- Mercredi 19 janvier 2022
- Enquête sur les soins à domicile - Audition de M. François de La Guéronnière, conseiller-maître de la cour des comptes, président de section
- Priorités et résultats de la recherche médicale et état des connaissances scientifiques sur le variant Omicron de la covid-19 - Audition de M. Gilles Bloch, président de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et de M. Yazdan Yazdanpanah, directeur de l'agence interne ANRS Maladies infectieuses émergentes
- Mission d'information sur l'adéquation du passe vaccinal à l'évolution de l'épidémie de covid-19 - Demande d'octroi à la commission, pour une durée de six mois, des prérogatives attribuées aux commissions d'enquête
- Proposition de loi visant à renforcer le droit à l'avortement (deuxième lecture) - Examen d'une motion et de l'amendement au texte de la commission
- Désignation de rapporteurs
- Projet de loi portant reconnaissance de la Nation envers les harkis et les autres personnes rapatriées d'Algérie anciennement de statut civil de droit local et réparation des préjudices subis par ceux-ci et leurs familles du fait de leurs conditions d'accueil sur le territoire français - Désignation des candidats à la commission mixte paritaire
- Proposition de loi visant à renforcer le droit à l'avortement - Désignation des candidats à la commission mixte paritaire
- Jeudi 20 janvier 2022
Mercredi 19 janvier 2022
- Présidence de Mme Catherine Deroche, présidente -
La réunion est ouverte à 9 heures.
Enquête sur les soins à domicile - Audition de M. François de La Guéronnière, conseiller-maître de la cour des comptes, président de section
Mme Catherine Deroche, présidente. - Nous entendons ce matin M. François de la Guéronnière, conseiller-maître, pour la présentation de l'enquête demandée à la Cour des comptes en application de l'article L.O. 132-3-1 du code des juridictions financières sur les soins à domicile.
Je salue nos collègues qui participent à nos travaux en visioconférence.
J'indique que cette audition fait l'objet d'une captation vidéo retransmise en direct sur le site du Sénat, qui sera ensuite disponible en vidéo à la demande.
Cette demande d'enquête formulée en septembre 2019, portait initialement sur les prises en charge en santé à domicile mais un rapport de l'IGAS, paru quelques mois plus tard, a traité ce sujet. Nous avons donc orienté le sujet vers les services de soins à domicile.
M. François de la Guéronnière, conseiller-maître de la Cour des comptes, président de section. - Vous avez rappelé, Madame la Présidente, les circonstances qui ont abouti au choix de ce sujet que la Cour des comptes n'avait encore jamais eu l'occasion de traiter.
En guise d'introduction, permettez-moi de préciser la méthode que nous avons suivie pour nos travaux. Nous avons mené cette enquête en sollicitant les administrations et établissements publics en charge de la mise en oeuvre de cette politique publique ainsi que les administrations et établissements statistiques, budgétaires ou d'application. Nous nous sommes également appuyés sur des comparaisons internationales et notamment les données de l'OCDE. Enfin, la Cour a également contrôlé sur le terrain plusieurs services de soins à domicile dans deux régions différentes.
Malgré la période de crise sanitaire, nous n'avons pas rencontré de difficulté lors de nos travaux, exception faite de la base de données Resid-EHPAD à laquelle nous n'avons pu accéder. Nous ne pouvons que regretter l'impossibilité de collecter les données de cette base gérée par la caisse nationale d'assurance maladie (CNAM) et recensant les informations sur les pensionnaires d'établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) ou de services en raison d'un problème d'alimentation de cette base par les établissements eux-mêmes.
Avant toute chose, je me permettrai de rappeler les quatre catégories de services sur lesquelles porte cette enquête. Les deux premières interviennent très majoritairement pour les personnes âgées dépendantes ; ce sont les services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) et les services polyvalents d'aide et de soins à domicile (Spasad), davantage expérimentaux, qui regroupent des services de soins infirmiers et des services d'aide et d'accompagnement à domicile (Saad). Les deux autres catégories de services concernent les personnes handicapées. Il s'agit des services d'éducation spéciale et de soins à domicile (Sessad) pour les enfants et des services d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés (Samsah). La grande majorité des personnes suivies par ces services le sont par les Ssiad et les Sessad.
Notre rapport comporte trois axes réflexion. Le premier sur lequel nous avons travaillé porte sur les chiffres globaux des services de soins à domicile et les dépenses qui leur sont afférentes.
Des efforts notables ont été entrepris, à travers le plan de solidarité grand âge (2007-2012) ou le plan pluriannuel du handicap (2008-2014), pour augmenter le nombre de places dans ces services représentant une alternative à l'entrée dans les établissements. Ces efforts ont été cependant interrompus à partir de 2016. La proportion de ces services dans l'accueil des personnes dépendantes demeure donc modeste : 20 % pour les personnes âgées, 19 % pour les adultes en situation de handicap et 36 % pour les jeunes handicapés.
Si les comparaisons internationales restent fragiles, le constat pouvant être dressé est que le taux d'institutionnalisation de la France - ou autrement dit d'accueil en établissement - n'a pas été réduit au contraire de ce qui a été observé dans les pays scandinaves par exemple. Cette situation en demi-teinte est d'autant plus préoccupante que les perspectives démographiques font apparaître un besoin important de places. Ainsi, 25 000 places en Ssiad devront être créées à l'horizon de 2030 pour maintenir constant le taux d'accueil dans ces services.
S'agissant des coûts de ces services, nous avons observé deux faiblesses. Premièrement, le soutien à domicile est partagé entre les services à domicile - représentant trois milliards d'euros - et les soins infirmiers au sens strict - soit deux milliards d'euros de dépenses. Ces soins infirmiers sont en croissance très rapide contrairement aux Ssiad. Ils sont très concentrés géographiquement dans la moitié sud de la France et notamment dans la région de la Côte d'Azur. Or plusieurs éléments laissent à penser que ces soins infirmiers ne sont pas toujours pertinents. Ils ne sont en effet corrélés à aucun indicateur de dépendance générale dans la population que nous avons étudiée.
La seconde question que nous avons abordée concerne le coût de la prise en charge par les services de soins à domicile en comparaison du coût des modes concurrentes de prise en charge. Les coûts globaux pour la collectivité des personnes âgées prises en charge à domicile sont de moitié moins importants que ceux d'un accueil en établissement. Toutefois, lorsqu'il y a une médicalisation au domicile via un Ssiad, la différence de coût, en faveur des Ssiad, n'est que très légère.
Il ne s'agit là que d'une comparaison du coût public des soins apportés aux personnes. S'agissant du coût pour les familles, il convient naturellement de garder à l'esprit les dépenses qui s'ajoutent lorsque la personne est à domicile comme les coûts liés à l'hébergement.
Une seconde approche a consisté à étudier
la performance des services eux-mêmes grâce notamment aux
contrôles que nous avons menés. Une première observation
évidente est que la prise en charge en établissement,
plutôt qu'un recours aux Ssiad, croît avec le degré de
dépendance des personnes âgées exprimé selon
l'indicateur GIR. À l'inverse pour les situations de GIR 5 et 6,
caractérisant une faible dépendance, le recours que ce soit aux
services ou aux établissements n'est que très marginal. Les Ssiad
constituent donc une alternative efficace aux établissements pour des
degrés intermédiaires de perte d'autonomie
- GIR 2, 3 et
4.
Pour les personnes handicapées, les Samsad permettent une insertion essentielle dans les parcours de soins avec toutefois une difficulté à discerner entre ce qui relève des soins et ce qui relève de l'accompagnement social. Quant aux enfants handicapés, les Sessad sont surtout efficaces dans l'accompagnement de la scolarisation.
Les services de soins en domicile partagent trois faiblesses. On constate, en effet, pour chacun d'entre eux une mauvaise comptabilisation de leur activité. Il n'est donc pas possible de discerner la gravité et la complexité des cas traités.
Ensuite, ces services s'avèrent souvent d'une taille trop petite qui ne permet ni d'assurer la pérennité du service, ni de faciliter l'emploi à plein temps d'aides-soignants, lequel est plus efficace, ni d'envisager une bonne intervention des professionnels extérieurs.
Enfin, nous avons constaté que l'amplitude horaire restreinte freinait les possibilités d'intervention de ces services au regard des besoins.
La Cour s'est intéressée, en dernier lieu, à l'organisation et la régulation du système des soins à domicile.
Concernant l'organisation territoriale de ces services, nous avons constaté que les autorités régionales de santé (ARS) qui devraient jouer un rôle décisif pour organiser une gradation des soins qui soit logique et intégrée, jouent finalement assez peu ce rôle. Pourtant, les ARS disposent de la contractualisation avec chaque service, au moyen des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (CPOM), comme outil adapté afin de permettre une réponse graduée et territoriale aux besoins des personnes dépendantes.
La tarification de l'intervention des services de soins à domicile pâtit également d'inconvénients majeurs. Elle est encore marquée par le système historique de dotation globale, lequel n'incite pas à l'efficience et ne reflète pas le niveau de dépendance des personnes âgées. Les services n'ont donc pas d'intérêt à prendre en charge des personnes fortement dépendantes puisque leurs frais en sont augmentés sans que leurs ressources ne suivent la même tendance. Nous recommandons la mise en place, pour les Ssiad, d'une tarification en fonction du GIR. Cette même logique de modulation en fonction des incapacités devrait s'appliquer pour les personnes handicapées dépendantes.
S'agissant des ressources humaines, la situation est difficile en raison de la combinaison d'un besoin croissant de professionnels et d'une chute drastique des candidatures due à la faiblesse de la rémunération et un déficit plus général d'attractivité de ces professions. Les réponses du Ségur progressivement étendues aux Ehpad et aux services de soins à domicile créent des décalages entre les secteurs qui devraient se résorber. L'augmentation générale des salaires pourra remédier aussi en partie à ce défaut d'attractivité. Il reste toutefois des chantiers à mener afin de donner des perspectives à ces emplois grâce à la création de passerelles inter-métier et à la mutualisation des moyens humains entre opérateurs intégrés.
