- Lundi 5 juillet 2021
- Mardi 6 juillet 2021
- Mercredi 7 juillet 2021
- Projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale - Examen des amendements au texte de la commission des lois sur les articles délégués au fond
- Hommage à un commissaire décédé
- Application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 - Examen du rapport d'information
- Réserves des régimes de retraites - Examen du rapport d'information
- Élection du rapporteur général
- Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 - Désignation de rapporteurs
- Projet de loi de finances pour 2022- Désignation de rapporteurs pour avis
- Désignation d'un rapporteur
- Proposition de loi pour la prévention en santé au travail - Désignation des candidats à la commission mixte paritaire
Lundi 5 juillet 2021
- Présidence de M. Philippe Mouiller, vice-président -
La réunion est ouverte à 14 h 30.
Proposition de loi pour la prévention en santé au travail - Examen des amendements au texte de la commission
M. Philippe Mouiller, président. - Nous examinons les amendements de séance sur la proposition de loi pour la prévention en santé au travail.
M. Stéphane Artano, rapporteur. - Avant d'entamer l'examen des amendements de séance, je souhaite partager avec vous l'approche que Pascale Gruny et moi-même avons retenue dans le contrôle de la recevabilité de ces amendements au titre de l'article 45 de la Constitution. Comme vous le savez, pour être recevables, les amendements doivent présenter un lien, direct ou indirect, avec une disposition du texte déposé. J'insiste sur ce dernier point : conformément à la jurisprudence constante du Conseil constitutionnel, la recevabilité s'apprécie au regard de la version initiale de la proposition de loi et non du texte transmis par l'Assemblée nationale.
Parmi les amendements déposés en vue de l'examen en séance, il nous semble que quatre thèmes principaux s'écartent manifestement du champ initial du texte déposé.
Le premier concerne la prévention des violences conjugales, sexuelles et sexistes ainsi que les droits et l'accompagnement des personnes victimes de ces violences. Une quinzaine d'amendements traitent de ce sujet pourtant éloigné des dispositions du texte initial qui portent, je le rappelle, sur l'organisation du système de santé au travail. Bien entendu, nous ne nions pas l'importance de ce sujet et ses répercussions sur la santé et les conditions de travail des salariés. Pour autant, l'enjeu des violences à caractère sexuel ou sexiste n'est abordé que par l'article 1er et sous un angle très spécifique et limité dans sa portée : il s'agit d'harmoniser la définition du harcèlement sexuel entre le code pénal et le code du travail. Nous pensons, par conséquent, que ce texte n'est pas le bon véhicule pour discuter ces propositions qui semblent inspirées par une convention de l'Organisation internationale du travail (OIT) sur la violence et le harcèlement.
D'une façon générale, aucune disposition du texte initial n'a pour objet de préciser les conditions de prévention et de protection contre une catégorie déterminée de facteurs de risques professionnels ni d'énumérer ces facteurs de risques. Dans ces conditions, contrairement aux amendements portant sur la définition du harcèlement sexuel au travail, la très grande majorité des amendements tendant à insérer dans la proposition de loi des dispositions relatives à la prévention des violences sexuelles, sexistes ou domestiques ne présentent pas de lien, même indirect, avec des dispositions de la proposition de loi dans sa version initiale. Par conséquent, ils nous semblent devoir être regardés comme irrecevables au titre de l'article 45 de la Constitution.
Suivant ce raisonnement, il devrait en aller de même pour les amendements relatifs à la prévention de certains facteurs de risques liés aux modalités d'organisation du travail, telles que la gestion algorithmique des ressources humaines ou le télétravail. Ces amendements ne sont rattachables à aucune disposition du texte déposé. La mention de l'organisation du travail à l'article 2 résulte d'un amendement adopté par l'Assemblée nationale et ne vise qu'à rappeler que les employeurs doivent tenir compte de cet enjeu dans l'évaluation des risques professionnels. Elle ne peut pas constituer, sur le plan juridique, une porte d'entrée à l'ajout de dispositions sur des modalités spécifiques d'organisation du travail, modalités qui pourraient, sinon, être déclinées à l'infini.
Un troisième thème s'écartant du champ initial de la proposition de loi concerne les procédures applicables aux employeurs en matière de reclassement des salariés inaptes, puisque le texte déposé ne comporte aucune disposition sur ce sujet.
La proposition de loi, dans sa version initiale, ne comporte aucune disposition relative à l'organisation des instances représentatives du personnel (IRP). Le comité social et économique n'est évoqué à l'article 2 qu'en tant qu'il contribue à l'évaluation des risques professionnels. Une telle disposition ne permet pas d'envisager de revenir, d'une façon générale, sur l'organisation, le fonctionnement et les missions des IRP. Enfin, comme nous l'avions évoqué lors de l'examen en commission, les thèmes de la négociation collective autres que ceux qui sont liés à la santé au travail ne trouvent pas non plus leur place dans cette proposition de loi.
Voici les principaux éléments que je souhaitais porter à votre attention sur le contrôle de la recevabilité des amendements au titre de l'article 45 de la Constitution.
EXAMEN DES AMENDEMENTS DES RAPPORTEURS
Article 2 bis
L'amendement de coordination n° 223 est adopté.
M. Stéphane Artano, rapporteur. - L'amendement n° 224 vise à faire courir le délai de six mois imparti au Comité national de prévention et de santé au travail (CNPST) pour déterminer les modalités de mise en oeuvre du passeport de formation à partir de la publication du décret qui doit le mettre en place. En outre, il fixe une date butoir au déploiement du passeport de prévention, qui devra intervenir, au plus tard, le 1er octobre 2022.
L'amendement n° 224 est adopté.
Article 7
L'amendement de coordination n° 225 est adopté.
M. Stéphane Artano, rapporteur. - La commission a prévu de laisser aux partenaires sociaux, par l'intermédiaire du CNPST, l'initiative de la détermination du cahier des charges de la certification. En cas d'absence de proposition à l'issue d'un délai déterminé, les référentiels seraient déterminés par décret en Conseil d'État. L'amendement du Gouvernement no 187 revient sur cet apport de la commission en prévoyant un simple avis du CNPST. Le sous-amendement n° 226 vise à conserver la rédaction de la commission sur ce point.
Le sous-amendement n° 226 est adopté. La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 187 ainsi modifié.
Article 8 bis
L'amendement rédactionnel n° 227 est adopté.
M. Stéphane Artano, rapporteur. - L'amendement n° 228 supprime cet alinéa devenu inutile avec l'entrée en vigueur, à compter du 1er juillet 2021, de la nouvelle rédaction de l'article L. 1111-18 du code de la santé publique.
L'amendement n° 228 est adopté.
M. Stéphane Artano, rapporteur. - L'amendement n° 229 prévoit une date butoir pour le versement d'une partie du dossier médical en santé au travail au sein du volet « santé au travail » du dossier médical partagé, fixée au plus tard au 1er janvier 2024.
L'amendement n° 229 est adopté.
Article 14
L'amendement de coordination n° 230 est adopté.
M. Stéphane Artano, rapporteur. - L'amendement n° 231 vise à assurer la cohérence rédactionnelle de l'article 14 bis et à garantir son applicabilité à Saint-Pierre-et-Miquelon.
L'amendement n° 231 est adopté.
Article 15
L'amendement rédactionnel n° 232 est adopté.
Article additionnel après l'article 17
M. Stéphane Artano, rapporteur. - Compte tenu de la brièveté de leurs missions, d'une durée moyenne de quinze jours, les trois millions de salariés intérimaires bénéficient d'un suivi individuel de leur état de santé très insuffisant et ne reçoivent presque aucune information de prévention sur les risques auxquels ils sont exposés, que ce soit par l'entreprise de travail temporaire ou l'entreprise utilisatrice. L'amendement n° 233 vise à renforcer les actions de prévention en santé au travail pour ces salariés.
L'amendement n° 233 est adopté.
M. Stéphane Artano, rapporteur. - L'amendement n° 234 vise à tenir compte du fait que, compte tenu des ressources médicales limitées sur le territoire de Saint-Pierre-et-Miquelon, tous les médecins non spécialistes en médecine du travail susceptibles d'exercer dans ce domaine ne seront pas nécessairement en capacité de justifier d'une formation en médecine du travail dès l'entrée en vigueur de la loi.
L'amendement n° 234 est adopté.
M. Stéphane Artano, rapporteur. - L'amendement n° 235 fixe au 1er janvier 2023 la date butoir d'entrée en vigueur de l'article 21 de la proposition de loi.
L'amendement n° 235 est adopté.
M. Stéphane Artano, rapporteur. - L'amendement n° 236 vise à poser une date butoir, fixée au 1er juillet 2022, à la mise en oeuvre des obligations de formation des infirmiers de santé au travail. La définition du contenu de cette formation requiert un temps de concertation et une adaptation des maquettes pédagogiques des formations proposées par les établissements d'enseignement supérieur les dispensant.
L'amendement n° 236 est adopté.
M. Stéphane Artano, rapporteur. - L'article 8 bis, inséré par la commission, vise à permettre aux services de prévention et de santé au travail autonomes (SPSTA) de recourir, par convention, aux compétences des services de prévention et de santé au travail interentreprises (SPSTI). L'amendement n° 237 a pour objet, réciproquement, de permettre à un SPSTI de recourir aux compétences d'un SPSTA.
L'amendement n° 237 est adopté.
TABLEAU DES SORTS
EXAMEN DES AMENDEMENTS AU TEXTE DE LA COMMISSION
TABLEAU DES AVIS
M. Stéphane Artano, rapporteur. - L'amendement n° 148 prévoit une formation des élus au comité social et économique (CSE) au harcèlement moral, sexuel, aux agissements sexistes et à la prévention des violences sexuelles et sexistes. Il est irrecevable au titre de l'article 45.
Mme Laurence Cohen. - Même si le périmètre de ce texte a été défini en commission, il me semble que l'application de l'article 45 - déjà restrictif en soi - est sévère, si elle doit conduire à exclure ce qui touche aux violences sexistes et sexuelles, ou à la suppression du comité d'hygiène, de sécurité et de conditions de travail (CHSCT). Cela pose problème, et c'est un coup porté à notre droit d'amendement, quels que soient les bancs sur lesquels nous siégeons. La prévention concerne bien la santé au travail ! Je le redirai en séance, car cette évolution me paraît lourde de dangers pour la démocratie.
L'amendement n° 148 est déclaré irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution.
Article 28 bis (supprimé)
L'amendement n° 82 est déclaré irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution.
M. Stéphane Artano, rapporteur. - L'amendement n° 125 demande un rapport du Gouvernement au Parlement sur les conséquences de la suppression des CHSCT. Il est irrecevable au titre de l'article 45.
Mme Laurence Cohen. - Même pour une demande de rapport ?
M. Philippe Mouiller, président. - L'irrecevabilité est liée à son thème, pas à la demande de rapport.
M. Stéphane Artano, rapporteur. - C'est frustrant aussi pour les rapporteurs, qui doivent s'en tenir à la lettre de la Constitution et à la jurisprudence constante du Conseil constitutionnel, ce qui nous contraint à écarter des sujets intéressants...
Mme Laurence Cohen. - Vous n'êtes pas personnellement en cause, c'est un problème plus large.
L'amendement n° 125 est déclaré irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution.
La réunion est close à 15 h 25.
Mardi 6 juillet 2021
Présidence de Mme Catherine Deroche, présidente
La réunion est ouverte à 13 h 30
Situation et perspectives des comptes sociaux - Audition de M. Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des comptes publics
Mme Catherine Deroche. - Mes chers collègues, nous entendons cet après-midi M. Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des comptes publics, sur la situation et les perspectives des comptes sociaux. J'indique que cette audition fait l'objet d'une captation vidéo retransmise en direct sur le site du Sénat, qui sera ensuite disponible en vidéo à la demande.
Il s'agit d'un rendez-vous habituel pour notre commission qui examine chaque année, dans la perspective du débat d'orientation des finances publiques, l'application de la loi de financement de la sécurité sociale de l'année précédente.
Je regrette à cet égard que le Gouvernement, à la suite du report de la date de la commission des comptes de la sécurité sociale de juin, ne se soit pas cru autorisé à livrer à la représentation nationale la primeur de l'état des comptes sociaux et que nous ayons dû reprogrammer cette audition à un horaire atypique et dans un temps limité puisque nous disposons de moins d'une heure avant de devoir rejoindre la séance publique.
