation de la DGF égale à la moitié de l'inflation prévisionnelle. Les autorisations d'engagement seront probablement inférieures, l'an prochain, à leur niveau de 2009, ce qui est regrettable. Je veux bien, à titre personnel, donner quitus au Gouvernement de ce budget.
Comment faire autrement, quand il s'agit de programmes déjà lancés ?
Mais que restera-t-il de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » dès lors que la taxe professionnelle est supprimée sans être remplacée par quelque chose de précis ? Peut-être en saurons-nous plus samedi prochain... Les collectivités percevront 15,5 milliards :11,4 milliard sur la valeur ajoutée des entreprises soumises au barème, la différence étant compensée par l'État. Soit. Mais qui garantira la pérennité de ce système ? Commencer une réforme des collectivités territoriales en supprimant leur principale recette, c'est mettre la charrue avant les boeufs ; c'est, comme dit M. Chevènement, ajouter « du fouillis au fouillis ».
Comment se prononcer sur un budget qui ne pourra peut-être pas être appliqué ? Nous nageons dans l'incertitude. L'abstention de mon groupe sur ce budget me paraît être la sagesse.
Mme Josiane Mathon-Poinat. - Cette loi de finance étrangle encore un peu plus les finances locales. La compensation des charges transférées par la décentralisation est très insuffisante : les concours aux collectivités territoriales n'augmentent que de 0,70 %, soit la moitié de l'inflation prévisible. Environ 300 millions font défaut. Ce manque à gagner s'ajoute aux effets mêmes de la décentralisation qui n'a pas prévu d'instrument de stabilisation pour tenir compte des évolutions économiques et démographiques.
La suppression de la taxe professionnelle, qui représente 22,6 milliards de ressources nettes en 2008, aura des conséquences désastreuses pour les collectivités. Le nouvel impôt leur procurera 12,7 milliards, l'État s'étant engagé à compenser les 9,9 milliards manquants -mais pour 2010 seulement ! Les collectivités seront inéluctablement conduites à reporter la charge sur les ménages. Aujourd'hui, 48 % de leurs ressources viennent des ménages, 52 % des entreprises ; après la réforme, la proportion sera de 75 % et 25 % ! Cette réforme coupera le lien entre les entreprises et les territoires, entre les communes et l'activité économique. Les équipements publics et les services publics seront restreints : double peine pour nos concitoyens !
Enfin, les dispositifs de péréquation prévus ne sont pas satisfaisants. La réforme de la DSU est gelée, la DDU limitée à sa valeur de 2009. Vous réduisez drastiquement les ressources des collectivités, tout en dénigrant l'échelon local. A vous entendre, les élus seraient trop nombreux, les collectivités formeraient un millefeuille coûteux et incompréhensible. Celles-ci réalisent pourtant 73 % de l'investissement public, malgré des transferts de compétences qui ne sont pas toujours compensés, et ne contribuent au déficit public qu'à hauteur de 10 % ! Quant aux financements croisés, ils ne représentent que 5 % des dépenses.
La grande majorité des élus sont bénévoles. Le Gouvernement veut couper court à une démocratie locale qui ne lui est plus favorable. Votre réforme est une attaque si frontale qu'aucune association représentative n'y est favorable ; même les élus de la majorité sont troublés ! Pour atteindre son objectif de recentralisation et de réduction des services publics locaux, le Gouvernement avance masqué, en découpant la réforme en cinq projets de loi et en étranglant financièrement les collectivités : ce n'est qu'après avoir réduit leurs ressources que nous débattrons de leurs compétences. L'inverse eût été plus logique. Nous ne voterons pas ces crédits. (Applaudissements à gauche)
M. Jean-Pierre Sueur. - Je n'aborderai qu'un seul thème : la péréquation. On se souvient du choeur de Faust, qui chante « Marchons, marchons ! », en restant sur place... C'est un paradoxe : la France est l'un des pays où la part des dotations de l'État est la plus élevée dans le financement des collectivités -et risque de s'accroître avec la réforme de la taxe professionnelle.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. - Vous y avez aussi contribué !
M. Jean-Pierre Sueur. - Je n'en disconviens pas.
A l'heure où chacun parle d'autonomie financière, voire d'autonomie fiscale, pourquoi autant de dotations ? (M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois, se pose la question) Une réponse : la péréquation. L'État peut assurer une meilleure répartition en fonction des situations, car chacun sait qu'il n'y a pas de relation entre les charges et les ressources des collectivités. C'est une question de simple justice et d'efficacité.
Difficile toutefois de faire de la péréquation avec une enveloppe globale qui régresse si chacun prétend toucher autant que l'année précédente : il faut avoir le courage d'établir des priorités, et tout le monde ne peut être prioritaire !
La DGF augmente de 0,6 %, soit la moitié de l'inflation. Le poids de la part forfaitaire de la DGF est tel que l'inertie l'emporte sur la péréquation. Le rapport de M. Jarlier souligne que le poids relatif de la dotation de péréquation est « extrêmement modéré » au sein de la DGF des communes : la DSR représente 3,2 % du montant de la DGF, la DSU, 5 %... Je maintiens que la péréquation réelle, au sein de la DGF, ne dépasse pas 10 %, d'autant que ces deux dotations ne sont pas aussi péréquatrices qu'on pourrait le souhaiter. Ne vaudrait-il pas mieux concentrer les crédits de la DSR sur quelques projets de développement et d'aménagement dynamiques, plutôt que de continuer le saupoudrage actuel ?