Pour conclure, notre rapport formule une série de recommandations comme l'élargissement de l'accès aux données Resid-ESMS afin d'apprécier l'efficience globale des prises en charge, la mise en place effective d'un recueil de réclamation des usagers - nous avons en effet constaté la mauvaise prise en compte des voeux des usagers, la nécessité de compléter les indicateurs existants pour mieux mesurer l'activité, l'introduction à la charge des ARS d'un objectif quantifié de développement des coordinations territoriales entre établissements sociaux et médico-sociaux, établissements de santé, professionnels de santé en structures coordonnées et, enfin, l'ouverture des perspectives de carrière des aides-soignants.
M. Philippe Mouiller, rapporteur de la branche autonomie. - Le caractère insuffisant des données statistiques et des outils de suivi de l'offre médico-sociale est régulièrement souligné - qu'il s'agisse, ici, de la connaissance des services de soins à domicile, comme, naguère, des bénéficiaires de l'AAH... L'enquête formule une préconisation intéressante pour mieux apparier et exploiter les données utiles, mais n'est-ce qu'une question de réglementation de l'accès aux données ? N'y a-t-il pas un problème plus large : la CNSA a-t-elle les moyens de piloter efficacement l'offre de solutions aux personnes en perte d'autonomie ?
Question connexe : faut-il selon vous pousser l'analyse jusqu'à l'architecture budgétaire, comme le faisait le rapport Vachey, en élargissant la visibilité, voire le périmètre de la branche autonomie lui-même, aux actes infirmiers de soins aux personnes âgées par exemple ?
L'enquête note bien la tension fondamentale qui existe dans la politique de soutien à l'offre de services à domicile : elle doit remédier aux inégalités géographiques, mais aussi tenir compte du vieillissement différencié selon les territoires. La Cour en appelle ainsi à une « programmation et une régulation fines, au moins au niveau des départements ». Par quels outils et quels indicateurs faudrait-il organiser plus précisément la programmation et le soutien à l'offre de services ?
Vous notez que les temps de déplacement sont un facteur de coût important dans le secteur des personnes âgées. Certaines études économiques sont allées jusqu'à préconiser, pour optimiser le temps passé à se rendre d'un patient à un autre, d'organiser des monopoles territoriaux, c'est-à-dire d'autoriser un opérateur unique sur un territoire, selon un système d'enchères renouvelées périodiquement. Sans forcément aller jusque-là, n'y a-t-il pas une vraie réflexion à avoir sur l'optimisation des temps de transport ?
Enfin, la dernière loi de financement de la sécurité sociale a prévu la fusion, à terme, des Ssiad, des Saad et des Spasad dans un service unique, dont le financement vise à inciter au renforcement de la qualité de service. Cela va probablement dans le bon sens. Quelles sont selon vous les conditions à réunir pour qu'une telle réforme réussisse à atteindre les objectifs poursuivis ?
Mme Brigitte Micouleau. - J'ai posé hier une question orale au Gouvernement sur le manque de reconnaissance que ressentent les prestataires de santé à domicile (PSAD) depuis de nombreuses années. Il m'a été répondu que ces prestataires étaient essentiels. Je m'étonne pourtant qu'ils ne soient pas mentionnés dans votre rapport.
Mme Michelle Meunier. - Je m'interroge moi aussi sur le point de savoir si les ARS jouent le jeu en matière d'organisation des services, comme vous l'avez relevé.
Le maintien à domicile des personnes âgées se heurte aussi à la désertification médicale. À Nantes, je connais des personnes âgées dont le médecin traitant est parti à la retraite et qui peinent à obtenir une visite à domicile de la part des médecins restants, par ailleurs débordés. Comment pourrait-on y remédier ? Faudrait-il, par exemple, confier la compétence de renouvellement d'ordonnances à des infirmiers ? Voyez-vous des solutions organisationnelles ?
M. Thierry Grignon, rapporteur extérieur à la Cour des comptes. - Monsieur Mouiller, le problème auquel nous nous sommes heurtés est de ne pas avoir pu compléter, via les outils Resid-Ehpad et Resid-ESMS, nos comparaisons sur les coûts publics des différentes offres. Ces outils nous auraient permis de savoir si les personnes soignées à domicile ont des consommations extérieures de soins, en ville ou à l'hôpital, supérieures ou inférieures à celles des résidents d'Ehpad. Ces données finiront par être connues, car la Drees a accès à Resid-Ehpad.
Je ne saurais me prononcer sur la capacité de la CNSA, qui dispose de ses propres services statistiques, de piloter la branche efficacement. Mais nous pourrions imaginer des leviers complémentaires, en lien avec la Drees ou avec la direction de la sécurité sociale. D'autres sources statistiques permettent au demeurant le pilotage des services, telles les études de coûts ou les tableaux de bord de l'Anap ; quoique perfectibles et appelant sans doute une réforme du mode de financement, ces sources donnent par exemple une idée des difficultés spécifiques de chaque type de handicap.
M. François de la Guéronnière. - Vous nous interrogez également sur l'architecture budgétaire. Les dépenses relatives aux soins à domicile relèvent en effet de deux enveloppes différentes, répondant à des logiques de régulation différentes : dotation limitative pour les services de soins à domicile, enveloppe ouverte pour les actes infirmiers. C'est effectivement une difficulté. Nous n'avons pas proposé de changer l'architecture générale des dépenses, mais il nous semble nécessaire de travailler à une meilleure régulation des dépenses d'infirmiers, notamment celles destinées aux personnes âgées, car l'efficience n'est pas toujours au rendez-vous.
Nous ne pouvons répondre sur l'organisation de l'offre sur le plan territorial.
Mme Alice Lapray, rapporteure extérieure à la Cour des comptes. - Nous avons pris connaissance de l'étude que vous évoquez, monsieur Mouiller, sur les coûts de déplacement et les monopoles territoriaux. Les Ssiad ont, de fait, pris en compte les territoires d'intervention respectifs des différents services, de sorte qu'ils ne se chevauchent pas. Ce n'est certes pas le cas pour les Saad, ce qui peut créer une concurrence délétère - car elle porte aussi sur le personnel. Dans le secteur du handicap, les ARS veillent en délivrant leurs autorisations à la bonne couverture du territoire par type de handicap.
M. François de la Guéronnière. - Le manque de reconnaissance des professionnels, qui était l'objet initial de l'enquête mais qui a entre-temps fait l'objet d'un travail de l'Igas, a finalement été écarté du champ de nos investigations.
Nous avons suggéré deux pistes pour lever les obstacles à la réalisation de visites médicales à domicile : d'une part, recourir plus facilement aux infirmiers, notamment aux infirmiers en pratique avancée bénéficiaires de délégations d'actes ; d'autre part, remédier à la petite taille des services en confiant aux ARS le soin de pousser à leur regroupement. Nous pensons que cela leur permettrait d'atteindre une taille critique et donc de recruter.
M. Daniel Chasseing. - Vous avez parlé d'une nécessaire augmentation du nombre de services. Combien de places de Ssiad faudrait-il pour satisfaire les besoins, et à quel coût ?
Au chapitre de la coordination des services, ne faudrait-il pas réunir les Ssiad et les Saad, sous l'autorité du conseil départemental, avec une décentralisation des crédits d'assurance maladie ? Cela permettrait de mieux coordonner les prestations à domicile, notamment pour les personnes atteintes d'un handicap moteur.
Vous avez parlé d'un financement qui serait fonction du niveau de dépendance. Il faudrait éviter de recourir à la grille Pathos, qui donne des résultats assez catastrophiques. Le taux de dépendance renseigné régulièrement par le médecin traitant au moyen d'une grille GIR, reste le meilleur indicateur.
Ne pensez-vous pas, enfin, qu'il faudrait ouvrir davantage les Ehpad vers la société, y développer l'accueil de jour, et organiser les établissements en deux pôles relatifs, respectivement, aux pensionnaires et à l'accompagnement à domicile ?
Mme Frédérique Puissat. - Si je vous ai bien compris, il faudrait créer 25 000 places d'ici à 2030 afin de conserver la même qualité de service qu'actuellement.
Or nous savons que les budgets augmentent de manière forte dès à présent. Nous parlons certes des Ssiad mais permettez-moi de revenir sur les Saad, qui sont des composantes du service d'accompagnement à domicile. Les budgets que leur consacrent les départements affichent de fortes hausses, sous l'effet de la loi relative à l'adaptation de la société au vieillissement ou du Ségur de la santé.
Pour autant, cela ne se traduit pas par une appétence accrue pour les métiers offerts par ces structures, qu'il s'agisse des Saad ou des Ssiad. On n'observe d'ailleurs pas de ruissellement de ces budgets en hausse jusqu'aux professionnels présents sur le terrain, à tel point qu'un département comme l'Isère a souhaité lancer un audit sur ces structures.
Pour ce qui concerne la Cour des comptes, avez-vous délibérément mis ce sujet de côté ou fera-t-il l'objet de futurs travaux ?
Mme Véronique Guillotin. - Ma question concerne également la coordination.
J'ai le sentiment que les travaux de la Cour des comptes portent essentiellement sur les structures médico-sociales, et plus particulièrement les Ssiad, alors qu'il conviendrait de porter le regard en premier lieu sur les personnes.
Plus précisément, le regroupement des structures est sans doute une bonne chose mais il ne faudrait pas oublier les soins, qu'il s'agisse des soins infirmiers ou des soins médicaux purs, notamment par l'accès au médecin traitant.
Dans cette optique, l'hospitalisation à domicile pourrait sans doute apporter une solution pertinente. Comment évaluez-vous l'intérêt de structures qui coordonneraient les besoins médicaux et médico-sociaux des personnes dans un tel cadre ?
S'agissant des inégalités territoriales en matière d'accès aux places pour les personnes âgées, que pensez-vous de la possibilité pour les aides-soignants de s'installer au domicile de ces personnes ?
Enfin, le problème du manque de places pour les enfants du Nord de la France contraints d'aller dans des structures en Belgique est-il en voie de résolution ?
Mme Raymonde Poncet Monge. - Tout d'abord, je remercie la Cour des comptes pour la qualité de son rapport.
Je reviendrai également sur le problème récurrent de la coordination. Vous avez émis l'idée intéressante selon laquelle cette coordination doit échoir aux acteurs de terrain car s'il existe de nombreuses structures de coordination, c'est bien la traduction de cette coordination sur le terrain qui importe.
