Mercredi 21 février 2018
- Présidence de M. Hervé Maurey, président -
La réunion est ouverte à 9 h 30.
Audition de M. Jean-Benoît Albertini, commissaire général à l'égalité des territoires
M. Hervé Maurey, président. - Monsieur le commissaire général, mes chers collègues, nous allons tout d'abord entendre M. Jean-Benoît Albertini, commissaire général à l'égalité des territoires (CGET) avant notre collègue Marta de Cidrac, qui nous présentera la proposition de loi de Patrick Chaize visant à sécuriser et à accélérer les investissements dans les réseaux très haut-débit, au service de l'aménagement numérique du territoire.
Monsieur le commissaire général, nous sommes très heureux de vous accueillir dans notre assemblée qui est particulièrement sensible aux questions d'aménagement du territoire. Vous exercez cette fonction depuis le mois de septembre mais votre parcours professionnel témoigne à la fois de votre compétence et de votre intérêt dans ce domaine, puisque vous avez été conseiller en charge de l'aménagement du territoire auprès du Premier Ministre Jean-Pierre Raffarin, directeur de cabinet du secrétaire d'État en charge de l'aménagement du territoire, adjoint au délégué de la DATAR, directeur du cabinet du ministre de la cohésion des territoires, Richard Ferrand puis Jacques Mézard et préfet de Vendée, avant d'être nommé à ce poste..
Le CGET, créé en 2014, nous paraît relativement en retrait par rapport à la DATAR. J'ai d'ailleurs remis, avec mon collègue Louis-Jean de Nicolaÿ, un rapport intitulé « Aménagement du territoire : plus que jamais une nécessité », l'urgence à agir que nous évoquions contrastant avec la vision de votre prédécesseur qui se considérait davantage comme un facilitateur que comme un acteur. On avait d'ailleurs l'impression que le CGET était un spectateur. Comment va-t-il évoluer ? Son rattachement au ministre de la cohésion des territoires, et non plus au Premier ministre, n'induit-il pas une perte de la transversalité de ses actions, pourtant nécessaire pour apporter des réponses aux difficultés que connaissent les territoires ? Où en est la création de la nouvelle agence nationale des territoires annoncée par le Président de la République ? Quelle sera la place du CGET par rapport à elle ? Vous avez la parole pour nous éclairer sur le rôle du CGET et ses perspectives.
M. Jean-Benoît Albertini, commissaire général à l'égalité des territoires. - Monsieur le président, mesdames et messieurs les sénateurs, je suis particulièrement heureux de m'exprimer devant vous, a fortiori pour vous éclairer sur les missions du CGET, en ayant en tête le fait que nous n'avons sans doute pas su rendre suffisamment accessible et de manière efficace l'information nous concernant. Le CGET, dont la vocation est transversale et le fonctionnement interministériel, embrasse des échelles territoriales plus diverses que celles qui relevaient de la compétence de la DATAR. C'est dans cet esprit que je vous ai apporté quelques documentations sur des initiatives récentes, comme le plan « action coeur de ville » ainsi qu'une présentation de notre organisation qui s'inscrit dans la continuité de la DATAR. Le CGET est également le dépositaire des compétences et des missions de la délégation interministérielle à la ville et de l'agence pour l'inclusion sociale et l'égalité des chances pour ce qui concerne la politique de la ville, conformément à ce que le Président de la République a précisé, dans son discours prononcé à Roubaix-Tourcoing, le 14 novembre dernier.
Le CGET, qui relève formellement du ministre de la cohésion des territoires, emploie 300 agents regroupés, depuis octobre dernier, dans le bâtiment, situé 20, avenue de Ségur, qui rassemble les services du Premier ministre. Nous étions auparavant à Saint-Denis et cette nouvelle localisation permet d'être en contact au quotidien avec d'autres partenaires, comme France Stratégie, avec lequel le CGET coproduit un certain nombre d'études, comme récemment celle sur les liens entre les métropoles et leurs territoires avoisinants.
À la fois récent et riche de l'héritage de ses prédécesseurs, le CGET, tel qu'en dispose son décret fondateur, est un organe interministériel ; le changement de notre rattachement administratif, impliquant le changement du comptable-référent pour la gestion de nos effectifs et de nos crédits, ne remet nullement en cause cette dimension. Pour preuve, sont toujours rattachées au CGET la délégation interministérielle au renouveau du Bassin du Nord-Pas-de-Calais créée par le précédent gouvernement, la délégation interministérielle pour l'aménagement logistique de l'Axe Saône-Rhône-Méditerranée ainsi que la délégation interministérielle pour le développement de la vallée de la Seine. Les caractéristiques de ces projets nécessitent de faire le lien avec les collectivités territoriales et la diversité des départements ministériels directement concernés. Le CGET entretient une relation privilégiée avec les échelons déconcentrés de l'État et les SGAR (Secrétaire général aux affaires régionales), dont il est mensuellement chargé d'animer le réseau conformément à un décret de 2014. Enfin, dans la continuité des missions qui préexistaient, le CGET est attaché au partenariat avec les collectivités territoriales, comme en témoigne son usage du lien contractuel, qui permet d'instaurer une relation équilibrée et confiante. Cette dimension participe ainsi à cette responsabilité partagée, évoquée par le Président de la République comme la source du nouveau « pacte girondin », à l'occasion de la dernière conférence nationale des territoires qui s'est tenue, ici même, en juillet 2017.
L'attachement à ces valeurs et notre rôle de support des initiatives, pour le compte du Gouvernement et du ministère de la cohésion des territoires, n'empêche pas le CGET, éclairé notamment par les rapports de votre commission, de s'inscrire dans une approche de critique constructive sur les outils de l'organisation territoriale de la République, qui doivent évoluer. En effet, l'organisation de la République est désormais décentralisée et cette évolution, obtenue au terme de trente-cinq années de décentralisation, implique le renouvellement de nos pratiques et de nos initiatives. L'empilement des procédures contractuelles - avec a minima 1 200 contrats territoriaux en vigueur aujourd'hui - nuit à la lisibilité, à l'identification des responsabilités et à l'efficacité de l'action publique en matière d'aménagement du territoire. Si chaque génération de contrats (contrats de ruralité, CPER, contrats de ville, contrats de bassin, contrats de revitalisation) répondait, en soi, à un objectif spécifique, la multiplication des périmètres d'intervention et des déclinaisons territoriales empêche désormais l'adaptation aux réalités territoriales et le suivi effectif des programmes d'action.
Dans ce cadre décentralisé, le CGET entend accompagner l'initiative des acteurs et non se substituer à eux. C'est là un changement avec le rôle de la DATAR dans laquelle l'État était davantage prescripteur que coopérateur. Pour autant, le CGET peut également piloter des dispositifs d'envergure nationale qui sont proposés aux collectivités territoriales, comme le programme « action coeur de ville », qui s'adresse aux villes moyennes. Bien que la DATAR soit intervenue par le passé dans les villes moyennes avec des programmes d'intervention spécifiques, il manquait jusqu'à présent une initiative d'envergure nationale pour rétablir les équilibres compromis dans l'animation de ce réseau de villes moyennes, si important pour le maillage territorial et la cohérence du territoire national. Cette initiative est d'actualité : l'appel à candidatures à ce programme vient d'être clos et d'ici la mi-mars, le ministre de la cohésion des territoires, appuyé par le comité de pilotage national, fera connaître la liste des villes lauréates du premier contingent qui débutera cette année. Parmi ces initiatives nationales, il faut également citer la deuxième vague du déploiement de maisons de services au public ou encore le plan téléphonie mobile et très haut débit pour lequel 5.000 nouveaux pylônes, dont 600 en 2018, seront installés pour couvrir les zones blanches et grises du territoire national. Je crois que vous avez pu, à cet égard, entendre le Secrétaire d'Etat auprès du ministre qui vous a présenté ces points.
Je pense aussi à l'animation de la politique de la ville : le CGET, par sa tutelle sur l'agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), anime également la politique de la ville. Il contribue actuellement, en appui aux préfets de régions et de départements, à la préparation des contrats de ville, qui seront révisés en 2018. Enfin, le CGET continue à porter les zones de revitalisation rurale ou la prime d'aménagement du territoire, qui soutient l'installation d'entreprises dans les zones fragiles de nos territoires.
Trois actions-clés permettent de résumer les orientations du CGET, telles qu'elles ont été fixées par la feuille de route gouvernementale : d'abord, accompagner des territoires dans leur projet, à leurs côtés et non à leur place. Ensuite, favoriser les coopérations entre les différentes échelles territoriales, en réaction contre un discours réducteur opposant les territoires entre eux. Ainsi, certaines métropoles mettent en oeuvre une forme très inventive de coopération sur une diversité de thématiques avec leurs territoires voisins, à travers les contrats de réciprocité, dispositif expérimental, qui lient désormais la Métropole de Brest avec l'ensemble du pays de Brest ou encore la Métropole de Toulouse avec les pays de l'Est du Gers. Le CGET soutient ces démarches qui permettent de sortir d'un discours de fracture et de rupture en matière d'aménagement du territoire. Troisième action-clé enfin : la coconstruction des politiques publiques, dans un contexte où les collectivités territoriales réclament de l'État la prise en compte de leurs compétences et l'accompagnement de leurs initiatives. Le CGET, comme instrument de la politique gouvernementale, doit répondre à l'expression des besoins des collectivités d'un travail commun, sans pour autant occuper une position tutélaire, comme cela a pu être le cas, avec la DATAR.
Parmi les récents travaux du CGET, le baromètre de la cohésion des territoires, annoncé lors de la conférence nationale des territoires de Cahors, est une tentative pour qualifier la cohésion territoriale au niveau national à travers différents paramètres, comme le fait également l'Union européenne. En outre, cette initiative devrait être renforcée par la publication d'un rapport sur la cohésion des territoires, qui devrait constater à la fois la convergence des dynamiques régionales et l'accroissement des disparités au niveau infrarégional, comme dans le grand quart Centre-Nord-Est de la France, où la concentration des facteurs de fragilité justifie des interventions publiques spécifiques.
