Mardi 30 janvier 2018
- Présidence de M. Hervé Maurey, président -
La réunion est ouverte à 9 h 30.
Projet de loi relatif à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques 2024 - Examen du rapport pour avis
M. Hervé Maurey, président. - Nous examinons le rapport pour avis de notre collègue Philippe Pemezec sur le projet de loi relatif à l'organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques 2024.
Nous nous sommes saisis pour avis de ce texte après son examen par l'Assemblée nationale, dans la mesure où les députés ont introduit en séance des dispositions relatives aux transports, que la commission des lois nous a déléguées au fond. Ces articles portent plus particulièrement sur deux projets d'infrastructure importants : le Charles-de-Gaulle Express (CDG Express) et le Grand Paris Express - c'est-à-dire la réalisation de quatre nouvelles lignes de métro automatique, les lignes 15, 16, 17 et 18, et le prolongement de l'actuelle ligne 14. Nous nous sommes également saisis pour avis de l'article 6 du projet de loi, qui prévoit un allégement des procédures de participation du public pour les opérations nécessaires à l'organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques.
L'organisation des Jeux Olympiques soulève des questions au coeur des préoccupations de notre commission, en matière de transports, de développement durable, et d'aménagement du territoire. Notre avis est d'autant plus bienvenu dans le contexte agité autour du développement de ces lignes.
Dans un récent rapport, la Cour des comptes a dénoncé la dérive des coûts de ce projet et préconisé d'en revoir le périmètre et le phasage. Il lui semble très peu probable que les engagements du Gouvernement soient intégralement respectés, même si elle rappelle que « pour plusieurs lignes, le calendrier de réalisation fait partie des engagements pris dans le dossier de candidature de Paris à l'organisation des Jeux olympiques de 2024 ». Si le coût du projet assigné à la Société du Grand Paris s'élevait à 22,6 milliards en 2013, la dernière estimation qu'elle a transmise au Gouvernement faisait état de 38 milliards.
Le Premier ministre a engagé une concertation avec les élus d'Ile-de-France pour trouver des solutions et les a réunis vendredi dernier. Nous devons être mobilisés, et avons décidé d'auditionner mardi prochain Mme Catherine de Kersauson, présidente de la 2ème chambre de la Cour des comptes, et auteure du rapport. Je propose d'ouvrir cette réunion à tous les sénateurs qui seraient intéressés.
M. Philippe Pemezec, rapporteur pour avis. - Ce projet de loi est examiné après engagement de la procédure accélérée par le Gouvernement le 15 novembre 2017. À l'issue de son examen par les députés, il comporte 29 articles, contre 18 à l'origine, et porte sur des sujets divers comme l'aménagement du territoire, l'urbanisme, l'environnement, le sport, la sécurité et les transports.
Notre commission a reçu une délégation au fond de la commission des lois pour traiter spécifiquement quatre articles relatifs aux transports, de 13 bis A à 13 bis D, qui ont été ajoutés, pour trois d'entre eux, à l'initiative du Gouvernement en séance publique à l'Assemblée nationale. En outre, notre commission s'est saisie pour avis de l'article 6 relatif à l'aménagement des procédures de participation du public.
Les deux articles les plus importants du volet transports concernent la finalisation et la sécurisation du projet CDG Express, liaison prévue pour relier la capitale à l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle en 20 minutes à compter de 2023, dont notre commission a déjà eu à connaitre précédemment.
Un article sur le Grand Paris Express permettra de valider des déclarations d'utilité publique nécessaires à la réalisation de certaines lignes, afin d'intégrer une modification de la taille des quais de gare par rapport à ce qui était prévu dans le schéma d'ensemble du Grand Paris. Cette modification intervient dans un contexte politique incertain : alors que le Premier ministre doit annoncer un rephasage du projet, on peut s'inquiéter que, comme le relève la Cour des comptes, « les calendriers de réalisation ne laissent aucune marge pour la survenance d'incidents et donc sont de moins en moins réalistes ».
Le rapport de la Cour des comptes, rendu public la semaine dernière, a permis à chacun de mieux comprendre les enjeux tant financiers que calendaires. En tant que parlementaires, nous avons l'opportunité d'exprimer nos attentes via l'examen de ce texte et d'interroger le ministre en séance. Selon ce rapport, le pilotage des coûts prévisionnels du Grand Paris Express a été insuffisant, conduisant à une augmentation du coût global du futur réseau de transport public de plus de 12 milliards entre mars 2013 et juillet 2017. Désormais, le coût total dépasserait les 38 milliards. La trajectoire financière de la Société du Grand Paris apparaît non maîtrisée voire non soutenable, avec un risque de voir s'installer un « système de dette perpétuelle » qui grèverait significativement les comptes publics : en cause, une forte élévation possible des frais financiers, de 32 à 134 milliards et un recul de l'échéance de remboursement de 2059 à 2084. Cet alourdissement de la charge des prêts du Grand Paris Express pourrait représenter plus d'un point de PIB de dette publique supplémentaire en 2025 et 0,69 point de PIB de dette publique supplémentaire en 2050. Enfin, la Cour pointe une gouvernance inadaptée aux enjeux opérationnels et financiers et l'insuffisance des contrôles des tutelles et du conseil de surveillance sur le directoire de la Société du Grand Paris.
L'abandon des engagements du Grand Paris Express à horizon 2024 serait dommageable, tant sur le plan opérationnel de l'accueil des Jeux Olympiques et Paralympiques, que pour l'image de notre pays, au regard des engagements qu'il a souscrits auprès du Comité international olympique. Le monde attend que la France soit à la hauteur de sa réputation et de ses ambitions en 2024 et ces décisions ne sauraient être prises à la légère.
L'article 13 bis D concerne la question de l'accessibilité universelle des transports de la métropole parisienne et de celle d'Aix-Marseille-Provence.
L'article 6 prévoit une procédure simplifiée de consultation du public préalable à l'autorisation des projets d'infrastructures olympiques.
Les articles 13 bis A et 13 bis B sécurisent les deux volets du montage retenu en 2013 pour la liaison du CDG Express, nouvelle ligne ferroviaire directe de 32 kilomètres entre la gare de l'Est à Paris et le terminal 2 de l'aéroport Paris-Charles-de-Gaulle, spécifiquement adaptée aux besoins des passagers aériens et présentant un haut niveau de service. CDG Express circulera sur 24 kilomètres de voies existantes entre la gare de l'Est et Mitry-Mory et sur 8 kilomètres de voies nouvelles, entre Mitry-Mory et l'aéroport.
Après l'échec d'un projet de concession globale incluant les travaux de la ligne et son exploitation en 2006, le montage retenu par l'accord interministériel de 2013 présente une double dimension : d'un côté, les travaux de réalisation des 8 kilomètres de voies nouvelles et des ouvrages nécessaires à l'infrastructure sont confiés sous la forme d'un contrat de concession, sans mise en concurrence, à une société dédiée, formée par ADP et SNCF Réseau. De l'autre côté, l'exploitation du service de transport de voyageurs de CDG Express - achat de rames, entretien du matériel roulant, relations commerciales... - doit être confiée à un prestataire choisi par l'État, après une procédure de sélection transparente et respectant les principes d'égalité de traitement de la commande publique. Ce montage d'ensemble s'inscrit donc dans un cadre juridique dérogatoire et exceptionnel, au service d'un projet lui-même exceptionnel dans ses caractéristiques et ses objectifs.
L'article 13 bis A renforce la sécurité juridique autour du contrat de concession de travaux. Son deuxième alinéa précise que les redevances que l'exploitant du service de transport devra payer au concessionnaire des travaux pour l'utilisation des 8 kilomètres de voies nouvelles dérogent au droit commun des concessions. Dans un contrat de concession classique, conformément à l'article 32 de l'ordonnance du 29 janvier 2016, les tarifs à la charge des usagers sont précisés. Or, dans la concession de travaux CDG Express, le concessionnaire des travaux sera en relation avec un usager unique - l'exploitant du service de transport. Cet article n'a donc pas vocation à s'appliquer.
En outre, le mode de rémunération du concessionnaire des travaux est d'ores et déjà fixé dans ses principes. Les 24 kilomètres de voies existantes empruntées par CDG Express feront l'objet d'une tarification de droit commun, versée à SNCF Réseau par l'exploitant sous réserve d'une répartition spécifique avec le concessionnaire des travaux, tandis que le nouveau tronçon de 8 kilomètres se verra appliquer une tarification spécifique.
Le troisième alinéa de cet article tire les conséquences de cette tarification spécifique appliquée au nouveau tronçon. Depuis 2009, l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer) émet des avis conformes sur la fixation des redevances d'infrastructure liées à l'utilisation du réseau ferré national. Elle vérifie le respect de certains critères de soutenabilité, de cohérence par rapport au coût global de l'infrastructure et de situation concurrentielle sur le marché.
Le troisième alinéa de l'article 13 bis A prévoit de déroger à la compétence de l'Arafer pour la fixation du péage payé par l'exploitant au concessionnaire des travaux. Cette solution, qui garantit la sécurité juridique du montage financier retenu, peut se justifier par trois raisons : en premier lieu, dans le cas où l'Arafer devrait se prononcer sur cette tarification, elle ne pourrait pas rendre d'avis conforme car la tarification ne permet pas de couvrir les coûts d'infrastructure supportée par le concessionnaire. C'est pourquoi une taxe sur les billets d'avion a été introduite en loi de finances rectificative pour 2016, afin de compléter les ressources du concessionnaire des travaux. En second lieu, ce péage n'est pas conforme aux principes de soutenabilité puisqu'il est calculé par rapport aux recettes globales de l'exploitant et vise à capter une part importante de l'excédent résultant de l'exploitation du service de transport de personnes. Enfin, compte tenu du caractère exceptionnel et urbain du projet CDG Express, la dérogation aux principes généraux des redevances et au contrôle de l'Arafer est possible et même prévue par les textes européens.
L'article 13 bis B consolide le cadre juridique applicable au second contrat nécessaire à la mise en service de la liaison CDG Express. Il rend applicable au contrat d'exploitation, qui doit être conclu prochainement entre l'État et un prestataire sélectionné après procédure de mise en concurrence, deux dispositions de l'ordonnance du 29 janvier 2016. Cette ordonnance ne saurait s'appliquer d'office puisque le contrat d'exploitation n'a pas la caractéristique première d'une concession, à savoir le partage de risques entre concédant et exploitant, au regard des charges supportées par l'exploitant et des recettes envisagées.
En conséquence et pour sécuriser la vie de ce contrat, l'article 13 bis B rend explicitement applicables les articles 55 et 56 de l'ordonnance de 2016 relatifs aux modifications par avenant du contrat et aux modalités d'indemnisation du cocontractant en cas de résiliation, résolution ou d'annulation du contrat par le juge. Cette disposition renforce ainsi la sécurité juridique du contrat de service dont bénéficiera l'exploitant.