Il est un peu tôt pour que vous puissiez comparer les Spasad et les Ehpad de ce point de vue, y compris en termes de coût, d'efficience, ou encore pour savoir qui permet de répondre au mieux aux besoins des patients. Mais il serait intéressant de mener une telle comparaison car les Spasad doivent pouvoir pallier la faiblesse de l'environnement familial que vous soulignez vous-mêmes. Ils peuvent également permettre l'intervention d'autres spécialités en cas de besoin, comme l'ergothérapie.
Par ailleurs, si le rôle de coordination des Ssiad est bien reconnu par les ARS, il n'en va pas de même pour le rôle des Saad. Personne ne paye la coordination du responsable de secteur. Comment, selon vous, convient-il de remédier à cette vraie difficulté ?
Au sujet de l'attractivité, je pense que l'ensemble de la chaîne des intervenants devrait bénéficier de perspectives de revalorisation au cours de la carrière : les aides-soignants devraient certes pouvoir devenir infirmiers, mais il faut aussi penser aux auxiliaires de vie sociale, dont nous manquons également.
Au-delà, l'attractivité dépend aussi de l'amélioration des conditions de travail, notamment des horaires très larges ou du travail le week-end. Avez-vous des propositions en la matière ?
M. François de la Guéronnière. - Monsieur Chasseing, nous estimons que le besoin en matière de places en Ssiad afin de maintenir la proportion de places dans ces structures à l'horizon 2030 est de l'ordre de 25 000, pour un coût d'environ 600 millions d'euros.
La Cour n'a pas expertisé la possibilité de coordonner les Ssiad au niveau départemental et de créer un monopole sous l'autorité des conseils départementaux, mais nous avons appelé à un renforcement du rôle des ARS pour créer une gradation des soins et une coordination entre les soins, à partir des outils que sont les CPOM et des éléments incitatifs de tarification.
Par ailleurs, la Cour a relevé que les grilles des GIR étaient bien remplies. L'évolution tarifaire que nous proposons pourrait donc être mise en place à court terme.
Quant aux questions de l'ouverture des Ehpad et de l'accueil de jour, elles seront traitées dans de prochains travaux de la Cour.
Mme Alice Lapray. - Madame Puissat nous interroge sur l'absence de ruissellement des augmentations budgétaires des départements sur le terrain ; nous avons pu constater que les Ssiad ne constituaient pas de trésorerie. Pour l'exprimer trivialement, ils ne font pas de gras, et les opérations sont strictement calibrées d'un point de vue financier.
Pour ce qui concerne les coûts associés à la coordination des Spasad, il y a une forme d'efficience dans la mutualisation des interventions entre Ssiad et Saad. Nous avons pu le souligner pour ce qui concerne les Ssiad, qui sont des outils de gradation des soins, qui modulent le niveau des interventions en fonction des besoins. Le mode Spasad, si j'ose dire, permet aussi une telle graduation. En revanche, lorsque deux services avec deux directions différentes interviennent sans se coordonner, c'est la famille qui doit assumer ce rôle.
Madame Guillotin, l'hospitalisation à domicile relève du secteur sanitaire. C'est une véritable hospitalisation, avec tout ce que cela implique en termes de responsabilité des établissements hospitaliers. Ce sont donc des opérations beaucoup plus lourdes que ce que peut offrir un Ssiad ; elles sont, de surcroît, beaucoup plus limitées dans le temps.
S'agissant de l'ouverture des Ehpad sur leur territoire, la Cour a bien précisé en troisième partie de son rapport que sur un territoire, il y a des ressources mais que celles-ci sont souvent accaparées par les différents acteurs. Par exemple, une partie des infirmiers sont en Ehpad, une autre en Ssiad, une autre en libéral... Il y a donc sans doute des pistes à creuser en matière de mutualisation des ressources existantes sur les territoires plutôt que de privilégier un modèle dans lequel chacun essaye de les garder pour lui. Soyons conscients que derrière ces problèmes se trouvent aussi des sujets de parts de marché. Les Ehpad ou les Ssiad ne sont donc pas nécessairement les mieux placés pour la mise en oeuvre d'une telle démarche
M. François de la Guéronnière. - Madame Poncet Monge, je voudrais souligner que notre étude de coûts, qui n'inclut pas les frais d'hospitalisation, montre que les services d'aide à domicile étaient un peu moins chers que les Ehpad mais pas dans des proportions très larges. Dès lors, le développement de l'accompagnement à domicile ne doit pas s'envisager sous l'angle des économies qu'il permettrait mais avant sous l'angle de l'adéquation aux besoins des personnes âgées ou dépendantes.
Mme Alice Lapray. - Au sujet de l'attractivité des métiers, un aide-soignant travaille souvent entre 6 heures et 8 heures du matin puis entre 18 heures et 20 heures, c'est-à-dire une très grande amplitude horaire qui ne permet pas de concilier simplement vie personnelle et vie professionnelle. À cet égard, il semble que la taille critique d'un service permet aussi d'offrir un contrat à durée indéterminée à temps plein à ces catégories de personnel. Des regroupements de services permettent d'aller dans ce sens. Je reconnais que ce n'est pas simple, mais c'est faisable.
Évidemment, cela ne résout pas tout, notamment la question du niveau des salaires. Mais nous vous rejoignons quant à la nécessité d'améliorer les passerelles entre les aides-soignants et les infirmiers, le passage de l'un à l'autre demeurant encore très complexe.
M. Thierry Grignon. - Permettez-moi simplement de compléter les propos précédents sur la question des regroupements ou des mutualisations des services qui souvent se caractérisent par une taille insuffisante. Outre la difficulté des temps pleins pour les aides-soignants, c'est aussi un problème qui se pose s'agissant d'autres professions au sein des services pour personnes handicapées. Il est dur de trouver un masseur-kinésithérapeute ou un ergothérapeute si le service n'atteint pas une taille critique.
M. Jean-Luc Fichet. - La notion de guichet unique avait été évoquée il y a quelques années comme quelque chose de révolutionnaire. L'idée était de coordonner les services afin que la personne n'ait qu'un seul interlocuteur à s'adresser pour une prise en charge à domicile. Je ne sais pas dans quelle mesure ce dispositif a prospéré. Le constat que je dresse est qu'en progressant dans la grille AGGIR, avec des intervenants nombreux, le fonctionnement des professionnels se fait de plus en plus en silo. Chacun agit de son côté et dans l'urgence. N'est-on pas en train de réinventer le guichet unique qui ne fonctionne pas ? Il ne peut être une réussite que si les protagonistes ont la volonté de s'investir et si une personne unique est placée à sa tête pour conduire la coordination.
La taille critique des services est certes un élément essentiel mais la mutualisation suppose aussi l'éloignement géographique des services pour certaines personnes. Je crains que ce ne soit pénalisant, une fois de plus, pour les territoires ruraux.
Les aides à domicile sont des personnes en situation de grande précarité qui interviennent eux-mêmes auprès de personnes se trouvant dans une situation tout aussi similaire. Cela ne peut qu'engendrer beaucoup de souffrance ; le métier d'aide à domicile est réellement une profession difficile.
La question de la formation n'a pas été évoquée jusqu'à présent. Comment ce personnel peut-il être mieux formé et mieux considéré ? Avant d'envisager des passerelles inter-métiers et de faciliter l'évolution des carrières, il faut que ces aides à domicile aient une formation et des compétences professionnelles reconnues. La question dont nous parlons ce matin est donc éminemment complexe car elle touche à la souffrance humaine. À nous de faire preuve d'ingéniosité pour améliorer la qualité de la prise en charge de la personne. Le nombre d'intervenants en une journée auprès d'une même personne dépendante est considérable. Cela emporte comme conséquence des coûts élevés, parfois supérieurs à une prise en charge hospitalière, avec un résultat qui n'est toujours au rendez-vous.
M. René-Paul Savary. - J'ai moi aussi pu faire le constat, lorsque je sévissais en tant que médecin, des trop nombreux professionnels qui se succédaient auprès d'une seule personne dépendante. Il conviendrait de rechercher la polyvalence des métiers et de replacer la personne au centre des soins, pour qu'un seul professionnel s'occupe de façon plus globale de la personne dépendante. L'argent que nous consacrons à la coordination d'un système trop complexe devrait l'être aux soins des personnes elles-mêmes.
La question plus précise que je souhaite vous poser concerne votre choix de recourir à l'indice GIR pour les Ssiad. Comme il s'agit de soins infirmiers, la grille Pathos utilisée dans les établissements me semble davantage pertinente. Des personnes très dépendantes n'ont pas forcément besoin de beaucoup de soins infirmiers et inversement. Pourquoi donc ne pas choisir de croiser ces grilles ?
M. Alain Duffourg. - Je vous remercie pour cet état des lieux des soins à domicile. J'ai bien pris note de la corrélation qui existe, à l'échelle de la population générale, entre la prise en charge en établissement et le degré de dépendance des personnes mesuré par leur indicateur GIR. Je suis élu d'un département rural dont la population est particulièrement vieillissante. Je constate une forte demande d'accueil dans des Ehpad avec des délais d'attente pouvant durer plusieurs mois. Le manque de places en services de soins à domicile à même d'apporter une solution alternative aux établissements s'avère donc une question cruciale.
Pour cela, je suis convaincu qu'un des problèmes majeurs reste la rémunération des aidants à domicile, qui ont eu le sentiment d'être les oubliés du Ségur. Avez-vous des éléments actualisés et plus précis à nous communiquer s'agissant de la revalorisation salariale de ces professionnels ?
Mme Émilienne Poumirol. - Ayant déjà eu l'occasion de gérer le fonctionnement de Saad et de Ssiad, je reviendrai pour ma part sur le point de la coordination. Il me semble qu'à l'échelle de l'intercommunalité ou de plusieurs intercommunalités - si ces dernières sont de petites tailles -, le système de guichet unique fonctionne bien. Dans mon territoire, une véritable coordination permet d'avoir les interventions de l'aide-soignante ou de l'aide-ménagère, par exemple, qui ne se superposent pas afin de fractionner ces actions et ainsi de rendre l'accompagnement le meilleur possible. C'est en améliorant l'efficacité de la coordination que nous permettrons aux personnes de rester à domicile le plus tard possible. En outre, l'échelle supérieure du département est intéressante mais le maillage et l'organisation au sein des intercommunalités me semblent pouvoir être suffisants.
