- Mercredi 27 octobre 2010
- Loi de finances pour 2011, réforme du régime de l'accession à la propriété et réforme de la fiscalité de l'urbanisme - Audition de M. Benoist Apparu, secrétaire d'Etat chargé du logement et de l'urbanisme auprès du ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer
- Loi de finances pour 2011 et rôle de la DGCCRF dans la régulation commerciale - Audition de Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi
Mercredi 27 octobre 2010
- Présidence de M. Jean-Paul Emorine, président -Loi de finances pour 2011, réforme du régime de l'accession à la propriété et réforme de la fiscalité de l'urbanisme - Audition de M. Benoist Apparu, secrétaire d'Etat chargé du logement et de l'urbanisme auprès du ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer
La commission procède à l'audition de M. Benoist Apparu, Secrétaire d'Etat chargé du logement et de l'urbanisme auprès du Ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, sur le projet de loi de finances pour 2011, sur la réforme des aides à l'accession à la propriété et sur la réforme de la fiscalité de l'urbanisme.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'Etat chargé du logement et de l'urbanisme auprès du ministre d'Etat. - Je m'en tiendrai aux traits les plus saillants de ce budget pour 2011. Pour l'accès au logement et à l'hébergement, nous avons engagé, à la demande du monde associatif, qui gérait jusqu'à présent le programme 177, une réforme de grande ampleur, destinée à instaurer un pilotage de l'Etat : programmation départementale des besoins, prise en charge individuelle pour construire un parcours d'insertion avec un service intégré d'accueil et d'orientation dans chaque département, pilotage financier refondu enfin.
Parallèlement, l'Etat s'engage à assurer la transparence budgétaire du secteur. Depuis une quinzaine d'années, les lois de finances ne s'y conformaient pas, dans la mesure où les sommes inscrites en loi de finances initiale sont systématiquement abondées par des décrets d'avance - pour 110 millions déjà cette année et peut-être davantage avec le collectif. Et cela pose problème : chaque année, lorsque l'on délègue des montants aux directions régionales, elles savent que cela ne correspond pas à leur budget global, ce qui empêche aussi de contractualiser avec les associations pour établir des prévisions pluriannuelles. Cette année, le budget sera transparent, en hausse de 8 %, pour atteindre 1,2 milliard.
Deuxième aspect de la réforme, la sécurisation des agences, au premier rang desquelles l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), suivie par l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), aujourd'hui financée par le 1 % logement et non plus par les concours du budget de l'Etat.
Troisième point important, la réforme des dispositifs d'aide à l'accession à la propriété, présentée il y a quelques semaines par le Président de la République. Le taux de propriétaires n'a guère augmenté en dix ans, passant de 56 % à 57 %. Le Président de la République, à l'occasion de l'élection présidentielle, avait dit son souhait de voir se développer une France de propriétaires. C'est là bien plus qu'un simple slogan électoral : un vrai projet de société. La propriété ne saurait être réservée aux plus riches. Pour les classes moyennes et modestes, elle constitue une sécurité, une preuve de réussite et le moyen de transmettre un patrimoine. Au cours de l'année 2010, nous avons procédé à un dénombrement des outils. Il n'en existe pas moins de douze, dans cinq familles : le plan d'épargne logement (PEL), pour une dépense de l'Etat de 1,8 milliard d'euros ; la location-accession, avec le prêt social location-accession (PSLA), pour 1,1 milliard ; le crédit d'impôt de la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (TEPA), pour 3 milliards par génération ; le prêt à taux zéro (PTZ), pour 1,2 milliard dans sa version actuelle ; le Pass foncier, porté par les partenaires sociaux à hauteur de 1,2 milliard sur la période 2009-2011, et qui engage l'Etat pour 300 millions.
Notre réforme tend à conserver trois grandes familles de produits. La première, pour aider les futurs propriétaires à préparer leur accession, d'où le maintien du PEL, qui permet de constituer un apport personnel. Sur 1,8 milliard d'euros, 1,3 représente la prime d'Etat versée à la clôture du compte et 500 millions la défiscalisation des intérêts. Verser une prime de 900 € ne modifie évidemment pas la solvabilité de la personne mais le PEL reste utile en ce qu'il prépare l'accession. Par ailleurs, le montant des dépôts atteint 140 milliards... Pour l'accession proprement dite, nous prévoyons donc un « PTZ + ». Vient enfin la sécurisation du parcours, et c'est à ce titre que nous maintenons l'aide personnalisée au logement (APL), qui s'adapte bien aux bénéficiaires en épousant la courbe de leurs revenus. De fait, si la crise n'a pas provoqué de multiplication des impayés, c'est que l'APL a joué son rôle d'amortisseur.
Le PTZ +, corps central du dispositif, résulte de la fusion du PTZ actuel pour 1,2 milliard, du crédit d'impôt de la loi Tepa pour 1,21 milliard, du Pass foncier pour 300 millions et de la TVA à 5,5 %. Nous avons voulu un produit universel, plus puissant que le PTZ actuel - un quadruplement dans certains cas - épousant mieux la réalité de la composition familiale de l'accédant, sachant que c'est le différé de remboursement qui fait l'avantage d'un produit mieux adapté de surcroît à la réalité du marché.
Un couple de professeurs des écoles en début de carrière gagne quelque 3 500 euros par mois. Dans ma ville, Châlons-en-Champagne, où le prix moyen du mètre carré est de 1 900 euros, il peut accéder à la propriété. Il ne le peut pas dans une grande métropole comme Paris, où le prix moyen du mètre carré est de 7 000 euros. Le différentiel de l'aide en fonction du territoire est à peine de 30 %, alors que dans la réalité, la différence est de 300 % à 400 %. Avec un PTZ en dessous de 3 000 euros, on est incapable de solvabiliser les classes moyennes.
Ceci touche à la question de l'universalité, qui suscite certaines critiques sur le registre : « Vous allez encore aider les plus riches ». Quant à moi, j'ai été convaincu de la nécessité d'universaliser le dispositif dès lors qu'il est réservé aux primo-accédants : ce n'est pas avec ce PTZ nouveau que l'on va aider Mme Bettencourt.
Mme Évelyne Didier. - Ni ses petits-enfants ?
M. Benoist Apparu, secrétaire d'Etat. - Tous ceux qui sont déjà propriétaires ne sont pas concernés. Dans le marché de l'immobilier, la notion de classe moyenne n'est pas la même qu'ailleurs. En Île-de-France, un revenu de 3 000 euros, soit celui d'un ménage de classe moyenne, un couple avec deux enfants, par exemple, n'y est pas éligible, puisque le seuil est fixé à 2 500 euros. Pour éviter cet effet d'éviction de la classe moyenne des grandes métropoles, il faut considérer un revenu de 4 000 à 6 000 euros.
Notre territoire est très disparate, et cela est fonction des prix de l'immobilier. Dans la zone C, nous sommes à 69 % de propriétaires, au-dessus de la moyenne européenne. En zone A, on n'est qu'à 41 %. Ne pas donner au PTZ un caractère universel, c'est faire une croix sur l'accession en zone A. J'ajoute que les montants diffèrent en fonction de la qualité énergétique du logement : c'est un dispositif écologique.