La DSU n'est pas assez sélective : 75 % des communes de plus de 10 000 habitants la touchent. Un excellent amendement adopté par nos collègues de l'Assemblée nationale l'abonde de 70 millions et la cible sur les communes les plus défavorisées, soit la première moitié de la liste. Elle augmentera ainsi de 1,2 %, c'est-à-dire de l'inflation, c'est-à-dire qu'elle n'augmentera pas. Je sais qu'il a fallu batailler, que le Gouvernement rechignait, mais cela ne m'empêchera pas de dire qu'il faut faire plus.
Vous me répondrez, monsieur le ministre, que la DDU a été créée pour cela. On aurait pu faire plus simple... Cette dotation, dont vous vantez les 50 millions à répartir en 2009 sur 100 communes, n'a été dotée, si j'en crois le rapport de M. Jarlier, que de 26 millions en crédits de paiement, dont une large part ne pourra être consommée...
A ne jamais réformer dans le sens de la péréquation -et le rapport de M. Saugey parle même d'une baisse de l'effet péréquateur des dotations de l'État- on va à la catastrophe. Écoutons Claude Dilain, le maire de Clichy-sous-Bois, qui nous dit qu'il persistera jusqu'au découragement, mais qu'il se sent tenu d'alerter sur la bombe à retardement que nous sommes en train de produire. « Je sonne à toutes les portes, on me répond qu'il n'y a pas d'outil adapté. » Faut-il attendre l'explosion ? Ces paroles nous rappellent à l'impérieuse urgence de la péréquation. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales. - L'examen de cette mission est toujours particulier : il ne retrace qu'une petite partie de l'effort financier de l'État en faveur des collectivités locales, majoritairement inscrit en première partie de la loi de finances, ainsi que l'a souligné M. Jarlier : 2,6 milliards à peine, alors que l'enveloppe normée s'élève à 57 milliards et que l'effort financier global, avec la compensation des transferts, atteint 97,5 milliards. L'effort de l'État est donc substantiel et constant.
Ce projet de loi de finances intervient dans un contexte particulier, celui de la réforme de la taxe professionnelle, qu'il était urgent de réformer, pour que nos entreprises renouent avec la compétitivité et pour sauver l'investissement productif. On a récemment vu l'effet des délocalisations dans les pays de la Loire, M. Ayrault ne me contredira pas. La réforme était urgente pour mettre un terme aux fermetures des établissements industriels, synonymes, au plan financier, d'amenuisement des bases. Le Gouvernement s'est engagé à assurer une compensation intégrale pour chaque collectivité, par une ressource fiscale -ce qui n'a pas toujours été le cas, je pense à la suppression de la part sur les salaires, en 2000-, une compensation, enfin, conforme au principe d'autonomie fiscale des collectivités territoriales, introduit dans notre Constitution en 2003...
Après l'Assemblée nationale, vous vous êtes employés à améliorer le dispositif et je sais que vous aurez à coeur, dans quelques jours, d'assurer la meilleure affectation possible des ressources. Le Parlement devait se saisir pleinement de ce travail et je fais confiance à votre rapporteur général et à vos débats pour assurer le meilleur équilibre.
Je sais que toutes les difficultés ne sont pas levées et qu'il faudra procéder à des ajustements dans les prochains mois. C'est la raison d'être de la clause de revoyure, proposée par votre rapporteur général, M. Marini.
Reste que les collectivités locales sont assurées de disposer de ressources fiscales dynamiques pour exercer leurs compétences et mener à bien leurs grands projets, sans que soit rompu le lien entre activité économique et territoires.
Ce bel objectif est en passe de se réaliser grâce à l'immense travail collectif qui a vu Gouvernement et Parlement joindre leurs efforts.
Ce grand chantier ne doit pas occulter notre effort global en faveur des finances locales et de la péréquation.
L'enveloppe normée, M. Jarlier, Mme Troendle, progresse de 1,2 %. En son sein, les crédits du Fonds de compensation de la TVA augmentent de 6,4 %. Restent 300 millions supplémentaires, soit une augmentation de la DGF de 0,6 %, la moitié de l'inflation. Si les dépenses du Fonds de compensation de la TVA devaient augmenter l'an prochain, nous ne reviendrons pas sur les autres variables. Sortir le Fonds de compensation de la TVA de l'enveloppe ? Le ministre du budget a dit qu'il pouvait se rallier à cette proposition : il faudra alors s'accorder, en 2012, sur l'indexation de l'enveloppe ainsi redessinée.
Vous vous inquiétez, madame Troendle, de l'effort financier de l'État en faveur de l'investissement local. Certes, il n'y a aura pas indexation en 2010, comme en 2009. C'est que l'Assemblée nationale a choisi d'abonder la DGF.
L'État a entendu les craintes des élus. L'effort du plan de relance a été de 3,8 milliards en 2009 en remboursement anticipé du Fonds de compensation de la TVA, hors enveloppe. Il en est de même pour le Fonds de compensation de la TVA versé aux collectivités qui vont s'engager en 2010, à la suite de l'amendement que vous avez adopté en première partie. Cela représente un effort supplémentaire estimé à 1 milliard.
J'en viens à la péréquation. L'effort de progression des masses financières a été plus contraint cette année, parce que les collectivités territoriales ont été associées à la maîtrise des dépenses publiques.
L'article 55 reconduit la mesure d'écrêtement du complément de garantie de 2 % initiée l'an dernier. Cette mesure se combine avec l'abondement de 131 millions d'euros de la DGF des communes, voté à l'Assemblée nationale, de manière à afficher une augmentation de la péréquation communale sans abaisser trop fortement le complément de garantie des communes.
En 2010, le Comité des finances locales disposera ainsi des marges d'indexation nécessaires pour faire progresser les dotations de péréquation.