La feuille de route de la politique de la ville, quarante ans après son lancement, doit évoluer. Les travaux de Jean-Louis Borloo devraient alimenter le prochain comité interministériel des villes prévu en avril prochain. En outre, le CGET assure la coordination nationale, en lien avec l'Union européenne et Régions de France, de la nouvelle génération des fonds européens accordés à partir de 2020. Ces programmes sont attendus par les territoires.
Le CGET prépare de nouveaux dispositifs opérationnels destinés à soutenir les territoires fragiles signalés dans le baromètre. Ainsi, les départements de la Nièvre et de la Creuse, les bassins miniers du Nord-Pas-de-Calais sont confrontés à des difficultés relativement anciennes ; le CGET y intervenant en appui des autres structures de l'État.
Enfin, la création de l'agence nationale de cohésion des territoires doit permettre de soutenir les territoires : elle répond aux besoins d'ingénierie nécessaires à la réussite des projets de développement local, qu'il s'agisse d'accompagner la réalisation des programmes de l'État, comme le plan « villes moyennes » ou encore de soutenir les collectivités partenaires. Une mission de préfiguration devrait ainsi préciser les détails du fonctionnement de cette nouvelle agence.
M. Hervé Maurey, président. - Je vous remercie, Monsieur le commissaire général, de votre intervention et laisse la parole à nos collègues, en commençant par Louis-Jean de Nicolaÿ, qui est à la fois le rapporteur pour avis de la mission budgétaire « cohésion des territoires » et le co-auteur d'un excellent rapport sur cette question.
M. Louis-Jean de Nicolaÿ. - Merci de cette excellente introduction. On se demande vraiment si la création d'une nouvelle agence est nécessaire vu ce que fait le CGET à l'heure actuelle. À vous entendre, tout va plutôt bien dans nos territoires avec les différents dispositifs existants. Changer un nom est parfois plus simple et clair, d'autant qu'on a parfois du mal aujourd'hui à voir comment s'articulent les programmes entre eux.
Nous sommes nombreux à représenter les territoires ruraux qui connaissent plusieurs fractures : numérique, médicale ou encore scolaire. Cela montre combien il est difficile de parler d'uniformité du territoire. Des politiques ciblées, qui se font pour le moment attendre, sont nécessaires pour réduire les fractures et soutenir le milieu rural. Les actions « coeur de ville », qui s'adressent aux villes de plus de 10 000 habitants, vont nécessairement laisser de côté 33 000 communes !
Deux autres questions : quel est l'avenir des pôles de compétitivité que nous avions évoqués ensemble lors de la préparation du budget ? Ont-ils vocation à être transférés aux régions ou peuvent-ils demeurer autonomes ? Par ailleurs, quel est l'avenir des zones de revitalisation rurale, qui sont aujourd'hui des zones fiscales mais ne disposent pas de soutien particulier en plus ? Enfin, la taxe sur le pétrole va rapporter douze milliards d'euros dans quelques années. Comment cette manne pourrait-elle aider les communes rurales dans leur transition énergétique et dans la rénovation de l'habitat ?
M. Claude Bérit-Débat. - D'abord je souhaiterais savoir où en sont les zones de revitalisation rurale (ZRR). Ensuite, s'agissant du programme « actions coeur de ville », de nombreuses villes moyennes, autour de 30 000 habitants, sont candidates. Selon quels critères leur sélection va-t-elle s'effectuer ?
M. Gérard Cornu. - Effectivement, l'aménagement du territoire est essentiel pour nous, au Sénat, qui représentons les territoires. Nos concitoyens ont l'impression d'une réelle fracture territoriale entre, d'une part, Paris et les métropoles régionales, et le reste du territoire. Outre les problèmes que vient de rappeler mon collègue Louis-Jean de Nicolaÿ, un problème de mentalité se pose : la province apparaît lointaine, pour les autorités technocratiques qui ont une vision très « parisienne », comme en témoignent les propositions de fermeture des lignes ferroviaires secondaires du rapport de Jean-Cyril Spinetta. Tous ces travers nourrissent le sentiment d'abandon des territoires ! Le CGET a un travail considérable devant lui, car le constat qu'hormis Paris et les grandes métropoles, le reste de la France importe peu est ancré fortement dans les esprits. Le Sénat est devenu le seul défenseur des territoires, alors que la composition de l'Assemblée nationale, à la suite de son dernier renouvellement, est devenue plus urbaine.
M. Hervé Maurey, président.- Nous devrions entendre prochainement M. Jean-Cyril Spinetta, qui ne partage sans doute pas la même vision de l'aménagement du territoire que celle de notre commission.
M. Rémy Pointereau. - On peut être nostalgique de la vision de la DATAR qui donnait de réelles perspectives de long terme à nos territoires et de l'espoir, notamment en matière d'infrastructures. L'action « coeur de ville » part sans doute d'un bon sentiment, mais va se limiter à une vingtaine de bénéficiaires, alors que 600 villes éligibles connaissent de réelles difficultés. Faudra-t-il attendre trente ans pour que cette action soit pleinement réalisée ? Comment entendez-vous catalyser ces actions ? La prolongation des zones de revitalisation rurale est une source d'inquiétude car certaines recompositions territoriales locales les ont mises à mal : quels pourraient en être les nouveaux critères, le cas échéant ? Enfin, les différentes fractures, auxquelles j'ajouterai celles de la mobilité et de l'agriculture, nourrissent un sentiment d'abandon s'exprimant dans les urnes. Comment comptez-vous résorber ces différentes fractures concrètement dans les mois qui viennent ?
M. Jean-Michel Houllegatte. - Même si c'est difficile, il nous faut désormais faire notre deuil de la DATAR qui est d'une autre époque, à laquelle l'État faisait preuve de volontarisme. Or, depuis lors, l'organisation de la République est décentralisée et les élus locaux disposent de réels pouvoirs. Cependant, la France connaît une métropolisation grandissante, induisant la migration des fonctions tertiaires supérieures vers les nouvelles capitales régionales. Changeons de paradigme ! Alors qu'auparavant, les réseaux de villes et les pôles de compétitivité étaient moteurs, ceux-ci ne parviennent plus à mettre en réseau de l'innovation disséminée dans nos territoires. Comment y parvenir ? En outre, les relations avec Business France sont progressivement devenues inexistantes. On ne sait plus où sont les commissaires à l'industrialisation. Comment les réactiver ?
M. Jérôme Bignon. - Je suis élu de la Somme et des Hauts de France. Pourquoi le délégué interministériel au développement de l'axe portuaire Saône-Rhône-Méditerranée est-il seul dans cette fonction à vos côtés, alors que le Premier Ministre, que ce soit au CIMER (Comité interministériel de la Mer) ou au Havre, a souligné l'importance nationale des ports du Havre, de Dunkerque et de Marseille ? Par ailleurs, 480 contrats de ruralité ont été signés. Or, de nombreuses personnes, qui vivent en dessous du seuil de pauvreté, ne sont pas identifiées en tant que telles dans ces contrats. Pourrait-on imaginer un nouveau type de contrat de ruralité destiné à soutenir ces personnes en grande précarité (médicale, scolaire, économique) et situées en zone très rurale ?
M. Jean-François Longeot. - Votre documentation sur l'action « coeur de ville » me semble très intéressante. La revitalisation des villes moyennes est une urgence, comme le souligne d'ailleurs le ministre de l'économie Bruno Lemaire, mais nous allons mettre trente à quarante ans, comme vient de le souligner mon collègue Rémi Pointereau, pour y parvenir. Comment agir avec des crédits du Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC) qui sont en nette diminution, de 16 à 14 millions d'euros cette année, à comparer avec 70 millions d'euros il y a 10 ans ? Aujourd'hui, il y a 14 millions d'euros de crédits pour 66 millions d'habitants, c'est peu, alors que l'ensemble de nos centres-villes connaissent la dévitalisation et la désertification. Il faut des moyens, notamment administratifs, pour obtenir des crédits et les utiliser, alors comment alléger les conditions d'obtention et d'utilisation des crédits du FISAC ?
M. Guillaume Gontard. - Il est en effet important de s'appuyer sur les territoires pour assurer la décentralisation. Comment créer un lien entre les métropoles, à l'influence et l'importance grandissantes, et les zones rurales, où les communautés de communes sont de plus en plus modestes ? La coconstruction, via notamment des pactes métropolitains sur des questions comme les transports, l'urbanisme ou encore la gestion des déchets, me paraît une solution favorisant, à terme, les partenariats. Les contrats de réciprocité ont-ils vocation à être pérennisés et de nouveaux outils sont-ils à l'étude pour créer de nouvelles synergies entre les territoires ?
M. Frédéric Marchand. - L'aménagement des territoires est une nécessité. Les métropoles ne sont nullement l'alpha et l'oméga de la réussite. Ainsi, la métropole européenne de Lille, avec ses quatre-vingt-dix communes, présente de réelles disparités. Certains dispositifs, comme la politique de la ville, qui fête ses 40 ans, doivent être revisités en s'appuyant sur des pistes utilisées par le Gouvernement, je pense notamment à celle de l'économie sociale et solidaire avec French Impact. Cette piste ne permettrait-elle pas de créer plus d'emplois ?
