- Mercredi 8 février 2023
- Projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 - Audition de M. Nicolas Mitjavile, directeur de la Caisse nationale des industries électriques et gazières
- Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à améliorer l'encadrement des centres de santé - Examen du rapport et du texte de la commission
- Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé - Examen du rapport et du texte de la commission
- Proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, créant une aide universelle d'urgence pour les victimes de violences conjugales - Examen du rapport et du texte de la commission (deuxième lecture)
Mercredi 8 février 2023
- Présidence de Mme Catherine Deroche, présidente -
La réunion est ouverte à 9 h 05.
Projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 - Audition de M. Nicolas Mitjavile, directeur de la Caisse nationale des industries électriques et gazières
Mme Catherine Deroche, présidente. - Nous entendons ce matin M. Nicolas Mitjavile, directeur de la Caisse nationale des industries électriques et gazières sur le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale (PLFRSS) pour 2023.
L'objectif de cette audition est de présenter les impacts du projet de loi sur la caisse des électriciens et gaziers.
M. Nicolas Mitjavile, directeur de la Caisse nationale des industries électriques et gazières (CNIEG). - Merci pour votre accueil ; je connais la qualité et le sérieux de vos travaux.
Parmi les régimes spéciaux, ou statutaires, le nôtre est de taille moyenne, loin derrière les différents régimes de la fonction publique et proche de celui de la SNCF : nous comptons environ 200 000 pensionnés et 150 000 affiliés. Nos engagements financiers avoisinent 200 milliards d'euros.
Surtout, ce régime bénéficie d'un adossement financier au régime général, mis en place au début des années 2000 ; l'État avait l'intention de l'étendre aux autres régimes spéciaux, mais ne l'a finalement pas fait. Cet adossement, très précieux, a permis de déconsolider l'essentiel de cette charge des comptes des seules entreprises alors concernées, EDF et Gaz de France, dans la perspective de leur introduction en bourse. Vous évaluez régulièrement la neutralité de notre régime au regard des comptes de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav) et de l'Agirc-Arrco ; à chaque fois, vous avez constaté cette neutralité, obtenue notamment grâce à la soulte de 7 milliards d'euros offerte par les employeurs de la branche lors de la mise en place de l'adossement. Cette neutralité découle également de la contribution tarifaire d'acheminement (CTA), qui couvre les droits passés, jusqu'en 2004, du secteur régulé. Cette contribution est neutre pour le consommateur ; on a simplement transféré une part du tarif vers cette taxe.
Notre régime est équilibré, depuis sa création, de par la loi, et il continuera de l'être si cette réforme entre en vigueur.
Enfin, notre régime est pleinement autonome dans sa gestion. Le nerf de la guerre, en matière de régimes de retraite, c'est l'informatique : nous sommes sur ce point complètement autonomes. Au-delà, la qualité de la gestion du régime est universellement reconnue : en témoignent la grande satisfaction de nos pensionnés, mais aussi les différents audits comptables et les contrôles effectués par les corps d'inspection de l'État, qui se sont toujours montrés très élogieux.
Le nombre d'employeurs concernés par ce régime a augmenté ; au-delà d'EDF et Engie, on en compte environ 160, contre 130 lors de la création de la caisse. Aux entreprises locales de distribution se sont ajoutées de nouvelles entreprises actives dans le domaine des énergies renouvelables.
Un enjeu crucial pour le régime est l'attractivité du secteur. L'Assemblée nationale a récemment créé une commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la France. Ses auditions ont montré que le secteur est aujourd'hui moins attractif qu'il y a une vingtaine d'années ; on pouvait alors embaucher les meilleurs diplômés ; aujourd'hui c'est beaucoup plus difficile. Le régime de retraite joue un rôle en la matière, mais il n'est qu'un des éléments de la couverture sociale, qui varie suivant les employeurs et est souvent moins protectrice que dans le secteur bancaire, ou encore que chez TotalEnergies pour ne citer que quelques exemples.
Les mesures de convergence présentes dans toutes les réformes des retraites depuis 1993 font que, si les nouveaux entrants conservent un avantage fidélisant avec ce régime spécifique, cet avantage est désormais assez limité. D'ailleurs, les départs sans anticipation se font exactement au même âge que dans le régime général : 62,9 ans. L'âge moyen de départ à la retraite, en comptant les départs anticipés, s'établit à 60,4 ans, un peu plus tôt que dans le régime général, mais cela est aussi dû à un décalage dans le calendrier d'application de diverses réformes.
La gestion des nouveaux entrants après la réforme, au vu de la présence d'une « clause du grand-père », risque de poser des problèmes d'intendance. En matière de ressources humaines, il ne sera pas toujours aisé d'expliquer aux nouveaux que leur statut sera moins avantageux que celui de leurs collègues accomplissant les mêmes tâches. Ce ne sera pas simple non plus en matière informatique : l'entrée en vigueur dès septembre 2023 prévue dans le projet de loi est même impossible ; les informaticiens nous disent qu'ils ne pourraient en aucun cas être prêts à cette échéance ! Je veux vous alerter quant à ce risque de « catastrophe industrielle », dont les coûts pourraient être importants.
Enfin, le projet de loi, dans sa rédaction actuelle, ne dit rien de l'avenir de l'adossement financier de notre régime au régime général. Le système actuel est solide, il le restera jusqu'à son extinction. Je n'ai donc qu'une prière à vous adresser : préservez ce système d'adossement ! Les problèmes financiers sont déjà largement résolus grâce au travail intelligent accompli il y a une vingtaine d'années.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - Quelle est la situation financière du régime des industries électriques et gazières (IEG) au 31 décembre 2022 ? Quelles sont ses spécificités par rapport aux autres régimes obligatoires de base ? Quelle incidence le report à 64 ans de l'âge d'ouverture des droits à compter de la génération 1968 et l'accélération de l'allongement de la durée d'assurance requise pour l'obtention du taux plein auront-ils sur la trajectoire financière du régime ?
M. Nicolas Mitjavile. - Notre régime doit être à l'équilibre, conformément aux termes de la loi. C'est d'ailleurs le cas pour l'année 2022 - les comptes seront prochainement arrêtés.
Grâce à la contribution tarifaire d'acheminement, nous disposons d'un excédent de trésorerie de 700 millions d'euros en 2022 ; 600 millions d'euros sont gérés par l'Urssaf Caisse nationale et nous conservons 100 millions d'euros pour gérer les variations de trésorerie. Contrairement à ce que je lis parfois, nous n'avons pas de réserve cachée.
Le report à 64 ans de l'âge d'ouverture des droits touchera les agents au statut, dont la pension est calculée sur les six derniers mois de salaire. Dans les faits, notre taux de remplacement est très proche de celui du régime général et de celui de la fonction publique, car les primes ne sont pas prises en compte. Le report sera plus coûteux pour notre régime, car nos bénéficiaires ne peuvent prétendre à des plans de préretraite.
En ce qui concerne l'équilibre du régime sur le long terme, la sortie des nouveaux entrants et le traitement du stock de droits acquis ne nous inquiètent pas si l'adossement est maintenu. Nous sommes sereins sur la gestion de ce régime tant à court terme qu'à long terme.
M. René-Paul Savary, rapporteur pour la branche vieillesse. - Quel serait l'effet des ajustements paramétriques proposés sur la pension moyenne ?
M. Nicolas Mitjavile. - Celle-ci devrait augmenter puisque le salaire sera plus important après le report à 64 ans.
Au sujet de la durée d'assurance moyenne, les agents pourront décider soit de continuer à travailler afin d'éviter la décote soit de partir plus tôt - dans ce cas, ils bénéficieront d'une pension moins importante. Il est très difficile d'anticiper les décisions des personnes.
M. René-Paul Savary, rapporteur. - Quelle part du total des départs en retraite ont représenté en 2022 les départs anticipés pour carrière longue ?
M. Nicolas Mitjavile. - Cela représente environ 5 % du total, soit 4 000 départs.
M. René-Paul Savary, rapporteur. - Qu'en est-il des départs anticipés pour handicap et incapacité permanente ?
M. Nicolas Mitjavile. - Les départs anticipés pour handicap comptent pour 0,5 % et ceux pour incapacité permanente 5 %.
M. René-Paul Savary, rapporteur. - Quelle incidence sur le nombre de départs anticipés au cours des prochaines années auraient le report à 62 ans de l'âge de départ anticipé pour incapacité permanente et l'extension de ce dispositif aux salariés justifiant d'un taux d'incapacité permanente compris entre 10 et 19 % et de 5 à 17 années d'exposition à des facteurs de pénibilité ?
M. Nicolas Mitjavile. - Le régime spécial propose une anticipation spécifique au titre du taux d'incapacité permanente, avec un abaissement de l'âge d'ouverture des droits de trois ou de six mois. Le report à 64 ans entraînera mécaniquement un recul de l'âge de départ pour ces salariés.
M. Hervé Duchaigne, directeur comptable et financier de la CNIEG. - Il y aura en effet un décalage dans le temps : les gens partiront plus tard en retraite.
M. René-Paul Savary, rapporteur. - La modification des facteurs de pénibilité aura-t-elle une influence ?
M. Hervé Duchaigne. - Nous avons nos propres spécificités. Les nouveaux entrants seront affiliés au régime général, tandis que les agents statutaires auront leur propre système, mais tous seront affectés par la réforme et ce décalage dans le temps.
M. René-Paul Savary, rapporteur. - Ce sont donc deux catégories très différentes. Les dispositions relatives à l'assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF) et à l'assurance vieillesse des aidants (AVA) seront-elles appliquées aux nouveaux entrants ?
M. Nicolas Mitjavile. - L'AVPF et AVA s'appliquent aussi aux salariés des IEG ; durant cette période, leur contrat de travail est suspendu et ils relèvent du régime général.
M. Hervé Duchaigne. - Notre dispositif de branche concernant la pénibilité est performant : le départ en retraite est possible à 57 ans. Depuis 2009, des jours acquis au titre de la pénibilité peuvent être versés au compte épargne retraite.
M. René-Paul Savary, rapporteur. - Le régime garantit-il une pension minimale ?
M. Hervé Duchaigne. - Les pensions minimales s'élèvent à 930 euros pour 15 ans d'activité, 1047 euros pour 30 ans et 1163,55 euros pour 35 ans.
M. René-Paul Savary, rapporteur. - La retraite progressive touchera-t-elle de nombreux agents ?
M. Hervé Duchaigne. - Il est difficile de le prévoir, mais nous estimons que celle-ci sera peu utilisée.
M. Nicolas Mitjavile. - C'est une avancée pour le régime.
M. René-Paul Savary, rapporteur. - Absolument. Par ailleurs, le cumul emploi-retraite concerne-t-il beaucoup d'agents ?
M. Hervé Duchaigne. - Notre régime ne suit pas directement les bénéficiaires de ces dispositions. Nous effectuons des contrôles au moment où les personnes atteignent l'âge légal de départ à la retraite pour nous assurer que celles-ci respectent les plafonds et qu'elles remplissent les conditions. Si le projet de loi est adopté, les personnes qui activeront ce dispositif cotiseront au titre de leur nouvelle activité : il reviendra à la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav) d'effectuer les vérifications nécessaires.
Mme Sylvie Vermeillet, rapporteure pour avis de la commission des finances. - Quel est le montant de la pension moyenne ? Les agents bénéficient-ils de primes de fin de carrière ? Certaines personnes deviennent-elles contractuelles après être parties en retraite de manière anticipée ? Quel est le montant total de la contribution publique versée au régime via la taxe spéciale ?
M. Nicolas Mitjavile. - Le cumul emploi-retraite est un phénomène très marginal.
Nous vous transmettrons par écrit des informations détaillées sur le montant de la pension moyenne et sur les primes de fin de carrière.
M. Hervé Duchaigne. - La
contribution tarifaire instaurée en 2005 dans le cadre de la
réforme du financement correspond à une fraction de la facture
que les consommateurs payaient : c'est une part de la facturation qui est
isolée. Aujourd'hui, la collecte de la contribution tarifaire
représente environ 1,7 milliard d'euros, qui ne servent pas
seulement à financer les retraites : une partie de l'enveloppe
finance les prestations, une autre la soulte
- 400 millions
d'euros en 2023 - reversée au régime général,
versée sur vingt annuités jusqu'en 2024 ; quant aux
excédents de trésorerie, ils ne sont en aucune façon une
« cagnotte » : ils restent sur notre compte bancaire,
cette somme étant mise à disposition de l'Urssaf Caisse nationale.
Mme Sylvie Vermeillet, rapporteure pour avis de la commission des finances. - Quel est le montant de vos coûts de gestion ?
M. Hervé Duchaigne. - Je n'ai pas en tête le coût unitaire, mais notre budget de fonctionnement annuel est de moins de 30 millions d'euros.
Mme Laurence Cohen. - Vous avez dit que votre régime était équilibré et qu'il donnait, à juste titre, entière satisfaction aux pensionnés. On présente souvent les régimes spéciaux, dont le vôtre, comme des régimes privilégiés. Ma famille politique préfère les appeler des régimes pionniers : nous plaidons pour que le régime général suive leur exemple plutôt que de tirer les droits vers le bas.
Les conditions d'ouverture des droits sont fixées très précisément dans votre régime. J'ai visité récemment un site gazier dans le Val-de-Marne ; si l'âge moyen des départs anticipés est de 58 ans, cela concerne 20 % des agents, essentiellement les services actifs, qui subissent, tout au long de leur carrière, pénibilité, astreintes, travail de nuit, charges lourdes, exposition à des substances chimiques cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (CMR).
Une réforme, de surcroît, est passée par là, en 2010 : depuis la réforme Woerth, il faut avoir travaillé au moins dix-sept ans dans l'industrie électrique et gazière pour bénéficier d'un départ anticipé. Il faut faire le lien avec l'attractivité des métiers : les personnes que j'ai rencontrées m'ont dit leur fatigue ; un report de l'âge de départ pourrait remettre en cause leur volonté de demeurer dans leur entreprise.
M. Philippe Mouiller. - En miroir de l'intervention de Mme Cohen, je voudrais revenir sur l'équilibre des caisses, qui est assuré par une taxe prélevée sur la facture d'électricité. Cette contribution tarifaire d'acheminement est-elle calculée au regard des besoins de la caisse ou son montant est-il figé ?
Par ailleurs, la remise en cause d'un certain nombre d'éléments relatifs à la pénibilité pose des difficultés ; reste qu'en parallèle vous conservez le compte épargne jours retraite, dont la branche peut modifier les règles d'attribution. N'y a-t-il pas là un moyen de compenser, par un outil que vous maîtrisez, ce que vous décrivez comme une perte importante, et ainsi d'atténuer l'effet de la réforme ?
J'approuve ce que vous avez dit sur la perte d'attractivité du métier.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Vous avez parlé de la pénibilité, qui relève d'un dispositif de branche ; à l'avenir, compte tenu de la faible prise en compte de la pénibilité dans la loi générale, ces dispositifs de branche vont devoir être renforcés. Le vôtre permet aujourd'hui de partir à 57 ans. La réforme va-t-elle porter cet âge de départ à 59 ans ? Comment votre dispositif de branche s'articule-t-il avec la loi générale ?
