Questions au Gouvernement
M. le président. - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.
Je rappelle que l'auteur de la question, de même que la ou le ministre pour sa réponse, disposent chacun de deux minutes trente.
Licenciements boursiers
Mme Annie David . - Alors que l'entreprise Caterpillar (exclamations à droite : « Encore ! ») affichait un bénéfice de 3,5 milliards pour 2008, le groupe a eu l'indécence d'annoncer la suppression de 20 000 emplois pour 2009, dont 733 dans l'Isère. « Une année horrible » dit le PDG de Caterpillar France. Horrible pour qui ? Pour les salariés, pas pour les actionnaires, qui ont bénéficié d'une augmentation de 17 % de leur dividende. Horrible, oui, le choix de la direction d'accroître la fortune de quelques privilégiés au détriment de centaines de familles. Horrible, le comportement insolent de cette direction qui assigne en justice le comité d'entreprise. Heureusement, elle a été déboutée.
M. Robert Hue. - Quand même !
Mme Annie David. - Passés la stupeur et l'émoi, l'indignation et la colère ont pris le pas chez les salariés, à Cater Continental, Freescale ou Faurécia, dont trois salariés sont hospitalisés après avoir été agressés par des vigiles.
Tous luttent pour préserver leur emploi et la pérennité des sites industriels. Cette lutte porte un nom : lutte des classes. C'est bien de cela qu'il s'agit, face à la rengaine libérale du chacun pour soi. Votre prétendu dialogue social est devenu une coquille vide. Les salariés sont contraints de défendre leur emploi et leur dignité par leurs seuls moyens ; ils refusent d'être licenciés, de disparaître en silence, de plier devant le chantage du « travailler plus pour gagner moins » ! C'est l'ensemble de la société qu'ils défendent contre les méfaits des patrons voyous. La responsabilité du Gouvernement est grande dans la situation économique et sociale gravissime que nous connaissons. L'heure n'est plus au bilan ou à l'analyse, mais à l'action.
Il faut enfin accorder des droits nouveaux aux salariés pour qu'ils soient impliqués dans les choix de gestion de l'entreprise et en finir avec les stock-options, les « retraites chapeaux », les parachutes dorés. Il faut défendre l'emploi par la loi ; c'est pourquoi nous avons déposé une proposition de loi visant à interdire les licenciements économiques. Le sacrifice des salariés au profit des actionnaires doit cesser !
Allez-vous enfin entendre l'exigence populaire et unitaire d'un changement de politique qui s'est exprimée le 29 janvier, le 19 mars et qui s'exprimera avec autant d'ampleur demain 1er mai ? Allez-vous appeler les parlementaires de votre majorité à voter notre proposition de loi ? (Applaudissements à gauche)
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services. - Il n'est pas convenable de faire de l'idéologie avec les difficultés humaines des salariés. (On s'esclaffe à gauche) Je suis contraint de vous rappeler quelques vérités. La première, c'est que la crise est mondiale et pas seulement française ; votre attaque contre le Gouvernement est donc outrancière. (Exclamations à gauche) Je dirai ensuite que, dans cette crise, les PME sont aussi frappées, ce dont vous ne parlez pas en vous focalisant sur les profits boursiers de certains.
M. Robert Hue. - Les patrons voyous sont dans les multinationales !
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. - Vous oubliez aussi de mentionner la réactivité du Gouvernement, qui a été imitée par beaucoup de pays. Nous avons aidé les petites et moyennes entreprises...
Mme Annie David. - Parlez-nous des grandes !
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. - Nous avons refinancé les banques, pris des mesures sociales -que notre majorité a votées mais pas votre groupe, toujours aux abonnés absents quand il est question de mesures sociales. (Applaudissements sur les bancs UMP ; vives protestations à gauche)
Paralysie des universités
M. Jacques Legendre . - Je m'exprime avec une particulière gravité sur un sujet qui angoisse bien des familles et désespère de nombreux étudiants : le blocage de certaines universités.
M. René-Pierre Signé. - La faute à qui ?
M. Jacques Legendre. - Cette situation devient catastrophique pour des milliers d'étudiants qui craignent de ne pouvoir passer leurs examens, de perdre une année et, peut-être, singulièrement pour les moins favorisés, de mettre un terme à leurs études. Dans le moins grave des cas, les examens risquent de devoir être repoussés au mois de septembre.
