Questions orales
M. le président. - L'ordre du jour appelle les réponses du Gouvernement à dix-huit questions orales.
Allocation logement temporaire
M. Philippe Madrelle. - Madame la ministre du logement, en raison du désengagement de l'État, les associations de l'insertion par le logement font face à de graves difficultés financières. De fait, l'allocation logement temporaire qui leur est versée, et dont le barème dépend de votre ministère, n'a pas progressé depuis 2004 et augmente seulement de 1,9 % en 2009. D'où leurs interrogations sur la pérennité de leurs missions alors qu'elles croulent sous les demandes du fait de l'extension de la pauvreté et de la précarité.
En Gironde, l'ALT concerne 1 066 personnes pour 557 logements. Les associations ont pour principale mission de proposer un hébergement social temporaire à des familles monoparentales, des personnes seules et des travailleurs précaires et personnes isolées présentant des troubles du comportement et de la personnalité avec, pour objectif, l'insertion durable. Rémunérées par l'ALT selon le type de logement offert, elles peuvent demander une participation aux personnes hébergées en fonction de leurs ressources. Ce système les conduit à rechercher les logements à faible loyer, de plus en plus rares, notamment dans l'agglomération bordelaise, où les loyers ont progressé de 15 % entre 2004 et 2007, et les contraint à se transformer en véritables gestionnaires d'immobilier puisqu'elles paient les charges, de plus en plus lourdes, et entretiennent les appartements. Autre conséquence de la pénurie de logements, la forte dispersion géographique des hébergements qui amoindrit l'efficacité des accompagnateurs sociaux. En conséquence de quoi, les associations enregistrent au moins 1 000 euros de pertes par an et par ALT, cette somme correspondant à la différence entre recettes et dépenses d'hébergement et de suivi social.
Pour que les associations puissent remplir leur mission d'insertion par le logement, l'ALT doit être recalculée en fonction du prix des logements du parc social toutes charges comprises, et revalorisée d'au moins 20 %. Elles ne se résoudront pas à abandonner ce dispositif qui est adapté pour répondre à l'urgence des personnes en souffrance. A preuve, plus de 50 % des hébergements débouchent sur le logement autonome ; l'accès au logement, nous en sommes tous conscients, est l'étape fondamentale de l'insertion. Pouvez-vous nous assurer, madame la ministre, de votre volonté d'accorder aux associations les moyens de lutter contre la précarité ?
Mme Christine Boutin, ministre du logement. - Monsieur le sénateur, merci d'avoir souligné que ces préoccupations ne m'ont pas échappé. J'ai obtenu, en effet, une revalorisation de 1,6 % de l'ALT en 2009 alors que cette allocation n'avait pas progressé depuis 2004. De plus, dans le cadre du plan de relance, trop souvent oublié, 5 000 logements seront loués en intermédiation locative. Je n'ai pas reçu de candidature d'association en Gironde, mais je suis prête à examiner tout projet.
Quant à l'accompagnement social, il est de la compétence des conseils généraux au titre du Fonds de solidarité pour le logement (FSL). Pour compléter cette action, des postes d'accompagnateurs sociaux ont été financés dans le cadre du plan de relance, dont treize pour la région Aquitaine, qui interviendront notamment pour les ménages hébergés en logements ALT.
M. Philippe Madrelle. - Madame la ministre, très objectivement, les effets des mesures que vous venez d'énoncer ne se font pas sentir sur le terrain. Le logement d'urgence temporaire ne relève pas du conseil général, mais des associations qui, aujourd'hui en difficulté, viennent frapper à notre porte en Gironde et sont aidées via le FSL. Qui plus est, la direction des affaires sanitaires et sociales de Gironde a supprimé les crédits alloués à l'accueil des déboutés du droit d'asile dont la procédure de recours est en cours d'examen, ce qui accroît les tensions. Enfin, j'ajoute que l'hébergement d'urgence est sinistré dans notre département, diagnostic que je partage avec le maire de Bordeaux !
Vente du patrimoine immobilier d'Icade
Mme Odette Terrade. - La vente de 34 000 logements de la société Icade, filiale de la Caisse des dépôts et consignations, qui est prévue pour cet été a été annoncée par un communiqué de presse du 12 décembre dernier, sans concertation. Elle a provoqué un vif émoi parmi les parlementaires de tous bords qui vous ont interpellé, madame la ministre, ainsi que le ministre du budget sans obtenir de réponse satisfaisante. Cette vente de logements sociaux situés dans la région parisienne où la question du logement est particulièrement sensible, ressemble de plus en plus à partie de ping-pong, où l'un ne cesse de renvoyer la balle à l'autre, dont locataires et salariés, vendus avec les murs, feront les frais. Car, faut-il le rappeler, ces logements du parc social de fait ont été construits par la Scic, filiale de la Caisse des dépôts, avec de l'argent public.
De nombreuses communes avaient mis des terrains à disposition pour le franc symbolique afin de disposer de logements sociaux ou intermédiaires, lesquels ont été pour une grande partie conventionnés via des prêts de l'État. Alors que l'Autorité des marchés financiers les avait évalués à 1,426 milliard en 2006, Icade va les vendre 2,935 milliards. Comment une telle plus-value est-elle possible en si peu de temps, sur un patrimoine au reste moins important, puisqu'Icade a vendu, entre-temps, 10 000 logements ?
Alors que notre pays souffre d'un manque cruel de logements sociaux et que vous prévoyez dans la loi de mobilisation pour le logement de racheter 30 000 logements à des promoteurs privés, est-il admissible que des bailleurs sociaux payent une telle plus-value aux actionnaires privés d'Icade ?
S'ajoute à cela un conflit d'intérêts pour la Caisse des dépôts, partie prenante à cette cession à la fois comme vendeur, en tant que maison-mère d'Icade, et comme acquéreur, puisque la SNI, chef de file du consortium de candidats au rachat, est également une filiale de la Caisse, laquelle sera vraisemblablement, de surcroît, le principal prêteur des bailleurs candidats. Ainsi, la CDC va non seulement récupérer le produit de la cession au prix qu'elle se sera elle-même fixé mais va encaisser les intérêts sur les prêts. Ce qui fait dire à certains collègues, pourtant proches de votre sensibilité politique, que nous sommes face à un véritable scandale d'État.
Évidemment, les maires des villes concernées, en toute logique, souhaitent, comme nous, que ces logements soient rachetés par des bailleurs sociaux afin que leur destination reste sociale. Mais céder aujourd'hui le patrimoine d'Icade à des bailleurs sociaux, dans ces conditions, revient à faire financer deux fois ces logements par des fonds publics. Il est scandaleux qu'après avoir largement amorti la construction de ses immeubles grâce à l'accumulation des loyers, dont certains ont subi des hausses inadmissibles alors qu'ils étaient versés par des locataires aux ressources modestes, Icade ait pu, au détour d'une introduction en bourse, privatiser son patrimoine de manière à le revendre quelques années plus tard dans une opération purement spéculative et à un prix qui frise l'indécence, sans qu'aucune démarche transparente de concertation ait été engagée avec les élus.
Quelles réponses pouvez-vous apporter, madame la ministre, aux maires des communes d'Ile-de-France concernés, qui demandent un droit de regard sur cette vente intéressant directement la politique d'habitat de leurs villes ? Que comptez-vous faire, avec le ministre du budget, pour que les bailleurs sociaux puissent acquérir ces logements à un prix qui n'alimente pas le jeu d'une spéculation honteuse ? Quelles garanties pour les emplois des salariés ? Quelles mesures allez-vous prendre pour que ce parc social soit pérennisé et que soit garanti aux locataires actuels un maintien dans les lieux avec un loyer social, adapté à leur situation ?
Mme Christine Boutin, ministre du logement. - Dans le cadre du recadrage de son activité, Icade vend en effet 31 500 logements, à plus de 90 % en Ile-de-France. Un groupe de vingt bailleurs sociaux, menés par la SNI, s'est porté candidat. L'intérêt d'une vente en bloc est de pérenniser la vocation sociale de ces logements. Il s'agit de trouver une réponse globale, conciliant intérêts des locataires et intérêts patrimoniaux d'Icade.
L'opération entre dans le cadre du décret du 15 mai 2007, qui réglemente la cession aux bailleurs appartenant à une filiale de la CDC et ayant fait l'objet d'un conventionnement, afin d'éviter le déconventionnement des logements et de préserver leur vocation sociale sans hausse de loyer. Voilà qui doit répondre à vos préoccupations.
C'est ainsi que 18 500 logements conventionnés d'Icade peuvent être acquis par des PLS. En outre, le décret prévoit qu'au moins un tiers des logements doivent être loués à des ménages dont les ressources sont inférieures au plafond Plai, et un tiers au plus à des ménages dont les ressources sont comprises entre le plafond Plus et celui du PLS, ceci afin de maintenir leur vocation sociale et de garantir la mixité. Est également prévue une procédure de concertation entre les bailleurs, les communes et l'État, qui doit se traduire par une convention tripartite, cela afin d'assurer la cohérence de la politique sociale de la commune. Cette convention doit prévoir un loyer plafond inférieur au loyer réglementaire.
Le reste du parc est hors du champ d'application du décret. Les logements peuvent être acquis, ainsi que je l'ai indiqué aux maires concernés, par des prêts réglementés, Plai ou PLS, donnant lieu à un conventionnement qui impose le respect de conditions de ressources et de loyer.
Mme Odette Terrade. - Je vous remercie de ces éléments de réponse détaillés, dont j'espère qu'ils seront suivis d'effet. Les locataires, qui ont déjà subi des augmentations de loyer importantes, et les élus peuvent compter sur notre vigilance.
Le groupe communiste, à l'Assemblée nationale et au Sénat, a demandé la constitution d'une commission d'enquête sur les conditions de cette cession. Quand il s'agit de l'argent public, nous estimons que la transparence doit être de mise.
RN 57
M. Claude Jeannerot. - La route nationale 57, qui relie le nord de l'Europe à la Suisse, en passant par mon département, la Franche-Comté, est un axe européen, retenu à ce titre par l'État dans son propre patrimoine, contrairement aux 140 kilomètres de routes nationales d'intérêt local comme la RN 83, transférés au conseil général du Doubs au 1er janvier 2006.