L'article 13 bis C valide une modification de la longueur des quais prévue pour certaines lignes du Grand Paris Express, ce qui sécurisera les déclarations d'utilité publique relatives à ces lignes, en particulier la ligne 17. Il modifie l'article 57 de la loi du 28 février 2017 relative au statut de Paris. La Société du Grand Paris réalisera ainsi des économies, à condition qu'elles ne soient pas intégralement englouties par les moyens supplémentaires mobilisées, notamment les tunneliers, pour tenir le délai de 2024 pour la ligne 17.
L'article 13 bis D conclut le volet transports du projet de loi Jeux Olympiques et Paralympiques sur l'accessibilité universelle. Introduit à l'initiative de la rapporteure Aude Amadou au nom de la commission de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, il vise à inciter les autorités organisatrices de transports de la métropole du Grand Paris et de la métropole d'Aix-Marseille-Provence à améliorer l'accessibilité universelle des transports nécessaires aux sites olympiques, via la remise d'un rapport dans un délai de dix-huit mois à compter de la promulgation de la présente loi.
Je ne vous proposerai pas de modification sur le volet transports : ces dispositions, avant tout techniques, n'ont pas de conséquences de fond sur le projet CDG Express ni sur le Grand Paris Express.
Notre commission s'est saisie pour avis de l'article 6, qui porte sur les modalités de participation du public préalablement à l'autorisation des projets d'infrastructures. Afin de simplifier les démarches et de réduire les délais, l'article prévoit de substituer à l'enquête publique une procédure de consultation du public par voie électronique. Cette procédure, normalement prévue pour des projets de moindre ampleur, permet au public de transmettre ses observations sur une plateforme électronique, sur la base d'un dossier préparé par le maître d'ouvrage présentant les caractéristiques techniques du projet. Il s'agit d'une procédure allégée par rapport à l'enquête publique. Outre quelques modifications de forme, il n'y a pas de commissaire enquêteur. Dans le cadre d'une enquête publique, le commissaire enquêteur réunit les observations du public. À la fin de la consultation, il se prononce sur l'opportunité du projet par un avis motivé. En cas d'avis réservé ou défavorable, l'autorité administrative peut tenir une réunion publique pour que le maître d'ouvrage réponde aux remarques formulées. Surtout, si le projet est autorisé malgré un tel avis, un référé peut être déposé devant le juge administratif afin de suspendre cette décision, dans l'attente que sa légalité soit appréciée par le juge. Ces procédures rallongent d'autant le délai d'autorisation du projet.
Afin de s'assurer que la consultation du public par voie électronique se déroule en toute indépendance, l'article 6 prévoit que la synthèse des observations et propositions du public est réalisée par un ou plusieurs garants nommés par la Commission nationale du débat public, et non par l'autorité administrative compétente comme le prévoit le code de l'environnement. Il prévoit également que cette procédure allégée ne s'appliquer pas aux enquêtes préalables réalisées dans le cadre d'une déclaration d'utilité publique, c'est-à-dire lorsqu'un projet d'infrastructure requiert une procédure d'expropriation.
Pour réaliser à temps les infrastructures indispensables à la tenue des Jeux Olympiques et Paralympiques, il ne me paraît pas déraisonnable de prévoir des modalités simplifiées de consultation du public. Néanmoins, dans sa rédaction actuelle, l'article prévoit que la réponse du maître d'ouvrage aux observations du public est facultative. Compte tenu de l'importance des projets, je vous proposerai un amendement pour rendre cette réponse obligatoire, sans pour autant modifier les délais prévus par le texte. Cela éviterait que les observations du public ne fassent l'objet d'aucun retour par le porteur de projet, ce qui amoindrirait la portée de la consultation.
Ce texte doit permettre de prendre la mesure des engagements souscrits par la France pour l'organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques. Il est nécessaire d'avancer rapidement sur ces sujets car 2024, c'est demain.
M. Hervé Maurey, président. - Merci pour ce premier rapport, réalisé dans un temps contraint, car les dispositions initiales de ce projet de loi ne concernaient pas notre commission.
M. Gérard Cornu. - Je félicite le rapporteur pour son excellent travail dans des conditions difficiles et trop rapides. Nous souhaitons tous la réussite des Jeux Olympiques de Paris. Mais il faut simplifier pour respecter les délais. Nous serions ridicules si la ligne CDG Express n'était pas construite à temps. Les Jeux Olympiques seront une belle vitrine pour la France, et après les Jeux, nous conserverons une liaison rapide entre Paris et le hub international de Roissy.
M. Jérôme Bignon. - Pour un coup d'essai, c'est un coup de maître, cher collègue.
Je suis atterré par le rapport de la Cour des comptes. Les dépassements des budgets, en si peu de temps, sont extravagants, et n'ont pas été signalés. On a exigé que les parlementaires ne soient plus à la tête d'organismes publics - nous étions suspectés d'être malhonnêtes - mais nous n'avions pas de tels problèmes à l'époque ! Que font ces gens si brillants à la tête de ces organismes ? Je représente le Sénat au Conseil de surveillance de la société du canal Seine-Nord Europe et j'ai signalé à Xavier Bertrand que nous devions avoir des structures de contrôles réelles, équivalentes aux audits réalisés dans les grandes entreprises. Ce niveau de dépassement de budget est impensable !
M. Hervé Maurey, président. - Nous entendrons la Cour des comptes sur ce sujet la semaine prochaine.
M. Jérôme Bignon. - Heureusement que la Cour est là pour lever les lièvres !
EXAMEN DES ARTICLES
M. Philippe Pemezec, rapporteur pour avis. - L'article 6 soumet les projets à une procédure ad hoc de participation du public. Au lieu d'une enquête publique, ces projets feraient l'objet d'une procédure allégée de participation du public par voie électronique. À l'issue de cette procédure, la synthèse des observations et des propositions du public serait réalisée par un ou plusieurs garants nommés par la Commission nationale du débat public dans le délai d'un mois. L'amendement DEVDUR.1 propose de rendre obligatoire la réponse du maître d'ouvrage ou de la personne publique responsable, sans allonger le délai d'un mois prévu. Il ne serait pas judicieux que les observations du public puissent demeurer sans réponse du maître d'ouvrage. Cette réponse pourra préciser les éventuelles évolutions du projet retenues par le maître d'ouvrage à la suite des remarques.
L'amendement DEVDUR.1 est adopté.
M. Philippe Pemezec, rapporteur pour avis. - Avis défavorable à l'amendement de suppression COM-9. Ce projet de loi ne traite pas de l'opportunité du CDG Express - ce débat est révolu - mais en sécurise le montage.
La commission proposera à la commission des lois de ne pas adopter l'amendement COM-9, et d'adopter l'article 13 bis A sans modification.
M. Philippe Pemezec, rapporteur pour avis. - Même avis défavorable à l'amendement de suppression COM-10.
La commission proposera à la commission des lois de ne pas adopter l'amendement COM-10, et d'adopter l'article 13 bis B sans modification.
Articles 13 bis C et D
Elle proposera à la commission des lois d'adopter les articles 13 bis C et 13 bis D sans modification.
M. Hervé Maurey, président. - Ce projet de loi sera examiné la semaine prochaine en séance publique.
Proposition de loi relative au développement durable des territoires littoraux - Examen des amendements de séance
M. Hervé Maurey, président. - Nous en arrivons à l'examen des amendements de séance sur la proposition de loi relative au développement durable des territoires littoraux.
M. Didier Mandelli, rapporteur. - Avis favorable à l'amendement n° 11 rectifié bis sous réserve de remplacer les termes de « développement d'une culture locale du risque auprès des populations » par ceux d'« information du public sur le risque de recul du trait de côte ».
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 11 rectifié bis, sous réserve de rectification.
Article additionnel après l'article 2
M. Didier Mandelli, rapporteur. - Avis favorable à l'amendement n° 44 sous réserve d'une rectification. Je vous propose d'écrire : « Le niveau prévisible de montée des eaux pris en compte dans les dispositifs d'adaptation des littoraux est déterminé par le Plan national d'adaptation au changement climatique ».
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 44, sous réserve de rectification.
Article 4
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 40.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 12 rectifié.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 34.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 25 rectifié.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 33.
Article 5
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 29.
Article additionnel après l'article 7
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 35.
Article 9
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 41.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 32.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 15 rectifié bis et, à défaut, y sera défavorable.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 2 rectifié et, à défaut, y sera défavorable.
M. Didier Mandelli, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n° 16 rectifié.
M. Gérard Cornu. - Mais quid des secteurs urbanisés ?
M. Didier Mandelli, rapporteur. - Ils sont déjà pris en compte par l'article.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 16 rectifié.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 26 rectifié.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 4 et, à défaut, y sera défavorable.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 27 rectifié.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 3 et, à défaut, y sera défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 28 rectifié.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 5 et, à défaut, y sera défavorable.
M. Didier Mandelli, rapporteur. - Plusieurs amendements ont été déposés sur les parcs photovoltaïques. Nous verrons tout à l'heure un amendement qui répond à vos préoccupations. Je souhaite le retrait de l'amendement n° 38.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 38 et, à défaut, y sera défavorable.
M. Didier Mandelli, rapporteur. - Même demande de retrait à l'égard de l'amendement n° 31.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 31 et, à défaut, y sera défavorable.
M. Didier Mandelli, rapporteur. - L'amendement n° 19 rectifié pourrait produire l'effet inverse de celui attendu par ses auteurs.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 19 rectifié et, à défaut, y sera défavorable.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 43 et, à défaut, y sera défavorable.
Articles additionnels après l'article 9
M. Didier Mandelli, rapporteur. - Je demanderai des précisions au Gouvernement sur l'amendement n° 18 rectifié bis, mais je vous propose d'en demander le retrait.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 18 rectifié bis.
M. Didier Mandelli, rapporteur. - Avis plutôt favorable à l'amendement n° 1, mais je souhaite qu'il soit rectifié afin de ne viser que les sites dégradés, comme pour les parcs photovoltaïques. Étant en général dévolu aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ou aux départements, le traitement ou le stockage des déchets pourrait donc être effectué sur le territoire d'autres communes que celles sur le littoral. Évitons des unités de traitement sur des espaces littoraux.
M. Christophe Priou. - C'est la même chose avec la loi montagne.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 1, sous réserve de rectification.
M. Didier Mandelli, rapporteur. - L'amendement n° 36 rectifié traite des parcs photovoltaïques : je suggère son retrait au profit de l'amendement 24 rectifié bis qui est plus précis. Même si j'approuve son esprit, des risques perdurent.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 36 rectifié et, à défaut, y sera défavorable.
M. Didier Mandelli, rapporteur. - Avis favorable à l'amendement n° 24 rectifié bis, sous réserve d'une rectification afin de prévoir que les sites dégradés sont définis par décret, pour permettre d'être plus précis. D'ores et déjà, une dizaine de sites dégradés ont été recensés par l'État.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 24 rectifié bis, sous réserve de rectification.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 8 rectifié bis et, à défaut, y sera défavorable.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 14 rectifié sexies.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 17 rectifié et, à défaut, y sera défavorable.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 37 et, à défaut, y sera défavorable.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 20 rectifié bis et, à défaut, y sera défavorable.
Article 16
La commission émet un avis défavorable à l'amendement de suppression n° 42.