Que dire de la situation de ces nombreux étudiants étrangers qui ont engagé des frais pour un séjour universitaire en France qui ne se conclura peut-être pas par l'obtention d'un diplôme ? Ils avaient choisi la France. Ils avaient rêvé de faire leurs études à Paris. Croit-on qu'ils seront demain les ambassadeurs de la culture de notre pays ? Croit-on que ces blocages vont faire progresser nos universités dans le classement de Shanghai ?
Il est légitime que nous débattions, et parfois nous opposions, sur la politique universitaire à conduire. Mais est-il raisonnable de porter un tel préjudice à l'enseignement supérieur français, pour lequel nous avons tous de grandes ambitions ?
On a justifié ce mouvement par la volonté d'obtenir des moyens supplémentaires. J'ai eu la curiosité de regarder les moyens attribués aux universités du département dont je suis l'élu. Lille 1 voit les moyens alloués augmenter de 992 500 euros, soit trois fois plus qu'en 2008, tandis que triplent ses crédits de mise en sécurité. Et pourtant, on bloque l'université. Lille 2 voit ses crédits de moyens augmenter de 25 %. Et pourtant, certains enseignants font de la rétention de notes. Lille 3 voit son allocation de moyens majorée de 6,5 %, et pourtant, on appelle aussi au blocage. (Exclamations sur les bancs socialistes : « La question ! »)
Pourquoi un tel acharnement au risque de mettre en péril l'avenir des étudiants ?
Quelles mesures allez-vous prendre pour sauver ce qui peut l'être de l'année universitaire ? Comment allez-vous assurer la liberté d'étudier et la poursuite des réformes nécessaires pour permettre au maximum d'étudiants de réussir leurs études et à notre pays de rester une des grandes nations du savoir ? (Applaudissements à droite et sur plusieurs bancs au centre)
Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche . - Je suis entièrement mobilisée pour assurer le rattrapage des cours et déjà une trentaine d'universités en organisent un ou décalent les examens.
Ma responsabilité est double. Elle s'exerce d'abord envers les étudiants : j'ai demandé aux recteurs et aux directeurs des Crous d'apporter des aménagements afin qu'ils ne souffrent pas de ces décalages pour le versement des bourses ou le logement. Elle porte ensuite sur l'image de l'Université française et la valeur des diplômes nationaux. Nous serons intransigeants sur leur qualité ; il n'est pas question de les brader (applaudissements à droite) : pas de diplôme sans rattrapage !
Après la réécriture du décret portant statut des enseignants-chercheurs, après l'annonce par le Premier ministre de la sanctuarisation des emplois universitaires, après l'annonce de la concertation sur la formation des enseignants, de plus en plus d'enseignants-chercheurs et une majorité des étudiants veulent reprendre les cours. J'espère que les motifs politiques ne prévaudront pas sur les motifs universitaires. Je ne comprends pas le silence du parti socialiste sur les séquestrations, sur l'appel irresponsable de la coordination nationale des universités à bloquer et à boycotter les examens. (Applaudissements à droite et sur plusieurs bancs au centre)
M. Charles Gautier. - Provocatrice !
M. Robert Tropeano . - Ma question s'adressait à M. le Premier ministre. Le Président de la République a annoncé en grande pompe la réduction à 5,5 % de la TVA dans la restauration au 1er juillet. La profession l'attendait, et c'était légitime pour un secteur très dépendant du pouvoir d'achat des Français. Mon groupe partageait cette revendication et nous en attendons beaucoup : les professionnels ont promis 40 000 créations d'emplois. Ma question porte sur l'annonce et la méthode. Les effets d'annonce de l'exécutif tendent à devenir une méthode de Gouvernement : après la suppression de la publicité à la télévision publique, après l'annonce de la suppression de la taxe professionnelle, qui reste à préciser, voici la TVA à 5,5 %. Pourquoi faire du Parlement une simple chambre d'enregistrement de décisions qui lui reviennent ? L'article 34 de la Constitution dispose qu'il lui appartient de fixer les règles, l'assiette et le taux des impositions de toute nature. Admettez-vous que c'est au Parlement qu'il appartient de déterminer la baisse de la TVA et quand pensez-vous qu'il sera amené à se prononcer ? Êtes-vous certain que ce sera avant le 1er juillet et que le vote sera positif ? Enfin, allez-vous en finir avec les effets d'annonce et mettre en pratique vos discours sur la revalorisation du Parlement ? (Applaudissements sur les bancs socialistes et sur ceux du RDSE)
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services . - Je vous remercie de soutenir cette mesure qui était réclamée sur tous les bancs.