J'en viens à la contribution de péréquation interne au secteur du logement social. Le potentiel financier des organismes HLM était de 6,5 milliards en 2008 ; la marge d'autofinacement est de 12,5% - pour 5 % à La Poste et 15 % dans un groupe privé comme Accor. Il s'agit d'une moyenne et les écarts entre bailleurs sociaux vont de 2 % à 22 % et c'est pourquoi nous avons voulu instituer une péréquation de 340 millions, qui vient alimenter, non le budget de l'Etat, mais bien la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLtS). Il était initialement prévu de faire reposer l'assiette sur le chiffre d'affaire des bailleurs sociaux, soit 2,5 % des loyers perçus. Après discussion, nous sommes convenus de faire porter l'assiette sur le potentiel financier des bailleurs, sachant qu'il est de 1 800 euros par logement en moyenne, avec des écarts très importants - d'un montant négatif, parfois, jusqu'à 4 000 ou 5 000 euros. A moins de 1 000 euros, le bailleur est exonéré de la contribution, la taxe étant ensuite progressive.
J'en viens à la réforme de la fiscalité de l'urbanisme, qui sera présentée en loi de finances rectificative. Nous y travaillons, dans le cadre d'une réforme plus large du droit de l'urbanisme, avec l'ensemble des associations représentatives des collectivités locales. Nous nous sommes engagés à n'agir qu'avec leur feu vert. Il ne nous manque que celui de l'Association des régions de France. Il faut savoir que la situation est très variable selon les régions, il existe 8 taxes et 9 participations.... En Savoie, par exemple, existe une taxe en vue des Jeux Olympiques. C'est d'une complexité affolante. C'est pourquoi nous envisageons de ramener les huit taxes principales à une seule taxe d'aménagement dont le taux peut varier de 1 à 5 %. Les collectivités pourraient aller jusqu'à 20 % à condition de supprimer dans ce cas, les participations financières actuellement dues.
Le second principe que nous retenons vise à inverser la logique en matière de densité. La fiscalité aujourd'hui la freine : nous l'encourageons, via un versement pour sous-densité, plus conforme aux exigences du Grenelle.
M. Dominique Braye. - Je félicite le ministre qui a su mener la concertation avec les associations, parmi lesquelles l'Assemblée des communautés de France (AdCF), dont je suis membre. Dans le contexte actuel de rigueur budgétaire, ce projet de budget pour le logement préserve beaucoup : cela mérite d'être salué.
L'accession à la propriété est un vrai projet de société. La réussite du parcours résidentiel doit être possible pour le plus grand nombre. Vous prenez en compte la composition familiale et la réalité des prix : un couple avec deux enfants, avec un revenu moyen, pourra accéder à la propriété.
En matière de péréquation, vous reprenez une idée de la loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour les logements et les luttes contre l'exclusion : les fonds des organismes HLM qui ne construisent plus doivent profiter aux autres, dans les zones tendues. Mais on a vu comment certains organismes avaient su s'organiser pour ne pas payer, au détriment de l'intérêt général. Il est bon d'y revenir pour assurer enfin une péréquation qui profite aux zones tendues. Beaucoup d'élus, cependant, qui ont, à la tête d'organismes HLM, pris des décisions courageuses pour construire ne devraient pas être taxés. Il est juste d'apaiser leurs inquiétudes.
Le président du plan Bâtiment, Philippe Pelletier, m'a fait observer qu'en relevant à 30 % la possibilité de dépassement du coefficient d'occupation des sols (COS) mais en la restreignant à certaines zones, la loi d'engagement national pour l'environnement avait conduit au blocage de nombreux projets dans les zones tendues, qui devraient pouvoir s'en tenir au régime antérieur à cette loi.
Quel est le résultat des simulations effectuées s'agissant de la future taxe d'aménagement ? Elle sera perçue par les communes ou les intercommunalités, lesquelles interviennent beaucoup en matière d'aménagement : il faudrait prévoir un partage obligatoire au prorata de la participation aux dépenses d'équipement.
La pression fiscale sera-t-elle stable ou accrue ? Quel est le mécanisme, enfin, du versement pour sous-densité destiné à lutter contre le développement urbain ?
M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis des crédits de la mission « ville et logement ». - Vous ne trouverez pas en moi un second thuriféraire. Je ne rejoins Dominique Braye que pour saluer, avec lui, l'effort de concertation... sur le seul sujet de la réforme de l'urbanisme.
Pour ce qui est de l'accession à la propriété, je me fais le porte-voix de nos collègues des Outre-mer qui souhaitent que le PTZ + prenne en compte leur situation spécifique.
Fallait-il ouvrir ce PTZ nouveau aux deux derniers déciles de la population, soit aux personnes aux revenus les plus élevés, qui n'ont aucun mal à accéder à la propriété ? En période de disette budgétaire, ces 400 millions de dépense supplémentaire sont-ils vraiment bienvenus ?
Jusqu'au 31 décembre, une famille locataire pouvait demander à bénéficier d'une aide avec une rétroactivité de trois mois : voilà cette fois une économie de 200 millions d'euros mais au détriment des familles les plus pauvres...
J'en viens à la ponction sur les locataires des organismes d'HLM...
M. Dominique Braye. - C'est faux !
M. Thierry Repentin, rapporteur spécial. - ... organismes dont les loyers constituent les seules ressources de fonctionnement. Ces 340 millions par an sur une période de trois ans représentent 80 euros par ménage. Cela doit certes vous permettre de sécuriser le budget de l'ANRU, puisque 260 millions lui seront affectés, qui lui serviront à payer ses dettes aux organismes HLM et aux collectivités. Cela « sécurise » aussi votre budget, puisque l'aide que versait l'Etat à l'ANRU va progressivement se réduire comme peau de chagrin, jusqu'à n'atteindre plus que 60 millions : telle sera en effet, en 2013, la dépense de la nation en faveur de la rénovation urbaine. J'ai compris qu'il n'y aurait pas de péréquation. La solution présentée à l'Assemblée nationale par M. François Scellier est rejetée par tous : il n'y aura pas un centime de plus sur l'aide à la construction, quelle que soit la zone.
M. Dominique Braye jette l'opprobre sur la fonction de dirigeant d'HLM en laissant à penser qu'ils thésaurisent (M. Braye proteste). Mais dans les HLM, à la différence de ce qui a cours dans les groupes privés comme Accor, il n'y a aucune redistribution de dividendes : ils remplissent une mission d'intérêt général. Et si le volume des dépenses varie selon les années, on sait que cela est à imputer à la variation des subventions publiques.
Voilà donc 340 millions de ponction, qu'il faudra compenser en faisant appel aux collectivités locales, sinon, cela signifiera 20 000 mises en chantier de moins par an, à mettre en regard des 400 millions dépensés pour élargir le PTZ + aux revenus les plus aisés...
Deux millions de logements sont vacants dont 165 000 dans le logement locatif social. La situation est particulièrement préoccupante en Île-de-France. Une décision d'expulsion a frappé, il y a quelques jours, un groupe de jeunes que vous connaissez bien, monsieur le ministre, et qui ne sont pas des va-nu-pieds mais des étudiants de haut niveau, des salariés, qui n'ont pu trouver à se loger en Île-de-France. On se souvient de votre tentative, relayée par Libération, pour leur trouver une location : ce fut un échec. N'est-il pas temps que l'Etat engage une action afin de permettre à de telles personnes d'occuper légalement - car je ne défends en rien l'occupation sans droit ni titres - des logements qui restent vacants depuis parfois quarante ans ?
M. Jean-Paul Emorine, président. - Nous défendons tous ici l'intérêt général, M. Thierry Repentin, et M. Dominique Braye au même titre que nous tous.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'Etat. - Le président du plan bâtiment - né du Grenelle, pour générer des économies d'énergie -, M. Philippe Pelletier, vous a interpellé, Dominique Braye : nous entendons ses préoccupations, mais il nous faut trouver un véhicule pour régler le problème - peut-être la proposition de loi de simplification et d'amélioration de la qualité du droit...