Cette péripétie, tout comme la dégradation sans précédent des comptes sociaux après la crise sanitaire me paraît souligner la pertinence des propositions portées par notre commission d'une actualisation du cadre organique applicables aux lois de financement de la sécurité sociale que nous évoquerons également au cours de cette audition.
Monsieur le ministre, vous avez la parole pour un propos liminaire avant que je ne la donne à vos collègues qui souhaitent vous interroger.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. - Je vous remercie pour votre invitation à cet échange sur la situation et les perspectives des finances sociales, à l'occasion du rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale, que nous avons présenté aux membres de la commission le 24 juin dernier.
Je partage, madame la présidente, le regret sur l'horaire atypique de cette réunion qui est de mon fait en raison d'une convocation à l'Elysée que je ne pouvais reporter.
Ce rapport de la CCSS permet, comme chaque année, de retracer les comptes de l'exercice 2020 et d'actualiser les perspectives de l'année 2021. Ces données sont essentielles alors que nous commençons à préparer la prochaine loi de financement de la sécurité sociale et que des réflexions sont en cours, notamment au sein de votre commission - je pense à la proposition de loi organique de votre rapporteur général -, pour améliorer la gouvernance des finances sociales.
Je souhaite tout d'abord revenir rapidement sur les résultats 2020 et les prévisions 2021.
Nous sommes actuellement confrontés à un déficit sans précédent avec un solde global du régime général et du fonds de solidarité vieillesse qui s'élève à - 38,7 milliards d'euros. Ce chiffre donne le vertige, à deux titres : car il est supérieur de plus de 33 milliards d'euros à ce que nous anticipions avant la crise dans le cadre du PLFSS pour 2020 et est supérieur de près de 11 milliards d'euros au précédent plus grand déficit qui avait suivi la crise financière de 2008 - avec un déficit de -28 milliards d'euros en 2010 - ce qui en fait le déficit le plus important qu'ait connu la sécurité sociale depuis sa création.
Cette dégradation, brutale, par rapport au début du quinquennat, où nous projetions un retour à court terme à l'équilibre de la sécurité sociale et un remboursement de la dette sociale d'ici 2024, s'explique par la crise que nous traversons et par les dispositifs de protection que nous avons déployés.
Ce que nous enseigne ce chiffre, c'est d'abord que la sécurité sociale a joué un rôle essentiel dans la gestion de la crise qui a secoué notre pays, au travers du financement d'un ensemble de dispositifs qui ont largement contribué à préserver les moyens et le pouvoir d'achat des Français. Ce déficit est aussi le reflet de l'action du Gouvernement, des décisions que nous avons prises et des dispositions que le Parlement a accepté de voter, pour protéger les Français pendant la crise sanitaire.
Il résulte ainsi que le rapport de la commission des comptes le rappelle pour les deux tiers de moindres recettes, en raison des dispositifs visant à soutenir les entreprises - puisque les indemnités d'activité partielle ne sont pas assujetties - , et pour un tiers de dépenses supplémentaires, essentiellement des dépenses financées par l'assurance maladie. Je pense à la prise en charge des tests à 100%, nous sommes un des seuls pays en Europe à le proposer et 33 millions de tests ont été réalisés en 2020 ; je pense aussi à la création d'indemnités journalières dérogatoires, notamment au titre de la garde d'enfants.
Cette année, la situation est différente de celle de l'année dernière, mais elle lui ressemble par certains aspects.
À ce stade les prévisions montrent que le déficit global du régime général et du fonds de solidarité vieillesse devrait se stabiliser autour de 38,4 milliards d'euros, c'est-à-dire peu ou prou au même niveau qu'en 2020, et 2,6 milliards d'euros au-dessus des prévisions faites lors de l'adoption de la LFSS pour 2021.
Cependant, l'explication de ce déficit est différente par rapport à l'an dernier car on constate un rebond de l'activité économique, et donc une augmentation des recettes de la sécurité sociale. Ainsi, si l'on ne prend pas en compte les effets liés à l'intégration de la branche autonomie dans les comptes de la sécurité sociale, les recettes devraient progresser de 4,6%, du fait de l'augmentation de la masse salariale du secteur privé. Mais ce rebond n'est pas à la hauteur de la hausse des dépenses exceptionnelles mises en oeuvre cette année encore pour faire face à la crise sanitaire et à la troisième vague épidémique ; les tests coûteront près de 5 milliards d'euros à la sécurité sociale et la vaccination représente un coût qui s'élèverait autour de 4,6 milliards d'euros
Enfin, mais nous avons tous le même espoir : la situation cette année est différente car malgré les inquiétudes que nous connaissons, la campagne de vaccination et son regain annoncé aujourd'hui par le ministère de la santé, nous laissent espérer parce que nous n'avons jamais été aussi près de la sortie de ce tunnel épidémique.
Au-delà de tout cela, lorsque nous avons ces chiffres en tête, cette situation des finances sociales, et plus largement des finances publiques est bien sûr préoccupante. Je souhaite le souligner, vous l'avez vu, la situation des branches n'est pas identique, une partie d'entre elles vont retrouver très vite des excédents, je pense à la branche risques professionnels et à la branche famille. La dégradation générale des comptes de la sécurité sociale doit toutefois nous conduire à porter une appréciation globale et cohérente sur la situation des finances sociales et sur les moyens de l'améliorer.
J'ai déjà eu l'occasion de le dire, nous devons sortir progressivement du « quoi qu'il en coûte » pour retrouver le chemin du retour à l'équilibre, le chemin d'une dépense plus soutenable. Car on ne peut pas durablement accepter que la trajectoire financière de la sécurité sociale soit dégradée, et la sécurité sociale n'a pas vocation à rester indéfiniment en déficit. La sécurité sociale a vocation à revenir à terme à l'équilibre, la dette sociale à être remboursée. C'est notre engagement commun envers les générations envers les prochaines générations depuis 1996 et la création de la CADES, engagement renouvelé l'été dernier.
Le respect de nos engagements et le rétablissement de la soutenabilité de nos finances sociales impliqueront bien évidemment sur la sphère sociale des réformes d'ampleur. Mais ces réformes interviendront en temps voulu, car afin de redresser les comptes de la sécurité sociale sans augmenter les prélèvements, nous allons devoir faire un effort renforcé de maîtrise de la dépense une fois la crise passée.
Cette maîtrise passe également par le renforcement du cadre de gouvernance des finances publiques. Au vu de la situation globale de la sécurité sociale, et plus largement des finances publiques, un renforcement du pilotage global de la sécurité sociale doit être mis en oeuvre, afin d'affecter, si besoin de façon explicite, les ressources en fonction des priorités de financement identifiés.
Par ailleurs les propositions de loi organiques, je pense à celle du député Thomas Mesnier qui porte sur le champ social, et évidemment à celle de votre rapporteur général, concernant les finances sociales, apportent de premières réponses utiles afin de renforcer la gouvernance des finances sociales, notamment en renforçant l'inscription de lois de financement de la sécurité sociale annuelles dans le cadre financier pluriannuel de la loi de programmation des finances publiques.
Enfin, je pense bien sûr au prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui doit être l'occasion encore plus prioriser nos dépenses, car chaque nouvelle dépense pérenne ne fait qu'accroître l'effort devant être fourni dans les années à venir.
Pour nous, le seul chemin possible afin de préserver à terme la crédibilité de notre stratégie de finances publiques et d'assurer la pérennité de notre système social, passe par cette amélioration du pilotage global, passe par cette volonté de priorisation et passe aussi par la mise en oeuvre prochaine de réformes, je le répète, en temps voulu. Notre priorité reste la sortie de crise, ce qui explique l'essentiel des déficits prévisionnels pour l'année 2021.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. - Je vous remercie, Monsieur le ministre, pour vos propos liminaires et vous remercie d'avoir salué les efforts du Sénat et de l'Assemblée nationale avec les propositions de loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, nous aurons l'occasion d'y revenir.
Vous avez bien décrit la situation préoccupante des comptes de la sécurité à la fin de l'exercice 2020. Pourriez-vous préciser les principaux facteurs de résistance des recettes et si cette « meilleure fortune » est appelée à durer - et donc à améliorer la trajectoire des comptes sociaux à l'avenir, notamment pour 2021 ? Vous avez parlé de pluriannualité, je pense qu'il faut s'inscrire sur une période d'au moins trois ans.
Comme vous le savez, la Cour des comptes a refusé de certifier les comptes de la branche recouvrement pour l'exercice 2020. Je souhaiterais savoir quelle est votre analyse face à ce refus et les actions que vous comptez mettre en place afin d'améliorer la fiabilité des comptes de cette branche. Par ailleurs, on peut se demander si, dans ce contexte, il est bien raisonnable de lancer le chantier de l'unification du recouvrement des cotisations de l'Agirc-Arrco et de l'Acoss. Je crois comprendre de votre communiqué de presse du 17 juin que vous pensez la même chose... Néanmoins, l'article 18 de la LFSS pour 2020 prévoyait bien qu'avant de décider d'un report, le Gouvernement devait adresser au Parlement un rapport qui en détaille et qui en explicite les motivations. Monsieur le Ministre, aurons-nous bien ce rapport prévu par la loi et pouvez-vous nous en donner d'ores et déjà les principales orientations ?
Enfin, vous avez évoqué le cadre organique, que nous trouvons actuellement trop laxiste en matière de dépenses financées par la sécurité sociale, comme la pratique de l'année 2020 l'a démontré, même si cette année a un caractère exceptionnel.
Je rappelle que nous avons dépassé l'Ondam de 14 milliards et que 20 milliards de dépenses supplémentaires, certes bien ciblées, ont été engagées : 8,4 milliards pour les établissements de santé, 6,8 milliards pour les soins de ville, 4,8 milliards pour Santé publique France, et 6,3 milliards de remboursement de soins de ville et de médicaments. Les dépenses engagées ainsi que les dépenses - pérennes ! - du Ségur de la santé sont légitimes, mais un tel dépassement sans autorisation parlementaire n'est pas normal et ne saurait se reproduire. La chose est d'ailleurs impossible pour les dépenses de l'État, ce qui n'empêche nullement celui-ci d'agir, dès lors qu'un collectif budgétaire est adopté rapidement. Monsieur le Ministre, soutiendrez-vous les propositions que nous faisons pour faire évoluer le cadre organique des lois de financement de la sécurité sociale ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. - Le rebond de recettes de 4,6 %, à périmètre constant, en 2021, est une bonne nouvelle. Sous réserve que la situation sanitaire ne se dégrade pas, j'ai bon espoir que cette augmentation puisse être plus importante. D'une part car les prévisions de taux de croissance de l'Insee, de la Banque de France et de la Commission européenne sont plus optimistes, de l'ordre de 5,7 % à 6 %, que l'hypothèse du Gouvernement, qui est de 5 %. D'autre part car l'évolution des revenus imposables, que le prélèvement à la source nous permet de suivre mois par mois, a augmenté de 8 % par rapport à l'année dernière depuis le début de l'année 2021. Cela traduit une activité plus forte, des embauches et des heures supplémentaires dans certains secteurs. C'est aussi lié au fait que pour un certain nombre de salariés, l'activité partielle, bien que particulièrement protectrice, se traduisait par une perte de revenus puisque l'indemnité perçue n'était que de 84 % du salaire net. Tout cela nous laisse penser que le rebond de recettes est solide.
Nous avons cependant toujours fait le choix de la prudence et conservons l'hypothèse d'un rebond de recettes de 4,6 %, même si Insee, Banque de France et Commission européenne, de même que l'OCDE, prêtent à la France le taux de croissance le plus élevé dans la zone euro non seulement en 2021, mais aussi en 2022. C'est de bon augure pour la dynamique des recettes de la sécurité sociale.
La certification contribue à la confiance des citoyens dans les comptes de la sécurité sociale, laquelle a su être au rendez-vous dans la gestion de la crise sanitaire. Nous avons mis en oeuvre des dispositifs très rapides dans des délais très contraints - arrêts maladie dérogatoires sans délai de carence, garanties accordées aux établissements de santé, maintien de droits sociaux... -, et les comptes de la branche recouvrement n'ont pu être certifiés en raison d'incertitudes et de désaccords. Ceux-ci concernent notamment les incidences des modalités d'appel en 2020 des cotisations et contributions sociales des travailleurs indépendants. La Cour des comptes a mis en cause le fondement juridique de l'abattement exceptionnel de 50 % des cotisations provisionnelles à partir de septembre 2020, alors que le mécanisme retenu a permis de tenir compte du nombre d'échéances impayées et de recommencer à prélever des montants de cotisations provisionnelles égaux à ceux dus avant la crise. Nous avons exclu de comptabiliser en produits courants les montants appelés réduits de 50 %, ainsi que les montants prévus mais non appelés, car cela aurait conduit à surestimer les recettes au titre de 2020, dans la mesure où les revenus ont chuté. Les créances envers les travailleurs indépendants ont été constatées de septembre à décembre à hauteur des seules cotisations appelées : c'est là le point de désaccord ayant conduit à l'absence de certification. Je considère que l'année exceptionnelle que nous avons vécue a conduit à prendre des décisions exceptionnelles, et que la normalisation de l'activité nous prémunira à l'avenir de telles difficultés de certification.
