Mercredi 30 mars 2016
- Présidence de M. Jean Claude Lenoir, président, puis de Mme Elisabeth Lamure, vice-présidente -Mobilisation du foncier public en faveur du logement - Présentation du deuxième rapport de la CNAUF
La réunion est ouverte à 9 h 37.
M. Jean-Claude Lenoir, président. - Nous accueillons Thierry Repentin, qui a participé durant de nombreuses années aux travaux de notre commission.
Je rappelle brièvement que Thierry Repentin est président de la Commission nationale de l'aménagement, de l'urbanisme et du foncier (CNAUF), et qu'il a remis à ce titre, le 17 février dernier, son rapport annuel à Mme Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l'habitat durable, sur le bilan de l'application de la loi du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement. Thierry Repentin a par ailleurs été désigné délégué interministériel à la mixité sociale dans l'habitat. Il est accompagné par son adjoint, M. Simon Molesin.
Contrairement à 2014, où le bilan qui nous avait été présenté était mitigé - c'était l'année suivant le vote de la loi - il semble, à la lecture du rapport qui a été remis, que la situation soit différente en 2015. Le rythme des cessions s'est accéléré. Certaines de vos recommandations ont trouvé une traduction législative, notamment dans la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques dite loi Macron. Je pense en particulier à l'extension de la décote sur les équipements publics à l'ensemble des cessions de terrains concernés, ou encore à l'association des acteurs de l'aménagement aux travaux de la CNAUF.
Monsieur le président, vous allez nous rappeler les principales conclusions et recommandations formulées dans votre rapport. Je vous donne tout de suite la parole.
M. Thierry Repentin, président de la CNAUF. - Mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, je suis très heureux de me retrouver parmi vous.
J'ai en effet passé dix ans dans ces murs, au sein d'une commission qui a la chance d'avoir un champ de compétences si vaste qu'elle constitue sans doute la commission la plus intéressante du Sénat.
Je suis, en tout état de cause, ravi d'être à nouveau devant vous, après une première audition l'an dernier, en tant que président de la CNAUF.
Je rappelle que cette institution a été créée par le Parlement, dans le cadre de la loi du 18 janvier 2013, dite loi sur la décote, qui permet de vendre le foncier d'État et des établissements publics avec une décote.
L'an dernier, j'avais pris mes fonctions six mois avant d'être auditionné pour la première fois par votre commission. Le bilan de la loi était alors mitigé et modeste, ce qui démontre que des réformes de structure nécessitent du temps pour être appréhendées par celles et ceux qui doivent les appliquer.
Chacun sait que toutes les lois, notamment celles concernant des politiques territoriales, nécessitent un temps d'appropriation et parfois - c'est l'objet de ma mission - un service « après-vote » dans la durée et de façon constante auprès des préfets de département et de région.
On en voit aujourd'hui les premiers résultats, qui me semblent intéressants en termes qualitatifs - même si j'ai rencontré plusieurs obstacles. Quels sont-ils ? Premier obstacle : la loi a conduit à un changement de paradigme pour toutes les administrations d'État. Alors qu'il s'agissait précédemment de vendre au plus offrant, dans un souci constitutionnel, de respect du principe d'égalité devant la loi et devant les charges publiques, cette loi permet désormais de vendre au juste prix pour réaliser des logements à un prix abordable pour nos concitoyens.
Si nous sommes sur le bon chemin, j'ai pu constater à quel point un certain nombre de ministères savaient préserver leur intérêt et que l'idée de vendre avec une décote n'est pas encore totalement ancrée dans les esprits de certaines administrations centrales.
La deuxième difficulté à laquelle j'ai été confronté - je le suis encore, mais de moins en moins - réside dans le fait que les collectivités n'avaient pas anticipé cette loi. Nombre des terrains appartenant à l'État ou à ses établissements n'étaient et ne sont toujours pas constructibles au regard des documents d'urbanisme en vigueur, les collectivités locales, lorsqu'elles ont établi leurs documents d'urbanisme, ont en effet laissé ces zones soit en zones inconstructibles, soit en zones à vocation militaire ou hospitalière, tenant compte du fait qu'elles étaient propriétés d'État, avec une destination bien définie.
Il est donc nécessaire de faire évoluer les documents d'urbanisme avant de pouvoir concrétiser les cessions, et quelques maires - de moins en moins, beaucoup de collectivités locales s'étant engagées dans des modifications de leur plan local d'urbanisme (PLU) - me demandent de leur laisser encore quelques mois afin de modifier le PLU.
Pour autant, le rythme des cessions s'est nettement accéléré, et le bilan que je vous présente me semble plus positif.
En termes quantitatifs, je vous rappelle que, pour les deux seules années 2013 et 2014, période de mise en place de la loi du 18 janvier 2013, seuls treize terrains avaient été cédés.
Au cours de l'année 2015, les différents ministères et établissements publics ont signé soixante et onze cessions, ce qui permettra de programmer sur ces terrains, désormais propriétés soit de collectivités locales, soit d'un organisme choisi par la collectivité locale, près de huit mille logements, dont 45 % de logements sociaux et 55 % de logements privés ou bénéficiant d'un dispositif de défiscalisation, au choix des collectivités locales.
Ces soixante et onze cessions se scindent en trente-sept terrains appartenant à l'État, soit un peu plus de dix-sept hectares, le reste appartenant notamment à la SNCF - vingt-six terrains sur trente-six hectares.
Quant à la SOVAFIM, société de valorisation foncière de l'immobilier de l'État, elle a cédé cinq terrains devant permettre la construction de six cents logements, les établissements publics de santé concernés par l'application de la loi depuis le 1er janvier 2015, en ayant cédé trois.
Ces résultats sont le fruit d'une mobilisation renforcée. La CNAUF n'a été installée qu'à l'été 2014, alors même qu'elle avait été créée par la loi de janvier 2013. Il y a donc sans doute eu, entre janvier 2013 et l'été 2014, un peu de temps perdu.
Le Président de la République a lui-même présidé une réunion, en juin dernier, avec les huit ministres propriétaires de foncier, le Premier ministre et moi-même, en fixant une feuille de route pour l'année 2015, avec un objectif incompressible d'au moins soixante cessions permettant la construction de cinq mille logements pour la fin 2015. Cela a incontestablement favorisé la mobilisation des ministères.
Le Premier ministre, en juillet dernier, a adressé une circulaire à l'ensemble des préfets pour les mobiliser sur l'accélération des cessions, réaffirmant leur leadership en matière de négociation. C'est au préfet et non au ministère propriétaire du terrain de négocier, car c'est le préfet qui représente l'unité des ministères. Ceci évite les stratégies individuelles.
Je me rends moi-même à un rythme hebdomadaire dans les régions les plus tendues pour m'assurer du déblocage des dossiers, afin que soient mobilisés au mieux les terrains inutilisés. Je suis parfois confronté à des négociations qui remontent à 2005 et qui se finalisent aujourd'hui. Parmi les plus difficiles, le dossier de la gare Saint-Sauveur, à Lille, a été ouvert en 2005, et l'accord trouvé en décembre 2015. Ce sont des cas parfois délicats et la mobilisation des préfets est cruciale.
Pour poursuivre cette dynamique, notamment vis-à-vis des préfets, j'ai demandé au ministre de l'intérieur d'intervenir devant eux à l'occasion de leur réunion mensuelle, afin qu'ils aient conscience que ces cessions sont une priorité.
J'ai été comme vous parlementaire. Je me rends compte qu'une telle loi peut n'être appliquée qu'à la condition que des gens soient missionnés pour le faire, d'autant plus que son application concerne les collectivités territoriales et nécessite une connaissance technique.
Les préfets sont « bombardés » de priorités successives. C'est pourquoi, il est indispensable que quelqu'un leur rappelle au quotidien les priorités, leur remémore leur feuille de route et leur rappelle ce que l'on attend d'eux.