La tarification des Ssiad pose problème. La création d'un Ssiad conduit à une réticence des infirmiers du secteur qui craignent une perte d'activité. Il faut donc faire oeuvre de pédagogie pour les convaincre. Toutefois, ils ont tendance, une fois le Ssiad créé, à n'orienter vers le service que les patients nécessitant des soins très lourds et donc plus consommateurs de temps. L'acte n'étant pas rémunéré en fonction du temps passé auprès de la personne, l'équilibre du budget du Ssiad devient vite difficile et sa pérennité est remise en cause.
Il y a donc un véritable travail à engager sur la gradation de la tarification des actes selon le degré de dépendance pour obtenir un bon équilibre financier des Ssiad. Certains gestionnaires de ces services sont actuellement obligés de refuser des patients dont la situation demande des soins trop lourds ou bien n'engagent du personnel que pour 27 heures par semaine pour rendre leur budget soutenable.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. - J'ai apprécié la mise à plat du système que vous proposez, mais il me semble que vous n'avez pas assez insisté sur les Spasad. Nous sommes nombreux à insister sur la nécessité de coordonner les intervenants pour optimiser les moyens. Ce n'est même pas qu'une question financière : les usagers et les aidants doivent pouvoir se référer à des soignants qui ne soient pas chaque jour différents ! Il faut donc réunir l'aide et les soins à domicile - c'était d'ailleurs la conclusion du rapport que j'avais rendu au nom de la commission avec notre ancien collègue Dominique Watrin.
M. François de la Guéronnière. - Monsieur Fichet, il n'existe pas aujourd'hui de guichet unique : il faut remplir des dossiers différents selon les services auxquels on souhaite avoir accès. Certains dossiers peuvent se remplir en ligne. Une des clés du succès serait de rassembler dans une même entité différents types de structures, sur le modèle des Spasad, en effet.
Mme Alice Lapray. - Nous avons absolument tenu à examiner des territoires ruraux comme urbains, car on n'y rencontre évidemment pas les mêmes réalités. Nous avons été surpris de certaines observations, parfois à rebours des idées reçues - sans qu'elles puissent prétendre à la généralité ; nous avons par exemple rencontré un Ssiad en Seine-et-Marne qui fonctionnait très bien car les emplois proposés étaient stables, et la coopération avec l'hôpital très bonne. Il reste que, dans le monde rural, la durée des transports peut être considérable et les voitures sont indispensables. Il faut donc des outils de gestion performants pour assouplir la coordination, comme un pool de voitures professionnelles pouvant être remisées à domicile, ou un bon logiciel de programmation des déplacements. Lorsque ces outils existent, la coordination peut être plus efficace qu'en zone urbaine.
M. Thierry Grignon. - Pendant longtemps, les diplômes d'assistants éducatif et social ouvraient vers trois filières : travail en Ehpad, services aux personnes âgées, travail en établissement ou services pour personnes handicapées. Le ministère a réformé la formation pour renforcer le tronc commun, afin de remédier à la préférence pour la première filière. Les passerelles seront d'autant plus faciles à développer qu'il y aura moins de concurrence entre secteurs. L'extension des mesures du Ségur y a contribué, ainsi que l'agrément de l'avenant 43 de la branche de l'aide à domicile, qui devait donner lieu à une augmentation de 13 % à 15 % des salaires au 1er octobre.
Il faut enfin ouvrir des perspectives aux aides-soignants. Nous proposons par exemple de simplifier l'accès, pour ces professionnels, à la profession d'infirmier. Aujourd'hui, ces professionnels, qui sont essentiellement des femmes, ne peuvent y prétendre qu'après deux ans et demi d'institut de formation en soins infirmiers, investissement lourd qui ne peut être consenti qu'avant d'avoir des enfants.
M. François de la Guéronnière. - Nous partageons le constat de M. Savary s'agissant du nombre trop important d'aidants intervenant auprès d'une seule personne. C'est pourquoi nous recommandons le développement de services polyvalents comme les Spasad ainsi que de délégations entre professionnels de santé.
M. Savary a ensuite fait observer avec raison que c'était la grille Pathos la plus appropriée pour rendre compte de la dépendance.
M. René-Paul Savary. - Non, elle indique la pathologie !
M. François de la Guéronnière. - Notre rapport évoque bien aussi les indicateurs Pathos. La raison pour laquelle j'ai cité la grille Aggir est que les statistiques sont plus facilement disponibles pour ces indicateurs. Les moyens dont nous disposons aujourd'hui nous contraignent malheureusement à recourir aux GIR.
M. René-Paul Savary. - Oui, mais ce n'est pas juste.
M. François de la Guéronnière. - Sur le fond, vous avez tout à fait raison.
- Présidence de Mme Chantal Deseyne, vice-présidente -
M. Thierry Grignon. - Enfin, la dernière question concernait l'impact du Ségur sur les rémunérations salariales du secteur des soins à domicile. Comme vous le savez, l'extension du Ségur au secteur s'est faite progressivement. S'agissant du complément de traitement indiciaire, l'extension est pratiquement accomplie aujourd'hui, ce qui est une bonne chose. Lors de nos contrôles sur le terrain, quelle que soit la nature du service, cette question de l'extension du Ségur nous remontait systématiquement. Une fuite des ressources humaines était déjà constatée au profit des Ehpad au sein desquels les mesures du Ségur avaient été appliquées.
À notre connaissance, demeurent toujours quelques questions sur l'extension du Ségur au sein du secteur du handicap. En outre, la branche de l'aide à domicile (BAD), par un accord qui s'apparente à un Ségur pour les personnes en Saad, a créé une sorte de concurrence entre les personnels du département ; ce point spécifique demeure donc aussi à régler.
Mme Chantal Deseyne, vice-présidente. - Je vous remercie pour vos interventions et vos éclairages.
Il me reste à demander à la commission l'autorisation de publier l'enquête, avec un avant-propos de notre collègue Philippe Mouiller.
La commission autorise la publication du rapport.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.
Priorités et résultats de la recherche médicale et état des connaissances scientifiques sur le variant Omicron de la covid-19 - Audition de M. Gilles Bloch, président de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et de M. Yazdan Yazdanpanah, directeur de l'agence interne ANRS Maladies infectieuses émergentes
Mme Catherine Deroche, présidente. - Nous entendons à présent M. Gilles Bloch, président de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et M. Yazdan Yazdanpanah, directeur de l'agence interne ANRS Maladies infectieuses émergentes, sur les priorités et les résultats de la recherche médicale et sur l'état des connaissances scientifiques sur le variant Omicron de la covid-19.
J'indique que cette audition fait l'objet d'une captation vidéo retransmise en direct sur le site du Sénat, qui sera ensuite disponible en vidéo à la demande.
Monsieur Bloch, j'ai souhaité organiser cette audition après vous avoir rencontré dans un autre cadre où vous avez présenté, de manière très synthétique et passionnante, le travail de l'Inserm. J'avais pensé que cette audition permettrait à la commission de prendre un peu de distance et de recul par rapport à ses travaux sur la covid, mais nous avons en quelque sorte été rattrapés par l'actualité récente.
Alors que la transformation du passe sanitaire en passe vaccinal a été annoncée à la fin de l'année 2021, en pleine flambée d'une cinquième vague liée au variant Delta du SARS-CoV-2, dont les hôpitaux continuent à subir les conséquences, des interrogations se sont fait jour sur les effets du variant Omicron sur l'évolution de l'épidémie. Je remercie M. Yazdanpanah d'avoir accepté de venir nous en parler ce matin.
Sur le fondement des travaux de l'Inserm et des publications les plus récentes, s'appuyant notamment sur les observations faites dans les pays qui nous ont précédé face au variant Omicron, comme l'Afrique du Sud ou le Royaume-Uni, je souhaiterais que vous puissiez nous apporter des réponses aux questions suivantes : que savons-nous précisément de ce variant, de sa contagiosité et de sa létalité ? Quelles conséquences entraîne-t-il sur le vaccin ? Dans quelle mesure le vaccin permet-il d'éviter les infections ou les réinfections, de réduire la transmission et d'éviter les formes graves de la maladie ?
Je voudrais aussi vous interroger sur l'état de la science quant à la différence entre l'immunité acquise par le fait d'avoir contracté la maladie et celle qui est acquise par le vaccin.
M. Gilles Bloch, président de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). - C'est un plaisir d'être de nouveau parmi vous. Nous avions initialement prévu un échange sur l'Inserm et son positionnement dans le paysage de la recherche française et internationale. Compte tenu de l'actualité, vous avez aussi souhaité que nous fassions un focus sur l'épidémie qui repart avec le variant Omicron.
Permettez-moi en dix minutes maximum de dresser le panorama du positionnement global de l'Inserm et sa trajectoire pour les années à venir ; 2022 est une échéance importante, puisque nous devrons signer très bientôt notre contrat d'objectifs. Puis, mon collègue Yazdan Yazdanpanah axera son propos sur l'épidémie et le variant Omicron. Nombre de sénateurs connaissent bien notre institution, puisque, à l'instar d'autres PDG, j'ai déjà été auditionné par le Sénat.
L'Inserm est la locomotive de la recherche en santé en France, qui comprend près de 300 laboratoires répartis sur le territoire, employant plus de 8 000 salariés et collaborant avec 8 000 chercheurs, hospitalo-universitaires ou issus du Centre national de la recherche scientifique (CNRS).
Il couvre, de par sa taille, l'ensemble du spectre des thématiques médicales, depuis la recherche fondamentale à laquelle nous sommes attachés et sa publication dans les grands journaux, tels que Science ou Nature, jusqu'à la recherche très finalisée, y compris sur la personne humaine. Ses trois grandes missions sont la production de connaissances ; le transfert vers le monde économique ; et la diffusion des savoirs vers tous les publics, notamment les gouvernants, qui reprennent parfois largement nos expertises collectives.
La crise a fait grand bruit dans les médias et le monde politique. Jusqu'à présent, la France a tenu son rang en termes de production de connaissances issues de l'Inserm comme des autres opérateurs. Je souligne que nous avons également produit notre part de science habituelle dans d'autres domaines.