M. Benoît Huré. - La DATAR a façonné la France en son temps. Il est important que le CGET préserve ses leviers d'influence auprès du Premier ministre. La ruralité est très diverse et connaît la désespérance. Élu de la partie rurale des Ardennes, je mesure combien les moyens à concentrer sont importants. Après près de quarante ans de décentralisation, les écarts de richesses entre les territoires vont désormais de 1 à 40. La péréquation horizontale ne peut évidemment résorber de telles disparités et le problème n'est pas idéologique ici ! N'oublions pas les conséquences électorales d'une telle désespérance. Les politiques publiques doivent être à la hauteur des ambitions, à la condition de rendre nos concitoyens, en proximité, acteurs et non consommateurs ! Ceux-ci doivent ainsi devenir des parties prenantes à la vie publique. La réorganisation territoriale qui s'est déroulée précédemment, aurait pu permettre de redessiner les institutions locales à partir des bassins de vie. Or, la démarche suivie a été inverse ! L'action publique, à la fois portée par l'État, les collectivités locales, le monde associatif et les acteurs économiques, doit se traduire par une réelle proximité garantissant une meilleure répartition géographique. Un géographe avait parlé d'une « France à 12 minutes », où tout serait accessible. Encore faut-il, pour y parvenir, que les territoires soient irrigués par des infrastructures à la hauteur des nécessités.
M. Olivier Jacquin. - Je salue la qualité de vos cartographes, monsieur le commissaire général. Les choses sont plus compliquées qu'une opposition rural / urbain : la ville connaît également des difficultés considérables (mobilité, éducation) et pourtant, c'est un rural qui le dit. On parle beaucoup de la richesse des métropoles, mais un nouveau courant économique tend à démontrer que le schéma est plus complexe. D'ailleurs, certaines villes moyennes créent en moyenne plus d'emplois que les grandes agglomérations qui ne réussissent pas ! Sur les relations entre villes et campagne, il est essentiel que les ruraux puissent s'exprimer sur l'organisation des villes lorsqu'ils dépendent d'une métropole, et réciproquement. Encore faut-il que l'estime soit partagée de part et d'autre. L'ingénierie permet ainsi de résorber les différences territoriales entre villes et campagnes. Or, la diffusion de cette ingénierie est assimilée par l'État à des dépenses de fonctionnement et il est réticent à consacrer des moyens à ce type d'actions ! Il y a des risques à rendre fongibles ces nouveaux fonds, notamment la dotation de soutien à l'investissement des communes (DSIL) à laquelle les communes rurales étaient éligibles car ce sont les territoires les plus organisés qui seront les premiers bénéficiaires de ces fonds. Je crois qu'il y a un manque de confiance de l'État vis-à-vis des autorités déconcentrées du fait d'une dissymétrie d'ingénierie. L'État semble craindre la puissance nouvelle des régions et abaisse leur dotation globale de fonctionnement. Il comptait enfin sur la puissance européenne pour conférer une puissance d'investissement à nos territoires. Or, les discussions en cours à la Commission européenne nous paraissent extrêmement inquiétantes. Quelle est votre position sur ce point ?
M. Guillaume Chevrollier. - La France devient un pays à deux vitesses. Alors que la France urbaine riche et dynamique se concentre dans les mégalopoles, la France rurale, située en zone périphérique, connaît le déclin économique et commercial ainsi que des problèmes de mobilité. La fracture territoriale s'accélère. La dotation globale de fonctionnement par habitant en milieu urbain est de 120 euros tandis qu'elle est divisée par deux en milieu rural ! L'agence nationale de la cohésion des territoires suscite une forte attente. Quel sera le rôle du CGET par rapport à elle ? Par ailleurs, les collectivités territoriales éprouvent des difficultés pour financer les projets qui exigent 20 à 30 % d'apport en fonds propres. Que pensez-vous des moyens directs, comme les dotations d'équipement des territoires ruraux (DETR), qui garantissent plus d'autonomie et d'efficacité dans la conduite des projets et permettent d'échapper à l'empilement des procédures contractuelles que vous évoquiez ?
Mme Angèle Préville. - Les communes rurales ne disposent que de très peu de moyens pour conserver leur patrimoine, comme dans mon département du Lot. La baisse des dotations globales de fonctionnement aggrave leur situation. Un dispositif d'envergure nationale est-il prévu en faveur du patrimoine qui est un legs de notre histoire ?
M. Jean-Marc Boyer. - La France à deux vitesses devient de plus en plus manifeste. Si les collectivités territoriales ont essayé de compenser les fragilités de leurs territoires, les baisses de dotation les en empêchent désormais. Or, la mutualisation n'est pas toujours la panacée et la fracture entre territoires urbains et ruraux ne cesse de s'accroître ! En Auvergne, on dit que deux pauvres n'ont jamais fait un riche. Pourquoi la dotation globale de fonctionnement par habitant en secteur urbain est-elle en effet deux fois plus importante par habitant qu'en zone rurale ? Vos objectifs d'accompagnement se limitent-ils à une dimension comptable ou comptent-ils, à l'inverse, mettre en oeuvre une véritable péréquation ?
M. Michel Dagbert. - Un contrat partenarial d'intérêt national a été élaboré par le précédent gouvernement et mis en oeuvre par le gouvernement actuel ; un délégué interministériel venant d'être désigné. Ce contrat partenarial, qui prévoit la rénovation énergétique de 21 000 logements, embrasse de nombreuses thématiques, comme l'urbanisation, la vie scolaire ou la santé. Or, la désespérance des populations, qui se sentent abandonnées, ne semble guère prise en compte par la présentation des activités du CGET dans son répertoire de cartes. Les réactions électorales, en juin 2017, dans mon département où se trouve l'ancien bassin minier du Nord-Pas-de-Calais, soulignent l'urgence d'une action efficace et profonde. Pouvez-vous me rassurer, monsieur le commissaire général sur le caractère pluridisciplinaire et transversal de la mission et des moyens du nouveau délégué interministériel ?
Mme Nicole Bonnefoy. - Les territoires ruraux ont des atouts et des capacités. Pour autant, l'ingénierie de qualité doit être considérée comme un investissement pour ces territoires et pas uniquement comme des dépenses de fonctionnement. Un plan prison, comportant un appel à projets auprès des collectivités, vient d'être lancé par l'État. Dans mon département, un EPCI rural s'est proposé d'accueillir un quartier de préparation à la sortie (QPS) mais un autre projet, porté par une ville, a été sélectionné. Seules les candidatures des villes ont été réellement prises en compte, en raison des infrastructures tenues pour essentielles à la construction de ce QPS. Pourquoi proposer à l'ensemble des collectivités territoriales de candidater à de tels projets, si l'on considère, après coup, que seules les villes y sont éligibles ? Les élus ruraux concernés ont été meurtris par le mépris avec lequel leur candidature a été accueillie. Enfin, quelle sera la configuration de la nouvelle agence nationale des territoires ? Quels en seront les moyens et surtout, que va-t-elle apporter aux territoires ?
M. Didier Mandelli. - Je salue la volonté de monsieur le commissaire général, ancien préfet de Vendée, d'accompagner l'ensemble des collectivités du département. Les fractures sont communes aux territoires, qu'ils soient ruraux ou urbains et la désespérance est dans les villes comme dans les campagnes. Comment les missions de la future agence nationale des territoires seront-elles articulées avec le CGET et France Stratégie ? Une seule structure ne pourrait-elle pas être mise en place ? Je suis convaincu qu'il n'y a pas d'égalité sans cohésion ni de cohésion sans égalité. N'avoir au final qu'un seul interlocuteur répondrait aux besoins des acteurs locaux.
M. Éric Gold. - Je relaie, à nouveau, le sentiment profond d'abandon des citoyens des territoires ruraux. Le décalage est grand entre la présentation de grands plans ambitieux et ce qui est effectivement vécu sur le terrain. Cette frustration est aussi présente chez les élus dont la capacité décisionnelle a été réduite, du fait de l'extension des structures intercommunales ou des régions. Les Sénateurs ne seront plus les acteurs de terrain comme auparavant, faute d'un ancrage local. Quelle sera la lisibilité des actions mises en oeuvre, à la fois par le CGET et l'agence nationale de cohésion des territoires ? Comment s'articuleront leurs actions ?
M. Christophe Priou. - Vous aviez su, comme préfet de Vendée, maintenir un contact et établir une confiance avec les entreprises durant des crises, comme celle de la conchyliculture, qui ont duré plusieurs années. La Région Pays-de-Loire a été emblématique de l'aménagement du territoire. Il y a vingt ans, Olivier Guichard ne signait déjà plus de contrats de plan État-région, du fait, selon lui, de l'incapacité de l'État à honorer ses engagements ! Je ne suis pas certain, du reste, que la situation ait changé depuis lors. La création d'une commission permet bien souvent d'enterrer un projet et le nombre des missions que nous connaissons actuellement (mission Duron, mission Spinetta) ne me semble pas de nature à renforcer, pour nos concitoyens, l'efficacité des décisions et des réalisations. En outre, la gestion du dossier de Notre Dame des Landes fournit l'exemple manifeste d'une grave fracture démocratique, en remettant en cause non seulement un référendum antérieur mais aussi les décisions des élus et de justice.
Mme Marta de Cidrac. - Représentante du département des Yvelines, qui est à la fois rural et urbain, je rappellerai que les préoccupations exprimées par mes collègues représentants des zones rurales se retrouvent également dans certains de nos quartiers urbains, comme en témoignent les derniers résultats électoraux. Restez vigilant à l'équilibre de nos territoires, qu'ils soient ruraux ou urbains !
M. Hervé Maurey, président. - Comme nos questions et nos réactions le révèlent, les membres de notre commission dressent un constat unanime quant aux grandes difficultés éprouvées dans leurs territoires. Malgré les grandes déclarations d'intention ministérielles, quelles que soient les majorités, rien de change depuis des années ! À mon tour, je ne peux que relayer cet agacement et cette colère face aux responsables politiques. On est tous d'accord sur le constat mais ça ne bouge pas ! Pouvez-vous nous en dire plus sur cette nouvelle agence? Vous avez également évoqué France Stratégie. Or, notre commission a reçu Jean Pisani-Ferry qui nous a tenu un discours uniquement centré sur l'avenir des métropoles et où les habitants des autres zones négligés. Une telle vision technocratique est inadmissible, d'autant plus que les conditions de vie dans toutes les métropoles sont loin d'être idéales !