J'ai pris l'initiative de créer un comité de suivi mensuel réunissant l'ensemble des services concernés et la SNCF, pour établir chaque mois, un bilan des cessions, des blocages, des difficultés à lever et pour permettre la mise à jour de la liste des terrains à vendre, car il faut prévoir l'avenir et trouver des terrains disponibles.
Un travail de pédagogie a été conduit auprès des différents acteurs.
En 2015, le dispositif de mobilisation du foncier a connu plusieurs évolutions législatives et réglementaires. Un texte de loi, fût-il très bon, ne peut jamais prévoir tous les cas de figures auxquels on est confronté.
Monsieur le président a indiqué que, dans la loi dite loi Macron, nous tenons compte désormais, pour diminuer le prix de vente, du coût nécessaire à l'édification des services publics pour accueillir les populations. Cette disposition n'était pas prévue à l'origine.
Nous avons aussi soutenu des propositions faites par deux de vos collègues députés, Jean-Marie Tétart et Audrey Linkenheld, qui ont rédigé un rapport sur l'application de la loi de janvier 2013. Vous avez ainsi lors de l'examen de la loi de finances pour 2016 ouvert la décote aux cessions d'anciens logements existants, désormais vacants. Il s'agit d'anciennes casernes de gendarmerie, des douanes. L'administration, notamment Bercy, considérait qu'il ne s'agissait pas de logements nouveaux. La décote a donc été ouverte à ce type de logements qui nécessitent une réhabilitation très lourde avant de pouvoir être remis sur le marché. Si on ne diminue pas le prix de vente, on ne peut équilibrer les opérations.
Le décret d'application va être publié prochainement, et on a déjà repéré d'anciennes casernes à Thonon-les-Bains, à Saint-Louis et à Villé, en Alsace, qui seront bientôt cessibles dès lors que la décote pourra être appliquée.
Deuxième avancée sur laquelle il peut y avoir un débat j'en conviens : lors des discussions concernant la loi de programmation militaire (LPM), un amendement a été adopté au Sénat pour éviter les décotes supérieures à 30 % concernant les biens appartenant au ministère de la défense, et ce jusqu'au 31 décembre 2019.
Cet amendement était présenté par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées de la Haute assemblée, qui souhaitait sanctuariser les recettes de l'armée, et notamment de la vente du foncier militaire.
Il se trouve que le ministre de la défense lui-même, dans les recettes qu'il escomptait dans la LPM, avait anticipé le fait qu'il vendrait son foncier avec une décote. Néanmoins, cette disposition a été votée. Dès lors, je n'ai pu négocier de ventes. Toutes celles que nous avions faites auparavant à Nantes, Bordeaux, Rodez ou Papeete, se sont toutes faites avec une décote supérieure à 60 %, les emprises militaires ayant des contraintes de dépollution, de désamiantage et de création de réseaux telles qu'on n'arrive pas à équilibrer une opération sans décote.
Le Gouvernement m'avait indiqué qu'un amendement en loi de finances 2016 viendrait abroger cette disposition. Cela a été le cas. Je retrouve donc une certaine capacité à négocier et, entre l'été et décembre 2015, connaissant les intentions du Gouvernement, j'ai continué à négocier en anticipant le fait que la loi de finances 2016 me permettrait d'avoir à nouveau une décote aussi importante qu'auparavant.
J'espère conclure dans l'année des accords avec des collectivités locales pour réaliser des logements sur d'anciennes bases militaires, comme à Toulon, Fréjus, Roquebrune-Cap-Martin, Tours, Saint-Malo, Rennes, Montpellier ou Toulouse.
Enfin, dernière avancée de 2015 en termes réglementaires et législatifs : l'État pourra désormais opérer des cessions suivant la procédure de gré à gré. Dès lors que l'État vend un terrain et que la commune ne fait pas jouer son droit de priorité, l'État pourra demander directement à un organisme de logement social s'il est intéressé, plutôt que de faire un appel d'offres qui nécessiterait au moins six mois de délai, l'idée étant de faire gagner un peu de temps sur les ventes. Ce décret est aujourd'hui en cours de finalisation.
En conclusion, je désire attirer votre attention sur quelques propositions.
Premièrement, la transparence est nécessaire, et je souhaite que la liste des terrains à céder ou des terrains qui seront cessibles dans le futur soit à l'avenir publique, ce qui n'est pas encore totalement le cas aujourd'hui. Cela permettra à des opérateurs de se positionner, et à des collectivités locales de ne pas découvrir qu'une éventuelle cession peut se faire sur son territoire, sans que le maire ou le président de l'EPCI ne soient avertis.
Deuxièmement, il convient de connaître pour chaque cession l'effort financier consenti par l'État et ses établissements publics, car de nombreux efforts sont faits dans le cadre de prix négociés. Ces efforts n'étant pas connus, c'est un équivalent d'aide à la pierre qui n'est pas évalué. Or, je considère que cette ristourne nationale de 48 millions d'euros de non-recettes octroyée par l'État en 2015 au titre de la décote doit être valorisée dans le cadre de la politique du logement.
Troisièmement recommandation : il faut que les listes soient plus régulièrement revues par les services déconcentrés de l'État, ce qui incitera les ministères à partager davantage les informations concernant les propriétés disponibles, car je n'ai pas encore trouvé un document unique recensant l'ensemble des propriétés de l'État disponibles.
La quatrième proposition consiste à amplifier les résultats. On pourrait étudier l'opportunité d'élargir le dispositif de la décote à des établissements qui ne sont pour le moment pas assujettis. Je pense au ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, où il existe parfois de très grandes propriétés inutilisées.
Il est par ailleurs indispensable que l'ensemble des terrains disponibles soit mobilisés plus systématiquement dans les territoires où on constate un manque cruel de logements abordables. C'est pourquoi la CNAUF souhaite que l'action des services de l'État prenne place sur les territoires des communes en rattrapage, au titre de l'article 55 de la loi SRU, car on ne peut demander un effort aux collectivités locales si l'État est lui-même propriétaire de terrains qu'il ne valorise pas.
Il faut des années de pratique pour que ces outils soient utilisés dans le cadre de la gouvernance de la politique d'aménagement du territoire et de la politique du logement.
J'espère avoir l'opportunité de revenir dans un an et pouvoir vous présenter un bilan meilleur encore que celui de 2015, car j'ai la certitude qu'il existe des marges de progression dans ce domaine.
M. Jean-Claude Lenoir, président. - Merci pour ce rapport extrêmement concis.
Mme Dominique Estrosi Sassone. - Monsieur le président et cher Thierry, la dynamique est effectivement en place - c'est le moins que l'on puisse dire - par rapport à ce bilan modeste que vous nous aviez exposé il y a un peu plus d'un an.
Cependant, je pense que la vigilance doit être permanente, plus particulièrement dans les territoires tendus, là où se situent les besoins.
Aujourd'hui, la mobilisation n'est pas uniforme, s'agissant notamment des territoires tendus, peu dotés de foncier public. Dans les Alpes-Maritimes, lorsqu'on parle de foncier public, on n'évoque que la base aérienne de Roquebrune-Cap-Martin. Les autres opportunités sont, ou portion congrue ou, pour l'instant, inconnues. Pour autant, des collectivités comme la ville de Nice ont fait des propositions auxquelles le préfet n'a pas répondu.
Sur ces territoires, la mobilisation du foncier public semble complexe pour de multiples raisons. Les différences de traitement sont une réalité. Ce n'est pas forcément une critique, mais ceci entraîne des problèmes d'équité entre territoires.
Des listes régionales sont établies. Elles sont perfectibles, comme toutes les listes. Sont-elles vraiment discutées au niveau local, voire régional ? Illustrent-elles la volonté de retenir principalement du foncier immédiatement mobilisable, ou du foncier qui peut avoir de réels potentiels, mais plus difficilement négociable ?
Ces listes doivent rester évolutives, mais ce n'est pas le cas aujourd'hui. On peut aussi considérer qu'elles peuvent être discutées avec les grandes agglomérations. C'est là que se trouvent les besoins et le foncier potentiellement mobilisable, certaines stratégies de territoires ou de développement économique devant entrer en ligne de compte.