Monsieur le rapporteur général, le communiqué que j'ai rendu public il y a quelques semaines confirme le report d'un an de la mise en oeuvre du transfert du recouvrement des cotisations de l'Agirc-Arrco. Cela nous laisse le temps de mettre en place un outil pilote pour affiner cette réforme. Nous prendrons un décret pour acter ce report et le Parlement sera destinataire d'un rapport focalisé sur la situation des entreprises qui le justifie.
Vous m'interrogez enfin sur la proposition de loi organique que vous avez déposée, qui rend limitatifs les crédits des lois de financement de la sécurité sociale et défend le principe de lois de financement rectificatives de la sécurité sociale. Nous sommes attachés à la souplesse que permet le PLFSS pour répondre rapidement à des crises telles que celle que nous avons connue. Je sais par ailleurs que vous travaillez à une différenciation des dépenses selon leur utilité médicale ou sociale ou de leur affectation au fonctionnement de certaines administrations. J'espère que les débats qui s'ouvrent nous permettront de trouver un point d'atterrissage partagé.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général. - Êtes-vous d'accord avec nous sur le principe de lois d'approbation des comptes de la sécurité sociale, sur le modèle des lois de règlement du budget de l'État ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. - Oui, monsieur le rapporteur général.
M. René-Paul Savary, rapporteur de la branche vieillesse. - Le Gouvernement envisage-t-il d'inclure une mesure paramétrique sur les retraites dans le prochain PLFSS ? Vous pouvez répondre par oui ou non...
M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. - Peut-être !
M. René-Paul Savary, rapporteur de la branche vieillesse. - Que compte faire le Gouvernement pour aider l'Unédic à apurer sa dette ?
Des cotisations ont été décalées pour les travailleurs indépendants ; quelles mesures comptez-vous prendre pour harmoniser les règles, de sorte que ces cotisations comptent effectivement pour le calcul de leur retraite ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure de la branche maladie. - Le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale fait état d'un dépassement de l'Ondam en 2021, lié à la crise sanitaire, de l'ordre de 9,6 milliards d'euros. Pour la seule campagne vaccinale, un dépassement de 3,1 milliards d'euros est annoncé : pourquoi n'avoir pas prévu davantage en LFSS ? Autrement dit : de quelles hypothèses partiez-vous ?
J'ai été surprise par vos propos selon lesquels les tests coûtent plus cher que la campagne vaccinale. Le dépassement, dans le cas des tests, devrait atteindre 5 milliards d'euros, alors que 2 milliards seulement ont été provisionnés... On lit que le Gouvernement pourrait revoir les conditions de prise en charge des tests pour inciter à la vaccination : pouvez-vous nous en dire plus ?
Quel regard portez-vous sur un écart de plus de 9 milliards d'euros de dépenses, sans projet de loi de financement rectificative cette année encore ? Nous avions certes accepté à titre exceptionnel en LFSS 2021 que la procédure d'alerte sur l'Ondam ne conduise pas à un plan de redressement. Pour autant, comment comptez-vous associer le Parlement ? On ne peut pas entendre cette année encore qu'il ne serait pas en mesure d'examiner un collectif social.
Le rapport charges et produits de l'assurance maladie qui vient d'être adopté par la Cnam prévoit une situation lourdement déficitaire pour les prochaines années, avec un déficit attendu de 7 milliards d'euros en 2025, sous l'effet notamment d'une baisse durable des recettes. Comment comptez-vous permettre à l'assurance maladie de retrouver l'équilibre financier qui est le gage de sa soutenabilité ?
Le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie (HCAAM) a rendu ses conclusions sur la refonte de l'Ondam. Comptez-vous vous inspirer de ses conclusions et renforcer l'information du Parlement ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur de la branche autonomie. - Le 15 juin dernier, la Cour des comptes a remis au Gouvernement une stratégie de finances publiques pour la sortie de crise, qui repose sur deux piliers : le renforcement de la croissance ponctuelle et la maîtrise des dépenses publiques dans cinq secteurs prioritaires, dont l'assurance maladie. Quels leviers identifiez-vous pour maîtriser les dépenses, sachant que la cinquième branche, elle, appellera des moyens supplémentaires ?
S'agissant plus spécifiquement de la branche autonomie, quels moyens sont consacrés, dans l'exécution du budget 2021, à l'investissement et aux mesures du Ségur de la santé d'accompagnement des soignants ?
M. Alain Milon. - Je n'ai qu'une question simple, monsieur le ministre : pourquoi le « quoi qu'il en coûte » ne concerne-t-il que les organismes publics ? Les dépenses de vaccins ou de tests, qui dépassent les 10 milliards d'euros, sont à la charge des seuls organismes de sécurité sociale. Les mutuelles, elles, n'ont pas participé. Pourquoi ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure de la branche famille. - Comme l'a souligné le rapporteur général, l'Ondam 2021 devrait être dépassé de quelque 10 milliards d'euros, notamment du fait des dépenses engagées par Santé publique France au titre de la campagne de vaccination. Une nouvelle fois, la sécurité sociale va devoir financer cette agence à hauteur d'environ 5 milliards d'euros en étant compensée à hauteur de 150 millions d'euros depuis son transfert de l'État intervenu en 2020. La sécurité sociale sera-t-elle donc compensée à due concurrence cette année pour cette charge, qui devrait d'ailleurs par nature relever de la « dette covid » que l'État amortira sur le très long terme ?
La loi sur la dette sociale et l'autonomie votée en 2020 a prévu un plafond de transfert à la Cades de 92 milliards d'euros au titre des déficits cumulés de la sécurité sociale sur la période 2020-2023. Or la somme des déficits des exercices 2020 et 2021 devrait atteindre 74 milliards d'euros. Dès lors, le plafond de transfert est-il déjà caduc à vos yeux, de même que l'échéance de remboursement de la dette sociale au 31 décembre 2033 ?
De manière plus générale, au vu des différents travaux qui vous ont été remis et de vos propres réflexions, quelles sont les perspectives d'atterrissage des comptes sociaux après la crise ? À partir de quels leviers et à quel rythme un retour à l'équilibre doit-il être envisagé selon vous ?
Mme Monique Lubin. - Pour commencer, je poserai la même question que René-Paul Savary sur les retraites. Ensuite, vous avez terminé votre propos liminaire comme le fait le ministre Bruno Le Maire en parlant des économies que nous aurions à faire sur les dépenses publiques dans les mois qui viennent. C'est assez contradictoire avec ce qu'attendent les Français, après la crise dont nous peinons à sortir, en matière de moyens dans les hôpitaux et en matière de dépendance Nous attendons cette grande loi sur la dépendance. Les services d'aide à domicile sont dans des situations très pénibles ; ils n'arrivent plus à recruter et nous savons bien pourquoi. C'est une des questions auxquelles nous aurons à répondre. Comment pourrez-vous concilier les deux objectifs que sont répondre aux attentes des Français et faire ces économies dont vous ne cessez de parler ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. - Quelques mots pour essayer d'apporter des éléments de réponse mais je crois que vous avez compris que je ne pourrai pas être complet.
La position du Gouvernement est la suivante : nous sommes convaincus qu'il faut une réforme des retraites pour deux raisons. La première est intrinsèque au système tel qu'il existe aujourd'hui. Il s'agit de la cohabitation et donc de l'illisibilité des 42 systèmes de retraite et du problème d'injustice qu'il en résulte au dépend notamment des poly-pensionnés et des actifs dont les carrières ont été hachées par la précarité. La deuxième raison tient au déséquilibre financier qui était constaté avant la crise et que cette dernière a aggravé dans des proportions moins inquiétantes que nous estimions grâce à la reprise de l'activité économique mais avec le maintien d'un déficit structurellement important pendant de nombreuses années. La question de savoir s'il faut une réforme est donc tranchée à nos yeux. Reste uniquement la question du calendrier qui sera tranchée par le président de la République et je ne m'autorise pas à parler avant lui.
Sur les questions relatives à l'Unédic, nous n'avons pas à ce stade prévu de modalités d'intervention de l'État pour accompagner l'amortissement de la dette de l'Unédic. Nous considérons que le financement de l'activité partielle pour la quote-part relevant de l'Unédic relève de sa responsabilité et que la reprise de l'activité économique doit nous conduire à un apurement de cette dette accumulée au cours de l'année. Cette dette revêt à nos yeux un caractère moins structurel que celle résultant du système d'assurance vieillesse dans la mesure où la perte de l'Unédic s'explique par un manque à gagner en termes de cotisations et par une dépense exceptionnelle qui n'a pas vocation à perdurer dans le temps. A ce stade, nous n'avons pas prévu de modalités particulières.
Je vous confirme, en revanche, Monsieur le Rapporteur Savary, qu'en ce qui concerne le calcul de la retraite des travailleurs indépendants, le sujet évoqué est bien dans notre viseur. Nous le traitons dans le cadre de la préparation de certaines mesures en faveur des indépendants. Nous aurons l'occasion de revenir vers le Parlement. Il serait assez illogique finalement de garantir l'acquisition des droits à la retraite pour certains actifs dont ceux placés en activité partielle et de ne pas le faire pour les indépendants dont la cotisation a été suspendue ou diminuée de moitié par l'Etat, avec un risque d'exonération de la cotisation ou de report sur les exercices suivants. Quand bien même ce n'est pas simple juridiquement, nous travaillons à la garantie de l'acquisition de droits à la retraite pour l'année qui devait faire l'objet d'une cotisation et non pour l'année au cours de laquelle le versement sera effectif.
Madame la Sénatrice Imbert, j'en viens au coût de la campagne de vaccination supérieur de 3 milliards d'euros à la prévision. Je veux d'abord rappeler que lorsque nous avons inscrit dans le PLFSS une provision d'un milliard et demi, il s'agissait bien d'une provision. Nous étions à un moment où nous ne connaissions pas la date de mise sur le marché des vaccins, où nous n'en maitrisions pas les coûts unitaires. Par ailleurs, la part de la population éligible était moins importante à cette période que la part de 80 % que nous connaissons actuellement. Aujourd'hui, nous assumons le fait que la campagne coûte presque 5 milliards d'euros. Si la campagne coûtait 7 ou 8 milliard d'euros, je serais devant vous de la même manière en considérant que la vaccination est le meilleur investissement possible pour la santé des Français et la reprise économique. C'est un coût auquel nous devons faire face. Pour cet aspect-là, le « quoi qu'il en coûte » trouve toute sa puissance.
J'entends la difficulté qu'il y a pour les parlementaires de constater l'absence de projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale. Je ne sais pas juger aujourd'hui de ce que le Gouvernement inscrira à l'ordre du jour du Parlement et je ne sais pas s'il y a la nécessité d'avoir un collectif budgétaire rectificatif pour la sécurité sociale. Je doute que le temps nous le permette d'ici le PLFSS pour 2022.
Sur la question du plan d'économies et du Haut conseil pour l'Avenir de l'Assurance maladie (HCAAM), nous travaillons avec Olivier Véran et ses équipes pour voir les propositions et les solutions qui pourraient être reprises. Je ne suis pas convaincu que nous aurons le temps de reprendre les propositions de la HCAAM sur la construction et la restructuration de l'Ondam d'ici le PLFSS 2022. Nous sommes plutôt dans une logique de stabilité du cadre réglementaire pour répondre à la crise. Nous allons reporter les réformes qui sont certainement utiles pour rétablir l'équilibre des comptes de la sécurité sociale mais qui seraient orthogonales avec notre volonté de sortir de la crise.