Articles additionnels après l'article 18
La commission demande le retrait de l'amendement n° 23 et, à défaut, y sera défavorable.
La commission s'en remet à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 30 rectifié.
M. Didier Mandelli, rapporteur. - Comme cela a déjà été dit, l'amendement n° 39 est irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution.
M. Hervé Maurey, président. - Il ne sera donc pas examiné en séance publique, car il est dépourvu de lien indirect, même avec ce texte.
La commission déclare l'amendement n° 39 irrecevable au titre de l'article 45, alinéa 1, de la Constitution.
La réunion est close à 10h15.
Mercredi 31 janvier 2018
- Présidence de M. Hervé Maurey, président -
La réunion est ouverte à 9 h 35.
Table ronde sur les assises de la mobilité
M. Hervé Maurey, président. - Mes chers collègues, nous avons décidé de consacrer notre réunion de commission de ce matin aux mobilités, qui vont être au coeur de l'actualité législative du prochain trimestre, le président de République et le Gouvernement ayant fait très tôt part de leur volonté de s'atteler à ce chantier important.
La ministre des transports a lancé, en septembre 2017, les assises de la mobilité, qui se sont terminées en décembre. Elle a mis en place un certain nombre d'ateliers. Il nous a paru utile de réunir ce matin les présidents de ces ateliers afin qu'ils nous fassent part de leurs travaux.
En parallèle, le Gouvernement a créé un Conseil d'orientation des infrastructures, au sein duquel j'ai l'honneur de représenter le Sénat, avec Gérard Cornu et Michel Dagbert.
Ce Conseil d'orientation, présidé par Philippe Duron, doit remettre son rapport demain matin à la ministre des transports. Nous aurons le privilège d'auditionner Philippe Duron dès la semaine prochaine à propos des différents scénarios qu'il propose.
Tout cela doit déboucher, ainsi que l'a rappelé hier le Président de la République lors de ses voeux aux assemblées, sur un projet de loi sur les mobilités, qui devrait être présenté en conseil des ministres vers le mois d'avril et venir devant le Parlement dans la foulée.
Sont présents ce matin - et je les en remercie :
- M. Patrick Oliva, co-fondateur du processus de Paris sur la mobilité et le climat, qui a présidé l'atelier sur les « mobilités plus propres » ;
- M. Michel Neugnot, premier vice-président de la région Bourgogne-Franche-Comté, président de la commission « transports et mobilité » de Régions de France, qui a présidé l'atelier sur les « mobilités plus solidaires » ;
- M. Gilles Savary, que nous connaissons bien, qui a été longtemps député et qui a toujours été très impliqué dans les questions de transport. C'est à lui que nous devons la proposition de loi sur la sécurité dans les transports, que nous avons examinée et adoptée. Il a présidé l'atelier sur les « mobilités plus sûres » ;
- M. Bertrand Pancher, député, également très impliqué dans les questions de transport et de développement durable, président de l'atelier sur les « mobilités plus connectées » ;
- Mme Valérie Lacroute, députée, présidente de l'atelier sur les « mobilités plus intermodales » ;
- enfin, M. Noël de Saint Pulgent, inspecteur général des finances, dont la compétence dans le secteur des transports est connue, qui a présidé l'atelier sur les « mobilités plus soutenables ».
M. Patrick Oliva, président de l'atelier « mobilités plus propres ». - Je souhaiterais tout d'abord situer le contexte. Il s'agissait de s'intéresser à la mobilité des Français au quotidien, en laissant de côté la logistique et le fret.
Je voudrais que vous reteniez trois mots des travaux de cet atelier : accélération, transformation et équité territoriale.
En matière d'accélération, on ne part toutefois pas de rien dans le domaine des mobilités plus propres. La loi sur la transition énergétique a lancé de nombreuses initiatives, en particulier la stratégie nationale pour des mobilités plus propres.
Le contexte est également européen. Un certain nombre d'engagements ont été pris dans la feuille de route de 2011, dont la réduction des émissions de CO2 de 60 % d'ici 2050.
Nous nous sommes placés dans l'objectif d'une décarbonation pleine et entière en 2050, mentionnée dans le plan Climat de Nicolas Hulot. Nous parlons ici d'une décarbonation nette : cela signifie que, s'il reste des émissions, elles devront être compensées.
Le transport, premier secteur émetteur de CO2, continuera inéluctablement à produire, en 2050, un certain nombre d'émissions, et j'attire votre attention sur le fait qu'il nous faudra les compenser.
Viser zéro émission nette en 2050 est plus ambitieux que ce qui a été fixé en Europe. C'est donc une exigence très forte.
Cela nécessitera une transformation : nous ne pouvons imaginer que les évolutions incrémentales qui ont eu lieu jusqu'à présent vont pouvoir satisfaire ce niveau d'exigence très forte. Cette transformation sera également l'occasion d'amener des bénéfices économiques importants pour le pays, dans la mesure où de nombreux emplois devraient y être attachés.
La transformation du secteur de la mobilité va en particulier nécessiter des investissements très importants du secteur privé et d'un certain nombre d'actions du secteur public. Ceci doit être mené dans la perspective de générer de nouvelles activités économiques.
Nous avons également veillé, dans le cadre des assises, à ce que le principe d'équité territoriale en matière d'accès au travail, aux soins, aux services, soit toujours présent dans la mesure où les remontées des ateliers organisés à travers tout le pays ont démontré, dans certains cas, une dégradation de la prestation territoriale en termes de transport. Certaines zones ne sont en effet pas bien couvertes, et même moins qu'il y a quelques années, alors que d'autres bénéficient de davantage de moyens. Ce contexte est important, car il pose le cadre.
Nous avons tenté d'établir un plan d'action sur quatre décennies - 2050, 2040, 2030, 2020 - en décidant à chaque fois d'un certain nombre d'opérations à mener. 2050, c'est l'horizon auquel on doit atteindre le niveau de zéro émission nette.
Vous le savez, la France a fait l'objet de deux avis motivés de l'Union européenne, car nous sommes très au-dessus des normes définies par l'OMS. Il est donc nécessaire, dans la perspective d'une mobilité plus propre, d'être à la fois à zéro émission et à des niveaux de pollution toxique extrêmement faibles.
Pour cela, nous avons tenu compte de l'orientation donnée par le ministre de la transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot, consistant en l'arrêt des ventes de véhicules émetteurs de gaz à effet de serre à l'horizon 2040.
Afin d'y parvenir, nous pensons qu'il convient, à l'horizon 2030, qu'une majorité de villes françaises atteignent l'objectif de zéro émission polluante ou de très faibles émissions polluantes. C'est un concept qui est né en 2003 à Tokyo, ville pionnière et leader dans ce domaine, et qui en a tiré des bénéfices considérables. Ceux qui connaissent Tokyo savent que cette ville était extrêmement polluée il y a vingt ans. Elle ne l'est plus aujourd'hui grâce à un concert d'actions.
L'idée est, en définissant des périmètres attachés à ces exigences, de pouvoir porter plusieurs éléments structurants de la transformation, par exemple en redonnant une part plus éminente à la marche. Un certain nombre de villes se sont déjà organisées, mais elles ne sont pas si nombreuses, et il est important que toutes ces mobilités douces soient remises à l'honneur.
La recherche de zones à très basses émissions passe également par la promotion du vélo. Par rapport à la plupart des pays voisins, la France est en retard. Peu de zones sont aujourd'hui très équipées pour les vélos. La volonté commune - c'est ce qui est remonté de manière très forte des ateliers nationaux - est de développer le vélo en fixant un certain nombre de préconisations dans le contexte urbain.
Troisième élément important : aller vers de très basses émissions, c'est également limiter le nombre de véhicules, en ville. Ceci nous a amenés à proposer un certain nombre d'orientations sur le covoiturage et l'autopartage. Il est essentiel de définir un contexte législatif qui permette de développer ces pratiques, qui existent mais ne sont pas suffisamment encadrées, afin de bien segmenter le covoiturage et l'autopartage par rapport à des activités professionnelle de transport.
L'autre incidence, c'est l'amélioration des services publics de transport. Beaucoup de villes de taille moyenne sont bien équipées. Ce n'est pas le cas partout, mais si l'on veut développer ces contextes de mobilité propre, il faut que les transports publics soient mis à l'honneur et que leurs services soient améliorés dans le temps.
Restent les véhicules autres, particuliers et petits utilitaires, essentiellement concernés par le passage à la mobilité électrique, avec ce que cela requiert comme équipements.
L'échéance de 2020 consiste à essayer de préparer le contexte dans lequel ces mutations importantes vont pouvoir prendre place.
M. Michel Neugnot, président de l'atelier « mobilités plus solidaires ». - Le terme de « mobilités solidaires » recouvre deux types de solidarité, la solidarité avec certains publics et la solidarité avec les territoires. Il s'agit en résumé d'une mobilité partout et pour tous.
On retrouve, dans l'atelier pour lequel nous avons travaillé, énormément d'aspects contenus dans les cinq autres ateliers. Ayant travaillé différemment, on constate néanmoins une convergence très forte sur de multiples sujets.
Nous nous sommes positionnés par rapport à l'existant : la loi sur la nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), avec les compétences réparties entre les autorités organisatrices de la mobilité (AOM) et les régions, avec le schéma régional d'aménagement et de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet), et leur volet infrastructures et intermodalité, qui doit être mis en place à mi-2019.
D'autre part, notre groupe de travail a essayé de faire en sorte que tous les niveaux de collectivité soient représentés, ainsi que tous les acteurs de la mobilité, aussi bien le public que le privé. Quand on parle de mobilité, il faut en effet embrasser toutes les solutions.
On a donc une vision très large, et nos recommandations portent sur une organisation qui complète l'état législatif actuel.
Le premier point porte sur le fait qu'une rupture existe actuellement entre les agglomérations, autorités organisatrices de la mobilité, et le reste du territoire, où l'on trouve des autorités organisatrices de transport (AOT). La différence est essentielle, tout ce que les nouvelles technologies peuvent apporter n'existant pas sur l'ensemble du territoire. D'où l'idée que les régions deviennent architectes de ces mobilités. L'architecte ne fait pas tout : il dessine l'architecture, amène l'ingénierie, et fait en sorte d'assurer la cohérence de l'ensemble.
Dans toute cette architecture, il y a le « faire connaître », qui comporte l'accès aux données, c'est-à-dire la nécessité de capitaliser l'ensemble des données de mobilité, quelles que soient les solutions existantes, dans un système d'information multimodal interactif, allant jusqu'à la distribution du titre de transport et utilisant tous les moyens de communication à l'échelle régionale.
Pour que cela fonctionne, il faut mobiliser le bloc communal. Nous recommandons de ne pas être fermes sur telle ou telle structure. Le bloc communal possède déjà son organisation. Un certain nombre de pays et d'intercommunalités ont déjà développé des solutions de mobilité.
Il faut donc que la loi exige que cette organisation d'intermodalité existe sur l'ensemble du territoire, avec une architecture portée par les régions, sans définir la structure la plus adaptée. Il faut être capable de redonner à l'échelon communal, regroupé comme il le souhaite, en fonction de son histoire, la part de décentralisation que l'on veut pour les régions.