M. Jean-Benoît Albertini. - Je reçois votre dernière réaction comme l'expression de votre attente ! La question de l'ingénierie renvoie aux compétences de l'agence nationale de cohésion des territoires. Celle-ci est-elle nécessaire ? Lors de l'annonce de sa création au Sénat, le Président de la République a précisé que cette nouvelle agence soutiendrait l'ingénierie des territoires fragiles ou périphériques. Le CGET ne fait presque pas de soutien en ingénierie, entendue comme une assistance à maîtrise d'ouvrage, aux côtés des porteurs de projets, pour les aider à monter un dossier, sauf en territoires de montagne avec les comités de massif. Nous nous appuyons sur les services déconcentrés existants. L'agence nationale de cohésion des territoires devrait remplir cette fonction d'accompagnement à l'ingénierie non assumée par le CGET qui est avant tout chargé, comme l'était la DATAR, du pilotage national des dispositifs. Ainsi, le CGET conçoit le plan « actions coeur de ville », organise les cofinancements et la sélection, avant de suivre sa mise en oeuvre ; cette démarche étant analogue à celle suivie pour les pôles de compétitivité ou encore les pôles de développement métropolitains. En revanche, la loi prévoit que l'assistance aux collectivités territoriales porteuses de projet incombe aux agences techniques départementales ; ce que, du reste, la loi NOTRe a réaffirmé en consacrant le rôle des conseils départementaux. Cependant, l'accès à cette assistance, qui permet de concrétiser des projets, reflète une réelle inégalité entre les territoires. Si cette compétence repose, en théorie, sur les autorités départementales, régionales et intercommunales, l'État doit garantir, au nom de la solidarité nationale, cet accès à l'ingénierie. Or, la constante diminution des moyens alloués aux services déconcentrés conduit à certaines situations critiques, soit en termes de ressources humaines ou d'expertises disponibles. La diversité des interlocuteurs constitue également un frein à l'initiative des collectivités. L'agence nationale de cohésion des territoires devrait occuper ce créneau, sur des cibles à la fois thématiques, comme les villes moyennes ou la transition énergétique, et territoriales de priorité partagée, comme la Creuse, confrontée à la faible capacité des acteurs publics mobilisables, ou les collectivités ultramarines, en proie à des problèmes spécifiques. Le CGET a, quant à lui, mission d'objectiver les enjeux et d'observer l'existant, avec notamment l'Observatoire des territoires, afin d'orienter l'activité de l'agence.
Certes, la création de cette agence a pris du temps. L'Élysée, du fait de l'engagement du Président de la République, et Matignon, en raison du caractère interministériel de cette nouvelle structure, ont été mobilisés depuis l'automne dernier. Nous sommes proches de la décision : l'agence serait rattachée au CGET et en sera ainsi le prolongement naturel et non un substitut. En outre, le CGET, qui est une direction générale d'administration centrale, est nécessaire au ministère de la cohésion des territoires, mais garde totalement son caractère interministériel. D'ailleurs, qui contesterait le caractère interministériel de la direction générale des finances publiques ou du trésor, pourtant rattachée au ministère des finances ? L'interministérialité résulte bel et bien de la visibilité, de la capacité d'entraînement et de participation à des arbitrages.
L'ingénierie est un sujet essentiel à la création de la nouvelle agence pour la cohésion des territoires. Je crois pouvoir vous dire, sans engager le Gouvernement, que la lettre de préfiguration de l'agence est en cours d'arbitrage et de finalisation. Cette création ne revient nullement à ajouter un nouveau guichet, mais répond au projet ambitieux et structurant annoncé par le Président de la République lors du dernier congrès des maires le 23 novembre dernier. Le CGET souhaitait également que les porteurs de projets disposent, dans chaque préfecture de département ou de régions, d'un nombre limité, voire d'un seul interlocuteur, pour l'instruction de leurs dossiers ; l'agence de cohésion des territoires doit venir en appui financier et en soutien administratif auprès des échelons locaux lorsqu'ils atteignent la limite de leurs capacités. Le Président de la République a d'ailleurs indiqué que cette nouvelle agence se substituerait à un certain nombre d'intervenants aujourd'hui dispersés, avec une double exigence de simplification et d'efficacité. Je ne peux pas être plus précis concernant les structures concernées.
Le plan « actions coeur de ville » obéit à un calendrier serré : les préfets de région ont fait remonter, le 15 février dernier, au CGET plusieurs centaines de candidatures recueillies par les préfets de département. Les critères de sélection ont été définis sans que ne soit précisé de seuil démographique précis. Le choix sera fait par le ministre, autour de la mi-mars. Il sera possible de considérer ces critères avec souplesse afin de sélectionner certaines villes qui assurent des fonctions de centralité, à savoir l'animation des territoires, la présence de services à la personne ou encore un consensus territorial, comme à Morlaix, dont la candidature est à la fois portée par la ville et la communauté d'agglomération, dans une logique politiquement partagée et stratégiquement construite. Une distinction sera également faite entre les villes, fortes de leur capacité d'ingénierie et de leur portage de projets déjà assuré, qui seront à même de débuter immédiatement un programme opérationnel avec l'État, et les autres villes, dont le projet, considéré comme pertinent, devra être muri durant les deux prochaines années. On sera au-delà de vingt villes sélectionnées chaque année, dès 2018. Les villes de 2 000 à 5 000 habitants non éligibles à ce dispositif, ont par ailleurs également bénéficié du « programme centres-bourgs » avec 300 candidatures et 53 sites retenus et, d'autres programmes nationaux, régionaux, ou encore départementaux sont possibles. Tout ne peut pas venir de l'État ! La révision à mi-parcours des contrats de plan État-régions (CPER) devrait également intervenir en 2018; leur volet territorial pouvant, le cas échéant, bénéficier aux villes non retenues pour le programme « action coeur de ville ».
Le rapport des métropoles avec le reste du territoire ne saurait se limiter au constat de la fracture territoriale comme fin de l'histoire ! Au CGET, nous ne nous résignons pas à constater l'évolution de la dynamique territoriale de la France vers une aggravation continue des fractures et des ruptures. La situation des métropoles est d'ailleurs loin d'être homogène. Elles concentrent une réelle richesse et de nombreux emplois, mais leur situation est extrêmement diverse avec, pour certaines, une perte d'habitants, y compris dans leur coeur de ville. Ainsi, le coeur de ville de Paris perd de la population tout en gagnant des emplois, ce qui suscite de fortes externalités négatives. Les métropoles de Rouen et de Nice connaissent des dynamiques négatives, dans leur rayonnement territorial et leur dynamique d'emplois. Objectivons ces constats en rappelant que ces métropoles accueillent également 70 % des poches de pauvreté que compte le pays et un très grand nombre des quartiers « politique de la ville ». C'est un fait ! Mais les autres fragilités, dans le territoire national, sont tout aussi prioritaires pour le CGET. J'ai participé, le 5 février dernier, à l'installation du comité de pilotage pour la stratégie de dynamisation du territoire du Bassin minier Nord-Pas-de-Calais, avec M. Alain Neveü, délégué interministériel chargé du projet de sa redynamisation. La présence du Premier ministre, accompagné du ministre de la cohésion des territoires, dans le Pas-de-Calais démontre la dimension interministérielle du plan qui sera présenté demain. J'ai d'ailleurs veillé, à la fois comme directeur de cabinet du ministre de la cohésion des territoires, puis comme commissaire général, à la nomination de M. Alain Neveü qui figure dans l'organigramme du CGET, tout comme ses deux autres homologues respectivement en charge de l'Axe Saône-Rhône-Méditerranée et du développement de la Vallée de la Seine.
Les zones de revitalisation rurale et les zones franches urbaines se terminent en 2020. L'évaluation de leur efficacité réelle et concrète sur les territoires est importante pour, le cas échéant, les prolonger ou les ajuster et nous nous interrogeons. Ces zones représentent des dépenses fiscales. Quelle est la pertinence actuelle de ces dispositifs ? Le CGET a proposé au ministre de la cohésion des territoires d'aménager un régime de sortie du zonage généralisé en prévoyant le maintien, pendant trois ans, des dispositions fiscales, afin de préparer les territoires concernés. Je vous propose d'ailleurs que le Sénat puisse apporter sa pierre à l'évaluation de ces dispositifs qui sont aussi fragiles que contestés.
Les pôles de compétitivité continuent. La DATAR et le ministère des finances étaient à l'origine de ces dispositifs en 2005, qui bénéficient désormais de près de 6 millions d'euros de financement du CGET. L'ensemble de ces pôles reste-t-il d'intérêt national ou certains peuvent-ils passer sous un pilotage régional ? Cette question, déjà évoquée il y a deux ans, devrait être bientôt ré-ouverte, puisque les conditions d'accompagnement des pôles de nouvelle génération vont être redéfinies dans les nouveaux contrats de plan État-régions.
Sur l'interterritorialité, le CGET continue, comme l'avait fait la DATAR avec les pôles métropolitains, à porter le sujet de la coopération interterritoriale de manière active et avec conviction. Alors que la plupart des territoires ruraux n'ont pas la possibilité d'organiser une ingénierie de projets, certaines initiatives locales vont dans le bon sens. Ainsi, la métropole de Brest a mutualisé l'agence d'urbanisme métropolitaine au profit de l'ensemble des collectivités de son pays, en y incluant Saint Brieuc qui dispose désormais d'un représentant au sein de son conseil d'administration. La mise en commun des moyens de l'agence d'urbanisme est également assurée par le pacte État/métropole et le pacte de réciprocité de la ville de Toulouse, dont bénéficient les villes situées dans sa périphérie. Une telle démarche permet la mise en oeuvre de projets de territoire, dans une logique plus d'irrigation que de ruissellement. C'est d'ailleurs cette même logique que nous cherchons à privilégier dans l'axe stratégique Saône-Rhône-Méditerranée. Il n'y a pas de gouvernance politique dans les axes transfrontaliers, alors que ceux-ci présentent des enjeux territoriaux de premier ordre ! Les logiques d'aménagement ne tiennent nullement compte des flux de travailleurs transfrontaliers, comme sur la frontière entre le Luxembourg, qui ne cessent d'accueillir des entreprises dans ses zones d'activités rutilantes, et la France, où s'étendent de véritables zones dortoir et qui subit le contrecoup négatif de ce phénomène bipolaire. En effet, alors que Luxembourg concentre ses moyens sur cette dynamique économique, les collectivités territoriales françaises arrivent en ordre dispersé, rendant vaine toute tentative de négociation transfrontalière. Le réseau des villes du sillon lorrain doit être articulé avec un nouveau pôle métropolitain, que le CGET propose d'organiser, en réunissant neuf intercommunalités pour répondre à cette problématique territoriale pour le moment figée.