J'aimerais des précisions sur les éléments de pénibilité. La prise en compte des astreintes, du travail de nuit, des charges lourdes - celles-ci avaient été exclues et font leur retour, bien que de manière très altérée - ne pose pas de problème particulier.
Mais quid de l'exposition aux CMR, que votre branche prend en compte ? C'est précisément le genre de pénibilité que le patronat dit habituellement impossible à prendre en compte par les employeurs, au motif qu'il ne s'agirait pas d'un critère objectivable. Comment faites-vous ?
Mme Cathy Apourceau-Poly. - Vous avez dit que le régime était équilibré, et même excédentaire.
Le régime spécial va disparaître ; nous l'appelons pour notre part, comme l'a dit Laurence Cohen, régime pionnier. Vous avez souligné que ce métier était moins attractif qu'auparavant, que vous aviez davantage de difficultés à recruter. Cette perte d'attractivité me semble en partie imputable à la casse progressive du service public par les gouvernements successifs.
Votre branche compte 156 entreprises ; comment feront les salariés lors des négociations annuelles, puisque deux régimes coexisteront, le régime actuel et le régime général ?
M. Nicolas Mitjavile. - J'ai insisté sur l'attractivité du secteur ; c'est une question qui, à juste titre, vous intéresse : vous vous demandez comment on va compenser l'abandon du régime actuel pour maintenir l'attractivité du secteur.
En matière de pénibilité, notre dispositif de branche nous paraît aujourd'hui adapté aux conditions de travail : il faut dix-sept ans de services actifs pour pouvoir partir à 57 ans. S'y ajoute le dispositif du compte épargne jours retraite, mis en place en 2009 au niveau de la branche. Sur la prise en compte de l'exposition aux CMR, nous vérifierons et vous répondrons précisément.
Madame la sénatrice Cohen, vous avez raison d'insister sur la question de l'attractivité du secteur dans la durée, que pose indirectement cette réforme, cette industrie n'ayant pas vocation à disparaître... Nous notons depuis un certain nombre d'années une perte d'attractivité. Le régime de retraite n'est qu'un élément parmi d'autres des conditions sociales et salariales de la branche, que les acteurs doivent veiller à maintenir au niveau d'exigence requis.
Un mot sur le financement : la CTA est totalement neutre ; c'est une simple écriture, d'une certaine manière. Nos taux de cotisation employeur sont d'ailleurs sensiblement plus élevés que dans le régime général. La CTA n'est qu'un pur transfert d'un élément « prix et chiffre d'affaires » vers un élément « taxe » visant à couvrir de manière dédiée les droits acquis des travailleurs relevant de ce régime.
M. Philippe Mouiller. - Le taux de la taxe est-il fonction des besoins financiers du régime ?
M. Hervé Duchaigne. - La contribution tarifaire que nous collectons est une taxe dont le taux est déterminé par les pouvoirs publics, assise sur des éléments tarifaires d'acheminement fixés par la Commission de régulation de l'énergie (CRE). La loi prévoit que le montant de cette taxe est déterminé de manière à financer les charges de la caisse de retraite sur une période de cinq ans - voilà pour la mécanique générale, nonobstant les aléas.
Une évolution tarifaire est intervenue en 2021, qui a conduit les pouvoirs publics, compte tenu d'un certain nombre d'incertitudes quant aux hypothèses, à retenir un maintien du taux, c'est-à-dire une neutralisation du montant de CTA collecté, 1,7 milliard d'euros, afin d'éviter que l'augmentation du tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité (Turpe) ne vienne augmenter inconsidérément les recettes de CTA.
Tous les ans, lorsque je présente l'arrêté des comptes de la caisse, nous faisons le point, avec les tutelles, sur les excédents et sur les perspectives. La contribution tarifaire finance une fraction des droits acquis avant le 1er janvier 2005 et une fraction de la soulte, 400 millions d'euros, qui s'éteindra en 2025 - l'excédent augmentera d'autant. De surcroît, les charges à financer au titre des droits acquis avant 2005 sont en diminution : passé le cap de 2018-2019, nous sommes entrés dans une phase de décrue démographique et d'extinction naturelle de la CTA.
Légalement, je rappelle que la CTA constitue une imposition de toutes natures, donc une ressource d'État qui, en tant que telle, n'appartient pas au régime.
M. Nicolas Mitjavile. - Tout cela dépend beaucoup des prévisions de la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) ; de toute façon, les excédents ne restent pas dans le régime spécial.
M. Philippe Mouiller. - Et c'est l'État qui fixe le Turpe...
Mme Raymonde Poncet Monge. - La durée minimale de services ne change pas. Pouvez-vous me confirmer que la loi précédente a fait passer cette durée de quinze à dix-sept ans ? Quant à l'âge de départ, qui est actuellement fixé à 57 ans, va-t-il être modifié par la loi ?
M. Hervé Duchaigne. - Ce n'est pas nous qui tenons le crayon ; mais, tel que nous comprenons le projet de loi, cet âge passerait bel et bien de 57 à 59 ans. Notre rôle se limitera à mettre en oeuvre ce que le législateur aura décidé.
M. René-Paul Savary, rapporteur. - À quel âge en moyenne ceux qui bénéficient de ce départ anticipé partent-ils à la retraite ?
Les pensions des retraités de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) sont liquidées à plus de 60 ans en moyenne pour ce qui est de la catégorie active : nombre de pensionnés décalent déjà leur départ anticipé, par rapport à l'âge minimal, pour valider tous les trimestres exigés. Pour ce qui est de la CNRACL, l'impact d'un passage de 57 à 59 ans ne sera pas de deux ans, mais de neuf mois supplémentaires en activité.
Mme Raymonde Poncet Monge. - C'est une moyenne.
M. René-Paul Savary, rapporteur. - Dans votre branche, quel est l'âge moyen de départ anticipé ?
M. Nicolas Mitjavile. - Le départ intervient en moyenne à 60,3 ans, à 62,9 ans pour les départs non anticipés.
Quant à la durée minimale de cotisation, elle a été portée de 15 à 17 ans par la précédente loi.
Mme Annick Jacquemet. - Philippe Mouiller vous a interrogé sur la perte d'attractivité du secteur. Comment l'enrayer ? J'ai été surprise de vous entendre dire qu'une grande facette de l'attractivité du métier était les conditions de départ en retraite : il me semble un peu dommage que des jeunes qui entrent dans la vie professionnelle aient pareil objectif de carrière...
Quels autres leviers actionner pour rendre vos métiers attractifs ?
M. Nicolas Mitjavile. - Telle n'est pas du tout ma vision des choses ; vous m'aurez mal compris... En revanche, l'existence de mesures parfaitement justifiées permettant un départ anticipé est bel et bien un élément d'attractivité du secteur. Les départs pour handicap ou invalidité représentent d'ailleurs une part très modeste du total des départs anticipés. Mais l'attractivité tient plutôt à la bonne couverture sociale, aux salaires, aux conditions de travail et à la fierté d'exercer ces métiers.
Mme Monique Lubin. - Puisqu'il est excédentaire, je m'interroge sur le bien-fondé de la mise à mort de ce régime. On nous présente les régimes spéciaux comme coûtant cher aux contribuables. Or, en l'espèce, on s'apprête à verser au régime général de nouveaux salariés, donc, à l'avenir, de nouvelles dépenses. J'ai cru comprendre qu'il fallait équilibrer notre système de retraites : quel est l'intérêt ?
Par ailleurs, la CTA va-t-elle être restituée au consommateur d'électricité dès lors qu'il n'y en aura plus besoin pour financer ce régime spécial ?
M. Nicolas Mitjavile. - Si j'ai soulevé la question de l'attractivité, c'est qu'elle se pose. Étant devenu, dans la dernière partie de ma carrière, un spécialiste de la retraite, je peux vous dire qu'elle n'est qu'un élément de l'attractivité du secteur : il faut raisonner à l'échelle de la branche d'activité dans son ensemble, étant entendu que celle-ci doit pouvoir répondre aux besoins de la Nation.
Quant au choix de restituer ou non la CTA, il me dépasse totalement. Je comprends la logique - s'il n'y a plus à couvrir certaines charges passées, il faut que le tarif soit réduit -, mais l'économie des tarifs électriques et gaziers est un sujet très complexe...
Mme Catherine Deroche, présidente. - Nous vous remercions de votre participation.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.
Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à améliorer l'encadrement des centres de santé - Examen du rapport et du texte de la commission
Mme Catherine Deroche, présidente. - Nous examinons le rapport de notre collègue Jean Sol sur la proposition de loi visant à améliorer l'encadrement des centres de santé.
M. Jean Sol, rapporteur. - La proposition de loi visant à améliorer l'encadrement des centres de santé, déposée par la présidente de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, Fadila Khattabi, a été adoptée par nos collègues députés selon la procédure de législation en commission le 30 novembre dernier.
La discussion de ce texte, qui contient douze articles à l'issue de son examen par l'Assemblée nationale, est inscrite par le Gouvernement à l'ordre du jour des travaux de notre assemblée le 14 février prochain.
Cette proposition de loi trouve son origine dans les scandales qui ont émaillé le secteur ces dernières années, en particulier celui des centres dentaires.
En 2015, trois ans seulement après son ouverture, Dentexia fermait après avoir mutilé et escroqué de nombreux patients auxquels étaient proposés toujours plus d'actes afin de maintenir des flux de trésorerie élevés. Dans le rapport qu'elle a consacré à l'établissement, l'inspection générale des affaires sociales recensait, en juillet 2016, pas moins de 2 400 patients membres du « collectif contre Dentexia » ainsi que 350 plaintes ordinales.
En 2021 éclatait un nouveau scandale, le scandale Proxidentaire, du nom de cette chaîne bourguignonne de centres exploitant les mêmes recettes, avec les mêmes résultats : des patients attirés par la promesse de soins à bas coût, des soignants sommés de faire du chiffre, des soins superflus facturés en quantité excessive, des victimes parfois édentées à vie. Dans le collectif d'usagers du seul centre de Chevigny-Saint-Sauveur, en Côte-d'Or, on en compte pas moins de 160. Leurs récits, dont la presse locale s'est fait l'écho, serrent le coeur au moins autant que celui de la Fantine des Misérables.
La chronique des récentes dérives de certains centres de santé ne s'arrête hélas ! pas là. Dans les Alpes-Maritimes, les centres Dental Access ont déposé le bilan en septembre 2020. Créés en 2015, ils avaient fait l'objet, à partir de 2016, de nombreux signalements et de plusieurs inspections de l'agence régionale de santé (ARS) ; en mars 2018, une patiente de 75 ans est même décédée pendant une intervention.
Je pourrais également citer la chaîne Clinadent, qui était soupçonnée fin 2021 par la direction des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur d'avoir mis en place un système de fraude fiscale par l'organisation de sociétés satellites chargée de minorer artificiellement le résultat des centres.
À chaque fois s'observe la même indifférence à la raison d'être - sanitaire ! - de ces structures de la part de ce qu'il faut bien appeler des aigrefins. Le fondateur de Dentexia avait été condamné par le passé à douze ans d'interdiction de gestion pour avoir omis de déclarer un état de cessation de paiement, et le gérant de Proxidentaire, couvreur de profession, augmentait ses marges en employant des dentistes tunisiens formés en Roumanie, attirés par un salaire de toute façon plus élevé que dans leur pays d'origine. J'hésite, enfin, à tirer une conclusion définitive du seul constat que la gérante de Dental Access fût avocate fiscaliste.
De telles dérives ont été rendues possibles par un assouplissement du cadre juridique applicable à ces centres. Afin de favoriser leur développement, la loi de 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST) avait notamment substitué au régime d'agrément un régime de simple déclaration de conformité à la réglementation. Une telle souplesse caractérisait également la nature juridique des centres, la forme associative étant assez recherchée, ainsi que les activités qu'ils peuvent entreprendre.
L'ordonnance du 22 janvier 2018 avait vocation à mettre de l'ordre après le scandale Dentexia : elle a notamment interdit à ces centres la distribution des bénéfices issus de leur exploitation, prohibé la publicité et explicité le principe d'une ouverture à tous les patients et de la dispensation à titre principal de prestations remboursables.
Ces mesures n'ont à l'évidence pas suffi, et le nombre de centres a continué d'augmenter. Il a bondi de 50 % entre 2017 et 2021, cette proportion atteignant 124 % pour les centres ophtalmologiques, conduisant à une significative augmentation des remboursements liés à des consultations d'orthoptistes. La Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) peut certes déconventionner les acteurs malhonnêtes, comme elle l'a fait opportunément le 22 janvier dernier avec deux centres franciliens, mais cela ne résout pas le problème posé plus largement par un segment de l'offre qui semble échapper en partie aux efforts de maîtrise.
J'en viens aux apports de ce texte, dont je peux dire, avant même que l'on en discute dans le détail, qu'il est indispensable.
Son article 1er rétablit un agrément pour les centres de santé, qui vaut autorisation de dispenser des soins aux assurés sociaux. Il ne concernerait cependant que les seules activités dentaires et ophtalmologiques.
Le texte initial prévoyait d'y intégrer les activités gynécologiques, qui ont finalement été laissées hors champ, la rapporteure de l'Assemblée nationale estimant que le besoin n'était pas suffisamment établi.
Les autres activités des centres de santé ne font pas l'objet d'un rétablissement d'agrément et demeurent soumises au seul engagement de conformité, dont le récépissé vaut autorisation de dispenser des soins.
Le texte a été enrichi par les travaux conduits en commission par nos collègues députés. La rapporteure a notamment souhaité préciser les pièces obligatoires du dossier de demande d'agrément. Si je considère qu'un renvoi au pouvoir réglementaire eût été suffisant, je comprends sa préoccupation et ne vous proposerai pas de revenir sur cette énumération non exhaustive. Sont ainsi nécessairement adressés au directeur général de l'ARS le projet de santé, les déclarations d'intérêts des membres de l'instance dirigeante ou encore les contrats liant l'organisme gestionnaire à des sociétés tierces.
Surtout, la commission a prévu un schéma en deux temps, avec un agrément provisoire pour une durée d'un an, période au cours de laquelle une visite de conformité peut être organisée par l'ARS et conduire à la remise en cause de cet agrément.
Par ailleurs, soucieuse de renforcer le pouvoir du directeur général de l'ARS dans l'octroi des agréments, la commission a prévu des motifs de refus : par exemple, un dossier de demande d'agrément jugé insuffisant ou, plus grave, des manquements du projet de santé ou de la gestion du centre aux exigences de conformité et à celles du projet régional de santé. Ces motifs devront, selon moi, être précisés par voie réglementaire.
Enfin, apport important de la rapporteure, l'agrément est délivré définitivement et maintenu si et seulement si les informations relatives aux professionnels employés - diplômes et contrats de travail - sont transmises sans délai aux ARS et aux ordres concernés. Il s'agit, par un avis motivé de l'ordre attendu sous deux mois, de pouvoir identifier et signaler les installations de professionnels ayant déjà eu des pratiques peu scrupuleuses.