La RN 57 constitue une infrastructure de tout premier plan pour l'ensemble du Doubs et du Haut-Doubs. Or, elle n'est plus dimensionnée pour pouvoir soutenir le développement de ce territoire. Sur deux points majeurs, les travaux et les études doivent être finalisés en urgence : le contournement de Besançon, capitale régionale, tout d'abord, avec l'achèvement de la voie des Mercureaux et le lancement du projet Beure-Planoise, inscrit au contrat de plan État-région 2000-2006. Des crédits de l'État sont nécessaires pour permettre d'achever rapidement les chantiers en cours et de lancer les derniers marchés. Le lancement immédiat des études opérationnelles et des marchés pour la section Beure-Planoise permettrait de terminer, à bref délai, le contournement de Besançon, attendu de longue date.
Ensuite, la relance d'un plan opérationnel de travaux sur le parcours de la RN 57 dans le Haut-Doubs constituerait une étape nouvelle pour cette liaison d'intérêt national et international. Les élus du département, toutes sensibilités confondues, se sont rassemblés le 22 novembre dernier, dans les rues de Pontarlier, pour demander un geste de l'État. Votre prédécesseur, M. Perben, avait, dans un courrier du 30 juin 2006, pris un certain nombre d'engagements, en particulier sur la réalisation du créneau entre La Main et La Vrine, afin qu'il soit réalisé en début de programme, mais également sur la déviation des Tavins, ajoutant que, pour soulager l'agglomération de Pontarlier de l'intense trafic qui la traverse, il demandait à ses services d'engager les études préliminaires pour définir, dans la concertation, le tracé de la déviation. Trois ans après, aucun signe concret ne nous a été donné. Après de tels préliminaires, on espérait un passage à l'acte. Hélas, il n'en est rien.
L'annonce par voie de presse du programme de modernisation d'itinéraires du réseau routier national (PDMI) a plongé les élus dans la stupéfaction et l'indignation. Nos espoirs ont été déçus : notre région ne bénéficie pas des investissements attendus.
Que compte faire l'État, monsieur le ministre ? Quand et comment financera-t-il l'achèvement du contournement routier de Besançon ? Quand les engagements pris en faveur du Doubs et du Haut-Doubs seront-ils respectés ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. - La desserte de la Franche-Comté, du Doubs et de la ville de Besançon fait partie de l'un des plus grands chantiers français et européens, puisqu'une ligne à grande vitesse doit desservir le secteur à l'horizon 2011. Le Grenelle II a également été l'occasion d'évoquer la desserte entre le bassin Rhône-Saône et le bassin Rhin-Moselle.
L'aménagement du contournement de Besançon, et plus précisément, les travaux de la voie des Mercureaux sont en cours de réalisation. Les financements sont mis en place en fonction des possibilités techniques d'avancement du chantier, dans le respect du coût d'objectif final de l'opération tel qu'il a été arrêté avec l'ensemble des cofinanceurs, à savoir 160,9 millions en valeur septembre 2007.
Pour achever le contournement sud-ouest de Besançon, il faudra en outre assurer la jonction de la voie des Mercureaux avec la RN 57 au niveau du « Trou au loup » et aménager la section Planoise-Beure, deux opérations qui n'ont pu être inscrites au PDMI 2009-2013 au vu de l'avancement de leurs études préalables.
Il n'est pas possible aujourd'hui de définir la solution à retenir pour la section Planoise-Beure. Avec M. Borloo, nous avons donc demandé à nos services de poursuivre la procédure, sachant que l'aménagement devra prendre en compte les contraintes particulières liées aux milieux naturels et à l'urbanisation du secteur. Le moment venu, un accord financier avec l'ensemble des partenaires conditionnera le lancement des travaux.
En revanche, le préfet de région a été mandaté par mes soins pour négocier avec les collectivités territoriales afin de définir leur participation financière à l'aménagement de la RN 57, qui a été ajouté au PDMI. Cette opération pourrait donc être réalisée d'ici 2014.
M. Claude Jeannerot. - Je suis loin d'être rassuré, monsieur le ministre. Vous avez bien voulu rappeler que le contournement de Besançon coûterait presque 170 millions d'euros à la République, mais les trois quarts ont été payés par les collectivités territoriales.
Lorsque 130 kilomètres de routes nationales ont été transférés au département du Doubs, dont je préside le conseil général, nous avions compris que le principe du décroisement s'appliquerait à compter de 2006 ; or, vous dites que les collectivités territoriales vont être sollicitées une fois de plus.
Le département du Doubs a déjà versé 50 millions d'euros pour la ligne de TGV et 50 millions pour l'opération des Mercureaux. Vu les tensions financières actuelles, il n'est pas raisonnable d'imaginer que les collectivités territoriales puissent contribuer à financer de nouveaux équipements de dimension nationale, voire européenne.
Aménagement de la RN 88
M. Jean-Marc Pastor. - Ma question porte sur la mise à deux fois deux voies de la RN 88 entre Albi et l'autoroute A 75 à Séverac-le-Château.
Classée « grande liaison d'aménagement du territoire » dès 1993 à l'occasion du comité interministériel d'aménagement du territoire (Ciat) de Mende, la RN 88 est devenue une priorité nationale. Pourtant, sa mise à deux fois deux voies n'est réalisée que sur la moitié du trajet, malgré d'autres comités interministériels et la charte signée entre l'État et le syndicat mixte d'études et de promotion de l'axe Toulouse-Lyon.
Les collectivités ont eu droit à des engagements réitérés de l'État, mais attendent toujours son soutien concret.
Les voies de communication contribuent fortement au développement économique. Or, la région Midi-Pyrénées est notoirement l'une des plus enclavées, puisque Rodez, Figeac et Millau sont à plus de deux heures de Toulouse.
Le Président de la République a déclaré hier vouloir mettre l'accent sur l'aménagement du territoire et la réactivation des territoires ruraux. La mise à deux fois deux voies de la RN 88 est un bon cas pratique pour ce faire, puisque le maillage du territoire oublie aujourd'hui la région Midi-Pyrénées, au nord selon l'axe Lyon, Clermont et Bordeaux avec l'A 89, à l'est par Montpellier avec l'A 75, le TGV empruntant l'arc atlantique.
La RN 88 assure une liaison interrégionale entre Midi-Pyrénées et Rhône-Alpes, mais elle relie également l'Espagne à l'Europe centrale. L'État ne doit donc pas s'en tenir à de volatiles autorisations d'engagement. Les élus locaux craignent qu'après avoir supprimé les contrats de plan État-régions et exclu les investissements routiers de l'État des nouveaux contrats de projet, qu'après avoir organisé le transfert de routes nationales aux départements et plaidé pour un décroisement des financements, l'État n'assume plus sa part et sollicite une nouvelle fois les collectivités locales, auxquelles il reproche par ailleurs d'augmenter les impôts ! Les élus redoutent d'être contraints non seulement de cofinancer, mais aussi de subir des remboursements erratiques après avoir avancé ce que l'État reconnaît devoir payer lui-même.
Comment le Gouvernement envisage-t-il de mettre au plus tôt cet itinéraire à deux fois deux voies ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. - L'État souhaite accélérer l'aménagement que vous venez d'évoquer, pour assurer une liaison satisfaisante entre Toulouse et Rodez. Ce complément indispensable du maillage routier contribuerait grandement au désenclavement territorial.
Un programme spécial d'investissement, s'ajoutant aux programmes de modernisation des itinéraires, sera donc bâti pour financer la mise à deux fois deux voies de l'itinéraire reliant Albi à Rodez.
Le préfet de région vient d'être mandaté pour négocier à cet effet avec le conseil régional de Midi-Pyrénées, dont je connais l'investissement sur le plan ferroviaire, ce dont je le remercie, et les conseils généraux du Tarn et de l'Aveyron, qui devront participer au financement de ce programme aux côtés de l'État. Après discussion, une convention fixera la participation de chaque partenaire et les modalités de financement.
La rocade d'Albi et les aménagements de sécurité dans la traversée de Lescure-d'Albigeois figurent parmi les opérations prioritaires du mandat adressé au préfet de la région Midi-Pyrénées pour finaliser les PDMI. Des discussions se déroulent actuellement, dans de bonnes conditions, avec les collectivités territoriales.
Les travaux sur la section Tauriac-La Mothe devraient pouvoir débuter en 2010, la mise en service étant prévue pour 2013. Le moindre avancement des procédures concernant la déviation de Baraqueville -notamment pour l'aménagement foncier- interdit d'ouvrir avant 2011 ce chantier qui durera au moins quatre ans.
M. Jean-Marc Pastor. - Je vous remercie pour cet aperçu. On verra... L'État ne semble pas avoir les moyens de concrétiser les annonces du Président de la République.
Il n'est pas convenable de solliciter continuellement le contribuable local, tout en critiquant les financements croisés, en réduisant les ressources des collectivités territoriales et parfois en stigmatisant celles-ci.
Les routes nationales ont été transférées aux départements au mois de novembre, avec force campagne de communication sur la clarification des compétences attribuées à chacun, mais les projets réalisés dans la foulée seront payés par les collectivités territoriales, non par l'État. Nous le regrettons.
Recrutés locaux à Caracas
Mme Claudine Lepage. - J'attire votre attention sur la situation de recrutés locaux employés par les services de l'ambassade de France à Caracas, par le consulat, la mission économique, l'attaché de sécurité intérieure, l'attaché de défense et même le lycée français.
Alors que leurs collègues sont rémunérés en euros, ces personnes, parfois de nationalité française, perçoivent leur rémunération en bolivars, ce qui les défavorise. En effet, l'inflation comprise entre 30 % et 40 % par an dégrade considérablement leur pouvoir d'achat, alors que leur grille n'a jamais été revalorisée depuis 1995.
En outre, le strict contrôle des changes vénézuélien leur interdit en pratique d'utiliser cet argent hors du pays. Cette différence de traitement, légitimement considérée comme injuste, est potentiellement porteuse de tensions entre agents recrutés localement.
La loi locale vénézuélienne ne fait pas obstacle au versement des salaires en euros, qui ne coûterait rien à l'État français.
Cet exemple illustre à nouveau la position précaire d'agents recrutés localement par la France, véritables laissés pour compte alors qu'ils contribuent activement au bon fonctionnement de nos postes et à notre rayonnement international. Cette situation donne une image négative de notre pays, loin de l'égalité dont la République se prévaut.