Troisième élément du dispositif : nous pensons qu'il faut une norme pour définir les territoires à mobilité inclusive, en termes d'objectifs et non de moyens.
La démarche visant à augmenter les mobilités sur l'ensemble des territoires doit se construire progressivement. Il faut plutôt enclencher une dynamique. Nous avons pris l'exemple des villes et villages fleuris, où il existe des niveaux, et celui des territoires à énergie positive, auxquels on fixe des critères objectifs. C'est cette notion qui doit être définie par l'État.
Une contractualisation dynamique doit ensuite se faire entre les régions, architectes, le bloc communal et les départements. Les départements sont responsables des routes et du volet solidarité, aussi bien s'agissant des territoires que des personnes. Souvent, les départements financent la mobilité à travers des financements d'associations, de structures. Combien de plateformes de mobilité à caractère social sont financées par des départements ?
Il existe sur les territoires une multitude d'opérations, de structures, d'initiatives, publiques ou privées, qui amènent des bouts de mobilité, des bouts de solutions.
Le problème, quand on interroge les acteurs, réside dans le fait que les financements ne sont pas coordonnés. En outre, leur pérennité n'est pas garantie, et le grand public n'en a pas connaissance.
Une dynamique est à créer territoire par territoire, à travers le système d'information multimodale, le référentiel de mobilité, le pacte conclu entre la région, le bloc communal et les départements.
M. Gilles Savary, président de l'atelier « Mobilités plus sûres ». - Cet atelier a traité de deux sujets très distincts, celui de la sécurité, qui concerne la prévention des risques accidentels, et celui de la sûreté, qui concerne plutôt les atteintes volontaires aux biens et aux personnes.
On parle souvent des services de sécurité : ils sont en fait là pour assurer la sûreté et éviter les intrusions. Ce sont deux domaines très différents.
Pour ce qui est de la sécurité, celle-ci s'organise toujours autour de trois motifs d'accidents éventuels, ceux qui tiennent à l'infrastructure, ceux qui tiennent aux comportements et ceux qui tiennent aux véhicules.
En matière de sécurité, le problème essentiel de l'ensemble des mobilités terrestres reste la route. C'est elle qui tue le plus : 3 477 décès l'année dernière, et 24 000 blessés graves. Ce sont des chiffres extrêmement importants. Le classement de la France est relativement bon, mais il n'est pas exceptionnel s'agissant du nombre d'accidents par habitant. Elle est bien mieux classée s'agissant du nombre d'accidents par kilomètre effectué, assez proche des pays scandinaves.
Ce qui interroge surtout, c'est qu'après 40 ans de baisse ininterrompue des décès et des blessés graves, on enregistre chaque année depuis 2013 une légère augmentation du nombre de décès dus à la route - entre dix et quinze.
C'est sur le réseau secondaire et en milieu urbain que se produisent ces décès, notamment, dans ce dernier cas, en ce qui concerne les conducteurs de vélos et les utilisateurs de modes doux, qui sont très vulnérables.
La question est de savoir comment répondre à ces deux risques et les identifier. À quoi sont-ils dus ?
L'atelier a considéré qu'il faudrait d'abord renforcer la coopération entre les départements et l'État en matière de sécurité routière. En réalité, on trouve 100 décideurs sur les réseaux secondaires départementaux. Le réseau départemental est complexe, immense par rapport à ce qui reste du réseau national, et il est souvent utilisé en zone périurbaine comme « trajet malin » pour sortir des congestions.
On se pose par exemple la question de l'impact des nouvelles applications, comme Waze, qui font passer des véhicules dans des endroits impossibles, sous prétexte d'éviter les bouchons.
Les sujets à réguler sont donc énormes, et il devrait exister, de ce point de vue, un rapprochement entre l'État, garant de la sécurité routière, et les cent décideurs que sont les départements. Il y a là un problème d'accès aux données et d'analyses des accidents. C'est une très forte préconisation de l'atelier.
Deuxième préconisation : des limitations de vitesse modulables - même si c'est trop tard, le Premier ministre ayant décidé de mettre en place une limitation de vitesse uniforme à 80 kilomètres à l'heure.
Pourquoi proposait-on une limitation modulable ? Il ne s'agit pas de refaire tout le réseau secondaire. Nous n'en avons ni les moyens, ni, d'ailleurs l'intérêt. Certaines routes départementales sont pittoresques, et il faut les garder en l'état, mais il faut pouvoir signaler les zones de dangerosité.
Or nous avions estimé qu'une limitation de vitesse uniforme, outre le fait qu'elle attisait le soupçon du « tiroir-caisse » qui délégitime la politique de sécurité routière, permettrait aux gens qui conduisaient de ne pas faire face à la monotonie de la limitation et d'identifier de façon plus claire les zones de danger, en faisant un effort particulier sur la signalétique.
Vous le savez tous, une route départementale de l'Ardèche n'a rien à voir avec une route départementale de la Beauce, une route de haute montagne ou une route des Landes. Si on a le même « prêt-à-porter », on n'aura pas une très grande finesse d'approche.
Troisièmement, nous proposons de faire de la maintenance prédictive et d'intervenir sur le réseau départemental dans les endroits typiquement dangereux, même s'il y a eu peu de morts. C'est ici qu'une coordination avec l'État apparaît nécessaire. Il faut d'abord identifier la zone départementale sursollicitée, par exemple du fait du développement périurbain.
La première cause de décès, ce sont les intersections et les stops grillés. La mesure de limitation à 80 kilomètres à l'heure ne sera pas efficace, puisqu'on est bien en deçà aux intersections. Il faut donc aussi agir sur ce sujet.
Enfin, nous pensons qu'il faut appliquer l'open data aux véhicules afin de partager l'analyse des accidents. Les véhicules vont de plus en plus emprisonner des données qui seront la propriété du constructeur. Il y a là un vrai sujet : cela permettra de savoir si l'accident est consécutif à une faute humaine, à un distracteur ou à une défaillance du véhicule lui-même, surtout quand lorsque le véhicule comportera des aides à la conduite autonome.
Enfin, nous préconisons aussi l'encadrement réglementaire de l'usage des engins de déplacement personnel en ville : trottinettes et vélos électriques, etc., qui permettent d'aller plus vite et plus loin, de l'ordre de 40 kilomètres à 50 kilomètres. Cela va modifier l'usage de la voie et de la ville. On ne peut s'amuser à utiliser un vélo électrique sur un trottoir, car si on percute un piéton, on lui fait très mal. Les skateboards et les gyropodes ne sont pas encadrés aujourd'hui.
Nous préconisons aussi de travailler sur les distracteurs. Aujourd'hui, l'inquiétude des autoroutiers est grande. L'année dernière, on a enregistré une augmentation de 50 % des percussions sur les chantiers autoroutiers, parfois avec des décès. On soupçonne les distracteurs, notamment dans les poids lourds, et les aides à la conduite, d'en être responsables : en regardant le GPS, on percute le chantier. C'est un sujet d'actualité.
Enfin, nous avons préconisé que l'éducation nationale consacre une journée à l'éducation routière et au civisme routier. Il faut que les jeunes considèrent que les skateboards ou les rollers sont dangereux. Il faut un minimum de civisme.
Nous avons par ailleurs préconisé une formation continue - par exemple tous les 15 ans - pour les détenteurs du permis de conduire, afin de s'adapter aux nouveaux risques et à l'évolution du code de la route.
En matière de sûreté, nous avons demandé l'éthylotest antidémarrage.
Pour ce qui est du chemin de fer, l'essentiel du problème vient des intrusions sur les voies. Je veux parler des migrants, qui trouvent aujourd'hui leur route en suivant les voies ferrées, ce qui entraîne de nombreux décès, et des passages à niveau, dont vous avez hélas entendu parler.
La sûreté est un sujet très politique. Nous considérons que tous les réseaux urbains et périurbains doivent disposer d'un minimum de politique de sûreté. Nous préconisons donc que les préfets de département réunissent l'ensemble des opérateurs et des autorités organisatrices pour déterminer une sorte de « contrat local de sûreté ».
Dernière mesure qui peut faire du bruit, nous proposons que les grandes autorités urbaines puissent se doter d'un service interne de sûreté qui ne soit pas soumis à appel d'offres, afin qu'on ne fasse pas de « sûreté au rabais » avec des gens qui ne seraient pas transférables - des « cow-boys » qui changeraient à chaque fois que l'on changerait d'opérateur.
M. Noël de Saint Pulgent, président de l'atelier « mobilités plus soutenables". - Il faut entendre le terme de « mobilités soutenables » au sens financier du terme.
Premier constat : il existe un décalage qui crée de la frustration entre l'utilité socio-économique des projets, dont certains sont nombreux à franchir tous les seuils acceptables - la commission Duron va nous indiquer lesquels demain - et la difficulté à les financer.
Il faut bien reconnaître que peu de services ou d'infrastructures sont rentables au sens financier du terme. Il faut donc étudier comment solidariser les deux notions. Pour cela, il faut éviter quelques mythes.
Certains financements innovants sont possibles. Il faut les utiliser, mais cela ne réglera pas toute la question.
Il existe trois catégories de financeurs possibles, dont deux sont essentielles. La première catégorie est celle des usagers, la seconde celle des finances publiques, de l'État jusqu'aux communes. La troisième est constituée de tous les acteurs qui bénéficient de l'infrastructure sans nécessairement l'utiliser - ce point est important.
Nous avons un exemple avec ce qui se passe aujourd'hui à Bordeaux et dans son agglomération, avec l'arrivée du TGV. Les effets d'aubaine et les spéculations qui en résultent créent de la valeur. C'est un cas très particulier, mais une infrastructure, notamment dans une ville, crée toujours de la valeur.
C'est l'un des points sur lesquels l'école économique française, qui a été très productive, n'est malheureusement pas en avance, notamment par rapport aux Anglo-Saxons. On sait créer des avantages en termes de temps et d'environnement, mais on ne sait pas valoriser les effets que peut avoir sur l'agglomération la création d'une ligne de métro, d'un tramway, etc... Une réflexion est certainement à mener sur ce sujet. Il faut y réfléchir, avant que les économistes aient trouvé la solution.
Des solutions ont déjà été expérimentées. L'idée d'un prélèvement sur les cessions n'est pas très opérante. Elle a été abandonnée. Il existe en effet un périmètre, avec des effets de seuil, etc.
Néanmoins, on peut s'inspirer de ce qui a été fait pour le Grand Paris et développer la valorisation foncière par le biais de taxes. Il en existe deux pour le Grand Paris, la taxe spéciale d'équipement, qui a la même assiette que la taxe foncière, et la taxe sur les bureaux.
Nous proposons de nous caler, pour les entreprises, sur l'assiette de la taxe foncière, qui est revalorisée assez régulièrement et, à condition que les recettes soient fléchées, d'en faire bénéficier certains projets. Nous ne faisons là que proposer des outils qui pourront ensuite être utilisés ou non.