Sur la question de la cinquième branche évoquée par Monsieur le Rapporteur Mouiller. La dégradation des comptes en 2021 est d'abord liée à l'élargissement du périmètre mais aussi à des provisions pour créances qui ont été faites en fonction d'un niveau d'activité qui n'a pas été au rendez-vous du fait de la crise. Le déficit de 1,2 milliard d'euros - de mémoire, alors que nous anticipions plutôt 400 millions dans la première estimation, est dû à cette période très spéciale. Toutefois, l'affectation d'une recette de CSG à partir de 2024 va permettre de financer les nouvelles missions et le virage domiciliaire auquel nous aspirons. Nous n'avons pas d'inquiétude aujourd'hui sur le fait que cette cinquième branche sera équilibrée et peut-être même excédentaire à horizon de 2030, comme prévu initialement. La Cour des comptes a remis un rapport avec cinq secteurs prioritaires à ses yeux en matière de réforme et de recherche d'autonomie. MM. Blanchard et Tirole nous ont remis leurs propositions ainsi que les membres de la commission présidée par Jean Arthuis. L'ensemble de ces contributions nous seront utiles pour construire une programmation des finances publiques dans un cadre organique rénové. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale les deux propositions de loi organique, respectivement de Laurent Saint-Martin et Éric Woerth pour les finances publiques et de Thomas Mesnier pour les finances sociales, et qu'il souhaitera à la rentrée cette inscription au Sénat. À cette occasion auront lieu un croisement et un débat qui permettront d'aborder les dispositions de la proposition de loi déposée par votre rapporteur général.
Quelles sont les priorités que nous retiendrons ? Aujourd'hui, il est trop tôt pour le dire. Notre priorité est d'accompagner la sortie de crise avant d'arrêter ce programme d'économies.
Monsieur le président Milon a évoqué la contribution des mutuelles. L'année dernière, nous avons demandé aux mutuelles de contribuer à hauteur de 1 milliard d'euros. Il est prévu une contribution de 500 millions d'euros en 2021. Nous avons des discussions en cours avec le ministère des Solidarités et de la Santé pour voir s'il est nécessaire de maintenir ce prélèvement de 500 millions d'euros ou s'il faut envisager un prélèvement supplémentaire. J'ai le sentiment à vous écouter que vous nous y encouragez et, si cette solution venait à prospérer, je ne manquerai pas de vous demander de l'aide pour argumenter auprès des mutuelles.
Madame Doineau, vous reprenez dans vos propos le désaccord que le Gouvernement et le Sénat ont entretenu à l'occasion des dernières LFSS : la compensation pour les budgets de Santé publique France. Nous considérons que les compétences de Santé publique France relèvent de l'action en matière de santé et de maladie et donc de la sécurité sociale. C'est pourquoi, nous n'avons pas modifié les modalités de compensation par l'État des fonds que la sécurité sociale apporte à Santé publique France pour financer les campagnes de vaccination et de test. C'est un point de désaccord qui, je le crains, va rester mais que nous assumons.
S'agissant de l'amortissement de la Cades et le plafond de 92 milliard d'euros, nous avons bon espoir que les trois années de déficit cumulées puissent encore être sous le plafond indiqué. Il faut néanmoins garder en tête que si le plafond venait à être dépassé, l'Acoss a encore la possibilité de porter de la dette. Nous pouvons imaginer un scénario, que nous ne souhaitons pas, dans lequel le dépassement du plafond est porté par l'Acoss et que le transfert à la Cades est limité à 92 milliards comme le prévoit la loi organique. Cela ne remettrait pas en cause la date de 2033 pour l'apurement de la dette de la Cades.
Enfin, Madame Lubin m'a interrogé sur deux sujets. Sur la question des économies, je pense que les Français attendent que la sécurité sociale soit viable, que nous puissions répondre à leurs besoins mais avec un niveau de dépenses publiques qui soit soutenable et un niveau d'endettement qui ne soit pas aggravé. C'est pourquoi, une fois la crise terminée, nous aurons à faire des efforts les uns les autres et à imaginer des réformes de maitrise des dépenses publiques pour revenir à un niveau soutenable. Dans ce cadre, le projet de loi porté par Brigitte Bourguignon fait un double choix important ; d'abord, politique en ce qui concerne l'accompagnement de la dépendance et le virage domiciliaire et puis, également, budgétaire étant donné ses conséquences d'ampleur en la matière. Je ne peux pas vous dire à quel moment ce texte sera inscrit à l'ordre du jour des assemblées parlementaires. Permettez-moi toutefois de rappeler que nous avons commencé à travailler sur les questions d'attractivité du secteur de l'aide à domicile. Dans le PLFSS de l'année dernière, un soutien de 200 millions d'euros a été apporté pour les métiers de l'aide à domicile. C'est une des premières fois que l'État accompagne la revalorisation salariale d'agents ou de salariés qui ne relèvent pas de son périmètre de compétences en termes d'emploi, de recrutement et donc de lien hiérarchique mais qu'il vient accompagner directement les employeurs d'aides à domicile. Cela fait aussi partie des orientations du texte préparé par Brigitte Bourguignon.
Mme Catherine Deroche, présidente. - Je vous remercie beaucoup, Monsieur le ministre, pour vos réponses néanmoins précises à certaines questions ; pas toutes évidement, mais nous nous y attendions.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.
La réunion est close à 14 h 30
Mercredi 7 juillet 2021
- Présidence de Mme Chantal Deseyne, vice-présidente -
La réunion est ouverte à 9 h 30.
Projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale - Examen des amendements au texte de la commission des lois sur les articles délégués au fond
Mme Chantal Deseyne, présidente. - Nous examinons d'abord trois amendements de notre rapporteur.
EXAMEN DES AMENDEMENTS DU RAPPORTEUR
M. Alain Milon, rapporteur pour avis. - Le texte issu des travaux des commissions a prévu la coprésidence du conseil d'administration des agences régionales de santé (ARS) par le président du conseil régional ou son représentant, aux côtés du préfet de région. Une coordination est nécessaire à l'article L. 1442-2 du code de la santé publique, relatif à l'agence de santé de la Guadeloupe, de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, qui exerce dans ces territoires les compétences dévolues aux ARS. Le conseil de surveillance de cette agence de santé est présidé, aux termes de cet article, par le représentant de l'État en Guadeloupe. Mon amendement ASOC.3 propose que cette instance - transformée en conseil d'administration par le projet de loi - soit coprésidée par le président du conseil régional de Guadeloupe ou son représentant. Cela nous avait échappé, et un amendement a été déposé sur le sujet, qui tombera si mon amendement est adopté.
L'amendement est adopté.
Article 31 bis
L'amendement de coordination ASOC.2 est adopté.
M. Alain Milon, rapporteur pour avis. - Mon amendement ASOC.1 précise la rédaction de cet article en supprimant notamment la mention inappropriée d'un « droit de communication » ainsi que la référence au secret professionnel, et il délimite mieux l'étendue du contrôle.
L'amendement ASOC.1 est adopté.
La commission demandera aux rapporteurs de la commission des lois de bien vouloir déposer ces amendements.
EXAMEN DES AMENDEMENTS AU TEXTE DE LA COMMISSION
Article 31
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Article 31 |
|||
Suppression d'article |
Défavorable |
||
Autorité du préfet de département sur les délégations départementales des ARS |
Défavorable |
||
Autorité du préfet de département sur les délégations départementales des ARS |
Défavorable |
||
Nomination du délégué départemental des ARS après avis du président du conseil départemental |
Défavorable |
||
853 rect. |
Nomination du délégué départemental des ARS après avis du président du conseil départemental |
Défavorable |
|
Présentation du bilan d'activité du délégué départemental d'ARS au président du conseil départemental |
Défavorable |
||
854 rect. |
Présentation du bilan d'activité du délégué départemental d'ARS au président du conseil départemental |
Défavorable |
M. Alain Milon, rapporteur pour avis. - L'amendement n° 1413 revient sur les évolutions souhaitées à cet article 31 par notre commission des affaires sociales : la définition des missions des délégations départementales des ARS, l'approbation du projet régional de santé (PRS) par le conseil d'administration, la coprésidence de ce conseil par le président de région et le rééquilibrage entre les représentants de l'État et ceux des collectivités territoriales. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 1413.
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Article 31 |
|||
672 rect. |
Nomination du délégué départemental des ARS après avis du président du conseil départemental |
Défavorable |
|
Nomination du délégué départemental des ARS après avis du président du conseil départemental |
Défavorable |
||
673 rect. |
Présentation du bilan d'activité du délégué départemental d'ARS au président du conseil départemental |
Défavorable |
M. Alain Milon, rapporteur pour avis. - L'amendement n° 1553 rééquilibre la composition entre les sièges des différents collèges - État, assurance maladie, collectivités territoriales, usagers - constitués « à parts égales ». Avis favorable.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 1553.
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Article 31 |
|||
41 rect. |
Équilibre des voix entre les représentants de l'Etat et de l'assurance maladie et ceux des collectivités territoriales |
Défavorable |
|
704 rect. |
Information de la conférence régionale de la santé et de l'autonomie |
Défavorable |
|
182 rect. bis |
Ajout d'un représentant des collectivités des zones de montagne à la composition du conseil d'administration des ARS |
Défavorable |
|
322 rect. |
Ajout d'un représentant des collectivités des zones de montagne à la composition du conseil d'administration des ARS |
Défavorable |
|
566 rect. bis |
Ajout d'un représentant des collectivités des zones de montagne à la composition du conseil d'administration des ARS |
Défavorable |
|
808 rect. |
Ajout d'un représentant des collectivités des zones de montagne à la composition du conseil d'administration des ARS |
Défavorable |
|
Ajout d'un représentant des collectivités des zones de montagne à la composition du conseil d'administration des ARS |
Défavorable |
||
Ajout d'un représentant des collectivités des zones de montagne à la composition du conseil d'administration des ARS |
Défavorable |
||
Ajout d'un représentant des collectivités des zones de montagne à la composition du conseil d'administration des ARS |
Défavorable |
||
1609 rect. |
Intégration d'un représentant des SDIS à la composition du conseil d'administration des ARS |
Défavorable |
|
Compétence du conseil d'administration des ARS pour statuer sur toutes les décisions concernant l'offre de soins |
Défavorable |
||
Compétence du conseil d'administration des ARS pour statuer sur toutes les décisions concernant l'offre de soins |
Défavorable |
||
805 rect. |
Réalisation par le conseil d'administration d'un état de la désertification médicale dans la région |
Défavorable |
|
42 rect. |
Introduction d'un programme relatif à la réduction des inégalités sociales et territoriales de santé dans le schéma régional de santé |
Défavorable |
|
Coprésidence de l'agence de santé de Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy |
Défavorable |
Articles additionnels après l'article 31
M. Alain Milon, rapporteur pour avis. - L'amendement n° 796 rectifié pourrait être déclaré irrecevable au titre de l'article 41 de la Constitution : les modalités de désignation des élus siégeant au conseil d'administration de Santé publique France relèvent de la partie réglementaire du code de la santé publique (article R. 1413-3). À défaut, avis défavorable
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 796 rectifié.
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Articles additionnels après l'article 31 |
|||
Publication par les ARS des décisions d'allocation de ressources aux établissements de santé |
Irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution |
||
Application par les ARS du principe de subsidiarité |
Défavorable |
||
Information de la CRSA par le DG ARS sur la politique d'allocation des ressources financières aux activités de santé |
Irrecevable au titre de l'article 45 de la constitution |
||
1143 rect. |
Consultation de la CRSA sur l'allocation des ressources financières |
Irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution |
|
Présentation au conseil régional et aux conseils départementaux de la mise en oeuvre de la politique régionale de santé |
Défavorable |
M. Alain Milon, rapporteur pour avis. - L'amendement n° 1142 rectifié bis pourrait être déclaré irrecevable au titre de l'article 41 de la Constitution, car ces dispositions relèvent à l'heure actuelle d'une circulaire. À défaut et pour ces raisons: avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 1142 rectifié bis.
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Articles additionnels après l'article 31 |
|||
Prise en compte dans le projet régional de santé des contrats locaux de santé existants |
Défavorable |
||
659 rect. |
Prise en compte dans le projet régional de santé des contrats locaux de santé existants |
Défavorable |
|
Prise en compte dans le projet régional de santé des contrats locaux de santé existants |
Défavorable |
||
Participation des usagers dans les conseils territoriaux de santé et dans les contrats locaux de santé |
Favorable |
||
Conclusion obligatoire de projets territoriaux de santé et intégration des GHT à ces projets |
Irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution |
||
Intégration des groupements hospitaliers de territoire à l'élaboration des projets territoriaux de santé |
Irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution |
||
658 rect. |
Généralisation des contrats locaux de santé |
Défavorable |
|
Généralisation des contrats locaux de santé |
Défavorable |
||
Généralisation des contrats locaux et volet santé mentale |
Défavorable |
||
760 rect. |
Intégration obligatoire de la santé mentale dans les contrats locaux de santé |
Défavorable |
|
Intégration obligatoire de la santé mentale dans les contrats locaux de santé |
Défavorable |
||
Intégration obligatoire de la santé mentale dans les contrats locaux de santé |
Défavorable |
||
Intégration obligatoire de la santé mentale dans les contrats locaux de santé |
Défavorable |
M. Alain Milon, rapporteur pour avis. - L'amendement n° 793 prévoit la présence des élus dans les conseils d'administration des communautés professionnelles territoriales de santé. Avis défavorable : soyons honnêtes, la place des élus n'est pas dans ces structures constituées par les professionnels de santé !