Je vous proposerai une réécriture partielle de cet article afin d'en clarifier la formulation. Il me semble nécessaire de revoir les étapes d'obtention de l'agrément provisoire ou définitif, comme il est plus pertinent, selon moi, de parler de « retrait » de l'agrément dans le cas où la visite de conformité montrerait des incompatibilités importantes.
Je vous proposerai enfin de renforcer les pouvoirs d'information des ARS après la délivrance de l'agrément, afin de faciliter les contrôles sur les liens d'intérêts ou les contrats liant les organismes gestionnaires à des sociétés tierces. Il me paraît indispensable de prévoir un retrait possible en cas de manquement aux règles applicables aux centres de santé ou relatives à la qualité et à la sécurité des soins.
L'article 1er bis prévoit l'exclusion du dirigeant d'un centre de santé de toute fonction dirigeante au sein de la structure gestionnaire si celui-ci a des liens d'intérêts avec une entreprise délivrant des prestations à la structure. Il s'agit de prévenir certains montages complexes que l'inspection générale des affaires sociales (Igas) avait identifiés. Je vous proposerai, à cet article, une seule modification d'ordre légistique.
L'article 1er ter introduit une obligation d'information des ARS, des caisses primaires d'assurance maladie (CPAM) et des ordres en cas de fermeture d'un centre de santé. Il s'agit de pouvoir assurer la désactivation rapide des numéros Finess - fichier national des établissements sanitaires et sociaux - ou encore des cartes de professionnels de santé (CPS) des praticiens, et de tarir ainsi les flux de facturation. Cet article répond là aussi à des dérives constatées, relatives à des facturations réalisées postérieurement à des fermetures. Je vous proposerai de renforcer ce dispositif d'information obligatoire en prévoyant une information anticipée en cas de fermeture prévue, et de transférer ces dispositions à l'article 1er.
L'article 1er quater prévoit un mécanisme transitoire de « gestion du stock », afin de faire entrer les centres de santé existants dans le nouveau régime d'autorisation. Cette disposition est tout à fait bienvenue : se focaliser sur les nouveaux centres sans chercher à mieux contrôler les centres ouverts n'est pas pertinent.
Sur ce point, je vous proposerai des clarifications du dispositif ménageant des délais distincts pour les agréments provisoires et définitifs, que j'espère plus compatibles avec la charge de travail des ARS.
L'article 2 oblige les centres à se doter d'un comité dentaire ou ophtalmologique, pour ceux qui exercent des activités de ce type. Un tel comité, qui serait chargé de contribuer à la politique d'amélioration de la qualité des soins et à la formation continue des salariés, serait un utile contrepoids au pouvoir du gestionnaire. Il serait naturellement composé des seuls médecins du centre, mais pourrait inviter à ses réunions des représentants des usagers.
L'article 2 prévoit également de faciliter l'identification, par les patients, des professionnels qui les prennent en charge.
Les amendements que j'ai déposés à cet article ne sont que de clarification rédactionnelle.
L'article 2 bis dispose que les salariés des centres sont identifiés par un numéro personnel distinct de celui de la structure dans laquelle ils exercent. Étrangement, en effet, le numéro RPPS - répertoire partagé des professionnels de santé - ne suffit pas toujours à l'assurance maladie pour remonter jusqu'au professionnel exerçant dans un centre de santé. Je vous proposerai simplement d'étendre cette mesure à tous les praticiens, au lieu de la réserver aux seuls salariés, car les centres peuvent également faire appel à des bénévoles.
L'article 4 vise à préciser les conséquences d'un constat de manquement d'un centre de santé à ses obligations légales et réglementaires. Il garantit d'abord que les décisions de suspension et de fermeture prises par le directeur de l'ARS sont transmises sans délai à la Cnam et aux instances ordinales compétentes. Il prévoit ensuite qu'une décision de suspension encore en vigueur ou une décision de fermeture peut, pendant huit ans, justifier le refus de délivrance du récépissé d'engagement de conformité ou de l'agrément demandé par le même organisme gestionnaire, le même représentant légal ou un membre de son instance dirigeante. Il crée enfin un répertoire national destiné à recenser les mesures de suspension et de fermeture prises dans toute la France, à l'attention des services de l'État et de l'assurance maladie. Je vous proposerai des amendements de clarification.
L'article 5 dispose que les gestionnaires des centres de santé font certifier leurs comptes et les transmettent annuellement au directeur général de l'agence régionale de santé. Je ne suis pas certain que cette mesure s'impose pour tous les centres, notamment les plus petits ou ceux qui sont gérés par une collectivité territoriale. Je vous proposerai par conséquent de renvoyer au décret la détermination des critères en fonction desquels s'impose la certification des comptes, ainsi que les modalités de leur transmission.
L'article 6 visait à assortir le manquement à l'obligation de transmission des informations utiles à l'ARS des sanctions financières déjà applicables en cas de manquement à l'engagement de conformité. Il est en réalité satisfait par la rédaction de l'article 8 issue des travaux de l'Assemblée nationale : je vous propose par conséquent de le supprimer.
L'article 7 précise que les centres de santé ne peuvent demander le paiement intégral anticipé des soins qui n'ont pas encore été dispensés. J'y suis favorable, de même qu'à la possibilité malgré tout laissée aux centres de demander un acompte, ce qui peut s'entendre pour des soins complexes et séquencés. Je vous proposerai simplement un amendement rédactionnel.
L'article 8 complète les dispositions relatives aux sanctions financières qui sont à la main du directeur général de l'ARS en élargissant les hypothèses dans lesquelles il peut les prononcer ; en prévoyant un barème gradué, qui serait précisé par voie réglementaire ; en portant la valeur de l'amende maximale de 150 000 à 300 000 euros, et celle de l'astreinte journalière de 1 000 à 2 000 euros. Je vous proposerai d'augmenter encore ces valeurs, respectivement à 500 000 et 5 000 euros, afin de rendre les sanctions plus dissuasives et d'affiner le barème dans lequel le directeur de l'ARS pourra choisir celle qui correspond le mieux aux manquements constatés, en fonction de leur gravité.
Enfin, l'article 9 prévoit la remise d'un rapport relatif aux moyens dont les ARS auront besoin pour remplir ces nouvelles missions. Il est vrai que les moyens de contrôle des ARS sont ce qu'ils sont ; nous l'avons déjà déploré ici même en préconisant de renforcer les contrôles sur les groupes gestionnaires d'établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). Il n'est toutefois pas nécessaire de commander au Gouvernement un rapport de plus pour savoir à quoi nous en tenir sur ce point.
Cette proposition de loi me semble pertinente et nécessaire. Je vous propose simplement de renforcer les modalités opérationnelles de sa mise en oeuvre et de colmater quelques brèches dans le cadre juridique des centres de santé. Cela ne saurait certes tenir lieu de politique ambitieuse de l'offre de soins, mais c'est là un autre débat.
Pour l'heure, je souhaite que ce texte consensuel, qui a été adopté à l'unanimité par l'Assemblée nationale, puisse trouver au Sénat une rédaction permettant, au gré d'une navette constructive, son adoption définitive au Palais-Bourbon.
Enfin, en tant que rapporteur, il me revient de vous proposer un périmètre au titre de l'article 45 de la Constitution.
Je vous propose de considérer que ce périmètre inclut des dispositions relatives au régime d'autorisation des centres de santé ; aux règles relatives au suivi des professionnels exerçant dans ces structures ainsi qu'à l'organisation de leur mission collective de garantie de la sécurité et de la qualité des soins ; à l'identification des praticiens et à la facturation des actes des centres de santé ; aux exigences éthiques applicables aux praticiens et gestionnaires de ces structures ; aux sanctions applicables aux centres de santé et à leurs dirigeants en cas de pratiques contraires au code de la santé publique.
En revanche, ne présenteraient pas de lien, même indirect, avec le texte déposé des amendements relatifs au régime d'autorisation des établissements de santé ou aux règles d'installation et de conventionnement des professionnels de santé.
Mme Catherine Deroche, présidente. - Il convenait en effet de réguler les centres de santé ; certains donnent une image déplorable qui rejaillit sur l'ensemble des structures de ce type.
J'ai envoyé un message de soutien à notre collègue présidente de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, qui a reçu des lettres d'injures et de menaces racistes dans le contexte très passionné que vous savez.
Mme Florence Lassarade. - Je remercie Jean Sol pour ce remarquable travail. Le problème qui se pose dans les centres dentaires ne vient-il pas de la cotation des actes ? La conservation de la dent vivante est sous-valorisée au bénéfice des implants, qui rapportent beaucoup : on en revient à l'époque où, aux États-Unis, à 20 ans, chacun se faisait arracher toutes ses dents. La dent vivante peut être conservée beaucoup plus longtemps qu'on ne le pense, mais à raison d'un travail minutieux et chronophage qui n'est pas valorisé par les tarifs.
M. Olivier Henno. - L'examen de ce dossier nous remet en mémoire nos cours d'économie sur les effets de la concentration capitalistique - c'est d'autant plus frappant qu'il s'agit du domaine de la santé et des soins. Nous connaissons le sujet s'agissant des maisons de retraite ; on observe, dans les centres dentaires, une même remise en cause de la qualité des soins, avec un maillage territorial qui, de surcroît, s'effiloche quelque peu.
Cette proposition de loi répond à toutes ces questions, mais elle y répond partiellement. Se pose, de manière plus profonde, la question de la cotation des actes, en effet, mais aussi celle d'une nouvelle pratique libérale de la médecine : une remise à plat est nécessaire, s'agissant de questions nouvelles, auxquelles on était peu confronté autrefois. Les solutions ne seront pas trouvées par petits bouts : c'est l'organisation de notre système de soins et de santé en général qui est en question.
Mme Laurence Cohen. - Madame la présidente, je soutiens le message que vous avez envoyé à la présidente de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale : l'insulte et les menaces n'ont rien à faire dans nos débats, qui doivent rester courtois et posés.
Je remercie Jean Sol pour la qualité de son travail et pour son écoute.
Je partage les propos de Florence Lassarade.
Pourquoi n'utilise-t-on pas cette proposition de loi pour rétablir l'agrément pour tous les centres de santé ? Cela permettrait de garantir la qualité. La majeure partie des centres de santé, d'ailleurs, se plie à aux exigences de qualité ; ceux qui sont visés sont des bandits. L'agrément pour tous les centres de santé me paraît la meilleure solution, assortie de décrets d'application bien cadrés qui permettraient d'empêcher les dérives.
Je regrette que nous n'ayons pas pu réintroduire à cette occasion un amendement adopté lors d'un précédent texte financier qui visait à réguler l'installation des centres de santé. Or, je considère que si une régulation est nécessaire, elle ne peut pas s'appliquer de la même manière aux structures pluridisicplinaires et à l'exercice individuel.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - Laurence Cohen vient de poser la question que je souhaitais soumettre à notre rapporteur sur l'agrément.
Je remercie Jean Sol pour la clarté de ses explications : nous voterons ses propositions. Ces scandales-là, qui se nourrissent de la souffrance des gens, ne devraient pas exister. On parle souvent des fraudes aux prestations, mais elles sont sans commune mesure avec celles qui sont ici évoquées. Il faut augmenter les pénalités si l'on veut éradiquer le problème.
Mme Victoire Jasmin. - Je félicite notre collègue Jean Sol pour son travail.
Le contrôle de ces activités lucratives, qui entraînent des dérives considérables, sera du ressort des ARS ; mais je doute de leur capacité à contrôler réellement - on l'a vu pour les Ehpad : leurs effectifs sont insuffisants, sans parler de la formation et des référentiels métiers.
Il faut poser la question des diplômes des professionnels qui exercent dans ce genre de structures. Les numéros Adeli devraient être recensés et vérifiés par l'ARS, car en ce domaine aussi prospèrent des pratiques illégales. De manière générale, il faut garantir l'efficacité et la pertinence des contrôles.
Ces centres fonctionnent n'importe comment, parfois avec du personnel sous-qualifiés. Un encadrement est nécessaire, mais il faut veiller aux moyens permettant d'assurer la qualité et la conformité des pratiques.
M. Jean Sol, rapporteur. - Madame Lassarade, la question de la cotation des actes peut en effet se poser, mais cela ne justifie pas les détournements constatés. Les surfacturations réalisées ne l'ont pas été pour solvabiliser une meilleure prise en charge des soins, mais bien pour générer des profits.
Monsieur Henno, les centres de santé sont bel et bien révélateurs d'un phénomène de concentration ; ils sont d'ailleurs plus densément présents dans les zones urbaines. Notez que le directeur général de l'ARS pourra désormais refuser l'agrément en cas d'incompatibilité avec le projet régional de santé, ce qui est un moyen discret mais réel de lutter contre ce phénomène.
Madame Cohen, si l'agrément pour tous les centres a été supprimé en 2009, c'est qu'à l'époque on constatait que les autorités administratives n'étaient pas capables de gérer cette charge - il s'agissait alors de favoriser les installations afin de répondre à un besoin. La charge que représente ce nouvel agrément applicable aux seules activités dentaires et ophtalmologiques est déjà considérable. Sur le sujet de l'installation, nous avançons discrètement...
Madame Doineau, oui, il reste un peu de marge pour rendre les sanctions plus dissuasives ; d'où mon amendement de relèvement du barème. Les ARS sont d'ailleurs demandeuses de tels pouvoirs.
Madame Jasmin, la question de l'effectivité des moyens de contrôle est bel et bien cruciale, concernant notamment les numéros d'identification. La PPL améliore les contrôles des contrats de ces centres, mais aussi le suivi des professionnels en cas de fermeture ; mais il est vrai qu'il faudra que cet effort soit accompagné de moyens supplémentaires et de formations spécifiques pour les personnels des ARS.
Mme Catherine Deroche, présidente. - Ce texte prévoit de rétablir l'agrément pour les centres dentaires et ophtalmologiques, qui ont fait l'objet de très graves dérives. D'autres types de centres de santé auraient-ils pu justifier ce même traitement ?
M. Alain Milon. - La suppression de l'agrément fut en effet une conséquence de la loi HPST ; mais ce qu'une loi défait, une autre peut le rétablir.
Je poserai une question qui n'a pas de lien direct avec le texte : on constate, sur le territoire national, que des groupes financiers à capitaux étrangers sont en train de prendre le contrôle des cliniques de médecine, chirurgie et obstétrique (MCO), des centres de psychiatrie, mais aussi de certains établissements de soins de suite et de réadaptation (SSR) et même, en Île-de-France, de certains centres de santé.
À l'occasion de l'examen de ce texte, ne pourrait-on voter des amendements tendant à limiter cette prise de contrôle ? Je suis très inquiet, car la santé privée, sous forme d'un consortium de groupes, risque un jour d'être plus puissante que la santé publique.