J'évoquerai brièvement l'actualité de notre institution. Je l'ai indiqué, nous allons cette année signer avec l'État notre contrat d'objectifs, de moyens et de performance. Ce contrat, qui devrait être soumis au conseil d'administration la semaine prochaine, s'inscrit dans le cadre de la loi de programmation de la recherche. Grâce aux moyens supplémentaires clairement affichés, nous pourrons mieux soutenir nos laboratoires, revaloriser les rémunérations, retrouver une trajectoire d'emplois à la hausse. Alors que nous recrutions chaque année 60 chercheurs et 75 ingénieurs, techniciens, administratifs (ITA) lors du précédent contrat, nous emploierons désormais 77 chercheurs et 105 ITA, auxquels s'ajouteront les chaires de professeurs juniors.
En 2021, en exécution, le budget de l'Inserm a pour la première fois dépassé le milliard d'euros, dont le tiers provient toujours de recettes extérieures. Notre budget 2022 se stabilisera au-dessus de ce chiffre, comme voté en loi de finances. Autre nouveauté, le ministère de la santé apportera sa contribution directe par des subventions au budget de l'Inserm. Nous pourrons ainsi déployer de manière plus efficace des programmes de recherche en santé, notamment vers la recherche clinique.
Quelles sont les grandes priorités de l'Inserm ? Je le redis, l'Inserm est mobilisé sur toutes les thématiques et disciplines dans le domaine de la recherche en santé. Il s'est vu confier de grands programmes nationaux, les « stratégies d'accélération » : l'une est axée sur les maladies infectieuses émergentes et sera mise en oeuvre par l'ANRS Maladies infectieuses émergentes, afin de donner plus de substance à l'action de l'Inserm ; une autre s'articule autour de la santé numérique et du projet numérique du PariSanté Campus ; une troisième - annoncée tout récemment - s'attachera aux biothérapies et à la bioproduction ; une quatrième, enfin, portera sur le microbiote en santé - elle n'est pas rendue publique, mais nous y travaillons avec nos collègues de l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae).
Au-delà de ces projets en cours, l'Inserm est très mobilisé pour faire aboutir de nouvelles stratégies exploratoires, financées par les investissements d'avenir, autour de la santé mentale - après l'annonce du Président de la République en septembre, nous soumettons derechef un dossier scientifique en ce sens -, du vieillissement en bonne santé, de l'explosion des inégalités sociales et leur retentissement sur la santé, du diabète et de ses complications, véritable fléau qui, à côté des maladies infectieuses, prospère activement dans le monde entier.
Mme Catherine Deroche, présidente. - J'ai participé hier avec certains de mes collègues à un déjeuner de travail, lors duquel le directeur de l'Institut Gustave-Roussy (IGR) a évoqué la cancérologie personnalisée d'ici à 2030. L'Inserm travaille-t-il en partenariat avec des instituts ?
M. Gilles Bloch. - J'ai tracé des pistes d'inflexion, mais l'Inserm est fortement positionné sur un socle, dont fait partie la recherche sur le cancer. Tous les grands centres de recherche, qu'il s'agisse de l'IGR, de l'Institut Curie ou du Centre Léon-Bérard à Lyon, sont en cotutelle avec l'Inserm. Depuis une dizaine d'années, les moyens des plans Cancer successifs et de la stratégie décennale ont contribué au travail de structuration et aux avancées qualitatives des recherches en ce domaine, dont l'Inserm a été partie prenante.
M. Bernard Jomier. - J'aimerais vous poser deux questions.
La première porte sur la recherche. L'Inserm couvre les différents champs de la recherche - fondamentale et clinique. La France a créé six instituts hospitalo-universitaires (IHU) voilà un peu plus de dix ans, et je précise d'emblée que ma question ne porte pas du tout sur l'Institut hospitalo-universitaire Méditerranée Infection. Ce sont des modèles très intéressants d'intégration des différents types de recherche et des applications thérapeutiques. Quel est votre regard sur ces IHU, au travail desquels vous êtes partie prenante ? Ce modèle a-t-il tenu ses promesses ?
Ma seconde question concerne l'information en santé, qui est l'un de vos axes de travail importants. La pandémie a révélé à quel point l'information scientifique des Français s'est trouvée menacée par la multiplication de données infondées. Comment l'Inserm appréhende-t-elle cette question ?
Mme Victoire Jasmin. - Vous avez parlé de l'Inserm de façon générale. Mais qu'en est-il de l'unité mixte de recherche (UMR) se trouvant en Guadeloupe ? Comment envisagez-vous la continuité de l'activité de recherche, particulièrement sur la drépanocytose, dans le cadre de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ? Quelles sont les perspectives avec la Caraïbe ?
Mme Florence Lassarade. - On entend beaucoup parler du numérique en santé, qui suscite des promesses difficiles à tenir eu égard à la confidentialité et à la gestion des données médicales. Quel est votre point de vue sur l'espace numérique de santé, dont on aimerait qu'il émerge ? C'est à mon avis relativement urgent.
M. Gilles Bloch. - Merci pour ces questions qui recouvrent des sujets de préoccupation pour l'Inserm.
Pour les IHU, j'ai un positionnement pragmatique. À certains endroits, ce modèle a extrêmement bien fonctionné. C'est le cas d'Imagine et de l'Institut du cerveau (ICM), dont je suis administrateur et au sein desquels je me rends avec assiduité. Ce sont des réussites qui ont concrétisé notre mobilisation pour réunir des acteurs de la recherche publique, hospitalière, de grands industriels eux-mêmes administrateurs et des associations de patients. C'est aussi le cas des UMR importantes, où la mixité est forte du fait des conditions locales et du leadership des individus concernés. Ailleurs, ce modèle a moins bien marché. L'IHU de Cannes a été délabellisé et le fonctionnement de l'Institut Méditerranée est, de notoriété publique, discutable et sera probablement mieux contrôlé par les partenaires visés.
Le modèle IHU apporte en cas de succès une réelle plus-value, qui justifie de relancer de nouvelles initiatives. Nous discutons d'un prochain appel d'offres dans les prochains mois, et l'Inserm collabore à de futures propositions dans ce cadre.
Pour ce qui est de l'information en santé, nous l'avons tous touchée du doigt de façon cuisante durant la première vague de la crise covid au printemps et à l'été 2020. Nous avons tous réagi dans l'urgence, et certains se sont exprimés de façon individuelle sans recevoir l'appui des institutions. Cela s'est parfois avéré totalement contreproductif par rapport à la gestion collective de la crise, contribuant à une certaine hystérie.
L'Inserm a essayé de maîtriser les prises de parole malheureuses et d'apporter des informations construites, mises à disposition sur notre site web et nos vidéos pour démonter les fake news. Nous avons mis en place une cellule-riposte, composée d'une centaine de chercheurs ou d'enseignants-chercheurs, pour déconstruire une fausse information et proposer un contenu positif. Nous avons aussi rendu disponible un très bon ouvrage sur ce thème. Nous sommes montés en puissance de façon offensive en faveur de la communication envers tous les publics. Le fonctionnement des médias est ce qu'il est, mais nos grandes institutions et les universités oeuvrant à la recherche en santé doivent faire entendre leur voix pour être des références sur des savoirs construits selon un consensus.
S'agissant de la recherche sur la drépanocytose et l'UMR en Guadeloupe, nous allons probablement maintenir nos efforts et procéder à des évaluations régulières. Il est très important que l'Inserm soit présent dans les outre-mer sur ces thématiques locales ; je veux vous rassurer sur ce point.
Enfin, sur la vaste question du numérique en santé, nous avons travaillé sur la stratégie d'accélération main dans la main avec l'Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (Inria). L'objectif est de fournir des outils et d'expérimenter des projets utilisant les données massives. Celles qui portent sur la personne humaine se heurtent à la confidentialité. Mais selon nous, il faut y avoir accès en respectant certaines règles éthiques. Le dossier patient individuel est déployé par le ministère de la santé ; l'Inserm n'est donc pas directement concerné par ce chantier. L'outil similaire qui est utilisé en Suède donne des gisements d'informations très précieux pour la recherche en épidémiologie.
Mme Catherine Deroche, présidente. - Notre commission lancera une mission d'information sur les données de santé, thème qui s'invite très fréquemment dans nos débats. L'absence de dossier médical partagé (DMP) entraîne des dysfonctionnements de gestion et oblige à réitérer les mêmes examens.
M. Yazdan Yazdanpanah, directeur de l'ANRS Maladies infectieuses émergentes. - Le variant Omicron a émergé début novembre, et a pour la première fois été identifié en Afrique du Sud - ce pays a des capacités de séquençage que d'autres n'ont pas.
En Europe, il a été introduit dans certains pays en raison de leur proximité avec l'Afrique du Sud - le Royaume-Uni a de nombreux vols avec ce pays -, mais aussi parfois du respect moindre des gestes barrières dans certains pays - des clusters ont été observés au Danemark et en Norvège. En France, il est arrivé avec environ quinze jours de retard sur le Royaume-Uni. La souche Omicron est largement majoritaire en France, malgré des différences géographiques.
Lorsque nous avons un nouveau variant, nous nous posons quatre questions : sait-on faire le diagnostic ? est-il plus contagieux ? est-il plus sévère ? répond-il aux vaccins et aux traitements ?
Pour le variant Omicron, on peut désormais affirmer que les tests fonctionnent bien, et que ce variant est plus transmissible. Le R0, à savoir le nombre de personnes à qui une personne infectée transmet le virus, est de 10 pour le variant Omicron, contre 3 au début de l'épidémie et 5 ou 6 pour le variant Delta. Les courbes très importantes sont dues au fait qu'il répond moins bien au vaccin, et qu'il est plus transmissible intrinsèquement.
Concernant la réponse vaccinale, six mois après la deuxième dose vaccinale, la protection contre l'infection est proche de zéro - je ne parle pas de la protection contre les formes sévères. Après la dose de rappel, la protection atteint 60 à 70 %, mais on ne sait pas combien de temps elle dure, faute de données. On parle de 50 % à trois mois, mais il semble que le taux baisse ensuite. Les équipes de recherche du centre hospitalier universitaire (CHRU) de Lille et de l'Inserm travaillent sur ce sujet. En revanche, cette efficacité vaccinale est importante pour protéger contre les formes sévères. Même après la deuxième dose, l'efficacité contre les formes graves est de 60 %, et atteint 90 % après rappel. C'est la justification de la politique de vaccination et du rappel pour contrer ce variant. Cependant, nous ne savons pas quelle est la durée d'efficacité du rappel.
