- Mercredi 20 septembre 2006
- Traités et conventions - Avenant à la convention franco-tunisienne sur le service national - Examen du rapport
- Traités et conventions - Accord France-Bulgarie sur la mise à disposition d'un immeuble à des fins de coopération culturelle - Examen du rapport
- Nomination de rapporteurs
- Proche-Orient - Situation au Liban - Echange de vues
Mercredi 20 septembre 2006
- Présidence de M. Serge Vinçon, président. -Traités et conventions - Avenant à la convention franco-tunisienne sur le service national - Examen du rapport
La commission a tout d'abord examiné le rapport de M. André Trillard sur le projet de loi n° 324 (2005-2006) autorisant l'approbation de l'avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne relative aux obligations de service national en cas de double nationalité, ainsi qu'à l'échange de lettres franco-tunisien du 17 juin 1982 relatif à cette convention.
M. André Trillard, rapporteur, a indiqué que, dès 1999, les autorités tunisiennes avaient fait valoir que la réforme du service national en France en 1997 avait introduit un déséquilibre important entre les obligations, limitées en France au recensement et à la journée d'appel de préparation à la défense, et celles imposant en Tunisie un service militaire de douze mois assorti d'une période incompressible de formation militaire. Ce déséquilibre incitait les franco-tunisiens résidant en Tunisie à déclarer qu'ils souhaitaient satisfaire à leurs obligations militaires en France.
Une telle situation conférait à ceux-ci un privilège important, puisqu'il leur permettait, par une sujétion symbolique, de s'exonérer d'obligations militaires encore substantielles en Tunisie. Elle rendait nécessaire, au moins pour ces binationaux résidant habituellement en Tunisie, un aménagement de la convention, tout en préservant le droit d'option pour un service dans l'un ou l'autre pays.
Le rapporteur a précisé que l'avenant à la convention franco-tunisienne prévoit que les binationaux résidant en Tunisie sont censés assumer leurs obligations militaires en Tunisie, mais ont la possibilité de les assumer en France, à condition de déclarer cette option avant l'âge de vingt ans. Toutefois, pour assurer l'équilibre des obligations parmi l'ensemble des jeunes Tunisiens, ce droit n'est accordé qu'à la condition que les binationaux concernés effectuent une période de volontariat ou d'engagement au sein des armées françaises, pour une période équivalent au service national tunisien, soit douze mois.
Quant aux jeunes binationaux résidant en France, ils conservent la possibilité de choisir, avant l'âge de vingt ans, d'effectuer un service en Tunisie, dans les conditions prévues par la législation tunisienne. Il ne s'agit bien sûr que d'une possibilité et l'on peut penser que l'immense majorité d'entre eux choisira de satisfaire à ses obligations militaires en France.
Les binationaux ayant satisfait dans ces conditions à leurs obligations dans l'un des deux Etats sont considérés comme l'ayant fait dans l'autre Etat, ce qui évitera par exemple aux franco-tunisiens résidant en France et ayant satisfait aux obligations françaises d'être incorporés, contre leur gré, dans l'armée tunisienne lors d'un séjour dans ce pays.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi.
Traités et conventions - Accord France-Bulgarie sur la mise à disposition d'un immeuble à des fins de coopération culturelle - Examen du rapport
Puis la commission a examiné le rapport de M. Daniel Goulet sur le projet de loi n° 448 (2005-2006), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Bulgarie relatif à la mise à disposition d'un immeuble à des fins de coopération culturelle.
M. Daniel Goulet, rapporteur, a retracé l'historique de l'immeuble édifié en 1923, à Sofia, par l'Alliance française, puis confisqué par les autorités communistes bulgares en 1950. Il a précisé qu'après avoir répondu favorablement, en 1992, à la demande de restitution formulée par l'Alliance française, le gouvernement bulgare avait revu sa position en 1999 en se considérant toujours propriétaire de l'immeuble. C'est alors qu'une solution fondée sur une mise à disposition a été envisagée. Les négociations bilatérales ont abouti à l'accord du 2 décembre 2003 par lequel la Bulgarie reconnaît à l'Etat français le droit d'utiliser l'immeuble pour une durée de 99 ans et à titre gratuit, sous réserve de deux conditions : d'une part, la France s'engage à utiliser l'immeuble aux fins de coopération culturelle, soit directement, soit par le biais d'une institution ou d'un établissement placé sous sa tutelle, et, d'autre part, elle s'engage également à prendre en charge la remise en état de l'immeuble et les frais d'entretien durant cette période.