M. Daniel Chasseing. - Je félicite Jean Sol pour cet excellent travail. Certains centres, pas tous, ont pour unique objectif le rendement financier ; il faut encadrer leur activité. J'ai vu des dentistes, venus de pays de l'est de l'Europe, recyclés dans de tels centres.
Mme Annie Le Houerou. - Je m'associe au soutien apporté à la présidente de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale.
Cette proposition de loi est un texte de réaction à plusieurs scandales sanitaires impliquant des centres de santé ; merci pour ce travail très intéressant, monsieur le rapporteur.
L'encadrement législatif est nécessaire ; pour autant, ce texte restera lettre morte si les ARS n'ont pas les moyens, en effectifs, mais aussi en compétences, de le faire appliquer. Les ARS elles-mêmes disent que les compétences en analyse financière sont aujourd'hui insuffisantes au sein de leurs équipes pour pouvoir contrer l'organisation sophistiquée que ces centres de santé mettent en place.
Le texte ne concerne que les centres de santé ophtalmologiques et dentaires. Actuellement, des centres de santé fleurissent sur la base de téléconsultations, avec un encadrement général, et d'autres centres de santé spécialisés peuvent donner lieu à des dérives. Le texte n'y répond pas.
L'amendement du rapporteur précise le sujet de l'identification des professionnels. Il est important d'avoir un numéro unique non seulement pour les centres de soins, mais aussi pour tous les professionnels de santé intervenant dans ces centres, qu'ils soient salariés ou libéraux.
Il faut aussi avoir un répertoire national. Les agréments seront donnés par région, mais les personnes ayant eu un comportement déviant ne doivent pas pouvoir intervenir dans d'autres régions. C'est un garde-fou.
Je fais le lien avec l'autre texte. La loi visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, dite « loi Rist », prévoit un accès direct à des assistants dentaires. Or des assistants dentaires ou des orthoptistes interviennent en amont de l'évaluation médicale, par exemple par un ophtalmologiste. Tout cela doit bien s'articuler pour obtenir un vrai diagnostic médical d'un professionnel et répondre au besoin de soin.
De nombreux textes sont déposés pour répondre à une situation particulière ou à une dérive du système de santé. Nous devons réfléchir plus globalement à notre système de santé, pour répondre aux besoins de soin par une offre de soins et non par des arguments pécuniaires ou lucratifs. Les centres de santé s'implantent dans des zones déjà très bien dotées en offre de soins.
M. Bernard Bonne. - Merci pour cet excellent rapport, qui comporte de nombreuses similitudes avec le rapport sur les Ehpad que nous avions publié avec Michelle Meunier à la suite du scandale Orpéa. Nous sommes dans la même configuration : de grands groupes ne sont là que pour faire de l'argent, et ne s'intéressent qu'à la rentabilité, plutôt qu'aux patients. Cela devient inacceptable. Il faut imposer des limites et des contrôles. Je doute que l'ARS soit prête à remplir la mission que nous lui avons confiée. Elle ne contrôle qu'au sein de la région, or ces groupes sont interrégionaux, voire internationaux, et arrivent à masquer leur rentabilité. S'il n'y a pas un contrôle officiel et organisé des groupes, nous n'arriverons pas à contrôler la totalité de ce qu'ils font.
Il faut aussi limiter l'expansion de ces groupes. Nous avions proposé, pour les maisons de retraite, une limitation à 25 % en moyenne pour les groupes privés.
Je ne comprends pas que les ARS ne s'allient pas avec les ordres des médecins, des dentistes et des pharmaciens pour contrôler ensemble ces structures et se transmettre les informations.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Nous nous associons à la protestation contre les agressions verbales et le courrier reçus par Mme Fadila Khattabi. Ce courrier comprend des insultes racistes et assimile les personnes de communautés étrangères à des trafiquants de drogue. Nous savons d'où peut venir une telle attaque.
Je remercie le rapporteur pour son travail important. Si nous ne visons plus le vote conforme, nous pourrons déposer des amendements sans aucune culpabilité... L'Assemblée nationale a adopté ce texte à l'unanimité, mais avec l'abstention de certains groupes politiques... Il fallait l'améliorer.
Nous avions beaucoup débattu des centres de santé durant la commission d'enquête sur le scandale Orpéa. Des améliorations sensibles et importantes ont été apportées contre les conflits d'intérêts. Mais ce genre de loi n'examine le problème que sous l'angle des abus du secteur privé lucratif. Le secteur mutualiste n'approuve pas certaines préconisations, qu'il juge inadaptées. On légifère pour contenir un secteur privé lucratif qui abuse, mais ce prisme nous empêche de proposer de véritables solutions. Nous allons passer beaucoup de temps à mettre en place l'agrément provisoire, aux dépens des contrôles des ARS, qui doivent être inopinés et fréquents. De plus, cet agrément provisoire pose problème. Affectons plus de temps au contrôle.
Arrêtons de courir derrière le privé lucratif qui trouvera d'autres moyens de s'enrichir. Peut-on faire de l'argent sur les activités de santé ? Nous avons déposé un amendement pour que les centres de santé ne fassent pas partie du secteur privé lucratif ; autrement, ils trouveront toujours un moyen de faire du profit... Tarissons plutôt la source !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. - L'article 2 précise que les centres de santé doivent se doter d'un comité dentaire ou ophtalmologique composé uniquement de médecins du centre et éventuellement de représentants d'usagers. Ne craignez-vous pas que cet entre soi ne mène à rien et empêche tout contrôle effectif ? Il faudrait qu'un représentant extérieur, par exemple de l'ordre, puisse donner son avis.
Mme Catherine Deroche, présidente. - Le syndicat des ophtalmologistes demande que les orthoptistes participent à ce comité, notamment dans un contexte d'accès direct - les patients ignorent parfois qu'ils ont été vus par un orthoptiste et non un ophtalmologiste. Cela sera revu pour la séance publique.
M. Jean Sol, rapporteur. - Monsieur Milon, la place des groupes dans les centres de santé est en réalité réduite ou peu visible. Les centres sont nécessairement gérés par des organismes à but non lucratif. Des associations font l'interface. Certains, comme le groupe Ramsay, développent des centres expérimentaux. Ce texte ne concerne en revanche pas les établissements de santé. Reste que le poids croissant du privé justifierait une réflexion plus globale et un texte spécifique.
Je partage l'analyse de M. Chasseing sur les profits. Nous devons y mettre un terme.
Madame Le Houerou et monsieur Bonne, ce texte va améliorer notre connaissance des pratiques frauduleuses. Il crée un répertoire national des décisions de suspension ou de fermeture de centres. Les ordres professionnels doivent être mieux informés des manquements aux bonnes pratiques professionnelles touchant à la qualité, à la sécurité des soins et à la gestion des risques.
Madame Poncet Monge, effectivement il faut identifier quels contrôles faire, les prioriser et les renforcer. Les centres gérés par les collectivités locales, par exemple, ne doivent pas être prioritaires.
Les bénéfices des centres de santé ne peuvent pas être redistribués. Mais interrogeons-nous également sur les raisons pour lesquelles des organismes non lucratifs, comme la Croix-Rouge, cherchent à céder leurs centres de santé, et plus globalement à réduire leur offre de soins.
Monsieur Vanlerenberghe, selon les personnes auditionnées, le comité médical ou dentaire ne pose pas de difficultés particulières. Il doit être possible d'inclure des professionnels supplémentaires, à condition de le prévoir dans le décret. Il ne nous a en tout cas pas semblé souhaitable que le gestionnaire en soit membre, car celui-ci a vocation à se prononcer sur les pratiques professionnelles, à la qualité des soins et à la gestion des risques.
EXAMEN DES ARTICLES
M. Jean Sol, rapporteur. - L'amendement COM-6 clarifie la procédure d'agrément ainsi que des conditions de refus et de retrait.
Il réécrit une partie de l'article, en vue de de reformuler les dispositions relatives à la procédure d'agrément pour préciser les dispositions relatives au dossier d'agrément et aux motifs de refus, intégrant les refus prévus à l'article L. 6323-1-12 modifié à l'article 4 et clarifier le cadre de la visite de conformité, qui suit l'octroi de l'agrément provisoire et prévoit que les résultats de cette visite, transmis à la caisse locale de l'assurance maladie, peuvent ainsi conduire au retrait de l'agrément ; et de permettre à l'agence régionale de santé d'exiger l'actualisation des éléments demandés dans le dossier d'agrément. En effet, les déclarations d'intérêts ou encore les contrats liant l'organisme gestionnaire à des sociétés tierces peuvent évoluer de manière substantielle après le dépôt de la demande d'agrément. Donnons à l'ARS les moyens de constater des changements de nature à compromettre la bonne gestion du centre de santé et de permettre la consultation par le conseil de l'ordre du projet de santé du centre, car celui-ci, ainsi que ses modifications, donne un éclairage pertinent à l'analyse du contrat de travail dont l'ordre est chargé.
L'amendement COM-6 est adopté. En conséquence, les amendements COM-1 et COM-2 deviennent sans objet.
L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. Jean Sol, rapporteur. - La conservation du dossier médical et la transmission des dossiers en cas de fermeture sont des lacunes importantes dans la gestion et la prise en charge des patients lésés par certains centres de santé déviants. L'amendement COM-7 prévoit une obligation de conservation du dossier médical et de mise à disposition de ce dernier en cas de fermeture, pour prévenir de tels manquements et assurer la reprise des patients.
L'amendement COM-7 est adopté et devient article additionnel.
Avant l'article 1erbis (nouveau)
M. Jean Sol, rapporteur. - L'amendement COM-3 exclut les établissements de santé privés à but lucratif des organismes pouvant créer et gérer un centre de santé. Avis défavorable.
L'amendement COM-3 n'est pas adopté.
M. Jean Sol, rapporteur. - L'amendement COM-8 privilégie une codification au sein de l'article L.6323-1-3 relatif aux organismes gestionnaires des centres de santé.
L'amendement COM-8 est adopté. En conséquence, l'amendement COM-4 devient sans objet.
L'article 1er bis est ainsi rédigé.
M. Jean Sol, rapporteur. - L'amendement COM-9 supprime l'article 1er ter au profit d'un transfert à l'article 1er.
L'amendement COM-9 est adopté.
L'article 1er ter est supprimé.
M. Jean Sol, rapporteur. - L'amendement COM-10 corrige des erreurs de référence.
L'amendement COM-10 est adopté.
M. Jean Sol, rapporteur. - L'amendement COM-11 encadre l'application transitoire du régime d'agrément aux centres existants. Il prévoit que, faute du dépôt du dossier de demande d'agrément dans le délai de six mois, le centre de santé n'est plus autorisé à dispenser des soins dentaires ou ophtalmologiques, alors qu'aucune conséquence n'est prévue en cas d'absence d'engagement dans la procédure d'agrément. Il prévoit également, pour la gestion du stock, un délai de trente mois à l'issue duquel les centres actuels ne pourront continuer de dispenser des soins dentaires ou ophtalmologiques qu'à la condition d'un agrément définitif. Les ARS disposeront ainsi d'un délai de deux ans après le dépôt du dernier dossier de demande d'agrément pour délivrer ce dernier.
L'amendement COM-11 est adopté.
L'article 1er quater est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Après l'article 1erquater (nouveau)
M. Jean Sol, rapporteur. - L'amendement COM-12 interdit la publicité en faveur des prestations délivrées.
L'amendement COM-12 est adopté et devient article additionnel.
M. Jean Sol, rapporteur. - L'amendement COM-13 précise le rôle et le fonctionnement du comité médical ou dentaire.
L'amendement COM-13 est adopté.
M. Jean Sol, rapporteur. - L'amendement COM-14 précise la rédaction des dispositions relatives à la bonne information des patients sur les professionnels qui concourent à leur prise en charge.
L'amendement COM-14 est adopté.
L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. Jean Sol, rapporteur. - L'amendement COM-15 élargit aux bénévoles des dispositions relatives à l'identification personnelle des praticiens des centres de santé.
L'amendement COM-15 est adopté.
L'article 2 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 3 (Supprimé)
L'article 3 demeure supprimé.
M. Jean Sol, rapporteur. - L'amendement COM-5 oblige la publication, sur le site de l'ARS, des décisions de sanction financière que prend son directeur général. Une telle publication est actuellement facultative. J'y suis plutôt favorable.
L'amendement COM-5 est adopté.
M. Jean Sol, rapporteur. - L'amendement COM-16 clarifie la disposition relative à l'information de la Cnam et des ordres des décisions de suspension et de fermeture de centres.
L'amendement COM-16 est adopté.
M. Jean Sol, rapporteur. - L'amendement COM-17 est rédactionnel et de clarification.
L'amendement COM-17 est adopté.
L'amendement rédactionnel COM-18 est adopté.
L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 5 (nouveau)
L'amendement de clarification COM-19 est adopté.
L'article 5 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. Jean Sol, rapporteur. - L'amendement COM-20 supprime l'article 6, qui est satisfait.
L'amendement de suppression COM-20 est adopté.
L'article 6 est supprimé.
Article 7 (nouveau)
L'amendement rédactionnel COM-21 est adopté.
L'article 7 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. Jean Sol, rapporteur. - L'amendement COM-22 prévoit l'information des instances ordinales des manquements constatés compromettant la qualité et la sécurité des soins.
L'amendement COM-22 est adopté.
M. Jean Sol, rapporteur. - L'amendement COM-23 relève les valeurs maximales de l'amende administrative et de l'astreinte journalière.
L'amendement COM-23 est adopté.
L'amendement de clarification rédactionnelle COM-24 est adopté.
L'article 8 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. Jean Sol, rapporteur. - L'amendement COM-25 vise à supprimer l'article 9, qui est une demande de rapport.
L'amendement de suppression COM-25 est adopté.
L'article 9 est supprimé.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Tableau des sorts
Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé - Examen du rapport et du texte de la commission
Mme Catherine Deroche, présidente. - Nous passons à l'examen de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Cette proposition de loi a été déposée en octobre dernier par la députée Stéphanie Rist, et adoptée par l'Assemblée nationale le 19 janvier. Affichant l'ambition d'améliorer l'accès aux soins par la confiance entre professionnels de santé, le texte a au contraire opposé ces dernières semaines les professions entre elles et suscité d'importantes inquiétudes. Très attendu des professions paramédicales dont il valorise les compétences, il suscite, à l'inverse, la colère des syndicats de médecins, qui jugent que certaines de ses dispositions désorganisent le parcours de soins, présentent un risque de dégradation de la qualité des prises en charge et, in fine, de perte de chances pour les patients.
Dans ce contexte tendu, le Gouvernement a jugé bon d'inscrire cette proposition de loi à l'ordre du jour des travaux du Sénat dès le 14 février prochain, laissant à la commission moins de deux semaines pour examiner un texte sensible, largement amendé en séance publique à l'Assemblée nationale. Le Gouvernement profite d'un véhicule législatif d'initiative parlementaire pour insérer diverses dispositions sans étude d'impact, sans cohérence d'ensemble ni vision à long terme. L'examen intervient, de surcroît, concomitamment aux négociations de la prochaine convention médicale et contribue à en aggraver l'âpreté. Le moment aurait-il pu être plus mal choisi ? Il est difficile de l'imaginer.