M. Jean Arthuis. - Non.
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. - Il revient au Président de la République et au Gouvernement de l'avoir obtenue (applaudissements à droite), comme chacun le souhaitait.
M. Jean Arthuis. - Non...
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. - Il n'est pas dans les intentions du Gouvernement de nier les responsabilités du Parlement, auquel il appartient de fixer le taux de TVA.
M. Bernard Piras. - Vous vous moquez de nous !
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. - Cette disposition sera introduite dans le projet de loi sur le tourisme que le Sénat a adopté à l'unanimité et qui viendra devant l'Assemblée nationale dans les jours prochains. Tout le monde le demandait...
M. Jean Arthuis. - Non !
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. - Cette mesure de pouvoir d'achat doit permettre une baisse des prix effective car j'attends que les professionnels tiennent leurs engagements. (Applaudissements à droite et sur de nombreux bancs au centre ; exclamations sceptiques à gauche)
Grippe porcine
Mme Muguette Dini . - L'Organisation mondiale de la santé vient de relever le seuil d'alerte pandémique de 4 à 5. Il y a plusieurs foyers avérés au Mexique, aux États-Unis et en Espagne. Les ministres de la santé des Vingt-sept se réunissent pour décider la suspension des vols pour le Mexique mais cela ne suffirait pas. Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre ?
Nous avons préparé un plan de prévention et de lutte contre la pandémie grippale, qui a fait l'objet de simulations. La phase 5 a-t-elle été activée et la réserve de santé mobilisée ? Quid des centres d'appel 15 ? La France a constitué des stocks suffisants de masques et de Tamiflu, que certains prennent préventivement, ce qui ne sert à rien. La répartition a-t-elle été faite et quand disposerons-nous d'un vaccin contre le N1H1 ? (Applaudissements au centre)
M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire . - Je vous prie d'excuser l'absence de Roselyne Bachelot, qui se trouve à Luxembourg pour une réunion du conseil des ministres européens sur ce sujet.
La situation est préoccupante. L'OMS vient effectivement de déclencher l'alerte à l'indice 5, qui correspond à un risque de contamination géographique. Dès vendredi dernier, le Premier ministre a réuni les ministres et les professionnels concernés ; depuis, une réunion quotidienne a lieu, à laquelle Roselyne Bachelot assistera tout à l'heure, après le conseil des ministres européens.
La France souhaite l'arrêt provisoire des vols au départ de l'Europe à destination du Mexique. La décision sera prise -ou pas- cet après-midi. Il n'est pas aisé de juger de sa pertinence, compte tenu de l'existence de plusieurs foyers. Pour ce qui est de l'information et de l'étanchéité, Dominique Bussereau s'est rendu ce matin dans les aéroports. Il a interrogé les voyageurs sur leurs conditions de rapatriement et sur les moyens déployés, et a été satisfait de leurs réponses. La capacité en termes de vaccins et de masques va être renforcée à l'extérieur du pays par nos postes diplomatiques.
En France, le puissant dispositif prévu par le plan de santé publique a été renforcé. Le Premier ministre décidera lors de la réunion de 18 heures s'il y a lieu d'organiser une diffusion plus ample, et notamment de déclarer la procédure d'alerte. S'agissant de la capacité de vaccination, de l'organisation des hôpitaux et de l'information prévue, le dispositif français, jugé exemplaire par l'OMS, est en place.
M. René-Pierre Signé. - Il n'y a pas de vaccin !
M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État. - François Fillon est totalement mobilisé sur ce sujet, et il s'exprimera tout à l'heure à l'occasion de la réunion quotidienne. (Applaudissements à droite)
Mouvement social dans les hôpitaux
M. Bernard Cazeau . - Mardi, devant les grilles du Sénat, la communauté hospitalière était dans la rue. A Paris, certains services comptaient 100 % de grévistes. A la télévision, des médecins déclaraient manifester pour la première fois de leur vie.