Le CGET est cotutelle, avec les ministères des affaires étrangères et de l'économie et des finances, de Business France qui a vu sa gouvernance récemment évoluer. La mission stratégique de son nouveau directeur général est de rééquilibrer le poids jusque-là accordé à la capacité d'exporter des entreprises françaises avec le renforcement de l'attractivité de nos territoires pour les investisseurs étrangers. C'est pourquoi, le travail de Business France avec les agences régionales de développement est essentiel au marketing territorial. La valorisation de l'offre des territoires pour l'implantation des entreprises étrangères va donc connaître une montée en puissance.
La traduction électorale des symptômes de désespérance territoriale ne nous échappe pas. Lors du comité de pilotage de la mission Bassin minier du Nord Pas de Calais, qui s'est tenu à Oignies, le 5 février dernier, de nombreux élus se sont exprimés sur la nécessité d'une action efficace et prompte. L'État a été très réactif : un délégué interministériel a été nommé en septembre dernier et des capacités d'engagement financier significatives, comme le fonds stratégique d'intervention économique, sont d'ores et déjà opérationnelles. 23 000 logements, situés dans le bassin minier, sont également à requalifier. Cela représente plusieurs centaines de millions d'euros, sur un site classé par ailleurs au patrimoine de l'UNESCO.
La dotation globale de fonctionnement contribue, de manière grandissante, à la péréquation, tout comme les aides à l'investissement à travers la DETR ou la DSIL. La réforme de la DGF est législative et le Sénat a déjà beaucoup travaillé sur cette question. Nous alimentons le débat avec la DGCL (direction générale des collectivités territoriales). Jacques Mézard, en raison de son parcours sénatorial et de son intérêt pour le sujet, est très pressant vis-à-vis de son homologue ministre de l'intérieur pour que ce chantier soit réouvert.
Après la centralisation des dotations départementales et la réduction des enveloppes, le FISAC est devenu une entrée quasi-résiduelle. Il devrait être réintégré dans les capacités d'intervention de l'agence nationale pour la cohésion des territoires. Le soutien au commerce de proximité, en milieu rural ou dans les petites villes, ne devrait donc plus se limiter au FISAC, mais être fongible avec d'autres lignes de crédit.
Au début de la présente mandature s'est posée la question du prolongement des contrats de ruralité. Or, la première génération des contrats de ruralité a parfois été conclue un peu rapidement. Une nouvelle génération de contrats devrait voir le jour, à l'issue d'une évaluation que le CGET souhaite partager avec vous. Certaines orientations seront possibles, uniquement du fait du choix politique de maintenir la DSIL, initialement destinée à compenser temporairement les baisses de dotations. Les orientations transmises aux préfets permettent de laisser les acteurs locaux décider de l'usage de ces fonds totalement déconcentrés dans une perspective d'investissement, dans le cadre des intercommunalités ou des maîtrises d'ouvrage communal.
Aussi bien en zones rurales qu'urbaines, nos concitoyens doivent être écoutés. C'est certes la noblesse de la mission des élus que d'y parvenir, mais également une exigence qui doit être placée au coeur de la définition des politiques publiques. Ainsi, les contributions des conseils de citoyens des quartiers politiques de la ville et de tous ceux qui souhaitent s'exprimer sont essentielles et vont alimenter les travaux du comité interministériel des villes. Elles devraient permettre de prioriser les mesures qui y seront arrêtées. Cette démarche doit être aussi valable dans les territoires ruraux, lors de la création de nouvelles maisons de services au public, dans le cadre des schémas départementaux d'accessibilité des services au public. Leur nombre, qui s'élève aujourd'hui à 1 200, devrait doubler à terme. Nous souhaitons que leur offre de services soit étoffée et réponde davantage aux questions de mobilité, via des solutions innovantes qui sont, pour l'heure, en expérimentation.
M. Hervé Maurey, président. - Merci, Monsieur le commissaire général, pour votre intervention. Votre volontarisme laisse un peu d'espoir ; encore faut-il que vous disposiez des moyens et des soutiens nécessaires à votre mission.
M. Jean-Benoît Albertini. - Je serai heureux, Monsieur le Président, de venir vous exposer, à votre convenance, l'état d'avancement des différents chantiers évoqués ce matin.
M. Hervé Maurey, président. - C'est bien noté, Monsieur le commissaire général. Nous prenons également acte de votre souhait que notre commission soit associée à l'évaluation des actions à venir du CGET, s'agissant notamment de l'évolution des ZRR. Nous serons enfin heureux de soutenir votre action, dans la mesure où elle ira dans le sens que nous avons évoqué ce matin.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.
Proposition de loi tendant à sécuriser et à encourager les investissements dans les réseaux de communications électroniques à très haut débit - Examen du rapport et du texte de la commission
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - La proposition de loi tendant à sécuriser et à encourager les investissements dans les réseaux de communications électroniques à très haut débit a été déposée le 10 novembre 2017 par Patrick Chaize et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains, dans un contexte marqué par d'importantes turbulences pour le déploiement des réseaux à très haut débit en fibre optique. L'annonce par l'opérateur SFR d'un projet de couvrir unilatéralement l'intégralité du territoire national par son propre réseau a, en effet, menacé les principes structurants du déploiement du très haut débit en France et en a souligné les fragilités.
Depuis 2013, dans les zones très denses et moyennement denses identifiées par l'appel à manifestation d'intentions d'investissement de 2011 (dit « AMII »), les déploiements sont menés par les opérateurs privés, sur fonds propres. Le reste du territoire national constitue la zone d'initiative publique, dans laquelle la maîtrise d'ouvrage est confiée aux collectivités territoriales et à leurs groupements. Les déploiements sont alors assurés via des financements publics apportés par l'État, les collectivités territoriales, l'Union européenne et des partenaires publics comme la Caisse des dépôts et consignations. Des cofinancements privés y contribuent également.
Compte tenu des investissements nécessaires à la réalisation d'un réseau local en fibre optique sur l'ensemble du territoire national, une logique de mutualisation des infrastructures est privilégiée hors des zones très denses. Dans la zone d'initiative publique, le respect de ce principe est indispensable pour assurer la viabilité économique des réseaux publics. Même si l'opérateur SFR a depuis fait marche arrière, rien n'empêche un autre opérateur de mener demain des déploiements en doublon d'un autre réseau et de fragiliser ainsi les équilibres existants.
Par ailleurs, dans la zone d'initiative privée, la concrétisation pleine et entière des intentions exprimées par les opérateurs dans l'AMII de 2011 reste incertaine. Comme l'avaient souligné nos collègues Hervé Maurey et Patrick Chaize dans un rapport d'information adopté par notre commission en 2015, le manque de précision sur ces engagements et l'absence d'instruments de contrôle n'apportent aucune garantie sur la concrétisation de leurs intentions. Encore récemment, dans son avis rendu à la demande du Sénat en octobre 2017, l'ARCEP a souligné la nécessité de renforcer l'encadrement de l'initiative privée et de protéger les réseaux d'initiative publique.
La proposition de loi répond à ce besoin de clarification et de sécurisation du partage des tâches, pour un chantier dont le coût total était estimé à 20 milliards d'euros en 2013 et qui dépassera peut-être in fine 30 milliards d'euros. Un projet d'une telle importance pour nos concitoyens ne saurait, en effet, reposer exclusivement sur un consensus précaire entre acteurs publics et privés. La proposition de loi comporte, par ailleurs, une série de mesures visant à faciliter le déploiement des réseaux en fibre optique, ainsi que quelques dispositions relatives à la couverture mobile.
En vue d'appréhender efficacement ces sujets aussi techniques qu'essentiels pour l'aménagement de nos territoires, j'ai souhaité mener dans un temps resserré une vingtaine d'auditions et de consultations. J'ai pu ainsi entendre des représentants des administrations centrales, de l'ARCEP, des grands opérateurs privés et des opérateurs alternatifs, ainsi que des associations de collectivités territoriales. Il en ressort un besoin de clarification pour conforter les déploiements en cours, auquel le présent texte vise à répondre.
Une première série d'articles contribue à l'objectif de sécurisation des réseaux, en prévenant les risques de duplication. L'article 1er complète les règles générales encadrant l'établissement des réseaux de communications électroniques en y ajoutant la prise en compte des lignes en fibre optique existantes ou projetées. L'article 2, particulièrement important, modifie l'article L. 33-13 du code des postes et des communications électroniques (CPCE) en prévoyant l'établissement par arrêté d'une liste identifiant les opérateurs et les collectivités territoriales chargés, sur le territoire de chaque établissement public de coopération intercommunale (EPCI), d'établir un réseau en fibre optique. Cette liste précisera également le calendrier prévisionnel de déploiement des lignes encore à réaliser, sur la base d'engagements pris auprès du ministre s'agissant des opérateurs privés et des schémas directeurs territoriaux d'aménagement numérique (SDTAN) pour les collectivités territoriales. L'ARCEP sera chargée de contrôler le respect de la répartition des responsabilités et du calendrier de déploiement fixés et pourra, le cas échéant, adopter des sanctions.