La nouvelle taxe sur l'urbanisme devra produire des montants de même niveau qu'auparavant : nous y avons veillé, en concertation avec les associations. Reste que les recettes fiscales, en ce domaine, sont très sensibles à la conjoncture.
En matière de lutte contre l'étalement urbain, c'est afin d'inverser la logique actuelle, ainsi que je l'ai exposé, que nous prévoyons un versement pour sous-densité.
Thierry Repentin m'a interpellé sur l'Outre-mer. J'ai apporté ce matin même, en Conseil des ministres, une réponse à Mme Penchard. L'Outre-mer est classé en B1, et les réglementations thermiques ne sont pas les mêmes, d'où la question : comment appliquer les dispositifs outre-mer ? L'outre-mer sera considéré comme étant de fait en zone Bâtiment basse consommation (BBC) : on lui appliquera donc la solution la plus favorable.
Vous mettez en regard un prélèvement et une dépense : 340 millions prélevés sur les organismes HLM, 400 millions de dépense supplémentaire pour le PTZ +. Mais votre raisonnement, qui laisse penser que l'on prend dans une poche pour mettre dans l'autre, n'est pas pertinent. Nous travaillons sur l'ensemble des parcours résidentiels. Ce n'est pas en opposant les uns aux autres que l'on fera avancer les choses.
Je ne suis donc pas favorable au transfert de 400 millions d'euros que vous préconisez.
Je vous rappelle que les huit premiers déciles de la population, sans les mesures que nous prenons, pourraient faire une croix sur l'accession à la propriété en zone A, Paris, Côte d'azur, Genevois français... Comment admettre qu'un couple qui vit à Paris avec deux enfants et qui gagne 3 000 euros par mois soit exclu du marché ? Jusqu'à 5 000 voire 6 000 euros de revenus, il est impossible de devenir propriétaire dans la capitale... A Châlons-en-Champagne en revanche, avec ce revenu, on n'a pas besoin d'aides. Mais si nous avions présenté un produit, universel en zone A mais non universel ailleurs, il aurait été très complexe, notamment pour les banques. Et qu'en aurait pensé le Conseil constitutionnel ?
Sur l'APL, la disposition que vous évoquez figure dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale et non le projet de loi de finances, même si l'impact budgétaire est indéniable. Cependant, le but est d'harmoniser les procédures des minima sociaux, et si aujourd'hui les demandes d'APL ne sont pas instantanées parce que les intéressés connaissent cette rétroactivité, demain, les comportements se modifieront et les économies à attendre seront donc modestes...
Vous parlez de « ponction sur les locataires » : il n'y en a pas, car nous bloquons dans le même temps l'indice de référence des loyers et les bailleurs ne pourront donc pas répercuter le montant de la taxe sur les loyers. Vous dites également que les revenus sont le seul revenu des bailleurs sociaux : cela est faux car ils placent 10 milliards d'euros par an, qui leur rapportent 600 millions d'euros, deux fois la contribution demandée - ce qui signifie certes que leur trésorerie est bien gérée. Sur certains bancs du Parlement, on appelle à une taxation des produits financiers : réjouissez-vous que nous proposions cette taxe !
L'Union sociale pour l'habitat que vous représentez sous une autre casquette est favorable à la vente de HLM. La vente de 1 % du parc par an rapporterait 2 milliards d'euros. Et si une perte de 340 millions d'euros représente 20 000 logements en moins, alors 2 milliards d'euros par an, ce sont 100 000 logements en plus. Certes, il est compliqué de vendre - tout dépend de la sociologie des habitants - et organiser des règles de copropriété n'est pas simple. Je partage l'analyse formulée par le monde HLM ; mais des solutions sont peut-être envisageables. Et pourquoi certains bailleurs parviennent-ils à vendre jusqu'à 0,8 % de leur parc sans difficulté ? Soit dit en passant, ceux qui produisent le plus sont aussi ceux qui vendent le plus : n'y aurait-il pas un lien ?
Sur l'affaire d'expulsion que vous évoquez, il existe une double décision de justice. La Cour d'appel a prononcé l'expulsion, la propriétaire demande le concours de la force publique, nous le lui donnons parce que nous respectons les décisions de justice. Quant à la vacance, vous savez qu'il faut manier cette notion avec des pincettes. Sur 2 millions de logements vacants, 165 000 appartiennent au parc social, soit environ 1,5 % de la production annuelle : c'est beaucoup, mais il y a des explications. En outre, je trouve comme vous choquant qu'un immeuble soit inutilisé pendant 40 ans mais je défends le droit de propriété. A nous d'encourager les propriétaires à mettre en location, surtout en zone tendue, à nous de pénaliser la vacance - à la suite de la discussion de la proposition de loi relative à la lutte contre le logement vacant, je travaille à la rédaction d'un décret afin d'étendre le champ de la taxe sur les logements vacants comme je m'y suis engagé ici. La loi MOLLE a aussi autorisé l'expérimentation de locations pour quelques mois, par exemple dans l'attente de travaux prévus dans un délai d'un an ou un an et demi. Je crois à l'expérimentation, pas à l'obligation ni à la réquisition ou à l'interdiction d'expulser.
M. Roland Ries. - Le passage des plans d'occupation des sols (POS) aux plans locaux d'urbanisme (PLU) suscite à Strasbourg, Marseille, Nancy ou ailleurs des situations très délicates. La loi Grenelle II prescrit notamment aux communautés urbaines de s'orienter vers un PLU communautaire. Or à Strasbourg nous avions travaillé sur des projets de PLU communaux. Tout est à refaire. Je comprends néanmoins votre logique. Mais il y a plus grave : après le 13 janvier prochain, il ne sera plus possible de modifier les POS. J'avais proposé un amendement dans la proposition de loi de simplification du droit mais ce texte ne sera pas adopté à temps. Est-il possible d'intégrer les dispositions dans la prochaine loi de finances rectificative ? Nous ne pouvons demeurer en apesanteur après le 13 janvier !
M. Benoist Apparu, secrétaire d'Etat. - Il y a eu un « bug » lors de la CMP relative à la loi dite Grenelle II. J'en assume la responsabilité. Mais la difficulté est à présent réelle. La proposition de loi de simplification du droit ne sera pas adoptée en temps utile, la loi de finances et la loi de finances rectificative ne sont pas des véhicules envisageables puisque le Conseil constitutionnel considérerait immanquablement les dispositions comme des cavaliers. A moins que vous vous engagiez à ne pas déférer ces textes... (Sourires) Le projet de loi adéquat reste à trouver.
Mme Odette Herviaux. - Pouvez-vous nous apporter des précisions sur le zonage du nouveau PTZ ? Y aura-t-il un plafond de ressources pour bénéficier du délai supplémentaire de remboursement ? De trop longs délais font peser un risque sur l'opération et le niveau d'endettement de l'accédant. Seulement 5 % des emprunteurs prennent une assurance-chômage, comment diffuser celle-ci plus largement ? Quid de la réforme des droits de mutation ? Seront-ils intégrés dans la taxe foncière ? Regroupements ou disparitions de taxes locales, il faudra en tout cas veiller à préserver l'autonomie de décision des collectivités.