Je souhaite que la rémunération du personnel recruté localement à Caracas soit versée en euros. En outre, les prestations sociales de cette catégorie de personnel devraient être améliorées dans l'ensemble des postes à travers le monde. Ces agents, souvent employés depuis de longues années en application du droit local, sont indispensables au fonctionnement des services extérieurs de la France et à son rayonnement.
Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des affaires étrangères et des droits de l'homme. - Nous avons conscience de la dégradation de la situation financière qui frappe nos agents de droit local recrutés à Caracas.
Avec une moyenne de 2 000 euros par agent local, les salaires exprimés en euros de nos agents vénézuéliens sont relativement élevés par comparaison avec le reste de notre réseau diplomatique et consulaire. Toutefois, il est vrai que, en raison d'un strict contrôle des changes, le revenu réel reçu en bolivars par nos agents se dégrade et nos agents locaux ont été informés qu'une solution était recherchée pour améliorer leur situation financière. Cela nécessite une concertation préalable avec Bercy ; elle est en cours et nous sommes mobilisés pour qu'une réponse soit apportée dans les meilleurs délais.
S'agissant de la protection sociale des agents de droit local dans le réseau diplomatique et consulaire, le ministère des affaires étrangères et européennes s'attache à dresser un état précis de la situation, afin d'identifier les pays où l'effort de mise à niveau devrait être porté en priorité.
Nous sommes donc non seulement pleinement conscients des difficultés rencontrées par nos agents de droit local à Caracas, mais mobilisés pour qu'une solution puisse être rapidement trouvée aux difficultés qu'ils rencontrent.
Mme Claudine Lepage. - Je vous remercie de cette réponse encourageante. Lors de sa visite, en avril, M. Woerth s'était ému de la situation de nos agents au Venezuela. De manière générale, le sort des recrutés locaux est très difficile. On comprend bien que la situation ne soit pas la même en Allemagne et au Congo, mais comment admettre que des gens qui ont servi la France se retrouvent sans retraite ?
Redéploiement du Rased
M. Hervé Maurey. - Je souhaite attirer l'attention du ministre de l'éducation nationale sur les inquiétudes grandissantes que suscite le redéploiement du réseau d'aide spécialisée aux élèves en difficulté (Rased). Ces équipes apportent depuis 1990 un soutien particulier aux élèves en échec ou en grande difficulté scolaire. Leur action, très appréciée sur le terrain, est tout à fait différente de l'aide personnalisée que les enseignants peuvent apporter aux élèves grâces aux deux heures libérées du samedi matin. En effet, cette aide personnalisée permet aux maîtres de répondre ponctuellement et en petit groupe aux difficultés rencontrées par leurs propres élèves, alors que les Rased répondent à des situations de blocage lourds par rapport à l'enseignement en général ou à des difficultés chroniques. Ils interviennent en étroite collaboration avec l'équipe pédagogique et les familles pour maintenir, autant que faire se peut, les élèves dans le système général.
L'aide personnalisée répond de manière pertinente à des difficultés ponctuelles, l'aide des Rased à des problèmes lourds.
Dans l'Eure, la suppression de postes Rased se fait au détriment de nombreuses écoles des petites communes. C'est pourquoi enseignants et parents d'élèves s'inquiètent. Va-t-on revenir sur la suppression partielle des Rased ? Quelles sont les intentions du Gouvernement ?
Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des affaires étrangères et des droits de l'homme. - Je vous prie d'excuser M. Darcos, retenu par une réunion avec les recteurs d'académie. Depuis la rentrée 2008, la durée de l'enseignement scolaire dans le premier degré est fixée à 24 heures hebdomadaires dispensées à tous les élèves, auxquelles s'ajoutent deux heures d'aide personnalisée en très petits groupes pour les élèves en difficulté. Ce sont donc 60 heures annuelles qui sont désormais consacrées par chaque maître à des actions directes auprès des élèves en difficulté. Autrement dit, l'équivalent de 16 000 postes d'enseignants entièrement dédiés à aider les élèves qui en ont le plus besoin.
Dans ce nouveau contexte, la contribution des enseignants spécialisés de Rased doit évoluer. Leur expertise professionnelle indéniable doit désormais être ciblée sur les élèves en très grande difficulté, en évitant une dispersion inutilement coûteuse.
L'Eure comptait 79 postes de maitres E (à dominante pédagogique) et 33 postes de maitres G (à dominante éducative). Sur ce total de 112 postes, 33 sont concernés par la nouvelle organisation des missions du réseau. Parmi ces derniers, dix-sept seront installés dans des écoles en poste surnuméraire tandis que seize seront redéployés. Dans votre circonscription, le réseau initial de 4 maîtres E et trois maîtres G a été réorganisé sur une nouvelle base de quatre maîtres E -dont deux surnuméraires- et deux maîtres G.
Les implantations des maîtres surnuméraires ont été définies par le niveau de difficulté scolaire de certaines écoles, soit un poste de surnuméraire à Bourg Lecomte dans la commune de Bernay et un poste surnuméraire à Louis Pergaud à Brionne. Cette réorganisation conduira à une concentration des actions des maîtres E surnuméraires sur les écoles qui en ont le plus besoin.
S'agissant des autres écoles de votre département, monsieur le sénateur, le ministère va redéfinir les missions des maîtres E et G et réorganiser la couverture géographique selon plusieurs critères : la prise en charge des élèves fragiles connus dès la rentrée ; les priorités définies en fonction des évaluations en CE1 et CM2 ; l'organisation d'aides regroupées dans le temps ; la mise en cohérence avec les dispositifs d'aide personnalisée. A cette réorganisation s'ajouteront des mesures de carte scolaire tenant compte des situations de redéploiement et de la difficulté scolaire avérée de certaines écoles. Les fermetures envisagées dans les écoles de Bourg Lecomte et Jean Moulin à Bernay ont été abandonnées à ce dernier titre ; le nombre moyen d'élèves par classe y sera à la rentrée inférieur à vingt.
Service civil volontaire
Mme Fabienne Keller. - En avril dernier, j'avais inscrit au rôle des questions orales sans débat une question sur la relance du service civil volontaire ; le Président de la République venait de vous confier, monsieur le haut-commissaire, un second commissariat à la jeunesse avec, dans votre lettre de mission, l'extension de ce service civil volontaire. C'était sans compter l'initiative du groupe RDSE qui, dans le cadre des nouvelles prérogatives dont bénéficient les groupes politiques au sein de notre assemblée, avait inscrit un débat sur ce sujet le 10 juin dernier. Je ne reviens donc pas sur les différents éléments qui définissent un service civil et qui ont été longuement débattus, son caractère obligatoire ou non, sa durée, la rémunération des jeunes, les objectifs d'insertion professionnels.
Nous aurions pu évoquer aussi les dispositifs proches, comme le service militaire adapté outre-mer, les places en Épide ou les pompiers volontaires. Le 10 juin, vous avez évoqué la création d'ici plusieurs années de 50 000 places pour le service civil, soit 10 % d'une classe d'âge, ce qui semble un objectif à la fois ambitieux et réaliste, à mettre en rapport avec les 2 800 jeunes concernés actuellement. Pourriez-vous nous préciser dans quel calendrier et selon quelles modalités cet effectif de 50 000 volontaires pourrait être atteint ?
Le 10 juin, vous avez jugé inconcevable qu'il n'y ait que 185 jeunes en service civil mobilisés en faveur de l'environnement. De fait, nous connaissons tous les enjeux colossaux de la réduction des gaz à effet de serre de 20 % d'ici 2020. Au-delà de la question du financement, l'information de tous les occupants, propriétaires ou locataires sur la performance énergétique de leur logement, joue un rôle primordial pour créer la prise de conscience et accélérer les prises de décision. Lors de sa venue à Strasbourg, le 10 mai dernier, Mme Jouanno avait laissé entendre qu'elle réfléchissait à la création d'un service civil environnemental. Ma question est la suivante : comptez-vous dégager une véritable synergie entre le développement du service civil volontaire et la mise en oeuvre des grands chantiers environnementaux ? Quelles modalités envisagez-vous ?
M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté et à la jeunesse. - La question est vraiment d'actualité : cet après-midi se terminent les travaux de la commission de concertation dont j'espère qu'elle approuvera un service civil ambitieux, et je rencontre tout à l'heure Mme Jouanno.
Le Gouvernement est effectivement attaché aux deux dimensions que vous avez évoquées. Si l'on veut que le service civil ait une vraie influence sur la société, il faut qu'une proportion significative de la classe d'âge soit concernée. Beaucoup ici en sont d'accord mais il faut avancer graduellement. J'espère revenir bientôt avec des crédits de telle façon que, fin 2009, nous puissions envisager 10 000 volontaires. Je n'ai guère d'inquiétude alors pour le succès de ce service.
J'aurai encore moins d'inquiétudes si nous centrons ce service civil sur des causes qui le méritent et qui rendent un réel service au pays. Pour les jeunes, pas de doute, la cause la plus importante, c'est la sauvegarde de la planète et, donc, la dimension environnementale est centrale dans ce service civil. Il faut aider les ménages, les personnes âgées à faire un diagnostic énergétique, à obtenir les aides existantes puis à passer à l'acte. C'est un enjeu écologique, économique, qui, en même temps, offre aux jeunes une formation d'avenir. On peut favoriser ce genre de service civil avec des aides des collectivités locales et de l'Ademe, et j'espère bien que nous serons dépassés par l'ampleur du succès de ce service civil. Je vous remercie d'avance de votre soutien.
Mme Fabienne Keller. - Merci de votre réponse et de votre énergie dans la mise en place d'un service civil adapté aux besoins. Je vous assure de mon soutien, un soutien partagé par beaucoup sur tous les bancs. Nous sommes conscients du coût budgétaire qu'aura le développement d'un tel service civil, surtout du fait de la rémunération des jeunes. Je vous remercie chaleureusement d'avoir compris qu'il y avait dans l'environnement un gisement de formations à des métiers d'avenir et je vous souhaite plein succès pour cet après-midi et pour les négociations budgétaires à venir.