Le Gouvernement avait choisi de reporter la réforme de fond de la DSU à l'an prochain, pour la mener en cohérence avec la révision du zonage prioritaire de la politique de la ville. Il avait donc proposé à l'article 56 de reconduire les attributions individuelles, en les indexant selon les choix du Comité des finances locales. Mais les députés ont amendé ce texte afin de poursuivre les principes de répartition adoptés en 2009, sans attendre la réforme du zonage prioritaire de la politique de la ville, et de cibler l'augmentation de la DSU sur les 250 premières communes du classement de la DSU.
Je suis prêt à me rallier à cette proposition, à la condition que l'augmentation ne se fasse pas au détriment de la DSR, dont je souhaite qu'elle augmente également de 6 % l'an prochain.
Le Gouvernement reconduit, enfin, la dotation de développement urbain, créée l'an dernier, qui bénéficiera d'une nouvelle tranche de 50 millions. Si sa mise en place a été un peu longue, c'est qu'il a fallu attendre la publication du décret d'application, après consultations, pour répartir la dotation entre les 100 communes éligibles.
Les crédits n'ont donc été disponibles qu'en juin, mais les préfets avaient très tôt pris contact avec les communes éligibles pour déterminer quels projets seraient retenus en 2009. Cette année, je souhaite que la totalité des autorisations d'engagement soit mobilisée et les crédits débloqués dès que les communes auront été déclarées éligibles.
Le fonds de soutien aux communes touchées par le redéploiement territorial des armées sera abondé de 10 millions d'euros, qui s'ajouteront aux 5 millions versés en 2009. Là encore, les crédits ont été débloqués très tard, pour la simple raison que le redéploiement territorial des armées n'a pas entraîné en 2009 de pertes significatives de population ou de recettes fiscales pour les collectivités concernées. Seuls cinq contrats de redynamisation des sites de la défense ont été signés depuis cet été. Mais je travaille sur ce dossier en lien étroit avec M. Mercier ; nous avons adressé récemment une circulaire commune aux préfets.
Je terminerai par quelques remarques sur la compensation financière des transferts de compétences. Vous avez adopté en première partie les articles 17 et 18, désormais traditionnels, qui attribuent une fraction de TIPP aux départements et aux régions en compensation des transferts de compétences. Au total, la fiscalité transférée pour compenser les charges de l'acte II de la décentralisation s'élève à 2,78 milliards d'euros pour les départements et à 3,18 milliards pour les régions. Le fonds de mobilisation départementale pour l'insertion a été reconduit et doté de 500 millions d'euros. Nous procéderons dans le cadre de la loi de finances rectificative à divers ajustements au profit des régions.
Mme Nathalie Goulet. - A quelques mois des élections !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. - Je présenterai aussi un amendement modifiant le montant de la dotation générale de décentralisation des départements et des régions : grâce au travail de la Commission consultative d'évaluation des charges présidée par M. Thierry Carcenac, nous avons pu affiner l'évaluation du coût des transferts. Je n'ai garde d'oublier la Commission consultative d'évaluation des normes présidée par M. Alain Lambert, à qui j'indique que l'État a entrepris de réorganiser ses administrations au niveau local : le conseil des ministres a examiné hier un projet de décret relatif aux directions départementales interministérielles, qui vise à regrouper les administrations départementales autour de deux ou trois pôles.
Enfin, le Gouvernement a tenu compte du contexte particulier lié à la généralisation du RSA pour les départements : il a décidé de ne pas appliquer l'ajustement de la compensation prévu sur la base des données d'exécution de l'année 2008, ce qui conduit à accorder aux départements un versement exceptionnel de 45 millions d'euros en 2010. Toutes ces mesures témoignent des efforts consentis par le Gouvernement pour compenser justement les charges liées à la décentralisation. (Applaudissements à droite et au banc des commissions)
Examen des crédits
Les crédits de la mission sont adoptés, ainsi que les crédits du compte spécial « Avances aux collectivités territoriales ».
Articles additionnels avant l'article 55
M. le président. - Amendement n°II-112, présenté par M. Faure.
Avant l'article 55, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 2333-52 du code général des collectivités territoriales est abrogé.
II. - La perte de recettes pour les collectivités territoriales résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État résultant du paragraphe précédent est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
M. Jean Faure. - La loi d'aménagement de la montagne de 1985 a autorisé les communes à instaurer une taxe de 3 % sur le chiffre d'affaires des remontées mécaniques ; les départements peuvent de leur côté créer une surtaxe de 2 % pour financer des actions de solidarité entre les communes de montagne. Ces ressources sont exclusivement affectées à certaines dépenses : formation du personnel des stations, équipements pour pratiquer d'autres activités que le ski, etc.
Certaines grandes communes soumettaient déjà les remontées mécaniques à la « taxe Ravanel », dont le taux était de 5 %. Pour préserver ce droit acquis, il fut décidé que les départements devraient rembourser à ces grandes communes le produit de leur surtaxe. Or depuis 25 ans les équipements ont beaucoup évolué : les grandes stations tirent un bénéfice considérable de ce dispositif. Les départements, en revanche, sont privés d'une manne qui pourrait servir à la redistribution entre les communes, au maintien de petits commerces, etc. Cet amendement a pour objet de corriger cette injustice, afin que toutes les communes participent à la solidarité locale.
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. - La commission n'a pas eu le temps d'examiner cet amendement. Elle aurait besoin de connaître les communes et les montants concernés. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. - La DGF ne peut compenser la suppression d'une dotation versée par les départements aux communes ni la perte de revenus fiscaux de certaines communes, car elle est répartie entre toutes les communes selon les mêmes critères, qui doivent rester stables d'une année à l'autre. Retrait, sinon rejet.