M. Bruno Retailleau. - La réforme des aides à l'accession est indispensable. Mais l'intégration du zonage dans les dispositifs d'aide à l'accession n'aura-t-elle pas des conséquences négatives ? A-t-on réalisé des simulations pour savoir quels ménages gagnaient ou perdaient avec le nouveau PTZ, en milieu rurbain par exemple ? Le zonage associé à un avantage fiscal est compréhensible ; mais l'accession à la propriété n'est pas un investissement que l'on va déplacer de 50 kilomètres pour bénéficier d'un périmètre plus favorable. On se loge là où l'on travaille, là où on a ses racines.
Quant à la taxe d'urbanisme, la réforme me semble bonne. Notre mission d'information sur Xynthia a suggéré un double financement pour consolider les digues : le recours au fonds Barnier et une modulation de la taxe d'urbanisme selon le quartier. Il n'est pas anormal de demander aux habitants directement concernés de participer aux travaux de construction ou d'entretien d'ouvrages de protection.
Mme Évelyne Didier. - La réforme des taxes d'urbanisme figurera-t-elle dans le projet de loi de finances rectificative ?
M. Benoist Apparu, secrétaire d'Etat. - Oui avec application en 2012 pour laisser aux collectivités le temps de faire leurs calculs.
Mme Évelyne Didier. - N'est-on pas en train de transformer le droit au logement en droit à l'accession à la propriété ? N'y a-t-il pas là une incitation à emprunter trop systématique ? Va-t-on vers une France de propriétaires... ou une France de ménages endettés ?
M. Jean Boyer. - Le droit de propriété doit être respecté mais Mme Christine Lagarde a annoncé au mois d'août une réflexion sur la taxe foncière applicable aux terrains à construire inutilisés et à certains logements. Qu'en est-il ? Le produit de la taxe ira-t-il aux communes ?
M. Benoist Apparu, secrétaire d'Etat. - Le PTZ doublé était à trente-cinq ans, le Pass foncier à quarante. Le nouveau PTZ est à trente ans, afin que le coût de l'emprunt ne soit pas prohibitif. Reste à placer le curseur du différé de remboursement. Sur un prêt à taux zéro à trois ans, l'économie n'est pas considérable - les intérêts pendant trois ans. Ce qui compte, c'est bien le différé de remboursement, en l'occurrence vingt-trois ans. Dans certains cas de figure, la subvention, pour un prêt de 150 000 euros, dépasse 50 000 euros. Et je précise que le différé tient compte du revenu.
Un risque de surendettement ? Nos ménages sont bien moins endettés qu'aux Etats-Unis, le taux de sinistralité est très faible chez nous et n'a pas augmenté durant la crise. C'est que l'APL aide les ménages à rembourser leur emprunt chaque mois : 150 euros en moyenne, ce n'est pas rien. Les banques font preuve de beaucoup de précautions -certains leur reprochent leur rigidité-, ce qui contribue à une situation saine. En France, on ne peut obtenir un nouveau prêt en gageant sa maison.
Il n'y a pas véritablement de réflexion sur les droits de mutation. L'un des freins à l'accès à la propriété, ainsi qu'à la mobilité professionnelle, réside précisément dans le niveau de ces droits. Mais une diminution poserait un problème aux collectivités. L'enjeu essentiel de la réforme est de faire en sorte que les aides de l'Etat ne soient pas mangées par une hausse des prix de l'immobilier. Or un abaissement du montant des droits ou du taux de TVA se répercuterait immanquablement et immédiatement sur les prix.
Quant à l'autonomie de décision des collectivités en matière d'urbanisme, rien ne changera, celles-ci décideront toujours du niveau des taux, il y aura seulement un taux plafond à 5 %, avec une possibilité de monter jusqu'à 20 % en cas de suppression des participations individualisées. Dans l'exemple des digues, si la collectivité supprime les participations, elle pourra zoner le territoire... et appliquer un taux plus élevé là où elle finance des travaux.
Vous avez exprimé des inquiétudes pour l'accession à la propriété en zone C ; mais celle-ci existe déjà et ne se limite pas aux opérations Scellier ! Notre souci est que les montants du PTZ soient réalistes, quelle que soit la zone. Entre le Cantal et Paris, la différence de revenus est d'environ 30 à 40 %, il faut intégrer ce différentiel afin qu'à revenu comparable, la capacité d'acquisition soit comparable dans les deux régions.
M. Bruno Retailleau. - Dans le neuf, on va perdre le taux réduit de TVA.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'Etat. - L'investissement de l'Etat en zone C est aujourd'hui de 600 millions d'euros, il passera à 800 millions avec le PTZ +. Et méfions-nous des comparaisons entre un dispositif, le Pass foncier, totalement sur-aidé mais contingenté à 30 000 dossiers, un PTZ de 380 000 « places », un PTZ version plan de relance forcément accentué mais qui a vocation à s'éteindre... Nous avons écouté les élus et changé le curseur afin de rendre le dispositif plus favorable à la zone C. Désormais les accédants dans le cadre du nouveau PTZ ne seront plus perdants par rapport à l'ancien prêt à taux zéro. La solvabilité des ménages emprunteurs dépend plutôt du prêt complémentaire. Entre la Vendée et Paris, l'écart des salaires est de 40 % mais celui des prix immobiliers de 400 %. Il n'y a pas à s'étonner que le PTZ soit de 140 000 euros en région parisienne et de 40 000 euros en Vendée. Quant au prêt complémentaire, il est d'un montant bien inférieur en zone C et la solvabilisation y est donc forcément meilleure.
Droit au logement, droit à l'accession à la propriété : ce qui compte à mon sens, c'est la cohérence du parcours résidentiel. Devenir propriétaire est un rêve, mais 85 % de propriétaires, comme en Espagne, c'est un obstacle à la mobilité. Il faut trouver le juste milieu, autour de 65 %. Aujourd'hui, nous ne savons pas favoriser l'accès à la propriété dans les zones à prix élevés. Quant au surendettement, il n'est pas plus important qu'ailleurs en zone C, où le pourcentage de propriétaires, 69 %, dépasse pourtant notre cible nationale.
Dans Les Échos, cet été, Christine Lagarde a effectivement évoqué une réforme des taxes foncières - qui en est au stade de la réflexion, non du projet. Le foncier est la matière première du logement. J'ai été battu à plate couture à l'Assemblée nationale sur la question de l'organisation du droit des sols. Pourtant, tant que l'on n'aura pas une organisation fondée sur le bassin de vie et des PLU de niveau intercommunal, on ne libérera pas le foncier. Les maires protesteront : après la fiscalité locale, l'urbanisme, vous nous retirez nos compétences ! L'amendement de Michel Piron, dans le projet de loi Grenelle II, limitait pourtant le PLU intercommunal aux communes de plus de 30 000 habitants, la chose n'ayant pas vraiment de sens en deçà.
La fiscalité est aujourd'hui plutôt avantageuse pour celui qui se livre à la rétention foncière... La fiscalité sur le foncier non bâti en zone tendue n'est pas adaptée : il faut l'inverser afin d'être plus dur avec celui qui conserve des terrains le plus longtemps possible à des fins de spéculation.
Loi de finances pour 2011 et rôle de la DGCCRF dans la régulation commerciale - Audition de Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi
Ensuite, la commission entend l'audition de Mme Christine Lagarde, Ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, sur le projet de loi de finances pour 2011 et le rôle de la DGCCRF dans la régulation commerciale.
