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Question de Mme Maryse Carrère (Hautes-Pyrénées - RDSE) publiée le 16/05/2024

Question posée en séance publique le 15/05/2024

M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

Mme Maryse Carrère. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Je tiens au préalable, au nom du groupe du RDSE, à dire que nous partageons les inquiétudes exprimées à l'instant au sujet de la situation en Nouvelle-Calédonie et à adresser toutes nos condoléances aux familles des victimes. J'ai aussi une pensée pour la famille et l'entourage des deux agents de l'administration pénitentiaire assassinés dans l'Eure.

Monsieur le Premier ministre, dans une récente étude, la Fédération hospitalière de France a présenté la situation financière préoccupante des Ehpad publics : près de 85 % d'entre eux enregistrent un résultat déficitaire pour l'année 2023 alors que, en 2019, ils n'étaient que 44 % à boucler leurs budgets dans le rouge.

Cette tendance confirme qu'il est urgent de mener une réforme structurelle du financement de ces établissements essentiels. Les fonds d'urgence répétés - 100 millions d'euros l'année dernière, 695 millions cette année - ne font que calmer superficiellement l'hémorragie qui touche principalement les établissements publics, mais aussi les Ehpad associatifs à but non lucratif.

Les directeurs d'établissement dénoncent l'impact de l'inflation sur les charges d'exploitation, mais également la compensation incomplète des revalorisations salariales et l'évolution insuffisante des tarifs d'hébergement.

La situation pousse ces responsables à chercher à faire des économies sur tout et sur tous ! La loi du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement a mis en place un système de dotation « soins et dépendance » en faveur des Ehpad, mais celui-ci ne leur permet plus d'assurer une prise en charge de leurs résidents répondant à leurs besoins, malgré des taux d'occupation proches des 95 %.

Ce n'est pas une question de volonté de la part des membres du personnel de ces établissements : dans ces conditions précaires, ils font preuve d'un dévouement que nous pouvons saluer. La question du financement de la cinquième branche du régime général de la sécurité sociale, relative à l'autonomie, reste au coeur du débat. Ce financement doit faire l'objet de choix concrets, à la hauteur des besoins du secteur, qui devront permettre de ne plus faire peser sur les résidents ou leurs familles cette situation budgétaire intenable.

Aussi, monsieur le Premier ministre, afin de garantir aux Ehpad les moyens d'assurer un accompagnement respectueux de la dignité des personnes âgées, quelle réforme de leur financement envisagez-vous ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. - M. Daniel Chasseing applaudit également.)

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Réponse du Premier ministre publiée le 16/05/2024

Réponse apportée en séance publique le 15/05/2024

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Gabriel Attal, Premier ministre. Madame la présidente Maryse Carrère, ces derniers mois ont été émaillés d'images et de témoignages scandaleux, révoltants, sur les conditions de vie dans certains Ehpad. Ces images et ces témoignages ont fait douter certaines familles et ont jeté l'opprobre, injustement - j'insiste sur ce point -, sur toutes les femmes et les hommes qui travaillent dans nos Ehpad, des femmes et des hommes qui, dans leur écrasante majorité, se donnent sans compter et s'engagent pour les autres ; je veux leur rendre hommage avec vous.

Nous devons répondre aux défis des Ehpad, d'autant que le grand âge est un enjeu de société majeur et le sera encore plus à l'avenir au vu de l'allongement de l'espérance de vie.

Au-delà des cas particuliers que vous connaissez, l'ensemble du secteur souffre de l'inflation et d'un manque d'attractivité des métiers. Fadila Khattabi, tout le Gouvernement et moi-même avons pleinement conscience des difficultés des Ehpad et nous répondons présent !

Nous répondons présent pour rétablir la confiance dans ces établissements, avec un vaste plan de contrôle. Nous répondons présent aussi, évidemment, pour préserver leur viabilité. Tel est le sens du fonds d'urgence de 100 millions d'euros créé l'an dernier, ainsi que de l'augmentation inédite des dotations entre 2019 et 2023, fruit du Ségur de la santé : cela signifie 4 milliards d'euros de plus pour nos aînés, pour que le personnel des Ehpad soit mieux payé et plus nombreux.

Malgré tout, je sais que des établissements connaissent toujours des difficultés structurelles. Là aussi, nous prenons le problème à bras-le-corps. Nous avons entendu l'appel des différents acteurs : nous augmentons de 5 %, en 2024, la dotation des Ehpad publics pour réduire le déficit et poursuivre les revalorisations salariales. À l'échelle locale, les situations difficiles font l'objet d'un suivi par les agences régionales de santé (ARS), en lien avec les élus, et des crédits complémentaires sont alloués aux Ehpad les plus en difficulté.

Nous agissons enfin, madame la présidente Carrère, pour que ce ne soient pas les plus modestes qui pâtissent de cette situation difficile. Ainsi, la loi du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l'autonomie, ou loi Bien Vieillir, que vous avez votée, a donné aux établissements la possibilité de définir deux tarifs d'hébergement différenciés en fonction des revenus.

Ces mesures sont importantes, mais je pense, comme vous, que nous devons aller plus loin, notamment en faisant évoluer la gouvernance des Ehpad. Mon gouvernement a donc proposé aux présidents de conseils départementaux une expérimentation qui verrait l'État financer la dépendance, comme le demandent les professionnels. Près d'un quart des départements s'y sont portés candidats, et je souhaite que le mouvement se poursuive. Par ailleurs, comme vous le savez, Éric Woerth a effectué un important travail sur l'approfondissement de la décentralisation, qui l'a évidemment conduit à aborder également cette question-là ; il nous remettra son rapport dans les tout prochains jours.

Vous voyez, madame la présidente, que nous reconnaissons l'importance de cette question pour notre cohésion sociale ; nous continuerons donc à agir avec force pour le bien vieillir dans notre société. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et UC.)

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