En lien direct avec ce dispositif, l'article 5 complète les pouvoirs de l'ARCEP en définissant les sanctions encourues par les opérateurs en cas de manquement aux engagements pris dans le cadre de la liste précitée, qui pourront atteindre 1 500 euros par local non raccordable. Quant à l'article 3, il permet à l'autorité d'intégrer à sa réglementation un objectif d'optimisation de l'utilisation des infrastructures, en vue de définir de nouvelles règles techniques renforçant le partage des infrastructures et prévenant les risques de duplication.
Sur un plan opérationnel, l'article 6 modifie les règles relatives à l'occupation du domaine public pour le déploiement des réseaux de communications électroniques. Il vise à contrer deux stratégies, régulièrement dénoncées, que constituent la duplication des réseaux - source d'inefficiences économiques - et la préemption des infrastructures d'accueil - source de retards dans les déploiements. Il renforce les pouvoirs à disposition des autorités gestionnaires du domaine public pour favoriser le partage des infrastructures dites « d'accueil » des réseaux de communications électroniques. En outre, il permet aux collectivités territoriales de délivrer, après information de l'ARCEP, une permission de voirie à un autre opérateur lorsque l'opérateur en place ne remplit pas ses obligations de déploiement. Le titre d'occupation domaniale de l'opérateur ayant failli à ses obligations deviendra alors caduque.
Ces différents articles constituent un ensemble de mesures favorables à la mutualisation des réseaux. Par ailleurs, d'autres articles traitent de sujets connexes, mais plus ciblés. L'article 4 interdit toute aide ou subvention publique à un opérateur de réseau en fibre optique ou à un utilisateur final, sauf dans le cadre de la compensation d'obligations de service public ou de l'établissement d'un réseau d'initiative publique. Cette disposition vise à prévenir les pressions exercées par les opérateurs privés pour obtenir des aides destinées au raccordement final des logements.
L'article 7 modifie un intitulé au sein du code général des collectivités territoriales en vue de consacrer la qualification de service public pour les activités d'établissement et d'exploitation par les collectivités de réseaux de communications électroniques. Cette précision répond à un impératif de clarification, certaines juridictions administratives ayant adopté des positions différentes sur ce sujet.
L'article 8 modifie l'article L. 33-11 du CPCE, relatif au statut de « zone fibrée », en permettant à l'opérateur gestionnaire d'un réseau de cuivre sur une zone ayant obtenu ce statut de demander à la collectivité territoriale concernée de racheter les infrastructures d'accueil susceptibles de donner lieu à des travaux de génie civil pour le nouveau réseau en fibre optique. Un refus ne pourra être fondé sur le prix demandé dès lors qu'il apparaît raisonnable au regard notamment de l'état des infrastructures concernées et de leur utilité. Un décret fixera les critères retenus en vue d'apprécier ce caractère raisonnable. Pour mémoire, le statut de « zone fibrée », créé en 2015, permet de constater un déploiement de la fibre suffisamment avancé pour déclencher des mesures facilitant la bascule intégrale et définitive du réseau cuivre vers la fibre. Cet article vise à apporter une réponse équilibrée au problème de propriété de certaines infrastructures d'accueil, afin d'éviter aux collectivités territoriales de dépendre d'une location des infrastructures d'Orange et de faciliter le déploiement de la fibre optique.
Trois articles visent ensuite à soutenir les déploiements mobiles. L'article 9 plafonne ainsi le montant de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER) applicable aux stations des réseaux mobiles, à hauteur de 20 000 fois le montant forfaitaire par station. L'objectif est d'inciter les opérateurs à déployer de nouvelles stations pour améliorer la couverture du territoire. Afin de faciliter concrètement ces déploiements, l'article 10 définit une clause de dispense ou d'allègement de certaines formalités prévues par le code de l'urbanisme au bénéfice des opérations effectuées sur des constructions existantes, ayant pour objet d'améliorer la couverture du territoire, y compris par un changement de technologie. Un décret en Conseil d'État en précisera la procédure. Quant à l'article 11, il modifie les critères retenus pour constater la couverture des « zones blanches » en centre-bourg, en prévoyant qu'elle devra désormais correspondre à une très bonne ou une bonne couverture en réseau 2G, au sens de la nouvelle méthodologie définie par l'ARCEP depuis septembre 2017.
Enfin, l'article 12 gage la proposition de loi et l'article 13 en précise les modalités d'entrée en vigueur en indiquant que les modifications apportées à l'article L. 33-13 du CPCE par l'article 2 ne s'appliquent pas aux engagements qui auraient été souscrits et acceptés via cet article dans sa rédaction antérieure à la proposition de loi.
À ces dispositions, je vous proposerai d'apporter des ajustements, en vue d'en préciser le sens et de tenir compte de certaines observations qui nous ont été faites lors des travaux préparatoires, sans toutefois bouleverser les grands équilibres du texte. Je vous proposerai une nouvelle rédaction de l'article 2, afin de ne pas modifier l'article L. 33-13 précité, qui sert de base à des négociations en cours entre l'État et les opérateurs, et de privilégier la création d'un nouvel article au sein du même code. À cette occasion pourront être apportées plusieurs précisions au dispositif, notamment en excluant les zones très denses, en prévoyant un avis public de l'ARCEP sur le projet de liste et en précisant le traitement des cas de duplication.
À l'article 4, sans remettre en cause l'interdiction d'aides publiques aux opérateurs, un amendement visera à permettre aux collectivités territoriales d'accorder des aides aux habitants dans le cadre d'une politique d'action sociale. Il me semble, en effet, important de maintenir une telle faculté pour les élus de nos territoires.
À l'article 6, je vous proposerai des amendements visant à inciter les acteurs publics à l'anticipation en matière de gestion du domaine public dans le cadre du déploiement des réseaux à très haut débit et à sécuriser le dispositif prévu par les auteurs de la proposition de loi. La réduction des nuisances et la bonne gestion du domaine public justifient de porter davantage d'attention au contrôle de ces déploiements et d'assurer une plus grande cohérence dans la délivrance des autorisations d'occupation domaniale.
À l'article 8, je vous proposerai une nouvelle rédaction pour le rachat des infrastructures d'accueil des réseaux en cuivre, afin de laisser davantage de marges de manoeuvre aux collectivités.
À l'article 11, je vous proposerai de renforcer les exigences de couverture dans les zones blanches en matière de téléphonie mobile. La situation que vivent certains territoires est insupportable et le relèvement des exigences de couverture me semble indispensable pour souligner l'importance de sujet et, qu'en 2020, le concept de zones blanches disparaisse. Enfin, je vous proposerai de supprimer l'article 13 de la proposition de loi, par cohérence avec les modifications apportées à l'article 2, qui le privent d'objet.
Nous aurons par ailleurs à examiner deux amendements déposés par notre collègue Patrick Chaize, portant sur l'attribution du statut de « zone fibrée » et sur l'IFER applicable aux réseaux en fibre optique, qui permettront de renforcer le texte.
En conclusion, l'ensemble de ces dispositions forment un ensemble cohérent en faveur d'un déploiement plus sécurisé des réseaux à très haut débit pour apporter à nos concitoyens, quel que soit leur lieu de vie, un accès de qualité aux réseaux de communications électroniques. A l'heure où internet constitue un bien commun, il est indispensable que chacun puisse en bénéficier dans de bonnes conditions ; cette proposition de loi y contribuera.
M. Hervé Maurey, président. - Merci, madame la rapporteure, pour la qualité de votre travail, mené dans des délais forts contraints. Vous avez réussi votre baptême du feu !
M. Patrick Chaize, auteur de la proposition de loi. - Je remercie également notre rapporteure pour son implication et le soin qu'elle a apporté à m'associer à ses travaux, mais également la centaine de cosignataires de la proposition de loi, qui ont ainsi soutenu mon projet.
L'objectif de ce texte est de sécuriser les investissements publics et privés et d'éviter ainsi de mettre à mal des projets d'infrastructures, dans un contexte où l'annonce de SFR d'un fibrage de la France sans recours aux subventions publiques mettait à mal le plan France très haut débit et le partage en différentes zones du territoire national. Le risque était grand de voir se multiplier les dédoublements de réseaux aux côtés de zones sans aucune connexion. À titre d'illustration, sur l'île de La Réunion, certaines communes bénéficient de deux ou trois réseaux concomitants, tandis que certaines en sont complètement privées. Il est absolument nécessaire de répartir les investissements sur le territoire, afin d'éviter tout risque de fracture numérique.
S'agissant de l'élaboration en cours du code européen des communications électroniques, je me suis assuré auprès de la Commission européenne que la présente proposition de loi n'entrait pas en contradiction avec les dispositions prévues. Elle ne contrevient nullement à la liberté d'investir et poursuit un objectif identique à celui de la Commission, visant à éviter l'over building, c'est-à-dire les dédoublements.
La proposition de loi cherche, en outre, à rendre plus contraignants les engagements pris par les opérateurs. L'absence actuelle de contrôle des investissements dans les zones AMII conduit à des retards sur la couverture intégrale prévue à échéance 2020. Il s'agit également de reconnaitre les réseaux de communications électroniques comme un service public local, inscrit à ce titre dans le code général des collectivités territoriales, de favoriser le basculement du cuivre vers la fibre, d'accélérer le développement du mobile en modifiant les règles applicables à l'IFER, de simplifier les procédures administratives et de redéfinir les zones blanches.
J'ai, en complément au texte initial, déposé deux amendements relatifs respectivement à l'IFER fixe - afin de prendre en considération les débats que nous avons eus à l'occasion de la dernière loi de finances rectificative - et au statut de « zone fibrée ».
Les opérateurs ne sont guère favorables au texte, considérant que SFR étant rentré dans le rang, les difficultés ont disparu. Mais nous voyons chaque jour combien l'équilibre demeure fragile ! Dans les Yvelines, par exemple, Orange va se déployer sur un RIP porté par une collectivité territoriale, mettant à mal son modèle économique. Friands de liberté, les opérateurs souhaitent pouvoir s'établir sur les secteurs denses et rentables, où les coûts ont déjà pour partie été assumés par les pouvoirs publics.