S'agissant du problème des usagers, le débat qui angoisse beaucoup d'autorités organisatrices est la tendance à la baisse de la contribution de ceux-ci aux transports collectifs. Cela concerne le TER, pour lequel les choses sont relativement stabilisées, même si, en dix ans, on a tout de même perdu quatre points, mais aussi les agglomérations.
La situation est très différente d'une agglomération à l'autre - et c'est d'ailleurs normal -, mais la tendance à la baisse est inquiétante. 30 % des coûts sont couverts par les recettes des usagers sans les amortissements, et entre 15 % et 17 % avec les amortissements. C'est très peu.
Nous proposons de mettre les informations sur la table et de connaître le niveau de fréquentation par ligne ou groupe de lignes, afin de vérifier si tout service est véritablement justifié ou s'il doit être adapté.
Il est très bien qu'il existe des tarifications solidaires en faveur de tel ou tel groupe, mais il faut que celles-ci soient rendues publiques, et que l'on sache les recettes que l'on perd pour les étudiants, pour les séniors, etc... Je reprends volontairement les catégories à propos desquelles la question de savoir s'il s'agit ou non de solidarité fait débat.
Nous proposons aussi, dans un tout autre registre -le péage sur les autoroutes étant accepté quoi qu'on en dise, même si les hausses sont mal ressenties- que les collectivités territoriales puissent, pour des opérations précises, instaurer un péage de manière temporaire après une concertation publique, sans passer par le régime de la concession.
Cela peut servir à financer en partie un allégement d'axe. Ceci doit également être possible pour les aménagements d'une partie d'un réseau départemental qui représentent un financement important.
Dans le même esprit, nous proposons d'élargir les possibilités de recours aux péages urbains, qui n'ont pas été utilisées en France, alors que des pays européens aussi différents que la Suède, l'Angleterre et l'Italie le pratiquent.
Il conviendrait de supprimer l'expérimentation de trois ans, certains investissements ne pouvant être rentabilisés dans cette durée, sachant qu'une collectivité peut toujours y renoncer si cela ne la satisfait pas. En outre, nous préconisons de baisser à 100 000 habitants le seuil, actuellement fixé à 300 000 habitants, au-dessus duquel il peut être appliqué, et d'aménager un certain nombre de dispositifs de cette nature.
Ceci est important à nos yeux. J'ai considéré que, si l'on voulait être pragmatique, on ne pouvait attendre de l'État et des collectivités publiques un « grand soir » des financements.
En revanche, il ne faut pas s'interdire, pour l'avenir, un certain nombre de prélèvements affectés. Je cite tout particulièrement le cas des hausses considérables de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), qui vont s'appliquer d'ici 2022, soit 25 % d'augmentation pour le diesel et 12 % pour l'essence : il serait justifié qu'un quart ou un tiers revienne aux transports et, en particulier, à la route.
Cela permettrait notamment de financer l'entretien routier, dont on nous dit qu'il lui manque 300 millions d'euros par an. La direction du Budget estime que ce n'est pas prouvé, mais c'est ce qu'évaluent la plupart des spécialistes.
Pour les routes, nous proposons la création d'un établissement public, une agence des routes - un EPIC. Je crois en effet que le moment est venu.
Nous avons été interpellés par l'association Régions de France, qui a estimé qu'il faudrait que les régions aient le choix de se voir affecter les routes ou non. On ne peut avoir un système à la carte et garder un « croupion » de route nationale. Cependant, s'il existe un établissement public, il pourra déléguer plus facilement que l'État lui-même.
Enfin, nous nous sommes intéressés à la problématique de la contribution des poids lourds. Je répondrai aux questions sur ce point.
M. Bertrand Pancher, président de l'atelier « mobilités plus connectées ». -J'ai été très impressionné de découvrir combien les mobilités plus connectées allaient transformer notre quotidien, à un point que je n'imaginais pas.
Aujourd'hui, si la réglementation le permettait, on pourrait déjà voir circuler sur nos routes des voitures sans chauffeur, des véhicules à haute technologie embarquée, comme Tesla. Cette technologie va devenir de plus en plus abordable et toucher l'ensemble des véhicules, de transport de passagers ou de marchandises, d'ici cinq à dix ans, en fonction du nombre d'équipements et des progrès. Nos systèmes de transport vont être totalement transformés, même en termes de sécurité.
Face à ce constat, nous avons deux possibilités : laisser faire les choses, en partant du principe qu'elles vont arriver de manière plus ou moins organisée, ou anticiper de façon à s'organiser le mieux possible et faire en sorte que notre pays puisse être leader dans ce domaine, ce type de phénomène devant engendrer beaucoup de richesses. C'est le choix qu'a retenu notre atelier, en formulant cinq préconisations.
La première concerne l'ouverture des données. La loi Macron la prévoyait pour tous les services de mobilité, mais le Conseil d'État a considéré que c'était insuffisamment précis. Il n'y a donc pas, pour le moment, d'obligation dans ce domaine.
La loi Lemaire (il s'agit d'Axelle) est allée jusqu'à l'obligation de rendre public les codes sources, à la base des données. Tout le monde est terrorisé par cette perspective.
L'atelier préconise donc, outre le fait de toiletter ces textes, de faire en sorte qu'il existe deux types de chef de file en matière d'ouverture des données, les régions et les agglomérations, celles-ci devant s'engager à se coordonner au plan national.
En deuxième lieu, nous préconisons que les AOT contrôlent les services de mobilité par des systèmes de licences. Beaucoup de systèmes arrivent sur nos territoires, comme les vélos en libre-service. Il n'y a même plus besoin d'appels d'offres.
Ce matériel à bas prix bouleverse l'organisation des AOT. Il faut faire en sorte que ces dernières aient la possibilité d'octroyer des licences pour contrôler l'ensemble des nouveaux intervenants.
Troisième préconisation : un plan d'infrastructures connectées, en fonction de la technologie maîtrisée et acceptée par tous, les véhicules très haut de gamme pouvant se connecter eux-mêmes, reconnaître la route, etc. Plus on descend en gamme, plus les choses sont complexes.
L'idée est de commencer par un corridor d'infrastructures connectées. Cela peut être facile avec les sociétés d'autoroutes, qui y sont prêtes, sous réserve qu'on travaille avec elles, dans le domaine des contrats, sur les espaces et dans le temps.
Les métropoles sont également prêtes. Viendra ensuite la question des corridors en milieu rural, qui pourra être réglée par des systèmes d'appels d'offres.
Quatrième proposition : créer un Conseil de l'expérimentation. J'ai été très frappé de constater que toutes les grandes organisations se connaissent, mais ne travaillent pas ensemble. C'est caricatural. Certaines ont besoin d'expérimentations, mais le rapport avec l'administration est complexe et les choses mettent du temps. D'autres ont des difficultés à trouver des financements. Or les financeurs possibles sont autour de la table, et les grands groupes sont prêts à investir des moyens. Parfois, l'expérimentation est en cours, mais il est nécessaire de la faire connaître. C'est un domaine compliqué pour l'État. Il faut donc parvenir à réunir tout le monde autour de la table.
Dernière proposition : lancer rapidement des appels à projets pour accompagner tous ces nouveaux services par le biais du programme d'investissements d'avenir (PIA), de crédits non consommés ou en recherchant des financements extérieurs. Personne ne comprendrait qu'on ne puisse s'engager dans des appels à projets, en milieu rural comme en milieu urbain, de façon à pouvoir initier des programmes et des engagements nouveaux dans ce domaine.
Ce type d'appels à projets est généralisé au ministère de l'écologie : on ne comprend pas qu'il y ait une incapacité à le faire dans le domaine des transports !
Pour le moment, ces cinq propositions sont soutenues par le ministère des transports et devraient normalement se traduire dans le projet de loi qui sera soumis au Parlement.
Mme Valérie Lacroute, présidente de l'atelier « mobilités plus intermodales ». - Le titre de cet atelier étant transversal, vous allez retrouver dans ce que je vais dire beaucoup des propositions qui ont été faites par les différents groupes. Nous avons toutefois fait le choix de constituer deux sous-groupes, un atelier dédié aux voyageurs et un autre dédié à la logistique, l'idée étant, même si ces deux sujets se recoupent, d'approfondir ces questions.
Concernant les voyageurs, nous avons axé nos travaux et nos propositions sur la gouvernance, l'utilisation des outils numériques et le financement.
Notre objectif a été de mieux permettre à nos concitoyens de se déplacer, aussi bien au travers des transports en commun que de la voiture. Nous avons en effet pris en compte tous les territoires ruraux qui ne bénéficient malheureusement pas forcément de transports en commun très développés. Il nous a donc semblé important que la voiture garde une place non négligeable dans ces déplacements.
Le premier sujet qui a été abordé par différents groupes est celui de la gouvernance. Il nous a beaucoup occupés. Nous sommes partis du principe que la loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (MAPTAM) et la loi NOTRe avaient énormément modifié les compétences des différentes collectivités, l'objectif n'étant ni le « grand soir » ni d'ouvrir la boîte de Pandore, mais de permettre une meilleure prise en compte de la mobilité dans son sens large - vélo, autopartage, covoiturage, marche.
Ces mobilités, dans leur ensemble, ne sont pas forcément partout bien prises en compte. Il ressort que la région pourrait être le chef de file de cette compétence dans son sens large, en partageant l'organisation avec l'ensemble des collectivités qui, dans les différents territoires, s'occupent aussi de mobilité.
Nous avons pu constater qu'un certain nombre de métropoles n'ont pas attendu les régions pour s'occuper du transport au sein de leur territoire, mais qu'elles ne se parlent pas forcément entre elles, ce qui peut pénaliser nos concitoyens.
Certaines EPCI ont la compétence des transports. Il existe par ailleurs des syndicats de transport, des syndicats mixtes, et tout un tas de structures dans les collectivités qui essayent de faire du transport, toutefois sans se parler.
Le Sraddet s'impose aux régions mais, pour l'instant, demeure un outil de cartographie de l'offre de transport qui ne va pas forcément plus loin. L'idée serait de créer une deuxième phase permettant à l'ensemble des collectivités d'échanger entre elles.
Les pôles d'échanges multimodaux - les gares routières - ont toutes les tailles. C'est parfois une collectivité qui s'en charge, parfois la région, la commune, un EPCI, un syndicat, en fonction de sa taille. L'idée serait que l'ensemble des collectivités concernées s'installent autour de la table et s'organisent. Le souci est de ne pas rouvrir les discussions qui ont déjà eu lieu, et qui ont été assez sensibles.
Un mot s'agissant de la gouvernance et des plans de déplacements des entreprises (PDE). Il est nécessaire d'y associer les entreprises. Il nous a semblé important - et j'espère que la ministre le retiendra - que ces PDE soient plus contraignants et prennent en compte les déplacements des salariés.
S'agissant des outils numériques, l'objectif est d'ouvrir les données pour permettre une meilleure information de nos administrés et d'offrir à l'ensemble des transporteurs la possibilité de croiser leurs données, afin de bénéficier de transports plus efficaces et mieux connus de l'ensemble de nos concitoyens.