Prix de journée dans les Ehpad
M. Didier Guillaume. - Ma question porte sur le prix payé par nos anciens dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes. Le 6 février, le Président de la République a évoqué les enjeux que représentaient la vieillesse et le cinquième risque. Mais les choses n'avancent que trop lentement, ce qui est gravissime pour nos personnes âgées. Aujourd'hui, les Ehpad abritent des hommes et des femmes qui ont connu la guerre et les privations. Ils y entrent en moyenne entre 82 et 85 ans ; ce sont souvent d'anciens commerçants, artisans ou agriculteurs qui, ayant travaillé à une époque où les cotisations sociales n'étaient pas ce qu'elles sont aujourd'hui, touchent aujourd'hui de très faibles retraites.
D'après un récent sondage du Parisien-Aujourd'hui en France, nos concitoyens s'inquiètent de la situation des personnes âgées et d'éventuelles maltraitances, ne serait-ce que psychologiques, dont elles seraient victimes. Ils s'aperçoivent que les maisons de retraites sont réservées à ceux qui ont beaucoup d'argent et que, pour les autres, même avec l'APA, les retraites ne suffisent pas à les payer.
J'ai regretté qu'hier au Congrès du Parlement, le Président de la République -dont j'ai pourtant partagé certains constats- n'ait pas évoqué l'enjeu que représente l'accompagnement de nos anciens. Dans le département que je préside, la Drôme, par exemple, un quart de la population a plus de 65 ans. Il manque donc des places en établissements !
Le financement des Ehpad est réparti en trois blocs : l'hébergement est à la charge des résidents, la dépendance à celle des départements et les soins à celle de l'assurance maladie. Pour les départements, les frais d'APA augmentent terriblement, d'autant que l'État n'en paye plus que 25 %, contre 50 % initialement, le reste étant à la seule charge des conseils généraux. Les frais de mise aux normes, notamment de sécurité, augmentent sans cesse et l'ensemble de ces charges et remboursements d'emprunt sont imputés sur le seul prix de journée. Or, ces travaux de mise aux normes profitent également à la dispense de soins. Ne pourrait-on, en conséquence, les répartir également sur le volet « soins » du financement ?
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille. - Bien évidemment, le Gouvernement est conscient du vieillissement de la population et le Président de la République a parlé hier des retraites... Rappelons-nous que l'espérance de vie atteint maintenant 81 ans, ce qui est une bonne chose, mais ce qui nous oblige à prendre des mesures pour mieux accompagner les personnes âgées dans notre pays. C'est un devoir de solidarité.
Le tarif hébergement des maisons de retraite, à la différence du budget de soins et de dépendance de ces établissements, n'est pas, par principe, à la charge de la collectivité puisqu'il correspond aux charges de logement des intéressés. La politique des pouvoirs publics, c'est-à-dire des collectivités locales et de l'État, n'a pas pour but de se substituer aux usagers pour les charges qui leur reviennent. Elle doit, en revanche, permettre aux personnes âgées dépendantes d'accéder à des établissements de qualité en apportant le soutien financier nécessaire aux plus modestes et en accompagnant, au travers des mécanismes fiscaux et de l'aide directe à l'investissement, le développement et la modernisation des établissements.
A cet égard, l'État s'est montré particulièrement actif ces dernières années pour favoriser l'investissement dans les Ehpad et maîtriser le reste à charge. Ainsi, depuis 2006, ces établissements ont accès au prêt locatif social et bénéficient à ce titre de la TVA à taux réduit à 5,5 % sur les travaux, bénéfice qui a été étendu par la loi du 5 mars 2007 instituant le droit opposable au logement. L'admission aux prêts locatifs sociaux permet également l'exonération de taxes foncières pendant 25 ans et ouvre le droit à l'allocation personnalisée au logement pour les résidents. Cela réduit le coût d'investissement, modère le reste à charge des résidents et garantit l'accès de personnes à revenus modestes dans ces établissements.
En outre, en écho aux recommandations de la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 a, pour la première fois, autorisé l'utilisation des crédits d'assurance maladie pour couvrir les frais financiers induits par les opérations de modernisation. Enfin, depuis 2006 et la mise en place de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, près d'un milliard d'euros a été affecté aux aides à l'investissement destinés aux Ehpad.
L'effort de l'État -50 à 70 millions par an- a été multiplié par quatre par rapport aux montants antérieurement engagés au titre des contrats de plan État-région. Sur les trois dernières années, plus de 800 Ehpad ont été aidés pour un montant moyen supérieur à un million d'euros. De ce fait, la modernisation du secteur a été fortement accélérée et ces subventions ont permis de réduire le tarif acquitté par l'usager, puisqu'une subvention de 20 % réduit la facture de l'usager de plus de 100 euros par mois.
En tenant compte de l'effet de levier des subventions accordées et, en 2009, de l'effet additionnel du plan de relance, l'effort global représente, en quatre ans, plus de 5 milliards de travaux dans ce secteur. C'est également un soutien puissant pour le secteur du bâtiment.
Mais le Gouvernement a parfaitement conscience que les enjeux les plus importants du vieillissement sont encore à venir et que notre système de protection sociale n'est pas adapté pour y faire face. C'est pourquoi une réflexion est engagée afin de mieux prendre en charge la perte d'autonomie. Augmenter le nombre de places en établissements médicalisés et réduire le reste à charge des usagers nécessitent d'identifier de nouveaux financements pérennes et innovants dans un contexte difficile. Plusieurs hypothèses techniques sont actuellement à l'étude qui font appel simultanément à la solidarité nationale, à la solidarité familiale et à la responsabilité individuelle afin de manifester concrètement la solidarité que nous devons à nos aînés.
M. Didier Guillaume. - Je peux être d'accord avec tout ce que vous venez de dire mais, si les gestionnaires ont reçu des aides, au bout du compte, nos personnes âgées et leurs familles, elles, ont vu le prix de journée augmenter. Si aucun effort supplémentaire n'est fait, nous allons dans le mur car, en cette période de crise et de chômage, les enfants ne peuvent pas davantage payer que leurs parents. Un effort de solidarité est nécessaire de la part de l'État. Dans mon département de la Drôme lorsque nous signons une convention tripartite avec les Ehpad et l'assurance maladie, nous sommes confrontés à ce dilemme : faut-il augmenter le prix de journée, ou le diminuer pour le rendre accessible aux plus modestes mais au risque de ne pas être conformes aux normes imposées ?
C'est un sujet de société. J'espère que le Gouvernement fera route vers le cinquième risque. Nous devons la solidarité nationale à nos anciens.
Accueil des enfants de 2 à 3 ans en maternelle
Mme Samia Ghali. - Selon tous les rapports de l'éducation nationale, les élèves de ZEP scolarisés tôt réussissent mieux en CP. Selon les personnels de la protection maternelle et infantile, la scolarisation précoce est indispensable à l'éveil et au développement de l'enfant dans les familles où l'intervention sociale est nécessaire.
Les pouvoirs publics ont longtemps privilégié une approche souple et pragmatique. Or, si les enfants de moins de 3 ans étaient près de 37 % à être scolarisés en 2002, ils ne sont plus que 22 % aujourd'hui. Même dans les quartiers les plus défavorisés, les familles se heurtent à des refus. Pour ces populations en grande difficulté, l'école publique et gratuite assure pourtant l'éveil et les premiers apprentissages.
Il faudrait renforcer formation des personnels et le ratio d'encadrement pour mieux accueillir ces enfants à l'école maternelle. Or votre réponse a été d'expérimenter, depuis septembre, dans le département du Rhône, la prise en charge payante des enfants de 2 à 3 ans dans des jardins d'éveil. Début avril, vous avez annoncé l'expérimentation de 8 000 places payantes en jardins d'éveil. Dans quels locaux ? Dans quelles conditions ? Avec quel encadrement, quels personnels ? A quel coût pour les familles et les collectivités territoriales ?
Mère d'un enfant de 20 mois, je connais les problèmes de garde d'enfants. Il faut davantage de places en crèche ! Par principe et par économie, vous abandonnez la scolarisation des enfants de moins de 3 ans. La généralisation de structures payantes, ne répondant pas aux exigences du service public de l'éducation, nous inquiète.
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille. - Le Président de la République m'a confié la mission de développer 200 000 offres de garde supplémentaires pour accompagner notre natalité, la plus forte d'Europe. Selon la Dress, le coût des modes de garde a baissé de 4,5 % par an entre 2002 et 2007, soit 24,37 % en cinq ans, grâce à la prestation d'accueil du jeune enfant (Paje), le crédit d'impôt pour les familles modestes, les aides fiscales.
L'école maternelle à 3 ans est une exception mondiale. La plupart des études -y compris celles commanditées par Mme Royal !- démontrent qu'il est néfaste de scolariser trop tôt les enfants, exception faite des quartiers difficiles où les enfants ne sont pas pris en charge. L'accompagnement n'est pas le même que dans les modes de garde traditionnels. Un enfant de 2 ans est un bébé ! Dans un jardin d'éveil, contrairement à l'école maternelle, il n'est pas obligé d'être propre.
Ce sujet a fait l'objet d'un rapport sénatorial de Mme Papon et de M. Martin, et d'une large concertation avec les acteurs de la petite enfance et les collectivités locales. Loin de concurrencer la maternelle, les jardins d'éveil visent à diversifier les modes de garde. Plus souples à mettre en oeuvre, ils reposent sur la mutualisation des moyens : une mairie, mais aussi une association ou une entreprise, pourra mettre en place un jardin d'éveil si elle dispose de locaux. Le coût moyen d'une place sera de 8 000 euros par an, contre 13 000 en crèche. Tout le monde y gagne : les collectivités locales, la Cnaf, les parents, qui paient en fonction de leurs revenus, les entreprises.
L'encadrement sera resserré, avec des groupes de douze à 24 enfants ; il y a aura trois encadrants, avec la possibilité de deux mi-temps supplémentaires. Le fonctionnement sera évalué annuellement.
D'ores et déjà, les candidatures se bousculent. Je vous enverrai la méthodologie, téléchargeable sur les sites de la Cnaf ou du ministère. Ce dispositif est un atout pour les collectivités locales et pour les familles. Il répond à l'exigence d'un encadrement privilégié pour les tout petits.