Un mot enfin de la seconde ambition : l'amélioration de l'accès aux soins. Ne nous berçons pas de chimères, ce texte oppose à un problème structurel des réponses parcellaires et ne permettra pas de résoudre les graves difficultés auxquelles certains de nos concitoyens sont confrontés. La démographie des médecins ne va pas s'améliorer de sitôt, les professionnels de santé mettront plusieurs années avant de s'approprier de telles innovations et les patients pourront se sentir désorientés.
Malgré ces vents contraires, il nous faut bien examiner ce texte afin de faire entendre la voix de notre commission. Je vous proposerai une approche équilibrée, consistant à adopter les mesures de ce texte les mieux à même de fluidifier le parcours du patient et de valoriser les compétences des professionnels de santé, tout en l'amendant chaque fois que cela apparaît nécessaire pour garantir la sécurité des soins comme pour conserver le rôle central du médecin dans la coordination et le suivi des patients. C'est sur cet équilibre que se construit la confiance entre les professionnels de santé. Mais celle-ci ne se décrète pas par la loi, elle se construit dans le temps.
Le premier volet de ce texte, sans doute le plus conflictuel, concerne l'accès direct à trois professions paramédicales exerçant aujourd'hui sur prescription dans le cadre du parcours de soins : les infirmiers en pratique avancée (IPA), les masseurs-kinésithérapeutes et les orthophonistes.
L'article 1er entend revaloriser la profession d'IPA en l'autorisant, d'abord, à prendre en charge les patients sans adressage préalable d'un médecin, à l'hôpital, en établissement médico-social ou en ville, lorsque l'IPA exerce en structure d'exercice coordonné. Il assortit cette autorisation de conditions permettant d'assurer l'information du médecin traitant. Enfin, il autorise la primo-prescription par les IPA de produits et prestations soumis à prescription médicale obligatoire.
Bénéficiant d'une formation de deux ans supplémentaires et d'une expertise dans l'un des cinq domaines d'intervention aujourd'hui reconnus, les IPA apportent, à l'hôpital comme en ville, un appui précieux aux équipes de soins que les auditions ont permis de confirmer. Autorisée en 2018, la profession n'a connu jusque-là qu'un développement limité : la France ne comptait l'été dernier qu'environ 1 700 IPA et moins de 200 d'entre eux exerçaient en libéral. Le nombre insuffisant de patients confiés par les médecins constitue l'un des obstacles au développement de la profession les plus fréquemment mis en avant.
Si contrairement à l'ambition affichée, ces dispositions ne résoudront donc pas, à court terme, les difficultés d'accès aux soins dans nos territoires, elles contribueront toutefois à renforcer l'attractivité et la reconnaissance de la profession comme à faciliter les prises en charge. C'est pourquoi je vous proposerai de les adopter, tout en veillant à ce que l'accès direct s'exerce en étroite coordination avec les autres professionnels de santé et avec le médecin en le réservant, en ville, aux structures les plus intégrées qui partagent une patientèle commune. La primo prescription de produits et prestations à prescription médicale obligatoire ne pourra, elle, être autorisée qu'après avis de l'Académie nationale de médecine et de la Haute Autorité de santé (HAS).
L'article 1er vise également à restructurer la profession en créant deux catégories d'IPA, spécialisés et praticiens. Ces dispositions n'étant pas adaptées au modèle français de pratique avancée infirmière tel qu'il s'est développé ces dernières années, et les organisations d'IPA elles-mêmes y étant opposées, je vous proposerai de les supprimer.
Les articles 2 et 3 visent à permettre également aux masseurs-kinésithérapeutes et aux orthophonistes d'exercer sans prescription médicale préalable, dans les mêmes conditions que pour les IPA. Là encore, je vous proposerai de mieux encadrer l'accès direct envisagé, en le réservant en ville aux structures les plus intégrées. Dans le même objectif et pour répondre aux inquiétudes exprimées par les médecins, je vous soumettrai également un amendement proposant de réduire le nombre maximal de séances de masso-kinésithérapie accessibles sans diagnostic médical préalable, porté à dix en séance publique à l'Assemblée nationale : il me semble préférable de le ramener à cinq.
Un second volet de la proposition de loi vise à étendre les compétences des professionnels de santé.
Ainsi, l'article 1er bis autorise les infirmiers à prendre en charge la prévention et le traitement de plaies, y compris par la prescription d'examens complémentaires et de produits de santé définis, et l'article 2 bis autorise les masseurs-kinésithérapeutes à prescrire une activité physique adaptée. Je vous proposerai de mieux encadrer ces dispositions, notamment en prévoyant que la HAS rende un avis sur le périmètre et les conditions des prescriptions envisagées.
L'article 4 entend confier de nouvelles compétences à des assistants dentaires dits de niveau II. Leurs missions, actuellement circonscrites à de la pure assistance du praticien, seraient étendues à une contribution active aux actes d'imagerie à visée diagnostique, aux actes prophylactiques, aux actes orthodontiques et à des soins post-chirurgicaux. Sous la responsabilité et le contrôle effectif du chirurgien-dentiste, l'assistant dentaire pourrait ainsi réaliser du détartrage, enlever des points de suture sans difficulté... L'article 4 ne crée donc pas un nouveau professionnel, mais distingue deux paliers au sein de la profession d'assistant dentaire, créant ainsi une perspective d'évolution de carrière pour ce métier.
Les compétences au coeur de l'article devront être acquises à l'issue d'une formation spécifique dont la maquette est discutée par la branche professionnelle et le ministère. Afin de bien préciser que seuls les assistants dentaires de niveau II pourront réaliser les nouvelles missions, je vous proposerai de conditionner l'exercice de ces activités à l'obtention du certificat de qualification professionnelle appropriée.
L'article 4 bis complète le dispositif par un encadrement bienvenu. Afin d'éviter toute dérive, il vise à limiter le nombre d'assistants dentaires de niveau II, dans une structure, au nombre de chirurgiens-dentistes. Certains centres de santé dentaire, peu scrupuleux, pourraient être tentés d'utiliser le biais de ces assistants dentaires pour réduire encore le nombre de praticiens exerçant effectivement dans les centres. Afin de renforcer ce contrôle, je proposerai un amendement pour que cette limitation s'applique sur un site d'exercice et non à l'échelle de la structure, et au regard du nombre de chirurgiens-dentistes effectivement présents.
D'autres articles élargissent les compétences reconnues à certains professionnels de santé sans modification en profondeur des professions.
Les pédicures-podologues se voient ainsi reconnaître par l'article 4 septies le pouvoir de prescription d'orthèses plantaires, de gradation du risque podologique et de prescription des séances de soins adaptés en cas de diabète. Ces compétences permettront de fluidifier le parcours de soins des patients et d'éviter les retards de prise en charge du risque podologique pour les patients diabétiques, que la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) avait, par exemple, constatés dans un rapport de 2017. Je vous proposerai donc d'adopter cet article.
L'article 4 octies permet aux opticiens-lunetiers d'adapter une prescription médicale de verres correcteurs ou de lentilles de contact lors de la première délivrance de ces dispositifs médicaux, avec l'accord écrit du praticien prescripteur. Je vous proposerai d'adopter l'article amendé afin de prévoir que les conditions d'adaptation sont précisées par décret. Tel est le cas pour les adaptations de prescription qu'ils peuvent déjà réaliser dans le cadre d'un renouvellement d'ordonnance.
Enfin, l'article 4 terdecies autorise, à titre expérimental, les pharmaciens biologistes à pratiquer des prélèvements cervico-vaginaux pour le dépistage du cancer du col de l'utérus. Je vous proposerai de soutenir cet article, avec le regret qu'il ne s'agisse là que d'une expérimentation. Les biologistes médicaux, qu'ils soient pharmaciens ou médecins, détiennent, en effet, des niveaux de qualification équivalents. Lever cette différence de traitement dans leurs compétences me paraît être souhaitable afin de renforcer les efforts dans la prévention de ce cancer.
Une troisième partie de la proposition de loi concerne l'organisation du parcours de soins.
L'article 4 ter vise à permettre aux sages-femmes, aux chirurgiens-dentistes et aux infirmiers de concourir à la permanence des soins ambulatoires (PDSA). Je vous proposerai d'adopter cet article, susceptible d'améliorer l'accès aux soins non programmés pendant les heures de fermeture de cabinet, après suppression des dispositions proclamant un principe de responsabilité collective. Cette notion ambiguë, dont le ministère a peiné à nous expliquer la portée, suscite l'inquiétude des professionnels.
L'article 4 quater définit la notion d'engagement territorial des médecins et prévoit que celui-ci est valorisé dans des conditions définies par les conventions médicales. Ces dispositions apparaissent dénuées de portée dans la mesure où les partenaires conventionnels sont d'ores et déjà en mesure de rémunérer la participation des médecins à la permanence des soins, la modération tarifaire des spécialistes de secteur 2 ou l'exercice coordonné. Elles interfèrent inutilement avec les négociations en cours. Aussi, je vous soumettrai un amendement visant à les supprimer.
En revanche, et pour rendre du temps médical utile aux médecins, je vous proposerai, avec Élisabeth Doineau, un amendement visant à lutter contre les rendez-vous médicaux non honorés. Notre dispositif propose de confier à la convention médicale le soin de déterminer une indemnisation du médecin à qui un patient fait faux bond sans raison légitime. Cette indemnisation serait mise à la charge du patient responsable afin de responsabiliser les assurés sociaux. La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) pourra, par exemple, déduire la somme des remboursements ultérieurs versés au patient.
Je vous proposerai également d'adopter l'article 4 quinquies, visant à faciliter la mise à jour des protocoles de coopération nationaux par le comité national des coopérations interprofessionnelles et des protocoles nationaux, après consultation des conseils nationaux professionnels concernés et avis de la HAS.
Enfin, deux articles concernent le statut de certaines professions et leurs conditions d'exercice.
L'article 4 sexies modifie les conditions de qualification permettant l'exercice des professions de préparateur en pharmacie et pharmacie hospitalière. Ces professions ne sont accessibles, en droit, qu'à la personne titulaire du brevet professionnel. Or, un diplôme d'études universitaires scientifiques et techniques (Deust) de préparateur ou technicien en pharmacie a déjà été créé dans une optique de montée en qualification de la profession. Je vous invite à voter cet article dont l'adoption est nécessaire pour permettre aux étudiants déjà engagés dans le Deust de pouvoir exercer à la fin de leur cursus.
De même, je vous proposerai d'adopter l'article 4 decies, qui vise à reconnaître les assistants de régulation médicale (ARM) comme professionnels de santé et devrait contribuer à améliorer l'attractivité d'une profession concentrant d'importants besoins de recrutement.
Je vous propose donc d'aborder ce texte de manière pragmatique. Il convient de retenir les mesures qui apportent des améliorations attendues sur le terrain par les professionnels de santé, mais de mieux encadrer, en revanche, les dispositions qui risquent de désorganiser inutilement le système de santé. Ainsi amendée, je vous invite à adopter la proposition de loi.
Il me revient enfin de vous proposer un périmètre pour l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution. Je considère qu'il comprend des dispositions relatives aux pratiques avancées des auxiliaires médicaux, aux conditions d'exercice des professions de santé, aux compétences des professionnels de santé, et aux relations entre les professionnels de santé et l'assurance maladie.
En revanche, j'estime que n'auraient aucun lien, même indirect avec le texte déposé, des amendements relatifs aux régimes sociaux et fiscaux s'appliquant aux professionnels de santé, ainsi qu'à l'organisation de l'hôpital et aux statuts des structures d'exercice.
Mme Catherine Deroche, présidente. - Nous avions demandé le report de l'examen du texte au Sénat, car le débat est hystérisé ; le Gouvernement nous l'a refusé. La loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) de 2023 comprend un article sur l'expérimentation de l'accès direct aux IPA. On lance une expérimentation en décembre pour la pérenniser en janvier !
On nous fait également revenir ici sur des questions abordées il y a quelques mois seulement, lors des débats relatifs au PLFSS. L'article 35 de la LFSS prévoit déjà qu'une négociation conventionnelle s'attache à répondre aux besoins d'organisation des soins sur le territoire.
Dans ce contexte particulier, nous avons trouvé un bon équilibre par rapport aux demandes des professionnels de santé, notamment quant au risque de désorganisation locale du système de soins. Au lieu de permettre l'accès direct aux professions paramédicales au sein des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), nous préférons le limiter aux structures les plus intégrées : maisons de santé pluriprofessionnelles, centres de santé, équipes de soins. Nous avons répondu à de nombreuses interrogations.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - Je salue le travail de la rapporteure, réalisé dans un temps contraint. Elle a rencontré de nombreux professionnels, qui nous ont éclairés sur leur ressenti sur cette proposition de loi, partie d'une bonne intention, mais qui intervient dans un contexte de démographie médicale déclinante.
Cette proposition de loi a été adoptée à une très large majorité à l'Assemblée nationale. Elle nous est imposée au moment où se déroulent les négociations conventionnelles avec les médecins. Même si ce texte n'est pas le seul sujet de discorde - il y a aussi la revalorisation des consultations -, il a été un détonateur. Je me suis longuement interrogée sur l'opportunité de l'examiner au moment des négociations entre la Cnam et les médecins, alors que celles-ci redéfinissent pour cinq ans leurs conditions d'exercice et de rémunération. La médecine de ville supporte de moins en moins bien le contexte actuel, avec la permanence des soins, l'installation en zone sous-dense, les mesures coercitives... Tout est organisé pour décourager les médecins, les futurs médecins et les vocations en médecine générale. Toutes ces propositions de loi accentuent le climat délétère pour la médecine de ville. Une pause s'impose.
Nous avons deux attentes : améliorer l'accès aux soins, dégradé sur de nombreux territoires, et valoriser les compétences des professionnels de santé paramédicaux. J'avais déposé des amendements au projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) en ce sens. La deuxième attente répond-elle à la première ? Lorsqu'on manque de médecins sur un territoire, on manque aussi souvent d'infirmières, de masseurs-kinésithérapeutes et d'orthophonistes... Il aurait été plus judicieux d'appeler la proposition de loi autrement.
L'année dernière, le Comité de liaison des institutions ordinales (Clio) a mobilisé les ordres professionnels et a appelé à approfondir l'interprofessionnalité. Il a proposé deux axes complémentaires : avec un médecin traitant, développer les partages d'actes et d'activité en équipes de soins primaires dans chaque territoire ; sans médecin traitant, confier aux autres professionnels de santé l'orientation du patient dans le système de santé en assurant une première prise en charge. Nous avions salué cette avancée presque inattendue, montrant une vraie concertation entre les professionnels de santé.
Dans le cadre des PLFSS, j'ai proposé de valoriser les compétences des sages-femmes, des IPA et des professions paramédicales. Cette reconnaissance doit leur être accordée, en insistant sur la pluridisciplinarité, la coordination des soins, l'appartenance à une équipe de soins primaires. La confiance ne s'improvise pas, mais se construit autour des responsabilités de chacun.