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 793.
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Articles additionnels après l'article 31 |
|||
Avis des signataires du contrat local de santé, des conseils locaux de santé et des conseils locaux de santé mentale sur le projet de santé des CPTS |
Défavorable |
||
Avis des signataires du contrat local de santé, des conseils locaux de santé et des conseils locaux de santé mentale sur le projet de santé des CPTS |
Défavorable |
||
Dérogation aux règles d'installation d'officines à Mayotte |
Avis du Gouvernement |
||
Dérogation aux règles d'installation d'officines à Mayotte |
Avis du Gouvernement |
||
Rôle des élus au sein des conseils stratégiques des GHT |
Défavorable |
||
Promotion des circuits courts et des achats locaux dans les groupements hospitaliers de territoire |
Irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution |
||
1145 rect. |
Consultation du comité économique de l'hospitalisation publique et privée sur la répartition des financements dédiés aux hôpitaux |
Irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution |
|
1144 rect. |
Travaux du comité économique de l'hospitalisation publique et privée sur l'unification des données de santé |
Irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution |
Article 31 bis
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Article 31 bis |
|||
705 rect. bis |
Modification de la composition du conseil de surveillance des hôpitaux |
Défavorable |
Articles additionnels après l'article 31 bis
M. Alain Milon, rapporteur pour avis. - L'amendement n° 703 est en partie irrecevable au titre de l'article 45 et doit être rectifié : son 4° concerne la représentation des personnels médicaux et non médicaux au sein du directoire des établissements publics de santé, sujet qui ne relève pas du périmètre du texte. Sur les autres points abordés, avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 703.
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la |
Articles additionnels après l'article 31 bis |
|||
893 rect. |
Modification de la composition du conseil de surveillance des établissements publics de santé |
Défavorable |
|
846 rect. |
Implication des élus locaux dans les conseils de surveillance des hôpitaux |
Défavorable |
|
Commissions départementales de la démographie médicale |
Défavorable |
||
Conditions d'installation des médecins généralistes |
Irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution |
M. Alain Milon, rapporteur pour avis. - L'amendement n° 43 rectifié prévoit l'association des collectivités à la définition des zones sous-dotées. L'article L. 1434-4 du code de la santé publique prévoit une définition de ces zones en concertation avec les professionnels de santé concernés. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 43 rectifié.
Article additionnel après l'article 32
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Article additionnel après l'article 32 |
|||
Affectation des amendes covid aux EPS |
Irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution |
Article 33
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Article 33 |
|||
Substitution du terme d'EPCI à celui de groupement |
Défavorable |
Article additionnel après l'article 33
M. Alain Milon, rapporteur pour avis. - L'amendement n° 660 prévoit une possibilité pour les régions de créer et gérer des centres de santé. Avis défavorable : cela doit rester une politique de proximité.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 660.
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Article 34 |
|||
868 rect. |
Possibilité pour les régions de créer et gérer des centres de santé |
Défavorable |
|
Possibilité pour les régions de créer et gérer des centres de santé |
Défavorable |
||
Possibilité pour les régions de créer et gérer des centres de santé |
Défavorable |
||
Rédactionnel |
Défavorable |
Articles additionnels après l'article 34
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Articles additionnels après l'article 34 |
|||
Contribution des collectivités à la santé |
Défavorable |
||
1069 rect. |
Contribution des collectivités à la santé |
Défavorable |
|
Contribution des collectivités à la santé |
Défavorable |
||
Contribution des collectivités à la santé |
Défavorable |
||
Contribution des collectivités à la santé |
Défavorable |
||
Extension des possibilités de délivrance de médicaments par les médecins ou infirmiers |
Irrecevable au titre de l'article 45 |
||
1088 rect. bis |
Expérimentation relative à l'organisation de la Ville de Paris |
Favorable |
|
Expérimentation de la location de logements sociaux aux étudiants en santé |
Irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution |
||
Programmes sanitaires d'intérêt collectif |
Irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution |
M. Alain Milon, rapporteur pour avis. - Avis défavorable aux amendements nos 61, 1414, et 1274, faute d'informations nouvelles reçues de la part du Gouvernement.
La commission émet un avis défavorable aux amendements nos 61, 1414 et 1274.
Articles additionnels après l'article 35 (supprimé)
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Articles additionnels après l'article 35 (Supprimé) |
|||
661 rect. |
Extension aux marchés publics des clauses relatives à l'emploi d'insertion |
Irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution |
|
Extension aux marchés publics des clauses relatives à l'emploi d'insertion |
Irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution |
M. Alain Milon, rapporteur pour avis. - Avis défavorable à l'amendement n° 1282, qui demande un rapport sur la recentralisation du revenu de solidarité active en Guyane, à Mayotte et à La Réunion : nous le demanderons en séance.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 1282.
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Article additionnel après l'article 35 (Supprimé) |
|||
907 rect. |
Demande de rapport au Parlement sur le coût du versement de l'allocation personnalisée d'autonomie pour les départements français. |
Irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution |
M. Alain Milon, rapporteur pour avis. - Les amendements nos 709, 1258, 1278 et 1415 reviennent sur, un apport de la commission en matière de contrôle par le conseil départemental des bénéficiaires du RSA, dont je vous propose par ailleurs d'améliorer la rédaction. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable aux amendements nos 709, 1258, 1278 et 1415.
Article additionnel après l'article 35 bis
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Article additionnel après l'article 35 bis |
|||
Assouplissement des possibilités de sanction des bénéficiaires du RSA |
Défavorable |
Article 36
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Article 36 |
|||
Rétablissement de la rédaction initiale |
Défavorable |
M. Alain Milon, rapporteur pour avis. - Avis favorable à l'amendement n° 38 rectifié, sous réserve que le Gouvernement confirme la faisabilité du dispositif.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 38 rectifié.
Article additionnel après l'article 36 bis
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Article additionnel après l'article 36 bis |
|||
379 rect. |
Développement des résidences autonomie outre-mer |
Avis du Gouvernement |
Article 37
M. Alain Milon, rapporteur pour avis. - L'amendement n° 75 prévoit le transfert aux communautés urbaines et métropoles d'une compétence d'action sociale d'intérêt communautaire. Avis défavorable : cela ne doit pas devenir une obligation !
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 75.
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Article 37 |
|||
Accord des communes membres pour la création d'un CIAS dans une communauté urbaine ou une métropole |
Défavorable |
||
278 rect. |
Accord des communes membres pour la création d'un CIAS dans une communauté urbaine ou une métropole |
Défavorable |
M. Alain Milon, rapporteur pour avis. - L'amendement n° 1417 du Gouvernement rétablit l'article 38, qui prévoit le transfert aux conseils départementaux de la tutelle des pupilles de l'État. La commission des affaires sociales a souhaité supprimer cet article, car elle a considéré que ce sujet trouverait mieux sa place dans le débat sur la loi relative à la protection des enfants, que nous examinerons prochainement. M. Taquet me disait justement avoir inséré cet article dans son texte...
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 1417.
Article 57
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Article 57 |
|||
405 rect. |
Renforcement de la coopération sanitaire par des contrats locaux de santé |
Défavorable |
|
Renforcement de la coopération sanitaire par des contrats locaux de santé |
Défavorable |
Article 78
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Article 78 |
|||
Mme JASMIN |
1283 |
Objectifs des actions de formation assurées par l'EPIC |
Favorable |
La commission proposera à la commission des lois les avis suivants :
TABLEAU DES AVIS
- Présidence de Mme Catherine Deroche, présidente -
Hommage à un commissaire décédé
Mme Catherine Deroche, présidente. - Mes chers collègues, je voudrais en notre nom à tous rendre hommage à notre collègue Patrick Boré, décédé ce week-end. Patrick Boré avait rejoint le Sénat en août 2020, avant même le renouvellement sénatorial et il avait choisi notre commission.
Nous retiendrons de lui ses grandes qualités humaines, son humour et surtout son immense courage face à la maladie.
La commission observe une minute de silence.
Application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 - Examen du rapport d'information
Mme Catherine Deroche, présidente. - Nous examinons à présent le rapport d'information de notre rapporteur général, M. Jean-Marie Vanlerenberghe, sur l'application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général. - Il me revient de vous présenter, pour la dernière fois, le rapport sur l'application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020.
Avant d'entrer dans des considérations financières parfois déplaisantes, je voudrais commencer cette intervention en saluant l'action de la sécurité sociale et de ses différentes branches auprès des Français lors de la crise sanitaire et économique de l'année dernière.
Je pense, en premier lieu, à la branche maladie, qui a notamment accompagné la campagne de tests et aujourd'hui la campagne de vaccination gratuitement pour les assurés sociaux - et qui a financé de nombreuses mesures exceptionnelles que nous détaillerons.
Je pense aux autres branches qui ont assuré l'ensemble des prestations dans un contexte financier délicat et une organisation du travail compliquée par la pandémie.
Je pense aussi à la branche recouvrement, très sollicitée dans la mise en place du soutien exceptionnel aux entreprises, en particulier celles qui ont été concernées par les fermetures administratives.
Et, hors du champ actuel des PLFSS, je pense aussi à l'assurance chômage, qui a contribué à maintenir à un niveau acceptable les revenus de nombreux travailleurs grâce notamment au dispositif exceptionnel d'activité partielle.
C'est dans la difficulté que chacun ressent le plus la réalité de ce filet de sécurité qu'est notre sécurité sociale pour tous les Français. Elle a su répondre présent en 2020. Raison de plus pour souhaiter sa pérennité, ce qui passe par la soutenabilité financière du modèle social en période plus calme.
Vous le savez déjà, la sécurité sociale a enregistré le plus fort déficit de son histoire en 2020 : 38,7 milliards d'euros sur le périmètre du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), et même 39,8 milliards en élargissant la perspective à l'ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale (ROBSS). Cela fait environ 10 milliards de plus que le précédent record, en date de 2010, au plus fort de la crise financière déclenchée en 2008.
Ces chiffres sont évidemment très différents de ceux que nous avions votés en LFSS 2020, avant le début de la crise sanitaire. Pour mémoire, il s'agissait d'un déficit de 5,4 milliards d'euros sur le régime général et le FSV, ce qui nous éloignait déjà de l'équilibre.
Le ministre Olivier Dussopt nous bien résumé, lors de son audition d'hier, le poids de chaque facteur de dégradation des comptes sociaux.
À titre principal, sous l'effet d'une récession de près de 8 % et de diverses mesures dont l'activité partielle, les recettes de la sécurité sociale ont été inférieures de 18,8 milliards d'euros à la prévision - 390,8 milliards au lieu de 409,6 milliards d'euros. Ce sont, en tout premier lieu, les cotisations sociales qui ont manqué à l'appel : elles diminuent de 5,8 %, du fait d'une baisse dans les mêmes proportions de la masse salariale du secteur privé. Les cotisations ont d'ailleurs failli passer sous la barre symbolique des 50 % du total des recettes du régime général et du FSV.
Du côté des dépenses, la situation peut se résumer simplement : les dépenses des branches vieillesse, famille et AT-MP n'ont été que peu affectées par la crise et sont relativement proches de la prévision de la LFSS 2020 ; en revanche, la branche maladie a subi à plein un redoutable effet de ciseaux. En effet, outre ses pertes de recettes, cette branche a dû financer un surcroît de dépenses de 16 milliards d'euros, dont 14 milliards au sein de l'Ondam.
Je vous rappelle les principaux postes de dépenses supplémentaires : 8,4 milliards d'euros sont destinés aux établissements de santé et médico-sociaux, 4,8 milliards d'euros de dotation exceptionnelle à Santé publique France et 2,3 milliards d'euros au titre des soins de ville entre indemnités journalières, tests et indemnisations des professionnels touchés par des restrictions d'activité.