Très rapidement, l'Afrique du Sud, le Royaume-Uni puis la France se sont rendu compte que le virus était entre 50 à 80 % moins sévère que le Delta, ce qui équivaut à 50 à 80 % moins de risques d'être hospitalisé ou de décéder. C'est dû au fort taux de vaccination et aux caractéristiques intrinsèques du virus.
Ce virus semble plutôt s'intéresser aux formes ORL qu'aux poumons. Je suis très prudent, mais nous sommes quasiment devant une autre maladie.
Ce changement dicte la stratégie d'intervention : les malades à l'hôpital sont plutôt des malades chroniques qui ont attrapé le virus et qui décompensent. Il est très important d'aller vers ces personnes pour les vacciner, et de protéger efficacement les 300 000 personnes immuno-déprimées. Nous devons aller vers les non-vaccinés et ceux qui n'ont pas eu leur rappel.
Dans les services hospitaliers, 15 à 30 % des patients sont immunodéprimés. Il est important de bien les protéger. Nous avons désormais des traitements : des anticorps monoclonaux et les antiviraux directs comme le Paxlovid de Pfizer, qui arrivera en février, en espérant que les résultats seront aussi bons que ceux qui ont été mentionnés dans le communiqué de presse. Parmi les anticorps monoclonaux que nous utilisions le plus, le Ronapreve de Roche Regeneron a été écarté, car il ne marche plus contre les nouveaux variants, notamment Omicron.
En prophylaxie, la molécule Evusheld d'AstraZeneca nécessite une injection tous les six mois. Son efficacité est diminuée avec Omicron, mais il reste efficace. De nombreux services d'immuno-déprimés, comme les services de transplantation ou de chimiothérapie, ont commencé à l'utiliser. Selon l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) hier, il y aurait 2 000 demandes. Nous devons absolument surveiller pour être sûrs qu'il n'y a pas d'émergence de résistance, d'où la mise en place de cohortes.
Nous devons protéger ceux qui risquent d'évoluer vers des formes sévères. Le sotrovimab de GSK a été autorisé par la Haute Autorité de santé (HAS) et sera disponible à la fin du mois pour les protéger. Nous avons donc des traitements que nous devons utiliser pour les immunodéprimés, mais il faut bien encadrer les choses.
Sur l'immunité naturelle, entre 9 à 12 millions de personnes auraient été infectées en France depuis la vague Omicron. Comment le savoir ? Selon le Consortium pour la surveillance et la recherche sur les infections à pathogènes émergents via la génomique microbienne (EMERGEN), 4,5 millions de personnes ont été infectées par Omicron, sachant que tout le monde ne se teste pas. Le chiffre de 9 à 12 millions est obtenu par extrapolation. Nous sommes probablement au pic. Une enquête de prévalence est prévue par l'Inserm en mars prochain.
Cette immunité va probablement nous protéger des prochaines vagues, même si cela dépendra des variants. Le fait d'avoir 90 % des plus de 12 ans vaccinés et une forte proportion d'infectés augmente l'immunité et protège contre les formes sévères, mais nous ne sommes pas à l'abri d'autres variants. Si nous n'en avons pas de nouveaux, cette maladie pourrait devenir une maladie saisonnière.
Mme Chantal Deseyne. - À propos de la recherche et du suivi des dynamiques épidémiques, l'émergence de nouveaux variants et leurs conséquences, différents instituts publient régulièrement des notes ou des rapports scientifiques sur l'évolution de l'épidémie. Je pense notamment à l'Institut Pasteur qui, fin décembre 2021, produisait des modélisations sur les perspectives d'évolution de la diffusion du virus avec l'arrivée du variant Omicron et de son impact sur le système hospitalier. Je pense aussi au Conseil d'analyse économique (CAE) sur l'impact du passe sanitaire, et à la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees).
Ces différents travaux de recherche et de modélisation sont-ils coordonnés ? Comment ces différents instituts se répartissent-ils par exemple les thématiques sur le suivi du système hospitalier et l'évaluation des différents outils de lutte contre l'épidémie ? Quel partage des informations et quel contrôle par les pairs sont-ils réalisés, notamment en termes de méthodologie ?
M. Laurent Burgoa. - Je vous remercie pour vos propos réalistes. Vous conseillez le Gouvernement. Le Parlement vient de décider la mise en place du passe vaccinal. Cette décision n'aurait-elle pas dû être prise en juillet dernier ?
Mme Florence Lassarade. - Durant les premières vagues, on estimait que les enfants avaient seulement des formes peu graves et étaient peu contagieux. Il y avait 250 hospitalisations d'enfants en début de semaine, 500 désormais, touchant notamment les nouveau-nés de mères non vaccinées durant leur grossesse. Cela va-t-il modifier notre position modérée sur la vaccination des enfants ?
Je suis certaine que le dépistage sur les eaux usées - notamment via le réseau Obépine (Observatoire épidémiologique dans les eaux usées) - renseigne, 15 jours en amont, à faible coût. Que pensez-vous de cet outil scientifique très pertinent ?
M. Olivier Henno. - J'ai été marqué par votre honnêteté, lorsque vous avez évoqué une maladie « presque différente. » La doctrine « tester, tracer, isoler » reste-t-elle encore pertinente avec cette maladie ? Il est légitime de s'interroger. Si cette maladie évolue vite, nous devrons rapidement faire évoluer notre doctrine. Enfin, les tests sont très coûteux. Cela a-t-il encore du sens de tester autant ?
M. Yazdan Yazdanpanah. - Nous devons nous féliciter : nos modélisateurs sont très productifs, à l'Institut Pasteur, à l'Inserm et à Santé publique France. Ils ont fait à la fois de la recherche et guidé la décision.
Nous avons monté un groupe de modélisateurs au sein de l'ANRS, avec une vingtaine de membres, pour essayer de coordonner l'ensemble des institutions sur le virus, mais aussi sur d'autres thématiques. Car nous aurons à l'avenir d'autres maladies émergentes - j'espère qu'elles n'auront pas cette ampleur. Nous voulons fédérer toujours plus les acteurs.
Faut-il un passe vaccinal ou un passe sanitaire ? Il m'est difficile de répondre.
M. Gilles Bloch. - Mon rôle de conseil au Gouvernement repose principalement sur un travail important d'expertise collective, sur un ou deux ans, portant sur de grands sujets comme les pesticides ou les essais nucléaires dans le Pacifique, et pas seulement l'épidémie actuelle.
Dans le cadre de l'épidémie, des experts de l'Inserm ou de l'Institut Pasteur ont participé aux comités conseillant le Gouvernement. Le passe sanitaire a fait la preuve de son efficacité dans la gestion de la crise. Il y a un débat sur le passe vaccinal. L'épidémie a changé de trajectoire ; je pense que le passe vaccinal deviendra une réalité.
M. Yazdan Yazdanpanah. - Au 17 janvier, 519 enfants de 0 à 9 ans étaient hospitalisés à cause du coronavirus et 85 en soins critiques. Les enfants font beaucoup moins de formes graves - sauf ceux qui ont des comorbidités - et cela ne change pas avec le variant Omicron. La plupart des enfants hospitalisés (80 %) ont moins de cinq ans, et 60 % moins d'un an. Ce sont les plus petits, pas encore vaccinés, qui sont touchés, et pas forcément les enfants qui vont à l'école. C'est encore trop, mais ce n'est pas plus que ce que l'on imaginait.
Je suis favorable à la vaccination des enfants de 5 à 11 ans, et je pense qu'il faut la renforcer.
En Espagne, 40 % des 5-11 ans sont vaccinés. Il faut davantage informer, sans rendre la vaccination obligatoire.
Mme Florence Lassarade. - Et les femmes enceintes !
M. Yazdan Yazdanpanah. - Oui. Cela pose aussi la question de la vaccination des populations précaires.
Dès avril 2020, j'étais membre du comité analyse, recherche et expertise (CARE) présidé par Françoise Barré-Sinoussi, qui a encouragé les projets de dépistage dans les eaux usées, en particulier avec le réseau Obépine. Santé publique France et l'ANRS ont lancé le consortium EMERGEN pour renforcer le dépistage dans les eaux usées. Avant même d'avoir diagnostiqué un premier patient infecté par Omicron à La Réunion - territoire ayant des liens de proximité avec l'Afrique du Sud -, nous avions des informations dans le réseau des eaux usées. Nous avons lancé un appel à projets de recherche Obépine, et nous sommes en contact avec eux. Il y a aussi un projet dans les Alpes-Maritimes. C'est un outil complémentaire qu'il faut appuyer.
Vous m'interrogez sur la stratégie « tester, tracer, isoler ». De nombreux pays, compte tenu du nombre de cas positifs, s'interrogent sur la nécessité de continuer à tester. Hier, nous avons dépisté plus de 400 000 cas. Depuis deux ans, nous avons appris avec cette épidémie. Une personne qui se sait positive va moins fréquenter ses amis, voire s'isoler. Une discipline collective s'est imposée. Du coup, cela a un impact sociétal. Selon les modélisations réalisées, si l'on diminue nos contacts sociaux de 20 %, cela réduit les hospitalisations de 50 %, même avec Omicron. Tester est donc important pour ralentir la vague. Certes, plusieurs pays ou régions ont levé le pied : par exemple, l'Ontario teste uniquement les cas symptomatiques. En nous fondant sur ces modélisations, nous pensons qu'il faut continuer de tester.
Mme Catherine Deroche, présidente. - Mais les tests chez les enfants posent problème. Cela devient compliqué pour les parents et pour leurs enfants, qui sont parfois testés trois à quatre fois par semaine.
Mme Victoire Jasmin. - Avez-vous des données pour évaluer l'efficacité réelle du vaccin en fonction de l'efficience et la réponse immunitaire par rapport à la vaccination, selon le nombre de doses, toujours plus rapprochées ?
M. Alain Milon. - J'espère que les difficultés financières que connaissait l'Inserm il y a quelques années ont disparu.
Vous nous avez fait un discours rassurant : plus de 90 % des plus de 12 ans sont vaccinés, un médicament actif sur ce virus va arriver, et nous faisons du dépistage dans les eaux usées. Cela doit rassurer l'ensemble de la population française. Cependant, ces mesures se mettent en place dans un pays riche, ce qui n'est pas faisable dans d'autres pays.