S'agissant de l'effort financier de l'État, il me semble qu'il y a dans le rapport un manque de clarté. Celui-ci annonce une décote de 48,5 millions d'euros pour l'année 2015, alors que les deux tableaux en annexe concernant la cession de terrain de l'État en faveur du logement et les cessions des terrains des établissements publics affichent respectivement 36,5 millions d'euros et 0,1 million d'euros, soit 36,6 millions d'euros. Dans ce cas, l'effort rapporté au logement est nettement moins important que celui qui est annoncé. Puis-je avoir des précisions à ce sujet ?
Vous avez dit que le décret sur les cessions de gré à gré était en cours d'élaboration. Qu'en est-il du décret qui devrait permettre à la SOVAFIM de céder les terrains avec décote ? Le rapport est silencieux sur ce point.
Il en va de même des décrets de la loi dite Macron, en particulier celui concernant les aménageurs. Il devait être publié en mars 2016. Nous sommes le 30 mars : qu'en est-il ? Comment les dispositifs de décote vont-ils être mis en place par rapport aux opérations de réhabilitation ? Peut-on avoir des pistes ?
Par ailleurs, les préfets sont des interlocuteurs privilégiés, mais il n'existe pas forcément de dialogue avec eux. Je ne parle pas du préfet des Alpes-Maritimes, qui est très impliqué en matière de problématique de logement. Nous avons renvoyé une liste modifiée par rapport à celle qu'on nous avait transmise, nous n'avons eu aucune réponse !
Nous sommes sur un territoire tendu, où on recense de nombreux besoins. On montre qu'on veut aller de l'avant et accompagner le dispositif, mais mobiliser ce foncier réclame du temps, et on n'a pas de retour.
S'agissant enfin de France Domaine, les ventes ne doivent pas se faire au prix le plus élevé possible, mais au prix le plus juste pour parvenir à équilibrer l'opération. Le travail réalisé par France Domaine est-il plus transparent quant à l'évaluation des biens ?
Pour les collectivités, ces évaluations constituent un véritable problème. Elles varient de façon extrêmement importante en très peu de temps, rendant impossible l'équilibre des opérations.
M. Martial Bourquin. - Je remercie le président Repentin pour son exposé. En tant qu'élu, il a défendu longtemps l'idée que les terrains qui sont à l'État doivent être à la disposition des collectivités lorsqu'elles veulent faire du logement social.
Tout naturellement, le fait qu'il ait pris des responsabilités à la tête de cette commission a engendré beaucoup d'espoirs.
Je suis intervenu plusieurs fois, à propos d'un terrain de RFF situé en plein coeur d'Audincourt, la ville dont je suis maire, dont on n'avait jamais rien pu faire, non que RFF n'ait pas voulu le vendre, mais parce que son prix au mètre carré, qui était basé sur celui des mètres carrés nationaux, représentait un chiffre effrayant. RFF l'avait fixé à 90 euros, alors que les Domaines l'avaient estimé à 8 euros en fonction des prix de la région.
La CNAUF a totalement joué son rôle dans ce domaine. On devrait signer la cession sous peu. Le projet comporte trois cents logements et mélange prêt locatif social (PLS), accession sociale à la propriété et logement privé.
Ceci démontre que, s'il est bon de voter des lois, le suivi de celles-ci est tout aussi important. La médiation de la CNAUF s'est révélée précieuse et a permis de trouver un compromis. Le volontarisme politique est essentiel - et je crois qu'il existe du côté de la CNAUF.
Je crois aussi que les préfets doivent jouer leur rôle. Durant les négociations, le préfet a également servi de médiateur et a fait en sorte que les choses débouchent.
Cette politique est très importante, surtout aujourd'hui, avec des taux d'intérêt bas et un secteur du bâtiment dont l'activité repart à la hausse. De telles friches constituent un vrai problème en milieu urbain.
Lorsqu'on fait un PLU, il faut impérativement y intégrer ces friches. Si l'on veut redessiner la ville et présenter un projet sur vingt ans ou trente ans, il est nécessaire d'en maîtriser la trame. Lorsque c'est le cas, on peut dessiner et mettre en oeuvre un projet urbain.
Je veux donc témoigner de l'efficacité de la CNAUF et du fait que cette loi a constitué une bonne chose pour les communes, les agglomérations, l'État, mais aussi pour le logement en général.
M. Michel Le Scouarnec. - Une observation tout d'abord : la transparence se met en place par rapport aux terrains et aux cessions, dans chaque département. Ceci va aider les maires à établir les PLU. Je voulais surtout attirer votre attention sur une des grandes difficultés de nos départements littoraux. Il existe dans le Morbihan un mouvement des maires et des conseillers municipaux très important par rapport à l'urbanisation des « dents creuses » dans les hameaux. Vous n'êtes pas forcément en mesure de résoudre ces difficultés, mais deux lois se superposent ici, la loi « littoral », qui interdit d'étendre les hameaux, et la loi ALUR, qui interdit de construire à l'intérieur des hameaux, alors que cela paraît aux maires, contraire à la philosophie de la loi, qui est de densifier, d'économiser le foncier agricole.
Pratiquement tous nos conseils municipaux, de toutes tendances politiques, émettent des voeux pour trouver une solution. Je voudrais que l'on réussisse à changer cet état de choses, car il existe des situations de tension dans le logement. Il n'y a donc que des raisons favorables pour remédier à une erreur dont nous sommes responsables - et qui va durer un certain temps. Plus vite on aura réglé ce point, mieux ce sera pour tout le monde, pour les populations, mais également pour les élus, qui attendent beaucoup des interventions des uns et des autres.
M. Daniel Dubois. - Je salue Thierry Repentin et je veux dire combien j'ai plaisir à le retrouver ici. Je souhaiterais lui dire aussi que ses propos ont toujours les mêmes qualités de clarté et de transparence.
Je désire faire deux observations à propos du suivi. Il est évident - vous l'avez démontré à travers la CNAUF - que, sans comité de suivi, on est « à côté de la plaque ».
Vous avez multiplié par cinq la vente de terrains de l'État : cela démontre bien la nécessité absolue de ce suivi. Je pense même que l'on ferait mieux de faire moins de lois et de mieux les suivre. Le pays y gagnerait en efficacité !
En second lieu, ainsi qu'il a déjà été dit, il existe un véritable problème avec France Domaine en matière de prix. Vous dites que l'État va évaluer l'effort qu'il fait dans le financement du logement social. Mais quelle est la valeur d'un terrain destiné à recevoir des logements sociaux ? C'est tout simplement le prix d'équilibre de l'opération. La preuve : beaucoup de terrains demeurent en stock parce qu'ils sont trop chers.
Je voudrais à présent élargir mon propos. Quid des territoires ruraux ? Bien entendu, les territoires tendus doivent être une priorité mais ceci ne peut se faire en abandonnant les autres territoires. Cela devient insupportable ! Je suis sénateur d'un département de 782 communes. Quand on a retiré les villes, on compte environ 350 habitants par commune.
Si je fais un sondage auprès des maires, 90 % d'entre eux vont me dire que, quelle que soit la « dent creuse », l'État et l'administration trouvent toujours un moyen de faire en sorte qu'on ne puisse pas construire : soit on est en limite du territoire, soit il faut l'affouiller parce qu'il peut y avoir quelque chose d'intéressant dans le sous-sol, comme sur ce terrain constructible de 1 200 mètres carrés vendu par la communauté de communes en plein centre du village. Aujourd'hui la Direction régionale des affaires culturelles (DRAC) demande de procéder à des fouilles. Résultat : personne n'y construira peut-être jamais rien !
Tous les moyens sont bons aujourd'hui pour l'administration pour ne plus construire, en reportant la responsabilité sur les agriculteurs et en expliquant que c'est la commission de la consommation des espaces agricoles qui a émis un avis défavorable, alors que ladite commission est pilotée par l'administration !