J'ai souvent plaidé la cause des orthophonistes. Tous les conseils départementaux font réaliser un bilan de santé des enfants en moyenne section de maternelle. En cas de problèmes orthophoniques, le médecin de protection maternelle et infantile (PMI) renvoie au médecin traitant pour obtenir une ordonnance. Ne peut-on pas faire sauter cette visite, pour réduire le nombre de consultations ? De même pour un adulte : les difficultés sont souvent déjà identifiées lors d'examens médicaux en cas d'accident ou de maladies dégénératives. Fluidifions et simplifions la prescription pour se rendre chez l'orthophoniste, de même que chez d'autres professions.
J'ai déposé avec Mme Imbert un amendement sur les consultations non honorées. Selon les médecins, cela correspondrait à 4 000 équivalents temps plein (ETP). Il est important de responsabiliser les patients. Il est inacceptable que certains patients prennent plusieurs rendez-vous et n'en honorent pas une partie sans s'excuser.
M. Bernard Jomier. - Mon intervention vaudra explication sur les amendements. Je remercie la rapporteure qui s'est attelée à une mission impossible : déminer un champ de mines, en respectant les uns et les autres. Ne nous y trompons pas, c'est un texte gouvernemental : le Gouvernement déclare la priorité sur une proposition de loi de la rapporteure générale de l'Assemblée nationale, qui a une filiation avec le premier texte de Stéphanie Rist déposé lors de la législature précédente. Le Gouvernement, depuis 2017, procède dans un irrespect total des corps intermédiaires, et encourage à légiférer sur un sujet particulièrement sensible alors que des négociations sont en cours. En conséquence, l'ensemble des organisations professionnelles, quelle que soit leur sensibilité, ont quitté la table. Les négociations conventionnelles s'arrêteront, règlementairement, en avril : il suffisait de reporter de deux à trois mois ce texte, que le Sénat l'examine en mai, pour que nous puissions délibérer dans des conditions acceptables. Le Gouvernement a refusé, malgré la demande de la présidente de la commission...
Mme Catherine Deroche, présidente. - ... et du président du Sénat !
M. Bernard Jomier. - Le Gouvernement s'entête donc à semer le désordre dans un irrespect total des organisations et de la vie conventionnelle. C'est un grave problème. Au lieu de vouloir résoudre les difficultés, il monte les professions les unes contre les autres, faisant l'inverse de notre travail ; je remercie tous les sénateurs d'avoir adopté la loi sur le ratio patients-soignants à l'hôpital. Toutes les professions hospitalières, qui n'étaient initialement pas toutes favorables au texte, ont fini par le soutenir grâce aux débats.
Il y a deux façons de faire de la politique : rassembler autour de la résolution d'un problème, ou diviser. Le Gouvernement a fait le choix irresponsable de diviser alors que la pénurie de médecins appelle à une meilleure utilisation des compétences de chacun. On ne gère pas la pénurie par la désorganisation, au contraire !
Nous ne voulons pas nous poser en défenseur des uns ou des autres, mais nous défendons la meilleure qualité de soins pour notre population. Cela passe par une utilisation optimisée des compétences.
Nous suivrons trois principes sur ce texte : d'abord, le respect d'un haut niveau de compétences du professionnel auquel on confie une mission de santé. Sans un tel niveau, nous n'accepterons pas que de nouvelles missions leur soient confiées. Or ce texte fait quasiment l'impasse sur la formation, alors que c'est un sujet essentiel. Ensuite, nous sommes favorables au partage des tâches. Enfin, nous voulons maintenir les parcours de soins. Ces trois principes sont indissociables.
Il faut se rappeler l'historique de la construction de notre système de santé. Il y a une filiation entre les propositions de loi Rist 1 et 2. Lors des débats de la loi Rist 1, Olivier Véran voulait recréer une profession intermédiaire d'officiers de santé. Ils ont été créés lors de la Révolution française, dans une volonté progressiste. Il y avait alors une pénurie de médecins. Mais cela a finalement créé un système à deux vitesses. On y a renoncé, car cela a encouragé des sortes de charlatanisme, faute de bien contrôler localement. Ensuite, cela risque de créer une distinction entre la ville, qui concentrerait les médecins, et la campagne avec des officiers de santé. Nous avons déjà soulevé ce risque pour la téléconsultation : certains auraient le droit de voir un médecin, tandis que d'autres seraient contraints de voir tel ou tel professionnel de santé derrière un écran. Malgré la pénurie, on ne peut inscrire ce type d'évolution dans l'organisation de notre système de soins. À l'époque, Olivier Véran avait reculé en raison de la forte contestation des professionnels de santé.
Nous ne nous opposerons pas à l'article 1er, mais ce dernier évoque des IPA spécialisés ou des praticiens pour lesquels il n'y a aucune définition nulle part. Nous souscrivons à la proposition de la rapporteure d'écarter le concept d'IPA praticien. L'alinéa 5 sur la détermination des compétences et de la formation proposées est insuffisant. Des premiers modèles d'IPA existent, comme les infirmières Asalée. Auparavant, il y avait des infirmières en psychiatrie, très utiles, mais la formation a été arrêtée... Nous sommes favorables au développement des IPA à condition qu'ils aient droit à une formation à la hauteur de leurs missions.
À l'article 2, nous ne comprenons pas ce référentiel de dix séances : est-il déterminé au doigt mouillé, ou fait-il référence à des référentiels de qualité de prise en charge ? Il existe des référentiels, par exemple pour la prise en charge d'une entorse de cheville par un masseur-kinésithérapeute, mais qui ne sont ni de cinq ni de dix... Si le législateur envoie le message qu'en cas de mal de dos, on a le droit à dix séances alors que cela n'a aucune utilité, la demande de séances risque d'exploser.
À l'article 2 bis, la loi donne des responsabilités de prescription d'actes en précisant qu'ils ne sont pas remboursés. Cela crée un système à deux vitesses : pour un même acte, si celui-ci est prescrit par un médecin, il est peut être remboursé sous certaines conditions, mais il ne l'est pas s'il est prescrit par un masseur-kinésithérapeute. Ce système est injuste. Nous affaiblissons le périmètre de la sécurité sociale. Nous ne mettrons pas le doigt dans ce dispositif. S'il est prescrit et donc médicalement utile, l'acte doit être remboursé. Mais nous ne pouvons pas supprimer cette absence de remboursement par amendement, l'article 40 de la Constitution nous l'interdisant. Je vois bien l'intérêt du Gouvernement...
Les orthophonistes ont un haut niveau de compétence. Ils effectuent des diagnostics, font le traitement, et s'inscrivent dans le parcours de soins en transmettant les informations au médecin traitant. Il n'y a aucune raison de ne pas leur accorder l'accès direct. L'article 3, qui le limite à certains types de structures, est injuste ; mais supprimer les restrictions est irrecevable.
Aux articles 4 ter et 4 quater, nous refusons que les soignants aient une responsabilité collective. Ce principe est flou juridiquement. Par contre, nous sommes favorables à une responsabilité individuelle qu'il faut organiser plus finement que la précédente obligation qui a été abrogée. Les CPTS, les ordres départementaux et les agences régionales de santé (ARS) doivent mettre en place un dispositif. L'ensemble des professionnels doivent, dans le cadre de leur mission, participer à la PDSA.
Nous ne sommes pas favorables à l'article 4 duodecies qui est une demande de rapport extrêmement provocante envers les médecins traitants.
Mme Laurence Cohen. - Je remercie la rapporteure de son important travail, sérieux, son souci de la mesure dans un contexte miné. Je suis de plus en plus dubitative, voire en colère, contre la politique du Gouvernement de ne pas prendre à bras-le-corps les problèmes de notre système de santé, qui est malade. Au lieu d'engager une réforme globale, il pense régler les soucis en téléguidant des propositions de loi qui complexifient, voire qui aggravent le problème. Ce n'est pas la première proposition de loi concernée. Parlementaires, nous ne pouvons nous dérober et sommes obligés de l'examiner et de l'améliorer. Nous ne pouvons continuer ainsi.
Je vois une analogie avec notre commission d'enquête sur la pénurie de médicaments. Pour le Gouvernement, c'est la course à l'échalote, avec des déclarations quotidiennes pour prétendre que le problème sera réglé dans trois mois... Il est irresponsable et manque d'anticipation.
Nous soutenons les IPA. Le groupe CRCE était favorable à l'expérimentation de l'accès direct. Les professionnels se sont engagés, notamment les orthophonistes. Le Sénat a déjà voté un amendement proposant cet accès direct. Pourquoi différencier les orthophonistes, dont le haut niveau de compétence est reconnu, selon leur lieu d'exercice ? C'est incompréhensible. J'aurais aimé que la rapporteure dépose un amendement pour y remédier.
Pourquoi le législateur imposerait-il un nombre de séances remboursées ou donnant lieu à accès direct ? C'est une ingérence dans le professionnalisme de chaque profession. On marche sur la tête...
S'agissant de l'article 4, un travail a été réalisé par les assistants dentaires et les dentistes, pour créer une formation particulière. Il y a une demande pointue soutenue par les dentistes. Répondons-y.
Je ne comprends pas l'amendement de la rapporteure sur le dédommagement des médecins voyant leurs rendez-vous non honorés. Ce problème concerne aussi les orthophonistes, les kinésithérapeutes... Pourquoi, une nouvelle fois, les médecins sont-ils au-dessus des paramédicaux ? C'est discriminatoire, et je ne soutiendrai pas cette proposition pour cette raison, sauf si on l'étend à tous les professionnels.
M. Philippe Mouiller. - Je remercie Corinne Imbert pour son travail. À mesure que l'examen du texte approche, les tensions montent de plus en plus fort. Ce ne sont pas les meilleures conditions pour travailler.
Comme Bernard Jomier, je critique la méthode employée. Certains sujets ont été traités lors de l'examen du PLFSS, renvoyés sur des conventions ou sur ce texte. Il y a un problème de pilotage. Je m'inquiète de la vision du Gouvernement sur la réorganisation du système de santé et sur la prise en charge, ainsi que de sa méthode. Il n'écoute pas les acteurs et renvoie au Parlement la responsabilité de régler des situations qui débordent le simple enjeu législatif. Il manque une vision globale.
Je ne comprends pas l'irrecevabilité au titre de l'article 40 de nos amendements sur les infirmiers anesthésistes diplômés d'État (IADE) : nous ne prévoyons pas de dépenses supplémentaires puisque le périmètre et la formation sont les mêmes. Dans le PLFSS, nous avions voté il y a deux ans le statut, la revalorisation et la reconnaissance des IADE. Cette proposition de loi constitue donc un recul. Ces pratiques sont réalisées quotidiennement sans être reconnues. Les négociations avec le Gouvernement patinent ; il passe de promesse en promesse, de texte en texte, et nous n'arrivons pas à les accompagner. Nous revenons en arrière dans les négociations.
Cette proposition de loi oppose les médecins aux autres professionnels de santé, et interroge beaucoup les élus ruraux sur le fait d'avoir des pratiques différentes selon les territoires.
La responsabilité, qu'elle soit individuelle ou collective, est un sujet fondamental. Qui est responsable de quoi ? Il faudrait étudier ce sujet plus en détail et notamment avec les assureurs.
J'entends la proposition sur les rendez-vous non honorés qui répond à un besoin, mais quelle capacité avons-nous à le faire ? Comment savoir quelles sont les raisons de l'annulation ?
Mme Florence Lassarade. - Nous nous battons sur les IPA, mais leur nombre est marginal. Je serais ravie que nous ayons des IPA partout. Nous nous battons pour une chimère. Depuis plus d'un mandat, on ne forme pas plus d'infirmiers, de puéricultrices ou de médecins. Je ne comprends pas le sens de cette loi.
Le problème des rendez-vous non honorés a toujours existé. À l'hôpital, le médecin s'ennuie durant ce temps ; en libéral, cela permettait de recevoir plus de patients en urgence, mais ce n'est plus possible avec Doctolib. Par quel moyen déterminer les rendez-vous non honorés ? Certains affabulateurs ne risquent-ils pas de déclarer des rendez-vous non honorés et de frauder ?
Revaloriser la consultation de 1,5 euro comme la Cnam le propose dans les négociations conventionnelles est une provocation, selon les nombreux médecins qui m'écrivent. Je suis tentée de ne pas voter ce texte malgré le travail remarquable de la rapporteure, car c'est une insulte à toutes les professions médicales.
Pour désengorger les listes d'attente des orthophonistes, il faudrait supprimer les méthodes globale et semi-globale, qui ont fait des dégâts pendant des dizaines d'années. Les pédiatres craignent cependant l'accès direct chez l'orthophoniste sans examen de l'enfant par un médecin.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. - Je remercie la rapporteure de son travail pragmatique. Je partage la position de beaucoup sur l'approche fractionnée de l'accès aux soins que prévoit cette proposition de loi. Le Gouvernement n'aurait-il pas de vision ? À lui de répondre. Le Conseil national de la refondation s'est saisi du sujet, notamment localement. De nombreuses réunions devraient aboutir à des propositions qui pourraient nourrir une loi santé et une refondation du système de santé. Le procès d'intention est injuste.
Ce texte part d'une bonne intention, déjà affirmée dans la loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST). Roselyne Bachelot, dans ses mémoires, regrette d'être passée à côté de l'accès partagé aux soins par des professionnels de santé. Certes, il y a eu de nombreux débats. Mme Bachelot est pharmacienne... Les médecins ont contesté son approche.
Je regrette que depuis le temps que le sujet est porté dans les PLFSS, et qu'on a déploré le manque de médecins, on n'ait pas assez pris en compte les autres professionnels, qui se sont beaucoup développés : le nombre de masseurs-kinésithérapeutes a doublé en dix ans, il en est de même pour le nombre d'infirmiers. Mettons à contribution tous ces professionnels compétents dans leur domaine. Doit-il y avoir une prescription médicale à chaque fois ?
Quand y a-t-il un diagnostic préalable lorsque vous allez chez le kinésithérapeute ? En général, le médecin vous demande combien de séances vous voulez... Il ne donne aucune recommandation sur la méthode de soins. Qu'apporte le médecin dans ce cas ?
M. Daniel Chasseing. - Je félicite la rapporteure qui a apporté des modifications importantes à ce texte par un travail constructif et pragmatique.
Supprimer la distinction entre IPA spécialisé et IPA praticien est de bon sens.
Un mal de dos ne doit pas inciter systématiquement à donner une ordonnance de kinésithérapie, car il peut parfois être nécessaire de réaliser un bilan préalable. Je suis favorable à ramener l'accès direct au masseur-kinésithérapeute sous un plafond de cinq séances.
Les médecins ne sont pas bien formés à l'orthophonie, j'approuve la proposition d'accès direct aux orthophonistes.
Je ne suis pas favorable à la prescription par les IPA ni à la responsabilité collective. Si le médecin délègue une responsabilité à l'IPA, il doit être responsable avec lui.