Ne risque-t-on pas de voir arriver par ces pays un variant à échappement vaccinal ?
Mme Nadia Sollogoub. - L'apparition de symptômes post-covid, ou covid long, n'est pas forcément liée à la gravité des symptômes lors de l'infection. On voit même des formes pédiatriques. Y a-t-il plus ou moins de covid long avec Omicron ?
M. Xavier Iacovelli. - Nous sommes favorables à la vaccination des enfants de plus de cinq ans. Je vous fais confiance. Mais 80 % des hospitalisations concernent des enfants de moins de cinq ans. Cela aura-t-il un impact sur les hospitalisations ?
J'ai lu que les tests salivaires étaient moins fiables que sur les précédents variants, et que nous n'avions pas encore d'éléments d'efficacité des tests salivaires sur Omicron. Avez-vous de nouveaux éléments sur ce sujet ?
Omicron s'intéresse plus aux voies ORL et moins aux poumons. A-t-on des éléments sur les séquelles de ces attaques sur les voies ORL, ou pas encore assez de recul ?
Baisser les interactions de 20 % réduirait les hospitalisations de 50 %. Le télétravail a-t-il un impact sur les hospitalisations ? Faut-il aller plus loin ?
Mme Annick Jacquemet. - Selon vous, cette immunité nous protégera face aux autres vagues. S'agit-il de l'immunité vaccinale ou naturelle ? N'aurait-on pas intérêt à laisser l'immunité naturelle s'installer, en protégeant les personnes à risque, ou prendrait-on de gros risques ? Quelle est la fiabilité des différents tests ?
Est-il possible de faire des modélisations sur les futures épidémies, pour être plus rapide et plus efficace ? Avons-nous des données comparatives pour les épidémies antérieures à ce virus, comme, par exemple, sur le pourcentage de positivité dans la population... Est-ce une première avec le covid ?
M. René-Paul Savary. - Les anticorps circulants diffèrent des anticorps cellulaires. Le fait d'avoir un fort taux d'anticorps ne nous protège pas forcément. Comment mesurez-vous l'efficacité des vaccins, lorsque vous indiquez qu'il est efficace à 40 % ? Comment comparez-vous ?
Mme Catherine Deroche, présidente. - Cela rejoint un débat que nous avions en séance. La Suisse, par exemple, a mis en place un passe sérologique.
M. Yazdan Yazdanpanah. - Il y a, d'une part, des études réalisées pour voir quelle immunité humorale est donnée par les anticorps, et quelle est l'immunité cellulaire. Mais cela ne donne pas l'efficience. On ne sait pas quel est le taux d'anticorps protecteurs. On fait donc de la neutralisation. On regarde les cellules T qui semblent protéger contre les formes sévères. Les études les plus importantes sont les études d'efficience, réalisées dans la population : on compare les personnes ayant fait deux ou trois doses. Les résultats sont disponibles après un certain délai, et pas immédiatement. La France n'est pas très bonne dans les enquêtes de populations, pour des raisons réglementaires : il faut croiser les bases de données de vaccination, de cas, etc. Le Royaume-Uni et Israël ont été meilleurs que nous. Avec EPI-PHARE, nous nous améliorons. La crise a fait évoluer un certain nombre de choses, et notamment la surveillance des populations.
M. Gilles Bloch. - L'Inserm est actuellement en bonne santé financière au vu de la progression de ses budgets depuis deux ans. Nous avons de bonnes opportunités - pas nécessairement des dotations de service public -, notamment via le plan d'investissements d'avenir (PIA) dans le cadre de la stratégie France 2030. Nous sommes assez sereins.
M. Yazdan Yazdanpanah. - Il y a des motifs en France d'être rassurants, mais il faut être humble et prudent sur les projections. Évidemment, le fait que moins de 10 % de la population des pays africains soient vaccinés est un vrai problème. Mais il faut quand même faire des choses dans les pays du Nord même si c'est moins fait dans ceux du Sud. Dans ces pays, il y a des problèmes de vaccins, de logistique, mais aussi une hésitation vaccinale plus forte. Comme pour le VIH, il y a un important travail à faire pour convaincre.
Avec les variants « historiques », il y avait jusqu'à 10 à 30 % de symptologie de covid long, qui n'étaient pas liés à la gravité de l'infection. On ne sait pas pour l'instant si l'on obtiendra la même proportion avec le variant Omicron. Nous avons averti les groupes de recherche pour que cela soit étudié. En février et mars, avec autant de personnes infectées, ce sera un sujet important. L'ANRS, la Fondation pour la recherche médicale et l'Inserm ont lancé un appel à projets en deux étapes sur le covid long notamment. Si c'est moins systémique, y aura-t-il moins de séquelles ? C'est possible. Il faut absolument tester.
Concernant la vaccination des enfants, il faut rappeler que la vaccination n'est pas réalisée dans un but individuel, mais collectif et sociétal. C'est son principe même. Cela a aussi un impact sur la transmission, et peut éviter de moins fermer des classes. C'est bon pour la santé mentale et stresse moins les enfants. L'impact est certes faible sur la santé individuelle et somatique. On se vaccine pour soi-même, mais surtout pour les autres.
Il fallait faire un choix entre les tests salivaires et les autotests. Il est difficile de faire des autotests salivaires - même si cela existe. Il semblerait qu'Omicron circule plus dans la sphère ORL et surtout dans la salive. Nous avons réalisé de premières études en Guyane sur la salive, et le résultat n'était pas si mauvais. Cela pourrait avoir un intérêt avec Omicron.
L'estimation de baisser de 20 % les interactions pour réduire les hospitalisations de 50 % repose sur une modélisation et non sur des données constatées. Le télétravail est inclus dans ces chiffres : de même que lorsqu'on est positif, en télétravail, on réduit ses contacts. Vittoria Colizza a réalisé une étude dans laquelle elle démontre l'impact du télétravail sur l'évolution de la pandémie. Au début de l'épidémie, il fallait réduire ses contacts de 60 % pour arriver à un résultat intéressant. Actuellement, il suffit de 20 %. C'est la raison pour laquelle on n'arrête pas les tests.
Chaque apparition d'un nouveau variant interroge sur la fiabilité des tests. D'une manière générale, les tests antigéniques sont moins sensibles que les PCR. Ce n'est pas nouveau. Actuellement, on réalise des tests sur les enfants pour savoir s'ils sont contagieux ou non. Même s'il y a une petite différence, on y gagne en santé publique, car ils sont plus faciles à faire. C'est pareil pour les autotests : ils sont un peu moins fiables, mais ils sont plus faciles à réaliser, car ils sont faits juste sur la paroi nasale, ce qui fait moins mal. Certes, c'est une question particulière pour les enfants. Avec les autotests, la personne prend elle-même les choses en main. C'est important en matière d'autodiscipline. Nous avions beaucoup travaillé sur ce sujet pour le VIH. Avec la vente des autotests en supermarché et la baisse des prix, cela responsabilise encore plus les personnes.
Au début de l'épidémie du SARS-CoV-2, nous nous sommes trompés, car nous nous sommes beaucoup servis de notre expérience sur la grippe, virus respiratoire qu'on connaissait le mieux. Nous connaissions aussi le SARS-CoV-1, apparu en 2002-2003. Or faire beaucoup de mimétisme entre les épidémies nous a induits en erreur. Nous avions un virus exactement le même à 90 %. Nous pensions qu'il se transmettait de la même façon. Or le SARS-CoV-1 se transmet uniquement quand il est symptomatique, tandis que le covid-19 se transmet deux jours avant l'apparition des symptômes. Il faut faire attention. Chaque virus a ses spécificités. Les conditions d'ouverture et de fermeture des écoles ont été étudiées en Asie.
Nous avons déjà discuté du passe sérologique. Pour l'instant, on ne sait pas ce que la sérologie veut dire. Lorsque vous répondez à un vaccin, il n'y a pas que la réponse immunitaire - anticorps humoraux - mais aussi la réponse cellulaire. On ne sait pas encore quelle est l'efficacité de ces anticorps : il ne faut pas faire doser ces anticorps, sauf chez les personnes immunodéprimées.
M. René-Paul Savary. - Et la Suisse ? Les affirmations du professeur Antoine Flahault notamment ?
M. Yazdan Yazdanpanah. - Je ne sais pas. On sait que les personnes immunodéprimées n'ont pas d'anticorps, mais, pour l'instant, on ne peut pas l'affirmer scientifiquement pour le reste de la population.
Mme Catherine Deroche, présidente. - C'est du ressort de la HAS.
Quelle est la forme du reporting de tous les travaux de l'Inserm auprès des autorités politiques ?
M. Gilles Bloch. - Nous avons mis en place une veille très importante sur les résultats scientifiques internationaux, et réalisé un énorme travail depuis le printemps 2020, afin que les ministères aient l'expertise la plus à jour pour prendre leurs décisions.
Mme Catherine Deroche, présidente. - C'est l'ANSM qui travaille sur les effets secondaires des vaccins ?
M. Yazdan Yazdanpanah. - Sur la pharmacovigilance, oui.
Un groupe d'étude au sein de l'ANRS, coordonné par Brigitte Autran, travaille sur les anticorps monoclonaux, et un groupe coordonné par Lionel Piroth travaille sur les antiviraux. Ils travaillent de manière très étroite.
M. René-Paul Savary. - Vous dites qu'avec le covid on est contagieux avant l'apparition des symptômes, mais combien de temps avant, et durant quelle période ? Parfois on peut être testé positif à J+5 ou J+7, sans être forcément contagieux...
Mme Corinne Imbert. - Comme le virus circule beaucoup, de nombreux patients, cas contacts, interrogent les professionnels de santé pour savoir s'ils doivent se faire vacciner. S'ils sont potentiellement contagieux, voire infectés, que faire ?
M. Yazdan Yazdanpanah. - C'est toute la difficulté du SARS-CoV-2 : la personne est contagieuse deux à trois jours avant le début des symptômes. C'est toute la difficulté, et la raison pour laquelle tout le monde devait porter le masque. Pour le SARS-CoV-1, la personne était contagieuse deux à trois jours après le début des symptômes. Ce n'est pas parce que le PCR est positif qu'on est contagieux. Quand on a un taux de CT supérieur à 30, on n'est pas contagieux. Les chercheurs ont essayé de cultiver le virus chez une personne qui excrète le virus. Au-delà de sept jours, sauf si le patient est immunodéprimé, il n'est plus contagieux. S'il est vacciné, la durée d'excrétion est encore plus courte. Certes, on ne connait pas tout avec Omicron.
