- Mardi 13 juin 2006
- Mercredi 14 juin 2006
- Famille et enfance - Protection de l'enfance - Examen du rapport
- Mission commune d'information - Centre de décision économique et attractivité du territoire national - Désignation des membres
- Mission commune d'information - Bilan et conséquences de la contamination par l'amiante - Audition de M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes
Mardi 13 juin 2006
- Présidence de M. Nicolas About, président -Famille et enfance - Prolongation du congé pour événement familial - Examen du rapport
La commission a tout d'abord procédé à l'examen du rapport de M. Nicolas About sur la proposition de loi n° 158 (2005-2006) présentée par M. Christian Gaudin et plusieurs de ses collègues, visant à prolonger le congé pour événement familial en cas de décès d'un conjoint ou d'un enfant.
M. Nicolas About, rapporteur, a d'abord rappelé que le code du travail accorde aux salariés le bénéfice de jours de congé exceptionnels dans certaines circonstances de leur vie privée : mariage, naissance d'un enfant ou décès d'un proche. Ce congé, dont la durée varie entre un et quatre jours selon la nature de l'événement considéré, est accordé sur présentation de justificatifs et n'entraîne, pour le salarié, ni perte de rémunération ni réduction de ses droits à congés payés. Il n'est pas nécessairement pris le jour de l'événement, mais peut l'être dans les quelques jours qui le suivent ou le précèdent.
M. Nicolas About, rapporteur, a indiqué que la proposition de loi déposée par le groupe de l'union centriste-union pour la démocratie française (UC-UDF), vise à porter de deux à cinq jours la durée du congé accordé en cas de décès du conjoint ou d'un enfant à charge.
Cette disposition répondrait d'abord à des considérations pratiques, car le congé actuel de deux jours est trop bref pour permettre au salarié de faire face, dans de bonnes conditions, aux conséquences du décès, et notamment à l'organisation des obsèques, ce qui amène un grand nombre de salariés à demander un arrêt de maladie pour disposer d'un délai supplémentaire. Elle corrigerait aussi l'anomalie qui fait que la durée du congé est plus longue en cas d'événement heureux qu'en cas de décès d'un proche. Sans doute faut-il y voir l'illustration de la réticence de nos sociétés contemporaines à affronter la mort et à accompagner les mourants.
M. Nicolas About, rapporteur, a précisé que le congé pour événement familial est également accordé en cas de décès du partenaire d'un pacte civil de solidarité (Pacs) et indiqué qu'il proposerait, par voie d'amendement, d'en étendre le bénéfice au salarié qui perd son concubin.
Il a admis que l'adoption de la proposition de loi ferait peser une charge supplémentaire sur les entreprises mais, à son sens, trop légère pour avoir un impact significatif sur l'économie. Ses conséquences sur les finances publiques seraient également limitées, puisque la proposition de loi ne s'applique qu'aux salariés de droit privé. Enfin, constatant que le gage prévu à l'article 2 de la proposition de loi n'est pas opérant, puisque le texte crée une charge nouvelle, il a recommandé de procéder à sa suppression.
Mme Gisèle Printz s'est interrogée sur la pertinence de la distinction entre enfants à charge et non à charge, le premier ouvrant droit à cinq jours et le second à deux seulement en cas de décès, faisant valoir que la peine ressentie est la même dans les deux cas.
M. Nicolas About, rapporteur, a précisé que la distinction se justifie uniquement pour des raisons pratiques, les démarches à engager pouvant être plus lourdes pour les parents lorsque l'enfant est encore à leur charge. Il a souligné que, singulièrement, la législation actuelle fixe des durées de congé plus longues pour des événements prévisibles, connus longtemps à l'avance, comme un mariage ou une naissance, alors qu'un décès, par nature moins prévisible, donne droit à un congé plus bref. L'organisation des obsèques exige pourtant d'accomplir certaines démarches dans des délais courts.
M. André Lardeux a demandé pour quelles raisons, dans la mesure où la proposition concerne les salariés du secteur privé, ne s'en remet-on pas à la négociation collective pour améliorer les droits reconnus aux salariés.
M. Nicolas About, rapporteur, a fait observer que, depuis longtemps, les règles minimales en matière de durée du congé pour événement familial sont fixées par le code du travail et qu'il serait surprenant de renvoyer précisément ce point à la négociation collective. Si tel devait être le choix, la logique voudrait alors que l'on supprime du code du travail le dispositif actuel pour en confier la conception d'ensemble aux négociations de branches. Ce faisant, les salariés qui ne sont pas couverts par un accord de branche perdraient tout avantage. Le bon sens veut plutôt que la loi fixe le socle minimal, des mesures plus favorables pouvant toujours être définies au niveau des entreprises.
En réponse à M. Louis Souvet, qui demandait pour quelles raisons cette mesure ne s'appliquerait qu'aux salariés du secteur privé, M. Nicolas About, rapporteur, a rappelé que les agents de la fonction publique sont soumis dans notre pays à des règles propres, distinctes du code du travail.
M. Alain Vasselle a suggéré de fixer la durée du congé à quatre jours, au lieu des cinq proposés par le texte, par parallélisme avec la durée du congé accordé en cas de mariage du salarié.
M. Nicolas About, rapporteur, s'est dit ouvert à cette proposition et a précisé qu'elle rejoignait certaines réflexions engagées dans le cadre de la préparation de la prochaine Conférence de la famille.
Mme Bernadette Dupont a demandé des précisions sur la suggestion du rapporteur de supprimer le gage de la proposition de loi. Elle s'est à son tour déclarée dubitative sur l'opportunité d'adopter une loi pour un sujet qui pourrait relever de la discussion entre partenaires sociaux et qui, de plus, ne s'appliquera pas aux fonctionnaires.
M. Nicolas About, rapporteur, a expliqué que le gage est utile s'il permet de compenser une diminution de recettes, mais qu'il est en revanche inopérant s'il s'agit de compenser une hausse des dépenses publiques, ce qui est le cas ici. Il a considéré à nouveau que la position consistant à s'en remettre à la négociation collective est défendable, mais qu'il faudrait alors, par cohérence, supprimer du code du travail toutes les dispositions relatives à la durée du congé pour événement familial.
M. Guy Fischer a salué dans la proposition de loi une mesure de bon sens et déclaré que le groupe communiste républicain et citoyen entend la soutenir. Il a approuvé l'idée d'harmoniser la durée du congé en cas de mariage et en cas de décès du conjoint et proposé de retenir une durée de quatre jours. Il a souligné que les conventions collectives accordent des avantages variés aux salariés et qu'il convient de définir un socle commun.
Mme Catherine Procaccia a souligné que les conventions collectives sont souvent plus protectrices des salariés et a demandé ce qu'il adviendrait de l'application de ces stipulations plus favorables. Elle a regretté que la mesure proposée ne s'applique qu'aux seuls salariés du privé.
M. Nicolas About, rapporteur, a précisé que l'adoption de la proposition de loi ne remettrait pas en cause l'application du principe de faveur et que les stipulations plus favorables des conventions collectives continueraient donc naturellement à s'appliquer. Il a proposé de retenir le principe d'une durée du congé égale en cas de mariage du salarié et de décès du conjoint ou d'un enfant et de la fixer à quatre jours.
Mme Raymonde Le Texier a souhaité que le code du travail continue de définir un minimum légal en matière de durée du congé pour événement familial et indiqué que le groupe socialiste soutient la proposition de loi. Elle a accepté que la durée du congé pour décès soit fixée à quatre jours.
Mme Gisèle Printz s'est inquiétée d'une éventuelle opposition du patronat à cette mesure.
M. Nicolas About, rapporteur, a estimé que les conséquences de cette mesure seraient en réalité très limitées pour les employeurs et rappelé que seules les entreprises qui ne sont pas couvertes par un accord collectif plus favorable seraient tenues d'augmenter la durée du congé pour événement familial accordé à leurs salariés.
En réponse à M. Alain Vasselle, qui s'enquérait de l'impact financier de la mesure proposée, M. Nicolas About, rapporteur, s'est dit convaincu que le Gouvernement veillerait à effectuer cette évaluation complexe, puisqu'elle nécessite de passer en revue les nombreuses conventions collectives applicables, d'ici à l'examen de la proposition de loi en séance publique à l'Assemblée nationale.
Mme Bernadette Dupont s'est déclarée à nouveau choquée que le Parlement légifère pour une catégorie seulement de travailleurs.
M. Nicolas About, rapporteur, a répondu qu'il s'agit pourtant d'une situation assez fréquente, rappelant que la réforme des retraites, par exemple, est d'abord intervenue dans le secteur privé avant d'être appliquée aux fonctionnaires. Il a rappelé le montant élevé des allégements de charges consentis aux entreprises, de l'ordre de 20 milliards d'euros, et jugé que l'effort qui leur est demandé, en regard, par cette proposition de loi, est bien modeste.
Par ailleurs, ces premiers jours d'absence sont actuellement pris en charge, en pratique, par l'assurance maladie, ce qui n'est pas non plus légitime.
M. François Autain s'est dit favorable à ce que la durée du congé soit plus longue en cas de décès qu'en cas de mariage, dans la mesure où le mariage est un événement qui peut intervenir plus fréquemment dans la vie du salarié.
M. Nicolas About, rapporteur, a regretté que des réticences se manifestent sur cette proposition de loi, qui s'expliquent peut-être par le souhait de réserver son annonce à la prochaine Conférence de la famille. Il a indiqué que la proposition de loi serait retirée si les conclusions favorables du rapporteur n'étaient pas suivies.
M. Paul Blanc a indiqué que l'adoption de cette proposition de loi irait à l'encontre du sentiment, largement partagé, selon lequel trop de lois sont adoptées dans notre pays et serait en contradiction avec l'objectif de la majorité parlementaire d'accroître la durée du travail.
M. Nicolas About, rapporteur, a répété que la seule mesure véritablement cohérente avec ce point de vue consisterait à supprimer du code du travail les dispositions relatives à la durée du congé pour événement familial. On pourrait en effet trouver choquant de refuser de voter cette proposition de loi sans procéder parallèlement à la suppression des quatre jours de congé accordés au salarié pour son mariage.