Quant à la politique fiscale et incitative, il nous a semblé important, pour permettre à nos concitoyens de mieux se déplacer, de sanctuariser le versement transport (VT), de l'orienter sur le niveau d'offres et non de s'en servir pour réaliser la gratuité, car le rôle des collectivités est de travailler sur la politique solidaire, et non sur la gratuité - je suis volontairement provocatrice.
Il faut également inciter fiscalement nos administrés au covoiturage. On sait que, dans les milieux ruraux, la voiture est indispensable. Il faut pousser nos concitoyens à partager leur véhicule, par exemple en leur proposant des indemnités kilométriques.
S'agissant de la logistique, nous avons axé nos travaux sur la place des marchandises dans la ville, l'efficacité dans le déplacement des marchandises et le verdissement de la flotte. Les incitations sur ce point peuvent être importantes.
Enfin, la place des marchandises en centre-ville constitue un sujet important. L'objectif n'est pas de faire en sorte que les logisticiens s'installent à l'extérieur et viennent polluer la ville par leurs livraisons - je ne citerai pas de noms. Il faut aussi que la logistique ait sa place en coeur de ville, d'où la nécessité d'incitations fiscales, peut-être au niveau des taxes foncières, pour privilégier l'installation de plateformes, et peut-être obliger les collectivités à ne pas oublier, comme souvent, un véritable volet « marchandises » dans les schémas de cohérence territoriale, plans locaux d'urbanisme, plans de déplacement urbain.
Il faut permettre un déplacement des marchandises plus efficace, mettre éventuellement en place une plateforme qui obligerait les services techniques des collectivités à y entrer tous les arrêtés de stationnement ou d'interdiction de circulation, afin de permettre aux cartographes qui alimentent les GPS des sociétés de transport de travailler sur des informations à jour, et d'éviter ainsi de voir les camions utiliser des voiries sur lesquelles ils n'ont pas à se trouver.
Mme Nelly Tocqueville. - Je suis d'autant plus sensible à votre exposé que j'ai été membre de la commission d'enquête sur le coût économique et financier de la pollution de l'air. Et, si les conclusions de ces travaux ont fait apparaître que la pollution n'était pas uniquement due à la circulation, les chiffres montrent tout de même qu'il y a une véritable urgence à faire évoluer les modes de déplacement. Vous avez rappelé la nécessité de donner plus de place aux modes doux, qu'il s'agisse du vélo ou de la marche à pied. Or aujourd'hui, on a davantage l'impression que les aménagements pour les vélos sont plaqués et pas suffisamment réfléchis. Cela pose alors la question de la cohabitation du vélo avec la voiture, comme avec les piétons.
En outre, les piétons doivent de plus en plus se faufiler entre les voitures dans les centres urbains, ce qui est dangereux. D'ailleurs, le nombre d'accidents impliquant des piétons est en augmentation. Aussi, il est urgent de mener une réflexion sur une nouvelle organisation de l'espace urbain.
Aujourd'hui, des habitudes sont prises par les automobilistes, par les cyclistes, mais aussi par les utilisateurs de nouveaux moyens de déplacements qui sont incontrôlés, voire incontrôlables. Face à ce constat, deux questions majeures se posent : comment faire évoluer l'urbanisme ? Comment modifier le comportement des cyclistes, automobilistes, piétons, et de manière plus large, de tous les usagers de la route ?
M. Rémy Pointereau. - Pour ma part, j'ai l'impression que nous sommes entrés, en matière de mobilité, dans une période de décroissance. En milieu rural, il est nécessaire que les transports collectifs soient plus réactifs et plus vertueux du point de vue environnemental. On peut s'interroger sur le maintien de certains transports, lorsque l'on voit des bus avec deux ou trois passagers traversant nos départements ruraux. Il faut ainsi aller vers un développement du transport à la demande, par minibus ou par taxi, et réfléchir au moyen de faire baisser son coût.
La limitation à 80 km/h est vécue comme une double peine par beaucoup de personnes en milieu rural, après l'augmentation du diesel. Je rejoins la position de M. Savary sur la nécessité de faire un discernement entre les routes accidentogènes et les autres. En outre, cette nouvelle limitation de vitesse pose la question de la cohabitation des voitures avec les véhicules sans permis, ou encore avec les poids lourds qui rouleraient alors à une vitesse similaire.
M. Gérard Cornu. - La sécurité est un enjeu qui nous concerne tous, mais nous avons l'impression que le gouvernement a fait le choix de la facilité dans les mesures prises. J'ai cru comprendre qu'une expérimentation avait été menée pendant un an sur le passage de 90 à 80 km/h. Or, nous parlementaires, avons du mal à obtenir les résultats de cette expérience. A-t-elle été efficace ?
En outre, avec la multiplication des panneaux signalétiques, le conducteur est désormais presque incité à être plus attentif à ce qui se passe sur les côtés que devant lui. Il n'est quasiment plus possible non plus d'utiliser les régulateurs de vitesse, y compris sur autoroute. La vitesse varie de manière constante entre 90, 110 et 130 km/h, sans que l'on sache pourquoi, avec des radars fixes très fréquents. Cela renforce l'impression que peut avoir l'automobiliste d'être une « vache à lait », et à mon sens, gâche l'objectif sécuritaire de la réduction de vitesse.
M. Claude Bérit-Débat. - Je me sens concerné par les thématiques de mobilité plus propre, plus solidaire, plus sûre, plus intermodale, plus soutenable et plus connectée, qui ne sont pas nouvelles. Lorsque j'étais président d'une autorité organisatrice de transport d'une petite agglomération de 100 000 habitants, nous avons essayé d'améliorer la répartition des parts des différents modes, ainsi que la sécurité.
L'une des difficultés majeures que rencontrent certaines autorités organisatrices de transport est la couverture simultanée d'un noyau urbain et d'un territoire rural. En effet, le transport en milieu rural n'est pas le même que celui en milieu urbain, et le coût est différent.
La gratuité des transports fait supporter le coût de ce dernier par le versement transport. C'est la raison pour laquelle j'y suis opposé, même si je comprends cette tentation pour des autorités organisatrices de transport, afin d'augmenter la fréquentation des bus. La question financière est d'ailleurs primordiale, car pour avoir un niveau de service satisfaisant, il faut des moyens. C'est la raison pour laquelle les collectivités de petite taille doivent pouvoir s'adosser à d'autres structures plus importantes, notamment les régions.
M. Patrick Chaize. - Je partage l'ensemble des propositions relatives à la voiture connectée. J'ai toutefois plusieurs inquiétudes. En effet, dans la présentation que vous avez faite des plans d'infrastructures connectées, il apparait en creux, comme une fatalité, que l'on va d'abord s'intéresser aux autoroutes, puis aux métropoles. La ruralité se retrouverait ainsi en queue de peloton, alors même que les routes du réseau secondaire sont les plus accidentogènes. Or, la voiture connectée est une solution pour améliorer la sécurité routière. Dès lors, ne faudrait-il pas avancer de façon parallèle sur l'ensemble des secteurs, dans la mise en place de ces infrastructures ? De la même manière qu'il y a eu, il y a peu, l'annonce d'un accord historique avec un opérateur de téléphonie mobile pour la couverture du milieu rural, il faut inciter l'ensemble des acteurs à réfléchir pour que la ruralité ne soit pas encore une fois oubliée.
M. Olivier Jacquin. - La question du ferroviaire a été très peu évoquée, et a, d'ailleurs, été écartée des Assises nationales de la mobilité. En effet, à chaque fois que l'on interroge la ministre sur ce sujet, elle renvoie sur les travaux en cours de Jean-Cyril Spinetta.
De même, la problématique du fret et de la logistique n'a été que très peu abordée. Hier, la délégation à la prospective recevait Michel Savy, spécialiste des questions de fret. La France accuse un retard important par rapport au Nord de l'Europe, à notre voisin allemand, ou à des pays comme le Japon, en dépit de la loi de modernisation de 2013. Certaines dispositions de cette dernière sont d'ailleurs restées lettres mortes.
Il faut également s'interroger sur la place de la puissance publique en matière d'ouverture des données. En France, nous avons une tradition forte d'organisation et de planification. Or les plateformes numériques sont en train de prendre la place des politiques publiques. Dès lors, y a-t-il encore la place pour un champion européen de l'organisation de ces données, qui le ferait dans un esprit conforme au service public ? En effet, on peut penser que si cette tâche est confiée aux GAFA, ces derniers l'exécuteront de manière non totalement dénuée d'intérêts commerciaux, par exemple en proposant un trajet passant par l'un de leurs partenaires.
Enfin, l'on constate que les gens vont habiter de plus en plus loin de leur lieu de travail et des villes. Cela est lié au prix du foncier en centre-ville, et crée des problématiques de déplacement. Vous avez évoqué la possibilité de réutiliser la valeur créée par la spéculation foncière pour financer les infrastructures de transports en commun. L'exemple de la Suède est intéressant puisque dans certains nouveaux quartiers, les tramways ont été financés par la commercialisation des parcelles.
M. Éric Gold. - Si aujourd'hui, une réflexion approfondie a été menée sur les transports en commun dans les métropoles, communautés urbaines, communautés d'agglomération et de manière plus large, dans les zones couvertes par une autorité organisatrice de transport, tel n'est pas le cas dans les communautés de communes et les territoires plus petits. Aujourd'hui, plus de 1 000 communautés de communes regroupant près de 20 millions d'habitants ne sont ainsi pas couvertes par une autorité organisatrice de transport. Cela pose la question de l'équité territoriale, et d'une « mobilité pour tous et partout ». Dans ces zones blanches, très peu de transports en commun existent, et les gens sont dépendants de la voiture.
Je voudrais avoir des précisions sur la gouvernance et la répartition des tâches sur les territoires. Pour certains, la région pourrait jouer le rôle d'architecte. Or, on constate que certaines ont déjà redélégué aux départements la compétence relative au transport scolaire, acquise par la loi NOTRe. Aussi, je m'interroge sur leurs volontés réelles et leurs capacités à jouer ce rôle d'architecte.
M. Jordi Ginesta. - L'on souhaite considérablement développer les véhicules électriques pour 2050. Toutefois, nos centrales sont-elles actuellement capables de fournir à 22 heures un surcroit d'électricité permettant de recharger des millions de véhicules ? Faut-il construire des centrales nucléaires ou thermiques ? Si l'on fait le choix de recourir à une production thermique, on ne fait que déplacer le problème de la pollution. En outre, quel est l'état d'avancement de cette question dans nos pays voisins ? En effet, si en 2050, le développement du véhicule électrique n'est pas le même dans tous les pays, cela va poser des problèmes pratiques de mobilité : les Français auront deux véhicules : un véhicule électrique pour circuler en France, et un véhicule thermique pour partir en vacances.
M. Guillaume Gontard. - Vous proposez une organisation des transports avec à sa tête la région, et en appui les agglomérations et les intercommunalités. Or, beaucoup d'intercommunalités ne sont pas dans le périmètre d'une autorité organisatrice de transport. Il faudra être vigilant pour ces zones blanches hors AOT et réfléchir à la manière dont elles doivent être traitées. La contractualisation proposée est à ce titre intéressante, car elle laisse une certaine latitude aux collectivités pour s'organiser et innover. Il faut ainsi accompagner les territoires et instaurer un vrai dialogue.