Je suis d'accord avec les réformes concernant les assistants dentaires, les pédicures-podologues et les opticiens-lunetiers. Les pharmaciens sont très présents et sont favorables à un accès direct aux soins. J'ai déposé un amendement pour qu'ils puissent réaliser un examen cytobactériologique des urines, le transférer au médecin, traiter la cystite et qu'ils soient remboursés.
Les IPA sont précieux pour les médecins et le patient, à condition qu'ils effectuent un travail pour lequel ils ont été formés : répondre aux besoins de prise en charge des patients présentant des maladies chroniques, en collaboration avec le médecin qui aura du temps médical libéré. La proposition de loi octroyant l'accès direct perd de son sens, car l'IPA pourra adresser à un médecin spécialiste sans passer par le médecin traitant. Certes, l'IPA bénéficie de deux ans de formation complémentaire, mais la formation d'infirmier n'est pas conçue pour réaliser un diagnostic, qui doit être réservé au médecin.
Selon le texte, l'IPA devrait en référer au médecin, mais lequel ? Il faut renforcer les IPA, mais pour libérer du temps médical afin que les médecins voient davantage de patients.
Il faut une organisation optimale avec une délégation de l'IPA, par exemple avec un secrétariat commun. Et si l'IPA a un souci ou a besoin d'une prescription supplémentaire, il pourrait faire appel au médecin qui se trouve à côté ou débriefer avec lui. Cela sécurise le patient et l'IPA. Le médecin n'est pas au-dessus des paramédicaux, qui sont indispensables. Nous devons travailler ensemble pour que le travail soit efficace. Le médecin a un rôle central de coordination, mais chacun son rôle au même niveau d'utilité.
Mme Véronique Guillotin. - Bravo pour ce travail compliqué. Va-t-on continuer à trouver des palliatifs pour résoudre un problème d'accès aux soins ? La rapporteure a essayé de trouver un consensus. Je m'inquiète du contexte. Ne veut-on pas tout simplement arrêter ce système de médecins généralistes, pour les remplacer par des médecins intermédiaires réalisant uniquement du filtrage ? Je comprends que les médecins généralistes aient des perspectives compliquées. On vient de leur dire qu'il leur faut dix ans de formation pour aider les territoires ruraux, avant de proposer des IPA praticiens... Je souscris à la suppression de ces IPA praticiens.
Dans mon hôpital, deux médecins étrangers prescrivaient systématiquement des consultations pour des spécialistes au moindre petit problème. Elles ne réalisaient ni diagnostic ni prescription, et embolisaient les spécialistes. En fait, leur formation était inférieure à la formation française. Est-ce l'orientation que nous souhaitons ? À mon sens, ce n'est pas la bonne solution. Je suis favorable aux IPA, mais je suis inquiète de l'accès direct. Si la loi est votée ainsi, peut-être concernera-t-il des CPTS, qui rassemblent parfois 2 000 professionnels de santé dont on ne peut pas dire qu'ils se côtoient...
Redonnons envie aux jeunes de faire de la médecine de ville. Or tous les messages envoyés, notamment au travers des propositions de loi coercitives, vont dans le sens du désamour de la médecine générale.
Oui, il faut enlever les IPA praticiens, prévoir des IPA dans les maisons de santé pluriprofessionnelles, en espérant que le texte restera ainsi...
Mme Catherine Deroche, présidente. - Le Gouvernement serait favorable au fait d'enlever les CPTS...
Mme Véronique Guillotin. - Il faut se réconcilier entre professionnels. Le primo-diagnostic est le plus important. Le médecin qui connaît son patient peut différencier un simple mal de dos d'une métastase. C'est trop facile de déterminer dix séances, puis cinq... Cela me met en colère.
Il faut faire quelque chose pour résoudre le problème des rendez-vous non honorés.
Mme Cathy Apourceau-Poly. - Merci pour ce travail. Je suis très en colère. Je sais que Corinne Imbert a rencontré de nombreux IADE. Nous avons voté, contre l'avis du ministre, leur reconnaissance dans le titre préliminaire. Mais aujourd'hui encore, nous serons victimes de l'article 40 de la Constitution. Que peut-on faire pour les reconnaître ?
Mme Raymonde Poncet Monge. - Peut-on contester le fait qu'il y ait un impact financier ?
Mme Catherine Deroche, présidente. - Sur les 66 amendements déposés sur ce texte, 17 ont été déclarés irrecevables en application de l'article 40 de la Constitution.
En application de la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur la LFSS pour 2022, les amendements relatifs aux compétences des professionnels sont considérés comme ayant une incidence sur les comptes sociaux et peuvent, à ce titre, figurer dans le PLFSS. Conséquence malheureuse, lorsqu'ils ne sont pas déposés par le Gouvernement, ils sont irrecevables au titre de l'article 40.
J'ai attiré l'attention du Conseil constitutionnel sur cette difficulté, notamment dans la perspective de l'examen de la proposition de loi Rist. Le Conseil a confirmé sa jurisprudence dans sa décision sur la LFSS 2023. Je suis donc forcée d'en tirer les conséquences.
J'ai évoqué hier avec le ministre François Braun cette proposition de loi ainsi que les sujets des IADE, des infirmiers de bloc opératoire diplômés d'État (Ibode) et des infirmières puéricultrices. Je lui ai proposé de déposer un amendement gouvernemental, que nous voterions. On pourrait les déclarer en pratique avancée, en fonction de la formation.
Je l'ai toujours dit : pour exercer une tâche, il faut avoir été formé pour être compétent, et en assumer la responsabilité. Chacun connaît ses limites, et donc sa responsabilité individuelle.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Merci de votre bienveillance et de vos propos chaleureux. À titre personnel, je considère le médecin généraliste, qui réalise le diagnostic, comme la pierre angulaire de notre système de santé.
Il existe des difficultés en matière d'accès aux soins. J'espère que nous pourrons apporter quelques améliorations, cela va avec le sens des responsabilités de chacun des professionnels concernés.
J'ai relevé dans le code les conditions d'exercice de la pratique avancée par un décret en Conseil d'État après avis de l'Académie de médecine, de la HAS et des représentants des professions concernées. Cela permettra d'assurer la sécurité des patients. Chacun son métier au regard de sa formation.
La coordination s'exerce lorsque les professionnels se connaissent au degré le plus petit : équipe de soins primaires ou spécialisés, maisons de santé pluriprofessionnelles, où l'on se croise et où l'on a une patientèle commune, et éventuellement les centres de santé. Les CPTS ne sont pas des organisations de soins, mais regroupent parfois un très grand nombre de professionnels qui ne se connaissent même pas : ce n'est pas le bon niveau de coordination.
Cette proposition de loi a des effets pervers sur l'attractivité des généralistes. Il y a quelques années, on avait réussi à rendre plus attractive la médecine générale. Ne décourageons pas les futurs médecins. Former davantage les paramédicaux et reconnaître cette formation s'entend également.
Les prescriptions d'activité physique adaptée par les médecins ne sont pas remboursées, sauf dans certaines conditions spécifiques.
J'ai été limitée par l'article 40 pour généraliser le dispositif aux orthophonistes. Nous avons préféré traiter de manière équitable les professions concernées pour ne pas ajouter de tensions. Je comprends qu'il puisse y avoir des tensions à l'échelle nationale entre les différentes organisations professionnelles. Les tensions au niveau local sont heureusement plus rares, mais très dommageables.
Lors de l'examen de différents PLFSS, nous avions voté diverses expérimentations comme l'accès direct aux IPA et aux orthophonistes. Le Gouvernement est incohérent : dans la LFSS de 2022, il a prévu une expérimentation pour les IPA de prescription de produits à prescription médicale obligatoire ; dans la LFSS de 2023, c'est l'accès direct. Non seulement les expérimentations ne sont pas lancées, mais elles sont effacées par cette proposition de loi, ce qui crée une incompréhension.
Les articles sur les assistants dentaires sont consensuels, nous les réécrivons pour mieux les préciser.
Nous renvoyons le sujet des rendez-vous non honorés aux négociations de la convention médicale. Nous aurions pu intégrer d'autres professions, mais seuls les médecins nous avaient interpellés sur le sujet. Nous pouvons étudier ce point.
Je propose un amendement donnant la possibilité au Gouvernement de reconnaître les IADE comme pratique avancée. Je souhaite préserver le rôle central du médecin en matière de coordination et de suivi de l'équipe de soins. La suppression de toute référence aux CPTS me semble pertinente. La proposition de loi prévoit également l'information obligatoire des médecins traitants.
Je partage l'analyse de Véronique Guillotin et ses craintes. À nous d'être vigilants. On ne peut pas avoir de médecine à deux, voire à trois vitesses si vous rajoutez le secteur 2.
Lors de l'audition, les IPA nous ont répondu, comme les médecins, qu'ils ne seraient prêts à venir à la campagne qu'en fonction des incitations financières même lorsqu'il y a un autre médecin, une pharmacie, un kinésithérapeute, une ou plusieurs infirmières... Ou bien ils proposent qu'un des infirmiers de la commune devienne IPA - sauf que cela nécessite que l'infirmier arrête de travailler deux ans, sans revenu, pour se former, et la formation est chère... Cette proposition de loi n'aura pas les résultats qu'elle veut nous faire croire, et fera des déçus. Elle a créé beaucoup de tensions, ce qui est regrettable.
Mme Catherine Deroche, présidente. - C'est comme les orthoptistes qui ne vont pas s'installer s'il n'y a pas un ophtalmologiste à proximité...
EXAMEN DES ARTICLES
Mme Chantal Deseyne. - Cette proposition de loi est un leurre et ne répond pas au manque de médecins sur le territoire. Je suis attachée au diagnostic réalisé par un médecin. En tant que patient, iriez-vous voir un médecin, un IPA ou un masseur-kinésithérapeute ? Personnellement, j'irais consulter un médecin... Je suis en colère contre cette proposition de loi. Les IPA ne pourront exercer que dans le cadre d'un exercice coordonné de la médecine, mais comment faire lorsqu'il n'y a plus de médecin ? Les IPA ne vont pas prendre la relève ! Et comme il faut transmettre des informations entre professionnels de santé, cela revient à réduire le temps médical. Je ne suis pas médecin, je défends un bon système de santé pour le patient.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Avis défavorable à l'amendement de suppression COM-14.
L'amendement COM-14 n'est pas adopté.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement COM-45 prévoit que les compétences des professionnels en pratique avancée sont prévues par décret en Conseil d'État, pris après avis de l'Académie de médecine, de la HAS et des représentants des professionnels concernés.
L'amendement COM-45 est adopté. En conséquence, les amendements COM-37 rectifié et COM-43 deviennent sans objet.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Les amendements identiques COM-46, COM-66 et COM-26 rectifié visent à permettre l'accession à la pratique avancée des auxiliaires médicaux disposant d'un diplôme non universitaire équivalent. Au Gouvernement de s'en saisir.
Les amendements identiques COM-46, COM-66 et COM-26 rectifié sont adoptés.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement COM-47 vise à supprimer la distinction entre IPA spécialisés et IPA praticiens, et les éléments sur la validation des acquis de l'expérience.
L'amendement COM-47 est adopté. En conséquence, l'amendement COM-29 devient sans objet.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement COM-48 supprime les CPTS parmi les structures autorisant l'accès direct, afin de s'assurer que les IPA exercent leur activité en lien étroit avec les médecins.
L'amendement COM-48 est adopté. En conséquence, l'amendement COM-30 devient sans objet.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement COM-31 supprime la notion d'acte effectué « sans adressage du médecin » que le texte ajoute à l'article relatif aux conventions infirmières conclues avec l'assurance maladie.
L'accès direct permettra aux IPA de réaliser certains actes sans adressage préalable. Il faut donc prévoir que la convention fixe les tarifs associés. Avis défavorable.
L'amendement COM-31 n'est pas adopté.
L'amendement de coordination COM-49 est adopté.
L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement COM-38 rectifié prévoit que des examens complémentaires en matière de traitement des plaies ne pourront être prescrits par les infirmiers qu'après avis du médecin traitant. Je vous propose plutôt d'encadrer cette mesure en prévoyant qu'elle ne s'applique que dans les structures les plus intégrées, à l'exception des CPTS, et après avis de la HAS sur la liste des prescriptions autorisées. Avis défavorable.
L'amendement COM-38 rectifié n'est pas adopté.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement COM-50 prévoit la saisine de la HAS sur la liste des prescriptions autorisées, notamment pour des examens complémentaires et des produits de santé dans le cadre de la prise en charge des plaies.
L'amendement COM-50 est adopté.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement COM-51 supprime les CPTS des structures autorisant la prise en charge et la prescription.
L'amendement COM-51 est adopté.
L'article 1er bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement COM-15 vise à supprimer l'article 2 autorisant l'accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes. Avis défavorable.
L'amendement COM-15 n'est pas adopté.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement COM-53 vise à supprimer les CPTS des structures autorisant l'accès direct.
L'amendement COM-53 est adopté.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement COM-54 ramène le nombre maximal de séances de masso-kinésithérapie autorisées en accès direct, en l'absence de diagnostic médical préalable, à cinq.
L'amendement COM-54 est adopté.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement COM-55 supprime la disposition prévoyant que les masseurs-kinésithérapeutes prennent en charge « en priorité » les patients atteints d'une affection de longue durée (ALD), peu opérationnelle ni cohérente. Il confie aux partenaires conventionnels le soin de définir les mesures, notamment incitatives, propres à orienter l'activité des masseurs-kinésithérapeutes vers les priorités de santé publique et la prise en charge des patients souffrant d'une ALD.
L'amendement COM-55 est adopté.
L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement COM-56 prévoit l'encadrement des prescriptions d'activité physique adaptée par un masseur-kinésithérapeute par un décret pris après avis de la HAS et de l'Académie de médecine.
L'amendement COM-56 est adopté.
L'article 2 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement COM-57 supprime les CPTS des structures autorisant l'accès direct.
L'amendement COM-57 est adopté.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Les amendements identiques COM-5, COM-13 et COM-23 suppriment les dispositions prévoyant qu'en l'absence de transmission au médecin traitant et de versement au dossier médical partagé (DMP) du bilan initial et du compte rendu des soins, les actes réalisés en accès direct par les orthophonistes sont mis à leur charge. Avis favorable.
Les amendements identiques COM-5, COM-13 et COM-23 sont adoptés.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Les amendements identiques COM-2, COM-10 et COM-21 précisent que l'obligation de verser le bilan initial et le compte rendu des soins dans le DMP ne s'applique que lorsque celui-ci est ouvert pour le patient considéré. Il ne pourrait pas être reproché à un orthophoniste de ne pas avoir alimenté un DMP qui n'existe pas. J'estime donc que ces amendements sont satisfaits. Avis défavorable.
Les amendements identiques COM-2, COM-10 et COM-21 ne sont pas adoptés.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Les amendements identiques COM-3, COM-20 et COM-11 suppriment les dispositions, ajoutées en séance publique à l'Assemblée nationale, prévoyant que l'appartenance à une CPTS n'autorise l'accès direct que dans le cas où le projet de santé prévoit les modalités de prise en charge et de coordination. Je vous propose plutôt de supprimer la CPTS comme structure ouvrant droit à l'accès direct. Avis défavorable.