M. Jean-Paul Emorine, président. - Il nous est agréable de vous accueillir, madame la ministre, pour vous entendre sur la mission « Économie » du projet de loi de finances initiale pour 2011, mais aussi sur la loi de modernisation de l'économie (LME) et la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie, et de l'emploi. - C'est toujours pour moi un plaisir de venir devant votre commission. Avant tout, je vous dirai quelques mots sur notre politique économique concrétisée dans le prochain projet de loi de finances. L'année 2011 sera la première de l'après-crise : les signaux sont tangibles d'une reprise économique dans le monde, qui aura pour effet d'augmenter la demande adressée à la France. Nos fondamentaux économiques endogènes - consommation intérieure et investissement, en particulier privé - rebondiront eux-aussi, avec un impact positif sur la croissance économique et l'emploi. Au deuxième trimestre 2010, l'investissement privé a augmenté de 1,1 % et la consommation intérieure, qui n'a jamais fléchi depuis le début de la crise, poursuit sa croissance. Depuis le 1er janvier 2010, la création nette d'emplois s'est élevée à 60 000. La tendance du chômage est à la stabilisation avec une courbe en « tôle ondulée » marquée par des creux et des pics tous les deux mois. Le chômage des moins de 25 ans diminue mais la situation des seniors s'aggrave - ce qui justifie à mon avis la réforme des retraites.
J'en viens au projet de loi de finances pour 2011. Son premier objectif est l'emploi. Le deuxième est la restauration des finances publiques. Notre déficit public atteint cette année 7,7 % du produit intérieur brut (PIB), au lieu des 8,5 % prévus. Fin 2011, il devrait être de 6 %. Notre troisième objectif est l'amélioration de la compétitivité de l'économie française, ce qui passe notamment par un effort pour stimuler les investissements en Recherche et développement (R&D) dans le secteur privé, effort qui s'ajoutera aux sommes consacrées au plan Campus. À cet égard, je soutiens sans réserve le crédit-impôt recherche (CIR). Plusieurs études ont montré ses effets positifs ; il ne faut donc ni le rogner, ni le complexifier. Depuis 2007, nous avons triplé son montant et je plaiderai pour son maintien malgré l'impératif de redressement des finances publiques.
La mission « Économie » est dotée de 2,1 milliards d'euros de crédits, répartis en quatre programmes. L'évolution la plus marquante est la diminution de certains moyens d'intervention.
Concernant le programme « Développement des entreprises et de l'emploi », deux priorités se dégagent. Oséo reçoit une dotation nouvelle pour soutenir ses activités de garantie. Nous augmentons par ailleurs de 20 % les crédits d'UbiFrance, dont le champ d'action est élargi à 19 nouveaux pays à fort potentiel dans le cadre de la poursuite du processus de dévolution du réseau international de l'ancienne Direction générale du Trésor et de la politique économique, devenue Direction générale du Trésor. Celle-ci conserve ses missions régaliennes, tandis qu'UbiFrance groupe les moyens et les personnels destinés au soutien à l'exportation. Ubifrance poursuit également un travail de réorganisation des acteurs de l'export, de manière à travailler plus étroitement avec les Chambres de commerce et les Chambres de métiers.
Le programme « Tourisme » voit ses crédits recentrés sur Atout France, qui a été doté de nouvelles missions depuis la loi de modernisation des services touristiques.
Le troisième programme concerne l'INSEE qui poursuit l'effort de productivité de ses services ; l'évolution de ses moyens, entre 2011 et 2014, tient compte de son transfert progressif à Metz.
J'en viens à la DGCCRF dont la directrice générale nous fait le plaisir d'être parmi nous. Cette Direction est chargée de trois missions : la lutte contre les ententes et l'abus de position dominante, la protection de la sécurité des consommateurs et le contrôle des relations commerciales.
La LME a profondément modifié le paysage de la lutte contre les atteintes à la concurrence, puisqu'elle a mis en place l'Autorité de la concurrence (ADLC) et instauré un nouveau partage des compétences entre cette dernière et la DGCCRF. Les nombreux décrets d'application de la LME ont été rapidement publiés et, dès mars 2009, la nouvelle Autorité était opérationnelle. Un modus operandi satisfaisant a pu être trouvé pour organiser le partage des compétences entre les deux structures. La DGCCRF participe à l'activité de l'ADLC en qualité de commissaire du Gouvernement. Elle intervient aussi devant la Cour d'appel de Paris lorsque celle-ci examine les décisions de l'ADLC. Ce fut en particulier le cas dans une affaire récente, où la Cour d'appel a révisé en profondeur une décision en matière de cartel de l'acier. C'est d'ailleurs cette affaire qui m'a conduit à nommer une commission composée de trois personnalités qualifiées -Jean-Martin Folz, Alexander Schaub et Christian Raysseguier- pour réfléchir aux sanctions dans le domaine des pratiques anticoncurrentielles. J'ai souhaité que soit établie une doctrine claire en la matière. Le rapport de la commission m'a été remis en septembre : il servira de base à l'ADLC pour fixer, avant la fin de l'année, ses lignes directrices. Le contrôle des concentrations a quant à lui été entièrement transféré à l'Autorité, la DGCCRF assurant simplement le suivi des engagements des parties aux opérations acceptées avant le transfert de mars 2009. La Direction générale participe aussi à la politique communautaire de la concurrence - négociations, règlements, directives, assistance aux Autorités de la concurrence d'autres Etats membres, mais l'ADLC est la seule représentante de la France pour l'examen des dossiers individuels au sein du réseau européen de la concurrence.
La deuxième grande mission de la DGCCRF est le contrôle des relations commerciales. Avec la LME nous souhaitions changer l'esprit et le cadre juridique des relations entre distributeurs et fournisseurs : cette loi leur a rendu la liberté de négocier, au profit final du consommateur. Cela a eu des effets positifs avec, par exemple, le recul et la stabilisation des marges arrières. Mais des clauses abusives subsistent encore dans les contrats de 2010. Le déréférencement partiel existe encore, lui aussi, et même se développe avec les nouveaux instruments promotionnels, les fameux NIP. Cela a conduit la brigade de la LME, composée de 120 agents de la DGCCRF, à mener une enquête au deuxième trimestre de 2009. En matière de procédures contentieuses civiles, il y a eu 39 assignations menant à des procédures et 14 interventions. Concernant les sanctions, 377 procès-verbaux ont été dressés en 2009 et le montant des amendes civiles qui se montait à 1,5 millions d'euros cette année-là a été triplé en 2010. Les amendes pénales se sont montées à 1 million d'euros, auquel il faut ajouter un autre million de transactions avec des contrevenants. Une première décision a été obtenue dans l'affaire qui nous opposait aux enseignes Castorama, condamnées en juillet 2010 par le tribunal de commerce de Lille à une amende civile de 300 000 euros. La presse a largement fait état de ces procédures, parce que le Gouvernement a voulu leur donner de la publicité. Toutes ces procédures sont cependant suspendues au règlement de la question prioritaire de constitutionalité relative à la notion de « déséquilibre significatif ».
Parallèlement, la DGCCRF a mené une concertation avec les principales enseignes de la grande distribution et cela a abouti à des engagements de leur part - sur la gestion des stocks, la modération des pénalités et la renonciation aux garanties de marge. Hervé Novelli a présenté le 5 octobre 2010 cet accord où la DGCCRF et la Commission d'examen des pratiques commerciales ont joué un grand rôle. À l'Assemblée nationale, ces travaux se sont prolongés par des réunions qu'organise Catherine Vautrin entre les différents acteurs afin de parvenir à un accord qui garantisse la sérénité des relations commerciales. Les dispositions de la LME en matière de relations commerciales font donc l'objet d'un suivi constant visant à sanctionner les comportements abusifs.