Mme Raymonde Le Texier a estimé que cette question ne saurait faire l'objet d'une analyse comptable et rappelé qu'au-delà des démarches à accomplir en vue des obsèques, des salariés peuvent souhaiter demeurer auprès du corps de leur défunt jusqu'au jour de l'enterrement, ce qui n'est possible que si un droit à congé leur est reconnu par la loi.
M. Alain Vasselle a estimé qu'il ne serait pas illogique de supprimer les jours de congé prévus en cas de mariage du salarié.
Mme Raymonde Le Texier s'est déclarée surprise de cette prise de position, dans la mesure où la majorité sénatoriale préfère généralement encourager le mariage. Elle a rappelé que les préparatifs du mariage demandent beaucoup de temps dans les jours qui précèdent la cérémonie et estimé que le congé permet d'y faire face de manière plus satisfaisante.
La commission a ensuite examiné les articles et les amendements présentés par le rapporteur.
A l'article premier (augmentation du nombre de jours de congés accordés en cas de décès du conjoint ou d'un enfant), la commission a adopté un amendement rectifiant une erreur matérielle, puis un amendement rédactionnel. Elle a ensuite adopté un amendement ramenant la durée du congé à quatre jours, au lieu de cinq. A l'issue d'un débat au cours duquel sont notamment intervenus Mme Bernadette Dupont, M. Paul Blanc, Mme Raymonde Le Texier et M. Nicolas About, rapporteur, la commission a également adopté un amendement étendant le bénéfice du congé au cas de décès du concubin.
A l'article 2 (gage de la proposition de loi), la commission a adopté un amendement de suppression de l'article.
Par coordination avec la modification rédactionnelle adoptée à l'article premier, l'intitulé de la proposition de loi a été modifié pour préciser que l'événement justifiant le congé est le décès du conjoint, et non pas d'un conjoint.
La commission a enfin adopté la proposition de loi dans la rédaction issue de ses travaux.
Mission d'information - Mise sur le marché et suivi des médicaments - Communication
Puis la commission a entendu une communication de Mmes Marie-Thérèse Hermange et Anne-Marie Payet sur le rapport de la mission d'information sur les conditions de mise sur le marché et de suivi des médicaments.
Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur, a rappelé la grave crise de confiance à l'égard du médicament, provoquée par le retrait brutal du Vioxx du marché. Dans ce contexte et à l'initiative de M. François Autain, la commission des affaires sociales avait alors décidé, à l'unanimité, de créer une mission d'information chargée d'étudier les questions soulevées par les procédures d'autorisation de mise sur le marché des médicaments (AMM) et, plus généralement, par la sécurité sanitaire des produits de santé, en raison du niveau élevé de la consommation médicamenteuse en France.
Créée en juin 2005, cette mission a organisé de nombreuses auditions et plusieurs déplacements : à Rouen au centre régional de pharmacovigilance, puis à Bruxelles et Londres auprès des autorités sanitaires européennes, belges et britanniques. Elle s'est particulièrement attachée, dans un souci de transparence et d'objectivité, à étudier et approfondir le rôle des agences dans la politique du médicament, l'indépendance de l'information et de l'expertise, ainsi que l'efficacité des outils de sécurité sanitaire.
Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur, a indiqué que la France a confié l'évaluation des produis pharmaceutiques à différentes agences sanitaires indépendantes, d'où la complexité du processus de commercialisation des médicaments, qui fait intervenir cinq instances : l'Agence française pour la sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) ; ou, le cas échéant, l'agence européenne du médicament (EMEA), qui délivre une AMM ; la Haute Autorité de santé (HAS), qui évalue le service médical rendu (SMR) et l'amélioration du service médical rendu (ASMR) des médicaments afin de proposer un niveau de remboursement ; le comité économique des produits de santé (CEPS), qui négocie le prix des médicaments ; l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (Uncam) chargée de fixer le taux de remboursement ; enfin, le Gouvernement, auquel il revient d'inscrire le médicament sur la liste des produits remboursables.
La mission s'est interrogée sur la pertinence de cette organisation et sur sa capacité à mettre à la disposition des patients des produits de santé sûrs et porteurs d'un intérêt thérapeutique. Cette question se pose notamment au sujet des critères d'appréciation utilisés par les commissions d'AMM et de la transparence, qui reposent sur la notion d'absence d'infériorité : or, les critères retenus laissent à penser que le doute profite aux médicaments plutôt qu'aux patients et les étapes de la procédure sont ensuite franchies sans réelles difficultés, ce qui se traduit par une quasi-automaticité entre l'AMM et la prise en charge du produit de santé par la collectivité.
Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur, a estimé que l'augmentation régulière des cas d'iatrogénie médicamenteuse doit inciter les pouvoirs publics à renforcer leur connaissance de l'utilité des produits en termes de santé publique, par le recours à des essais comparatifs systématiques et par la promotion d'études sur les stratégies thérapeutiques disponibles pour une même pathologie. Ces études, sans remettre en cause l'AMM, pourraient alors influer sur le prix et sur les conditions de prise en charge du produit.
En ce qui concerne les modalités de financement des agences, elle a précisé que, depuis 1999, les taxes, droits et redevances versés par les laboratoires pharmaceutiques ont représenté au moins 50 % des recettes de fonctionnement de l'Afssaps et atteignent même 80 % en 2006. Cette situation affecte le degré d'indépendance de l'agence à l'égard de l'industrie pharmaceutique : il serait légitime que l'Etat assure une part plus importante de son financement.
Puis elle a jugé qu'au-delà de ces questions institutionnelles, la restauration de la confiance des patients passe par une meilleure transparence de l'information dans le domaine du médicament. Conscientes de ces enjeux, les autorités européennes ont imposé aux agences en charge de la sécurité sanitaire des produits de santé de nouvelles obligations en matière de transparence de leurs travaux. Les agences doivent désormais rendre accessibles au public leur règlement interne, l'ordre du jour des réunions et leurs comptes rendus assortis des décisions prises, des détails des votes et des explications de vote, y compris des opinions minoritaires. Ces dispositions, qui seront prochainement transposées dans le droit français, sont déjà mises en oeuvre par l'Afssaps : les premiers comptes rendus des travaux des commissions d'AMM et de pharmacovigilance sont disponibles sur son site Internet.
Puis Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur, a indiqué que d'autres obligations européennes s'appliquent en matière de transparence des travaux d'expertise. Actuellement, l'Afssaps, comme la Haute Autorité, font appel à des experts extérieurs qui bénéficient souvent d'une compétence de haut niveau résultant de leur collaboration avec l'industrie pharmaceutique. Or, pour la crédibilité des travaux, il est indispensable que ces experts soient indépendants et désignés selon une procédure incontestable. Pour ces motifs, l'Afssaps a décidé, depuis cette année, de mettre en place une procédure de recrutement formalisée, précédée d'un appel à candidatures, pour le renouvellement de six des onze commissions consultatives qui composent l'agence, soit 30 % de ses effectifs.
Elle a jugé que la seconde difficulté résultant du recours massif à l'expertise externe tient à l'éventualité de conflits d'intérêts entre l'expert choisi et le laboratoire fabriquant le médicament. Pour s'en prémunir, un dispositif à deux niveaux a été mis en place. Il prévoit, d'une part, le dépôt d'une déclaration publique d'intérêt, d'autre part, l'établissement de critères d'identification des conflits d'intérêts.
La déclaration publique d'intérêt est établie sous la responsabilité des experts et constitue une obligation légale depuis la loi du 1er juillet 1998 sur le renforcement de la sécurité sanitaire. Ils doivent aussi actualiser ce document et signaler toute modification de situation.
L'efficacité de la mesure repose toutefois sur la capacité des agences à contrôler ces déclarations. Dans ce domaine, de nombreux efforts ont été accomplis et la situation devrait s'améliorer encore avec les nouvelles modalités de recrutement des experts. Mais il n'en demeure pas moins qu'entre 10 % et 15 % des experts ne respectent pas leurs obligations et des critiques sévères ont été adressées à l'Afssaps sur ses défaillances dans la gestion des conflits d'intérêts. Pour répondre à ces observations émises par une mission d'audit, l'agence a entrepris d'identifier les divers types d'intérêts et de classer les situations conflictuelles afin de vérifier l'absence de conflits d'intérêts des membres d'une instance avec les dossiers inscrits à l'ordre du jour ou avant de confier un dossier à un expert.
Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur, a recommandé trois voies d'action indispensables pour assurer la pérennité d'une expertise de haut niveau : valoriser le travail des experts, notamment par la prise en compte de l'activité d'expertise dans le déroulement de la carrière des praticiens hospitaliers et professeurs d'université-praticiens hospitaliers ; assurer le développement de la recherche publique en matière de sécurité sanitaire ; enfin, définir un statut de l'expert commun à toutes les agences sanitaires, permettant de rationaliser les pratiques auxquelles ont recours les agences pour recruter leurs experts et gérer les conflits d'intérêts.
Poursuivant la présentation du rapport, Mme Anne-Marie Payet, rapporteur, a indiqué que le système de mise sur le marché et de suivi des médicaments souffre également de sa trop grande dépendance à l'égard de l'industrie pharmaceutique. Cette dernière s'est, en effet, imposée comme le premier vecteur d'information des professionnels de santé. Or, la formation et l'information des médecins constituent les moyens les plus efficaces pour lutter contre les problèmes posés par les prescriptions inadaptées, la surconsommation de médicaments et le risque d'accident résultant de mauvaises associations médicamenteuses.
Elle a d'abord jugé indispensable de redonner toute sa place à l'enseignement de la thérapeutique, car le nombre d'heures consacrées à l'enseignement de la pharmacologie n'a cessé de baisser dans le cursus universitaire.
Elle a également estimé essentiel de s'interroger sur le mode de financement et les modules de formation dispensés dans le cadre de la formation médicale continue. L'Inspection générale des affaires sociales (Igas) a récemment formulé plusieurs recommandations que la mission a reprises à son compte : le recours à des rapporteurs indépendants dans la procédure d'agrément des formateurs et une sélection plus stricte des publications médicales dont les articles sont pris en compte dans la formation médicale continue du médecin.