M. Jean Faure. - J'ai prévu un gage pour que mon amendement soit recevable, mais rien n'oblige l'État à supporter ce gage : les grandes stations ont déjà amplement bénéficié de cette taxe, qui constitue un privilège indécent. La répartition du produit de la taxe par les départements corrigerait au contraire les inégalités.
Si M. le ministre lève le gage, les grandes stations, dont le budget dépasse parfois celui des chefs-lieux, toucheront un peu moins d'argent ; mais le département disposera de fonds supplémentaires pour des actions de solidarité et de redistribution. J'invite donc M. le ministre à revoir sa position et à lever le gage.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - En effet, à supposer que le gage soit levé, l'amendement n'affectera pas le montant de la DGF. Si j'ai bien compris, il s'agit d'ôter à certaines communes une partie du produit de la taxe pour la rendre aux départements, qui pourront ainsi renforcer la péréquation en faveur des petites communes. (M. Jean Boyer le confirme.) La commission considère cet amendement avec une certaine faveur.
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. - Je ne lève pas le gage : le Gouvernement a besoin de temps pour approfondir la question et savoir quelles communes sont concernées. Je promets de revenir sur la question lors de la prochaine discussion budgétaire.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Nous devons examiner les 17 et 18 décembre le collectif budgétaire pour 2009. Peut-être le Gouvernement pourrait-il prendre l'engagement d'étudier la question d'ici là, et M. Faure retirer son amendement pour le redéposer alors.
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. - J'en prends l'engagement.
M. Jean Faure. - Fort de l'engagement du président de la commission et du ministre, je reviendrai à la charge au moment du collectif.
L'amendement n°II-112 est retiré.
L'article 55 est adopté.
M. le président. - Amendement n°II-178, présenté par M. Collomb et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après l'article 55, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Au septième alinéa de l'article L. 5211-30 du code général des collectivités territoriales, les mots : « selon un taux fixé par le comité des finances locales dans la limite du taux d'évolution de la dotation forfaitaire prévue à l'article L. 2334-7 » sont remplacés par les mots : « selon un taux égal à celui retenu par le comité des finances locales pour les communautés d'agglomération dans les limites prévues au premier alinéa du II de l'article L. 5211-29 ».
II. - Au neuvième alinéa du II de l'article L. 5211-33 du code général des collectivités territoriales, les mots : « selon un taux fixé par le comité des finances locales au plus égal au taux d'évolution de la dotation forfaitaire prévue à l'article L. 2334-7 » sont remplacés par les mots : « selon un taux égal à celui retenu par le comité des finances locales pour les communautés d'agglomération dans les limites prévues au premier alinéa du II de l'article L. 5211-29 ».
Amendement n°II-179, présenté par M. Collomb et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après l'article 55, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Au septième alinéa de l'article L. 5211-30 du code général des collectivités territoriales, les mots : « selon un taux fixé par le comité des finances locales dans la limite du taux d'évolution de la dotation forfaitaire prévue à l'article L. 2334-7 » sont remplacés par les mots : « selon un taux fixé par le comité des finances locales au minimum égal à zéro et au maximum égal au taux d'évolution de la dotation forfaitaire prévue à l'article L. 2334-7 ».
II. - Au neuvième alinéa du II de l'article L. 5211-33 du code général des collectivités territoriales, les mots : « selon un taux fixé par le comité des finances locales au plus égal au taux d'évolution de la dotation forfaitaire prévue à l'article L. 2334-7 » sont remplacés par les mots : « selon un taux fixé par le comité des finances locales au minimum égal à zéro et au maximum égal au taux d'évolution de la dotation forfaitaire prévue à l'article L. 2334-7 ».
M. Pierre-Yves Collombat. - La dotation d'intercommunalité des communautés urbaines et des syndicats d'agglomération nouvelle est, depuis 2009, indexée sur la dotation forfaitaire des communes, laquelle diminue. Pour éviter de pénaliser ces intercommunalités, l'amendement n°II-178 tend à prévoir une progression de leurs dotations au moins égale à l'inflation prévisionnelle ; le n°II-179, de repli, instaure un mécanisme garantissant que leurs dotations ne diminuent pas, quelle que soit la dotation forfaitaire des communes. J'espère avoir porté la parole de M. Collomb sans la trahir...
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. - L'amendement n°II-178 va à l'encontre de notre objectif d'une péréquation renforcée. L'enveloppe étant fermée, son adoption rendrait impossible l'effort de 70 millions supplémentaires voté à l'Assemblée nationale en faveur de la DSU, qui pourrait également profiter à la DSR. Le raisonnement est le même pour le n°II-179 : nous ne pouvons garantir un taux d'indexation minimal à zéro pour les intercommunalités alors que les tensions seront fortes sur la DGF et que nous ne serons peut-être pas capables d'assurer une évolution positive de la dotation des communes. Communes et intercommunalités doivent être traitées sur un pied d'égalité. Avis défavorable.
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. - Rejet de l'amendement n°II-178 pour les raisons évoquées par M. Jarlier. En revanche, sagesse sur le n°II-179. On ne peut écarter la possibilité d'une évolution négative de la dotation forfaitaire des communes et, donc, des dotations de ces intercommunalités, ce qui n'est pas l'objectif recherché.
M. Pierre-Yves Collombat. - M. le rapporteur spécial me crucifie... Je ne défends pas particulièrement les communautés urbaines ! Nous y reviendrons lors du débat sur la taxe professionnelle. Je retire l'amendement n°II-178 au profit du n°II-179, plus raisonnable, sur lequel un compromis peut être trouvé.
L'amendement n°II-178 est retiré.
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. - Garantir la stabilité des dotations des intercommunalités aurait des effets négatifs sur la dotation des communes. Attention !