En conséquence, le déficit de la sécurité sociale est avant tout le déficit de la branche maladie : 30,4 milliards d'euros en 2020 et 31 milliards prévus en 2021. Même le déficit de la branche vieillesse, de 3,7 milliards d'euros et 2020, et 4,4 milliards prévus en 2021, semble relativement modeste à côté de ce trou de l'assurance maladie, qui risque de se révéler particulièrement difficile à combler.
L'activité de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) mérite un développement particulier, plus approfondi qu'à l'accoutumée.
En première ligne face à la crise, l'agence a su répondre avec diligence aux facilités accordées aux entreprises les plus touchées par les effets du confinement. Sa trésorerie en a naturellement été très affectée, d'où un relèvement considérable de l'autorisation d'emprunt à court terme que nous lui avons accordée en LFSS pour 2020 : le plafond, initialement voté à 39 milliards d'euros a été successivement relevé à 70 milliards d'euros par un décret du 25 mars 2020 puis à 95 milliards d'euros par un nouveau décret en date du 20 mai 2020 - ce montant a été reconduit par la LFSS pour 2021 pour l'année en cours.
De fait, l'agence a atteint un point maximum d'emprunt de 89,7 milliards d'euros dans le courant du mois de juin. Or il ne suffit pas de disposer d'une autorisation d'emprunt pour obtenir les emprunts sur les marchés, l'Acoss ne pouvant s'endetter qu'à court terme. La volonté d'éviter tout incident de financement de l'Acoss, dont les conséquences auraient été incalculables en termes de solidité de la sécurité sociale, explique sans doute la relative précipitation avec laquelle nous avons été invités à voter le projet de loi sur la dette sociale et l'autonomie : il fallait « détendre » la trésorerie de l'Acoss en permettant à la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) de reprendre rapidement une partie des découverts correspondant au financement des déficits passés.
Par ailleurs, nous en avons parlé hier avec M. Dussopt, je vous rappelle que la Cour des comptes a refusé de certifier les comptes de la branche recouvrement. Ce refus, qui jette une ombre sur l'exactitude des comptes qui nous présentés, est principalement dû à des raisons liées à l'exercice 2020 : fondement juridique de certaines opérations ; comptabilisation d'opérations exceptionnelles, etc.
Néanmoins, une parfaite maîtrise des opérations semble le minimum avant d'envisager la mise en oeuvre d'une des mesures de la LFSS 2020, à savoir l'unification du recouvrement des cotisations de l'Agirc-Arrco et de l'Acoss. Le ministre nous a confirmé hier que ce rapprochement serait repoussé à 2023.
Nous attendons donc le rapport du Gouvernement qui expliquera les raisons de ce report et le décret qui le concrétisera. Mais je considère qu'il s'agit d'une mesure raisonnable, aucun droit à l'erreur n'étant permis tant en matière de recouvrement que de calcul des droits des assurés pour leur retraite complémentaire.
Alors, mes chers collègues, après cette rapide revue de l'exercice 2020, quelles perspectives pour les comptes de la sécurité sociale ?
Je souligne tout d'abord que notre commission a appuyé sur le fond les mesures prises pour faire face à la crise sanitaire, tant en termes de recettes qu'en termes de dépenses. Je ne veux donc pas jeter la pierre au Gouvernement ou aux différents gestionnaires pour le déficit de l'année dernière qui n'est que la conséquence du soutien que la sécurité sociale a apporté aux entreprises et aux assurés sociaux.
Néanmoins, alors que nous commençons à entrevoir la fin de la tempête, les enjeux des prochaines lois de financement de la sécurité sociale apparaissent vertigineux.
Tout d'abord, la trajectoire financière de la sécurité sociale est probablement bouleversée à long terme.
Les derniers éléments dont nous disposons ne redéfinissent pas de perspectives à moyen terme mais je vous rappelle que la LFSS pour 2021 prévoyait un déficit quasiment stabilisé à une vingtaine de milliards d'euros à l'horizon 2024.
Je vous rappelle surtout, alors que le déficit 2020 est principalement dû aux recettes, que le déficit des années à venir sera principalement tiré par les dépenses, en particulier par les dépenses d'assurance maladie, beaucoup plus difficiles à maîtriser. J'avais ainsi montré, dans le premier tome du rapport sur le dernier PLFSS, que le déficit de l'année 2023, prévu à 22,5 milliards d'euros, au lieu de 0,6 milliard d'euros en LFSS pour 2020, s'expliquait par un niveau de recettes amoindri de 7 milliards d'euros du fait de la perte de croissance et de masse salariale au cours de la période, et par un niveau de dépenses supérieur de 15 milliards d'euros, dont environ 12,5 milliards d'euros pour les dépenses relevant de l'Ondam.
La dette sociale a donc fait son grand retour. Alors qu'il y a peu, nous pensions pouvoir enfin la rembourser d'ici à 2024, ou un peu au-delà, cet horizon a été repoussé à au moins 2033 - M. Dussopt n'ayant pas exclu que l'Acoss doive en parallèle financer de nouveau une partie de cette dette à l'avenir au moyen de découverts, ce qui n'est évidemment pas sain.
En conclusion, je pense donc que notre commission devra se montrer attentive à la légitimité des charges que l'on impose à la sécurité sociale et à la Cades.
Je considère que nous avons eu raison de nous opposer au transfert à la Cades d'une fraction de la dette hospitalière qui ne correspond pas à de la reprise de déficits de la sécurité sociale. Nous devrons continuer à veiller à ce que la Cades ne devienne pas un fourre-tout, au risque de prolonger son existence à jamais.
Et, dans le même esprit, nous devrons défendre, comme l'année dernière, une juste compensation de ses charges afin que la « dette covid-19 » de la sécurité sociale soit traitée comme celle de l'État. Cela vaut pour les dépenses exceptionnelles prises en charge par Santé publique France - dont le transfert n'a été compensé qu'à hauteur de 150 millions d'euros à la sécurité sociale. Cela pourrait également valoir pour l'ensemble des pertes de recettes qui correspondent à des décisions de l'État, notamment celles dues à l'activité partielle.
Cependant, mes chers collègues, soyons conscients qu'une juste répartition des charges ne nous exonérera pas de mesures de maîtrise de la dépense, en particulier sur les branches vieillesse et maladie, qui seront forcément impopulaires. Notre commission devrait sans doute y réfléchir sans tarder.
Mon dernier mot sera pour souligner que l'exercice 2020, certes très particulier, a jeté une lumière crue sur les limites du cadre organique actuel des lois de financement de la sécurité sociale.
Malgré un solde chamboulé de plus de 30 milliards d'euros, malgré 14 milliards d'euros de dépenses supplémentaires dans le cadre de l'Ondam dont certaines n'étaient pas de nature assurantielle, malgré un quasi triplement du plafond d'endettement de l'Acoss, malgré une prolongation de neuf ans de la dette sociale, le Gouvernement n'a pas déposé de projet de loi financement rectificatif de la sécurité sociale en 2020 et ne le fera pas davantage en 2021.
De fait, il n'y était pas juridiquement contraint et c'est là que le bât blesse sans doute. M. Dussopt a vanté hier la souplesse que permet la LFSS. Mais cette souplesse est excessive.
Le cas de Santé publique France parle de lui-même : si la crise du covid-19 avait eu lieu en 2019, alors que cette agence était encore financée par l'État, le Gouvernement aurait dû demander au Parlement la hausse de ses crédits dans un collectif budgétaire - ce que le Parlement lui aurait accordé. Mais, dès lors que c'est la sécurité sociale qui paye la même dépense, tous les verrous sautent.
Ne nous y trompons pas : un tel laxisme entraîne de mauvaises habitudes et incite même à transférer à la sécurité sociale des dépenses que l'État peut trouver pratique de débudgétiser.
Ce n'est pas bon pour les finances publiques en général. Et ce n'est pas bon non plus pour les LFSS à long terme. Car quand les vents auront tourné, ceux-là même qui vantent la souplesse de ces lois sauront en tirer prétexte pour dire qu'une loi financière qui ne régente rien ne mérite pas d'exister...
C'est pourquoi nous devrons faire évoluer la LOLFSS afin de poser des bornes au-delà desquelles le Gouvernement devra revenir devant le Parlement, mais aussi pour en adapter le périmètre et renforcer le contrôle du Parlement. La question de l'instauration d'une règle d'or des comptes de la sécurité sociale, que nous avons déjà votée l'année dernière, reviendra également.
M. René-Paul Savary. - Le niveau du déficit de la branche maladie est inquiétant. Certes, l'Acoss gère la dette sociale en trésorerie pour atténuer les conséquences du déficit, certes les marchés financiers nous offrent encore des possibilités d'emprunt - pourvu que cela dure... - et la Cades amortit la dette. Mais nous arrivons à des sommes abyssales en termes de déficits et d'emprunt ! Quelles mesures permettraient selon vous de les résorber ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général. - Je l'ai dit : il appartient à la commission, et non au seul rapporteur général, qui d'ailleurs achève son mandat, d'y réfléchir...
Plus sérieusement, il n'y a pas trente-six solutions. Les salaires à l'hôpital, en établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), ainsi que les autres charges, ont été augmentés, et il faut s'en réjouir. Mais en année pleine, cela représentera tout de même 7 milliards d'euros supplémentaires. Il faut les absorber ! Sans recettes nouvelles, et en excluant une hausse des cotisations qui ne semble pas d'actualité, je ne vois guère qu'une hausse de l'activité économique pour y parvenir. Nous l'avons déjà constaté dans le passé : les hausses de rémunération, notamment dans le privé, peuvent contribuer à améliorer le solde.
Nous avons par ailleurs toujours dit qu'il fallait faire un effort sur les actes médicaux, non pas de réduction, mais de régulation. Une ministre a évoqué naguère, reprenant une estimation de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), une proportion de 20 % à 30 % d'actes médicaux inutiles ou redondants... En appliquant une règle de trois, avec toutes les limites que cela comporte, 20 % de 200 milliards d'euros, cela fait tout de même 40 milliards d'euros : c'est considérable. Notre commission a déjà publié un rapport, dont j'étais l'auteur, sur les actes redondants ou inutiles, qui montrait que beaucoup de choses peuvent être faites.
Mme Catherine Deroche, présidente. - Nous remercions M. Vanlerenberghe pour la présentation de son dernier rapport en tant que rapporteur général. Je vous propose à présent d'autoriser sa publication.
Il en est ainsi décidé.
Réserves des régimes de retraites - Examen du rapport d'information
Mme Monique Lubin, rapporteure. - La mission d'évaluation et de contrôle de la Sécurité sociale a souhaité inscrire à son programme de travail une mission relative aux réserves des régimes de retraite. En effet, pendant la crise sanitaire, ces réserves ont été utilisées par plusieurs caisses de retraite pour mettre en oeuvre des mesures de soutien à leurs cotisants. Ces usages sont certes louables, mais ne nous semblaient pas correspondre aux objectifs premiers de la constitution de réserves par les différents régimes, d'autant qu'elles se cumulaient avec différents dispositifs de soutien à l'activité économique déployés par les pouvoirs publics. D'autre part, les discussions actuellement en cours entre les partenaires sociaux au sujet des niveaux de réserves de certains régimes, à commencer par celui des salariés du secteur privé, l'Agirc-Arrco, nous ont mené à établir un état des lieux de ces provisions au lendemain de la crise sanitaire afin d'en mesurer pleinement les conséquences sur les caisses de retraite.
Avant toute chose, il convient de rappeler que les régimes de retraite constituent des réserves en pratiquant la « sur-cotisation », c'est-à-dire en fixant des taux de cotisation supérieurs à ceux qui seraient nécessaires pour assurer strictement le versement des pensions des retraités actuels.
Ces efforts consentis par les actifs cotisants de chaque régime visent premièrement à assurer aux caisses un fonds de roulement leur permettant d'absorber le décalage entre la perception des cotisations et le versement des pensions sans recourir à un ajustement brutal de leurs paramètres financiers ni recourir au marché privé de la dette. En effet, contrairement aux régimes de base, les régimes complémentaires ne disposent pas de la possibilité de solliciter des avances de trésorerie auprès de l'Acoss.
Toutefois, la majeure partie des réserves ainsi accumulées sont placées sur les marchés en contrepartie d'actifs financiers, ce qui leur permet de dégager des rendements venant les alimenter. Dans cette perspective de long terme, les réserves visent d'abord et surtout à préserver l'équilibre financier des régimes auxquels elles appartiennent face aux conséquences des crises économiques, comme la chute brutale du produit des cotisations sociales générée par la crise sanitaire, et des bouleversements démographiques, à commencer par le « papy-boom ». Ce phénomène, qui se traduit, dans la plupart des pays industrialisés, par une forte augmentation des effectifs de retraités, alourdira, dans les décennies à venir, la charge supportée par les cotisants dans le cadre du système par répartition. Ainsi, il n'y aura plus, d'ici 2070, que 1,3 cotisant par retraité, contre 1,7 aujourd'hui. Dès lors, la solidarité intergénérationnelle appelle les actifs à constituer des réserves aujourd'hui pour alléger la charge de financement du système de retraite qui pèsera sur les générations futures.