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur, a ensuite abordé la question de la visite médicale, premier moyen de promotion des médicaments pour l'industrie pharmaceutique, qui y consacre en moyenne 80 % de ses dépenses de marketing, soit l'équivalent de 8.500 euros par médecin.
Les abus de cette pratique commerciale ont été fréquemment dénoncés, notamment pour ce qui concerne les recommandations de prescription. La nouvelle charte de la visite médicale, signée entre les entreprises du médicament et le CEPS, a vocation à y remédier. Elle fixe, à cet effet, les missions et les obligations déontologiques des délégués médicaux, promeut la qualité de l'information délivrée et prévoit les moyens de contrôle du système, grâce à la remise aux médecins de documents officiels sur les produits présentés. Il est toutefois regrettable que cette charte ne s'applique pas à la visite à l'hôpital, alors qu'il s'agit d'un élément majeur dans l'acquisition d'habitudes de consommation d'un produit et que les prescriptions qui y sont faites ne sont pas exemptes d'abus.
Enfin, il est à noter que les laboratoires contrôlent les journaux médicaux, ce qui justifierait qu'un contrôle plus important de la presse médicale soit opéré : d'abord, par la publication rapide du décret d'application de l'article 26 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades, qui prévoit l'obligation d'informer les lecteurs des liens d'intérêts de l'auteur pour que l'on puisse juger de son objectivité ; ensuite, par un examen attentif du contenu des revues avant leur accréditation comme outil de formation médicale continue.
Puis Mme Anne-Marie Payet, rapporteur, a abordé le troisième volet du rapport, consacré à la surveillance de l'usage des produits de santé en vie réelle. Cette surveillance du risque et du bon usage des produits sanitaires constitue, avec l'évaluation du rapport bénéfice/risque, le coeur de la mission de l'Afssaps. Celle-ci gère ainsi un réseau de surveillance spécialisé, dont la branche pharmacovigilance qui concerne les médicaments, permet de connaître et de suivre les événements indésirables liés à la prise de médicaments.
L'audit de l'Afssaps, conduit en 2002 par les inspections générales des finances et des affaires sociales, a porté une appréciation sévère sur l'activité de pharmacovigilance de l'agence. Celle-ci a, depuis lors, accompli un travail considérable pour remédier aux lacunes de son dispositif. Toutefois, des améliorations sont encore souhaitables pour corriger la sous-notification des effets indésirables : d'abord, en sensibilisant davantage les médecins de ville à la pharmacovigilance, notamment en les informant systématiquement des suites données à leurs signalements ; ensuite, en renforçant le rôle des pharmaciens ; enfin, en associant davantage les patients au système par l'intermédiaire d'associations de patients agréées.
La pharmacovigilance connaît aujourd'hui une profonde mutation et vient s'insérer dans la politique plus large de gestion des risques souhaitée par les autorités européennes. Son volet le plus innovant réside dans le développement des études post-autorisation de mise sur le marché (post-AMM), c'est-à-dire des études pharmaco-épidémiologiques qui sont menées après la commercialisation du produit.
Ces études sont effectuées sous l'égide des autorités publiques et doivent être distinguées des études menées par les seuls laboratoires, réalisées en vue d'élargir le champ de prescription d'un produit de santé. Elles correspondent à un changement d'optique dans le domaine de la sécurité sanitaire : il ne s'agit plus de se reposer sur les essais cliniques réalisés antérieurement à l'AMM et les notifications transmises au réseau de pharmacovigilance, mais de développer une politique volontariste fondée sur l'anticipation d'éventuels effets indésirables lors de l'utilisation des médicaments auprès d'une large population.
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur, a souligné que les études post-AMM visent à éclairer les conditions réelles de prescription et d'utilisation du médicament ; elles comparent les résultats effectifs aux données des essais thérapeutiques et révèlent les risques non étudiés ou tardifs qui pourraient apparaître lors de l'utilisation d'un médicament, ainsi que son impact sur le système de soins.
Les premières études post-AMM, mises en oeuvre depuis 1997, ont donné des résultats mitigés : sur les 105 études commandées, seulement 7 % d'entre elles ont été menées à leur terme, tandis que 54 % n'ont pas encore débuté. Ce retard est en partie dû à la complexité des travaux à conduire, dont la réalisation n'est envisageable que sur une période de plusieurs mois, voire de plusieurs années. Il s'explique aussi par la répartition des tâches entre les laboratoires et les autorités publiques, puisque le protocole de l'étude doit être validé par les commanditaires, alors que le laboratoire prendra en charge les dépenses afférentes.
Cette situation constitue un obstacle au développement des études post-AMM et surtout à leur mutation vers des études comparatives qui ne porteraient plus sur un produit, mais sur l'analyse des stratégies thérapeutiques disponibles pour une pathologie donnée. Dans cet objectif, il serait souhaitable que des crédits publics soient prévus dans le cadre de l'agence nationale pour la recherche afin de faciliter le développement de ces études.
Le second obstacle rencontré pour le développement des études post-AMM concerne l'accès à la gestion des bases de données gérées par l'assurance maladie, dont les autorités sanitaires critiquent le caractère trop restrictif. L'assurance maladie s'est toutefois engagée, dans l'avenir, à faciliter la consultation de ces bases par les autres acteurs du système de santé.
M. François Autain, membre de la mission d'information, a estimé que les deux rapporteurs ont parfaitement identifié les raisons pour lesquelles le système d'autorisation de mise sur le marché des médicaments est en crise. Il a cependant regretté que les recommandations qui en découlent ne soient pas à la hauteur de la gravité de la situation, ce qui a conduit le groupe communiste républicain et citoyen à s'abstenir lors du vote d'adoption du rapport. Il a également déploré que le rapport ne fasse pas état des résultats de l'enquête menée sur le Vioxx, pour préciser le nombre de morts par accidents cardiovasculaires qu'il a causés, identifier les responsabilités des acteurs en charge des AMM et analyser les éléments de pharmacovigilance sur ce médicament. Il a d'ailleurs précisé qu'un médicament proche du Vioxx a été maintenu sur le marché et continue d'être remboursé par la sécurité sociale.
M. François Autain a rappelé que les trente-trois recommandations faites par son groupe figurent en annexe du rapport de la mission et que certaines recoupent celles des rapporteurs. Déplorant la complexité du parcours du médicament, il a souligné l'importance de simplifier et rationaliser le système et de généraliser la pratique des essais comparatifs. Il a proposé également de supprimer le CEPS qui, selon lui, n'a pas rempli sa fonction, notamment en matière d'évaluation de l'efficacité des médicaments. Il a estimé nécessaire d'appliquer avec rigueur le principe selon lequel tout médicament qui n'apporte pas d'amélioration ne doit plus être remboursé par la sécurité sociale. Il a souhaité que l'Uncam traite directement avec les laboratoires pour fixer le prix et le taux de remboursement des médicaments.
Il s'est dit également favorable à l'institution d'une taxe sur le chiffre d'affaires des laboratoires, qui s'élève à plus de 38 milliards d'euros, afin de réduire la dépendance de la HAS par rapport à l'industrie pharmaceutique, tout en permettant de dégager des moyens supplémentaires pour financer les agences et l'information à destination des professions médicales et des patients.
Estimant urgent de rééquilibrer le système d'information, il a rappelé que la HAS dispose actuellement de 14 millions d'euros par an pour financer les informations relatives aux médicaments, alors que l'industrie pharmaceutique dépense 1,3 milliard d'euros chaque année pour la promotion de ses produits.
Il a enfin suggéré la création d'une nouvelle structure pour renforcer l'expertise et lui rendre une certaine indépendance, en garantissant l'absence de lien entre ses membres et les laboratoires, tout au moins pour le président et le vice-président. Saluant à nouveau la qualité du travail réalisé par les deux rapporteurs, M. François Autain a rappelé que l'abstention de son groupe se veut constructive, et non critique.
M. Guy Fischer a salué l'engagement de M. François Autain qui a permis la constitution de la mission d'information. Il s'est également félicité du travail important qu'elle a accompli et des réelles propositions élaborées grâce aux nombreux déplacements et auditions qu'elle a effectués. Il a toutefois confirmé certaines différences d'appréciation sur le fond, regrettant à son tour que le rapport n'évoque que de façon allusive le Vioxx et le Célébrex. Il a, en outre, rappelé que 30 % des dépenses des laboratoires sont consacrées au marketing et à la publicité, soit un volume financier important qu'il serait utile de comparer au déficit de la sécurité sociale, laquelle assure le remboursement des médicaments. Il n'est, en effet, pas illogique de penser que les prix des médicaments pourraient être plus bas sans la prise en compte du coût de cette publicité.
Il a également mis en exergue le paradoxe selon lequel le déremboursement des médicaments entraîne un surplus de recettes pour l'Etat, qui récupère l'augmentation de TVA résultant de la libération des prix des médicaments non remboursés.
Il a enfin souligné l'urgence de garantir l'indépendance de l'expertise en réformant le financement des agences et de la HAS.
M. Dominique Leclerc, membre de la mission, a souligné la spécificité franco-française, ubuesque, consistant à multiplier les structures au détriment des objectifs prioritaires que devraient être la cohérence et la transparence du système. Il s'est dit convaincu de la nécessité de développer l'expertise et de réduire la dépendance de l'industrie pharmaceutique par rapport aux professions médicales, même si celle-ci ne doit pas être surestimée. Il a rappelé que la presse médicale française, grâce au financement des laboratoires et des universités, bénéficie d'une grande notoriété et d'un certain crédit au niveau international. Il s'est dit favorable à un certain pragmatisme eu égard à l'appréciation du SMR de certains produits pharmaceutiques, tels que la valériane ou la passiflore, dont le remboursement a été remis en cause alors qu'ils permettent de se substituer à des produits remboursés plus onéreux, dont les effets d'accoutumance ou secondaires peuvent entraîner un coût plus important pour la sécurité sociale. Enfin, il a estimé nécessaire de conduire une réflexion sur le régime de TVA des médicaments après déremboursement.
Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur, a fait observer que le Vioxx est évoqué dès la première page du rapport et en a déterminé l'optique. Elle a également précisé que l'étude Cadeus a été intégrée au rapport de la mission d'information, qui n'a toutefois pas voulu cibler certains médicaments publiquement mis en cause, alors que d'autres n'ont pas été stigmatisés. Enfin, elle a estimé que la directive européenne de 2004 constitue une véritable réponse aux problèmes suscités par le Vioxx, ce dont M. François Autain a convenu.
Répondant aux critiques relatives à la multiplicité des structures, elle a expliqué qu'il existe en Europe deux autres modèles : le modèle belge, qui ne possède qu'une seule structure dotée de trois experts et subdivisée en cinq ou six départements, dont l'indépendance et la lisibilité ne sont pas assurées, et qui n'exerce pas plus de contrôle que les structures françaises ; le modèle britannique, qui s'est révélé peu fiable. Elle a souligné, à cet égard, la difficulté de fusionner la HAS, qui apprécie le SMR, et l'Afssaps.
Elle s'est réjouie que M. François Autain souscrive à la proposition de mise à disposition des essais comparatifs pour l'expertise.
Enfin, elle a fait remarquer que la suppression du CEPS, recommandée par le groupe communiste républicain et citoyen, se traduit parallèlement par la création de trois nouvelles structures, ce qui ne contribue donc pas à simplifier le système.
M. François Autain a objecté que certaines d'entre elles doivent être intégrées à des structures déjà existantes.
Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur, a en outre indiqué qu'un certain nombre de médicaments délivrés par les hôpitaux sont achetés en officine et sont, par conséquent, comptabilisés dans les dépenses de la médecine de ville.
M. Dominique Leclerc a précisé que ces dépenses sont estimées à 40 %.
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur, a fait remarquer que les personnes auditionnées ont majoritairement plaidé pour le maintien des structures existantes, tout en souhaitant une meilleure coordination entre elles et une plus grande transparence du système.
Elle s'est dite réservée sur le principe qui consiste à ne pas rembourser un médicament dont le SMR n'est pas supérieur à celui du générique, estimant légitime de préserver la libre concurrence entre les médicaments. Elle a confirmé la validité de la définition législative du médicament (« Tout produit ou substance présenté comme possédant des vertus thérapeutiques à l'égard des maladies humaines »), qui s'est révélée être en parfait accord avec les réflexions et conclusions de la mission. Enfin, elle s'est montrée favorable à une meilleure reconnaissance de l'expertise, qui doit être valorisée et mieux rémunérée.
Estimant nécessaire que le statut des médecins hospitalo-universitaires soit redéfini, M. Dominique Leclerc a souhaité notamment que les activités de recherche et les échanges intellectuels avec les autres pays soient mieux pris en compte dans l'emploi du temps des praticiens et dans leur rémunération.
A l'issue de ce débat, la commission a pris acte de cette communication et de la publication du rapport d'information issu des travaux de la mission.
Mercredi 14 juin 2006
- Présidence de M. Nicolas About, président, puis de M. Gérard Dériot, vice-président. -Famille et enfance - Protection de l'enfance - Examen du rapport
Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a tout d'abord procédé à l'examen du rapport de M. André Lardeux sur le projet de loi n° 330 (2005-2006) réformant la protection de l'enfance.
A titre liminaire, M. André Lardeux, rapporteur, a dressé un rapide panorama de la situation des enfants en danger en France et des politiques qui concourent à leur prise en charge. Selon l'observatoire de l'action sociale décentralisée (Odas), les départements ont reçu, en 2004, environ 95.000 nouveaux signalements d'enfants en danger, dont 19.000 correspondant à des situations d'« enfants maltraités » et 76.000 à des situations d'« enfants en risque ». Cette même année 2004, on recensait, selon l'observatoire national de l'enfance en danger (Oned), près de 140.000 enfants bénéficiant d'une mesure de protection de l'enfance.
Il a rappelé que la politique de protection de l'enfance relève des départements depuis les lois de décentralisation et qu'ils y ont consacré plus de 5 milliards d'euros en 2005.
Malgré ce bilan très satisfaisant de l'action départementale, la protection de l'enfance continue d'impliquer l'intervention du juge : plus de 80 % des enfants protégés relèvent du régime de l'assistance éducative, ce qui pose des problèmes de stigmatisation des familles, entretient la méfiance de celles-ci vis-à-vis de l'aide sociale à l'enfance et empêche d'instaurer un climat favorable à la prévention. Ce recours massif au juge témoigne de la délimitation confuse des domaines d'intervention respectifs des départements et de l'autorité judiciaire.
Puis M. André Lardeux, rapporteur, a souligné la démarche de concertation entreprise par le Gouvernement pour l'élaboration du texte : débats avec les professionnels de terrain, journées thématiques au niveau national, rapports préparatoires confiés à des parlementaires et tenue, les 10 et 11 avril dernier, des premières assises nationales de la protection de l'enfance à Angers. Il en est ressorti un consensus, portant tant sur la nécessité de la réforme que sur les grands axes à retenir.
Trois constats ont été établis à cette occasion :
- d'abord sur le caractère encore perfectible des procédures de signalement : le grand public ignore souvent quel est l'interlocuteur à même de recevoir ses interrogations sur la situation d'un enfant et les professionnels ont besoin de pouvoir recouper leurs informations avec d'autres pour se forger une conviction. Il en résulte un besoin criant d'amélioration du recueil, du traitement et de l'évaluation des informations.
Certes, la loi du 10 juillet 1989 sur l'enfance maltraitée a prévu la centralisation, par le département, des signalements d'enfants en danger mais ce dispositif reste, en pratique, très lacunaire car 20 % des signalements qui parviennent au juge sont effectués par des personnes étrangères au dispositif départemental de coordination des signalements et les conseils généraux n'en sont pas correctement informés.
Enfin, l'application de la règle du secret professionnel constitue un frein au signalement, car les professionnels appréhendent souvent assez mal ce que permet ou défend la législation en termes de partage de ces informations confidentielles ;
- ensuite, sur la rigidité excessive des modes de prise en charge de l'enfant : les termes de l'alternative actuelle entre intervention à domicile et accueil de l'enfant à temps complet hors de son lieu de vie habituel ne permettent plus de répondre à la diversité des situations. S'agissant plus particulièrement de la protection judiciaire, elle apparaît même comme un carcan, puisque toute évolution, même ponctuelle, de la prise en charge, suppose de repasser devant le juge ;
- enfin, sur la grande pauvreté du dispositif de prévention précoce dans le domaine de la protection de l'enfance : la prévention assurée par l'aide sociale à l'enfance (ASE) relève déjà du traitement des difficultés familiales et les véritables agents de prévention, comme les réseaux d'écoute, d'appui et d'accompagnement des parents (REAAP), mis en place conjointement par l'Etat et par les caisses d'allocations familiales, se situent en réalité en dehors du champ strict de la protection de l'enfance.
La protection maternelle infantile (PMI) aurait dû être l'outil par excellence de la prévention : son action se situe en amont de toute difficulté familiale et elle bénéficie, à travers la prévention sanitaire, d'un moyen légitime d'entrer en contact avec les familles. Mais ses atouts ne sont malheureusement pas mis à profit, notamment par manque de moyens humains.
Abordant ensuite la réforme proprement dite, M. André Lardeux, rapporteur, a indiqué qu'elle s'organise précisément autour de ces trois volets, en confirmant le rôle de chef de file du département en matière de protection de l'enfance.
Pour améliorer le signalement, le projet de loi crée, sous la responsabilité de chaque département, une cellule opérationnelle chargée de centraliser les informations préoccupantes transmises par les professionnels. Cette cellule aura un triple rôle : assurer la visibilité du dispositif départemental de signalement et constituer ainsi un point de repère pour le grand public ; simplifier le travail de recoupement des signaux de maltraitance nécessaire pour mieux repérer les enfants en danger ; permettre une première analyse de la situation, afin d'orienter l'enfant vers la prise en charge la plus adaptée.
Son efficacité supposant qu'aucun signalement ne puisse lui échapper, le projet de loi prévoit que les professionnels qui saisissent directement la justice devront en informer la cellule et que le juge pourra désormais indiquer au département les saisines qui lui parviennent en dehors du circuit départemental de signalement.
Le partage des informations au sein de la cellule ne sera possible que si les difficultés liées au secret professionnel sont levées. Le projet de loi est parvenu à trouver un juste équilibre en la matière : les informations à caractère confidentiel pourront être partagées entre professionnels liés par le même devoir de discrétion, dans la limite de ce qui est strictement nécessaire pour assurer la protection de l'enfant.
Enfin, le projet de loi clarifie les critères d'orientation vers la protection administrative ou judiciaire, en posant le principe d'une intervention subsidiaire du juge. Celui-ci ne sera plus saisi que dans deux cas : lorsque la protection administrative est insuffisante et lorsque cette dernière se révèle impossible à mettre en oeuvre par refus de collaboration de la famille.
Dans le domaine de la diversification des modes de prise en charge, M. André Lardeux, rapporteur, a expliqué que le projet de loi s'attache en réalité à donner une base légale aux solutions innovantes déjà expérimentées par certains départements. Trois nouveaux types d'accueil sont ici envisagés : l'accueil de jour, l'accueil exceptionnel ou périodique et l'accueil d'urgence, cette dernière formule étant plus spécifiquement destinée aux jeunes fugueurs, pour lesquels une mise à l'abri provisoire est prévue pour tenter de dénouer la crise. Particulièrement souple, cette formule n'exige pas d'admission formelle à l'ASE : elle pourra donc s'organiser sur la base d'une simple information des parents, sous réserve du contrôle du juge.
Parmi les nouveaux modes de prise en charge prévus par le projet de loi, il a également salué la création d'une mesure administrative d'accompagnement en économie sociale et familiale destinée à la prise en charge précoce des familles, en amont d'une éventuelle mesure de tutelle aux prestations familiales. Sa mise en place risque toutefois de soulever des difficultés pratiques pour les départements, les professionnels capables d'assurer ce type de prestation étant pour l'instant faiblement représentés parmi les effectifs des conseils généraux.
Il a souligné le double souci du projet de loi d'assurer la continuité de la prise en charge pour l'enfant et d'associer, autant que possible, ses parents à la définition des mesures et à leur mise en oeuvre. En témoignent l'obligation pour l'ASE d'élaborer avec les parents un document de prise en charge pour chaque enfant confié et la désignation d'un référent de l'enfant pour en assurer le suivi.