Enfin, vous êtes aussi en charge de la mixité. Je voudrais recueillir votre avis sur la politique de peuplement dans les quartiers sensibles. Beaucoup de directeurs d'office d'HLM l'appliquent sans le dire, mais avec un vrai risque pour eux. Ce sujet peut-il être un jour clairement abordé, d'autant que, dans certains quartiers, il faut aujourd'hui oser assumer ces priorités et cette responsabilité ?
M. Marc Daunis. - Monsieur le ministre, monsieur le président, je rejoins ce qu'ont dit mes collègues à propos de l'application de la loi.
Merci pour la volonté de transparence que vous affichez à travers vos cinq premières propositions. Je la ressens d'autant mieux que j'avais très mal vécu la publication, dans la presse locale, d'une carte des terrains à céder appartenant à l'État, dont 90 % étaient situés sur ma commune.
Ceci m'amène au deuxième point que je souhaitais évoquer, au-delà du fait que je suis d'accord avec les priorités affichées. Quelle est votre gestion des priorités ?
Je vais vous donner un exemple. En premier lieu, des terrains de l'État dans les Alpes-maritimes ont été acquis pour servir de réserves foncières afin de soutenir la création de la première technopole d'Europe, Sofia Antipolis, qui représentent 90 % des terrains cités dans les Alpes-Maritimes, zone tendue.
En faire une opération de logement est absurde en plein coeur de la technopole : cela obère le nécessaire développement de cette dernière et sa consolidation au regard de l'emploi, que le Président de la République et le Gouvernement ont défini comme priorité. Comment gérez-vous ceci ?
En second lieu, l'État peut-il alimenter une spéculation immobilière, ces terrains ayant été acquis pour éviter, quelques décennies plus tard, la spéculation immobilière s'agissant d'un aménagement public, afin de pouvoir le poursuivre dans de bonnes conditions économiques ?
Ceci amena ma troisième question - et je rejoins ce qui a été dit à propos des estimations de France Domaine. Dans beaucoup d'opérations, ce qui donne sa valeur au terrain, c'est l'aménagement public. Si l'on considère que c'est l'aménageur public qui valorise le terrain au profit du propriétaire, qui doit payer les coûts d'aménagement ?
Dans l'exemple de la technopole, le syndicat n'ayant en l'occurrence pas contracté de dette, les coûts d'aménagement ont été supportés par la cession des terrains aménagés, permettant ainsi, grâce à un cercle vertueux, de réinvestir et de poursuivre l'opération sans endettement, au-delà des subventions, versées à l'époque, par le conseil général, l'État, la région ou les collectivités.
S'il y a captation de ces fonds publics au seul bénéfice d'un propriétaire, fût-il l'État - même partiellement - l'opération débouche forcément sur une impasse. En outre, les terrains en question ont fait l'objet d'une étude conjointe des collectivités et de l'État, et d'un projet d'aménagement n'incluant pas de logements familiaux ou sociaux.
Enfin, il constate que la commune en question est une des trois seules des Alpes-Maritimes à respecter la loi SRU !
Mme Dominique Estrosi Sassone. - Il faut raison garder.
M. Marc Daunis. - Plus que la garder, il aurait fallu en avoir auparavant pour ne pas se retrouver dans cette situation !
Si l'on veut éviter de nouveaux déséquilibres sur ces terrains de l'État, on doit prévoir une contractualisation au-delà de la seule publication des listes. J'ai compris que c'est votre volonté. Permettez-moi de vous en remercier. Dans ce cas particulier, je sais que nous arriverons à une issue heureuse !
M. Gérard César. - Monsieur le Président. C'est un réel plaisir de nous retrouver.
Je me félicite que les cessions puissent se faire de gré à gré. C'est une bonne solution : cela permettra d'avancer sur les dossiers.
S'agissant des casernes de gendarmerie, il en existe une à Libourne qui a été construite il y a quelques années : elle est invendable ! France Domaine cherche une solution, mais n'en trouve pas.
Ma question portera sur les relations avec la Société nationale immobilière (SNI). Sur l'initiative du président Lenoir, nous avons auditionné son président-directeur général, André Yché. Quelles sont vos relations avec lui ?
Par ailleurs, beaucoup de terrains disponibles appartiennent aujourd'hui aux ports autonomes. Quelle est la position de la CNAUF à leur sujet ?
M. Franck Montaugé. - Les points que je voulais aborder ont déjà été évoqués par certains.
Je vais toutefois essayer de poser ma question à la lumière de l'expérience que je vis à Auch, dans le Gers, en tant que maire et président d'agglomération.
Les problèmes se posent effectivement dans les zones tendues, mais le monde rural comporte la plupart du temps des zones non-tendues où l'on ne peut rien faire du patrimoine national, qui ne vaut rien. Je le vis depuis une quinzaine d'années à Auch s'agissant d'une caserne de douze hectares située en plein centre-ville, qui nécessite des coûts de réhabilitation faramineux, et dont les prix du marché, à la vente ou à la location, ne permettent pas d'amortir les coûts de réhabilitation.
France Domaine a procédé à un appel d'offres sur ce site, mais le promoteur s'est « cassé les dents » face à la réalité du marché local.
Auch, depuis maintenant deux ans, est concernée par la politique de la ville. Pouvez-vous, dans ce cadre, faire en sorte que les friches - militaires en l'occurrence - puissent concourir à la remise en valeur de nos territoires, et permettent ainsi de résoudre des problématiques de logement, en particulier social, dans une perspective de mixité sociale et géographique que l'on souhaite tous ?
Je pense qu'il serait intéressant que la CNAUF discute avec l'ANRU de ces problématiques. Tout le monde sait que, sur ces territoires ruraux, les collectivités et les opérateurs potentiels de la réhabilitation sont confrontés à la baisse des dotations et disposent de faibles capacités d'investissement. S'il faut racheter à l'État du foncier ou du bâti à des prix hors de proportion par rapport à la réalité du territoire, on risque de garder ces friches encore très longtemps !
M. Henri Tandonnet. - En tant que membre de cette commission, je veux témoigner de l'efficacité de Thierry Repentin. Sa qualité d'ancien parlementaire lui permet d'arbitrer entre les différents ministères propriétaires des terrains, le ministère des finances, et celui du budget, dont les positions différentes ne facilitent pas les choses.
Dans le dispositif, le problème de la décote est essentiel. J'ai moi-même vécu certains des exemples qui ont été décrits. On a souvent l'impression que ces décotes engendrent des disparités mais, en définitive, elles sont là pour permettre de parvenir à un résultat économique, comme l'a dit Daniel Dubois.
Comment simplifier ce système ? Tant qu'on ne connaît pas le prix de l'immeuble, on ne peut mener à bien l'opération.
À Nantes, l'opération a été facilitée par l'intervention de l'établissement public foncier local (EPFL). Ne pourrait-on donner plus d'importance au rôle des établissements publics fonciers locaux afin de trouver un opérateur, l'EPFL connaissant la valeur des immeubles ainsi que tous les aménagements nécessaires ? N'est-ce pas une piste qui peut faciliter les opérations futures ?
M. Joël Labbé. - J'apprécie également la présence du président Repentin qui fait preuve d'un véritable volontarisme dans ce domaine.
Il a exposé devant nous ses difficultés avec les préfets. Sans parler de mauvaise volonté, il me paraît difficile de croire qu'il n'existe pas de liste exhaustive recensant l'ensemble des terrains disponibles : à mon sens, il doit pourtant bien exister des instructions ministérielles !
La nomination d'Emmanuelle Cosse au Gouvernement a fait débat. Je l'ai personnellement soutenue. Une de ses motivations a précisément été de faire en sorte que cette loi que nous avons votée puisse être appliquée de façon pragmatique. C'est l'objectif qu'elle s'est fixé. Je pense, monsieur le président, qu'il serait intéressant que notre commission l'entende.