Mme Samia Ghali. - Je suis mère de quatre enfants -l'aîné a 18 ans, et passe son bac en ce moment même (sourires), le dernier a 20 mois. Si je suis d'accord avec vous sur le fond, je crains les inégalités entre communes riches et communes pauvres. Certains quartiers de Marseille ne risquent pas d'accueillir des jardins d'éveil...
Certes, à 2 ans, mieux vaut être gardé par une nounou ou aller en crèche. Mais quid d'un enfant né, par exemple, en mars ? Vaut-il mieux qu'il soit scolarisé à 2 ans et demi, ou qu'il attende devant la télévision d'avoir 3 ans et demi ?
Le Président de la République veut renforcer l'école de la deuxième chance ; donnons déjà des moyens à celle de la première chance ! En ne scolarisant un enfant qu'à 4 ans, on accumule les retards.
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État. - Bonne chance à votre fils qui passe le bac ! (Sourires) Vous avez quatre enfants, j'en ai trois : nous avons toutes deux l'expérience des modes de garde !
Les secteurs déficitaires, notamment en milieu rural ou dans certains quartiers, seront aidés par la Cnaf, à hauteur de 3 200 euros, pour développer les modes de garde. Dans la convention d'objectifs et de gestion signée avec la Cnaf, l'État apporte 1,3 milliard d'euros. Avec Fadela Amara, nous avons prévu une ligne budgétaire de 30 millions pour le développement des modes de garde dans 215 quartiers prioritaires. Les appels à projets sont lancés ; je suis prête à regarder avec vous les secteurs qui vous intéressent.
La tenthrède cibdela janthina à La Réunion
Mme Anne-Marie Payet. - La tenthrède cibdela janthina a été introduite à la Réunion pour lutter contre la vigne marronne, implantée par un curé métropolitain qui espérait produire lui-même son vin de messe. Porté par le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad) et financé par la région, ce projet est lancé en février 2008 après une étude concluant que la larve de tanthrède se nourrit exclusivement de feuilles de vigne marronne, sans risque de propagation aux autres végétaux. Débarrassées de cette peste végétale, les zones concernées -Bois Blanc et la Rivière de l'Est, sur la commune de Sainte-Rose- seraient progressivement colonisées par les plantes endémiques. Mais Cabi Bioscience, organisme de recherche spécialisé dans la lutte biologique, préconise des tests complémentaires avant un lâcher dans le milieu naturel, ce qui a conduit la région à émettre un avis réservé.
Il est notamment regrettable que les apiculteurs de La Réunion n'aient pas été consultés.
Certains apiculteurs réalisent jusqu'à 40 % de leur production à partir du nectar de la vigne marronne. Or, leurs pertes potentielles n'ont pas été chiffrées et aucun programme de compensation n'a été prévu. Si l'abeille venait à disparaître de ces régions, l'impact sur l'agriculture serait d'autant plus considérable que 60 % de la production légumière et fruitière dépend de la pollinisation par ces insectes.
En 2009, la biodiversité n'a pas retrouvé sa place. Les larves de tenthrèdes détruisent la vigne marronne beaucoup plus vite que prévu et les terres nues sont très vite recolonisées par d'autres espèces envahissantes. Les tenthrèdes adultes, avides de nectar, concurrencent les abeilles. Dans les zones concernées, la récolte de miel de baies roses de certains apiculteurs a chuté de plus de 80 %. Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre, notamment pour remplacer le programme d'introduction de la tenthrède par un programme d'éradication ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice. - Michel Barnier, qui se trouve à Luxembourg pour le conseil des ministres européens de l'agriculture et de la pêche, vous prie d'excuser son absence.
La vigne maronne, introduite à La Réunion vers 1840, est l'une des espèces exotiques les plus envahissantes. La lutte contre cette plante a été rendue obligatoire par un arrêté ministériel du 31 juillet 2000. En complément de la lutte mécanique et pour limiter le recours aux herbicides, une solution biologique a été recherchée afin de préserver l'environnement et la santé, ainsi que la biodiversité et les équilibres biologiques. Un programme de recherche financé par le conseil régional a montré que la tenthrède cibdela janthina ne menaçait ni l'agriculture ni l'environnement. Selon les tests, ses larves ne s'attaquent pas aux principales plantes d'intérêt agricole, horticole ou patrimonial, et aucune interaction négative avec d'autres espèces n'a été décrite. En janvier 2008, après avis favorable du Conseil scientifique régional du patrimoine naturel, cet insecte a été lâché en milieu naturel.
La tenthrède est actuellement présente sur 20 000 hectares au sud et à l'est de l'île. A Bois-Blanc, les deux tiers des pieds de vigne maronne sont détruits et peu d'adultes de tenthrèdes sont encore observables. Ces insectes devraient donc disparaître au fur et à mesure de la régression de la vigne marronne. En outre, selon une récente étude de terrain, la pollinisation s'est bien effectuée en leur présence. A la demande du préfet, le Cirad a proposé aux apiculteurs de mener dès que possible une série d'expérimentations afin d'observer les interactions entre tenthrèdes et abeilles dans les activités de butinage. En forêt, la vigne maronne devrait être remplacée par des espèces indigènes dont plusieurs ont un intérêt mellifère reconnu, permettant ainsi de produire un « produit pays » labellisé.
Mme Anne-Marie Payet. - Le Cirad a déclaré il y a quelques jours qu'il y avait eu une incompréhension dès le départ : il ne savait pas que la vigne maronne servait à la production du miel local. En outre, selon les observations préalables effectuées à Sumatra, les tenthrèdes ne devaient pas s'attaquer aux espèces botaniques d'intérêt apicole ou agricole, contrairement à ce qui se passe actuellement à La Réunion pour les petits pois et les fleurs de citrouille.
Il faut protéger la filière apicole de La Réunion, dont le professionnalisme a été reconnu par une médaille d'or au salon de l'agriculture. En outre, la vigne marronne doit être remplacée par d'autres espèces car des pestes végétales encore plus difficiles à éradiquer, tel le tabac boeuf, commencent à s'implanter.
Vétusté de la maison d'arrêt de la Santé
M. Jean-Pierre Sueur. - Je vous prie d'excuser l'absence de Roger Madec, retenu pour des raisons indépendantes de sa volonté.
Le XIVe arrondissement de Paris abrite l'une des prisons les plus médiatiques de notre système judiciaire, la maison d'arrêt de la Santé, qui reste cependant l'une des plus délabrées de France. Construite en 1867, elle n'est plus conforme aux normes d'hygiène et de sécurité. Dans cette petite structure, qui regroupe un centre de détention et un quartier de semi-liberté, les conditions de vie sont inacceptables.
Le bâtiment a subi une détérioration irréversible, qui s'est accélérée ces dernières années. Deux blocs sur quatre ont dû être fermés en 2006 pour raisons de sécurité. Depuis, aucune rénovation, transformation ou reconstruction n'a été entreprise. Cette grande vétusté a pour conséquence une insalubrité croissante : les murs s'effritent, les plafonds s'écroulent. La maison d'arrêt tombe en ruine. Du fait du manque de locaux adaptés, il n'est pas possible de proposer un programme de formation, comme la loi le préconise. Il en est de même pour le travail et les activités sportives en extérieur. Les détenus ne disposent que d'une salle de musculation.
La restructuration de la Santé est à l'étude depuis 2000. Des travaux de rénovation, estimés à 150 millions d'euros, ont été programmés pour 2008, mais après un audit mené dans le cadre de la révision générale des politiques publiques la rénovation a été reportée à 2013-2016. Dans cette attente, les conditions de travail des agents de l'administration pénitentiaire se détériorent. Les grèves du mois de mai dernier témoignent d'un profond malaise, dû à la pénibilité de leur travail.
Depuis trente ans, les rapports sur les prisons françaises se suivent -rapports d'enquêtes parlementaires de 2000, de la Commission nationale de déontologie de la sécurité, de l'Observatoire international des prisons-, sans grand effet sur les conditions de détention. La France est régulièrement condamnée à ce sujet par la Cour européenne des droits de l'homme, et critiquée dans les rapports de l'ONU et du Comité européen de prévention de la torture. Depuis 1991, ce dernier y dénonce des « traitements inhumains et dégradants ». Hier à Versailles, les parlementaires réunis en Congrès ont entendu le Président de la République s'indigner sur l'état de nos prisons, qu'il a qualifié de honte pour notre République -ce qui nous rappelle le titre du rapport de la commission du Sénat, Prisons : une humiliation pour la République.
Le ministère de la justice ne finance que 771 000 euros sur les 150 millions du projet de réfection. On est bien loin des promesses du Gouvernement, qui souhaitait en 2005 la réhabilitation de la Santé ! Quelles sont les dispositions prévues pour honorer les engagements de l'État en ce sens ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice. - J'ai déjà répondu plusieurs fois à des questions concernant la maison d'arrêt de la Santé. La description que vous en faites est juste.
Cet établissement, d'une capacité originelle de 1 204 places, comprend deux quartiers distincts : le quartier haut et le quartier bas. Toutes les cellules sont équipées de wc et de lavabos, mais les douches sont collectives. Du fait de la détérioration irréversible du bâtiment, trois blocs de détention ont dû être fermés, réduisant la capacité de détention à 455 places. L'établissement abrite actuellement 573 détenus. Le projet de rénovation a été évalué fin 2008 et des études de faisabilité sont en cours. Dans l'immédiat, il s'agit d'identifier les actions à mener pour garantir le fonctionnement de la partie du site encore en activité et préserver la capacité d'accueil.
Il a été question de fermer cette maison d'arrêt au profit de l'agrandissement de l'établissement de Fleury-Mérogis. J'ai toutefois souhaité la maintenir, dans l'intérêt des tribunaux environnants, ainsi que pour les audiences tardives au palais de justice de Paris et dans le cas de procès lourds, importants.