L'amendement n°II-179 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-180, présenté par Mme Bricq et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après l'article 55, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er octobre 2010, un rapport relatif aux modalités de prises en compte, pour la répartition de la dotation globale de fonctionnement, des personnes détenues dans les établissements pénitentiaires dès la date d'achèvement du centre, au nombre de place effectivement construites, sans attendre l'arrivée effective des prisonniers.
M. Pierre-Yves Collombat. - Pour éviter que la population carcérale ne soit prise en compte dans le calcul de la DGF qu'avec un décalage de quatre ans, nous proposons de prendre en compte le nombre de places construites dans le centre pénitencier.
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. - Cette question, qui se pose lorsqu'un centre pénitencier est construit, a été évoquée par M. du Luart, rapporteur spécial de la mission « Justice ». La commission n'a pu expertiser l'amendement et suggère, à l'instar de M. du Luart, de faire d'abord le point. L'avis est plutôt favorable.
Mme Nathalie Goulet. - Bien !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. - Défavorable. Tout l'enjeu est de ne pas comptabiliser des habitants fictifs dans le calcul de la DGF...
Mme Nathalie Goulet. - Ah !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. - Les centres pénitenciers étant considérés comme des communautés de la même façon que les maisons de retraite, ils sont comptabilisés à part. Sinon, cela reviendrait à anticiper la population carcérale...
M. le président. - Le problème est plutôt l'inverse. Ils sont souvent trop nombreux...
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - En matière de justice, nous avons la chance d'avoir un rapporteur spécial dont les rapports font autorité. Peut-être faut-il envisager une démarche commune de M. du Luart et du Gouvernement plutôt que de prévoir, une fois de plus, un rapport dans la loi. Si tel est le cas, je ne doute pas de la diligence de M. du Luart. Le rapport pourrait être rendu avant le 30 juin.
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. - Vous avez l'engagement du Gouvernement.
M. le président. - Merci, monsieur Arthuis, de porter mes idées !
M. Pierre-Yves Collombat. - Soit, évitons de multiplier les rapports. J'aurai tout de même appris une chose intéressante ce soir : la population carcérale est fictive !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - C'est que les détenus utilisent peu la voirie !
L'amendement n°II-180 est retiré.
L'article 56 est adopté.
Article 56 bis
I. - À la première phrase du sixième alinéa de l'article L. 2334-17 du code général des collectivités territoriales, les mots : « locales et aux filiales de la Société centrale immobilière » sont remplacés par les mots : « de construction et de gestion de logements sociaux et aux filiales immobilières ».
II. - Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2011.
M. le président. - Amendement n°II-153, présenté par M. Jarlier, au nom de la commission des finances.
Rédiger ainsi cet article :
Le sixième alinéa de l'article L. 2334-17 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Dans la première phrase, les mots : « la Société centrale immobilière de la Caisse des dépôts et consignations » sont remplacés par les mots : « la société ICADE » ;
2° Après la première phrase, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Sont aussi retenus comme des logements sociaux pour l'application du présent article les logements de la Société Nationale Immobilière ou de ses filiales qui appartenaient au 1er janvier 2006 à la société ICADE et qui sont financés dans les conditions fixées par le dernier alinéa de l'article L. 2335-3, le dernier alinéa de l'article L. 5214-23-2, le dernier alinéa de l'article L. 5215-35 et le dernier alinéa de l'article L. 5216-8-1 du présent code. »
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. - Le logement social constitue l'un des critères de répartition de la DSU et du Fonds de solidarité de la région des communes d'Ile-de-France. Or il connaît depuis quelques années de profondes évolutions, notamment avec la réorganisation des activités de la Caisse des dépôts et consignations ; phénomène qui devrait s'accroître au cours des prochains mois avec la cession par Icade, filiale de la CDC, de son pôle logement. Pour ne pas pénaliser les communes qui accueillent ces logements, l'Assemblée nationale et le Sénat ont autorisé, à l'article 16 bis, les collectivités territoriales à continuer à bénéficier de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties. Par coordination, cet amendement vise à ce que lesdites collectivités puissent bénéficier de la compensation de l'État.
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. - L'avis est favorable. Sans ces dispositions, certaines communes auraient été pénalisées, non en raison de la perte du caractère social du logement, mais uniquement du changement de statut juridique de leur propriétaire.
Mme Josiane Mathon-Poinat. - En se recentrant sur des activités de promotion immobilière et de location de locaux industriels et commerciaux, Icade a pu accéder au statut fiscal privilégié de société d'investissement immobilière cotée, pour le plus grand bonheur de la Caisse des dépôts et consignations. Le produit de la vente des 35 000 logements dont il est question a permis à la Caisse des dépôts d'apporter plusieurs milliards au capital du Fonds d'investissement stratégique (FSI). De récents débats ont d'ailleurs démontré que les interventions de ce fonds étaient pour le moins critiquables puisqu'elles servent souvent à financer des plans sociaux.
Que les logements qui appartenaient à Icade demeurent considérés comme des logements sociaux préserve les intérêts et les ressources des villes les plus frappées par les opérations de transfert de patrimoine. Nous voterons donc cet article.
L'amendement n°II-153 est adopté et l'article est ainsi rédigé.
L'article 57 est adopté, ainsi que l'article 58.
Articles additionnels
M. le président. - Amendement n°II-12 rectifié, présenté par M. Jarlier, au nom de la commission des finances.
Après l'article 58, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 4332-8 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Bénéficient d'une dotation de péréquation les régions d'outre-mer et les régions métropolitaines dont le potentiel fiscal par habitant est inférieur d'au moins 15 % au potentiel fiscal moyen par habitant de l'ensemble des régions ou dont le potentiel fiscal par kilomètre carré est inférieur au potentiel fiscal par kilomètre carré de l'ensemble des régions dans une proportion définie par décret sur avis du comité des finances locales. »
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. - Dans un contexte budgétaire tendu, la péréquation prend une importance particulière. Même si les dotations de péréquation ont augmenté de 45 % entre 2004 et 2009, il n'en demeure pas moins que la part des volumes financiers consacrés à la péréquation ne permet pas toujours de réduire les écarts de richesse entre les différentes collectivités. Le rapport des professeurs Gilbert et Guengant de 2006, est très éclairant sur le sujet.