L'intégralité des établissements, de l'agent de service hospitalier au professeur de renommée mondiale, s'élève contre votre texte de loi « Hôpital, patients, santé, territoires ». L'hôpital est inquiet pour son financement, pour ses filières de formation, pour la qualité de ses soins. Hélas, la seule réponse consiste en une loi technocratique, qui vise à centraliser le pouvoir au profit de l'administratif. Pourquoi cet attachement à une gouvernance caporaliste de l'hôpital ? Veut-on confier le système à des hommes mandatés pour procéder à des coupes sombres dans les budgets et les effectifs ?
Nous souhaitions d'autres orientations, un autre message de la part du Gouvernement. Avec au moins 18 milliards d'euros de déficit annoncé pour 2009, 120 milliards de dette cumulée des régimes sociaux, nous attendions des choix décisifs visant à rassurer les Français quant à l'avenir du système de santé, et non un texte d'organisation dont l'intransigeance cache mal l'absence de solutions. II est encore temps d'éviter qu'un mauvais pas législatif n'aboutisse à un bourbier politique. Madame la ministre, allez-vous abandonner la procédure d'urgence et ouvrir de véritables négociations avec la communauté hospitalière ? (Applaudissements à gauche)
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité . - Ce projet de loi, voté le 18 mars à l'issue de la première lecture de ce texte à l'Assemblée nationale, actuellement en cours d'examen par votre commission des affaires sociales, réforme le système de santé afin de l'adapter aux nouveaux besoins de la population.
M. Bernard Piras et M. René-Pierre Signé. - Faux !
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. - C'est un texte ambitieux, qui traite de l'organisation des soins à l'hôpital et dans le secteur libéral et des mesures de santé publique et relatives au secteur médico-social, jusqu'ici pris en charge de façon cloisonnée. On déplore aujourd'hui la lenteur des décisions dans les hôpitaux, l'insuffisance des relations avec la médecine libérale, le manque de liberté d'organisation des médecins hospitaliers et le manque de délégation de compétences en faveur des pôles médicaux. Ce texte propose une gouvernance renouvelée au profit des médecins au sein de pôles médico-techniques. (Protestations sur les bancs socialistes)
M. Bernard Piras. - Expliquez-leur !
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. - Le président de la commission médicale d'établissement sera associé à toutes les décisions, pour un pilotage médicalisé.
Toutefois, ce texte peut être amélioré. (« Ah ! » sur les bancs socialistes) Le Gouvernement a déjà accepté 500 amendements à l'Assemblée nationale.
M. Jean-Pierre Sueur. - Supprimez l'urgence !
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. - Nous sommes prêts à préciser encore le rôle du président de la commission médicale d'établissement, mais il faut laisser au directeur un rôle de synthèse.
M. Charles Gautier. - Et les élus ?
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. - Certains médecins sont inquiets...
M. Robert Hue. - C'est vous qui serez bientôt sous perfusion !
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. - Le Gouvernement partage leur volonté de défendre l'hôpital public. (Vives contestations à gauche)
M. Jean-Pierre Sueur. - Et l'urgence ?
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. - Le texte, dans son ensemble, confirme le caractère public des hôpitaux. Mardi dernier, grévistes et manifestants se sont également exprimés sur des sujets qui dépassent le cadre de ce projet de loi, telle la tarification à l'activité ou les moyens de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris.
Le Gouvernement et l'Assemblée nationale ont tenté de définir le subtil équilibre qui doit régir les relations entre le président de la commission médicale d'établissement et le directeur. Les discussions au Sénat permettront de progresser encore dans cette coproduction parlementaire qui prendra le temps qu'il faudra. (Protestations à gauche ; applaudissements sur les bancs UMP)
M. Jean-Pierre Sueur. - Dans l'urgence ?
M. Jean-Paul Fournier . - La crise économique actuelle touche directement les jeunes de notre pays car leur manque d'expérience professionnelle les rend plus vulnérables.
Il est impératif de prendre des mesures spécifiques, immédiates, concrètes. Vendredi dernier, en présentant le plan d'urgence contre le chômage des jeunes, le Président de la République a voulu répondre à cette préoccupation qui touche toutes les familles françaises. Il a rappelé que les jeunes sont plus touchés que leurs aînés, soulignant que, outre les plans sociaux et les suppressions d'emploi, de nombreuses entreprises gèlent leurs embauches au détriment des jeunes. En outre, les contrats d'apprentissage et de professionnalisation ont diminué de 20 à 30 %. Enfin, la France, depuis des décennies, connaît l'un des plus faibles taux d'emploi des jeunes de l'OCDE.