Bien sûr, j'ai entendu les récriminations de fournisseurs, détaillants, distributeurs. Je réponds que cette loi est jeune et qu'il est encore trop tôt pour en tirer les enseignements, puisque nous ne disposons pas encore de l'inventaire des sanctions prononcées. Car, si je crois à la vertu de la prévention et de la pédagogie, je crois aussi à la vertu dissuasive des sanctions. Il faut donc se donner le temps de réfléchir sur les sanctions appliquées avant de se précipiter, la main tremblante, pour réécrire et amender cette loi au gré des insatisfactions et frustrations des uns et des autres.
Certains résultats positifs de la LME sont déjà chiffrables. Les délais de paiement, par exemple, ont diminué, sous l'effet de la surveillance de la brigade. Dans le cadre des 39 accords dérogatoires signés en 2009, ces délais ont diminué de 4 jours en 2008 et de 10 en 2010 ; dans la filière automobile, par exemple, les sous-traitants ont disposé de 2,5 milliards d'euros d'avantages de trésorerie.
Dans le cadre de sa troisième mission, celle de protéger le consommateur, la DGCCRF exerce une surveillance des prix. La LME avait prévu la mise en place d'un Observatoire des prix et des marges qui fut créé en mars 2009 et qui publie mensuellement sur le site de la Direction générale différents indicateurs de prix, notamment des produits de grande consommation. Il réalise en outre des études plus spécifiques, par exemple sur les produits agricoles - produits laitiers, charcuteries, fruits et légumes ; en 2009, il a réalisé 29 enquêtes ciblées. Il a également fait des enquêtes spécifiques dans les DOM pour vérifier si les engagements de modération, pris dans le cadre du Comité interministériel de l'outre-mer, sont bien respectés. La DGCCRF mène aussi des enquêtes sur les prix affichés à la pompe pour s'assurer de leur conformité avec ceux qui sont répertoriés sur le site internet officiel du prix des carburants.
La concurrence entre enseignes s'est accrue. L'écart des prix sur les marques nationales entre les enseignes les plus chères et les moins chères s'est ainsi accru, passant de 7 % en 2006 à 12,4 % en 2009. La LME a concouru à la modération des prix des produits de grande consommation. On devra peut-être revenir sur les délais de paiement ou sur l'urbanisme commercial, sujets délicats, mais, globalement, cet effet sur la concurrence, au bénéfice du consommateur, est un résultat positif de la LME, dont la DGCCRF est garante.
M. Jean-Paul Emorine, président. - Merci de cet exposé. Notre commission s'intéresse à ces problèmes puisqu'elle a saisi l'Autorité de la concurrence pour un rapport sur le prix du lait et, ce matin, le groupe de réflexion sur la PAC a auditionné M. Philippe Chalmain, nouveau président de l'Observatoire des prix et des marges.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. - A propos de la loi de février 2010 sur l'entreprise publique La Poste, j'aimerais avoir deux précisions de calendrier. L'Etat entre dans l'augmentation de capital de La Poste à hauteur de 1,2 milliard. Le projet de loi de finances pour 2011 prévoit une provision de 300 millions. Y-a-t-il un calendrier pour le versement du solde de cette entrée au capital de La Poste ?
La loi prévoyait qu'un décret confie à l'ARCEP la mission d'évaluer le coût de la présence postale sur le territoire. Ce matin, à une réunion de la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications que j'ai l'honneur de présider, nous nous interrogions sur la possibilité d'inscrire, dans le contrat que vous allez signer, avec le président de La Poste et celui de l'Association des maires de France, le montant du Fonds de péréquation, dans la mesure où ce décret n'est pas encore paru et que nous ne connaissons pas encore le coût réel de la présence postale sur le territoire. Quand ce décret paraîtra-t-il ?
Mme Odette Terrade, rapporteur pour avis. - Vous recentrez tous les crédits du tourisme sur Atout France. Mais le projet de loi de finances n'accorde en 2001 que 50 millions au tourisme, soit 10 % de moins qu'en 2009. Et il est prévu de descendre jusqu'à 45 millions en trois ans. Comment développer l'activité touristique avec des crédits aussi resserrés ?
Mme Christine Lagarde, ministre. - Pierre Hérisson, le projet de décret est transmis au Conseil d'Etat dont l'avis doit être rendu en novembre. Le décret sera donc publié avant la fin de l'année et, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), qui a été associée à la préparation de ce décret, pourra alors déterminer les coûts de la présence postale. Pour le chiffrage, je vous propose que nous regardions ensemble comment les travaux de l'ARCEP permettront d'arriver à une méthode qui ne soit pas subjective. Sur le calendrier de l'entrée au capital de La Poste, nous préparons la documentation.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. - Seuls 300 millions sont inscrits. Il nous faut savoir comment cette augmentation de capital permettra à La Poste de se développer.
Mme Christine Lagarde, ministre. - Nous sommes en train d'évaluer et de préparer la documentation juridique pour permettre la montée au capital de l'Etat et de la Caisse des dépôts et consignations. J'ai souhaité l'avis de la Commission des participations pour que les valorisations auxquelles nous étions arrivés soient confirmées. Tout cela sera fait rapidement.
La diminution des crédits du tourisme s'explique par la fin du financement de l'exposition universelle de Shanghai, ainsi que par la baisse des crédits contractualisés. Malgré cela, 75 % des engagements seront réalisés, contre 68 % en 2009. En outre, la concentration des efforts sur Atout France est la garantie d'une meilleure efficacité de la dépense publique. Je place de grands espoirs dans une coopération intelligente entre cette agence et certaines représentations régionales. J'ai été frappée, à l'exposition universelle de Shanghai, par la multiplicité des pavillons régionaux montés sur financement direct. Dans une telle opération - le pavillon français a reçu plus de visiteurs que le pavillon chinois - il est dommage de ne pas nous être coordonnés pour avoir une présentation de la France plus efficace.
Mme Élisabeth Lamure. - Je vous remercie pour le maintien du crédit d'impôt recherche. La LME a souvent été malmenée dans cette enceinte et c'est injuste car c'est une grande loi. Ce qui pèche, essentiellement, ce sont les relations commerciales, les fournisseurs devant toujours passer sous les fourches caudines de la grande distribution. Le temps presse pour ces fournisseurs qui perdent du chiffre d'affaires, certains s'étant même vu opposer des interdictions de magasin. La brigade de la LME fait bien son travail. Mais ne seriez-vous pas favorable à un réajustement de la LME sur cette partie des relations commerciales ? Et quel sera le niveau de ressources de la DGCCRF en 2010 ?
Mme Odette Herviaux. - Comment peut-on à la fois réduire le déficit public et obtenir le maximum de croissance possible ? Le déficit a été creusé par la baisse de l'emploi. Votre politique de l'emploi est-elle suffisante, surtout en direction des jeunes et des seniors ? Vous maintenez l'effort en faveur de la R&D, mais ne serait-il pas également nécessaire d'avoir une politique qui favorise l'investissement - de l'Etat, des collectivités locales, du privé - pour maintenir l'activité industrielle en France ? La DGCCRF aura-t-elle des moyens supplémentaires pour travailler avec l'Observatoire sur la formation des prix et des marges ? Comment son action s'articule-t-elle avec celle de la Direction générale ? Dans nos territoires, on voit diminuer les moyens et les effectifs. Qu'en sera-t-il de ceux de la DGCCRF ?