Fort malheureusement, le Gouvernement n'a pas encore rendu d'arbitrage sur cette proposition de loi, malgré de multiples relances et les accords de principe, comme l'a confirmé la récente audition de M. Denormandie. Je crains qu'à l'instar des récentes propositions de loi sénatoriales relatives à la compétence « eau et assainissement » et au littoral, il ne reprenne à son compte certaines de nos propositions, notamment dans le cadre du projet de loi « évolution du logement et aménagement numérique » (ELAN), dont cinq articles portent sur l'aménagement numérique du territoire dans l'avant-projet diffusé en décembre dernier.
M. Hervé Maurey, président. - Je partage les analyses de Marta de Cidrac et de Patrick Chaize. Le rapport d'information que nous avions élaboré en 2015 évoquait des problématiques et des solutions, qui trouvent avec ce texte leur aboutissement. Je considère d'ailleurs comme un très bon signe qu'il ne convienne pas aux opérateurs, qui n'aiment guère les contraintes ou les sanctions ! L'aménagement numérique du territoire représente un combat sénatorial depuis de longues années. Déjà, nous avions adopté en 2012 une proposition de loi sur ce thème, qui n'avait malheureusement pas abouti à l'Assemblée nationale, mais dont plusieurs dispositions ont été tardivement reprises par le Gouvernement. Quelle perte de temps !
Je crains, au regard du flou entretenu sur ce sujet par Julien Denormandie devant notre commission la semaine dernière, que le présent texte subisse le même sort. Je suis d'ailleurs intervenu en séance publique et ai écrit sur ce sujet un courrier au Président Larcher, pour alerter, au-delà de ce texte, sur l'attitude peu correcte du Gouvernement, qui donne par principe un avis défavorable à certains textes d'initiative sénatoriale avant d'en reprendre le contenu à son compte, comme pour les propositions de loi relatives à l'eau et l'assainissement ou au littoral. Je crois savoir que ce sujet sera abordé ce soir en conférence des présidents en présence du ministre des relations avec le Parlement.
M. Gérard Cornu. - Le peu d'enthousiasme manifesté par les opérateurs pour ce texte me rassure beaucoup ! L'objectif du Sénat doit être de faire en sorte que l'aménagement numérique du territoire permette de résorber la fracture numérique. Si elle se heurte parfois à des considérations économiques, la volonté du législateur doit in fine s'imposer. Il faut effectivement valoriser les travaux du Sénat contre la mauvaise manière qui leur est trop souvent faite par ce Gouvernement. Même politiquement opposées, les deux chambres ont, par le passé, toujours eu la volonté de coopérer !
M. Claude Bérit-Débat. - Le groupe Socialiste et Républicain est convaincu de l'opportunité de débattre de la présente proposition de loi et s'accorde sur l'intérêt de son contenu. Mais la question de son avenir se pose effectivement. Je suis, à cet égard, solidaire des propos tenus par MM. Maurey et Cornu sur l'attitude du Gouvernement : il est plus élégant de faire aboutir une initiative parlementaire dont on partage l'esprit que de la reprendre à son compte dans un autre texte. Mes deux interrogations sur la proposition de loi portent respectivement sur le contenu de l'accord conclu entre les opérateurs et le Gouvernement et sur son adéquation avec le futur code européen des communications électroniques.
Mme Pascale Bories. - La présente proposition de loi répond à une attente forte des fédérations et des syndicats spécialisés dans ce domaine, qui ont fait part de leur satisfaction. Je partage les inquiétudes exprimées quant à l'attitude du Gouvernement sur ce texte. Nos propositions seront-elles retenues et dans quel cadre ? Je m'interroge également sur le financement des infrastructures numériques : malgré les promesses gouvernementales, il semble qu'il manque encore 5 à 6 milliards d'euros. Qu'en est-il, à cet égard, de la création annoncée d'un fond d'aménagement numérique du territoire ?
Dans le département du Gard, nous avons des problématiques de connexion entre les zones AMII et le reste des territoires. Certaines communes en zone AMII sont, en effet, très éloignées des noeuds de raccordement d'abonnés (NRA). Serait-il dès lors possible de les raccorder sur une autre zone dans le cadre du RIP ? Enfin, quel bilan peut-on établir sur les zones où le réseau en cuivre est défaillant ? Pourrait-on envisager d'y installer la fibre de manière prioritaire ?
M. Louis-Jean de Nicolaÿ. - Cette proposition de loi a le grand mérite de clarifier le débat sur l'aménagement numérique du territoire. Il n'est en effet pas simple de comprendre la stratégie des opérateurs en la matière. Je me réjouis que le texte prévoie l'installation de la fibre sur l'ensemble du territoire national. Toutefois, en Sarthe, le coût d'une telle opération est estimé à 400 millions d'euros. Comment les financer si les opérateurs n'investissent plus que dans les zones AMII ? Ce pourrait être extrêmement coûteux pour les collectivités territoriales. Quelles sont, dans ce cadre, les obligations des syndicats d'aménagement numérique ? Vous avez évoqué l'objectif de couvrir les centre-bourgs des zones blanches en 2G. Il m'avait pourtant semblé, en écoutant la semaine dernière M. Denormandie, que nous en étions déjà à l'étape de la 4G, voire de la 5G...
M. Guillaume Gontard. - Si la proposition de loi, en sécurisant les investissements et en clarifiant les tâches de chacun, va dans le bon sens, elle s'inscrit dans un système dont le fonctionnement général ne nous convient pas. Il socialise les pertes, avec des investissements publics en zones non rentables, et privatise les profits. Ce modèle économique hybride ne permet pas aux acteurs de l'aménagement numérique de remplir leur mission d'intérêt général et de service public local. Le groupe Communiste, républicain, citoyen et écologiste aura donc un avis réservé sur le présent texte.
M. Frédéric Marchand. - Je salue aussi la qualité du travail de nos collègues. J'irai néanmoins à rebours de l'enthousiasme général : on ne part pas de rien puisque sera bientôt présenté le futur projet de loi ELAN. Julien Denormandie, lors de son audition, nous a bien fait sentir la volonté forte du Gouvernement d'inclure dans ce projet de loi ELAN des dispositions contenues dans la proposition de loi. Je m'interroge donc sur la redondance de ce texte, qu'on retrouverait partiellement ou totalement dans un projet de loi prochainement en discussion.
J'entends dire que les opérateurs voient cette proposition d'un mauvais oeil ; nous n'avons pas les mêmes retours. La Caisse des dépôts a récemment publié un document selon lequel les opérateurs observent avec bienveillance ce texte.
Enfin, comme mon collègue socialiste, je m'interroge sur la transposition de la directive européenne. Bien malin qui peut connaître son contenu et peut-être serons-nous amenés à légiférer de nouveau. Nous penchons pour une abstention bienveillante sur ce texte qui concerne à la fois le monde rural et le monde urbain.
M. Hervé Maurey, président. - Le projet de loi ELAN n'a pas encore été déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale et n'est même pas passé en conseil des ministres. Je ne vois pas pourquoi nous nous censurerions et n'examinerions pas un texte sous prétexte que le Gouvernement a prévu d'en déposer un. L'argument est réversible : puisque le Sénat va probablement adopter notre texte, pourquoi le Gouvernement ne le soutiendrait-il pas à l'Assemblée nationale ? Cela serait plus rapide que d'attendre l'examen du projet de loi ELAN, qui ne sera peut-être pas adopté définitivement avant la fin de l'année.
M. Jean-François Longeot. - Félicitations à Mme la rapporteure et à Patrick Chaize. Je souhaitais savoir ce qu'il était advenu de l'amendement déposé par Sylvie Vermeillet tendant à insérer un article additionnel après l'article 2 ?
M. Hervé Maurey, président. - Cet amendement, que vous avez cosigné, a bien été déposé, mais il a été déclaré irrecevable au titre de l'article 40. Tendant à modifier la destination des fonds de concours intercommunaux, il constituait un élargissement de l'autorisation de dépenser des communes.
M. Jérôme Bignon. - Félicitations à Mme la rapporteur pour son galop d'essai et à l'auteur de cette proposition de loi, qui a rédigé un texte de qualité sur les plans technique et juridique.
Ce jeu parlementaire est vieux comme la Ve République. L'initiative parlementaire a au moins un mérite : comme le Gouvernement a une plus grande maîtrise de l'ordre du jour, elle peut être incitative. Il ne faut pas perdre cette capacité, il faut même la renforcer. Il ne faut pas abandonner notre pouvoir d'initiative, sauf à déposer des propositions « bidon » sans intérêt. Cherchons des complicités à l'Assemblée nationale et faisons avancer ce texte dans l'intérêt général.
Lorsque j'étais député, le garde des sceaux de l'époque nous avait sollicités pour rédiger une proposition de loi réformant le droit des faillites parce que son administration n'avait pas les moyens de le faire. C'est ainsi qu'a été réformée la loi Badinter, à partir d'une copie blanche.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Messieurs Chaize, Maurey et Cornu, comme vous l'avez souligné, cette proposition de loi va dans le sens de l'aménagement numérique du territoire.
Monsieur Bérit-Débat, vous avez évoqué l'accord de janvier dernier sur la téléphonie mobile, qui est un sujet connexe de la présente proposition de loi, laquelle porte essentiellement sur les réseaux fixes. Le mobile est évoqué seulement aux articles 9 à 11.
Il faut également suivre les évolutions des règles européennes. La proposition de loi en tiendra compte, quitte à connaître quelques modifications.
Au niveau national, il ne faut pas s'interdire de faire notre travail de législateur sur des sujets d'une telle importance pour nos territoires.
Mme Bories m'a interrogée sur le coût véritable du haut débit. Dans ma présentation, j'évoquais un chiffre compris entre 20 et 30 milliards d'euros. Nous resterons vigilants.