Oui, les jeunes sont les premiers touchés par la crise. Le nombre de jeunes inscrits au chômage a progressé de 30 % en un an. Monsieur Hirsch, vous avez-vous-même affirmé qu'il y aurait 150 000 à 250 000 jeunes supplémentaires inscrits au chômage cette année pour un total de 435 000 personnes de moins de 25 ans à pointer au chômage.
J'ai rencontré hier les membres de la Fédération française du bâtiment du Gard. De nombreux entrepreneurs sont prêts à s'engager sur un plan concret, axé sur l'apprentissage et la formation, incitatif pour les entreprises. Pour être efficace, il doit être mis en oeuvre rapidement. Ce plan, doté d'une enveloppe de 1,3 milliard, devrait permettre à 500 000 jeunes de trouver un emploi ou une formation d'ici juin 2010. Monsieur le Haut-commissaire, pourriez-vous préciser le calendrier et le contenu de ce plan pour la jeunesse qui est au coeur de votre action ?
M. Martin Hirsch, Haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté et à la jeunesse . - Toutes les mesures annoncées vendredi dernier par le Président de la République ont été élaborées en concertation avec les syndicats, les employeurs et les jeunes. Ce sont des mesures concrètes, pragmatiques et d'application immédiate. Les jeunes refusent un sous-statut, des mesures spécifiques ; les employeurs ne veulent pas d'un plan qui soit une usine à gaz, ils veulent du concret. Pour les syndicats, l'alternance et les contrats de professionnalisation sont un bon outil d'insertion. (Exclamations à gauche) Bref, nous avons privilégié les mesures simples, de bon sens. Les jeunes nous ont dit qu'ils sont pris en stage au lieu d'être recrutés. Nous avons décidé que désormais, la rémunération du stage interviendra dès le deuxième mois, et non lors du troisième. Dans la fonction publique, comme dans le secteur privé, la transformation d'un stage en CDI donnera lieu au versement d'une prime de 1 500 euros à l'employeur au moment de la signature du contrat, puis six mois après.
Concernant l'alternance et l'apprentissage, outre le dispositif « zéro charge », les entreprises de moins de 50 salariés, les plus en difficulté, recevront une prime de 1 800 euros pour l'embauche d'un apprenti. Quant aux grandes entreprises, elles se sont engagées à faire plus : Veolia va doubler le nombre de ses apprentis cette année, Carrefour en recruter 3 000 supplémentaires. Tout contrat de professionnalisation donnera lieu au versement d'une prime de 1 000 euros à l'employeur, 2 000 euros lorsqu'il s'agit d'un contrat de faible qualification. Oui, monsieur Fournier, les entreprises sont prêtes à s'engager. La Fédération du bâtiment a pris des engagements concrets...
M. René-Pierre Signé. - On verra !
M. Martin Hirsch, Haut-commissaire. - ...qu'elle déclinera fédération par fédération, entreprise par entreprise. Je suis persuadé que chacun se mobilisera sur ce plan dont nous mesurons tous l'urgence ! (Applaudissements sur les bancs UMP)
Pour une répartition équitable des fruits du travail
M. Yves Daudigny . - Bien que le Premier ministre ne soit pas présent, je lui adresse cette question car elle relève de sa responsabilité directe, de ses choix politiques. Il y a cent quarante ans, Jean-Baptiste André Godin, ancien député de mon département écrivait : « Pour inaugurer le règne de la justice et de la liberté que doit réaliser l'association du capital et du travail, pour remplacer l'arbitraire du salaire par un droit de participation proportionnel au concours que le travail apporte dans l'oeuvre de la production, il faut découvrir le principe et les règles de la répartition équitable des fruits du travail ». Avec 77 000 chômeurs supplémentaires en mars, une augmentation du taux de chômage de 13,3 % cette année, voire 35,8 % pour les jeunes, à la veille d'un 1er mai historique, parce qu'unitaire, n'est-il pas temps de restaurer un État de droit ? N'est-il pas temps d'en finir avec le règne du « deux poids, deux mesures » ? D'un côté, Caterpillar, Continental, Faurecia, Sony, 3M, Scapa, qui multiplient mesures de chômage partiel et plans sociaux (exclamations à droite), refusent le dialogue, brandissent la menace de procédures judiciaires que le Gouvernement appuie par de fermes discours et rappels à la loi pénale ; de l'autre, primes outrancières et distribution de bénéfices contre lesquels le Gouvernement se contente d'en appeler à l'éthique et au code moral, approche que certains trouveraient excessive puisque, selon un quotidien du soir, « le patronat peine à mettre en place un comité des sages sur les rémunérations ». De même, à quand l'installation du Fonds social d'investissement ?