M. Daniel Goulet, rapporteur, a souligné que cet accord permettrait d'optimiser le dispositif de coopération culturelle à Sofia en regroupant sur un emplacement beaucoup plus central et visible des activités actuellement réparties sur deux sites : le site de l'Institut français, qui abrite dans ses locaux les services administratifs de coopération culturelle et une médiathèque, et le site du centre d'enseignement de la langue française. Il a ajouté que les loyers versés pour ces deux sites avoisinaient 120 000 euros par an, alors que le nouvel immeuble sera mis à disposition à titre gratuit, moyennant des travaux de rénovation estimés à 800 000 euros.
M. Daniel Goulet, rapporteur, s'est félicité de la mise en oeuvre prochaine de cet accord, tout en regrettant le délai de près de 15 ans écoulé depuis les premières démarches en vue de la restitution. Il a rappelé que la Bulgarie possédait une vieille tradition francophone, grâce aux établissements d'enseignement et aux Alliances françaises fondés au début du siècle dernier, et que le français pouvait toujours compter sur une base significative qu'il importait de valoriser. Il a estimé que le futur centre culturel de Sofia, dont l'installation sera permise par l'accord, constituerait un outil efficace au service de notre action culturelle. Il a proposé à la commission d'adopter le projet de loi autorisant l'approbation de cet accord.
M. André Boyer a souligné la vigueur de la francophonie dans le pays et le rôle important que tenait l'Alliance française à cet égard.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi.
Nomination de rapporteurs
Enfin la commission a désigné comme rapporteurs :
- Mme Joëlle Garriaud-Maylam sur le projet de loi n° 449 (2005-2006), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord cadre entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République Fédérale d'Allemagne sur la coopération sanitaire transfrontalière ;
- M. André Dulait sur la proposition de loi n° 488 (2004-2005) relative au suivi sanitaire des essais nucléaires français.
Proche-Orient - Situation au Liban - Echange de vues
M. Serge Vinçon, président, a ensuite rendu compte du déplacement qu'il venait d'effectuer au Liban, du 17 au 19 septembre, à l'invitation de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense.
M. Serge Vinçon, président, a tout d'abord relevé qu'à Beyrouth de très nombreuses affiches évoquaient la « victoire divine » remportée lors du récent conflit. Cette approche faisait d'ailleurs débat au sein de la société libanaise. Un grand rassemblement était prévu pour le vendredi 22 septembre, à l'initiative du Hezbollah, pour célébrer cette « victoire » qui pouvait mobiliser un nombre important de personnes.
Le Président Serge Vinçon a indiqué qu'il avait pu observer, lors du déplacement effectué, en hélicoptère, de Beyrouth à Naquoura dans le sud du pays, les destructions consécutives aux bombardements israéliens, notant que, pour ce qu'il en avait vu, ce qui ne constituait par définition qu'une appréciation partielle, ces destructions lui avaient semblé ciblées sur certains types d'objectifs, mais que de très nombreux ponts étaient hors d'usage.
M. Serge Vinçon, président, a indiqué qu'il avait pu participer à des entretiens avec plusieurs personnalités libanaises, dont le ministre de la défense et le Premier ministre, M. Fouad Siniora. Celui-ci apparaissait déterminé à s'investir dans un nouveau Liban, désormais souverain sur l'ensemble de son territoire. Des consignes strictes avaient été données par le Premier ministre à l'armée libanaise pour exercer sa mission de désarmement des milices armées et de surveillance de la frontière avec la Syrie. Le déploiement de l'armée libanaise au sud du Liban jusqu'à la frontière israélienne constituait un symbole politique essentiel. Le Premier ministre avait également réaffirmé sa volonté de voir reconnue la « libanité » des fermes de Chebââ, reconnaissance qui priverait le Hezbollah d'un prétexte important à son action armée.
M. Serge Vinçon, président, a précisé qu'il avait pu observer lors de son séjour à Naquoura, quartier général de la FINUL, l'installation des premiers chars Leclerc. Le Général Pellegrini, commandant de la FINUL, avait détaillé la mission de cette force, chargée d'intervenir en soutien de l'armée libanaise. Le Président a fait observer que l'interprétation de la résolution 1701 laissait quelques « zones grises » : quelle réaction adopter en cas de violation de l'espace aérien libanais par les appareils israéliens, ce qui constituait une violation des dispositions de la résolution ? Par ailleurs, l'embargo sur les armements acheminés dans la zone sud s'appliquait-il aux équipements de l'armée libanaise dont celle-ci a un urgent besoin ?
Enfin, le président Serge Vinçon, a rappelé que l'opération « Baliste », conduite par la marine nationale, et indépendante de la FINUL, avait joué un rôle essentiel dans l'évacuation des ressortissants français et étrangers et dans le soutien logistique à la FINUL I durant les combats.