Avant la survenue de la crise sanitaire, l'ensemble des régimes de retraite disposaient de 157,5 milliards d'euros de réserves. Seuls deux régimes de base avaient constitué des réserves, ceux des avocats, géré par la CNBF, et des professionnels libéraux, géré par la CNAVPL, de même que trois régimes intégrés, c'est-à-dire qu'ils couvrent à la fois les cotisations et les prestations de base et complémentaires, ceux des agents des collectivités locales, géré par la CNRACL, des clercs de notaires, géré par la CRPCEN, et des personnels de la SNCF, géré par la CPRPSNCF.
Différents facteurs expliquent que les principaux régimes de base ne disposent pas de réserves :
- Premièrement, à l'exception des exercices 2016 et 2017, le régime général, géré par la CNAV, est en déficit depuis 2005. Cette situation ne lui permet évidemment pas de dégager des provisions en dehors du Fonds de réserve pour les retraites, attributaire des excédents du régime général jusqu'en 2005 ;
- En ce qui concerne la branche vieillesse de la Mutualité sociale agricole, le régime des exploitants agricoles a accumulé les déficits jusqu'en 2018, tandis que le régime des salariés agricoles, excédentaire depuis 2013, est adossé au régime général, auquel il transfère ses déficits comme ses excédents ;
- Enfin, le régime des fonctionnaires de l'État, dont la gestion est assurée par le Service des Retraites de l'État, est équilibré chaque année par la contribution employeur de l'État et n'est donc pas structurellement conçu de manière à pouvoir constituer des réserves.
En revanche, toujours à fin 2019, 98 % des réserves du système de retraite sont détenus par des régimes complémentaires, ceux-ci ne bénéficiant pas, comme nous l'avons vu, des mêmes facilités de trésorerie auprès de l'Acoss que les régimes de base. Les niveaux de réserves varient fortement en valeur absolue, de 100 millions d'euros pour le régime complémentaire de la MSA à plus de 84 milliards d'euros pour l'Agirc-Arrco.
Néanmoins, ces comparaisons ne veulent rien dire, dans la mesure où chaque régime a constitué des réserves en fonction des perspectives d'évolution de sa propre situation démographique et des horizons de décaissement qui en découlent. Il convient donc de rapporter le montant des réserves détenues par chaque régime aux charges qui incombent à celui-ci. Sous cet angle, il apparaît nettement que les caisses disposant des réserves les plus conséquentes en volume ne sont pas celles qui pourraient financer le versement de leurs pensions le plus longtemps à partir de leurs seules réserves. Ainsi, avant la crise, l'Agirc-Arrco ne pouvait couvrir qu'une seule année de versement des pensions avec ses 84 milliards d'euros de réserves, tandis que les 5,5 milliards de réserves de la CRPNPAC, qui gère le régime des personnels navigants, représentaient près de neuf années de pensions.
M. René-Paul Savary. - L'examen des réserves des régimes de retraite conduit nécessairement à se pencher sur la question du Fonds de réserve pour les retraites. Créé par le gouvernement de Lionel Jospin en 1999, géré par la Caisse des dépôts et consignations et alimenté par une dotation initiale et des abondements annuels, celui-ci devait atteindre 1 000 milliards de francs en 2020, soit 150 milliards d'euros, pour faire face à la « bosse démographique ».
Toutefois, les conséquences de la crise de 2008 ont eu raison de cet objectif initial. En effet, à partir de 2011, alors qu'il représentait 37 milliards d'euros, le FRR a été consacré au remboursement de la dette née des déficits successifs de la branche vieillesse du régime général et les abondements annuels ont cessé. Depuis lors, le Fonds verse 2,1 milliards par an à la CADES jusqu'en 2024. En outre, la soulte versée par le régime de retraite des industries électriques et gazières en contrepartie de son adossement au régime général, confiée au FRR, a été rétrocédée à la CNAV en 2020 à un niveau de 5 milliards d'euros.
Ainsi, le FRR, qui représentait encore près de 34 milliards d'euros en 2019, ne disposait plus que de 27 milliards à fin mars 2021. La forte performance financière des placements du Fonds, qui s'est élevée en moyenne à 4 % depuis 2004, a permis de limiter l'impact de la réforme de 2010.
En suscitant une forte diminution du produit des cotisations sociales du fait de la contraction de la masse salariale ou des mesures de report de paiement prises par les pouvoirs publics, la crise sanitaire qui a éclaté l'an dernier a directement impacté les réserves des régimes de retraite. En effet, de nombreuses caisses se sont trouvées contraintes de recourir à celles-ci pour assurer la continuité du versement des pensions. En parallèle, la crise financière du premier semestre 2020 a conduit à une forte dépréciation des actifs financiers en contrepartie desquels sont placées les réserves des régimes sur les marchés.
Dans un tel contexte, le déficit de la branche vieillesse du régime général s'est considérablement creusé, atteignant 6,2 milliards. Sans la rétrocession de la soulte CNIEG par le FRR, ce déficit aurait dépassé les 11 milliards d'euros. La loi du 7 août 2020 a donc prévu de nouvelles reprises de déficits par la CADES à hauteur de 92 milliards au titre des branches vieillesse, maladie et famille du régime général et de la branche vieillesse du régime des exploitants agricoles, entraînant la mobilisation du FRR jusqu'en 2033, et non plus 2024. Celui-ci procédera ainsi à neuf décaissements annuels de 1,45 milliard d'euros au profit de la CADES entre 2025 et 2033.
À l'inverse, certains des régimes les mieux dotés en réserves se sont reposés sur celles-ci pour apporter à leurs affiliés des aides exceptionnelles. Ainsi, avec l'aval du législateur, le régime complémentaire des travailleurs indépendants, géré par le CPSTI, a financé sur ses réserves une aide d'un milliard d'euros consistant en un remboursement des cotisations versées en 2018, dans la limite de 1 250 euros. Les régimes complémentaires des professions libérales ont également mis en oeuvre de tels dispositifs de soutien, de même que le régime des personnels navigants, qui permet à ses affiliés de valider leurs services au titre des périodes d'activité partielle sans appel de cotisations employeur.
En conséquence de la crise et des mesures prises pour y faire face, les réserves des régimes de retraite se sont amenuisées de 5 milliards d'euros en 2020, pour s'établir à 152 milliards. Compte tenu de cette diminution et des nouveaux décaissements prévisionnels du FRR au profit de la CADES jusqu'en 2023, la situation patrimoniale nette du système de retraite, c'est-à-dire la somme des réserves détenues par les régimes et de l'actif résiduel du FRR après le dernier décaissement prévu, s'est plus fortement dégradée, passant de 179 à 161 milliards d'euros entre 2019 et 2020, en recul de 10 %.
Certains régimes se sont avérés particulièrement solides pendant la crise et n'ont que peu ou pas recouru à leurs réserves, notamment les régimes dits « jeunes », dont la population de cotisants excède largement les effectifs de retraités, c'est-à-dire les régimes des avocats et des professionnels libéraux. Il en va de même du régime des contractuels de droit public, géré par l'IRCANTEC, qui n'a pas été concerné par l'activité partielle, à l'instar des autres régimes du secteur public. À l'inverse, plusieurs régimes ont été fortement fragilisés, à commencer par l'Agirc-Arrco, dont les réserves ont diminué de 4,5 milliards d'euros. Les réserves du régime complémentaire des indépendants, quant à lui, ne représentaient plus que 7,8 années de versement des pensions à fin 2020, contre 9,4 un an auparavant. Ce délai a également diminué d'un an dans le cas du régime des personnels navigants.
Cette situation invite à reconsidérer avec plus de circonspection encore le projet de loi visant à instaurer un système universel de retraite déposé par le Gouvernement et dont l'examen a été suspendu l'an dernier. En contrepartie de la mission de gestion de la trésorerie du futur régime universel confiée à l'Acoss, le texte prévoyait l'affectation à cette dernière des réserves de fonds de roulement des régimes, dans la limite de trois mois de versement des prestations dues par chaque caisse. Or, la conformité d'un tel transfert à la Constitution et à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme demeure incertaine. En effet, comme l'a rappelé le Conseil d'État sur le fondement de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, si le transfert de la gestion d'un régime obligatoire de sécurité sociale ne porte pas en lui-même atteinte au droit de propriété de l'organisme qui l'assurait, l'affectation d'une partie des réserves des régimes à l'Acoss serait susceptible de leur faire subir un préjudice, dans la mesure où les réserves accumulées au prix des efforts de leurs affiliés leur appartiennent. Le Conseil d'État avait donc introduit dans le projet de loi une disposition prévoyant l'indemnisation de ce préjudice.
Forts de ces constats, nous formulons huit préconisations.
Compte tenu de la qualité de sa gestion et de l'absolue nécessité de disposer de réserves pour amortir les conséquences à venir du vieillissement de la population, il nous paraît d'abord indispensable de clarifier l'objectif du FRR, en réaffirmant sa vocation à constituer des provisions en vue d'assurer l'équilibre financier de la branche vieillesse du régime général au cours des prochaines décennies. Nous proposons donc que le Fonds se voie prioritairement attribuer le produit de toutes recettes exceptionnelles que l'État pourrait percevoir à l'avenir.
D'autre part, nous appelons les caisses de retraite à mettre en oeuvre les efforts nécessaires à la reconstitution des niveaux de réserves nécessaires à la couverture de leurs engagements futurs et, pour celles qui n'en disposaient pas, à l'apurement de leurs déficits. En vue d'atteindre cet objectif, les régimes disposant de marges de manoeuvre gagneraient, de notre point de vue, à élargir la part des actions, dont la performance financière reste élevée, dans le total de leurs actifs, à l'heure où le rendement des obligations tend à s'aplatir. Les réserves du régime de retraite des personnels de la SNCF, quant à elles, bien que relativement faibles, pourraient être affectées à la CNAV, comme les réserves de leur régime de prévoyance l'ont été cette année à la CNAM, dès lors que l'Acoss couvre les besoins de trésorerie du régime depuis 2019.
Dans la perspective des chocs économiques à venir, il nous semble important d'autoriser les caisses gérant un régime complémentaire de retraite à solliciter des avances de trésorerie auprès de l'Acoss en cas de chute du produit des cotisations, comme celles-ci ont pu le faire à titre exceptionnel entre mars et juillet 2020, dans le cas où le recours à leurs réserves serait de mauvaise gestion. En effet, les actifs admis en représentation des réserves subissant de graves dépréciations en cas de crise financière, y recourir présente un fort coût d'opportunité, dans la mesure où cela revient à enregistrer des pertes importantes, qui auraient pu se résorber durant la reprise si les actifs n'avaient pas été liquidés. Or, en 2020, le Gouvernement a rejeté la demande d'avance de trésorerie émise par l'Agirc-Arrco afin d'éviter de recourir à ses réserves dans un contexte dégradé, au prétexte que le recours aux réserves devait être prioritaire sur les demandes d'avances. Cette décision a contraint le régime à emprunter auprès des institutions financières, ce qui présente un coût non négligeable. Il nous semble important de prévenir une telle situation à l'avenir.
Quid, au total, de l'avenir de la solidarité inter-régimes ? Nous suggérons d'abord de maintenir pour l'heure les régimes complémentaires en dehors du mécanisme de compensation démographique, qui ne concerne aujourd'hui que les régimes de base, dans la mesure où, si ces régimes disposent de réserves parfois conséquentes, celles-ci elles-mêmes ne sont pas suffisantes à l'amortissement du vieillissement démographique à long terme. Une telle solution améliorerait la situation présente des régimes de base qui en bénéficieraient, alors que ces derniers disposent de facilités de trésorerie auprès de l'Acoss, en raccourcissant le délai d'épuisement des réserves des régimes complémentaires contributeurs. Ces derniers seront alors contraints à recourir à des ajustements paramétriques brutaux ou à l'emprunt. Néanmoins, nous estimons qu'il conviendrait de confier aux partenaires sociaux la charge de mener une réflexion à ce sujet au regard de leur attachement au principe de solidarité, dans la mesure où le paritarisme revêt à nos yeux une importance particulière.