Le texte organise aussi les conditions du maintien du lien avec la famille : selon les cas, le juge pourra désormais suspendre intégralement le droit de visite, le conditionner à la présence d'un tiers ou, au contraire, en assouplir les modalités d'exercice, laissant les parents et le service accueillant l'enfant en définir les aspects pratiques.
Enfin, pour ce qui concerne la prévention précoce, M. André Lardeux, rapporteur, a expliqué que l'objectif du projet de loi est de multiplier les occasions de contact entre les familles et les professionnels, en amont de toute difficulté, pour anticiper les problèmes et accompagner les parents. Il s'appuie sur la PMI qui voit ses missions étendues de la prévention sanitaire à une forme de prévention sociale, grâce notamment à l'organisation d'un entretien obligatoire pour les femmes enceintes au cours du quatrième mois de grossesse et à la possibilité qui lui est ouverte d'entrer en contact avec les parents dès la maternité, afin de leur proposer un suivi à domicile pendant les suites de couches.
Approuvant les orientations générales du projet de loi, le rapporteur a ensuite présenté les amendements destinés à en parfaire certains aspects.
S'agissant du dispositif de signalement, il lui a semblé nécessaire d'assurer l'exhaustivité de l'information transmise aux départements, grâce à un retour systématique du juge sur les cas de saisine directe et sur leurs suites. De même, les maires, qui signalent des familles en difficulté, mais ne parviennent jamais à savoir si une solution leur a été proposée, doivent aussi bénéficier de ce retour d'information.
En ce qui concerne les caractéristiques de la formation prévue par le texte en matière de protection de l'enfance, il convient de mettre en place des modules de formation communs aux différentes professions, pour faire progresser une culture partagée de la prévention et des bonnes pratiques de signalement.
S'agissant des modes de prise en charge, il a approuvé le dispositif de mise à l'abri prévu par le projet de loi pour les jeunes fugueurs mais les procédures à appliquer lorsque la fugue révèle des difficultés plus profondes et que le retour de l'enfant dans sa famille est impossible doivent être précisées ; de même, il conviendrait de préciser que le dispositif autorisant l'hébergement exceptionnel par les services d'action éducative en milieu ouvert (AEMO) ne concerne que les enfants pour qui le juge a préalablement prévu cette possibilité et doit pouvoir être contesté par les parents.
Il a enfin plaidé pour un approfondissement de la politique de prévention, grâce à l'intervention accrue de la PMI et de la médecine scolaire.
Abordant, pour conclure, les aspects financiers du projet de loi, M. André Lardeux, rapporteur, a indiqué que le Gouvernement avait évalué le coût de la réforme à 150 millions d'euros, dont 115 millions d'euros à financer par les conseils généraux, notamment au titre du recrutement du personnel social et médical. Le contexte financier difficile que connaissent les départements, avec l'explosion des dépenses de RMI et la montée en charge rapide de la nouvelle prestation de compensation du handicap, justifie que leur soit accordée la compensation de ces charges nouvelles.
M. Nicolas About, président, s'est félicité de ce que le rapporteur ait fait référence à la notion de « bientraitance », estimant que celle-ci devait inspirer l'ensemble de la politique de protection de l'enfance.
M. Guy Fischer a reconnu que le projet de loi avait fait l'objet d'une large concertation, mais il a estimé que ses mesures ne permettraient pas de contrebalancer les effets d'autres textes, notamment ceux sur la prévention de la délinquance, sur l'immigration, sur la réforme des ordonnances de 1945 et sur l'égalité des chances. Il a regretté le manque d'ambition du projet de loi, qui ne s'attache pas à résoudre les difficultés de fond de la protection de l'enfance et dont la mise en oeuvre se heurtera à l'insuffisance des moyens humains et financiers à la disposition des départements. Il a enfin considéré que la réforme proposée repose sur une approche excessivement comportementaliste et qu'au total, elle risque d'accroître les inégalités. Pour toutes ces raisons, il a déclaré que le groupe communiste républicain et citoyen voterait contre le texte.
M. Bernard Cazeau a relayé la déception des associations de protection de l'enfance devant un texte qui n'améliore qu'à la marge les dispositifs existants. Il s'est toutefois déclaré satisfait de la reconnaissance du rôle de chef de file du département en matière de protection de l'enfance. Il a estimé que les mesures prévues en faveur du développement de la prévention précoce se heurteraient à un problème de financement. Il a enfin dénoncé le télescopage entre cette réforme et celle prévue en matière de prévention de la délinquance. Il a donc annoncé que le groupe socialiste, apparentés et rattachés, s'abstiendrait sur le texte.
M. Louis Souvet s'est déclaré satisfait de la concertation menée par le Gouvernement sur le texte. Il a voulu savoir si la réforme s'était inspirée d'expériences fructueuses menées à l'étranger. Après avoir approuvé le retour d'informations prévu en faveur des maires, il s'est interrogé sur le rôle de l'éducation nationale en matière de signalement. Il a enfin souhaité connaître les aides prévues pour les femmes dont les difficultés auraient été repérées au cours du nouvel entretien obligatoire du quatrième mois de grossesse.
Après avoir salué à son tour la concertation ayant présidé à l'élaboration de la réforme, M. Gérard Dériot a approuvé la réaffirmation du rôle de chef de file des présidents de conseil général opérée par le projet de loi. Il a signalé que la mise en oeuvre des mesures prévues en matière de partage d'informations suppose un changement de culture des travailleurs sociaux. Il a également prévenu que l'extension des compétences des services de PMI se heurterait à la pénurie de médecins capables de les mettre en oeuvre. Le contrôle de légalité devra impérativement être plus souple pour permettre aux départements de recourir à des médecins vacataires. Il a enfin approuvé la proposition du rapporteur de prévoir une compensation financière intégrale pour les départements, tout en s'interrogeant sur les modalités de celle-ci.
Mme Bernadette Dupont a insisté sur la nécessité de passer d'un système de protection de l'enfance uniquement centré sur l'enfant à un dispositif d'assistance à la famille. Elle a salué l'action des conseillères en économie sociale et familiale (CESF), dont le recrutement doit être encouragé. Le développement de cette profession suppose toutefois d'accroître le nombre de personnes formées chaque année, ce qui nécessite une coopération accrue avec les régions désormais responsables des établissements de formation en travail social. Elle a souligné, elle aussi, que la mise en oeuvre de la réforme implique un changement de mentalité chez les professionnels de la protection de l'enfance.
Mme Isabelle Debré s'est à son tour inquiétée du financement de la réforme. Elle a salué l'initiative du rapporteur de renforcer le retour d'informations en faveur des maires qui signalent des familles en difficulté. Elle a enfin regretté que la réforme proposée par le Gouvernement reste en deçà des attentes des associations.
Mme Claire-Lise Campion a reconnu que l'élaboration du texte avait été précédée d'un vrai débat avec les professionnels de la protection de l'enfance, mais elle a regretté que le projet de loi se borne finalement à améliorer l'existant. Elle a émis des doutes sur la capacité de l'éducation nationale à participer à la prévention, alors que le Gouvernement a décidé de réduire fortement le nombre de postes au sein de ce ministère. Elle a déploré l'absence d'une véritable politique nationale de la famille. Elle a également repéré plusieurs oublis dans le projet de loi, notamment sur la prise en charge des mineurs étrangers isolés et sur la reconnaissance des lieux de rencontre parents-enfants. Elle s'est enfin inquiétée du financement de la réforme et de son télescopage avec le texte sur la prévention de la délinquance.
M. Alain Vasselle s'est félicité de l'extension du rôle des services de PMI. Il a approuvé l'initiative du rapporteur d'élargir l'objet de la visite médicale obligatoire à l'entrée en cours préparatoire et de créer un examen similaire à l'entrée au collège. Il a appuyé la demande du rapporteur de prévoir une compensation des charges nouvelles pour les départements, dès lors que les crédits ne seront pas prélevés sur la branche famille de la sécurité sociale.
Mme Brigitte Bout a salué le rôle fondamental des techniciennes d'intervention sociale et familiale (TISF) et des CESF pour accompagner les familles et les enfants en amont de toute difficulté. Elle a approuvé l'idée de mieux associer les maires au dispositif de signalement, tout en soulignant les difficultés actuelles rencontrées par les élus pour travailler avec les assistantes sociales. Elle a enfin insisté sur la nécessité de mieux recruter et contrôler les familles d'accueil pour éviter des placements inadaptés et préjudiciables à l'enfant.
M. Claude Domeizel s'est ému des délais de prescription en matière d'abus sexuels, trop brefs à son sens pour certaines victimes. Il a ensuite plaidé pour que les infractions sexuelles mineures commises par des jeunes de moins de seize ans puissent ne pas être inscrites durablement à leur casier judiciaire. Aujourd'hui en effet, les jeunes subissent les conséquences de leur acte malheureux pendant plus de vingt ans, car ils sont automatiquement inscrits au fichier des délinquants sexuels, ce qui les empêche d'accéder à certaines professions.
M. Jean-Pierre Godefroy a regretté le mutisme du texte sur la question des mineurs étrangers isolés, estimant qu'on ne peut pas renvoyer chez eux, à leur majorité, des enfants qu'on avait auparavant accepté de prendre en charge.
Mme Gélita Hoarau a dénoncé les reconductions à la frontière opérées ces derniers mois à Mayotte, où des enfants ont été renvoyés chez eux sans leurs parents, et vice versa. Elle a également protesté contre les suppressions de postes dans l'éducation nationale et le manque de moyens humains des PMI, estimant que ces facteurs ne pouvaient que conduire à un échec de la réforme présentée. Elle a enfin considéré que la protection de l'enfant commence avec le devoir de lui assurer un toit décent et qu'il conviendrait d'envisager la politique de l'enfance d'une manière globale et cohérente.
M. Nicolas About, président, a observé que le nombre d'enfants scolarisés n'a jamais été aussi faible qu'aujourd'hui et que, par conséquent, le nombre d'enseignants par élève est actuellement à son niveau le plus élevé. Les suppressions de postes envisagées lui sont donc apparues comme étant des mesures de bonne gestion, car l'augmentation continue de la dépense publique contribue également à mettre en difficulté les familles qui en assument la charge.