La mise en cohérence des zones AMII et des RIP à la frontière est une question opérationnelle qui ne me semble pas relever directement du niveau de la loi.
Sur la priorisation des déploiements y compris quand le cuivre n'est pas entretenu, le choix incombe au porteur du RIP. En outre, la loi pour une République numérique de 2016 a renforcé les obligations du responsable du service universel pour entretenir le réseau cuivre.
Monsieur de Nicolaÿ, au sujet des choix technologiques, la proposition de loi vise le fixe, mais n'exclut aucune autre technologie. Il ne s'agit pas d'écarter ce qui existe déjà dans nos territoires. Dans tous les cas, les financements privés peuvent alimenter les déploiements. Des solutions subsidiaires existent comme les réseaux radios locaux, de satellites, la montée en débit du cuivre, mais la proposition de loi cible la fibre optique. Nous n'opposons pas les technologies entre elles.
En ce qui concerne le mobile, nous avons déposé un amendement renforçant les exigences de couverture 2G imposées aux opérateurs dans les actuelles « zones blanches ». Certains diront que ce n'est pas suffisant, mais j'ai souhaité faire preuve de réalisme dans mes propositions.
M. Patrick Chaize. - Le périmètre du projet de loi ELAN est à peu près connu. Dans l'avant-projet, cinq articles portent sur l'aménagement numérique, dont quatre sur la simplification des déploiements. Le projet de loi est donc complémentaire à cette proposition de loi. Il comprend également une disposition modifiant l'article L. 33-13 du code des postes et des communications électroniques qui donne pouvoir à l'ARCEP de contrôler les engagements souscrits par les opérateurs. Or c'est bien le sens de mon texte, déposé le 10 novembre, que j'ai présenté au Gouvernement.
En tout état de cause, si nous adoptons cette proposition de loi le 6 mars prochain, elle ne s'appliquera pas immédiatement. Durant la navette parlementaire, nous devrions pouvoir mieux cerner les contours de la future directive européenne. Si nécessaire, l'Assemblée nationale pourra apporter des correctifs à notre texte. Nous serions ainsi en avance, pour une fois, dans le processus de transposition d'une directive...
Ce débat est nécessaire pour que les opérateurs sachent ce que le Parlement et le Gouvernement veulent en matière de numérique. Il faut maintenir une certaine pression sur eux et rassurer les collectivités, pour qu'elles continuent à investir.
Le Gouvernement a engagé 3,3 milliards d'euros dans le plan France Très Haut Débit. L'objectif, à l'échéance 2022, c'est de couvrir 100 % de la population en très haut débit, dont 80 % en fibre optique. Certains territoires seront déjà à 100 % en 2022, d'autres ne seront qu'à 50 %. Le Gouvernement va donc devoir mettre en place des financements complémentaires pour atteindre un objectif de 100 % en 2025.
À mon collègue Guillaume Gontard, je veux dire que ce texte, globalement, est conforme à l'esprit qui anime son groupe, à savoir protéger les investissements publics. À ce jour, une collectivité peut voir arriver sur son territoire des opérateurs privés qui vont mettre à mal son modèle économique. Nous sommes là pour préserver les investissements publics et assurer de façon certaine la desserte de l'ensemble des habitants en fibre optique.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er
L'article 1er est adopté sans modification.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Mon amendement COM-4 propose une réécriture de l'article 2, en créant un article additionnel au sein du code des postes et des communications pour ne pas modifier l'article L. 33-13, qui sert actuellement de base à des discussions entre le Gouvernement et les opérateurs pour formaliser les engagements de déploiements des réseaux fixes, dont nous avons demandé la transmission lors de l'audition de M. Denormandie.
Par ailleurs, cette nouvelle rédaction apporte plusieurs ajustements au contenu initial de l'article 2. Elle exclut les zones très denses du périmètre du dispositif, dès lors qu'y prévaut un principe de concurrence par les infrastructures et qu'il n'apparaît ni possible ni souhaitable d'identifier dans ces zones un opérateur chargé du segment mutualisé.
Elle prévoit également un avis de l'ARCEP sur le projet de liste, avec un délai d'un mois à compter de la publication de cet avis avant la fixation de la liste par le Gouvernement, afin de permettre au Parlement de s'exprimer en temps utile sur son adéquation aux besoins d'aménagement numérique du territoire. C'est une question de transparence et d'information de la représentation nationale.
Enfin, elle précise le traitement des cas de duplication, en visant les empiètements par des opérateurs privés sur une zone d'initiative publique, sans l'accord de la collectivité territoriale ou du groupement qui est chargé du déploiement.
L'amendement COM-4 est adopté.
L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 3
L'article 3 est adopté sans modification.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Sans modifier l'esprit de l'article 4, mon amendement COM-7 vise à permettre l'octroi d'aides aux utilisateurs pour l'accès à un réseau à très haut débit, dans le cadre d'une politique d'action sociale. Une collectivité territoriale pourrait en effet décider d'accorder des aides sur critères sociaux à certains habitants, en vue de faciliter leur raccordement à un réseau en fibre optique, dans les zones où le coût de cette opération entraîne un reste à charge important pour l'habitant.
M. Benoît Huré. - Ces aides portent-elles sur l'usage ou l'investissement ?
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Cela concerne les derniers mètres de raccordement, qui restent parfois à la charge de l'usager.
M. Benoît Huré. - Une personne dite « fragile » peut être aidée par la collectivité pour son raccordement fibre. Mais si elle déménage ?
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Nous parlons de l'action sociale de la commune de déploiement. Si une personne bénéficiaire d'une telle aide au raccordement déménage, il reviendra à sa commune d'accueil de lui proposer, éventuellement, une nouvelle aide.
L'amendement COM-7 est adopté.
L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 5
L'amendement rédactionnel COM-5 est adopté.
L'article 5 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Mon amendement COM-6 de précision vise à améliorer la gestion du domaine public dans le cadre du déploiement des réseaux à très haut débit en fibre optique.
Il doit permettre d'inciter les opérateurs et les collectivités publiques à prendre en compte par anticipation la disponibilité du domaine public routier lors de l'installation de réseaux en fibre optique. Il s'agit de rappeler le principe de cohérence qui doit régir le déploiement de nouveaux réseaux par rapport aux réseaux existants ou projetés.
L'amendement COM-6 est adopté.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Mon amendement COM-8 consolide le dispositif prévu par les auteurs de la proposition de loi visant à lutter contre la duplication des réseaux et à rationaliser les travaux de génie civil sur le domaine public routier.
L'amendement COM-8 est adopté.
L'article 6 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 7
L'article 7 est adopté sans modification.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Cet amendement de précision COM-2 vise à clarifier les modalités d'octroi du statut de « zone fibrée », en consolidant la compétence de l'ARCEP en la matière. L'attribution du statut se fera désormais sans sollicitation de l'opérateur. L'ARCEP sera responsable du recensement des réseaux en fibre optique ayant atteint un stade suffisant de maturité dans leur déploiement pour pouvoir obtenir le statut de « zone fibrée » et déclencher la transition vers le très haut débit. L'Autorité précisera les obligations pesant sur l'opérateur chargé du réseau concerné.
Cette nouvelle procédure doit permettre une mise en oeuvre transparente et plus généralisée du statut de « zone fibrée ». J'attire cependant l'attention de la commission sur la nécessité pour le ministre chargé des communications électroniques de prendre rapidement l'arrêté précisant les modalités et conditions d'attribution de ce statut, pour permettre à l'ensemble des acteurs d'intégrer les exigences afférentes. Cet arrêté n'a pas été pris alors que la décision de l'ARCEP proposant les modalités et conditions d'attribution du statut de « zone fibrée » a été rendue depuis le 27 juillet 2017.
L'amendement COM-2 est adopté.
L'amendement de précision COM-9 est adopté.
L'article 8 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 9
L'article 9 est adopté sans modification.
Article additionnel après l'article 9
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - L'amendement COM-3 de Patrick Chaize vise, pour les réseaux en fibre optique, à subordonner l'application de l'IFER à la délivrance du statut de « zone fibrée ». Cette imposition a été étendue aux réseaux en fibre optique et en câble via la seconde loi de finances rectificative pour 2017, sans discussion de fond sur les implications de cette décision pour les nouveaux réseaux, et alors même que le déploiement du très haut débit a été affirmé comme une priorité nationale par le Gouvernement.
S'il n'est pas incohérent de faire évoluer l'assiette de cette IFER, actuellement limitée au réseau en cuivre, l'application dès 2019 de cette imposition à toutes les lignes en fibre optique établies depuis cinq ans va modifier brutalement l'équilibre économique de certains réseaux en cours de déploiement.
Dès lors que le statut de « zone fibrée » vise précisément à conforter un réseau du fait de sa maturité technique et commerciale, il est pertinent de subordonner l'application de l'IFER fixe à ce statut. À ce stade d'avancement, le réseau concerné pourra plus aisément intégrer cette imposition nouvelle dans son modèle économique. Avis favorable.
L'amendement COM-3 est adopté et devient article additionnel.
Article 10
L'article 10 est adopté sans modification.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Notre amendement COM-10 renforce les exigences de couverture imposées aux opérateurs pour les communes identifiées dans le cadre du programme « zones blanches - centre-bourgs ». Je vous propose, dans la lignée des auteurs de la proposition de loi, une approche réaliste des exigences de couverture.
L'amendement COM-10 est adopté.
L'article 11 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 12
L'article 12 est adopté sans modification.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Notre amendement COM-11 de suppression tire les conséquences des modifications apportées à l'article 2.
L'amendement COM-11 est adopté et l'article 13 est supprimé.
M. Hervé Maurey, président. - Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi ainsi modifiée.
M. Frédéric Marchand. - Nous nous abstenons.
Mme Éliane Assassi. - Nous nous abstenons également.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
La réunion est close à 12 h 35.