Mme Angèle Préville. - Je soutiens pleinement l'instauration d'une journée de la sécurité routière dans l'éducation nationale. D'ailleurs, cela existe déjà au collège en cinquième et en troisième. Le département du Lot va plus loin puisqu'il organise tous les ans un stage de deux jours pour les élèves de cinquième, avec une formation à la conduite des deux roues.
Le recours au vélo, et notamment au vélo électrique, ne doit pas être réservé qu'aux villes. Il peut en effet être envisagé pour relier des villes proches, même en milieu rural. Les déplacements y sont parfois inférieurs à 10 kilomètres. Mais actuellement, la route est partagée avec les camions et les voitures. En outre, en raison de la baisse des dotations, certains départements ont procédé à un déclassement de routes secondaires, car ils n'ont plus les moyens de les entretenir et de faire les aménagements nécessaires.
Enfin, si les technologies électriques sont amenées à se développer, il faut envisager un rechargement de ces dernières, non pas chez soi par prise électrique sur le réseau national, mais, surtout en milieu rural, par des moyens alternatifs, comme les panneaux photovoltaïques.
Mme Nicole Bonnefoy. - Pouvez-vous nous présenter vos réflexions sur la possibilité de mettre en place une écotaxe ? En effet, dans les régions comme la mienne traversées par des cohortes de camions, l'instauration d'un tel outil fiscal permettrait de récupérer des recettes pour terminer des travaux qui auraient dû l'être depuis longtemps - par exemple des aménagements de deux fois deux voies.
Chaque jour, matin et soir, près de 4 millions d'élèves sont transportés. Quels ont été les débats, lors des assises de la mobilité, en matière de sécurité, gratuité et qualité des transports scolaires ?
Mme Michèle Vullien. - Il est important de sanctuariser le versement transport. Je suis frappée par la diminution constante de la participation des voyageurs au coût du transport collectif. La fixation des tarifs ressort de l'autorité politique, qui doit être affichée et expliquée. Je suis opposée à la gratuité des transports en commun, car elle ne permet pas de faire fonctionner le réseau, et dans certains cas est contreproductive.
Faire de la région le chef de file en matière de transport est intéressant. Dans le département du Rhône, le SYTRAL qui gère les transports de la métropole de Lyon est désormais compétent sur l'ensemble du département. Le bassin de vie est la bonne strate pour l'organisation des transports, en coordination avec la région. C'est d'autant plus important qu'il faut renforcer l'intermodalité avec tous les modes de transport, dont le ferré.
Enfin, la gestion du dernier kilomètre en matière de logistique urbaine doit être mieux prise en compte. C'est pourquoi il faut développer des espaces logistiques urbains dans les agglomérations.
M. Guillaume Chevrollier. - Les transports représentent le premier émetteur de CO2 dans notre pays. La mobilité est importante pour l'environnement, mais aussi pour l'attractivité de nos territoires, en particulier ruraux. À cet égard, la voiture reste un vecteur de transport essentiel. Il faut que les conclusions des assises de la mobilité proposent des solutions aux habitants des petites communes et aux entreprises qui y sont installées. C'est pourquoi il faut améliorer les réseaux routiers existants. En outre, les territoires ruraux ne doivent pas être oubliés dans le développement du véhicule électrique et de ses infrastructures de recherche.
Certes, il faut aller vers une mobilité plus sûre, mais je partage l'avis de M. Savary. Il faut faire preuve de discernement en matière de réduction de la limitation de vitesse. Aujourd'hui, dans nos territoires, les entreprises rencontrent des difficultés pour recruter des personnels et des commerciaux parcourant plusieurs milliers de kilomètres par an.
M. Charles Revet. - Vous avez très peu parlé du ferroviaire. Lorsque j'étais étudiant, à Rouen, la ville possédait un tramway. Au moment du « tout voiture », le tramway a été supprimé. Aujourd'hui, le métro-bus, - qui est un nouveau tramway - a été rétabli. On a supprimé en France plus de 10 000 kilomètres de voies ferrées. Nous possédons le meilleur maillage ferroviaire du monde. Certains de nos pays voisins ont développé le tram-train, permettant au train d'entrer à l'intérieur de la ville, ce qui permet une bonne desserte entre la ville et les territoires ruraux environnants. En outre, cela permet souvent pour une famille de se passer d'une voiture, ce qui est bénéfique pour l'environnement.
M. Jean-Marc Boyer. - Je partage votre opinion selon laquelle les lignes droites sont différentes d'une région à une autre. Aussi il faut signaler les tronçons dangereux, mais ne pas avoir une mesure générale. Vos arguments ne sont toutefois pas partagés par M. Barbe, délégué interministériel à la sécurité routière. Pouvez-vous d'ici le 1er juillet essayer d'infléchir la position prise par le gouvernement ?
M. Jean-Claude Luche. - Je crains que les personnes actuellement bloquées dans les embouteillages soient déçues par la réflexion que nous avons en ce moment. J'ai écrit à la ministre des Transports pour l'aménagement d'une deux fois deux voies dans mon département. Elle m'a renvoyé aux réflexions en cours dans le cadre des assises de la mobilité. La mobilité, c'est le vélo, mais aussi l'avion et les transports au commun. Nous la vivons au quotidien. Aussi, une équité territoriale entre nos concitoyens est indispensable. Or le développement des véhicules électriques dans les territoires ruraux ne se fera pas demain, ni même après-demain.
Il faut en outre intégrer dans les réflexions le relief, les conditions climatiques, les bassins d'emploi. Nous ne vivons pas dans un département rural comme dans une métropole. Depuis la loi NOTRe, les compétences des collectivités sont fortement cloisonnées. Vous souhaitez un renforcement du rôle des régions en matière de transport. Or elles sont déjà compétentes en matière de transports interrégionaux. Et, je constate que chez moi, l'aménagement du réseau et des transports collectifs routiers n'est pas une priorité régionale. Aussi, ce qui est important, pour améliorer la mobilité, c'est d'établir une méthode de travail pour les décennies qui viennent, pour que nous participions ensemble au développement de la France.
M. Jean-Michel Houllegatte. - La mobilité pendulaire des salariés qui résident en dehors des agglomérations entraîne une obstruction de nos axes urbains, le matin, le midi et le soir. Les entreprises élaborent des plans de déplacement d'entreprise. Pour moi, le versement transport a un effet déresponsabilisant. Aujourd'hui, les collectivités territoriales font des efforts sur la création d'aires de covoiturage, mais elles sont gérées sur la base du volontariat. Peut-on imaginer des plans de déplacement inter entreprises ? Est-il possible de prévoir une bonification pour celles qui se lanceraient dans cette démarche ?
M. Jérôme Bignon. -Nous voyageons beaucoup plus que les générations précédentes. Aussi, il faut organiser des transports soutenables. Les zones rurales ne doivent pas être les parents pauvres de la mobilité. La voiture est souvent le seul moyen de communication, ce qui accroit très fortement l'isolement des personnes âgées. Quelles sont les pistes envisagées pour renforcer l'accessibilité des transports dans les zones peu desservies ? Comment renforcer l'intermodalité en zone rurale ?
Pour le gouvernement, le numérique est la réponse pour fluidifier les déplacements au quotidien. Or, en raison de l'état actuel de couverture du territoire et de l'appropriation de ces technologies, le risque est de voir se renforcer les inégalités territoriales en matière de transport.
M. Frédéric Marchand. - Vendredi dernier, j'ai participé à la remise des premiers prix de French Mobility. La France n'est pas si mauvaise que cela en matière d'innovation. Il pourrait être intéressant de rassembler sur une plateforme les bonnes initiatives. A titre d'exemple, dans mon département, douze communes ont fait en sorte que le covoiturage en direction de la métropole lilloise soit organisé, notamment pour ceux qui sont en recherche d'emploi. De nombreuses initiatives existent, mais elles ne sont pas assez connues.
En matière de tarification, Dunkerque vient de voter la gratuité totale au 1er septembre. Une expérimentation avait été menée sur le weekend. On a constaté un bond de l'utilisation des transports en commun de 70 % le dimanche. Le coût est de 4 millions d'euros pour la communauté urbaine. C'est un choix politique qui est assumé.
Mme Françoise Cartron. - D'ici 5 à 10 ans, la voiture électrique va devenir une réalité. Elle va recouper la problématique de l'inégalité territoriale. Il y aura pour certains véhicules une nécessité d'adapter les équipements routiers. Cette adaptation sera-t-elle compatible avec le réseau routier départemental ?
On nous parle, dans un deuxième temps, du développement d'un modèle de voiture connecté, qui ne nécessitera plus d'adaptation sophistiquée, mais dont le coût sera élevé. Cette inégalité sera liée au revenu des utilisateurs : il y aura ceux qui pourront s'équiper d'une voiture connectée et performante d'un côté, et les autres de l'autre.
M. Michel Neugnot. - Pour le train, au-delà de la mobilité partout et pour tous, il faut parler du bon moyen de transport, au bon endroit et au bon moment. Le train n'est pas l'alpha et l'oméga du transport collectif.
En outre, si l'on souhaite développer la mobilité connectée, il faut également accepter les contraintes que cela engendre. Ainsi, on va vers la fin des guichets dans les gares.
Le train est un vecteur essentiel de transport, car c'est le plus rigide. La programmation des dessertes se fait deux ans et demi à l'avance. On souhaite ramener le train vers les pôles d'intermodalités. Mais il faut aussi accepter le principe de fermeture de lignes, quand il n'y a pas assez de voyageurs. Un train comportant moins de 50 voyageurs coûte dix fois plus que le car.
Les régions de France sont favorables à une utilisation du train dans les agglomérations, sous forme de tram-train, mais en en donnant la responsabilité aux agglomérations. En outre, il ne faut pas oublier que lorsqu'un train pénètre dans une ville, cela engendre des arrêts supplémentaires. Cela perturbe l'organisation du train, qui reste un outil massifié de moyenne et longue distance. S'il y a trop d'arrêts, les gens vont préférer prendre la voiture. On n'utilise le train que si son temps nominal est égal ou inférieur à la voiture. C'est pourquoi, si les métropoles peuvent obtenir des sillons disponibles, il faudra fixer des priorités.
Les transports scolaires sont divers et variés sur l'ensemble du territoire. Deux problèmes se posent : d'une part, l'harmonisation de la qualité de service sur le territoire d'une région, d'autre part, le financement. On parle de gratuité, mais il faut aussi parler du financement par le bloc communal. En Bourgogne-Franche-Comté, dans certains départements, le bloc communal n'est pas sollicité, alors que dans d'autres départements, il est sollicité à 55 %. La question de l'équité territoriale de traitement va se poser.
Il faut coordonner la mobilité en milieu rural. Si rien n'est fait, un coût global supplémentaire sera payé. Certes, il faut un architecte, mais il faut aussi un rôle d'animation au plus près des territoires, que peuvent jouer les collectivités territoriales.