Les amendements identiques COM-3, COM-20 et COM-11 ne sont pas adoptés.
L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Les amendements identiques COM-52 et COM-40 tendent à indemniser les médecins au titre des rendez-vous non honorés. Nous renvoyons cela à la négociation conventionnelle.
Les amendements identiques COM-52 et COM-40 sont adoptés et deviennent article additionnel.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement COM-58 prévoit une condition de formation spécifique pour l'exercice des compétences élargies des assistants dentaires. Il s'agit de clarifier les dispositions proposées à la lumière de l'intention de l'article.
L'amendement COM-58 est adopté.
L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement COM-19 vise à supprimer l'article 4 bis, lequel prévoit deux dispositions. D'une part, l'article encadre le nombre d'assistants médicaux présents dans les centres de santé ayant une activité ophtalmologique. Je vous proposerai moi-même une suppression de ces dispositions pour d'autres raisons que celles invoquées par l'objet : elles n'ont pas leur place dans ce texte. D'autre part, l'article cherche à limiter le nombre d'assistants dentaires de niveau II, ce que je pense nécessaire. Cet encadrement préviendra les dérives dans lesquelles les patients seraient, s'ils étaient confiés à une multitude d'assistants dentaires au détriment du temps passé effectivement avec le chirurgien-dentiste. Avis défavorable.
L'amendement COM-19 n'est pas adopté.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement COM-59 précise les modalités d'encadrement du nombre d'assistants dentaires de niveau II.
L'amendement COM-59 est adopté.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement COM-60 supprime la disposition encadrant le nombre d'assistants médicaux en centre de santé ophtalmologique, qui relève plutôt de la proposition de loi visant à améliorer l'encadrement des centres de santé, dont Jean Sol est rapporteur.
L'amendement COM-60 est adopté.
L'article 4 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement COM-61 supprime les dispositions relatives à la responsabilité collective des professionnels pour la permanence des soins. Cette notion de responsabilité collective n'emporte pas rétablissement de l'obligation de garde et inquiète inutilement les professionnels de santé.
L'amendement COM-61 est adopté.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement COM-39 rectifié précise que les infirmiers, pouvant désormais participer à la PDSA et régis par le principe de responsabilité collective des professionnelles à assurer la permanence des soins, le font sous délégation d'un médecin. Avis défavorable.
L'amendement COM-39 rectifié n'est pas adopté.
L'article 4 ter est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 4 quater (nouveau)
L'amendement de suppression COM-62 est adopté.
L'article 4 quater est supprimé.
Après l'article 4 quater (nouveau)
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement COM-1 limite la responsabilité d'un associé d'une société interprofessionnelle de soins ambulatoires à la hauteur des parts du capital social détenu par cet associé. Il ne concerne pas les conditions d'exercice ni les compétences des professionnels de santé et n'a donc pas de lien avec le périmètre du texte déposé. C'est pourquoi je vous propose de le considérer comme irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution.
Mme Catherine Deroche, présidente. - C'est pourtant un véritable problème, que nous n'arrivons jamais à caser dans une loi : cela ne relève ni du PLFSS ni d'une telle proposition de loi sur les compétences des professionnels de santé. Il faudrait interroger le ministre lors de la séance publique.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - Nous avions voulu déposer un amendement au PLFSS, mais cela ne convenait pas. Comment soutenir ces structures qui font face à un problème juridique ?
L'amendement COM-1 est déclaré irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement COM-16 rectifié, qui assouplit le régime d'autorisation du transfert ou du regroupement d'une officine dans une commune de moins de 2 500 habitants, ne concerne ni les conditions d'exercice ni les compétences des professionnels de santé et n'a donc pas de lien avec le périmètre du texte déposé. Je vous propose donc de le considérer comme irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution.
Mme Catherine Deroche, présidente. - Cet amendement sur les communes de montagne, qui soulève cependant de réels problèmes, n'a pas sa place dans ce texte.
L'amendement COM-16 rectifié est déclaré irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution.
Article 4 quinquies (nouveau)
L'article 4 quinquies est adopté sans modification.
Article 4 sexies (nouveau)
L'article 4 sexies est adopté sans modification.
Article 4 septies (nouveau)
L'article 4 septies est adopté sans modification.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement de coordination COM-63 précise que les conditions de l'adaptation des prescriptions initiales de verres et de lentilles par les opticiens-lunetiers doivent être déterminées par décret. C'est déjà le cas lors d'un renouvellement de prescription.
L'amendement COM-63 est adopté.
L'article 4 octies est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 4 nonies (nouveau)
L'article 4 nonies est adopté sans modification.
Article 4 decies (nouveau)
L'article 4 decies est adopté sans modification.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement COM-36 vise à supprimer l'article 4 undecies qui permet au pharmacien, lorsqu'une ordonnance médicale est expirée, de dispenser, pour trois mois par délivrance d'un mois, le traitement d'une pathologie chronique. Cet article permet, à titre exceptionnel, d'éviter toute interruption de traitement à l'expiration d'une ordonnance ; il prévoit des conditions suffisamment encadrées tenant notamment à l'information obligatoire du médecin prescripteur. Il pourrait s'agir par exemple d'un patient ayant déménagé loin de son médecin traitant, et qui a du mal à en retrouver un nouveau. Faisons confiance aux professionnels. Avis défavorable.
L'amendement COM-36 n'est pas adopté.
L'article 4 undecies est adopté sans modification.
Après l'article 4 undecies (nouveau)
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Les amendements identiques COM-27 et COM-32 encadrent la profession des prestataires de santé à domicile qui ne sont pas des professionnels de santé. Ils n'ont donc pas de lien avec le périmètre du texte déposé. Je vous propose donc de les considérer comme irrecevables au titre de l'article 45 de la Constitution.
Les amendements identiques COM-27 et COM-32 sont déclarés irrecevables en application de l'article 45 de la Constitution.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement COM-64 tend à supprimer l'article 4 duodecies, qui prévoit une demande de rapport sur l'opportunité de supprimer l'obligation d'adressage par un médecin généraliste - mais probablement veut-il dire « médecin traitant » - pour bénéficier de la prise en charge d'une consultation d'un médecin spécialiste. Cet article est un affront aux médecins.
L'amendement COM-64 est adopté.
L'article 4 duodecies est supprimé.
Article 4 terdecies (nouveau)
L'amendement rédactionnel COM-65 est adopté.
L'article 4 terdecies est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 5 (Supprimé)
L'article 5 demeure supprimé.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
TABLEAU DES SORTS
Proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, créant une aide universelle d'urgence pour les victimes de violences conjugales - Examen du rapport et du texte de la commission (deuxième lecture)
Mme Catherine Deroche, présidente. - Nous examinons, en deuxième lecture, la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, créant une aide universelle d'urgence pour les victimes de violences conjugales.
Mme Jocelyne Guidez, rapporteure. - Le 20 octobre dernier, le Sénat adoptait, à l'unanimité, la proposition de loi créant une aide d'urgence en faveur des victimes de violences conjugales déposée par notre collègue Valérie Létard. Moins de quatre mois plus tard, le texte nous revient, après avoir recueilli le vote, là aussi unanime, de l'Assemblée nationale, qui y a toutefois apporté des modifications substantielles en séance publique.
Pour apprécier ces modifications, je rappellerai brièvement le coeur des dispositions de cette proposition de loi telles que votées par le Sénat. Le texte prévoyait un dispositif d'avances d'urgence, octroyées par les caisses d'allocations familiales (CAF), sous la forme d'un prêt à taux zéro. Le premier des trois versements mensuels constituant cette aide devait intervenir dans les trois jours ouvrés suivant la demande. Nous avions également adopté un mécanisme de remboursement par l'auteur des violences conjugales. La CAF avait la possibilité de se constituer partie civile pour le compte de la victime, si celle-ci renonçait à exercer ses droits, afin de récupérer les sommes sur les dommages et intérêts prononcés lors d'un procès pénal.
Nos collègues députés ont apporté au texte des modifications non négligeables. Certaines ont été portées par le Gouvernement qui, à cette occasion, est sorti de la réserve dont il avait fait preuve devant nous. Toutefois, la proposition de loi a gardé intacte son ambition de donner aux victimes de violences conjugales, dans un délai très court, les moyens financiers de quitter définitivement leur conjoint violent. C'est pourquoi je vous proposerai d'adopter en l'état cette proposition de loi pour permettre son application rapide.
Ce texte nous apporte plusieurs motifs de satisfaction, aux premiers rangs desquels la levée du gage financier par le Gouvernement. De même, non contraint par l'article 40 de la Constitution, celui-ci a pu ajouter des modifications que nous appelions de nos voeux. D'une part, le montant de l'aide d'urgence devra désormais tenir compte de la présence d'enfants à la charge de la victime - cela m'importait beaucoup. Cette modulation semblait impérative alors que, dans la plupart des cas, les victimes ne quittent pas le domicile sans leurs enfants. D'autre part, les caisses de la Mutualité sociale agricole (MSA) se trouvent désormais intégrées au service de cette nouvelle aide, ce qui est nécessaire afin d'atteindre leurs allocataires. Enfin, je me réjouis du transfert du financement de cette aide de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) à l'État qui assumera là une mission qui lui incombe naturellement.
L'article 1er, qui porte le dispositif de l'aide d'urgence, a fait l'objet d'un amendement de rédaction globale du Gouvernement sous-amendé à de nombreuses reprises. La nature de l'aide a, tout d'abord, été dédoublée avec la possibilité d'octroyer à la victime soit un prêt soit une aide non remboursable selon sa situation financière et sociale. La détermination du montant de l'aide a également été revue : le montant pourra être modulé, dans le respect de plafonds limitatifs, selon l'évaluation des besoins de la personne, notamment sa situation financière et sociale ainsi que la présence d'enfants à charge. L'Assemblée nationale a également assoupli les délais de premier versement de l'aide. Le délai pourra, par dérogation, être porté de trois à cinq jours ouvrés, dans le cas où la victime n'est pas déjà enregistrée comme allocataire de l'organisme payeur. Cet allongement réduit certes l'ambition du texte, mais est plus conforme aux inquiétudes avancées par la Cnaf lors des auditions conduites pour l'examen de la proposition de loi en première lecture.
La navette a donc enrichi l'article 1er de nouvelles dispositions qui demeurent toutefois fidèles à l'objectif du texte adopté par le Sénat. Nos collègues députés ont par ailleurs maintenu inchangées les conditions d'octroi de l'aide d'urgence, ainsi que le bénéfice aux droits et aides accessoires au revenu de solidarité active (RSA) qui accompagne le versement de l'aide pécuniaire.
Enfin, le mécanisme de récupération de l'aide a été amendé en conservant le principe de demander le paiement à l'auteur des violences lorsque l'aide est versée sous la forme d'un prêt. Dorénavant, le remboursement du prêt fait partie des peines que les juridictions pénales peuvent prononcer contre l'auteur reconnu coupable, ainsi que des dispositifs à la main des parquets dans le cadre d'un classement sous condition de la procédure ou de mesures de composition pénale.
À l'article 2, les députés ont maintenu l'obligation faite aux gendarmes et policiers d'informer la victime déposant plainte de la possibilité de demander l'aide d'urgence. En revanche, si l'enregistrement de la demande dans le commissariat ou la gendarmerie demeure une faculté, elle n'est plus systématique. Sans doute les députés ont-ils estimé que de telles dispositions seraient appliquées non pas par la norme contraignante, mais par les engagements volontaires des acteurs du terrain.
D'autres dispositions de la proposition de loi concernent son applicabilité aux outre-mer. L'article 1er bis habilite le Gouvernement à légiférer pour adapter la loi à Mayotte. Le fléau des violences conjugales se retrouve avec encore plus d'acuité en outre-mer, comme je l'ai rappelé en première lecture. Cette proposition de loi ne doit donc pas oublier les habitants des territoires ultramarins.
Enfin, l'Assemblée nationale a inséré quelques nouveaux articles à la pertinence toute relative, mais qui, fort heureusement, ne gênent pas l'application du dispositif.
L'article 1er ter propose ainsi qu'une loi de programmation pluriannuelle détermine la trajectoire des finances publiques en matière de lutte contre les violences faites aux femmes. Pour symbolique et médiatique que soit cette disposition, elle est dépourvue de toute portée normative, le Gouvernement ne pouvant constitutionnellement être tenu de déposer un tel projet de loi. Les articles 2 ter et 2 quater sont des demandes de rapport pour lesquelles je demande votre indulgence au profit d'une adoption conforme du texte.
Aux côtés du maintien de l'essentiel de la proposition de loi et d'améliorations significatives du dispositif, quelques imperfections se sont glissées dans le texte. Il serait plus satisfaisant de le peaufiner, mais ne perdons pas de vue l'enjeu de cette proposition de loi qui nous presse. Le contexte politique de l'Assemblée nationale, qui rend peu prévisible l'issue de chaque texte, nous recommande aussi la prudence. C'est pourquoi je vous invite à adopter le texte sans modification pour que cette loi ambitieuse d'initiative sénatoriale soit promulguée sans délai.
Il me revient, en tant que rapporteure, de vous proposer un périmètre pour l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution et de l'article 44 bis, alinéas 5 à 8, du Règlement du Sénat. Cette irrecevabilité étant appréciée, après la première lecture, au regard des dispositions restant en discussion, je vous propose de considérer que le périmètre de la proposition de loi ne saurait plus excéder, en deuxième lecture, les dispositions relatives au dispositif d'une aide d'urgence en faveur des victimes de violences conjugales ; au remboursement de l'aide, y compris mis à la charge de l'auteur des violences ; et à l'adaptation du dispositif en outre-mer.
Des amendements qui ne seraient pas en relation directe avec une de ces dispositions seraient donc déclarés irrecevables par notre commission.
Mme Catherine Deroche, présidente. - Nous nous sommes interrogés sur le bien-fondé de modifier ou non le texte puisque, comme l'a présenté la rapporteure, nous avons relevé quelques imperfections. Toutefois, en accord avec Valérie Létard il nous semble préférable que sa proposition de loi soit adoptée très rapidement pour que les victimes bénéficient le plus vite possible de cette aide.
EXAMEN DES ARTICLES
Articles 1er,1er bis, et 1er ter
Les articles 1er, 1er°bis et 1er ter sont successivement adoptés sans modification.
Article 2
L'amendement COM-1 est déclaré irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution.
L'article 2 est adopté sans modification.
Article 2 bis (supprimé)
L'article 2 bis demeure supprimé.
Articles 2 ter, 2 quater et 2 quinquies
Les articles 2 ter, 2 quater et 2 quinquies sont successivement adoptés sans modification.
Article 3 (supprimé)
L'article 3 demeure supprimé.
La proposition de loi est adoptée sans modification.
TABLEAU DES SORTS
La réunion est close à 12 h 55.