Des travaux ont été engagés en 2008 et 2009 : 771 000 euros pour l'extension et la rénovation du quartier de semi-liberté, puis dans le cadre du plan de relance 100 000 euros pour des études, 36 000 pour la rénovation électrique, 36 000 pour la sécurisation, 64 000 pour la protection contre les risques d'incendie. Le suivi médical des détenus se fait au sein de l'unité de consultation et de soins ambulatoires de l'établissement, qui dépend du centre hospitalier Cochin -l'administration pénitentiaire n'a plus la compétence sanitaire depuis la loi de 1994. L'établissement offre de nombreuses activités socio-éducatives aux détenus, grâce à l'intervention et au dynamisme de nombreux intervenants extérieurs : cours organisés par l'éducation nationale, depuis l'alphabétisation jusqu'à la préparation du baccalauréat et aux études supérieures ; ateliers d'arts plastiques, conférences d'histoire de l'art par des intervenants du musée du Louvre ; concerts, ateliers de théâtre, atelier vidéo piloté par des intervenants du Musée Carnavalet, initiation à l'informatique, activités sportives, formation bureautique. Le pôle emploi et une association d'insertion professionnelle tiennent une permanence. Les détenus peuvent ainsi préparer leur future réinsertion professionnelle. Et ils peuvent travailler, mais j'admets que le nombre des activités se heurte aux contraintes du bâtiment ; les travaux de rénovation n'y changeront pas grand-chose. Les établissements nouvellement construits intègrent la nécessité d'une activité professionnelle et comprennent donc de grands ateliers, mais ce ne peut être le cas des locaux existants de la Santé.
M. Jean-Pierre Sueur. - Les chiffres que vous annoncez sont loin des 150 millions d'euros nécessaires à la réfection totale de la maison d'arrêt telle que prévue en 2005... C'est peut-être la dernière fois que nous vous voyons ici dans le cadre de vos fonctions ministérielles, nous serons donc attentifs à l'action que mènera votre successeur et je forme des voeux, madame Dati, pour votre action européenne.
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. - Je vous en remercie. Vous avez à coeur comme moi l'amélioration des conditions de vie en prison, nous avons travaillé ensemble en ce sens et je conserverai un bon souvenir de nos débats. Dans le cadre européen, j'espère que nous pourrons nous retrouver pour faire progresser ces sujets !
M. le président. - Mme la garde des sceaux nous donne encore ce matin le témoignage de son assiduité à nos séances et de son écoute ; nous l'en remercions.
Regroupement de services à l'hôpital Ambroise Paré
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Le projet de regroupement des services de réanimation chirurgicale et médicale de l'hôpital Ambroise Paré de Boulogne a été programmé pour 2012. Un nouveau bâtiment doit être construit afin d'accueillir ces deux services dans de parfaites conditions de sécurité et d'hygiène, conformément aux recommandations du décret de 2002 sur les règles d'exercice de la réanimation. Les locaux actuels de la réanimation chirurgicale et de la réanimation médicale ne sont pas aux normes.
Et pourtant en janvier dernier, l'AP-HP a décidé de fusionner les gardes de réanimation médicale et chirurgicale d'Ambroise Paré, autrement dit de regrouper de manière anticipée les services dans les locaux actuels. Cette décision a choqué le personnel, qui refuse de travailler dans des conditions contraires à la qualité des soins et à la sécurité des patients. Le président du comité de lutte contre les infections nosocomiales d''Ambroise Paré a jugé lui aussi la décision « tout à fait incongrue ». Le 13 avril dernier, l'Agence régionale de l'hospitalisation d'Ile-de-France a émis un avis défavorable à ce regroupement anticipé qui selon elle va « dans le sens d'une dégradation des conditions de prise en charge des patients, uniquement en chambres à deux lits, et des conditions d'hygiène hospitalière par l'impossibilité d'isoler les patients susceptibles d'être porteurs de bactéries multirésistantes aux antibiotiques ».
Le personnel soignant se trouverait dans l'impossibilité de respecter les règles minimales d'hygiène visant à éviter les infections nosocomiales et la propagation des bactéries résistantes aux antibiotiques. Un groupe de cinq experts doit rendre ses conclusions lors du prochain comité d'hygiène et de sécurité de l'établissement, le 3 juillet prochain. La direction de l'hôpital maintient néanmoins le cap, sa directrice s'est même déclarée prête à « passer outre » cet avis. Or, aucun engagement ferme n'a été pris sur la construction d'un nouveau bâtiment. Monsieur le ministre, ce regroupement anticipé va-t-il être abandonné ? Et quelles garanties pouvez-vous nous donner que le nouveau bâtiment de réanimation verra bien le jour ?
M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports. - Actuellement, les unités de réanimation médicale et chirurgicale se trouvent dans deux ailes distinctes de l'hôpital et à des étages différents. Le regroupement en une seule unité à vocation médico-chirurgicale répond au souci d'utiliser au mieux les moyens disponibles, sans attendre l'achèvement des travaux de construction, qui n'aura pas lieu avant 2011. Mme la ministre de la santé et des sports a demandé au directeur de l'ARS d'Ile-de-France un avis à ce regroupement anticipé, lequel a été tout à fait positif. Les conditions de prise en charge des patients ne seront pas altérées, puisque le regroupement se fera au sein de l'unité actuelle de réanimation médicale, parfaitement adaptée au traitement des infections lourdes. Vous regrettez qu'il y ait seulement des chambres doubles. Mais en cas d'infection grave, il sera tout à fait possible de fermer un lit et d'isoler le patient atteint. La configuration prévue permettra aussi, en cas d'épidémie nosocomiale, d'isoler et de transférer les patients entre les différentes unités de réanimation médicale et de soins continus.
Le regroupement anticipé favorisera le partage et le rapprochement des compétences médicales, notamment en matière de sécurité sanitaire. Les équipes médicales sont expertes dans la gestion des protocoles d'isolement préventif. Les conditions techniques et d'organisation devront bien sûr être clairement précisées.
La ministre de la santé a fixé des objectifs d'expertise et de sécurité sanitaire à l'ensemble des établissements hospitaliers du territoire. Sachez qu'elle est particulièrement attachée à la qualité de l'offre de soins et a demandé à l'ARS de suivre avec attention le bon déroulement de ce regroupement.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Et le nouveau bâtiment ? Le regroupement anticipé est dangereux. Il ne suffit pas d'isoler le patient atteint pour éviter la propagation d'une infection nosocomiale ! Le personnel est déterminé ; certains envisagent de démissionner. Ils contestent la méthode comme l'objectif -la rentabilité financière. De tels regroupements deviennent la règle et cette vision de court terme met en danger le système hospitalier et en particulier l'hôpital de proximité. Le départ vers Georges-Pompidou du service de cancérologie pose le problème de l'équilibre et donc de la survie d'Ambroise-Paré, dont l'activité a pourtant été presque maintenue lorsque l'établissement a perdu 25 % de ses lits pour cause de désenfumage. C'est que cet hôpital répond à de nombreux besoins locaux ! Je suggère à Mme Bachelot de m'y accompagner pour s'en rendre compte.
Infirmiers libéraux
M. Jean-Pierre Sueur. - Je veux attirer l'attention du Gouvernement sur le dispositif de régulation démographique de l'offre globale de soins infirmiers entré en vigueur le 19 avril dernier. Ce rééquilibrage est issu de l'arrêté du 17 octobre 2008, portant approbation de l'avenant à la convention nationale des infirmiers libéraux conclu le 4 septembre 2008 entre d'une part, l'Uncam et d'autre part, Convergence infirmière, l'Union nationale des infirmiers, l'Organisation nationale des syndicats d'infirmiers libéraux et le Syndicat national des infirmiers libéraux. Il s'agit de réguler le nombre des professionnels exerçant en libéral sur le territoire national.
Il prévoit, dans les zones surdotées, un conditionnement de l'accès au conventionnement selon lequel toute nouvelle installation n'est possible « qu'à condition de compenser le départ d'un collègue » et, dans les zones très sous-dotées, des mesures d'incitation à l'installation et au maintien telles que le soutien matériel pour l'équipement du cabinet et la prise en charge des cotisations d'allocations familiales ; mesures portées dans le contrat santé solidarité signé entre le professionnel et l'assurance maladie.
Selon le récent classement réalisé par la mission régionale de santé du Centre, le Loiret, que j'ai l'honneur de représenter au Sénat, comprend 37 zones, parmi lesquelles aucune surdotée ou très sous-dotée. En conséquence, il est exclu du dispositif d'incitation alors même qu'il constitue l'un des départements les moins bien dotés : la densité y est de 52 infirmières pour 100 000 habitants, contre 85 en moyenne. Ainsi, l'accès aux soins est considéré normal malgré d'importants déséquilibres et la situation critique des cantons de Patay, Briare, Châtillon-sur-Loire, Châtillon-Coligny et de Château-Renard, classés en zone « sous-dotée », où l'insuffisance du nombre d'infirmiers y est flagrante.
Monsieur le ministre, quels sont les modes de calcul qui ont conduit à l'exclusion du Loiret de ce dispositif ? Quelles mesures prendra le Gouvernement afin de remédier à cette situation et favoriser l'installation et le maintien d'infirmiers dans ces cinq cantons ?
M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports. - Par l'avenant à la convention nationale des infirmiers libéraux, les quatre syndicats de professionnels se sont engagés à réguler l'installation des infirmiers libéraux, dont la densité, de un à sept selon les départements, a pour conséquence de fortes inégalités d'accès aux soins. Cette démarche responsable s'est accompagnée, souligne Mme Bachelot, de revalorisations importantes des tarifs.
L'arrêté du 29 décembre 2008, après concertation avec les quatre syndicats d'infirmiers libéraux, a retenu pour critères de zonage le nombre d'infirmiers exerçant en ambulatoire et au sein des services de soins infirmiers à domicile, le taux d'activité des infirmiers, la structure de la population par âge et les caractéristiques géographiques de chaque canton ; critères à partir desquels chaque mission régionale de santé, en concertation avec les professionnels, a établi la classification.
Concernant la région Centre, les cinq cantons que vous évoquez ont été considérés sous-dotés et seules les quinze zones très sous-dotées, situées dans le Cher, l'Eure-et-Loir, l'Indre, l'Indre-et-Loire et le Loir-et-Cher, bénéficieront du dispositif incitatif. Cependant, ce zonage n'est pas figé et évoluera selon les données de recensement de la population. Surtout, ce dispositif conventionnel fera l'objet d'un suivi attentif et d'une évaluation par les partenaires conventionnels et les pouvoirs publics. Cette évaluation tiendra compte des données locales qui n'ont pas été nécessairement retenues dans les critères actuels de classification.