Pas moins de 60 % des Français jugent mauvaise la politique économique du Gouvernement. C'est dire que vous creusez un fossé abyssal avec la population. Monsieur le Premier ministre, je veux croire que ni le dogme ni le cynisme ne vous aveuglent à ce point. Quand procéderez-vous à cette indispensable répartition équitable des fruits du travail à laquelle vous exhortent les salariés ? Quand construirez-vous ce nouveau contrat social pour rétablir la justice et la cohésion dont vous être le garant ? (Applaudissements à gauche)
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services . - Pointer du doigt la responsabilité du Gouvernement n'est pas une explication satisfaisante. Ce serait feindre de croire que la crise est circonscrite à notre pays (protestations à gauche ; applaudissements sur quelques bancs à droite) quand elle touche toutes les économies occidentales. Selon les dernières prévisions, la croissance allemande serait de moins 6 %, celle de l'Italie de moins 4,5 %.
Bref, notre pays résiste mieux que d'autres. (Marques d'ironie à gauche où l'on évoque le taux de chômage) Imputer la crise à notre seul pays n'est pas une bonne chose. (Protestations à gauche) La création du Fonds social d'investissement a été annoncée le 18 février par le Président de la République.
M. Robert Hue. - A la demande des syndicats !
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. - Preuve que les syndicats sont responsables et que leurs actions sont reprises par le Gouvernement... Ce fonds sera doté de 2 à 3 milliards. En outre, vous n'avez pas évoqué la prime de solidarité active de 200 euros versée depuis le 6 avril à quelque 3,8 millions de foyers modestes, les allégements d'impôt sur le revenu pour les tranches les plus basses, la prime à la casse qui bénéficie aux consommateurs comme aux constructeurs et la prime aux embauches dans les petites entreprises. Bref, ce gouvernement est très réactif, il agit pour la relance, le soutien au crédit.
M. René-Pierre Signé. - Mais il agit mal !
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. - C'est tout le contraire ! Il agit bien et nous aimerions être soutenus sur d'autres bancs que ceux de la majorité ! (Applaudissements sur les bancs UMP)
TVA dans la restauration
Mme Isabelle Debré . - (Applaudissements sur les bancs UMP) Tout un secteur économique s'apprête à mettre en oeuvre un engagement de campagne du Président de la République : 112 000 restaurants, 24 000 hôtels-cafés-restaurants et 41 000 cafés bénéficieront bientôt de la TVA au taux réduit de 5,5 %, attendue depuis plus de treize ans ; ils pourront désormais lutter à armes égales avec la restauration à emporter.
Mme Nicole Bricq. - Pour un coût de 2,4 milliards d'euros.
Mme Isabelle Debré. - On ne peut que se féliciter de ce succès du Gouvernement auprès de Bruxelles...
M. René-Pierre Signé. - C'est bien le seul !
Mme Isabelle Debré. - Il prouve que tout est mis en oeuvre pour affronter cette période difficile, contrairement aux affirmations de ceux qui stigmatisent par principe l'action de la majorité. Monsieur le ministre, lors des états généraux de la restauration, mardi dernier, les organisations professionnelles ont signé, en contrepartie de l'effort budgétaire, un « contrat d'avenir ». (On se gausse sur les bancs socialistes) Quels en sont les objectifs ? Qu'avez-vous prévu pour vous assurer de la bonne exécution du contrat ? (Même mouvement) Quel est le calendrier de mise en oeuvre ? N'oublions pas que ce secteur est l'un des premiers pourvoyeurs d'emplois en France. (Applaudissements sur les bancs UMP)
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services . - Oui, nous sommes fiers d'avoir tenu cet engagement de campagne de M. Nicolas Sarkozy. (Murmures à gauche, où l'on parle de cuisine électorale) Combien d'autres auparavant avaient promis la baisse de la TVA ! Lui l'a menée à bien. Un contrat d'avenir a été signé avec les organisations professionnelles.