En réponse à une interrogation de Mme Dominique Voynet, M. Serge Vinçon, président, a indiqué que de nombreuses bombes à sous-munitions avaient en effet été lancées par l'aviation israélienne durant le conflit. Celles-ci, difficiles à repérer, constituaient un danger considérable pour les populations et avaient déjà provoqué de nombreuses victimes. L'une des premières missions des militaires français de la FINUL consistait à les détecter et à les détruire.
En réponse à une question de M. André Boyer, M. Serge Vinçon, président, a répondu que l'une des préoccupations principales du commandant de la FINUL était liée aux survols fréquents du territoire libanais par l'aviation israélienne. Sur le plan logistique, des négociations étaient par ailleurs en cours avec le gouvernement libanais pour la mise à disposition de terrains en vue de l'hébergement des 5 000 casques bleus en cours de déploiement.
M. Daniel Goulet et M. Robert Bret ont interrogé le président sur l'accueil fait par les autorités libanaises à la proposition française d'une conférence internationale pour tenter de régler les tensions régionales, et en particulier le conflit israélo-palestinien. M. Robert Bret a par ailleurs insisté sur le rôle particulier que devait jouer la France contre l'usage des armes à sous-munitions.
M. Serge Vinçon, président, a indiqué que le thème de la conférence internationale n'avait pas été abordé directement lors des entretiens. Cela étant, le positionnement diplomatique de la France était très positivement perçu au Liban et sa voix était attendue et entendue.
En réponse à M. Robert Bret, le président Serge Vinçon a indiqué que la France possédait certes des armes à sous-munitions, mais n'en fabriquait pas et n'en exportait pas. Il a par ailleurs rappelé que la commission avait chargé M. Jean-Pierre Plancade et Mme Joëlle Garriaud-Maylam d'un rapport d'information sur ce sujet des armes à sous-munitions.
M. Philippe Nogrix s'est inquiété du rôle et de l'influence du Hezbollah sur l'armée libanaise chargée de le désarmer. Il a par ailleurs souhaité relever que le Hezbollah avait déclenché le récent conflit par l'enlèvement de deux militaires israéliens.
M. Robert Bret a rappelé que l'une des modalités possibles du désarmement du Hezbollah était son intégration progressive au sein de l'armée libanaise.
M. Serge Vinçon, président, a fait observer que le déploiement de l'armée libanaise dans le sud Liban avait constitué un acte politique majeur et hautement symbolique de la part du gouvernement libanais. Quant au désarmement du Hezbollah, il ne pouvait que s'inscrire dans le cadre d'un dialogue politique interne au Liban.
Mme Hélène Luc a exprimé son inquiétude face à la faiblesse de l'armée libanaise et à l'insuffisance de son équipement, alors même qu'il lui revient en propre de désarmer le Hezbollah. Elle a par ailleurs souhaité que le ministre des affaires étrangères informe la commission des projets de la France tendant à restreindre, voire interdire, le recours aux armes à sous-munitions.
M. Philippe Nogrix s'est demandé comment le gouvernement libanais pouvait accepter qu'une organisation comme le Hezbollah puisse tenir une telle place dans le pays, alors même que chacun sait l'emprise majeure de l'Iran sur ce mouvement.
M. Serge Vinçon, président, a rappelé que le Hezbollah était aussi une organisation politique libanaise, présente au Parlement et au Gouvernement. Il est important que le Hezbollah occupe progressivement et pacifiquement un espace politique au Liban et délaisse l'espace militaire.
M. André Trillard a souligné la réalité et l'ancienneté de l'unité libanaise face à Israël. Il a aussi relevé que l'organisation confessionnelle qui fondait les institutions libanaises reposait sur un système clanique qui n'était sans doute plus en phase avec la société libanaise d'aujourd'hui.
M. Daniel Goulet a fait observer que la victoire du Hamas en Palestine ou les succès politiques du Hezbollah au Liban étaient liés à l'incapacité des gouvernements respectifs en place à répondre aux attentes de leurs peuples.
M. Robert Bret, revenant sur l'influence de l'Iran sur le Hezbollah, a estimé que ses membres étaient libanais avant tout et que, par conséquent, l'intégration politique de ce mouvement dans le jeu politique libanais était essentiel. Il a fait valoir que l'organisation politique « clanique » et quasi « féodale » du Liban, liée à son histoire et au rôle des grandes puissances, dont la France, dans la naissance de cet Etat, était, volens nolens, une réalité avec laquelle il fallait compter. Le soutien de parlementaires extérieurs, et notamment français, à l'égard de leurs collègues libanais pouvait peser favorablement sur une évolution positive des comportements politiques.
M. Serge Vinçon, président, a conclu en indiquant que beaucoup, au Liban, redoutaient une tension liée à la période préélectorale qui va commencer en vue de l'élection présidentielle prévue en 2007.