Pour les règles d'isolement, le Haut Conseil propose un test antigénique à J+5. S'il est négatif, la personne n'est probablement plus contagieuse. S'il est positif, elle l'est encore probablement. Le PCR est plus sensible.
Pour une personne cas contact, tout dépend du type de contact. En tant que clinicien, je dirais qu'il faut attendre une semaine pour savoir si l'on n'est pas infecté. Si l'on portait un masque, a priori il n'y a pas de problème. Si le contact était sans masque ou au sein du foyer, je recommanderais de différer d'une semaine le vaccin.
Mme Laurence Rossignol. - Lorsqu'on est encore positif à J+7, comment doit-on se comporter ?
M. Yazdan Yazdanpanah. - Si c'est un antigénique positif à J+7, je vous suggère d'attendre jusqu'à J+10. Si c'est un test PCR dont le taux est supérieur à 30, a priori vous pouvez arrêter l'isolement.
Mme Catherine Deroche, présidente. - Merci de votre intervention.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.
Mission d'information sur l'adéquation du passe vaccinal à l'évolution de l'épidémie de covid-19 - Demande d'octroi à la commission, pour une durée de six mois, des prérogatives attribuées aux commissions d'enquête
Mme Catherine Deroche, présidente. - À l'occasion des débats sur le projet de loi renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique, des interrogations se sont fait jour sur le calendrier dans lequel s'inscrivait l'examen de ce texte au regard de l'évolution de l'épidémie. Tout en acceptant le principe du passe vaccinal, les rapporteurs ont affirmé la nécessité d'opérer un suivi attentif de sa mise en oeuvre.
À cette fin, nous pourrions constituer, au sein de notre commission, une mission d'information sur l'adéquation du passe vaccinal à l'évolution de l'épidémie de covid-19.
À mon sens, ces travaux devraient rester relativement circonscrits et aboutir assez rapidement, dans la mesure où ils auront forcément un impact sur le reste de nos travaux et que l'agenda de la commission est déjà très dense. Cette mission pourrait entendre la direction générale de la santé et Santé publique France, la Drees, Doctolib, l'Institut Pasteur, l'Inserm, ainsi que le ministre de la santé. Nous avons de fait procédé aujourd'hui à l'audition de l'Inserm.
À l'issue de cette réunion de commission, je saisirai le Président du Sénat afin que cette mission d'information puisse être dotée des prérogatives d'une commission d'enquête, si vous êtes d'accord sur cette démarche. Si la commission des lois confirme la recevabilité du sujet, et après passage devant la Conférence des présidents cet après-midi, cela sera acté en séance publique demain à 10 h 30.
La commission décide de créer une mission d'information sur l'adéquation du passe vaccinal à l'évolution de l'épidémie de covid-19 et de demander au Sénat l'octroi pour celle-ci, pour une durée de six mois, des prérogatives attribuées aux commissions d'enquête.
Mme Catherine Deroche, présidente. - Notre commission n'est pas familière de cette procédure dans la mesure où elle dispose déjà de pouvoirs spéciaux en application de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale (LOLFSS). Les commissions des lois et de l'aménagement du territoire en sont plus coutumières. Je précise que c'est au bénéfice d'une mission déterminée d'une commission que des prérogatives de commission d'enquête peuvent être octroyées.
Nous désignerons les rapporteurs ultérieurement.
Comme c'est l'usage au sein de notre commission, tous les membres de la commission des affaires sociales seront évidemment invités à assister aux auditions menées par la mission d'information qui travaillera en toute transparence.
Proposition de loi visant à renforcer le droit à l'avortement (deuxième lecture) - Examen d'une motion et de l'amendement au texte de la commission
Mme Catherine Deroche, présidente. - Il est d'usage dans notre commission de désigner un rapporteur issu du groupe auteur de la proposition de loi lorsqu'elle est inscrite au sein d'un espace réservé. Ce rapporteur le demeure lorsque le texte est inscrit en deuxième lecture à l'ordre du jour gouvernemental.
Aussi, s'il revient en principe au rapporteur de présenter une motion tendant à opposer la question préalable au nom de la commission, je n'ai pas voulu imposer cet exercice à notre collègue Laurence Rossignol.
Mme Laurence Rossignol, rapporteure. - Je vous en remercie.
EXAMEN D'UNE MOTION ET DE L'AMENDEMENT
Mme Catherine Deroche, présidente. - Si le gentlemen's agreement nous avait permis de conserver une discussion générale en séance publique malgré une motion déposée par un groupe politique, il n'en va pas de même lorsque le texte est inscrit au sein de l'ordre du jour gouvernemental.
Afin de préserver la discussion générale, c'est au nom de la commission que je vous demande d'adopter une motion tendant à opposer la question préalable. Je ne reprendrai pas les arguments exposés la semaine dernière qui conduisent notre commission, bien que favorable à l'interruption volontaire de grossesse (IVG), à s'opposer à ce texte qui augmente les délais de recours.
Mme Laurence Rossignol, rapporteure. - Bien entendu, je regrette que la commission des affaires sociales et probablement le Sénat votent la question préalable, et que le texte ne soit pas adopté.
Le choix que vous faites pour exprimer votre désaccord avec cette proposition de loi est respectable, et il est beaucoup plus digne qu'une guerre de tranchées, à savoir une guerre d'amendements pour bloquer le texte.
Mme Catherine Deroche, présidente. - Nous avions eu un débat très intéressant lors de l'examen en commission. Nous pouvons ne pas être favorables à l'allongement des délais mais écouter les arguments des uns et des autres.
La motion n° 2 tendant à adopter la question préalable est adoptée. En conséquence, la commission décide de soumettre au Sénat une motion tendant à opposer la question préalable à la proposition de loi.
Elle émet un avis défavorable à l'amendement n° 1.
Mme Laurence Cohen. - Je regrette que mon amendement devienne sans objet à cause de la question préalable et qu'on ne puisse pas débattre sur le fond des arguments. Il est dommage que le Sénat n'adopte pas cette proposition de loi, mais c'est le débat démocratique...
TABLEAUX DES SORT ET AVIS
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
Motion |
|||
Mme DEROCHE |
2 |
Motion tendant à opposer la question préalable |
Favorable |
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Article 2 |
|||
Mme COHEN |
1 |
Rétablissement de l'article 2 d'origine, supprimant la clause de conscience spécifique à l'IVG. |
Défavorable |
Désignation de rapporteurs
Mme Catherine Deroche, présidente. - Sur la proposition de loi n° 64 (2021-2022) visant à maintenir le versement de l'allocation de soutien familial en cas de nouvelle relation amoureuse du parent bénéficiaire, la désignation est reportée à la semaine prochaine à la demande du groupe socialiste.
M. Jean-Luc Fichet est désigné rapporteur de la proposition de loi n° 337 (2021-2022) visant à créer une garantie à l'emploi pour les chômeurs de longue durée, dans des activités utiles à la reconstruction écologique et au développement du lien social.
Mme Catherine Deroche, présidente. - Ces deux textes sont inscrits au sein de l'espace réservé du groupe socialiste du 23 février prochain. Ils seront examinés en commission le 16 février où nous aurons donc un ordre du jour particulièrement chargé, avec cinq textes à examiner.
Projet de loi portant reconnaissance de la Nation envers les harkis et les autres personnes rapatriées d'Algérie anciennement de statut civil de droit local et réparation des préjudices subis par ceux-ci et leurs familles du fait de leurs conditions d'accueil sur le territoire français - Désignation des candidats à la commission mixte paritaire
Mme Catherine Deroche, présidente. - La commission mixte paritaire se réunira au Sénat le 1er février à 14 heures.
La commission soumet au Sénat la nomination de Mmes Catherine Deroche, Marie-Pierre Richer, Chantal Deseyne, Jocelyne Guidez, Émilienne Poumirol et Monique Lubin et M. Xavier Iacovelli comme membres titulaires, et de Mme Pascale Gruny, M. Laurent Burgoa, Mme Christine Bonfanti-Dossat, M. Olivier Henno, Mme Annie Le Houerou, M. Jean-Claude Requier et Mme Cathy Apourceau-Poly comme membres suppléants de l'éventuelle commission mixte paritaire.
Proposition de loi visant à renforcer le droit à l'avortement - Désignation des candidats à la commission mixte paritaire
Mme Catherine Deroche, présidente. - La commission mixte paritaire se réunira demain à 9 h 15 au Sénat.
Mme Laurence Rossignol, rapporteure. - Ce sera très rapide...
La commission soumet au Sénat la nomination de Mmes Catherine Deroche, Laurence Rossignol, Florence Lassarade et Chantal Deseyne, M. Olivier Henno, Mme Émilienne Poumirol et M. Xavier Iacovelli comme membres titulaires, et de MM. René-Paul Savary et Alain Milon, Mmes Corinne Imbert, Annick Jacquemet et Michelle Meunier, M. Stéphane Artano et Mme Laurence Cohen comme membres suppléants de l'éventuelle commission mixte paritaire.
La réunion est close à 12 h 10.
Jeudi 20 janvier 2022
- Présidence de Mme Catherine Deroche, présidente -
La réunion est ouverte à 10 heures 20.
Désignation de rapporteurs
La commission des affaires sociales désigne Mme Chantal Deseyne, M. Olivier Henno et Mme Michelle Meunier rapporteurs de la mission d'information sur l'adéquation du passe vaccinal à l'évolution de l'épidémie de covid-19.
Projet de loi relatif à la protection des enfants - Examen des amendements au texte de la commission mixte paritaire
Mme Catherine Deroche, présidente. - Nous examinons les amendements de séance déposés par le Gouvernement sur le texte établi par la commission mixte paritaire chargée d'examiner les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la protection des enfants.
M. Bernard Bonne, rapporteur. - La commission émet un avis favorable sur les amendements de coordination nos 1 à 5.
EXAMEN DES AMENDEMENTS AU TEXTE DE LA COMMISSION MIXTE PARITAIRE
TABLEAU DES AVIS
La réunion est close à 10 h 25.