Enfin, nous nous opposons à toute mesure tendant à la mutualisation des réserves des régimes de retraite. Une telle orientation reviendrait à porter atteinte à leur droit de propriété et aux efforts réalisés par leurs affiliés et serait donc juridiquement fragile. En outre, elle ne ferait que reporter à plus tard la question de l'équilibrage du système de retraite : les régimes disposant de réserves devant de toute manière consommer intégralement celles-ci à terme ; dès lors, recourir à celles-ci pour couvrir les déficits du régime général poserait, à l'avenir, la question du financement de ces régimes précautionneux.
Toutefois, la détention de réserves s'accompagne nécessairement d'une responsabilité capitale, celle de n'utiliser celles-ci qu'en vue de préserver l'équilibre financier des régimes qui les détiennent face aux conséquences des chocs économiques et démographiques. Le recours aux réserves aux fins de soutien à l'économie, tel que nous l'avons observé en 2020, devrait donc être proscrit à l'avenir.
Tels sont, mes chers collègues, les constats que nous souhaitions partager avec vous et les propositions que nous soumettons à votre sagesse. Celles-ci nous paraissent à même de favoriser, toutes choses égales par ailleurs, les efforts devant être collectivement consentis pour relever ensemble le défi du vieillissement démographique.
Mme Catherine Deroche, présidente. - Merci à tous les deux pour ce rapport essentiel au regard des enjeux de la transition démographique.
M. René-Paul Savary, rapporteur. - Le montant des réserves s'établissait à 157 milliards d'euros avant la crise. Par définition, elles sont destinées à être mobilisées en cas de crise économique ou de bosse démographique. Cinq milliards d'euros ont ainsi été perdus du fait de l'impact de la crise sanitaire.
À la question de savoir si les réserves sont nécessaires, nous répondons : oui. Dans un régime par répartition, elles sont indispensables. Quand on fait appel à la dette, le coût de celle-ci est supporté par les générations futures. C'est l'inverse du principe de répartition, selon lequel les actifs, par leurs cotisations de l'année, financent les pensions des retraités de l'année. Si le coût des pensions de l'année est basculé sur les cotisations de l'année suivante, le système de répartition se trouve remis en cause.
Dans des périodes difficiles, on peut s'interroger : faut-il mobiliser les réserves ou vaut-il mieux emprunter compte tenu des taux bas ? Nous estimons qu'il est préférable de conserver les réserves et de s'en servir. Pour rappel, le FRR a rapporté pendant des années 4 % par an. Nous écartons en outre la piste de la mutualisation.
Nous nous sommes également penchés sur les mécanismes de la compensation démographique au niveau des régimes de base : des soultes sont versées annuellement en fonction de la démographie de chacun des régimes. La CNAV, actuellement déficitaire, contribue à la compensation démographique. Les régimes qui ont une démographie dynamique paient et les régimes qui ont une démographie défavorable, avec plus de pensionnés que d'actifs, sont compensés.
Nous ne pensons pas que l'extension aux régimes complémentaires de ce mécanisme de compensation soit une bonne idée.
Le FRR doit retrouver sa vocation et être conforté : il n'est pas fait pour payer la dette sociale, il a été institué par précaution pour amortir la bosse démographique.
M. Jean-Luc Fichet. - J'aurais besoin d'une précision sur un passage de votre présentation : vous avez indiqué que « la solidarité intergénérationnelle appelle les actifs à constituer des réserves aujourd'hui pour alléger la charge de financement du système de retraite qui pèsera sur les générations futures ». Pourriez-vous nous expliquer plus exactement ce que vous entendez par là ?
Mme Monique Lubin, rapporteure. - Compte tenu du déclin démographique, avec le « papy-boom », une masse importante de retraites sera à payer par moins d'actifs. Afin de ne pas ponctionner de manière drastique et exceptionnelle les actifs au moment où la bosse atteindra son sommet, il est préférable que les salariés paient aujourd'hui des surcotisations pour alimenter des réserves qui pourront être mobilisées.
M. Jean-Luc Fichet. - Le passage en question pourrait être interprété comme invitant à constituer des retraites privées...
Mme Monique Lubin, rapporteure. - Absolument pas. Il s'agit d'appeler les caisses de retraite à continuer de faire surcotiser pour alimenter des réserves.
M. René-Paul Savary, rapporteur. - Ce rapport cotisants/retraités continuera d'aller dans le mauvais sens. Dans les projections du COR, le niveau moyen des revenus des retraités représente 103 % à 105 % du niveau du revenu moyen. En moyenne, les retraites en France sont globalement plus généreuses que dans d'autres pays européens. Les simulations tirées du système actuel montrent que, progressivement, le niveau moyen des revenus des retraités diminuera pour se situer à 85 % du revenu moyen à l'horizon 2030. La revalorisation des pensions étant indexée sur l'inflation, et non sur les salaires, le pouvoir d'achat des retraités diminuera mécaniquement. Cela ne signifie pas que les pensions de retraite baisseront, mais elles augmenteront moins vite que le salaire moyen.
Mme Monique Lubin, rapporteure. - L'un des critères principaux retenus est en effet la part des dépenses de retraite dans le PIB : elle a fortement augmenté dans la période récente en raison de la crise. Selon les prévisions du COR, d'ici à trente ans, cette part diminuera. On pourrait en déduire qu'il n'y a pas de problème au niveau des différents régimes de retraite, mais les dépenses augmenteront en volume. Or, comme le niveau des salaires augmentera plus fortement, le risque est celui d'un décrochage du niveau des retraites par rapport au niveau national.
Mme Annick Jacquemet. - Vous avez évoqué des montants de réserves importants. Sont-ils bien ajustés aux prévisions ? Sont-ils sous ou surestimés ? Ils reposent sur une surcotisation des actifs : cette situation vous semble-t-elle justifiée ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. - Les réserves ne reposent pas uniquement sur des surcotisations. Des régimes « jeunes » peuvent prévoir des cotisations plus élevées en raison d'un nombre important de cotisants par rapport au nombre de retraités. Ils enregistrent donc plus de recettes que de dépenses.
Le chiffrage de 157 milliards d'euros peut sembler important, il pourrait même être rehaussé à 179 milliards d'euros si l'on comptabilise l'ensemble des actifs. Gardons toutefois à l'esprit que les dépenses des régimes de retraite représentent 320 milliards d'euros par an.
Les quelque 79 milliards d'euros de réserves de l'Agirc-Arrco ne représentent que onze mois de prestations. Certes, pour certains régimes, les réserves couvriraient plusieurs années de pensions. Il reste néanmoins délicat d'inviter un régime à constituer des réserves pour couvrir six mois ou un an de pensions, puisque ces réserves reposent sur un équilibre entre le nombre de cotisants et le nombre de pensionnés. Les caisses de retraite gérées par les partenaires sociaux sont souvent excédentaires, quand celles gérées par l'État sont souvent déficitaires.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général. - Je souhaiterais ajouter une précision. L'Agirc-Arrco s'est fixée comme objectif de maintenir le niveau de ses réserves au-dessus de 50 % du montant de ses dépenses annuelles. A ce stade, il se situe largement au-dessus de ce seuil.
M. René-Paul Savary, rapporteur. - Leur objectif est de disposer d'un montant de réserves équivalent au versement des pensions pendant six mois. Certains considèrent que cela ne pose pas de difficultés quand d'autres disent que ce n'est pas faisable!
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général. - Dans le cadre du projet de réforme systémique des retraites, il était envisagé de fixer un objectif de réserves à 50 % des dépenses annuelles mais ce niveau était contesté, notamment par Pierre-Louis Bras, président du COR.
M. René-Paul Savary, rapporteur. - Oui, Monsieur Bras considérait même que la constitution de réserves n'était pas indispensable. Dans notre rapport, nous disons le contraire, nous considérons qu'il faut disposer de réserves.
Mme Catherine Deroche, présidente. - Je renouvelle mes remerciements aux rapporteurs pour leur rapport, qu'ils présentent au nom de la mission d'évaluation et de contrôle d'évaluation de la sécurité sociale. Je vous propose d'en autoriser la publication.
La commission autorise la publication du rapport d'information.
Élection du rapporteur général
Mme Catherine Deroche, présidente. - Notre rapporteur général m'a fait part de sa démission. Je voudrais tout d'abord le remercier en notre nom à tous pour la qualité du travail fourni au cours de son quasi-septennat depuis sa première élection, en octobre 2014.
L'alinéa 5 de l'article 13 du Règlement du Sénat prévoit que la commission des affaires sociales élit, dans les mêmes conditions que le président, un rapporteur général qui fait, de droit, partie du bureau de la commission.
M. Alain Milon. - Je voudrais m'associer à ces remerciements. Nous avons travaillé en grande confiance avec un rapporteur général de qualité.
Mme Catherine Deroche, présidente. - J'invite les candidats aux fonctions de rapporteur général de la commission des affaires sociales à se faire connaître.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général. - Le groupe Union Centriste présente la candidature d'Élisabeth Doineau.
Le scrutin est ouvert. Puis les scrutateurs procèdent au dépouillement.
Mme Catherine Deroche, présidente. - Les résultats du premier tour sont les suivants :
Ont obtenu : Mme Élisabeth Doineau, 24 voix ; M. Olivier Henno, 3 voix.
Mme Élisabeth Doineau ayant obtenu 24 voix, je la proclame élue rapporteure générale de la commission des affaires sociales. (Applaudissements)
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - Je vous remercie. Je mesure les défis qui se présentent à moi et j'y ferai face avec loyauté et humilité. Je vous assure que j'y mettrai toute mon énergie.
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 - Désignation de rapporteurs
La commission désigne les rapporteurs suivants sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022.
- Mme Corinne Imbert, rapporteur pour l'assurance maladie ;
- M. René-Paul Savary, rapporteur pour l'assurance vieillesse ;
- M. Olivier Henno, rapporteur pour la famille ;
- Mme Pascale Gruny, rapporteur pour les accidents du travail et maladies professionnelles ;
- M. Philippe Mouiller, rapporteur pour l'autonomie.
Projet de loi de finances pour 2022- Désignation de rapporteurs pour avis
Mme Catherine Deroche, présidente. - Comme chaque année, la commission doit désigner ses rapporteurs pour avis sur le projet de loi de finances.
La commission désigne les rapporteurs pour avis suivants sur le projet de loi de finances pour 2022.
- Mme Jocelyne Guidez, pour la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ;
- M. René-Paul Savary, pour la mission Régimes sociaux et de retraite ;
- M. Jean Sol, pour la mission Solidarité, insertion et égalité des chances ;
- M. Alain Duffourg, pour la mission Cohésion des territoires - Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables ;
- Mme Annie Delmont-Koropoulis, pour la mission Santé ;
- Mme Brigitte Micouleau, pour la mission Direction de l'action du Gouvernement ; Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives, Action 15 du programme « Coordination du travail gouvernemental » de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » (Mildeca) ;
- Mme Frédérique Puissat, pour la mission Travail et emploi.
Mme Catherine Deroche, présidente. - Il y a deux différences par rapport à l'an dernier : la désignation de notre collègue Alain Duffourg comme rapporteur sur l'hébergement d'urgence, en remplacement d'Olivier Henno et la suppression de notre saisine pour avis sur la mission outre-mer. Cette modification, décidée par le bureau de la commission, m'a été suggérée par notre rapporteur Alain Milon qui a souligné le fait que cette mission ne retrace en rien la politique du Gouvernement dans les outre-mers et qu'avec trois minutes en séance publique, le propos de notre commission est inaudible. En revanche, il est bien évident que notre commission doit porter une attention particulière aux outre-mers qui concentrent les difficultés sociales et Alain Milon se propose d'y veiller, comme référent de notre commission sur ce sujet.
Il en est ainsi décidé.
Désignation d'un rapporteur
La commission désigne Mme Laurence Garnier rapporteure sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à accélérer l'égalité économique et professionnelle (n° 592, 2020-2021)
Proposition de loi pour la prévention en santé au travail - Désignation des candidats à la commission mixte paritaire
La commission soumet au Sénat la nomination de Mmes Catherine Deroche, Pascale Gruny, M. Philippe Mouiller, Mmes Nadia Sollogoub, Emilienne Poumirol, Annie Le Houérou et M. Martin Lévrier comme membres titulaires, et de Mmes Marie-Pierre Richer, Frédérique Puissat, M. René-Paul Savary, Mme Jocelyne Guidez, M. Bernard Jomier, M. Stéphane Artano et Mme Cathy Apourceau-Poly comme membres suppléants de l'éventuelle commission mixte paritaire.
La réunion est close à 11 h 20.