M. Jean-Pierre Sueur. - Et très contestable !
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. - Il montre en effet que sur la période 2000-2006, les régions ont vu les inégalités de pouvoir d'achat s'atténuer, ce qui n'a été le cas ni pour les communes ni pour les départements. Encore faut-il que les régions les plus fragiles puissent bénéficier de cette péréquation : c'est tout l'objet de cet amendement.
Les critères d'éligibilité des régions à cette dotation de péréquation ne prennent pas en compte la spécificité des territoires régionaux et pénalise les régions dont la démographie augmente le moins. Ce mode de calcul conduit peu à peu à des incohérences qui se manifestent par le risque d'exclusion de certaines régions fragiles, ce qui est déjà le cas pour l'Auvergne. Le débat a déjà eu lieu lors de la discussion budgétaire de l'année dernière. Un groupe de travail avait été constitué au sein du Comité des finances locales mais il n'avait pu aboutir, faute de consensus. L'exercice est en effet difficile car la répartition s'entend à enveloppe fermée. Plus on est nombreux autour de la table, moins les parts de gâteau sont généreuses... Cette situation m'a amené à conduire une mission de contrôle au nom de la commission des finances sur l'efficacité de la péréquation régionale. C'est sur la base des conclusions de ce rapport que la commission vous propose de faire un pas vers une péréquation plus juste, en modifiant les critères de l'éligibilité de la dotation de péréquation des régions sans affecter ceux de la répartition. Actuellement, les critères d'éligibilité sont fondés uniquement sur la comparaison des potentiels fiscaux par habitant alors que, paradoxalement, ceux de la répartition entre régions prennent en compte les spécificités du territoire régional comme le potentiel fiscal superficiaire. La notion de territoire est donc absente dans les critères de sélection des régions. En outre, une région peut être exclue de la dotation de péréquation du fait d'une évolution démographique plus faible que celle des autres régions. Une croissance moins rapide induit en effet une augmentation du potentiel fiscal par habitant plus importante que la moyenne de référence qui sert de base au seuil d'éligibilité de la dotation. Une région peut ainsi se trouver exclue du dispositif de péréquation alors même qu'elle aura à supporter des charges fixes par habitant plus fortes. C'est le régime de la double peine !
Nous proposons donc de rapprocher les critères d'éligibilité de ceux de la répartition en intégrant un nouvel élément fondé sur le potentiel fiscal superficiaire des régions. Au potentiel fiscal moyen par habitant, on ajouterait un critère ouvrant l'éligibilité aux régions dont le potentiel fiscal par kilomètre carré est inférieur au potentiel fiscal par kilomètre carré de l'ensemble des régions. La commission a estimé qu'il revenait au Comité des finances locales et au Gouvernement de déterminer le curseur de ce critère en fonction des simulations qu'ils seront à même de réaliser. Il leur reviendra alors de déterminer la bonne mesure permettant de retenir un nombre raisonnable de régions en limitant les effets à la marge sur les dotations des régions déjà éligibles. Il convient de prendre en compte la diversité des territoires pour aller vers une péréquation plus juste.
M. le président. - Amendement n°II-195 rectifié, présenté par Mmes Alquier et M. André.
Après l'article 58, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 4332-8 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l'année 2010, il est alloué à la région Auvergne le montant résultant de la totalité de l'évolution de la part "péréquation" de la dotation globale de fonctionnement. »
Mme Michèle André. - Il s'agit, non pas de bouleverser le dispositif de péréquation régionale, comme le propose notre rapporteur spécial, mais d'attribuer l'évolution de la DGF en 2010 à la région Auvergne.
Nous parlons du problème de la péréquation régionale depuis que la région Auvergne est sortie du dispositif en 2008. Quand on connaît les spécificités de cette région, il n'est en effet pas compréhensible qu'elle soit exclue du bénéfice de la péréquation régionale. L'absence de prise en compte de la superficie régionale dans les critères d'éligibilité est à l'origine de cette inégalité.
Les présidents des régions de France sont parvenus à un accord unanime que je propose de reprendre dans cet amendement : à deux reprises, lors de leur assemblée générale le 13 mai et le 16 septembre, ils ont adopté le principe d'attribuer à la région Auvergne l'évolution de la dotation de péréquation en 2010. Cette solution permet de répondre à l'injustice actuelle tout en ne faisant pas perdre de recettes aux autres régions. Elle ne peut naturellement être que temporaire : nous devrons l'année prochaine réformer les mécanismes de péréquation au profit des collectivités locales. N'obérant pas l'avenir, ce dispositif nous éviterait de faire imploser la péréquation régionale, ce qui mettrait en péril les budgets de nos collectivités.
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. - Sur le fond, un Auvergnat ne peut pas être insensible à cet amendement. (Sourires) Mais le dispositif proposé est à l'évidence inconstitutionnel. Il est donc impossible d'y être favorable. Nous souhaitons néanmoins entendre l'avis du Gouvernement.
M. le président. - Un troisième Auvergnat va s'exprimer.
M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. - En 2009 douze régions ont bénéficié d'une attribution au titre de la péréquation régionale en raison du potentiel fiscal par habitant. L'amendement de M. Jarlier a pour objectif de compléter ce critère d'éligibilité en y ajoutant un critère de potentiel fiscal superficiaire, ce qui élargirait l'éligibilité à de nouvelles régions, notamment à l'Auvergne.