Le rapport du comité d'orientation des infrastructures apportera des réponses complémentaires.
M. Patrick Oliva. - Nous avons consacré une journée complète d'auditions à l'approvisionnement électrique, avec tous les acteurs de la production électrique. Les installations existantes permettent de répondre à 80 à 85 % de la demande. Il reste 15 à 20 % des besoins à couvrir. Une étude approfondie sera nécessaire, notamment pour identifier et trouver une solution aux points noirs, comme les jours de départ massif en vacances. Il n'est pas question de retourner à des installations de type thermique. Il faut en revanche bénéficier de la génération décentralisée de production d'électricité. En outre, le véhicule électrique n'est pas réservé à la ville. Il doit trouver dans les territoires ruraux une application, à condition de développer l'autopartage, et la création de stations de charge partagée. Toutes les préconisations de notre atelier sont conformes à un travail fait au niveau européen. Ainsi la voiture électrique française sera capable de s'intégrer dans un contexte européen. En outre, il y a 20 ans, on ne parlait que de l'hydrogène. Aujourd'hui, le développement du véhicule électrique se fait en France sur des batteries et stations de recharge. En fait, il faut développer les deux technologies, et des équipements financés à la fois par des fonds publics et privés. L'Allemagne s'intéresse beaucoup plus à la voiture à hydrogène. Il faut porter le débat du double équipement au niveau national.
Il est nécessaire, en milieu urbain, que des installations dédiées à la mobilité douce soient prévues. Nous proposons ainsi que dans les villes, au moins deux grandes dessertes pour une mobilité douce soient prévues. En outre, la jonction de villes proches fait partie de nos préconisations. Nous souhaitons également la création d'un code de la rue, qui doit postuler la centralité de la personne humaine, et donc de la marche. Pour le vélo, il doit le plus possible se pratiquer sur des espaces dédiés, non sur des espaces plaqués. Enfin, pour trouver des zones de convergences agréables et pacifiées, il faut tendre vers une circulation à 30 km/h. Cette vitesse est compatible avec une meilleure sécurité routière.
En France, le vélo représente 2 % des déplacements. Cette part est supérieure à 10 % chez la plupart de nos voisins européens. Un plan ambitieux doit être mis en place afin de porter la part de déplacements à vélo à 10 à 20 %. Cela permettra également d'offrir une solution au problème de sédentarité.
M. Betrand Pancher. - Les infrastructures connectées peuvent être prévues en milieu rural. La stabilité technologique est une vraie question qu'il faut se poser. J'ai interrogé les sociétés d'autoroute sur le coût d'un équipement de reconnaissance de basse tension. Il est estimé à 500 millions d'euros. Entre le moment où ces premiers corridors vont être installés et l'arrivée des premières voitures, plusieurs années vont passer. La sagesse recommande de prévoir d'abord quelques corridors, puis de voir comment les choses s'équilibrent. En outre, les constructeurs automobiles sont aujourd'hui incapables de prévoir les évolutions technologiques.
Aujourd'hui le véhicule électrique dispose d'une autonomie de 400 kilomètres et son autonomie augmente de 10 % par an. En milieu rural, l'hybride rechargeable a de l'avenir. La voiture Prius coûte encore 40 000 euros, mais on peut désormais emprunter pour ces modèles sur 7 à 8 ans.
Les voitures sans chauffeur vont prochainement arriver chez nous. De même, les petits véhicules légers sont en plein développement, comme les trottinettes électriques. En outre, des vraies révolutions sont en cours en termes de sécurité. Ainsi, une start-up est en train de développer des gants de moto connectés qui envoient des signaux aux véhicules qui arrivent en cas de chute à moto.
Une directive européenne va exiger que toutes les données des États membres puissent être transmises dans des espaces nationaux, selon des moyens de contrôle définis par ces mêmes États nationaux. En matière de développement des données, il faut faire en sorte que les GAFA ne viennent pas simplement se servir, et travailler sur un retour sur le profit réalisé grâce au traitement des données. Cela pourra être prévu dans le prochain projet de loi.
Mme Valérie Lacroute. - En matière de gouvernance, il faudra être attentif, lors des discussions parlementaires, pour faire en sorte que la région soit certes chef de file, mais aussi pour prévoir un système assez souple, où chaque collectivité doit pouvoir trouver sa place. Cela doit également permettre à des collectivités de petite taille de réfléchir à ces questions, qui représentent un coût relativement important. L'un des enjeux essentiels est une bonne coordination entre les acteurs. En découle la question du financement. Ce qui est essentiel de retenir, c'est que les entreprises, par le versement transport, contribuent à l'offre de transport, et non à la tarification de celle-ci. Il n'a ainsi pas vocation à assurer la gratuité du transport, qui doit rester un choix politique de la collectivité.
Afin d'encourager les entreprises à développer des plans de déplacements entreprises, il est proposé qu'elles puissent participer au comité qui pourrait être mis en place et réunirait les collectivités territoriales, les usagers et les entreprises, afin de leur permettre de faire entendre leurs voix sur le niveau d'offre proposé par les collectivités territoriales. Enfin, une incitation fiscale pour encourager les entreprises à mettre en place un plan de déplacements entreprise est également à l'étude.
Plusieurs réunions de travail ont réuni le monde de la logistique. Une charte est en cours de rédaction, qui sera mise à disposition des collectivités territoriales, afin de permettre une vraie sensibilisation sur ce sujet.
Enfin, des assises de l'aérien devraient se tenir avant ou après l'été.
M. Noël de Saint-Pulgent. - Vous avez relayé une inquiétude réelle sur les moyens financiers des transports collectifs. Or, ce n'est pas une fatalité, l'exemple du SYTRAL montre que l'on peut y arriver : le taux de couverture dépasse les 50 %, avec une organisation et une tarification performantes.
Il faut tout d'abord travailler sur les dépenses. Ces dernières sont de deux ordres : le matériel, tout d'abord, qui est bien géré, et le reste - notamment les frais de personnel. Pour ces derniers, il ne faut pas se contenter de mises en concurrence régulières, mais il faut imposer des plans de productivité des personnels. En effet, aujourd'hui, les coûts de personnel augmentent plus vite que l'inflation.
Pour les recettes, il faut s'interroger sur le bien-fondé de certaines réductions. Un exemple frappant est le forfait illimité en Ile-de-France. Si un forfait domicile-travail est nécessaire, est-il logique qu'il couvre tous les déplacements du week-end ? A Londres, la carte Oyster permet une tarification en fonction de la distance parcourue. Nous préconisons également que, si la couverture des dépenses par les recettes, hors investissements, est inférieure à 15 %, il ne soit pas possible d'augmenter le versement transport. Un plan de redressement devra alors être mis en place. Toutes les associations de collectivités ont pris conscience des problématiques liées à la tarification et au versement transport.
En Suède, les grandes opérations d'urbanisme participent au financement des transports. C'est aussi le cas en Asie. En France, il semble plus difficile de mettre en place ce modèle car bien souvent les constructions sont préexistantes. Toutefois, autour du Stade de France, il n'est pas illogique que la vente des terrains permette de financer les efforts en matière de transport collectif.
L'écotaxe régionale est une solution possible pour la couverture des coûts externes des poids lourds. Trois solutions sont envisageables. La plus simple consiste en une augmentation de la TICPE. Toutefois, cette dernière porte principalement sur les véhicules légers, puisqu'elle est limitée à un certain seuil pour les poids lourds. En outre, la TICPE est plus élevée que dans tous les pays voisins. On sait que les poids lourds étrangers ne s'approvisionnent plus en France. Une deuxième solution serait de remettre en place l'écotaxe, mais l'ensemble des professionnels routiers y sont très fortement opposés. La dernière possibilité est d'instaurer une vignette forfaitaire, qui est peut-être moins intelligente, mais possède une plus grande acceptabilité sociale. Dans tous les cas, c'est un choix politique qu'il ne nous appartient pas de faire.
M. Gilles Savary. - La question de l'abaissement de la limitation de vitesse à 80 km/h n'a pas été débattue lors des assises de la mobilité. La délégation interministérielle à la sécurité routière a refusé que l'on y travaille. Pour preuve, les comptes rendus des assises de la mobilité ont été publiés le 13 décembre, et la mesure a été annoncée le 8 janvier par le Premier ministre. À mon sens, cela révèle des conflits entre administrations. La sécurité routière, qui, traditionnellement, est interministérielle, a beaucoup basculé du côté du ministère de l'Intérieur.
Aujourd'hui, aucun outil financier n'est prévu pour une remise à niveau du réseau départemental routier. Or les départements doivent déjà faire face à des dépenses sociales élevées non compensées. Souvent la voirie départementale est la variable budgétaire d'ajustement. Or des aménagements ponctuels des routes sont nécessaires, afin d'améliorer leur qualité, ou pour remédier à la traversée de villes qui sont devenues de vraies rocades, à certaines heures de la journée.
Je m'inquiète également du fait que bien souvent, en matière de financement des transports, les solutions proposées concernent principalement le milieu urbain : on parle ainsi de péages urbains, de versement transport, ou encore de la dépénalisation des infractions au stationnement. Si un nouvel instrument financier est mis en place, il faudra le mutualiser avec le monde rural, notamment à travers le département.
L'expérimentation de la limitation à 80 km/h n'est pas concluante. En effet, si le nombre d'accidents a baissé, il n'est pas possible d'en expliquer les raisons, car de nombreux travaux avaient lieu à la même période, et la vitesse était de manière générale très réduite. Tout le monde s'accorde pour dire que les résultats obtenus ne sont pas significatifs.
M. Hervé Maurey. - Nous avons mis en place un groupe de travail, commun avec la commission des lois, qui doit établir des propositions.
M. Gilles Savary. - Pour moi, un travail pointilliste est nécessaire sur les infrastructures.
La mise en place d'une journée de la sécurité routière doit permettre de toucher toutes les écoles. Le contenu variera en fonction de l'âge des enfants.
Le fabuleux destin du véhicule connecté mérite quelques nuances. En effet, plus on est assisté, plus la reprise du volant s'effectue avec un délai de retard. Pour moi, la seule voiture qui peut être mise en circulation est la voiture autonome de niveau 5, et sur voie dédiée. En effet, si le réseau est ouvert à toutes les avancées partielles, on risque une augmentation du nombre des accidents. En outre, la gendarmerie nous signale la possibilité de piratages. Cela peut empêcher, par exemple, de contrebraquer pour rétablir une trajectoire. La gendarmerie est d'ailleurs très sensibilisée à cette question.
La catastrophe de Millas montre l'ampleur des responsabilités qui pèsent sur un chauffeur de car scolaire. Il faut également tirer les conséquences de la catastrophe de Puisseguin. Les bus sont des véhicules très inflammables. Nous travaillons actuellement sur le développement d'extincteurs automatiques, comme cela peut exister dans les voitures de Formule 1. Enfin, en matière de sûreté, il faudrait avoir un bouton d'alerte sur chaque car scolaire, radioconnecté à la gendarmerie la plus proche. Mais, même si cela n'est pas rassurant, la sécurité totale n'existe pas.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.