M. André Lardeux, rapporteur, a pris acte de la déception de certaines associations, tout en observant qu'aucune d'entre elles n'avait été en mesure de lui faire des propositions d'amendements pour améliorer le texte. Il a toutefois indiqué que les associations doivent avoir toute leur place dans le dispositif de signalement et au sein des observatoires départementaux de la protection de l'enfance.
S'agissant du financement de la réforme, il a dit comprendre les inquiétudes des présidents de conseil général, mais il a constaté qu'eux non plus n'avaient pas cru bon de lui faire parvenir des propositions d'amendements. Il a indiqué que ses contacts avec le cabinet du ministre lui permettent d'annoncer que le Gouvernement proposerait la création d'un fonds alimenté par l'Etat et par la branche famille pour financer la réforme.
Il a ensuite indiqué que la comparaison avec les modèles étrangers permet de conclure à la performance du système français de protection de l'enfance.
Abordant le rôle de l'éducation nationale en matière de signalement, il a expliqué que celle-ci participerait au dispositif départemental de signalement. Les enseignants vont toutefois devoir modifier leur comportement, puisqu'ils ont aujourd'hui le réflexe de s'adresser systématiquement au juge sans en avertir en parallèle les services du conseil général.
Revenant sur la création d'un entretien obligatoire au quatrième mois de grossesse, il a expliqué que ce nouvel outil vise à améliorer le repérage des futurs parents en difficulté, afin de les orienter vers des dispositifs d'aide existants, mais mal mobilisés.
M. André Lardeux, rapporteur, a reconnu que la pénurie de médecins rend difficile le recrutement des professionnels nécessaires dans les services de PMI. Il a approuvé le recours à des vacations de médecins libéraux ou retraités.
Il a expliqué que l'assistance à la famille en amont des difficultés constitue l'un des objectifs du projet de loi, à travers notamment la création de la nouvelle mesure d'accompagnement en économie sociale et familiale. Il a reconnu qu'il faudrait augmenter le nombre de CESF et améliorer leur formation.
Concernant le rôle des maires, il s'est dit en faveur d'un meilleur retour d'informations quand ceux-ci signalent une famille en difficulté, mais il a estimé difficile de leur confier d'autres missions en matière de protection de l'enfance, sous peine de brouiller la clarification des compétences à laquelle tente de procéder le projet de loi.
M. André Lardeux, rapporteur, s'est déclaré favorable à la définition d'une véritable politique de la famille, mais il a souligné que sa mise en oeuvre suppose de faire des choix par rapport à d'autres priorités dans un contexte budgétaire contraint.
S'agissant du recrutement des familles d'accueil, il a insisté sur le rôle de contrôle du département. Il a également précisé que les assistants familiaux ne peuvent pas être multipliés simplement pour répondre à un problème d'emploi.
Abordant la question de la prescription en matière d'agressions sexuelles sur mineurs, il a précisé que le code pénal prévoit déjà que les plaintes en la matière peuvent être déposées jusqu'à vingt ans après la majorité ; aller au-delà consisterait à conclure à l'imprescriptibilité de ces crimes. Il a ensuite déclaré n'être pas opposé à un aménagement de l'inscription au fichier des délinquants sexuels pour les jeunes de moins de seize ans ayant commis des infractions sexuelles mineures.
S'agissant enfin des mineurs étrangers isolés, M. André Lardeux, rapporteur, a rappelé qu'ils pourront bénéficier de la procédure de mise à l'abri provisoire prévue par le projet de loi, mais il a reconnu qu'une solution de prise en charge à long terme doit être trouvée en leur faveur.
La commission a ensuite procédé à l'examen des amendements présentés par le rapporteur.
A l'article premier (définition de la protection de l'enfance et renforcement du rôle des services de protection maternelle et infantile), la commission a adopté un amendement visant à confier aux PMI un rôle de repérage et d'orientation des enfants rencontrant des difficultés psychologiques, ainsi qu'un amendement visant à associer la médecine scolaire à la politique de prévention en matière de protection de l'enfance.
Elle a adopté sans modification les articles 2 (élargissement du dispositif de protection de l'enfance à la prévention des dangers et des risques de danger pour l'enfant), 3 (conditions de dispense de l'obligation alimentaire), et 4 (audition de l'enfant dans le cadre des procédures judiciaires qui le concernent).
A l'article 5 (recueil des informations préoccupantes sur les mineurs en danger et procédure de signalement à l'autorité judiciaire), elle a adopté un amendement visant à prévoir la participation des associations de protection de l'enfance au dispositif départemental de recueil des informations préoccupantes sur les mineurs en danger, ainsi qu'un amendement visant à sécuriser la transmission de ces informations lorsqu'elles sont couvertes par le secret professionnel. Elle a ensuite adopté deux amendements, le premier tendant à rendre systématique la transmission par le procureur au département de toutes les saisines directes qui lui parviennent, le second obligeant l'autorité judiciaire à informer le président du conseil général des suites données à ses signalements. Elle a enfin adopté un amendement faisant obligation au département d'assurer à son tour un retour d'information vis-à-vis des maires qui signalent un enfant en danger.
La commission a adopté sans modification l'article 6 (coordination entre protection administrative et protection judiciaire des mineurs en danger).
A l'article 7 (partage d'information entre personnes également soumises au secret professionnel), elle a adopté deux amendements rédactionnels et un amendement de coordination.
A l'article 8 (création d'observatoires départementaux de la protection de l'enfance), elle a adopté un amendement visant à élargir les compétences des nouveaux observatoires départementaux de la protection de l'enfance au suivi des schémas départementaux de l'enfance, ainsi qu'un amendement visant à prévoir une participation des associations concourant à la protection de l'enfance et de la famille à ces observatoires. Elle a enfin adopté un amendement rédactionnel.
A l'article 9 (inscription de l'accueil de jour parmi les mesures de placement susceptibles d'être décidées par le juge), la commission a adopté un amendement visant à rectifier une erreur matérielle.
A l'article 10 (information réciproque du président du conseil général et de l'autorité judiciaire sur la situation des mineurs faisant l'objet d'une mesure de protection), elle a adopté deux amendements visant à supprimer des dispositions relevant du niveau réglementaire.
Elle a adopté l'article 11 (droits des parents dans leurs relations avec le service de l'aide sociale à l'enfance) sans modification.
A l'article 12 (création d'une mesure administrative d'accompagnement en économie sociale et familiale et d'une mesure judiciaire d'aide à la gestion du budget familial), la commission a adopté un amendement visant à préciser l'autorité compétente pour financer la nouvelle mesure judiciaire d'aide à la gestion du budget familial. Elle a en outre adopté un amendement de précision rédactionnelle et trois amendements de coordination.
A l'article 13 (diversification des modes d'accueil des enfants placés et clarification des règles relatives au droit de visite des parents), elle a adopté un amendement visant à mieux distinguer les procédures applicables en matière d'accueil d'urgence selon que l'enfant est en danger au sein de sa famille ou qu'il se met lui-même en danger en abandonnant le domicile familial. Elle a ensuite adopté un amendement visant à préciser les conditions dans lesquelles les services d'AEMO sont autorisés à héberger de façon exceptionnelle et périodique les mineurs que le juge leur a préalablement confiés, ainsi qu'un amendement visant à inclure, parmi les éléments retenus par le juge pour déterminer le lieu d'accueil de l'enfant, la nécessité de préserver ses liens avec ses frères et soeurs. Elle a enfin adopté un amendement de coordination.
La commission a adopté sans modification l'article 14 (unités de vie distinctes pour les enfants accueillis en établissement en fonction des motifs du placement).
A l'article 15 (formation des professionnels participant à des missions de protection de l'enfance), elle a adopté un amendement visant à inclure les personnels d'animation relevant du ministère de la jeunesse et des sports parmi les professionnels ayant l'obligation de suivre une formation initiale et continue dans le domaine de la protection de l'enfance, ainsi que deux amendements visant à prévoir des modules de formation communs aux différentes professions et institutions participant aux missions de la protection de l'enfance. Elle a enfin adopté un amendement visant à supprimer des dispositions redondantes dans le code de l'action sociale et des familles et dans le code de l'éducation.
A l'article 16 (dispositions transitoires), elle a adopté un amendement visant à porter de deux à trois ans le délai laissé aux établissements accueillant des enfants confiés à l'ASE pour se mettre en conformité avec leur obligation de s'organiser en unités de vie distinctes en fonction des motifs ayant présidé au placement des enfants qu'ils accueillent.
Elle a enfin adopté un amendement portant article additionnel après l'article 16 visant à prévoir une compensation par l'Etat des charges résultant de la mise en oeuvre du projet de loi.
La commission a ensuite adopté le projet de loi ainsi amendé.
Mission commune d'information - Centre de décision économique et attractivité du territoire national - Désignation des membres
Puis la commission a désigné M. Paul Blanc, Mmes Isabelle Debré et Marie-Thérèse Hermange, MM. Jean-Pierre Michel et Roland Muzeau, pour représenter la commission au sein de la mission commune d'information sur la notion de centre de décision économique et les conséquences qui s'attachent, dans ce domaine, à l'attractivité du territoire national.
Mission commune d'information - Bilan et conséquences de la contamination par l'amiante - Audition de M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes
Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, sous la présidence de M. Nicolas About, président, la commission a procédé à l'audition de MM. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, et Jean-Denis Combrexelle, directeur des relations du travail, sur le suivi des travaux de la mission commune d'information sur le bilan et les conséquences de la contamination par l'amiante.
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, a tout d'abord indiqué que le rapport établi par la mission commune d'information sénatoriale sur les conséquences de l'exposition à l'amiante constitue, de même que celui établi par la mission commune d'information de l'Assemblée nationale, une base de réflexion pour le Gouvernement. Il a souligné que de nombreuses actions ont été engagées par le ministère du travail au cours de l'année écoulée.
Il a insisté, en premier lieu, sur le caractère prioritaire de la prévention des risques sanitaires liés à l'amiante.