Les professionnels se sont engagés à répercuter intégralement la baisse de la taxe sur certains produits dés le 1er juillet prochain. Ils créeront des emplois, prendront des apprentis, signeront des contrats de professionnalisation : en tout, 40 000 embauches ! Les organisations créeront aussi un fonds de modernisation...
M. René-Pierre Signé. - On verra !
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. - ...pour rénover les structures, dans cette branche essentielle du tourisme français. Quelles assurances, demandez-vous : mais un contrat repose toujours sur la confiance et il est fait pour être tenu. (Exclamations ironiques à gauche) Pourquoi celui-ci ne le serait-il pas ? L'ensemble des organisations qui ont signé le contrat représentent la moitié des restaurateurs.
M. Charles Gauthier. - Allons, ils ne s'engagent à rien.
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. - J'entame très prochainement un tour de France : nous apposerons sur l'ensemble des vitrines des restaurants une affichette : « ici, la TVA baisse, les prix aussi ». (Rires à gauche) Je fais confiance aux restaurateurs, mais aussi à l'opinion publique et aux consommateurs.
Un comité de suivi retracera chaque semaine les évolutions : prix, nombre des emplois et nombre d'apprentis. Nous prendrons ainsi à témoin l'opinion publique. Je préfère m'en remettre à sa vigilance plutôt que de recourir d'emblée à des contrôles coercitifs -que nous mettrons en oeuvre si l'exécution du contrat se heurte à des difficultés. (Applaudissements à droite)
Mise en oeuvre du plan de relance
M. Albéric de Montgolfier . - Le ministre en charge du plan de relance a récemment remis au Parlement un rapport d'étape. Sans attendre les conclusions des parlementaires en mission qui suivent la question, je souhaiterais connaître l'état d'avancement des mesures. Combien de conventions ont été signées au titre du remboursement anticipé du FCTVA ? Les collectivités ont-elles augmenté leur effort d'investissement ? Constatez-vous des blocages sur certains projets ? Si tel était le cas, les collectivités pourraient-elles présenter de nouveaux projets ? A quelle échéance cette appréciation aura-t-elle lieu ? (Applaudissements à droite)
M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique . - Nous avons achevé l'élaboration du plan de relance et vous avez voté le collectif correspondant il y a moins de trois mois. Or vous constatez vous-mêmes sur le terrain la mise en oeuvre : plus de mille projets ont été identifiés, le ministre chargé du plan de relance a remis un rapport au Parlement, 260 chantiers ont débuté, une centaine de projets -routiers notamment- seront lancés dans les semaines à venir. Les choses vont bon train ! Si des retards apparaissent, nous respecterons l'engagement du Gouvernement : des projets déjà prêts mais qui n'ont pas été retenus à l'origine seront lancés. Nous y veillerons, en examinant la situation avant l'été.
Les administrations jouent le jeu, sur tout le territoire.
M. Jacques Mahéas. - Les collectivités aussi !
M. Éric Woerth, ministre. - Bien sûr, mais on m'interroge sur les remboursements du FCTVA, qui sont effectués par l'État... Les collectivités tiennent tous leurs engagements. Et si elles rencontraient des problèmes avec les administrations, elles n'auraient qu'à s'adresser au Gouvernement.
Concernant le FCTVA, 15 000 conventions ont été signées -2 000 au cours de la dernière semaine, 6 000 ces quinze derniers jours : le rythme s'est donc accéléré, mais nous approchons de la date butoir du 15 mai. Ces 15 000 conventions représentent 42 millions d'euros.
C'est 50 % de plus que la moyenne de référence des années 2004-2007.
Nous vous tiendrons régulièrement informés de l'évolution du plan de relance, qui est l'un des premiers en Europe à se mettre en place si rapidement. (Applaudissements à droite)
M. Martial Bourquin . - Cela fait cinq mois que je ne cesse d'alerter le Gouvernement sur la situation de milliers de retraités.
Depuis le 1er janvier 2009, les salariés de moins de 60 ans ayant totalisé 160 trimestres de cotisation ne peuvent plus prétendre à l'allocation équivalent retraite (AER), d'environ 950 euros par mois, qui permettait de terminer dans la dignité une longue carrière, souvent réalisée dans des conditions pénibles
La suppression de cette allocation jette ces jeunes retraités dans la plus injuste précarité.