Nous avons étudié avec beaucoup d'attention la proposition de la commission des finances qui présente beaucoup d'avantages mais quelques inconvénients. Ce mécanisme risque en effet de perturber tout le dispositif de péréquation régionale : il permettrait en effet à l'Auvergne de bénéficier de la dotation, mais il ferait perdre 9,3 millions à la Corse, 6,9 millions au Limousin, 4,9 millions à la région Poitou-Charentes et 8,2 millions à Midi-Pyrénées.
Mme Nathalie Goulet. - Et pour la Basse-Normandie ?
M. Brice Hortefeux, ministre. - En outre, votre amendement renvoie à un décret, après avis du Comité des finances locales. Il est juridiquement curieux de prévoir une mesure d'ordre règlementaire alors que l'article 72 de la Constitution précise que la loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l'égalité entre les collectivités territoriales. Tous les critères de dotations doivent être déterminés par la loi.
Enfin, il aurait fallu que le Comité des finances locales se soit prononcé sur le dispositif que vous proposez. L'objectif de cet amendement est parfaitement louable, mais il est difficilement applicable à cause de ses incidences sur les autres collectivités. C'est pourquoi j'en demande le retrait.
L'amendement de Mme André poursuit le même objectif avec un dispositif bien différent. Je ne suis cependant pas loin de partager l'avis de M. le rapporteur, car il est sans doute contraire au principe d'égalité et présente un risque constitutionnel. Mais comme il s'agit d'un amendement de l'Association des régions de France, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute assemblée.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Je remercie M. le ministre de l'intérieur de nous dire que l'Association des régions de France a rédigé cet amendement, mais le Sénat n'est pas le notaire de l'ARF ! Il nous appartient donc de l'apprécier sereinement. Or, comment peut-on écrire dans une loi qu'une seule région récupérera l'intégralité de la progression d'une dotation de péréquation ?
M. Gérard Collomb. - C'est l'Auvergne !
M. Éric Doligé. - On peut en proposer d'autres....
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Je ne pourrai pas voter l'amendement n°II-195, même inspiré par l'ARF. Celui de la commission des finances donne une marge d'appréciation et d'ici la commission mixte paritaire nous aurons grâce à vous la possibilité de l'expertiser et de nous mettre à l'abri des inconvénients que vous redoutez.
Mme Michèle André. - Il ne s'agit pas d'un amendement de l'ARF. Parlementaire du Puy-de-Dôme, je porte la problématique de la région dont je suis issue, donnez m'en acte. L'ARF nous a fait connaître qu'elle n'y voyait aucun inconvénient et le ministre a fait allusion à la lettre qu'elle a adressée à Gilles Carrez et au Comité des finances locales.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Ce qui n'est pas interdit par la loi est possible et, si les régions en sont d'accord, c'est possible par voie conventionnelle.
M. Philippe Dominati. - Le débat est intéressant mais localisé. Je suis surtout gêné par les simulations : à quelques mois des régionales, il est déplaisant qu'on ne sache pas ce qu'il en sera pour les régions. La prochaine fois, je proposerai quelque chose pour le 4e arrondissement... Retrouvons la sérénité : il y a un mécanisme à revoir ? Pas dans ces conditions, pas à cette heure, pas si près des échéances de mars.
M. Jean-Pierre Sueur. - Mon explication portera seulement sur l'amendement de M. Jarlier. Je ne suis pas tout à fait d'accord avec les chiffres qu'il a énoncés pour la péréquation -tout dépend de ce qu'on appelle ainsi... Nous ne pouvons souscrire à son amendement. Il faut en effet se méfier de l'accumulation des critères. Il y en a eu une soixantaine à une certaine époque pour la DGF. C'est illisible...
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. - Et ça a des effets pervers !
M. Jean-Pierre Sueur. - ... et l'on multiplie ensuite les amendements sur tel ou tel d'ente eux. Il convient de faire très attention aux mécanismes que l'on met en place. M. Hortefeux a dit que l'ARF n'avait pas été consultée. Plus important, le comité des finances locales ne l'a pas été, même s'il a travaillé sur ce sujet difficile. Il est difficilement acceptable de dire en l'espèce qu'un décret définira la péréquation qui bénéficiera à quatorze régions et pas aux huit autres. Que les critères relèvent de la loi est une exigence absolue.
Mme Catherine Troendle. - Tout à fait.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. - Le législateur ne peut déléguer ses compétences : il doit fixer les proportions. L'amendement ne semble pas conforme aux règles constitutionnelles actuelles.
M. Éric Doligé. - Puisque l'on doit travailler samedi, j'ai ressorti quelques archives, dont un amendement de M. Marini prévoyant qu'avant le 1er juin 2010, le Gouvernement transmettra à l'Assemblée nationale et au Sénat un rapport détaillé sur le dispositif de péréquation... Puisqu'on va demander un rapport extrêmement précis, il serait peut-être dommageable de traiter les cas particuliers ici. Le Gouvernement nous a déjà apporté quelques éléments de simulation. Patientons six mois pour régler le problème auvergnat.
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. - J'ai bien entendu les questions constitutionnelles. L'amendement est issu d'un rapport résultant de six mois de travail. Oui, il y a une vraie difficulté sur le critère d'attribution et demain d'autres régions seront touchées si leur population augmente plus lentement que la moyenne. Il faut trouver une solution et l'on peut le faire d'ici le collectif. Je veux bien retirer l'amendement mais il y va de 11 millions.
L'amendement n°II-12 rectifié est retiré.
Mme Michèle André. - Donnons-nous six mois de réflexion.