L'inspection du travail a contrôlé 780 chantiers de désamiantage en juillet et août 2005, contre seulement 74 en 2004. Ces contrôles ont permis de repérer des infractions à la réglementation dans les deux tiers des cas. Le ministère a donné instruction aux services de l'inspection du travail de maintenir une vigilance constante sur ces chantiers. Il a fait part de son intention de renouveler ces opérations de contrôle, même s'il a rappelé que le respect de la réglementation relève, en premier lieu, de la responsabilité des employeurs concernés. Sous l'impulsion de la France, des opérations de contrôle des chantiers de désamiantage, coordonnées au niveau européen, vont être menées à l'automne.
Ensuite, il a précisé que la réglementation pour la protection des travailleurs, ancienne de dix ans, a fait l'objet d'un réexamen au cours du deuxième semestre 2005, pour tenir compte de l'évolution des connaissances scientifiques, notamment sur l'amiante non friable, et de la nécessaire transposition d'une directive européenne de 2003. Ce travail a abouti à l'élaboration d'un décret, dont la publication est désormais imminente.
Le ministre a rappelé l'engagement de la France en faveur d'une interdiction mondiale de l'amiante et indiqué être intervenu en ce sens, le 5 juin dernier, à l'occasion de la Conférence internationale du travail.
Il a ensuite évoqué le plan « Santé au travail » et son apport à la prévention des risques professionnels. Créée en septembre 2005, l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (Afsset) est désormais compétente en matière d'évaluation des risques professionnels. Elle s'est vu attribuer des moyens importants par le ministère du travail (5,6 millions d'euros en 2005 et 8,6 millions en 2006), avec l'ambition de devenir un pôle d'expertise sur les risques professionnels. Un département « Santé au travail », qui a recruté une vingtaine de scientifiques, a été constitué au sein de l'agence. Les moyens de l'Institut de veille sanitaire ont également été renforcés en matière de suivi épidémiologique.
Pour renforcer les contrôles, des cellules régionales pluridisciplinaires sont mises en place, afin d'apporter un appui scientifique et technique à l'inspection du travail. Elles sont présentes dans une quinzaine de régions et seront généralisées à l'ensemble du territoire en 2007.
La réforme de l'inspection du travail va permettre de doter ses services de sept-cents agents supplémentaires à l'horizon 2010. La formation des personnels aux questions de santé au travail a déjà été renforcée et le recrutement va être diversifié pour l'ouvrir à des profils techniques.
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, a souligné que la lutte contre les cancers professionnels est, au-delà du seul cas de l'amiante, une priorité de son ministère. Une campagne de contrôle a été lancée le 1er juin dernier sur les produits cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques (CMR) et des valeurs limites d'exposition plus restrictives pour une quarantaine de produits chimiques vont être déterminées. La procédure d'arrêt de chantier sera également étendue au risque chimique : elle permet à l'inspection du travail d'ordonner l'interruption d'un chantier en cas de danger pour les salariés.
En conclusion de son propos liminaire, le ministre a évoqué les autres actions engagées par le ministère : modernisation du Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels, lancement de plans d'action régionaux venant décliner le plan « santé au travail », modernisation des services de santé au travail, mise en place d'une tarification incitative... Il a enfin insisté sur la nécessité de mobiliser tous les acteurs de la prévention pour faire émerger une véritable culture de la prévention en entreprise.
M. Gérard Dériot a demandé au ministre de rappeler les données statistiques les plus récentes relatives aux maladies professionnelles causées par l'amiante.
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, a indiqué que les données consolidées les plus récentes correspondent à l'année 2003. Sur un total de 44.600 maladies professionnelles recensées parmi les assurés du régime général, 6.197, soit 14 % du total, étaient dues à l'amiante. Chez les agents de la fonction publique, 351 maladies causées par l'amiante, représentant 35 % du total des maladies professionnelles, ont été recensées, presque exclusivement parmi les personnels du ministère de la défense. Au sein de la fonction publique hospitalière, onze cas seulement de maladies professionnelles causées par l'amiante ont été reconnus. Il n'existe pas de données consolidées concernant la fonction publique territoriale.
Si les statistiques montrent que le nombre de maladies professionnelles causées par l'amiante a été multiplié par sept en dix ans, cette augmentation s'explique toutefois, pour partie, par une amélioration des techniques d'identification de ces pathologies et ne reflète pas nécessairement une extension équivalente de l'épidémie.
L'amiante est, par ailleurs, la première cause de cancers professionnels : 1.439 cancers dus à l'amiante ont été recensés en 2003, soit 87 % du total des cancers professionnels.
M. Gérard Dériot a rappelé que le Sénat a introduit, dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, un article 81 qui vise à mieux informer les salariés exposés à l'amiante de leur droit à bénéficier d'un suivi médical post-professionnel. Il a souhaité obtenir des précisions sur l'état d'avancement du décret d'application nécessaire à la mise en oeuvre de cette disposition, ainsi que sur les modalités d'information envisagées, et demandé si des mesures complémentaires, destinées à renforcer le suivi médical de ces salariés, sont prévues.
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, a rappelé qu'une expérimentation a d'abord été conduite dans quatre régions, au cours de laquelle 20.000 personnes ont demandé à bénéficier du suivi médical, 17.000 ont répondu à un questionnaire permettant d'évaluer leur niveau d'exposition à l'amiante et 6.000 ont bénéficié d'un examen au scanner. Le Gouvernement a décidé d'étendre cette expérimentation à l'ensemble du territoire à compter de la fin 2005, dans le respect de règles éthiques qui imposent que les salariés soient informés de leurs droits, puis effectuent une démarche volontaire. La caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (Cnam) va proposer des modalités d'organisation de ce suivi. Le ministère travaille de plus, avec l'Institut national de lutte contre le cancer, à l'élaboration d'une plaquette de sensibilisation. Le décret d'application de l'article 81 de la loi de financement de la sécurité sociale devrait paraître d'ici à la rentrée.
M. Gérard Dériot a ensuite demandé s'il est envisageable de réduire la durée du travail journalière des salariés des entreprises de désamiantage, afin d'améliorer leur sécurité.
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, a répondu que le décret en cours de préparation va permettre de renforcer la réglementation sur ce point. Les textes en vigueur imposent de tenir compte de la pénibilité des travaux de désamiantage pour fixer la durée du travail des salariés. Il est recommandé de ne pas faire travailler les salariés plus de deux heures et demie d'affilée, mais il ne s'agit pas là d'une obligation absolue, cette règle pouvant être adaptée en fonction de la situation propre à chaque chantier, pour tenir compte notamment des contraintes posturales et de la chaleur. La nouvelle réglementation inclura dans le temps de travail la durée de l'habillage et du déshabillage, les pauses et les phases de décontamination.
M. Gérard Dériot a demandé au ministre de présenter les principales observations et conclusions du rapport remis, en décembre 2005, par MM. Benjamin Joly, Christian Planes-Raisenauer et Jean Roigt, membres de l'Inspection générale des affaires sociales, au sujet du dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante.
Le ministre a indiqué que le rapport effectue d'abord un constat des défaillances de l'actuel dispositif de cessation anticipée d'activité : des salariés qui ont été exposés à l'amiante en sont exclus parce que l'établissement où ils ont travaillé n'est pas inscrit sur les listes définies au niveau national ; inversement, des salariés qui ont travaillé dans des établissements figurant sur ces listes, mais qui y ont exercé des métiers ne les ayant pas exposés à l'amiante, peuvent partir en préretraite ; la coordination entre le régime général de la sécurité sociale et les régimes de la fonction publique est, en outre, insuffisamment assurée ; enfin, la gestion administrative du dispositif est très lourde et son coût ne cesse de s'accroître : les dépenses devraient progresser de 600 millions d'euros en 2005 à 750 millions d'euros en 2006 et pourraient avoisiner 1,2 milliard d'euros en 2010.
Face à ce constat, l'Igas propose que le bénéfice de la cessation anticipée d'activité soit accordé sur une base individuelle, à partir d'un examen du parcours professionnel du salarié et en s'appuyant sur une liste des métiers et des secteurs caractérisés par un risque élevé d'exposition à l'amiante. Cette appréciation des situations individuelles pourrait s'inspirer des critères définis en Allemagne et en Belgique, ces deux pays s'étant déjà dotés de grilles d'évaluation. Les demandes seraient instruites par les caisses régionales d'assurance maladie (Cram). Le nouveau dispositif s'appliquerait sans distinction aux travailleurs relevant du régime général de la sécurité sociale et des régimes de la fonction publique. L'Igas pose également la question de l'âge d'entrée dans le dispositif et du niveau de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Acaata) par rapport au salaire de référence.
M. Gérard Dériot a rappelé que l'Association nationale des victimes de l'amiante (Andeva) a protesté, le 28 avril dernier, contre le projet de réforme de l'Acaata qu'elle prête au Gouvernement. Selon cette association, le Gouvernement envisagerait d'attribuer l'allocation aux seules personnes malades, et non plus à l'ensemble des personnes exposées à l'amiante, de réduire le montant de l'allocation et de reculer l'âge d'entrée dans le dispositif. Il a souhaité connaître les intentions réelles du Gouvernement en la matière.
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, a estimé que la proposition, formulée par la Cour des comptes, de réserver le bénéfice de l'Acaata aux seules personnes malades, soulève de sérieuses difficultés. Elle irait à l'encontre de la vocation de l'Acaata, qui est de compenser une perte prévisible d'espérance de vie, et se heurterait à l'opposition des syndicats, des associations et de parlementaires, sur tous les bancs. Le ministère du travail ne soutient donc pas cette proposition. Il ne juge pas non plus opportun de réviser le montant de l'allocation. Il est en revanche ouvert à une réflexion sur l'âge du départ en retraite, qui pourrait être modulé en fonction de l'état de santé du salarié.
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, a précisé que 1.500 établissements figurent aujourd'hui sur les listes ouvrant droit à l'Acaata et indiqué que les demandes d'inscription instruites par l'administration proviennent aujourd'hui principalement d'établissements dont l'amiante ne constituait pas l'activité principale.
Il a ajouté que le Gouvernement est intéressé par la suggestion de l'Igas de créer une voie d'accès individualisée à la cessation anticipée d'activité, mais qu'il convient d'étudier encore sa faisabilité, dans la mesure où l'on peut craindre un afflux massif de dossiers. La Cnam et l'Institut de veille sanitaire vont examiner cette question.