M. Jean-Claude Lenoir, président. - C'est ce que nous allons faire, je vous le confirme.
M. Joël Labbé. - Il convient de bien cadrer le rôle des préfets, qui sont sous l'autorité de l'État, afin qu'ils assurent le lien entre les territoires. C'est une question de volonté politique.
Je partage par ailleurs ce qui a été dit au sujet du rôle des territoires ruraux dans l'aménagement du territoire. Il faut s'en donner les moyens. Il n'existe pas de solution toute faite. On a évoqué les « dents creuses » : il ne doit pas s'agir de dentiers ! Il ne faut pas être trop strict, sous peine de se priver de terrains constructibles et de voir le prix des autres terrains augmenter du fait de la rareté.
Par ailleurs, il existe toujours, dans les bourgs centres en milieu rural, des bâtis qui ne se vendent pas : comment résoudre cette situation ? Certes, les populations ont tendance à s'installer dans les centres urbains, mais ne peut-on favoriser le retour vers le milieu rural - même si cela suppose une politique globale qui vous dépasse, monsieur le président ?
M. Jean-Pierre Bosino. - Je veux à mon tour remercier M. Repentin pour son intervention et le féliciter de son bilan.
J'aimerais également lui adresser quelques questions concernant le problème de la répartition entre logements publics et logements privés.
Vous avez fort justement insisté sur le fait qu'il faut valoriser l'effort de l'État en faveur de l'aide à la pierre. Nous avons débattu il y a quelque temps d'une proposition de loi sur le logement, et nous avons beaucoup insisté sur la question du logement social. Il ne s'agit pas d'opposer les zones ni les choix, mais cette répartition 55 % - 45 % me pose question : s'il faut favoriser les zones urbaines, il faut également construire des logements sociaux dans les zones rurales pour permettre à de jeunes couples de rester dans leur village. Cette démarche existe-t-elle ?
Le rapport évoque le « logement abordable », mais qu'est-ce qu'un logement abordable ?
Par ailleurs, les relations avec la SNCF ne sont vraiment pas aisées concernant la vente de ses terrains - pas plus que lorsqu'on traitait avec RFF - même s'il s'agit de permettre le développement économique. Les interlocuteurs changent en permanence, et on a beaucoup de mal à négocier.
Enfin, est-il prévu une décote pour l'aménagement d'aires d'accueil en faveur des gens du voyage ?
Mme Sophie Primas. - C'était ma question !
M. Jean-Pierre Bosino. - La chose est plus ou moins compliquée selon la situation géographique du terrain. En plein coeur de ville, c'est plus délicat, mais existe-t-il une possibilité en ce sens quand on est en périphérie ?
Enfin, l'un des tableaux du rapport évoque un terrain du ministère de l'agriculture et de la pêche d'une surface de 3 516 mètres carrés qui ne compte qu'un seul logement. Il s'agit d'un grand logement ! Existe-t-il une explication précise à ce sujet ?
Mme Sophie Primas. - Je voudrais réagir aux propos de M. Tandonnet au sujet des établissements fonciers publics locaux, les établissements publics fonciers régionaux me semblant plus éloignés de la réalité du terrain, compte tenu de la taille des régions. C'est une discussion que l'on a eue lors du débat sur la loi ALUR, et c'est une décision que je trouve regrettable car on avait des établissements publics fonciers départementaux qui connaissaient très bien la réalité du terrain.
Ma question porte sur les gens du voyage. Avez-vous des exemples dans votre stock, notamment concernant les aires de grand passage, car c'est là qu'on a des difficultés, notamment pour concilier les intérêts des collectivités locales avec ceux des agriculteurs, qui sont souvent sollicités à propos de ces terrains ? Cela relève-t-il de votre champ d'action ?
Mme Delphine Bataille. - Je voudrais évoquer la situation du Nord, même si les indicateurs datent du printemps précédent et ne correspondent donc pas au périmètre de la nouvelle grande région. J'attire votre attention sur le fait que 20 % de la population vit sous le seuil de pauvreté. On recense environ 420 000 logements sociaux, ce qui nous classe au premier rang en termes de densité, soit un logement social pour dix habitants.
Pour autant, 130 000 demandes restent en attente, ce qui représente quatre ans de délai, et l'on recense au moins autant de logements indignes.
On voit bien que ce département peine à combler son manque de logements et à atteindre une répartition équilibrée entre les territoires. J'insiste parce que certains redoutent le recentrage des financements publics sur les zones en tension, ce qui aurait pour effet de priver dans le même temps d'autres territoires en reconversion des moyens de se renouveler.
Vous avez évoqué la situation à Lille à travers le dossier de la gare Saint-Sauveur, pour lequel vous avez dépensé beaucoup d'énergie, et qui a mis dix ans à aboutir. Je voudrais cependant souligner d'autres succès, comme en témoigne, la signature d'un protocole qui acte la cession d'un terrain bâti avec, pour la première fois, une décote de 100 %, comprenant un ensemble immobilier de 1 500 mètres carrés en centre-ville. Il sera reconverti d'ici l'année prochaine en quarante-cinq places d'hébergement dans un centre de réinsertion sociale pour femmes en convalescence.
Ce dispositif de mobilisation du foncier public, tout le monde l'a dit, est essentiel dans les zones tendues, mais il l'est aussi en milieu rural. Je voudrais que vous précisiez si un dispositif spécifique d'accompagnement des élus locaux dans les territoires ruraux est envisagé ou s'il peut l'être. Comment voyez-vous aujourd'hui la mise en place de la mobilisation en milieu rural, où la situation est beaucoup plus complexe que dans les métropoles ?
Enfin, envisagez-vous une évaluation des sites recensés en milieu rural et concernés par des réhabilitations ?
M. Daniel Gremillet. - Je veux également poser une question sur le milieu rural. Bien du chemin a été parcouru en une année en faveur du milieu urbain, et c'est avec une grande satisfaction que je note cette mobilisation du foncier disponible.
J'ai cependant le sentiment que la fracture avec la ruralité est en train de croître à très grande vitesse. Le monde attire le monde, et le vide attire le vide ! Ce n'est pas forcément un reproche, c'est un constat.
Néanmoins, on assiste depuis cette année à une nouvelle organisation territoriale, qui offre des possibilités de bâtis qui n'existaient pas il y a un an et demi.
Comment pensez-vous intervenir en faveur de l'espace rural ? Il faut tenir compte du vieillissement de la population. Si on ne fait rien, certaines familles n'auront bientôt plus leur place dans le village où elles vivent, faute de logement adapté. C'est une question sociétale. Je ne souhaite pas opposer le milieu urbain au milieu rural, mais il est nécessaire d'y réfléchir.
M. François Calvet. - Je voudrais intervenir, en complément de mes collègues Henri Tandonnet et Sophie Primas, au sujet des établissements publics fonciers d'État (EPFE) et des EPFL. Je l'ai déjà fait, mais je tiens à le faire de nouveau. .
Je suis chargé à la communauté urbaine de Perpignan du logement social et de la réhabilitation urbaine.
Dans beaucoup de communes moyennes, les coeurs de ville se sont vidés. Ces coeurs de ville n'intéressent ni les EPFL ni les EPFE, pas plus que les propriétés dégradées. Ils disposent cependant en général d'une trésorerie excédentaire, grâce à la taxe spéciale d'équipement qui leur est versée chaque année.
Notre EPFL bénéficie de 5 millions d'euros de trésorerie, mais celui de Montpellier dispose de 50 millions d'euros. Pendant ce temps, tout le Gouvernement, « faible mais régulier », comme on dit au rugby, se désengage du logement.
Ces recettes constituent une trésorerie extraordinaire. Tous les EPFE et les EPFL ne financent pas la même chose, ne font pas payer les mêmes frais de gestion. Il n'y a aucune harmonisation de gestion. Certains offrent les services d'un architecte conseil de qualité, etc. Je pense qu'il y a là quelque chose à faire ! Cet argent est bloqué. C'est un frein important à la construction et à l'économie, alors que ces sommes, qui constituent des ressources, pourraient nous aider.