Des entreprises continuent à proposer à ces salariés en fin de carrière des départs volontaires afin d'éviter de coûteux plans sociaux, en leur laissant croire qu'ils toucheraient l'AER. Personne ne les a dissuadés ou alertés, ni les entreprises, ni les Assedic, ni les directions de l'emploi !
Aujourd'hui, ils sont 65 000 à découvrir qu'ils vont au mieux perdre 500 euros par mois et, au pire, se retrouver au RSA. Ils sont 65 000 à être priés de trouver du travail. Passé 55 ans, c'est aujourd'hui impossible. Est-ce une manière digne de terminer une carrière, de remercier ces salariés qui ont travaillé toute leur vie ?
Monsieur le ministre, comptez-vous réparer cette grave erreur et rétablir l'AER sans attendre, par décret, sans date butoir, car rien ne sera réglé fin 2009 ? Comptez-vous faire de même pour l'allocation veuvage, menacée de disparition en 2011 ? Comptez-vous engager une vraie réflexion sur la pénibilité du travail dans le calcul des retraites ?
M. le président. - Veuillez conclure.
M. Martial Bourquin. - Les petits retraités ne réclament pas des retraites chapeaux de 730 000 euros, comme certains : ils ne demandent qu'à vivre dans la dignité après une très longue carrière ! (« Bravo ! » et applaudissements à gauche)
M. René-Pierre Signé. - Vous devriez tous applaudir !
M. Brice Hortefeux, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville . - La situation des retraités est une préoccupation partagée par le Gouvernement et sur tous les bancs.
M. Charles Gautier. - Pourquoi la majorité n'a pas applaudi, alors ?
M. Brice Hortefeux, ministre. - Le Gouvernement met tout en oeuvre pour respecter l'engagement du Président de la République de revaloriser de 25 % les petites pensions d'ici 2012.
M. René-Pierre Signé. - Encore un engagement !
M. Brice Hortefeux, ministre. - Depuis le 1er avril, le minimum vieillesse a ainsi augmenté de 6,9 %, alors que l'inflation est proche de zéro.
M. René-Pierre Signé. - Répondez à la question !
M. Brice Hortefeux, ministre. - La situation des personnes de moins de 60 ans ayant effectué une carrière complète, sans espoir de retrouver du travail, a été abordée lors du sommet social à l'Élysée. Évoqué tout d'abord par Force ouvrière, ce problème a ensuite été relayé par toutes les formations politiques.
La loi prévoyant l'extinction du dispositif de l'AER au 1er janvier 2009 visait à encourager l'emploi des seniors.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Ça ne marche pas !
M. Brice Hortefeux, ministre. - Mais la crise est arrivée ! (Exclamations ironiques sur les bancs CRC)
Mme Éliane Assassi. - Ça, vous ne l'aviez pas prévu !
M. Brice Hortefeux, ministre. - Si vous, vous l'aviez prévu, vous êtes très forts. Pourtant, dans l'histoire, vous vous êtes trompés plus souvent que vous n'avez eu raison ! (Applaudissements à droite) La marque du Gouvernement et de la majorité, c'est la réactivité. A la demande de tous les groupes de l'Assemblée nationale et du Sénat...
M. Jean-Pierre Sueur. - Et de Martial Bourquin !
M. Brice Hortefeux, ministre. - ...nous allons reporter d'un an l'application de ce texte. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Jean-Pierre Sueur. - Bravo Martial !
M. Brice Hortefeux, ministre. - Le dispositif de l'AER sera prolongé à titre exceptionnel. C'est une réponse à la crise, et une nouvelle preuve de la réactivité et du pragmatisme du Gouvernement. Nous restons bien entendu déterminés à faciliter l'emploi des seniors.
M. Charles Gautier. - J'espère bien !
M. Brice Hortefeux, ministre. - Merci de votre encouragement. Le Gouvernement est à l'écoute des plus faibles, déterminé à les aider à surmonter la crise, avec, toujours, l'obsession de l'emploi. (« Très bien » et applaudissements à droite)
La séance est suspendue à 16 heures.
présidence de M. Roland du Luart,vice-président
La séance reprend à 16 h 15.