L'amendement n°II-195-rectifié est retiré.
L'article 58 bis est adopté.
M. le président. - Amendement n°II-182, présenté par M. Patient et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après l'article 58 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er octobre 2010, un rapport relatif aux modalités de prises en compte, pour la répartition de la dotation de base de la dotation globale de fonctionnement, de la population réelle des départements d'outre mer. Le rapport précise les possibilités de prise en compte des populations habitants dans des logements illégaux et des personnes en situations irrégulières.
M. Pierre-Yves Collombat. - Me voici spécialiste de l'outre-mer et défendant des amendements au risque de déplaire à MM. Sueur et Doligé. (Sourires) Il s'agit en effet de tenir compte des particularités territoriales de l'outre-mer et de prendre en compte le fait que beaucoup de personnes ont un logement plus ou moins légal.
M. le président. - Amendement n°II-183 rectifié, présenté par M. Patient et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après l'article 58 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er octobre 2010, un rapport précisant les possibilités de prise en compte, pour la répartition de la dotation forfaitaire de la dotation globale de fonctionnement des collectivités territoriales de Guyane, du revenu moyen par habitant, des dépenses scolaires ainsi que des particularités géographiques de ces collectivités.
M. Pierre-Yves Collombat. - Cet amendement est spécifique à la Guyane, le département qui a le plus faible PIB par habitant et dont 58 % de la population est concentré sur 6 % du territoire, le reste étant dispersé et difficilement accessible, sinon par voie fluviale.
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. - L'amendement n°II-182 reprend une préconisation de la mission commune d'information présidée par M. Doligé. A titre personnel, je suis favorable à cet amendement que la commission n'a pas examiné, non plus que l'amendement n°II-183 rectifié. Personnellement, je considère qu'il vaut mieux s'en tenir aux préconisations précises de la mission commune d'information et aux amendements n°sII-112 et II-185 que de rentrer dans un débat de détail.
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. - Avis défavorable à ces deux amendements. Comme l'a rappelé le comité des finances locales en 2004, la DGF n'a pas vocation à répondre à des politiques locales ou à couvrir des charges particulières. Il faut que la répartition repose sur des critères simples, fiables et significatifs.
Ces principes ont guidé le comité des finances locales sur la réforme des dotations, son rapport de mai 2004 insistant sur la lisibilité de la dotation forfaitaire, outre la simplicité et l'équité des dotations de péréquation. Or, ni la population séjournant de façon irrégulière sur le territoire, ni les occupants de logements illégaux ne peuvent par nature être connus de façon fiable.
En outre, modifier les critères de répartition de DGF pourrait avoir un important effet de transfert entre collectivités, notamment entre communes ultramarines par suite des crédits spécifiques attribués.
M. Éric Doligé. - Ayant participé récemment à la rédaction de deux rapports, l'un consacré à la sécheresse, l'autre à l'outre-mer, je constate qu'au fil des budgets, on égrène nos propositions, parfaitement justifiées mais qui forment un tout.
Sur place, on comprend l'ampleur des spécificités. Le président de notre assemblée a souhaité qu'un comité de suivi examine les suites données au rapport sur l'outre-mer. Plutôt que de dissocier des propositions ayant une cohérence d'ensemble, je préfère qu'on leur donne une traduction globale.
Mme Josiane Mathon-Poinat. - Ces deux amendements abordent l'évidente inadaptation des critères de répartition des dotations aux spécificités ultramarines.
M. Pierre-Yves Collombat. - A quoi bon multiplier rapports et préconisations, sans rien faire ensuite ?
La DGF n'est peut-être pas le meilleur véhicule, encore faut-il en proposer un autre. Il ne suffit pas de reprendre l'argument classique sur la « complexité » de la DGF pour justifier que l'on publie un rapport sans en tirer de conséquences.
M. Doligé a raison de vouloir faire progresser les choses.
L'amendement n°II-182 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°II-183 rectifié.
M. le président. - Amendement n°II-184, présenté par M. Patient et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après l'article 58 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans la dernière phrase du 2° de l'article L. 2334-7 du code général des collectivités territoriales, le mot : « triple » est remplacé par le mot : « quadruple ».
II. - Ce même 2° est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le solde est attribué à l'établissement public de coopération intercommunale dont la commune est membre. »
III. - Les conséquences financières résultant pour les collectivités territoriales de l'augmentation de la part de la dotation forfaire de la dotation globale de fonctionnement proportionnelle à la superficie, sont compensées à due concurrence par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
IV. - Les conséquences financières résultant pour l'État du III ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. Pierre-Yves Collombat. - La dotation superficiaire, intégrée dans la DGF, s'applique en Guyane à des communes incomparablement plus étendues qu'en métropole, puisque leur surface atteint couramment 50 kilomètres carrés contre une quinzaine dans l'Hexagone. Certaines s'étendent sur plus d'un million d'hectares ! Pour éviter de leur verser une dotation superficielle gigantesque, celle-ci est plafonnée au triple de leur dotation de base.
Nous proposons de relever ce plafond.
M. le président. - Amendement n°II-185, présenté par M. Antoinette et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après l'article 58 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement présente au Parlement, avant le 1er octobre 2010, un rapport présentant le bilan du plafonnement de la part de la dotation globale de fonctionnement proportionnelle à la superficie, applicable aux communes de Guyane ainsi que les propositions d'adaptation de ce dispositif dans un sens plus favorable aux communes disposant de faibles ressources.
M. Pierre-Yves Collombat. - Cet amendement de repli demande un rapport sur la dotation superficiaire, qui fonctionne à peu près en métropole mais très mal en Guyane.
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. - Après l'intervention de M. Doligé, la commission est défavorable.
Les amendement n°sII-184 et II-185, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.