M. Jean-Claude Lenoir, président. - J'adhère totalement à l'idée émise par Daniel Gremillet.
On trouve des domaines occupés par l'État dont celui-ci n'est pas propriétaire. Il s'agit de sites mis à sa disposition par les départements. Je pense notamment à ceux liés à une préfecture ou à une sous-préfecture. On a parfois, en centre-ville, de grands domaines, de grands parcs, qui pourraient être mobilisés pour répondre à une demande, comme l'a dit Daniel Gremillet, en faveur des personnes âgées, qui souhaitent une résidence dotée d'un certain confort.
C'est un véritable problème. L'État n'a aucun intérêt à quitter des lieux pour lesquels il ne paye pas. Il n'est pas propriétaire, mais s'il s'en va, il faudra qu'il loue ou qu'il achète ailleurs. L'opération ne se fait donc pas.
M. Thierry Repentin. - Vous avez posé beaucoup de questions, ce qui démontre bien l'utilité des rapports au Parlement, même si j'entends parfois dire, ici ou ailleurs, que leur intérêt est assez limité.
C'est un point de rendez-vous qui provoque les réflexions de celles et ceux qui ont la charge de mettre en oeuvre ces politiques publiques et de faire évoluer les textes législativement.
Je remercie chacun d'entre vous d'avoir insisté sur le fait qu'il faut suivre l'application de ces politiques au quotidien sur le terrain. En un an, je suis allé à quatre reprises voir le préfet de la région PACA, l'ensemble des préfets de cette région et des directions départementales des territoires (DDT). J'ai fait la même chose dans le Nord, l'Île-de-France, et à Toulouse. Certains préfets commencent à trouver que je suis un peu trop présent, mais j'ai l'intime conviction que si on relâche l'effort, les préfets recevant énormément de circulaires, une priorité chassera l'autre. Il faut donc être extrêmement constant dans les politiques foncières, de même que dans celles du logement ou de l'urbanisme, qui ne sont pas la priorité première de celles et ceux qui doivent rendre des comptes.
Je le rappelle, car il y aura un jour un autre président de la CNAUF. J'espère que la mission elle-même perdurera, car je constate, lorsque je me déplace, que des sujets qui étaient jusqu'alors bloqués trouvent une solution.
Dominique Estrosi Sassone a posé plusieurs questions, que l'on retrouve dans d'autres interventions. S'agissant de la liste régionale publiée par le préfet de région, que les choses soient bien claires : il s'agit d'une liste indicative, un vivier parmi d'autres. Sont inscrits sur ces listes régionales des terrains identifiés. Ils ne sont répertoriés qu'après avis des collectivités locales et du comité régional de l'habitat et de l'hébergement (CRHH). Cela signifie que les collectivités locales sont associées pour avis pour savoir si on les inscrit ou non sur la liste. Cela ne veut d'ailleurs pas dire que lorsqu'une commune ou un EPCI refuse l'inscription du terrain, que je ne regarde pas si cela ne présente pas un intérêt. Si j'estime que cela peut être intéressant pour le logement, je m'engage.
Si je précise qu'il s'agit d'une liste indicative, c'est que je n'ai pas connaissance, pas plus qu'aucune autre administration, de tous les terrains disponibles de l'État ou de ses établissements publics. Il existe, sur les territoires dont vous êtes élus, des terrains en friche - anciennes subdivisions de l'équipement abandonnées, délaissés de voiries - sur lesquels les travaux ne se feront jamais. Or, tous les terrains de l'État sont, de droit, éligibles à la loi.
Quand je me déplace, je souhaite à chaque fois rencontrer des représentants de l'État, mais aussi des élus, et je reviens souvent avec une liste complémentaire. Je ne peux pas connaître tous les terrains. C'est aussi pour cela que je me déplace, pour avoir en réserve des terrains supplémentaires.
Saisissez les préfets si vous avez connaissance de terrains disponibles. Si d'aventure vous n'avez pas de retour, rien ne vous interdit d'écrire au président de la CNAUF en vous étonnant que le préfet de votre département ne vous ait pas répondu à propos d'une disponibilité foncière qui peut être valorisée. C'est la loi qui a créé cette institution, elle doit être sollicitée !
S'agissant de l'équité, existe-t-il des disparités d'un territoire à l'autre ? Oui, la décote est différente pour chaque terrain, car France Domaine est tenu par le principe constitutionnel qui veut que l'on ne peut céder à vil prix un bien de la Nation.
L'évaluation qui est faite repose il est vrai sur la valeur du bien sur le marché foncier privé. La base de départ est la même pour tout le monde. Il peut y avoir plus ou moins de compétences dans des services départementaux de France Domaine, comme dans toute administration, et j'en suis conscient, mais la base de départ est la même pour tous.
Bien évidemment, l'estimation d'un bien dans le huitième arrondissement de Paris n'est pas la même que dans un village de la France profonde. Un terrain peut avoir une valeur nulle dans un territoire où il n'y a pas de demande.
Du prix de France Domaine sur le marché privé nous allons extraire le coût des travaux nécessaires pour que le terrain ou l'immeuble qui va être vendu soit urbanisable à des fins de construction de logement : dépollution des sols, désamiantage, prise en compte des services publics nécessaires pour accueillir les familles dans la partie réservée au logement social, la décote ne concernant que ce secteur. Si on me fait la démonstration qu'une classe ou qu'une crèche est nécessaire, on le prend en compte. Le prix diminue donc.
Je ne peux toutefois calculer la décote qu'à partir du moment où la collectivité locale intéressée par le foncier m'indique son programme. Tant qu'il n'y a pas de programme, je ne peux rien faire.
Par ailleurs, la décote est également possible pour les aires d'accueil des gens du voyage. C'est prévu dans les textes, mais tant que je ne suis pas saisi du programme, il n'est pas possible de calculer la bonne décote.
Nous instruisons avec la même rigueur, quel que soit le territoire, le principe de la décote, qui est d'autant plus important que l'on se situe dans une zone tendue, où le foncier est plus cher que dans des zones rurales, la demande n'étant pas la même.
Dans les Alpes-Maritimes, à Roquebrune-Cap-Martin, où l'on va réaliser 450 logements, la décote sera très forte, car c'est un secteur très attractif, situé à côté de Menton et de Monaco. On y trouvera un programme mixte.
En 2015, l'ensemble des ventes a permis de réaliser 45 % de logements sociaux et 55 % de logements privés. Je tente de tenir compte de ce que veulent les élus et du rôle qui est le mien en matière de mixité sociale.
J'essaie de faire des programmes qui privilégient un tiers de logement social, un tiers d'accession privée et un tiers d'accession sociale, voire de la défiscalisation, mais lorsqu'il s'agit d'une commune qui compte 70 % de logements sociaux et que je vends un terrain public, je me rapproche du maire pour essayer de rééquilibrer les choses. À Romainville, en Seine-Saint-Denis, nous avons vendu un terrain où 180 logements sont en train d'être construits, avec 25 logements sociaux, le reste représentant de l'accession à la propriété, avec TVA à 5,5 % et même des logements relevant du dispositif dit Pinel. Cela rééquilibre les choses.
À Grasse, Madame Estrosi, nous venons de vendre un terrain où seront construits 70 logements sociaux. Dans ce cas précis, nous avons directement vendu à l'opérateur.
J'essaie de trouver une solution adaptée aux territoires. Chaque terrain est un cas particulier, et la décote qui en découlera est le fruit du dialogue entre le préfet, le maire et le président de la CNAUF, qui doit apporter son arbitrage.
En cas de blocage entre le préfet représentant l'État et une collectivité locale, la CNAUF joue un rôle d'arbitre. Je peux être saisi par le préfet, la ministre du logement, le ministre du budget ou le Premier ministre pour déterminer quel est le bon programme et le bon prix. C'est ce qui s'est fait pour Lille-Saint-Sauveur et ses 23 hectares en centre-ville.