M. Jean-Pierre Sueur. - Ce nouveau dispositif de régulation est très positif. Lors des débats sur la loi portant réforme de l'hôpital, certains sénateurs de gauche ont d'ailleurs soutenu le contrat de santé solidarité présenté par Mme Bachelot pour assurer une meilleure répartition territoriale des médecins. Concernant les infirmiers, je prends acte de cette réponse du Gouvernement avec une certaine déception. Tout de même ! Il est difficile d'expliquer aux élus et habitants de cantons où le manque d'infirmiers est notoire qu'ils ne pourront bénéficier du dispositif incitatif parce qu'ils ont le malheur de ne pas être classés en zone très sous-dotée. Pour autant, ce zonage, m'avez-vous indiqué, pourra évoluer et fera l'objet d'un suivi. Je formule le voeu que celui-ci soit rapidement mis en oeuvre afin de mieux prendre en compte les spécificités locales. Nous devons privilégier une vision plus large pour les zones sous-dotées. Puisse ce dispositif de solidarité, mis en oeuvre en bonne concertation avec les professionnels et prometteur faire l'objet d'une évaluation dès les prochains mois afin d'y apporter les améliorations nécessaires !
Revalorisation des retraites agricoles
M. Jean Milhau. - Début 2008, le Président de la République s'est engagé à réduire « les poches de pauvreté » dans lesquelles se trouvaient certains retraités de l'agriculture. En effet, malgré des coups de pouce successifs depuis 1994, les retraites des conjoints, veuves et retraités ayant eu une carrière incomplète, étaient particulièrement faibles, pour ne pas dire indécentes. Selon les estimations de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole au 30 juin 2007, 91 % des veuves d'agriculteurs touchaient moins de 400 euros par mois, soit un montant inférieur au minimum vieillesse de 621,27 euros !
Face à cette situation et conformément aux conclusions du groupe de travail, un dispositif de revalorisation a été adopté en loi de financement pour 2009 afin de garantir un montant minimum de retraite égal, pour une carrière complète, à 633 euros par mois pour les chefs d'exploitation et les veuves et à 503 euros par mois pour les conjoints et les aides familiaux. Cette mesure, qui s'applique aux retraités ayant au moins 22,5 ans de carrière dans l'agriculture depuis le 1er janvier 2009, sera étendue à ceux qui totalisent au moins 17,5 années de carrière agricole à compter du 1er janvier 2011. Toutefois, la majoration cumulée au total des pensions versées ne peut dépasser un plafond de 750 euros par mois.
Cette mesure, qui avait suscité beaucoup d'espoir dans nos départements ruraux, se révèle très décevante dans son application. Tout d'abord, la prise en compte de la bonification pour enfant dans le calcul du plafond de 750 euros est injuste car cet élément constitue une compensation plus qu'un revenu. Ensuite, les majorations sont loin d'être à la mesure des attentes. Dans le Lot, sur 5 322 demandes traitées à ce jour, 52 % d'entre elles ont abouti à l'allocation d'une majoration de 24,53 euros par mois et 28,3 % à une majoration inférieure ou égale à un euro par mois... Malgré les efforts consentis pour revaloriser les petites retraites agricoles, notamment par M. Barnier, comprenez la déception des agriculteurs ! Quand le minimum garanti se situe à peine au-dessus du seuil de pauvreté, un vrai geste envers les retraités agricoles consisterait à prendre pour objectif le plafond de 85 % du Smic, au reste inscrit dans la réforme des retraites de 2003 pour tout salarié bénéficiant d'une retraite à taux plein. Quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il dans ce sens ? Comptez-vous assouplir les règles d'attribution et de calcul de la majoration décidée en 2008 afin d'augmenter le nombre de bénéficiaires en même temps que les sommes servies ?
M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports. - Le Gouvernement a tenu l'engagement pris par le Président de la République en février 2008 avec l'adoption de deux mesures de revalorisation des retraites dans la loi de financement pour 2009.
Premièrement, la création d'un montant minimum de retraite, que vous évoquez, et qui s'applique depuis le 1er janvier 2009. Deuxièmement, l'extension à toutes les veuves du bénéfice de la réversion de la retraite complémentaire obligatoire de leur conjoint, qui s'appliquera à compter du 1er janvier 2010.
Le montant minimum de retraite permet de garantir aux agriculteurs, aux veuves et aux conjoints un montant de retraite égal au minimum vieillesse pour les retraités à carrière complète et proportionnel à la durée de cotisation pour les carrières incomplètes.
Cette mesure d'équité qui répond à une forte demande des associations de retraités, donne à tous ceux qui ont pris leur retraite avant 2002 les mêmes droits qu'aux autres et améliore le niveau de vie des veuves, dont la pension n'était jusque-là revalorisée qu'à partir de 32,5 années de cotisations, beaucoup n'ayant jamais bénéficié des améliorations précédentes.
Depuis le 1er janvier 2009, cette mesure bénéficie à ceux qui justifient de 22,5 années de carrière dans l'agriculture. A compter de janvier 2011, la durée de cotisation sera abaissée à 17,5 années. D'ores et déjà 176 000 personnes en ont profité. La revalorisation moyenne est de 30 euros par mois, elle est de 50 euros pour 20 % des bénéficiaires et de plus de 100 euros pour 6 % d'entre eux.
Cette mesure étant accordée sous condition de ressources et de durée de carrière, certains agriculteurs ont effectivement bénéficié de revalorisations moindres, parce qu'ils ont eu des carrières agricoles de plus courte durée ou qu'ils ont des pensions, tous régimes confondus, plus élevées que la moyenne nationale.
En tout état de cause, Michel Barnier a demandé à la caisse centrale de la Mutualité sociale agricole de dresser un bilan de cette mesure, au vu duquel des améliorations pourront être proposées. Dans ce cadre, le relèvement du plafond de ressources de pensions et l'exclusion de la bonification pour enfant de ce plafond de ressources pourront être étudiés.
M. Jean Milhau. - Je souhaite que de telles mesures puissent être mises en oeuvre le plus rapidement possible. Imaginez les difficultés financières auxquelles se heurtent ceux qui ne peuvent bénéficier de ces dispositifs lorsqu'ils doivent être accueillis en établissements pour personnes âgées.
Fermeture du bureau de douane de Bâle-Mulhouse-Aéroport
Mme Patricia Schillinger. - Le projet de réorganisation administrative de la douane du Haut-Rhin suscite bien des inquiétudes. Lors d'un comité mixte paritaire spécial, la quasi-fermeture du bureau de Bâle-Mulhouse a ainsi été décidée : sur les neuf agents travaillant à l'aéroport, deux seraient mutés à Mulhouse, le reste des effectifs étant absorbé par le bureau de Saint-Louis, tandis qu'une présence douanière serait maintenue à l'aéroport par deux à trois agents, détachés, à tour de rôle, dudit bureau. Les horaires d'ouverture seraient réduits, le bureau fermant à 17 h 30 au lieu de 19 heures.
Ce projet risque de mettre à mal l'efficacité du service douanier de proximité. Il alourdit la charge de travail des douaniers en les obligeant à réaliser la même masse de travail, sur une plage horaire réduite, avec des effectifs moindres. On aurait tort de penser que la dématérialisation des opérations permettra de se passer d'un service de proximité. Les opérateurs pourraient bien en effet se lasser et préférer, au vu de la lenteur croissante de la procédure, un dédouanement ailleurs que sur le sol français.
J'ajoute que ce projet aura un impact néfaste sur les conditions de travail des agents. Cela fait maintenant plusieurs années que le bureau de Saint-Louis absorbe régulièrement les effets des fermetures ou des réorganisations successives de postes. Or ce mouvement s'effectue sans qu'il soit véritablement procédé, ni à une redéfinition des missions du bureau de Saint-Louis, ni à une réorganisation approfondie des effectifs, d'où un certain nombre de tensions et de rivalités entre le personnel arrivant et le personnel déjà en poste.
Quelle est, monsieur le ministre, la position du Gouvernement sur ce sujet ? Quelles sont les véritables intentions de la direction générale des douanes concernant le bureau de Bâle Mulhouse ? Quelles mesures le Gouvernement entend-il mettre en oeuvre afin de préserver un service douanier efficace, offrant des conditions de travail décentes à ses agents ?
M. André Santini, secrétaire d'État chargé de la fonction publique. - Je vous prie de bien vouloir excuser M. Woerth, qui ne peut pas être là pour vous répondre.
La réforme du dédouanement est très importante pour l'activité économique de notre pays, car elle contribue à améliorer la compétitivité des entreprises, confrontées à une recherche permanente de réduction des coûts et des délais, sachant que les importations et exportations sont au coeur des processus industriels et commerciaux.
Les opérateurs du commerce international souhaitent légitimement dédouaner le plus rapidement possible, dans une relation de confiance avec l'administration des douanes. Il a ainsi été demandé au directeur général des douanes et droits indirects de s'engager dans la définition d'un nouveau schéma de dédouanement, adapté aux besoins de sécurité des consommateurs et de compétitivité des entreprises, soucieux du respect des équilibres géographiques et des conditions d'accomplissement des missions de contrôle.
Le processus de modernisation du dédouanement doit accroître la qualité du service rendu aux entreprises grâce à une dématérialisation des formalités douanières avec l'outil Delt@ et les téléservices du portail Prodouane ; une professionnalisation accrue des agents des douanes, avec la constitution au sein des bureaux principaux d'une cellule dédiée à la gestion des procédures de dédouanement et la désignation d'un référent douanier unique, interlocuteur privilégié des entreprises ; la promotion d'une nouvelle relation avec les entreprises les plus fiables.
Le nouveau schéma d'organisation du bureau de Bâle-Mulhouse-Aéroport vise à une meilleure répartition des tâches de gestion et de contrôle, en conservant un pôle de service public douanier adapté aux enjeux économiques et de nature à garantir une offre de service de qualité. Le transfert envisagé de la gestion des procédures au bureau de Saint-Louis-autoroute, loin de remettre en cause les facilités existantes, doit permettre aux opérateurs de bénéficier d'un accompagnement renforcé.
La direction régionale des douanes de Mulhouse a mis en place un processus d'accompagnement des professionnels du dédouanement de la plate-forme de Bâle-Mulhouse en maintenant une présence douanière pour les formalités qui n'auront pas encore pu être dématérialisées. Enfin, une brigade de surveillance des douanes de 28 agents est implantée sur le site pour assurer le contrôle des flux de voyageurs. Ce service pourra également participer, dans le cadre de la complémentarité des services, à l'accomplissement de certaines opérations de dédouanement pour les particuliers.