En réponse à une question de M. Gérard Dériot, qui demandait si le décret d'application de l'article 96 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 2003, nécessaire pour que les fonctionnaires et contractuels du ministère de la défense bénéficient de la cessation anticipée d'activité, était paru, M. Gérard Larcher a indiqué que ce décret a été publié le 9 avril 2006.
M. Gérard Dériot a ensuite demandé si le Gouvernement est favorable, suivant les recommandations des missions d'information du Sénat et de l'Assemblée nationale, à une revalorisation des indemnités versées par le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva), afin de dissuader les victimes d'engager des actions contentieuses.
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, a indiqué que le conseil d'administration du Fiva a mis en place un groupe de travail chargé de réviser le barème d'indemnisation des victimes de l'amiante en s'appuyant sur une comparaison avec les indemnisations versées par les tribunaux et à l'étranger, et en tenant compte de l'évolution des connaissances scientifiques. Cette révision doit aussi s'inscrire dans le cadre de l'évolution de la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles.
M. Gérard Dériot a rappelé que la mission d'information sénatoriale sur les conséquences de l'exposition à l'amiante a proposé d'augmenter la participation de l'Etat au financement du Fiva et du Fcaata et de définir une clef de répartition stable des contributions respectives de l'Etat et de la sécurité sociale. Il a demandé si le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale tiendra compte de ces recommandations.
Après avoir fait observer que le financement du Fiva relève des ministres en charge de la sécurité sociale et du budget, M. Gérard Larcher a répondu que la direction de la sécurité sociale soutient ces propositions, mais que des discussions interministérielles doivent encore se tenir avant que la position du Gouvernement ne soit arrêtée, la mise en oeuvre de la réforme proposée nécessitant d'intervenir à la fois sur le projet de loi de finances et sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
M. Gérard Dériot a demandé dans quelle mesure les réformes en cours de l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail et de l'inspection du travail contribueraient à nous prémunir contre la répétition d'un drame sanitaire comparable à celui de l'amiante. Il s'est également félicité de l'effort entrepris en matière de prévention des risques chimiques, qui répond à une des préconisations de la mission d'information.
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, a indiqué qu'il faudrait pourtant aller encore plus loin en ce domaine : des milliers de produits chimiques mériteraient d'être expertisés afin de mieux connaître leurs effets sur la santé.
Ensuite, l'Afsset a vocation à fonctionner comme une tête de réseau, en charge de l'animation de la recherche dans le domaine de la santé au travail. Elle devrait disposer d'une équipe d'une cinquantaine de scientifiques à l'horizon 2009, recrutés tant en France qu'à l'étranger, et s'est vu attribuer 14 millions d'euros pour développer ses capacités d'expertise. La réforme de l'inspection du travail va permettre de professionnaliser davantage ses personnels sur ces questions.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe s'est réjoui que le ministre ait accepté d'être entendu sur ce sujet difficile et que le Gouvernement ait pris en compte beaucoup des recommandations de la mission d'information. Il a encouragé le ministre à continuer à oeuvrer en faveur de l'interdiction de l'amiante au niveau mondial.
Il a souhaité que la transparence soit encore améliorée sur les risques liés à l'amiante et a rappelé que la mission avait préconisé, à cette fin, de dresser une liste nationale des chantiers de désamiantage et de recenser les bâtiments amiantés. Il a insisté sur l'importance de la formation et du contrôle des professionnels du désamiantage, notant que le diagnostic effectué sur l'ancien porte-avions Clemenceau s'était révélé quelque peu approximatif.
Il a attiré l'attention du ministre sur les risques liés à l'amiante environnemental, par exemple sur le site de l'ancienne mine de Canari en Corse, qui peut mettre en danger la santé des salariés du secteur des travaux publics. Il a également souhaité que la traçabilité des déchets amiantés soit améliorée.
Il a enfin évoqué le problème posé par les fibres céramiques réfractaires, dont la mission a préconisé l'interdiction chaque fois qu'un produit de substitution est disponible, et la nécessaire information des consommateurs sur la présence d'amiante dans les habitations.
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, a souligné que la connaissance des risques va être améliorée grâce au renforcement des moyens épidémiologiques alloués à l'Institut de veille sanitaire et précisé que le décret en cours de préparation va renforcer les obligations des professionnels en matière de déclaration des chantiers de désamiantage. En ce qui concerne le recensement des bâtiments amiantés, il a indiqué qu'une enquête est en cours, mais que la remontée des informations est difficile. Le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, M. Jean-Louis Borloo, a demandé que des investigations soient menées dans les logements du parc social.
M. Nicolas About, président, s'est enquis de savoir si la publication de la liste des chantiers de désamiantage est envisageable.
M. Jean-Denis Combrexelle, directeur des relations du travail, a précisé que les chantiers sont connus de l'administration et que l'éventuelle publication d'une liste est aujourd'hui à l'étude.
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, a précisé que la réglementation visant à protéger les salariés du bâtiment et des travaux publics contre les dangers de l'amiante environnemental a été récemment complétée.
Il a ensuite indiqué que les fibres céramiques réfractaires font partie des sujets d'étude prioritaires assignés à l'Afsset. Toutefois, sans attendre la remise des conclusions de l'agence, le Gouvernement a d'ores et déjà décidé de rendre plus sévères et contraignantes les valeurs limites d'exposition à cette substance.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe a souligné qu'il convient d'éviter de reproduire avec les fibres céramiques réfractaires les erreurs commises avec l'amiante.
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, a précisé que le département « santé au travail » de l'Afsset, qui est placé sous l'autorité d'un toxicologue, a également été chargé de conduire une étude sur les formaldéhydes et sur les nanomatériaux.
Mme Sylvie Desmarescaux s'est interrogée sur les obligations actuelles des entreprises en matière d'utilisation des fibres céramiques réfractaires. Elle a indiqué que des salariés de son département sont victimes du manque de coordination entre régime général et régimes de la fonction publiques, ce qui les prive du bénéfice de l'Acaata.
M. Paul Blanc a demandé comment le Canada, connu pour être un grand producteur et exportateur d'amiante, a réagi à la proposition française d'interdiction mondiale de ce matériau. Il a souhaité obtenir des précisions sur les problèmes posés par l'amiante non friable, très présent dans les dalles en fibrociment par exemple.
M. Roland Muzeau s'est déclaré satisfait que cette audition ait lieu et a remercié M. Gérard Dériot d'avoir abordé l'ensemble des questions qui méritent d'être soulevées.
Il a souhaité que le ministre confirme que l'intention du Gouvernement est bien de compléter le dispositif de cessation anticipée d'activité par une voie d'accès individuelle, sans supprimer le système de listes, et qu'il rejette, par ailleurs, la proposition de la Cour des comptes de réserver l'Acaata aux seules personnes malades de l'amiante. Il a également souhaité connaître la position du ministre sur l'idée de déconcentrer la gestion du dispositif au niveau des Cram.
Evoquant la médecine du travail, il a critiqué la doctrine en vigueur en matière d'aptitude professionnelle, jugeant qu'elle conduit des médecins à cautionner l'exposition de salariés à des risques professionnels qui altèrent leur santé.
M. Alain Vasselle a noté que le ministre avait fait connaître la position de la direction de la sécurité sociale sur la proposition de la mission d'information relative au financement des fonds de l'amiante, mais qu'il s'était gardé de mentionner la position de la direction du budget. Il a souhaité que le ministre use de toute son influence pour que les recommandations de la mission sur ce point soient mises en oeuvre.
Il a ensuite abordé la question du risque chimique dans les métiers agricoles et demandé si la nouvelle réglementation va occasionner des contraintes supplémentaires pour les professionnels.
M. Alain Gournac a souligné que l'Afsset a une responsabilité éminente en matière de prévision et de prévention des risques sanitaires et rappelé que la dangerosité de nombreux éléments présents dans notre environnement quotidien, qu'il s'agisse des lignes à haute tension ou des produits ménagers, est encore mal connue.
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, a répondu que le Gouvernement accorde une attention particulière aux problèmes soulevés par les fibres céramiques réfractaires, comme l'atteste sa décision de rendre plus restrictives les valeurs limites d'exposition sans attendre les conclusions de l'agence. Il a déploré que la santé au travail soit un domaine de recherche perçu comme peu valorisant dans les milieux scientifiques et a regretté que la France compte, de ce fait, un faible nombre d'experts.
En réponse à M. Paul Blanc, il a indiqué que le Canada, la Chine, le Kazakhstan et la Russie sont les principaux producteurs de ce matériau et a rappelé que la France avait été déférée devant l'Organisation mondiale du commerce (OMC) en 1996, au moment où elle avait pris la décision d'interdire l'amiante pour des raisons de santé publique. Il a estimé que d'indéniables progrès ont été accomplis sur la voie d'une interdiction complète de l'amiante, puisque l'Organisation internationale du travail (OIT) s'apprête à approuver une résolution en ce sens. Sur la question de l'amiante non friable, le décret en préparation prévoit l'obligation de contrôler le niveau d'empoussièrement en fibre d'amiante sur les chantiers.
Répondant à M. Roland Muzeau, il a indiqué avoir demandé à l'Igas d'effectuer un premier bilan de la réforme de la médecine du travail engagée en 2004 et a annoncé qu'un rapport est en préparation sur le problème de l'aptitude. Il a estimé inenvisageable de revenir sur les listes déjà établies au titre de l'Acaata, à la fois pour des raisons de droit et d'opportunité.
Sur la question des agents chimiques utilisés pour les activités agricoles, il a répondu à M. Alain Vasselle que le Gouvernement va lancer, d'ici à un mois, un plan d'action sur les produits phytosanitaires, avant d'évoquer les problèmes sanitaires posés par les pulvérisateurs. Il a ensuite déclaré ne pas connaître la position de la direction du budget, avec laquelle le ministère du travail entretient des relations moins étroites qu'avec la direction de la sécurité sociale, sur la question du financement des fonds de l'amiante. Il a enfin rappelé les axes prioritaires fixés par le Gouvernement en matière de connaissance des risques chimiques.