M. Michel Teston. - L'an dernier, nous avons passé beaucoup de temps à discuter de l'intérêt de changer le statut de La Poste, changement auquel je me suis opposé. On nous expliquait alors que ce changement de statut s'imposait parce que l'entreprise avait un impérieux besoin de financement. Or, on apprend maintenant que la Caisse des dépôts pour verser 1,5 milliard, et l'Etat, pour verser 1,2 milliard, ne procèderaient que par étapes. L'urgence du changement n'était donc pas si grande.
La France est une des nations d'Europe où la péréquation est la plus faible s'agissant des dotations de l'Etat aux collectivités territoriales. Dans le dispositif de la défunte taxe professionnelle, existaient des Fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle dont les ressources provenaient de l'écrêtement d'entreprises ayant un certain niveau d'activité. Une partie des fonds était distribuée aux communes concernées, dites d'implantation des entreprises écrêtées et elles étaient amenées à investir en lien avec ces entreprises ; l'autre partie - de 40 à 60 % du total - était destinée aux communes dites « défavorisées ». Avec la disparition de la taxe professionnelle, qu'en sera-t-il de la part dévolue à ces communes défavorisées ? Les conseils généraux vont-ils en disposer ?
M. Gérard Bailly. - Le climat est mauvais entre la production, la transformation et la distribution. Nous attendons donc beaucoup de l'Observatoire des prix et des marges. On a condamné la grande distribution à des pénalités qu'elle ne paye pas toujours, menaçant de déréférencement certains fournisseurs. Qu'en est-il ? Paye-t-elle ou pas ?
Le climat est très morose alors que notre pays a de grandes chances d'avenir. Comment compléter l'action du gouvernement pour que l'opinion publique cesse de voir le verre à moitié vide et le voie enfin à moitié plein ?
M. Michel Bécot. - Je suis inquiet de constater une insuffisance de nos investissements dans le secteur touristique, alors que c'est un formidable levier pour notre économie et nos territoires. Nous devons repositionner nos résidences de tourisme, les mettre aux normes, c'est la condition pour continuer à attirer des touristes du monde entier.
Je m'inquiète, également, des conséquences qu'auront sur nos banques les nouvelles règles prudentielles, calquées sur le modèle anglo-saxon. On sait que les banques anglo-saxonnes sont spécialisées -industrielles ou commerciales- alors que les nôtres sont dites universelles : les ratios plus exigeants dont s'accommodent les premières, seront plus difficiles à supporter pour les secondes. Comment comptez-vous faire prendre en compte, dans le G20, cette spécificité de nos banques ? Le système financier anglo-saxon n'est pas parfait, on a vu ce qui nous en a coûté avec la crise des subprimes.
M. Marcel Deneux. - Madame le ministre, je suis convaincu que les pouvoirs publics ont les moyens de déceler toutes les marges arrières, qui laissent toujours des traces comptables, et que nous gagnerions à ce que le contrôle soit dissuasif. Les industriels, par crainte du déréférencement, ne se plaindront pas des marges arrières, je le fais donc à leur place, car je sais que leur attente est forte.
Sur le FMI, ensuite, le changement de gouvernance se traduit par une dilution du capital : notre pays ne risque-t-il pas d'y perdre en influence ?
Je souhaite encore attirer votre attention sur les critères présidant à la qualification de position dominante anticoncurrentielle. Je prendrai un exemple, en tâchant de ne pas citer de nom. En juillet 2008, le conseil d'administration d'une entreprise décide de vendre l'entreprise, pour maintenir son activité. Deux acheteurs se présentent, l'entreprise choisit l'un d'eux, la négociation dure un an et ils trouvent un accord. C'est alors que les services de l'Etat estiment que la fusion place l'entreprise en position dominante. L'examen attentif du dossier révèle que cette qualification est recevable pour une petite partie seulement du territoire, dans certaines zones frontalières, mais que c'est très loin d'être le cas sur l'ensemble du territoire national. Madame le ministre, sur quels critères la position dominante est-elle déterminée ? Dans le cas que je vous cite, vos services ont demandé à l'entreprise de vendre cinq sites dans un délai de six mois. Que se passe-t-il si aucun acheteur ne se présente ? Vos services font alors intervenir un négociateur pour aboutir à une baisse de prix de moitié, y compris la marge de négociation : avouez que c'est difficile à accepter ! Qui plus est, l'affaire a traîné, elle n'est toujours pas réglée. La profession critique l'administration, comment en irait-il autrement quand chacun sait que cette entreprise se situe bien en deçà de 40 % de parts de marché à l'échelle nationale ? Et tout ceci quand le Gouvernement annonce partout qu'il veut rehausser le pouvoir des producteurs et des transformateurs...
Mme Évelyne Didier. - Les commissions départementales de l'aménagement commercial (CDAC) ont remplacé les commissions départementales d'équipement commercial (CDEC) et, avec elles, sont apparus des critères nouveaux pour l'urbanisme commercial, tels que le développement durable, tandis que les critères purement commerciaux ont disparu. Il n'y a donc plus aucun débat, dans les nouvelles commissions, sur l'opportunité d'installer telle ou telle structure commerciale. Pourtant, les chambres consulaires réalisent des études détaillées et intéressantes pour analyser l'offre commerciale des territoires et son équilibre, notamment entre commerces alimentaires et non alimentaires. Madame la ministre, avez-vous des retours d'expérience, des bilans de ces nouvelles CDAC ? Pour le moment, il semble que la concurrence débridée règne sans prise en compte ni des importants investissements réalisés par les collectivités territoriales pour garantir à la population une offre accessible et diversifiée, ni de leur travail de planification urbanistique, notamment dans le cadre des schémas de cohérence territoriale (SCOT).
M. Thierry Repentin. - Je me réjouis que les errements de la LME en matière d'urbanisme commercial soient enfin pris en compte : la loi a facilité la création de millions de mètres commerciaux supplémentaires, sans que le consommateur y gagne.
Je souhaite ensuite attirer votre attention, Madame la ministre, sur les effets de la banalisation du livret A : son encours est certes passé de 164 à 189 milliards, mais vous vous apprêtez à lui faire subir ce que vous appelez une « mobilisation dynamique », en gros un prélèvement. Le taux de commissionnement des banques va baisser, de 0,6 à 0,5 point, ce qui le mettra proche du 0,4 point recommandé par Michel Camdessus. Mais je vous exhorte à disjoindre cette baisse de celle du taux de centralisation, que les banques vont assurément vous demander : c'est très important pour le financement du logement social et pour la politique de la ville ! Et je vous prie de donner des instructions claires pour que la baisse de dix points de base du taux de commissionnement, se traduise par une baisse équivalente du taux de base des prêts de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) : cela représente environ 200 millions d'euros pour le renouvellement urbain.
Je vous alerte, enfin, en tant que membre de l'Observatoire de l'épargne réglementée de la Banque de France. Vous avez déclaré que la banalisation du livret A devrait aider à la création de PME : cet objectif louable n'est pas atteint. En fait, ni vos services ni la Banque de France ne se donnent les moyens de contrôler la destination ni les modalités des prêts consentis grâce aux fonds du livret A : il faut vous assurer des conditions dans lesquelles ces prêts sont réalisés, car leur financement est avantagé. Vous parliez d'atteindre un taux de centralisation de 70 %, on en est loin !
M. Rémy Pointereau. - Si la LME est excellente à bien des égards, elle a rencontré des difficultés d'application dans le monde agricole, du fait notamment du décalage, qui peut atteindre 18 mois, entre le moment l'achat des intrans et celui des recettes. Quelles mesures envisagez-vous pour accompagner les agriculteurs pendant ce délai ?