Il arrive un moment où quelqu'un doit trancher, et vous disposez de la possibilité de solliciter la CNAUF par l'intermédiaire du préfet. Il ne m'est pas non plus interdit de m'autosaisir.
J'essaie de faire en sorte que la mobilisation soit uniforme. Je ne peux pas être derrière chaque préfet, mais l'équipe qui travaille avec moi appelle tous les jours les préfectures pour savoir où en est tel ou tel dossier, connaître le nombre de ventes. Nous avons un rendez-vous mensuel, et nous insistons auprès des services préfectoraux.
Quant aux décrets qui nous manquent, le décret relatif aux cessions de gré à gré est quelque peu compliqué à sortir, car on met sur le marché un bien qui vaut de l'argent. L'État ne peut privilégier en toute liberté celui à qui il va le vendre ni décider du prix auquel il va le vendre. Il existe des règles de concurrence, d'euro-compatibilité. Toute la difficulté est de connaître la part de logements privés jusqu'à laquelle l'État sera autorisé à traiter de gré à gré avec un organisme public.
Quand, à Grasse, nous vendons pour réaliser 100 % de logements sociaux, dans l'intérêt général. Il n'y a pas de problème. Imaginons que nous vendions la caserne de Roquebrune-Cap-Martin - 450 logements - avec 35 % de logements sociaux, et 65 % de logements privés : cela pose un problème. Étant donné qu'il y a beaucoup de logements privés, il pourrait y avoir beaucoup d'opérateurs, dont certains privés, intéressés par le projet, avec des problèmes de concurrence.
M. Daniel Dubois. - Dans ce cas, il faut vendre à un aménageur.
M. Thierry Repentin. - Mais l'aménageur vendra à des opérateurs privés, et il existe des règles de concurrence. On est donc en train de déterminer le pourcentage au-delà duquel il convient de ne pas prendre le risque d'un recours devant une juridiction. C'est la véritable difficulté à laquelle on est confronté.
Pour ce qui est du décret d'application des dispositions de la loi dite Macron relatives au foncier, vous n'avez que quelques jours à attendre.
Quel est le montant global de la décote ? Le rapport contient une coquille. Pour la ville de Paris, le montant de la décote est de 13 millions d'euros en 2015, et non de 1,3 million d'euros. Dans une autre chambre, cette erreur est passée inaperçue, ce qui démontre la vigilance de la Haute assemblée, j'ai plaisir à le souligner. Il s'agit donc bien de 48 millions d'euros, madame la sénatrice Dominique Estrosi-Sassone.
Je ne reviens pas sur France Domaine. Vous avez compris comment se fait l'évaluation des biens. Je peux vous assurer que la nouvelle chef de service de France Domaine est bien plus ouverte sur ce sujet que son prédécesseur. Elle a pour mission d'appliquer la loi telle qu'elle a été votée par le Parlement.
-Présidence de Mme Elisabeth Lamure, vice-présidente-
M. Thierry Repentin. - J'aborderai le sujet du domaine rural à la fin de mon intervention. C'est une problématique qui ne relève pas de ma fonction, mais nous avons quelques éléments de réponse.
Les établissements publics fonciers sont éligibles. Nous vendons à une collectivité locale, à un aménageur public choisi par la collectivité locale, à un organisme de logement social choisi par la collectivité locale, ou à un établissement public foncier.
Je n'ai encore jamais vendu un bien contre l'avis d'une commune. On a toujours trouvé un accord. Je ne peux pas vendre à un opérateur privé. Cela étant, rien n'interdit, si la collectivité locale veut faire supporter l'aménagement à un opérateur privé, d'acheter le bien à l'État et de le revendre à un opérateur choisi. Privilégier les EPFL et les EPFE permet à la collectivité locale de ne pas avoir de portage financier. La trésorerie est par ailleurs souvent abondante.
Les programmes et les priorités des EPFL relèvent aussi des élus locaux. Le plan pluriannuel d'investissement d'un EPFL, son règlement intérieur, sont exclusivement votés par les élus des territoires adhérents à l'EPF. Il y a aussi un travail de persuasion locale pour aller vers des acquisitions en centre-ville, ou dans des copropriétés. On est un peu en dehors de mon sujet sur le foncier public mais, à Nantes, on a vendu une caserne de 15 100 logements à l'EPF pour le compte de la collectivité locale. L'opération va s'étaler sur sept à huit ans.
Vous devez recevoir la ministre du logement le 3 mai prochain. Vous pourrez lui adresser un certain nombre des questions que vous m'avez posées, notamment à propos de l'évolution du périmètre des EPF. Il y a là un vrai sujet. Beaucoup de territoires ne sont pas couverts par des EPF, notamment les territoires ruraux dans lesquels il pourrait y avoir une action foncière sur du long terme qui, aujourd'hui, fait cruellement défaut à notre pays. Une des réponses à apporter aux uns et aux autres sur le fait de savoir ce que l'on fait en milieu rural réside dans la prospection foncière qui pourrait être réalisée sur le long terme ou le court terme, en mettant d'accord des propriétaires qui ont parfois besoin d'être sollicités par un professionnel.
J'ai entendu le Président de la République, lors du bicentenaire de la Caisse des dépôts et consignations, annoncer la création d'une grande foncière publique apportant 50 % du numéraire de la Caisse des dépôts et consignations, l'État y mettant du foncier. Il y a peut-être là un sujet à expertiser. L'autorité ministérielle pourra peut-être vous éclairer, car je ne suis pas complètement en charge de ce dossier - en tout cas pas pour le moment.
S'agissant des zones rurales, j'ai assez peu de terrains à vendre au titre des ministères ou des établissements publics dépendant de l'État, comme RFF ou Voies navigables de France. Pour certains, nous n'avons pas d'acquéreur. Aucun organisme de logement social ne le souhaite. Or, on ne vend pas de force un bien à quelqu'un qui ne le désire pas. Parfois, nous n'avons même pas d'opérateur privé intéressé, même dans des villes comme Roanne, ou Bergerac, où nos appels d'offres sont restés sans réponse. Les opérateurs estiment en effet ne pas avoir de demande. Peut-être passe-t-on parfois à côté d'opportunités, mais il existe des territoires qui ne suscitent pas d'appétit pour le moment. On reste donc avec des biens en portage qui coûtent cher.
Dans la négociation, je tiens aussi compte du fait que toutes les friches qui appartiennent à l'État lui reviennent très cher. La caserne que j'ai visitée hier à Toulouse coûte 400 000 euros de gardiennage par an. Quand on n'arrive pas à trouver un accord autour de 100 000 à 200 000 euros, je rappelle au ministre de la défense le coût actuel d'entretien du bien.
Pour les collectivités locales qui ont des problèmes de dotation, le logement constitue l'un des rares impôts dynamiques en taxe sur le foncier bâti indépendamment du fait que l'État perçoit aussi la TVA sur la construction et que tous les gens qui travaillent dans la filière du bâtiment ne sollicitent pas l'assurance chômage.
Je conseille aux ministères, au-delà des décotes, de faire les comptes pour la Nation. Pour les collectivités territoriales qui ont besoin de faire rentrer de l'argent dans leurs caisses, les 3 200 logements qui vont être réalisés sur les terrains de la ZAC Saint-Sauveur vont améliorer la fiscalité locale, au même titre qu'à Roquebrune-Cap-Martin, ou ailleurs.
Concernant les casernes de gendarmerie et la SNI, cette dernière n'est qu'un gestionnaire de patrimoines immobiliers et de logements parmi d'autres, qui a des relations privilégiées avec le ministère de la défense. Il n'a pas à être l'opérateur à privilégier, même s'il a des relations historiques avec la Caisse des dépôts et consignations qui lui permettent de se positionner très vite, parfois en obérant sur le territoire une concurrence qui peut s'établir.