La politique de contrôle, quant à elle, sera pilotée, à la direction régionale, par un pôle spécialisé et relayée sur le terrain par la cellule de supervision des contrôles nouvellement créée au bureau de Saint-Louis-autoroute et qui aura pour mission de programmer, de cibler et d'assurer le suivi des contrôles menés sur le site aéroportuaire, dans le but de fluidifier le trafic des opérateurs, en adaptant la pression de contrôle au niveau de confiance accordé aux entreprises.
L'administration des douanes, enfin, accorde une attention particulière à la situation individuelle des agents concernés par des redéfinitions de structures. Un dispositif adapté d'accompagnement social a été finalisé, en concertation avec les organisations syndicales des douanes.
Mme Patricia Schillinger. - Cette réponse me laisse insatisfaite. Le Gouvernement ne semble pas avoir pris la mesure des implications économiques de cette réorganisation pour l'Alsace et des problèmes humains que pose le transfert des agents à Saint-Louis. N'oubliez pas que nous avons déjà perdu le bureau de Héningue et que celui de la commune d'Hégenheim, dont je suis maire, doit disparaître d'ici à la fin de l'année. Vos projets demandent à être revus.
Conditions d'attribution de l'aide au retour à l'emploi
Mme Colette Giudicelli. - Si la philosophie du dispositif d'aide au retour à l'emploi est vertueuse, dans la mesure où elle doit assurer aux salariés brusquement privés d'emploi un revenu de remplacement leur permettant d'attendre dignement d'en retrouver un, il apparaît que cette allocation est versée alors même que la perte d'emploi résulte d'un licenciement pour motif personnel, y compris s'il découle d'une faute grave, d'une faute lourde, ou d'une sanction entraînant une mise à la retraite d'office.
C'est ainsi que des agents licenciés par une collectivité locale qu'ils ont lésée financièrement, en vertu de sanctions disciplinaires, souvent confirmées par les tribunaux administratifs, peuvent se voir verser cette indemnité. Il ne s'agit pas là de rumeurs ou d'interprétation partiale, mais bien d'actes graves et répétés, reconnus comme tels par les instances disciplinaires et juridictionnelles.
La gabegie de l'argent public, très pénalisante pour les collectivités de petite taille, est de surcroît récompensée par le versement d'une indemnité ! J'aimerais, monsieur le ministre, connaître votre sentiment sur cette question. Ne vous semble-t-il pas opportun de revenir sur le dispositif, pour éviter qu'il ne bénéficie à des personnes coupables d'avoir lésé des collectivités ?
M. André Santini, secrétaire d'État chargé de la fonction publique. - L'article L. 5422-1 du code du travail dispose qu'ont droit à l'allocation d'assurance chômage les travailleurs involontairement privés d'emploi, aptes au travail et recherchant un emploi et qui satisfont à des conditions d'âge et d'activité antérieure.
Les cas de perte involontaire d'emploi concernent toutes les formes de perte d'emploi qui ne résultent pas de la volonté manifeste de l'agent.
Le caractère volontaire ou non du chômage est donc apprécié en fonction de la rupture du contrat de travail : si elle incombe à l'employeur, le chômage est toujours considéré involontaire, même après un licenciement pour faute du salarié. En effet, les allocations pour perte d'emploi constituant un revenu de remplacement et non des indemnités de licenciement, leur versement est dû en raison de l'activité antérieure.
Le versement de l'allocation chômage doit procurer à l'intéressé un moyen de subsistance, dans l'attente d'un nouvel emploi. L'éventuelle sanction de l'agent intervient via le licenciement pour insuffisance professionnelle ou pour motif disciplinaire. Dans certains cas, l'indemnité de licenciement est supprimée.
Ainsi, tous les cas de licenciement ouvrent droit au versement de l'allocation chômage.
D'autre part, l'article L. 5424-1 du code du travail ouvre aux agents publics un droit à un revenu de remplacement, attribué dans les mêmes conditions et selon les mêmes modalités qu'aux salariés du secteur privé. Ces modalités sont désormais définies par la convention chômage du 19 février 2009, applicable à compter du 1er avril, sans modifier la réglementation antérieure. Il est ainsi précisé que « sont involontairement privés d'emploi ou assimilés les salariés dont la cessation du contrat de travail résulte notamment d'un licenciement ».
Ces dispositions ont toujours été corroborées par le juge administratif au plus haut niveau, le Conseil d'État ayant notamment considéré, dans l'arrêt ville de Marseille rendu le 25 janvier 1991, que « Les motifs disciplinaires ayant entraîné la perte d'emploi ne sont pas de nature à eux seuls à exclure le caractère involontaire de cette perte d'emploi. La révocation présentant un caractère définitif doit être considérée comme incluse dans les hypothèses possibles de perte involontaire d'emploi ouvrant droit au bénéfice de l'allocation chômage ».
Je ne suis pas sûr de vous avoir répondu...
Mme Colette Giudicelli. - Vous l'avez fait, et je vous en remercie.
Ma question portait sur la fonction publique, sujet que vous connaissez bien mieux que moi.
Son statut semble protecteur au point d'être parfois irritant. En l'occurrence, je m'étais engagée à vous interroger à la suite d'une affaire concernant un fonctionnaire de catégorie A. Bien que nos agents soient de grande qualité, certains ont un comportement déshonorant.
Travaux sur des bâtiments classés
M. Yves Détraigne. - Je ne doute pas que vous ayez évoqué avec Mme Albanel les obligations qui pèsent parfois sur une commune devant réaliser sur ses bâtiments des travaux d'entretien ou de sauvegarde.
Le maire d'une commune de mon département m'a saisi, car il doit remettre d'urgence en état la toiture de son église classée, ainsi que la couverture de la mairie. S'agissant de l'église, les Bâtiments de France ont répété ce qu'ils avaient indiqué l'année dernière, à savoir que ce dossier prioritaire ne pourrait être traité, les aides de l'État étant épuisées. Il faudra donc renouveler cette demande en 2010, pour la troisième année consécutive. Quant à la mairie, non classée mais située dans le périmètre de l'église, l'architecte des Bâtiments de France impose à la municipalité le devis le plus onéreux en invoquant une « meilleure intégration dans le milieu proche ». Or, cette commune compte 173 habitants...
Le patrimoine municipal est donc mieux entretenu lorsqu'il ne comporte pas de monument classé, car la politique des Bâtiments de France conduit à repousser souvent des travaux indispensables ! Les collectivités territoriales ne comprennent pas que l'État impose des décisions sans assumer leurs conséquences.
Comment le Gouvernement entend-il mettre un terme à des pratiques guère compatibles avec les finances de l'État et des collectivités territoriales, qui handicapent celles-ci et nuisent à l'entretien de leur patrimoine ?
M. André Santini, secrétaire d'État chargé de la fonction publique. - Les crédits consacrés aux restaurations des monuments historiques varient fortement depuis plusieurs années, oscillant d'un exercice à l'autre entre 305 et 380 millions d'euros. Conscient des difficultés que rencontre actuellement le secteur des monuments historiques, le Gouvernement a mis en place, depuis la fin 2008, plusieurs mesures budgétaires d'envergure en ce domaine.
Conformément aux annonces faites le 4 décembre par le Président de la République, le patrimoine est au coeur du plan de relance économique, avec une enveloppe supplémentaire de 100 millions, en sus des crédits alloués dans la loi de finances initiale pour 2009.
S'exprimant le 13 janvier 2009 à Nîmes, le chef de l'État a souhaité pérenniser cette enveloppe exceptionnelle, afin que 400 millions d'euros soient désormais alloués chaque année à la conservation des monuments historiques.
Pour 2009, le ministère de la culture n'a retenu que des opérations susceptibles d'être réalisées, démarrées, accélérées ou achevées en 2009 grâce aux crédits complémentaires.
Le dossier que vous évoquez ne répondait pas à l'ensemble de ces critères, notamment quant à la date de démarrage des travaux. J'invite par conséquent le maire à renouveler sa demande à la direction régionale de Champagne-Ardenne pour la programmer en 2010.
L'architecte des Bâtiments de France intervient également aux abords des monuments historiques en application des articles L. 621-31 et L. 621-32 du code du patrimoine. Il s'assure qu'un projet de construction ou d'aménagement situé à moins de 500 mètres et dans le champ de visibilité d'un monument n'est pas de nature à porter atteinte à celui-ci. Son avis s'impose au maire, qui peut toutefois en saisir le préfet de région. Mme Albanel affirme son soutien au travail patient des architectes des Bâtiments de France sur le terrain pour préserver la qualité des espaces bâtis et paysagers et les abords de monuments, tout en sachant que certaines décisions peuvent ne pas être toujours bien comprises, malgré leur motivation architecturale et historique. Dans le cadre de la fusion des services départementaux et régionaux du ministère, elle a demandé à ses directeurs régionaux de veiller à ce que les avis soient discutés de façon plus collégiale et que le public en soit informé.
De manière générale, investir dans la qualité architecturale et l'insertion harmonieuse des constructions récentes dans le tissu ancien est profitable à tous et participe à l'attractivité de notre territoire.
M. Yves Détraigne. - Je vous remercie pour cette réponse, bien qu'elle ne soit pas totalement satisfaisante, car il faut modifier notre réglementation.
Le patrimoine est peut-être une priorité pour le ministère de la culture, mais Mme Albanel m'a envoyé hier un courrier pour m'indiquer les sommes qui allaient être consacrées aux halles du Boulingrin. Situées à Reims, celles-ci ont été classées en 1990 alors que la municipalité voulait les détruire. Les crédits arrivent aujourd'hui, 19 ans plus tard ! Que feront le maire et ses 173 habitants pour la toiture de l'église, s'ils doivent attendre 19 ans ? Quels que soient les plans de relance, nous touchons là aux limites d'un système à revoir de fond en comble pour le rendre conforme aux moyens de l'État et des collectivités territoriales.
La séance est suspendue à midi et quart.
présidence de M. Jean-Claude Gaudin,vice-président
La séance reprend à 15 h 5.