Dans les zones de revitalisation rurale (ZRR), ensuite, l'allègement des charges pour les entreprises et les associations serait limité aux entreprises de moins de dix salariés. Ce plafond aurait des conséquences dangereuses pour bien des maisons de retraite, gérées par des associations qui peuvent employer jusqu'à 30 ou 40 salariés. Madame la ministre, peut-on revenir sur ce plafond, pour certaines catégories d'associations ou d'entreprises ?
M. Alain Fouché. - Nous ne parvenons pas à obtenir de réponses sur le fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle. Dans la Vienne, qui accueille une centrale nucléaire, le conseil général ventile les fonds et les communes ont besoin de connaître la part qui leur reviendra, pour leurs investissements. Les sommes allouées seront-elles les mêmes qu'auparavant ? Envisagez-vous d'inclure les intercommunalités ?
Ensuite, la LME aura certainement permis aux grandes surfaces de s'agrandir, puisqu'elle ont davantage construit en dix-huit mois qu'en cinq ou six ans, mais les nouvelles règles de l'urbanisme commercial ont vraisemblablement accentué les difficultés du commerce de proximité.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie. - La diminution des crédits de la DGCCRF est liée non pas à un recul de ses missions, mais à un changement de son périmètre : certains postes sont transférés, je pense en particulier au programme immobilier, placés sous l'autorité du Premier ministre. Ensuite, nous appliquons la règle du non renouvellement d'un départ sur deux à la retraite dans la fonction publique : cela représente 94 postes en moins, et le gel des 30 postes vacants lorsque la règle a été décidée.
Je crois comme vous, ensuite, qu'il y a des déséquilibres dans les relations entre producteurs, transformateurs et distributeurs, et je me félicite à ce propos que la question prioritaire de constitutionnalité soit posée sur la notion de déséquilibre significatif. Il faut veiller au bon équilibre des relations commerciales, respecter les partenaires tout en étant conscient de la dépendance dans laquelle peuvent se trouver les fournisseurs, notamment les PME. C'est pourquoi j'ai donné des instructions très précises en vue de traquer les clauses abusives dans les contrats. Les procédures engagées par M. Hervé Novelli ont été médiatisées à dessein pour montrer la détermination du Gouvernement dans ce domaine. Nous mènerons les procédures à leur terme.
Les crédits de la DGCCRF sont les suivants : 70 millions pour la régulation concurrentielle, 120 millions pour la protection économique du consommateur, 42 millions pour la sécurité du consommateur.
S'agissant de l'Observatoire de la formation des prix et des marges, mis en place grâce à la LME, je suis en mesure de vous présenter le premier rapport de son comité de pilotage, installé au printemps 2009. La loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche prévoit un nouvel observatoire : il reprendra les travaux de l'observatoire que nous connaissons.
S'agissant des ressources mobilisées pour La Poste, il s'agit d'aider l'entreprise à rester compétitive sur un marché désormais ouvert à la concurrence et où l'activité courrier a considérablement diminué. La Poste doit investir massivement, en particulier dans la logistique intelligente, et c'est à l'aune du plan stratégique de l'entreprise, validé par l'Agence de participation de l'Etat et par la CDC, que nous appelons les 300 millions, comme première vague d'un ensemble où l'Etat mettra 1,2 milliard et la CDC 1,5 milliard. C'est à ce prix que La Poste sera en mesure de rivaliser avec ses grands compétiteurs européens, tout en continuant d'assurer ses missions de service public.
Je salue le propos de Gérard Bailly, qui rejoint celui des plus grands économistes : une nation ne peut prospérer qu'avec de la confiance, donc de l'optimisme. J'ai été longtemps brocardée d'être l'« optimiste de service » et j'ai appris à me consoler avec cette remarque du gouverneur de la Banque du Mexique : l'optimiste et le pessimiste ne sont pas différents, puisqu'ils se trompent tous les deux, mais l'optimiste est plus heureux ! (Sourires) Donc oui, regardons le verre à moitié plein, plutôt qu'à moitié vide !
Sur les procédures de contrôle, je cède la parole à Mme la Directrice générale.
Mme Nathalie Homobono, directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). - Le contrôle relève de mes services et les jugements relèvent de la justice. Une affaire récente a donné lieu à une condamnation d'une entreprise à 23 millions d'euros, tous les fournisseurs ont demandé la restitution de fonds, à l'exception d'un seul.
Des signalements nous sont adressés et nous lançons une enquête quand nous estimons réunir suffisamment d'éléments. Mais il est vrai que les fraudes sont difficiles à établir, parce qu'il nous faut examiner un très grand nombre de factures et de lignes comptables. C'est pourquoi, sous couvert d'anonymat, nous demandons des pistes supplémentaires à des personnes informées des transactions frauduleuses. Ce travail de suivi est très difficile, mais indispensable à la garantie de l'ordre public économique.
Mme Christine Lagarde, ministre. - Michel Bécot, ensuite, a raison de souligner l'importance des investissements touristiques pour notre territoire, leur fonction de levier : nous devons avoir une approche collective, et si je me réjouis des forces réunies dans Atout France, je me désole aussi parfois de la déperdition d'énergie lorsque des échelons territoriaux différents mènent campagne chacun pour soi...Nous devons investir et je suis ouverte à toute proposition, surtout lorsqu'elle est concertée !
A la suite des travaux du comité de Bâle et du conseil de stabilité financière, nos banques vont devoir adopter de nouveaux ratios de capitaux propres et de liquidités. En fait, ces ratios sont le résultat de négociations, où nous avons pu faire entendre nos arguments en faveur de nos banques universelles. Nous serons très attentifs à la suite, c'est tout l'enjeu de l'application de l'accord Bâle 3 dans la période 2013-2018 : nous poserons comme condition que tout le monde applique les règles nouvelles et que le dispositif spécifique contre le risque systémique soit différencié selon plusieurs critères, dont le régime des faillites et la qualité du superviseur.
S'agissant du livret A, je me réjouis de constater que la fin du monopole emporte la satisfaction générale, car je n'ai pas oublié avec quelle ardeur certains s'y étaient opposés ! La baisse du taux de commissionnement va dans le bon sens, mais il n'y a pas de raison d'y lier celle de la centralisation. Le taux de consolidation dépendra du rôle des uns et des autres : la CDC doit continuer à assurer ses missions d'intérêt général, et les banques développer leur financement de l'économie, en particulier des PME, grâce à une disponibilité supplémentaire par rapport aux moyennes européennes.
Je n'ai pas répondu sur deux points. D'abord sur la taxe professionnelle, mais nous aurons à en débattre dans la loi de finances, au titre de la clause de rendez-vous, que j'ai souhaitée. Le Gouvernement présentera un projet de péréquation améliorée, régionale et départementale, assorti d'un moratoire supplémentaire, avec garantie de la ressource pour les communes. Sur l'urbanisme commercial, ensuite, mais une proposition de loi spécifique devrait en traiter bientôt. Pour moi, la volonté de maintenir le commerce dans les centres-villes ne doit pas se faire au détriment de l'objectif initial de la LME : renforcer la concurrence au bénéfice des consommateurs.
M. Jean-Paul Emorine, président. - Sur les ZRR, nous travaillons avec Michel Mercier sur un amendement qui exonèrerait du calcul du nouveau plafond les salariés des établissements médicosociaux. Enfin, je vous confirme, Madame la ministre, que nous sommes très sensibles à la question posée par Marcel Deneux sur la définition de la position dominante, parmi d'autres questions touchant au droit européen de la concurrence.