Quant aux gendarmeries invendables, j'espère qu'elles cesseront de l'être, la décote pouvant se faire sur les anciens logements. J'en ai vendu quelques-unes, et même des bureaux de police mais, s'il s'agit d'une gendarmerie en milieu rural, j'aurais sans doute moins de demandeurs que je n'en ai pour le commissariat de La Ciotat, pour prendre un exemple concret.
À Saint-Louis, en Alsace, qui n'est pas une très grande ville, on a cependant pu trouver un opérateur pour faire une dizaine de logements dans une ancienne gendarmerie. À Saint-Malo, quinze logements ont été construits en plein centre-ville dans l'ancien commissariat. C'est donc possible.
Je veux dire un mot sur les aides aux collectivités territoriales. Il ne m'appartient pas de juger le montant ni les critères qui font qu'on y a droit ou non. Pour la première fois en 2015, l'aide aux maires bâtisseurs, une disposition dotée de 100 millions d'euros, a permis à la maire de Romainville, pour qui l'on fait du logement privé, de percevoir 1,2 million d'euros du simple fait qu'elle a produit sur sa commune plus de 1 % de logements en rythme de croissance.
Cette disposition est uniquement possible pour des maires dont le potentiel fiscal est inférieur à 1 030 euros par habitant et par an. Elle permet également de prendre en charge des coûts de services publics.
Du coup, la maire de Romainville cherche d'autres terrains. Tout le monde ne connaît pas cette disposition. Ce peut être un argument vis-à-vis de certains maires qui s'interrogent. Qu'ils se renseignent auprès du préfet pour savoir s'ils sont éligibles. Toutes les communes ne le sont pas. Cela s'adresse à celles qui disposent de peu de ressources fiscales.
Existe-t-il dans les ports autonomes un patrimoine valorisable à des fins de construction ? Peut-être mais, pour le moment, ce n'est pas dans mon champ d'investigation. C'est cependant une piste qui va me permettre d'investiguer un nouveau domaine. Je regarderai donc les choses de près.
Je pense que vous parlerez des « dents creuses » le 3 mai avec la ministre.
Il existe, dans le cadre du projet de loi égalité-citoyenneté, dont vous serez saisis avant l'été, un certain nombre de dispositions concernant les établissements publics fonciers et les attributions de logements, notamment dans le parc social.
Par ailleurs, on peut peut-être effectuer quelques dérogations à la loi SRU pour des communes, dès lors que des règles d'urbanisme d'État ou des plans de prévention multiples font que les maires eux-mêmes ne peuvent construire afin de rattraper leur retard. Une analyse dérogatoire réalisée par les préfets pourrait éviter que certaines communes ne soient assujetties à des pénalités qu'il pourrait leur être impossible de lever compte tenu de cas très particuliers. La loi ne peut s'appliquer dans certaines situations particulières. Il faut réaliser une analyse au cas par cas.
Un texte ne peut prendre en compte toutes les collectivités locales, compte tenu de la diversité des territoires relevant de la loi « littoral », de la loi « montagne », ou de ceux exposés aux risques de submersion marine ou d'avalanche. Peut-être est-ce un sujet que vous pourrez approfondir avec une autorité ministérielle.
Par ailleurs, la première liste publiée par l'État comportait des terrains appartenant à des établissements publics d'aménagement. Je ne pense pas que ce soit la liste la plus pertinente qui fût. Dans ce que nous avons valorisé en 2015, il n'y a pas de vente sur des terrains appartenant à des établissements publics d'aménagement. Je les en ai sortis, car je considère que cela ne relève pas de ma mission. La publication des listes s'est faite quelque peu dans la précipitation. On a, pour ce faire, exercé des pressions sur les préfets. Cette liste n'a peut-être pas été suffisamment tamisée pour être complètement opérationnelle. Voilà comment je puis vous dire les choses avec un certain recul.
Quant à la décote, nous pouvons, pour reprendre l'exemple de Mme Bataille, aller jusqu'à 100 % mais - pour toutes les raisons que j'ai expliquées, notamment le principe constitutionnel, cette décote doit être justifiée. Si l'on est allé jusqu'à 100 % pour une ancienne propriété du ministère de l'écologie à Lille, c'est que les caractéristiques du bâtiment étaient telles que les coûts pour le transformer en lieu habitable justifiaient que l'on soit à zéro euro.
Il y aura une opération plus importante à Lyon dans les semaines qui viennent pour réaliser 280 logements. Nous avons également en perspective une cession gratuite à Montpellier pour une opération de 420 logements qui se conclura aussi dans l'année. Les bâtiments de l'armée sont très amiantés, et le coût de la dépollution est tel que ceci plombe le bilan financier de l'opération. On devra donc sans doute avoir une cession à zéro euro.
Un mot sur le monde rural. Je le répète, je suis prêt à accompagner les territoires ruraux dès lors que j'ai quelque chose à leur vendre et qu'il y a quelqu'un pour l'acheter.
Cela dépasse là aussi largement ma mission, même si, moi-même élu du département de la Savoie, je vois à quoi vous faites référence s'agissant de l'attractivité des territoires. Le fait que notre République comporte à la fois des villes durablement habitables et des campagnes durablement habitées nécessite des politiques publiques adaptées.
Je pense que Mme Cosse ou M. Baylet sont plus qualifiés que moi pour répondre à ces questions. Je relève cependant que, depuis l'été dernier, l'ANAH s'est vue dotée de 50 millions d'euros supplémentaires, que le prêt à taux zéro a été élargi aux zones rurales au 1er janvier 2016. Il va y avoir - ou il y a eu - un nouvel appel à projets pour les bourgs centres sur la dimension de réhabilitation du logement. Ce sont là quelques éléments qui peuvent vous intéresser. Je le répète : dans notre pays, il faudrait qu'un opérateur intervienne sur le foncier, et pas seulement sur le foncier public.
Dans la vie publique, on essaie toujours d'inventer des choses. Pour conclure, je vous invite à parcourir un ouvrage qu'a commis Edgard Pisani, grand ministre de la République durant les années 1960, qui s'intitule « L'utopie foncière », qui pointait déjà du doigt la carence de la France dans le pilotage des politiques foncières.
Je pense qu'il peut exister une maîtrise publique de projets d'intérêt général grâce à un outil promu par des élus locaux, dès lors qu'il y a un intérêt général à la clef. C'est peut-être quelque chose qu'il convient d'inventer, qui se rapproche de la foncière publique dont a parlé le Président de la République.
Je termine en vous disant de ne pas hésiter à solliciter la CNAUF. On n'a pas toujours une réponse immédiate. M. Bourquin l'a fait l'an dernier à propos d'un délaissé de la SNCF à Audincourt. Il a estimé que le juste prix était de 8 euros et non de 90 euros. Quand j'en parle avec la SNCF, leur analyse est substantiellement complémentaire. Cela étant, on arrive à trouver des accords, même dans des conditions très difficiles.
La gare de Saint-Sauveur ou l'hôpital de Courcouronnes, en région Île-de-France, se sont vendus à des prix très éloignés de ce que souhaitaient les ministères ou les établissements publics propriétaires, mais il faut le justifier par rapport au fait qu'on ne peut vendre à vil prix et avoir en face un projet d'intérêt général opposable supporté par une collectivité locale, si un jour il faut justifier une décote importante.
Mme Élisabeth Lamure, présidente. - Nous pouvons remercier Thierry Repentin pour la précision de ces réponses et le féliciter également pour son investissement dans sa mission (Applaudissements sur toutes les travées).
Nomination d'un rapporteur
La commission désigne M. Roland Courteau en qualité de rapporteur sur la proposition de résolution européenne n° 498 sur la conformité au principe de subsidiarité de la proposition de décision du Parlement européen et du Conseil (COM (2016) 53 final) établissant un mécanisme d'échange d'informations en ce qui concerne les accords intergouvernementaux et les instruments non contraignants conclus entre des Etats membres et des pays tiers dans le domaine de l'énergie, et abrogeant la décision n° 994/2012/UE.
La réunion est levée à 11 h 26